retour d`expérience - Supply Chain Magazine
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RETOUR D’EXPÉRIENCE LAPEYRE réorganise son Back-Office magasin Q uoi de pire, après l’achat de vos éléments de salle de bains, que d’attendre pendant près d’une heure au retrait des marchandises en compagnie d’une foule de clients agacés ? Et quelle mauvaise image pour l’enseigne qui vous a pourtant préalablement si bien vendu le produit ! Une mésaventure assez courante qui traduit une réelle faiblesse dans le dispositif de certaines marques de la distribution. Pour le groupe Lapeyre, la prise en compte de 26 N°65 ■ SUPPLY CHAIN MAGAZINE - JUIN 2012 De gauche à droite : Maxime Cognet (Consultant Senior, Métis Consulting), Vincent Percheron, (Directeur des projets logistiques Lapeyre), Bertrand Lesourd (Directeur Supply Chain Lapeyre ), Jean-Marc Soulier (Président, Métis Consulting), Patrice Floret (Senior Manager, Métis Consulting) ce sujet impliquant le « Back-Office », résulte d’un vaste plan de réorganisation initié dès 2007 avec l’appui du cabinet Métis Consulting. « Le challenge était de faire évoluer une entreprise très industrielle vers une Supply Chain Retail orientée clients », explique Jean-Marc Soulier, Président de Métis Consulting. L’objectif était double : accroître le chiffre d’affaires et réduire les coûts de distribution. Le cabinet s’attache dans un premier temps à opérer un diagnostic stratégique avec une forte implication du comité de direction. A l’issue de cette ©JPGUILLAUME Le point de vente est depuis longtemps le lieu privilégié où s’établit la relation entre l’enseigne et le consommateur. Mais aujourd’hui, l’échange commercial s’étend bien audelà. Conscient de cette évolution, Lapeyre (Groupe Saint Gobain) s’est engagé depuis quelques mois dans une optimisation des processus BackOffice magasins pour améliorer la qualité de services aux clients et la productivité de ses opérations. Une réorganisation en profondeur conduite avec le soutien du cabinet Métis Consulting. ©JPGUILLAUME Une organisation à mettre en place Dès son arrivée chez Lapeyre, Bertrand Lesourd, Directeur Supply Chain du groupe Lapeyre fait de l’optimisation du Back-Office une de ses priorités. Le sujet n’est pas neutre car il a d’importantes répercussions sur la relation client. Il n’est pas non plus très simple car l’entreprise distribue à travers différents canaux, des milliers d’articles pour l’aménagement de la maison : « Notre particularité est d’être un multi-spécialiste avec une activité commerciale qui comprend 25% des ventes sur stocks et 75 % à la commande, soit en sur-mesure, soit en standard ». Concrètement les clients sélectionnent les produits dans les magasins, sur catalogue. Ils les achètent et les réceptionnent euxmêmes, dans les réserves adossées au magasin ou bien se font livrer à domicile. « A cette étape de la relation, le rôle du Back-Office est capital, estime Jean-Marc Soulier. C’est un des paradoxes du Retail : plus on se rapproche du client, plus les taux de service se dégradent. » Pour remédier à ce problème, Lapeyre revoit la méthode de préparation et met en place un système de saisie codes-barres. Les produits attribués à un client sont identifiés à la réception puis regroupés sur un emplacement spécifique : « Avant, nous recevions les produits de nos usines et nous les stockions jusqu’à l’arrivée du client. Il lui arrivait parfois d’attendre un bon moment. Aujourd’hui, les produits sont placés directement sur la palette qui lui est destinée. C’est deux fois moins d’opérations pour nos magasiniers et nous gagnons du temps en entrée et en sortie. L’objectif est de limiter le temps d’attente en magasin ©JPGUILLAUME première étude un plan de transformation en deux étapes est arrêté : premièrement, mettre en œuvre 14 actions d’optimisation court terme ; deuxièmement, définir des projets stratégiques à plus long terme portant sur les offres et assortiments magasins, le réseau logistique, les processus Supply Chain, les systèmes d’information, l’organisation et la création voici trois ans de la fonction Supply Chain. A propos de Lapeyre Lapeyre appartient au Pôle « distribution bâtiment » du groupe Saint Gobain. Son offre est construite autour de quatre univers : cuisine, salle de bains, aménagement intérieur et aménagement extérieur. Elle propose à ses clients des services différenciés en magasin : vente sur stock sur une sélection de produits, vente à emporter (avec fabrication sur mesure), prestations d’atelier, livraison et/ou pose à domicile. Elle s’appuie sur un réseau intégré de 12 usines. En 2011, son CA était de 842 M€ pour 2.500 collaborateurs. Son réseau est constitué de 148 points de vente, principalement en France mais également en Suisse, en Belgique et dans les DOM-TOM. ■ JUIN 2012 - SUPPLY CHAIN MAGAZINE ■ N°65 27 RETOUR D’EXPÉRIENCE à 10 minutes maximum lorsque le client vient chercher sa commande », explique Vincent Percheron, Directeur des projets logistiques. Vincent Percheron et Bertrand Lesourd ©JPGUILLAUME Revaloriser les métiers du Back-Office Pour obtenir un résultat significatif au niveau des opérations de magasinage, Vincent Percheron mise sur l’accompagnement individuel et la formation du personnel : « Il faut que la démar che soit comprise et acceptée ». Un vaste plan de formation a donc été engagé avec le service Ressources Humaines de Lapeyre (pour le contenu métier, le management au quotidien, la sécurité…) et le cabinet Métis Consulting pour la partie ingénierie de formation. Parallèlement un effort particulier est mis sur la planification des ressources : « Le principe est de mettre en adéquation la charge de travail et la capacité des équipes, explique-t-il. Pour