Les cinémas César et Variétés déchirés entre patron

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Les cinémas César et Variétés déchirés entre patron
Les cinémas César et Variétés déchirés entre patron et
salariés
Pour sauver du désastre les deux cinémas du centre-ville, spectateurs, partenaires et salariés se réunissent cette
fin de semaine. Mais le propriétaire, pourtant incapable de verser les salaires et de payer le loyer à la mairie, n'a
pas dit son dernier mot.
Le cinéma Les Variétés - archives Marsactu
Par Lisa Castelly, le 16 septembre 2016
Lien : https://marsactu.fr/les-cinemas-cesar-et-varietes-au-bord-du-gouffre-ou-prets-a-renaitre/
Voilà des mois que les deux cinémas dépérissent sous le regard affligé des spectateurs. Après une grève des
salariés l’hiver dernier en raison de retards dans le paiement de leurs salaires, aucun signe de redressement n’a
été remarqué. Samedi soir, l’association de soutien créée en juillet sous le nom “Les Amis et partenaires des
Variétés” organise donc une soirée de soutien dans l’enceinte du cinéma de la Canebière. Dans l’invitation, il est
précisé que les salariés viendront “exposer la situation et les stratégies de lutte à venir”, tandis que l’association
formulera “des propositions et perspectives”.
“Nous voulons faire en sorte que l’équipe ne baisse pas les bras tant que la situation n’est pas tranchée”, explique
Florence Pazzottu pour l’association. Tartes salées et collations seront vendues au profit d’une caisse de secours.
Car s’il entretiennent le flou sur leurs intentions comme sur la situation exacte de l’entreprise, l’événement a été
organisé à la hâte pour répondre à une urgence : les employés ne touchent plus leurs salaires depuis le mois de
juin.
Dans ce cas, Galeshka Moravioff, le patron des cinémas et de l’entreprise “Bastille Saint-Antoine” qui les regroupe,
a normalement l’obligation de se déclarer en cessation de paiements au tribunal de commerce. Tout en restant lui
aussi flou sur la situation, son avocat Me Bonnet précise qu’une audience devant le tribunal de commerce de Paris
devrait se tenir très prochainement. “Il n’est pas question de liquidation”, estime-t-il cependant.
“Aujourd’hui, la situation est au point mort”, résume le réalisateur Nicolas Burlaud, qui avait occupé le cinéma en
mai dernier pour exiger le paiement de 3000 euros qui lui étaient dus suite à la diffusion de son film “La fête est
finie”. “Nous avons récupéré 1000 euros, le reste, on a fait une croix dessus vu la situation de la société qui gère le
cinéma”. Membre de l’association, il en résume ainsi l’objectif : “On a envie de soutenir ce cinéma, mais de se
débarrasser de cette société et de Moravioff”.
Parmi les créanciers : la mairie de Marseille
Galeshka Moravioff semble en effet avoir peu d’amis. À la mairie, propriétaire des murs, ses déboires financiers ne
suscitent plus beaucoup d’indulgence. “La Ville a attaqué la société pour une ardoise énorme d’impayés sur les
loyers. Le contentieux est en cours et je pense que le jugement devrait intervenir bientôt“, explique la maire des 1er
et 7e arrondissements Sabine Bernasconi (LR). L’élue souhaiterait faire des Variétés une des pièces maîtresses
du “Broadway marseillais” qu’elle veut voir naître sur la Canebière mais, comme l’association de soutien, elle
estime que “personne ne regrettera ce chef d’entreprise”.
Galeshka Moravioff n’en est pas à son premier naufrage. Entre 2009 et 2014, il s’est notamment séparé, non sans
turpitudes, de ses trois cinémas lyonnais. En juillet dernier, il était sommé par le bailleur de son cinéma parisien, la
Bastille, de quitter les lieux pour loyers impayés. Un épisode relaté dans un article de Télérama, qui ne manque
pas de dépeindre la réputation de “mauvais payeur” que se traîne le personnage dans le milieu du cinéma.
“Persécutions”
Pour son avocat, Galeshka Moravioff a des circonstances atténuantes. “Il est clairement victime des persécutions
du CNC (…) On l’a mis sur la paille”, assure Me André Bonnet. À l’origine des caisses vides et de la dégringolade
de “Bastille Saint-Antoine” on trouverait selon lui les travaux de numérisation des salles engagés par Moravioff en
2012 pour 700 000 euros et pour lesquels le Centre national du cinéma n’aurait versé qu’un quart de la subvention
promise.
“Forcément, en avançant 700 000 euros, mon client n’a pas pu leur verser la taxe sur les entrées qui s’élevait cette
année-là à 27 000 euros. De là, le CNC a bloqué le versement de la subvention qui aurait dû rembourser les
travaux. Alors que le comptable du CNC aurait simplement pu retenir cette somme de la subvention”, explique
l’avocat qui défendra bientôt une demande d’indemnisation devant le tribunal administratif de Paris. Interrogé par
Télérama, le CNC déplore de son côté le peu de transparence et de bonne volonté du propriétaire.
Moravioff veut garder la main
Pour autant, Me Bonnet assure que son client n’est pas prêt de dire adieu à ses cinémas marseillais. “Au contraire,
les choses devraient se résoudre et même se développer, promet-il. Il y a des gens très intéressés par ce réseau.
Il est question d’une réorientation ainsi que de travaux avec l’aide d’un investisseur externe”, détaille-t-il.
Galeshka Moravioff garderait donc en partie la main sur le réseau. Ce plan ne fait certainement pas partie des
“perspectives” imaginées parmi les scénarios de reprises de l’association et des salariés, qui entretiennent
désormais des relations glaciales avec leur patron. “Il faut que la Ville sache que, ces cinémas, ce n’est pas fini !”,
prophétise quant à lui Me Bonnet.

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