LE 1er MAI : SES ORIGINES, SA SIGNIFICATION.

Transcription

LE 1er MAI : SES ORIGINES, SA SIGNIFICATION.
LE 1er MAI : SES ORIGINES, SA SIGNIFICATION.
LES ORIGINES DU 1er MAI :
I.
Les racines profondes du 1er mai sont à rechercher dans la Révolution Industrielle et surtout dans ses
conséquences sociales.
I-1.
LA REVOLUTION INDUSTRIELLE.
Elle s’est d’abord installée en Angleterre, puis dans les autres pays d’Europe Occidentale et aux EtatsUnis d’Amérique à partir du milieu du XVIIIème siècle.
Cette expression désigne l’emploi de plus en plus généralisé de machines de plus en plus
perfectionnées. A partir du XIXème siècle, cette véritable révolution technique permet à l’homme d’améliorer
et d’augmenter de manière considérable ses capacités de production.
La révolution industrielle a entraîné des conséquences sociales notables. Quelles sont ces
conséquences ?
I-2.
LES CONSEQUENCES SOCIALES DE LA REVOLUTION INDUSTRIELLE.
En remplaçant le mode de production féodale par le mode de production capitaliste, la révolution
industrielle aura pour conséquences sociales de renforcer en tant que classe, la bourgeoisie qui va dominer la
société, tout en aggravant les conditions de vie et de travail du prolétariat ; ce dernier va alors développer des
luttes multiformes.
I-2-1 La bourgeoisie devient la classe dominante de la société à partir du XIXème siècle.
La bourgeoisie forte des immenses richesses qu’elle a accumulée grâce au commerce triangulaire
(pensez à la traite des noirs), à l’expropriation de la paysannerie, à l’exploitation du nouveau monde, etc.
prend le pouvoir en Europe ; En atteste les révolutions bourgeoises de 1789, 1830, sous l’étendard de
« Liberté, Egalité, Fraternité, etc. »
Propriétaire des moyens de production (les capitaux), la bourgeoisie au pouvoir en Europe et au EtatsUnis, mène une vie de luxe, de gaspillage, etc., tandis que le prolétariat lui aussi, contemporain du
capitalisme, connaît des conditions de vie misérables car sans moyens de production, il est obligé de vivre, le
plus souvent de survivre en vendant sa force de travail.
I-2-2 Le prolétariat : ses conditions de travail et de vie.
La révolution industrielle par la mécanisation a entraîné l’exploitation effrénée et inhumaine du
prolétariat, aggravant ainsi ses conditions de travail par :
-
Les journées de travail de 12 à 16 heures dans les fabriques et les mines ;
Les dures conditions de travail qui épuisent totalement et abrutissent les ouvriers enchaînés (au
sens propre et au sens figuré) à la machine ;
Le travail des femmes ; ces femmes effectuent les mêmes travaux que les hommes pour une
rémunération moindre ;
2
-
L’absence de protection de l’Etat qui est automatiquement du côté des patrons qui leur imposent
une discipline draconienne tout en pratiquant l’arbitraire ;
Les salaires de misère, le chômage, les licenciements, etc.
Ces conditions de travail entraînent d’effroyables conditions de vie pour la classe ouvrière : logements
insalubres, dénuement total, nourriture insuffisante, qui sont sources de décès prématurés, de maladies
professionnelles. L’alcoolisme et la délinquance font des ravages. La silicose tue toujours dans les mines. En
résumé, l’ouvrier vit dans une misère sans nom : Il survit plus qu’il ne vit. Son état est exprimé on ne peut
plus clairement par le docteur GUEPIN (Nantes 1835) quand il écrit : ’’ Vivre pour l’ouvrer, c’est ne pas
mourir ’’
La prise de conscience de cette misère de l’ouvrier amène certains économistes, philosophes,
sociologues, etc. à critiquer vigoureusement l’économie libérale et à proposer des solutions en vue de mettre
un terme aux injustices et aux inégalités de la société capitaliste : c’est le mouvement socialiste.
