La responsabilité du vendeur qui n`a pas souscrit d`assurance
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La responsabilité du vendeur qui n`a pas souscrit d`assurance
Publié sur Dalloz Actualité (http://www.dalloz-actualite.fr) La responsabilité du vendeur qui n’a pas souscrit d’assurance dommages-ouvrage le 17 mars 2011 IMMOBILIER | Assurance | Construction | Vente Le défaut de souscription de l’assurance dommages-ouvrage, laquelle n’est pas un accessoire indispensable de l’immeuble vendu, n’empêche pas la vente et ne constitue pas un défaut de livraison. Civ. 3e, 2 mars 2011, FS-P+B, n° 09-72.576 L’articulation du droit de la vente et du droit de la construction offre des problématiques juridiques intéressantes. L’arrêt commenté en est une illustration. Il précise la responsabilité du vendeur qui n’a pas souscrit d’assurance dommages-ouvrage. L’article L. 242-1 du code des assurances impose au maître d’ouvrage, qui fait réaliser des travaux relevant de la garantie décennale, de souscrire, avant l’ouverture du chantier, une assurance dommages-ouvrage. Cette assurance obligatoire se transmet aux propriétaires successifs de l’immeuble. L’article 1615 du code civil prévoit que le vendeur doit délivrer la chose avec ses accessoires et tout ce qui a été destiné à son perpétuel usage. Un acquéreur avait déduit de la combinaison de ces deux articles que le vendeur était tenu de délivrer un immeuble pour lequel une assurance dommages-ouvrage a été souscrite. En l’espèce, il avait acquis un terrain sur lequel le vendeur avait fait bâtir une maison d’habitation et un préau. Sous l’effet d’une forte bourrasque, la charpente du préau s’était effondrée en raison de vices de construction relevant des articles 1792 et suivants du code civil. L’assureur dommages-ouvrage avait pourtant décliné sa garantie au motif que seule la maison d’habitation était couverte par l’assurance souscrite au moment des travaux, les bâtiments annexes en étant exclus. L’acquéreur avait alors recherché la responsabilité du vendeur pour manquement à son obligation de délivrance, l’assurance dommages-ouvrage étant, selon lui, un accessoire de la chose vendue. Cet argument est rejeté par la cour d’appel et par la Cour de cassation au motif que, si les dommages relevaient bien de l’assurance dommages obligatoires, le défaut de souscription de cette assurance, qui n’est pas un accessoire indispensable de l’immeuble vendu, n’empêchait pas la vente de l’immeuble. Cet arrêt confirme une précédente décision rendue dans des termes similaires. La haute juridiction avait déjà estimé que si la souscription d’une assurance dommages-ouvrage par le maître de l’ouvrage est obligatoire, le non-respect de cette disposition a pour conséquence de priver l’acquéreur de la garantie de préfinancement des travaux, sans néanmoins rendre le bien indisponible à la vente (V. Civ. 3e, 13 nov. 2003, D. 2004. 109 ; Defrénois 2004. 37903-4, obs. H. Périnet-Marquet ; V. égal. pour l’absence de garantie décennale des constructeurs, Nancy, 6 mars 2007, RG n° 04/00420). En effet, si la souscription d’une assurance dommage est obligatoire pour le maître de l’ouvrage, cette assurance n’est pas nécessaire à l’usage normal de la chose vendue. Notamment, l’habitabilité de l’immeuble ne dépend pas de ce contrat. Ce n’est donc pas un accessoire indispensable (à titre d’exemples, pour des ventes mobilières ont été reconnus comme accessoires indispensables : des documents de salubrité nécessaires aux exportations de viande, Civ. 1re, 29 nov. 1994, D. 1996. 13, obs. G. Paisant ; la carte grise d’un véhicule, Civ. 1re 18 avr. 2000, n° 98-10.598, Dalloz jurisprudence). Dalloz actualité © Éditions Dalloz 2017 Publié sur Dalloz Actualité (http://www.dalloz-actualite.fr) Sauf si les acquéreurs en ont fait un élément déterminant de leur consentement, il faut en déduire que l’assurance dommages-ouvrage n’est pas une qualité substantielle de l’immeuble. L’action en annulation de la vente pour dol ou pour erreur ne peut davantage prospérer (V. Civ. 3e, 13 nov. 2003, préc.). Le cas échéant, il est plus efficace de rechercher la responsabilité du vendeur s’il a omis de mentionner cette carence dans le contrat de vente. Une obligation d’information spécifique est en effet prévue par le code des assurances. Lorsque la vente d’un immeuble intervient avant le délai d’expiration de la garantie décennale, l’article L. 243-2 du code des assurances impose de mentionner dans l’acte l’existence ou l’absence d’assurance. Cette obligation incombe au vendeur et au notaire (V. Civ. 1re, 18 janv. 2005, n° 03-12.782, Dalloz jurisprudence), qui est en outre tenu de vérifier l’exactitude des déclarations faisant état de la souscription effective de l’assurance et ne peut se contenter des seuls dires du vendeur (V. Com. 12 oct. 2004, RDI 2004. 519, obs. G. Leguay ). En l’espèce, ce moyen n’avait pas échappé à l’acquéreur qui, à l’appui de son pourvoi, invoquait également la responsabilité du vendeur pour défaut de renseignement et de loyauté. Il lui reprochait de ne pas avoir attiré spécialement et formellement son attention sur la circonstance qu’une partie des constructions n’était pas couverte par l’assurance. Cet argument est rejeté. La Cour de cassation approuve la cour d’appel d’avoir estimé que l’obligation d’information du vendeur avait été satisfaite alors que l’attestation d’assurance, qui était annexée à l’acte de vente et paraphée par l’acquéreur, énonçait clairement que la garantie valait pour les travaux de rénovation des bâtiments d’habitation et qu’une copie de la police d’assurance lui avait également été transmise. La Cour de cassation restreint ainsi la portée de l’obligation d’information à la seule production d’une attestation. Si les mentions de l’attestation doivent être exactes, le vendeur comme le notaire n’ont pas à prodiguer de conseil ou à mettre en garde l’acquéreur. Dans le même sens, elle avait déjà estimé que le notaire n’était pas tenu d’appeler spécialement l’attention des parties sur les conséquences résultant de l’absence d’assurance (V. Civ. 1re, 13 mars 2001, RDI 2001. 226, obs. G. Durry ). Il appartient à l’acquéreur de lire les polices et de se renseigner. Si, en l’espèce, la responsabilité du vendeur n’a pas été retenue, la vente d’un immeuble achevé depuis moins de dix ans non assuré au titre du dommages-ouvrage n’est cependant pas sans danger pour le maître de l’ouvrage. En pareille hypothèse, la Cour de cassation répute ce dernier constructeur. Il est alors tenu au titre de la garantie décennale (V. Civ. 3e, 17 déc. 1996, RDI 1997. 1997. 240, obs. Malinvaud ; 2 oct. 2002, RDI 2003. 182, obs. C. Saint-Alary-Houin ). En effet, l’article 1792-1 du code civil répute le constructeur de l’ouvrage « toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu’elle a construit ou fait construire ». S’agissant d’une garantie d’ordre public, toute clause limitative ou exclusive de responsabilité est réputée non écrite (V. Civ. 3e, 3 mars 2010, RDI 2010. 322, obs. Tricoire ). par C. Dreveau Dalloz actualité © Éditions Dalloz 2017