En même temps que le mouvement socialiste, s’est développé le mouvement ouvrier ; les ouvriers
s’organisent pour améliorer leurs conditions de vie et de travail, en menant des luttes multiformes afin de
défendre leurs intérêts face à la bourgeoisie.
I-2-3. Le mouvement ou les luttes du prolétariat face à la bourgeoisie.
I-2-3-a.
Le mouvement ouvrier et ses victoires.
Victimes d’une exploitation inhumaine, privés des droits les plus élémentaires, les ouvriers se battent,
illustrant une fois de plus la justesse du principe selon lequel, partout où il y a oppression et exploitation, il
y’ a nécessairement résistance et lutte.
Les premières luttes ouvrières jusqu’au milieu du XIXème siècle ne revêtent pas un caractère conscient
et organisé. De manière spontanée, des ouvriers isolés s’attaquent aux machines qu’ils pensent être à l’origine
de leurs malheurs. Mais l’expérience et l’éducation reçues de philosophes révolutionnaires tels que Karl Marx
et F. Engels, finissent par les convaincre de deux choses essentielles :
-
D’une part, que c’est l’exploitation capitaliste et non les machines qui est à l’origine de leurs
souffrances ;
D’autres part, de l’inefficacité des luttes spontanées et isolées.
Le constat d’échec des luttes spontanées et isolées, conduit la classe ouvrière à mettre au point,
différentes organisations ouvrières, au cours d’un processus long et laborieux. Ce sont :
-
Les compagnonnages ;
Les mutuelles ou fraternelles (à partir de 1830) ;
Les trade-unions (après 1800 en Angleterre) ;
Les chambres syndicales ou syndicats ( à partir de 1860 en France) et plus tard,
les Bourses du Travail.
Ces associations ouvrières prennent naissance dans les diverses branches de la production, par suite
des efforts spontanés des travailleurs et en tant que nécessité d’une résistance collective pour s’unir et
défendre les intérêts strictement professionnels.
Favorisés par la concentration industrielle croissante, la naissance et le développement d’une
conscience de classe, l’influence du socialisme scientifique, les organisations ouvrières mènent des luttes qui
aboutissent à des acquis dont les plus importants sont :
3
-
-
Une législation de protection du travail des femmes et des enfants avant même 1850. Après cette
date, on peut citer d’autres acquis:
La naissance de l’Association Internationale des Travailleurs (A.I.T.) ou première internationale
qui jouera un rôle important car elle renforcera et développera le mouvement ouvrier et syndical
sur des bases essentielles de classe ;
L’obtention du droit de grève puis du droit d’association (c’est-à-dire le droit de constituer des
syndicats) ;
L’acquisition et le développement d’une législation sociale portant sur un système d’assurances
maladies, accidents, de caisse de retraite ;
L’apparition de Ministères du Travail ;
L’amélioration de la condition ouvrière grâce à la garantie d’un salaire minimum et la réduction
progressive de la durée de la journée de travail (à 14 heures, 11 heures, puis 10 heures et à 8
heures).
Ces acquis n’ont pas été offertes sur un plateau d’argent à la classe ouvrière et aux travailleurs. Nous
l’avons souligné, ils sont les résultats des luttes du prolétariat contre la bourgeoisie exploiteuse et oppresseuse
qui a toujours tout fait pour s’y opposer ou les retarder. En effet, l’attitude de la bourgeoisie n’a jamais varié
face aux revendications des masses laborieuses.
I-2-3-b. De l’attitude de la bourgeoisie face au mouvement ouvrier et aux revendications ouvrières.
L’attitude de la bourgeoisie comporte deux constantes essentielles : La répression (le bâton) et/ou la
corruption (la carotte). Et l’histoire du mouvement ouvrier permet de souligner certains enseignements
fondamentaux :
-
Toutes les réformes ou concessions doivent être arrachées à la bourgeoisie qui ne les reconnaît que
quand elle ne peut plus faire autrement.
-
Aussi, il est nécessaire de réaffirmer avec force, que le syndicat n’a pas et n’a jamais été un cadeau
de la bourgeoisie ou le résultat de la magnanimité des pouvoirs en place. Les syndicats sont le
fruit de la sueur et du sang de la lutte acharnée et conséquente du prolétariat.
Le droit syndical constitue donc une victoire importante pour les ouvriers qui, d’hommes
isolés, se sont unis et sont devenus une force organisée que la bourgeoisie s’est vue obligée de
prendre en compte.
En effet, les syndicats, ne furent pas reconnus tout de suite. Pire, la bourgeoisie adoptait une attitude
dure, répressive envers les organisations de la classe ouvrière, les représentants des organisations ouvrières,
les dirigeants et les éléments les plus combatifs des syndicats et de la classe ouvrière étaient traqués, sujet à
d’odieuses poursuites et à des persécutions ayant abouti souvent à des mises à mort.
Des lois et ordonnances diverses étaient promulguées en vue d’interdire les syndicats ou de restreindre
leurs activités et leur influence. Ainsi, dans les premiers temps, considérés par la bourgeoisie comme un
danger pour l’ordre public, les syndicats étaient clandestins. C’était pourquoi, y adhérer constituait un acte
condamné par la loi.
-
Devant l’impossibilité de tuer le mouvement syndical et ouvrier, la bourgeoisie devait changer de
tactique ou pratiquer en même temps que la répression, la politique de la carotte : reconnaissance formelle de
certains droits, démagogie, corruption, etc.
Il faut donc savoir que la répression demeure la constante de la bourgeoisie et de tous ses
pouvoirs quel qu’en soit le manteau dont ils se drapent à l’égard du mouvement ouvrier et syndical. C’est la
politique de remise en cause des acquis et droits de la classe ouvrière, et surtout l’attitude de répression
4
systématique qui a abouti aux évènements du 1er mai 1886 que nous célébrons aujourd’hui, journée au cours
de laquelle les ouvriers de CHICAGO manifestaient pour réclamer la journée de 8 heures de travail.
Que s’est-il passé ce jour-là ?
Quelles significations peut-on donner à la célébration de cet événement ?
II.
LES EVENEMENTS DU 1er MAI 1886 A CHICAGO (USA) ET LEURS SIGNIFICATIONS
PROFONDES.
Avant de nous pencher sur les significations de cette journée, donnons la parole à un témoin des
événements pour nous les raconter.
II-1.
ER
CHICAGO, 1
MAI 1886, RACONTE PAR MAMAN JONES.
Dans son ouvrage ’’ autobiographique ’’ publié aux Editions Ouvrières, Maman JONES écrit :
« Le 1er Mai, qui devait ouvrir la campagne pour la journée de 8 heures, arriva. La presse
contribua à semer la panique dans toute la population. Par toute la ville de Chicago commencèrent des
grèves et des marches démonstratives. Les patrons claquaient des dents. Ils voyaient le spectre de la
Révolution. Les ouvriers des usines MAC CORMICK se rassemblèrent devant leur usine. Ceux qui
continuaient le travail furent traités de jaunes. Il y eu des briques lancées, des vitres cassées. On menaça
les jaunes. La police chargea les ouvriers sans avertissement, tirant dans le tas et distribuant des coups de
matraques. Il y eu des morts, des crânes enfoncés. L’Agence PINKERSON (célèbre agence de police
privée) forma des bandes armées, recrutées parmi d’anciens forçats et des hommes de main qu’elle louait
aux capitalistes à raison de 8 dollars par jour, pour former des piquets devant les usines et provoquer des
troubles ; ……..Des centaines de gens furent arrêtés ;…… Les meneurs du mouvement pour la journée de
8 heures, furent pendus le 11 novembre 1886.
Sept ans plus tard, le gouvernement déclara le verdict ’’
injustifiable ’’. »
Voici pour l’essentiel les événements du 1er mai 1886. Des travailleurs revendiquant la journée de 8
heures sont sauvagement massacrés par les forces et les agents de l’ordre bourgeois.
Les travailleurs du monde entier et la classe ouvrière ne furent pas dupes : Ils reconnurent en la lutte
des travailleurs américains, le combat de leur classe, d’où la violence de la répression de la bourgeoisie, elle
aussi consciente de l’enjeu. Aussi, ils décidèrent de lui accorder une dimension digne de la portée historique
de l’événement.
La IIème Internationale fondée en 1889 décida la première, au congrès de Paris, de faire du 1er Mai une
journée de la classe ouvrière, des masses laborieuses. C’est elle aussi qui a voulu que cette date soit une
journée de Solidarité Prolétarienne Internationale.
A partir de 1890, le 1er mai devient donc, à l’initiative des partis ouvriers d’Europe, d’Amérique,
d’Australie et de l’Union des Syndicats (IIème internationale), une journée internationale de lutte pour
la journée de 8 heures.
Dès lors des luttes vigoureuses se sont développées et ont abouti à la reconnaissance de la journée
légale de 8 heures par la plupart de tous les pays et gouvernements du monde.
Le 1er Mai fut déclaré journée fériée, chômée et payée.
Cependant, la forme de cette fête est variée selon les pays, les gouvernements et la force du
mouvement syndical.
5
Il n’en demeure pas moins que le 1er mai soit un acquis de la classe ouvrière internationale.
La journée du 1er mai mérite d’être fêtée en tant que telle. Elle est toujours une occasion pour
les travailleurs de faire le point de leurs luttes, de leurs conditions et de passer en revue leurs troupes et
leurs forces car la bourgeoisie quand elle fait semblant de dormir, elle le fait d’un œil.
Ce développement sur le 1er mai serait très superficiel, si nous ne faisions pas un survol de l’historique
de cette journée dans notre pays, qui illustre assez bien les différentes formes de célébrations du Premier Mai.
II- 2.
LE PREMIER MAI AU BURKINA FASO
L’historique du 1er mai dans notre pays est intimement lié à l’histoire de son mouvement syndical.
Ainsi, pendant la période coloniale, le syndicalisme, dans les limites de ce qui devait devenir l’ex
Haute-Volta, dut évoluer dans le cadre général du syndicalisme africain. Le 1er mai se commémorait dans le
cadre général de la lutte contre l’exploitation coloniale et pour la libération nationale.
Après les indépendances formelles, le passage de la lutte contre l’exploitation coloniale à celle contre
le néocolonialisme voit un fractionnement du mouvement syndical, à cause de deux (2) raisons essentielles.
-
d’abord la balkanisation de l’Afrique ;
mais surtout, parce que les responsables des néo colonies, avec l’appui de leurs maîtres, mirent
tout en œuvre pour vider les syndicats de leur orientation première.
C’est dans ce sens que les pouvoirs néo coloniaux qui se sont succédés dans notre pays firent feu de
tout bois pour s’inféoder les organisations syndicales ou à défaut, travailler à leur éclatement sur des bases
étrangères aux intérêts des travailleurs.
Ainsi, au lendemain des années 60, il existait dans l’ex Haute-Volta trois (3) centrales syndicales :
-
L’Union Syndicale des Travailleurs Voltaïques (USTV, aujourd’hui USTB) ;
L’Organisation Voltaïque des Syndicats Libres (OVSL, aujourd’hui ONSL) et
La Confédération Nationale des Travailleurs Voltaïques (CNTV, aujourd’hui CNTB).
Devant l’incapacité de ces centrales syndicales à trouver des solutions aux problèmes qui se posaient à
eux et face à la nécessité de s’organiser en vue de défendre leurs intérêts, les travailleurs se constituerons en
syndicats appelés ’’ Autonomes ’’ en dehors des centrales.
L’intersyndicat qui naîtra du regroupement circonstanciel entre ces syndicats et les trois centrales ne
franchira pas le cap du mouvement populaire du 03 janvier 1966.
Plus tard, les syndicats appelés ’’ Autonomes ’’ formeront en 1974, la Confédération Syndicale
Voltaïque (CSV aujourd’hui CSB), sur des bases anti- impérialistes.
La grande grève générale des 17 et 18 décembre 1975 à laquelle toutes les Centrales syndicales prirent
part, traduisait le regain de vitalité du syndicalisme burkinabè, regain auquel la CSB y joua un rôle important.
Mais cette dernière centrale ( CSB) développera plus tard des positions qui seront incompréhensibles du côté
des travailleurs à bien des moments jusque dans les années 80.
Le coup d’Etat du 25 novembre 1980, qui engendrera le pouvoir dit des Colonels du Comité Militaire
de redressement pour le progrès national ( CMRPN), trouvera les syndicats de notre pays, dans l’incapacité de
réaliser un front uni en vue de célébrer le premier mai.
6
C’est ce qui encouragera le CMRPN à confisquer purement et simplement le 1 er mai 1981, pour
soi-disant présenter son discours - programme.
C’était dans ce contexte d’exploitation et d’oppression, renforcée par l’incapacité et l’impossibilité
pour les directions des centrales syndicales à réaliser une unité syndicale véritable, que le courant syndical
révolutionnaire commença à s’affirmer chaque jour d’avantage.
Au lendemain de l’avènement du Conseil National de la Révolution (CNR), les centrales syndicales se
terraient, quand elles ne se ralliaient pas sans autre forme de procès, au pouvoir des comités de défense de la
Révolution (CDR).
Le 9 octobre 1983, des syndicats se réclamant du syndicalisme révolutionnaire de lutte de classes
( syntsha, synter, syntragmih, samab, snaid, ugeb), vont publier une Déclaration où ils annoncent leur
volonté d’une part, de défendre sans complaisance le principe de l’existence de syndicats et de leur
indépendance vis-à-vis du pouvoir en place et, d’autre part, d’œuvrer de toutes leurs forces à l’unité du
mouvement syndical.
Mais dans les conditions de 1984, il était illusoire de parvenir à un 1er mai unitaire. C’est donc de
manière dispersée que le 1er mai 1984 fut commémoré.
Poursuivant leur combat et dans l’esprit d’aboutir à une unité d’action, les syndicats révolutionnaires
parviendront à la mise au point et à la publication de la désormais historique
’’ DECLARATION
DU 28 JANVIER 1985 ’’ signée par onze (11) syndicats.
Cette déclaration commune sera l’acte de naissance du FRONT SYNDICAL.
Le 1er mai 1985 sera lui aussi commémoré en rangs dispersés. C’est ce qui favorisera dans une certaine
mesure l’intervention brutale des CDR en vue d’empêcher sa commémoration par le Front Syndical dans
l’après-midi à la Bourse du Travail de Ouagadougou.
Les travailleurs indignés par ces actes de vandalisme, baptiseront cette journée ’’ CHICAGO II ’’.
Sous l’angle unitaire, le 1er mai ne connaîtra pas un sort plus heureux en 1986.
C’est 1987 que la persévérance du Front Syndical à l’endroit des centrales syndicales pour avoir une
plate-forme d’action commune, base indispensable à l’établissement d’une unité combative, a fini par porter
fruits.
En effet, pour la première fois depuis la Grande Grève de décembre 1975, et sous le CNR qui a abattu
sur les travailleurs et leurs organisations, la répression la plus féroce de leur histoire, la volonté unitaire se
concrétise ; Toutes les centrales syndicales du pays, tous les syndicats autonomes et le front syndical,
publient un communiqué commun le 17 mars 1987, exprimant leur « volonté de poursuivre d’un commun
accord leur réflexion sur la situation qui prévaut dans le monde du travail au Burkina Faso ».
Mieux, tous prépareront ensemble un message unitaire pour commémorer de manière unitaire le 1er
mai 1987 à Ouagadougou et à Bobo-Dioulasso. Malheureusement, le CNR s’arrogea le droit de prendre en
otage cette journée d’une part, par son ‘’Symposium des Paysans ’’, et d’autre part en occupant militairement
la bourse du travail de Ouagadougou (par le BIA de Koudougou), empêchant de fait les travailleurs de
célébrer la fête internationale du travail. Mais cela n’enlève rien au mérite des syndicats qui ont fait la preuve
de leur capacité de s’unir. Cette capacité des syndicats à s’unir, sera réaffirmée en 1988.
7
En effet, c’est toujours avec la persévérance du front Syndical dans la recherche de l’unité syndicale et
la disponibilité des autres syndicats, que le 1er mai 1988 a été célébré dans l’unité d’action par l’ensemble des
organisations syndicales ( centrales et syndicats autonomes), à l’exception des syndicats fantôches dont les
directions ont été mises en place par le défunt CNR à la suite de véritables putschs opérés dans certains
syndicats ( syntsha de Bidima, SNEB, CSB de Yacinthe Ouédraogo, etc.)
L’exemple de la célébration du 1er mai au Burkina Faso, illustre éloquemment, les différentes formes
de célébration liées aux difficultés tant internes au monde du travail qu’aux tracasseries multiformes mises en
place par les autorités afin de faire perdre à cette fête de la classe ouvrière, sa signification profonde.
En effet, les gouvernements n’ont pas toujours la même conception de cette fête que les travailleurs.
Ces derniers, dans leurs organisations de lutte ou non, ne donnent pas tous, la même signification à la fête du
1er mai.
Les significations que l’on donne à la fête du 1er mai sont fort diverses.
II-3
LES SIGNIFICATIONS DU PREMER MAI
Pour nous, il y a deux groupes de significations :
-
D’un côté, un ensemble de conceptions erronées ;
Et de l’autre, des conceptions plus saines, plus justes car plus conformes à l’histoire, à l’évolution
historique du 1° mai.
III-3-1.
Des conceptions erronées à propos du 1er mai.
Ces conceptions erronées sont souvent développées par les ennemis conscients ou inconscients des
travailleurs et de la classe ouvrière. Elles ont pour origine soit une mauvaise compréhension des événements
de CHICAGO de 1886, soit une volonté plus ou moins nette de vider le 1er mai de son véritable contenu.
II-3-1-a
De la mauvaise compréhension des événements de CHICAGO 1886.
Cette mauvaise compréhension se retrouve dans les déclarations et les actes de certaines personnes.
-
Il y a ceux pour qui le 1er mai, appelé fête du Travail, doit consacrer la journée où les travailleurs
doivent travailler jusqu’à leur dernier souffle ;
Il y a aussi la version plus moderne, plus subtile qui se manifeste à l’occasion des cérémonies du
1er mai ; des Ministres, des Autorités politiques et même des responsables syndicaux, invitent sur
des intonations plus ou moins pathétiques, plus ou moins menaçantes, les travailleurs à se départir
de leur soit – disant paresse, et travailler encore plus, en acceptant avec sourire des sacrifices de
plus en plus grands, indispensables au bonheur de la bourgeoisie et du patronat.
Ces types de développement sont réactionnaires car ne tiennent nullement compte de deux
enseignements essentiels du 1er mai à CHICAGO.
-
Primo : le 1er mai 1886 à Chicago a inauguré la lutte en vue de réduire la journée de travail et la
ramener à 8 heures et non pour l’étendre jusqu’à l’infini.
Secundo : les classes laborieuses et le prolétariat n’ont jamais eu d’autres choix que le travail, le
dur labeur du matin au soir. Les ouvriers de Chicago réclamaient un allègement par la réduction de
la durée de la journée de travail. Il est clair que ceux qui tiennent de tels discours ignorent tout, des
conditions de vie et de travail des masses laborieuses qu’ils confondent avec leur propre oisiveté.
8
L’autre conception erronée du 1er mai repose sur une volonté plu ou moins nette de vider le 1er mai de
son véritable contenu.
II-3-1-b. Le premier mai vidé de son contenu véritable.
Les tenants de cette conception cherchent à anesthésier la conscience des travailleurs par la
compréhension insidieuse qu’ils répandent à l’occasion du 1er mai ou par la nature des activités menées à cette
occasion.
-
Pour les premiers, cette journée est un jour férié, chômé et payé comme les autres jours fériés dans
l’année ; rien de plus.
Pour les seconds, c’est une fête de plus et, en tant que fête, il faut faire en sorte qu’elle soit la plus
belle possible : Faire bombance, djandioba, s’enivrer, défilés multicolores, etc. on y ajoutera selon
les circonstances ou le pays, la proclamation de son allégeance ou de celui de son syndicat, à la
bourgeoisie au pouvoir.
Dans un cas comme dans d’autre, on prend bien soin d’oublier d’une part, que le 1er mai s’est fait
contre et sur le dos des classes exploiteuses et d’autre part, que cette date marque un jour de crime de la
bourgeoisie contre la classe ouvrière.
A ces conceptions erronées, il est nécessaire d’opposer une conception saine, c’est-à-dire plus
conforme d’une part à celles des victimes et des artisans de cette journée, et d’autre part, à l’idée de ceux qui
ont décidé de la perpétuer.
II-3-2 De la compréhension saine du 1er mai.
Pour les travailleurs, le 1er mai doit signifier :
-
Premièrement : Une journée de lutte ; les ouvriers de Chicago sont tombés dans la lutte résolue
pour la journée de 8 heures, pour l’amélioration de leurs conditions de vie et de travail.
Aujourd’hui, la journée de 8 heures est reconnue dans presque tous les pays du monde. Cela
signifie-t-il donc que la lutte est terminée ? Assurément non, puisqu’il existe encore des pays où la
journée de 8 heures n’est pas officiellement reconnue et d’autres où le 1er mai n’est pas
commémoré dans la légalité.
De plus, même là où elle est reconnue, la journée de 8 heures est l’objet de torpillages divers : Heures
supplémentaires, journée réelle de travail supérieure à 8 heures, travaux dits d’intérêts collectifs obligatoires
et en dehors de la journée normale de travail, chantages divers sur l’emploi, etc. etc.
C’est la raison pour laquelle le 1er mai doit permettre de faire le bilan des luttes : acquis, faiblesses,
voies et moyens d’aller de l’avant.
-
Deuxièmement : Une journée de souvenir ; Il faut se souvenir que les pionniers de la lutte pour la
journée de travail de 8 heures aujourd’hui reconnue presque partout, ont consenti jusqu’au
sacrifice de leur vie. Ils nous faut donc retenir qu’il a fallu et qu’il faut toujours des sacrifices si
nous voulons obtenir des victoires.
Aussi, les travailleurs doivent comprendre que la peur, la résignation qui conduisent inéluctablement à
la capitulation sont nos pires ennemis. Seule la lutte intrépide, avec un esprit d’initiative et de sacrifice élevé
permet des victoires. Aussi célébrer le 1er mai chaque année, sous des formes diverses tenant compte des
circonstances particulières, contribue à perpétuer la mémoire des ouvriers tombés ce jour-là à Chicago afin
qu’une des plus grandes revendications des travailleurs aboutisse.
9
-
Troisièmement : Une journée d’Espoir : La cause des travailleurs a survécu aux balles de la
bourgeoisie et a fini par triompher. C’est dire que malgré les difficultés, la répression, les causes
justes finissent toujours par triompher. Le 1er mai est une journée dont la célébration doit nous
galvaniser, nous armer d’optimisme en l’avenir car la victoire est certaine.
-
Enfin : Une journée de solidarité. Au cours de cette journée à nulle autre pareille, c’est une
occasion de faire le point sur la situation des travailleurs dans le monde et d’affirmer par delà les
frontières, la similitude de leurs problèmes et leur résolution ferme de s’unir contre l’ennemi
commun.
Pour conclure, il faut donc savoir que le 1er mai, journée mémorable de la lutte historique et héroïque
de la classe ouvrière pour l’amélioration de ses conditions de travail et de vie et pour l’émancipation, n’est
nullement le fruit de la magnanimité de la bourgeoisie.
Cette journée de victoire symbolise, magnifie l’esprit de lutte de la classe laborieuse que tout
travailleur doit maintenir vivace en tout leu et en tout temps.
Jour de victoire et de gloire pour la classe ouvrière et les masses laborieuses, c’est une journée de
défaite pour la bourgeoisie qui en cerne bien l’enjeu. Aussi ; tente-t-elle de manières diverses d’en
réduire la portée.
Mais, il ne fait pas de doute que le 1er mai demeurera pendant longtemps encore le symbole de la
résistance, de l’acharnement dans la lutte de la classe ouvrière et des travailleurs, leur raison d’espérer et la
manifestation de leur solidarité de classe.
VIVE LE 1er MAI, FETE INTERNATIONALE DU TRAVAIL.

Documents pareils