y parvenir, nous avons modélisé le nombre de lignes par fournisseur, le temps d’exécution d’une ligne en réception, le nombre de lignes de commandes avec dates prévisionnelles et temps moyens de sortie. A partir de critères objectifs, la performance individuelle est mieux valorisée et l’on peut également détecter les anomalies, prévenir certains conflits de travail. Ultérieurement, nous verrons s’il est opportun de créer des Challenges ou des mesures incitatives qui participent également à une reconnaissance des meilleurs. Pour le moment nous avons installé une série de KPI ainsi qu’une grille d’évaluation pour analyser les performances magasin par magasin et arriver à 100 % de conformité. » Les résultats obtenus par les nouvelles méthodes de travail et la revalorisation des fonctions sont incontestables : une augmentation de 25% de la productivité et un taux de satisfaction client en nette progression, notamment grâce à la réduction des temps d’attente au retrait des marchandises. Ajoutons une diminution de la casse, moins d’accidents et une amélioration Jean-Marc Soulier, Président de Métis Consulting : « Le magasin est le point d’ancrage du Cross-canal » Jean-Marc Soulier estime que d’importants gisements de progrès existent encore dans le Back-Office des enseignes qui n’ont pas encore réalisé les changements nécessaires, surtout dans un contexte de Cross-canal : « Les axes d’amélioration sont de nature différente selon la typologie des enseignes, la nature des produits, les types de magasins et les modes de ventes concernés. Ils portent en général sur l’optimisation des processus et des opérations, l’ajustement des prestations de livraison et l’organisation en amont des tâches logistiques. Bref, livrer du « prêt à vendre » lorsque cela est pertinent et possible. Ils passent également par la planification des besoins de ressources en magasin, le développement de la polyvalence et la formation aux bons gestes logistiques. J’ajouterais la professionnalisation de l’accueil pour les opérations de retrait de commandes. Aujourd’hui, avec l’élargissement des assortiments (non disponibles en magasin) et le développement du Crosscanal, le magasin évolue au-delà même de son rôle de point de vente immédiat. Il ajoute un rôle clé de centre de contact client pour des actes de ventes déportés temporellement ou spatialement. Il s’agit donc pour les enseignes de ne pas se préoccuper seulement de la « Shopping Experience » des consommateurs, mais aussi de l’efficacité de ces nouveaux lieux qui désormais font partie de la relation avec le client. » ■ 28 N°65 ■ SUPPLY CHAIN MAGAZINE - JUIN 2012 sensible des conditions de travail. « Stratégiquement, il était important que la Supply Chain ne reste pas bloquée à la réception et puisse entrer dans le magasin », conclut Vincent Percheron. Une vraie démarche d’amélioration continue Ce qui mérite d’être souligné dans ce projet, c’est la manière dont il s’inscrit dans la durée. En effet, au-delà des modifications dans l’organisation et les process, Lapeyre en collaboration avec Métis, a mis en place une vraie démarche d’amélioration continue et de professionnalisation de sa filière Back-Office. Celle-ci commence avec la formalisation du programme de formation, l’élaboration des équipes pédagogiques et la formation des formateurs. En 2011, ce sont 88 Responsables logistiques qui ont été formés à raison de neuf jours par parcours. Au total, 500 personnes recevront une formation sur trois jours. Une fois les fondamentaux déployés, Lapeyre a décidé de favoriser la montée en compétences des équipes logistiques. Dans les prochains mois, Métis Consulting va accompagner Lapeyre dans la création d’une véritable filière logistique : des modules de perfectionnement métier seront proposés à la fin de cette année aux équipes magasin (responsables et équipiers) pour améliorer la professionnalisation du Back-Office. En interne, l’entreprise a prolongé la mise en place des basiques par de nouveaux outils d’optimisation, comme l’utilisation des codes-barres pour les inventaires, l’installation de tableaux de bord de suivi de la performance individuelle, collective, de la qualité de service ou encore de la tenue des stocks en magasin. Loin de la haute technologie ou de systèmes d’information complexes, une simple application des fondamentaux, une bonne gestion des équipes et un projet d’entreprise clairement défini auront permis à l’enseigne de gagner en performance. Un vrai cas d’école. ■ JEAN-PHILIPPE GUILLAUME RETOUR D’EXPÉRIENCE La logistique urbaine fait beaucoup parler d’elle mais les cas concrets restent encore peu nombreux… La société Vert chez Vous lance un nouveau service de distribution dans Paris répondant au doux nom de « Au fil de l’eau ». Multimodalité est le maître-mot de cette solution innovante dont le coût n’est pas plus élevé qu’un modèle thermique traditionnel… Une aubaine pour les chargeurs. VERT CHEZ VOUS livre au fil de l’eau e coup d’envoi de la solution de distribution multimodale à Paris, « Au fil de l’eau », de la société Vert chez Vous (détenue par les groupes Tendron et Labatut et Gilles Manuelle), a été donné le lundi 7 mai. Nous vous l’annoncions en avant-première dans notre newsletter (NL 1384). Le concept est devenu réalité ! C’est ainsi que depuis quelques semaines, une péniche aux couleurs de la société vogue sur la Seine cinq jours par semaine. Baptisée « VoKoli » et gérée par une jeune entreprise partenaire Euroflots (créée en 2009), cette péniche a été aménagée en « entrepôt logistique flottant et itinérant ». Elle fonctionne sur le même modèle qu’une plate-forme logistique et accueille à son bord du personnel, des marchandises ainsi qu’une flotte de vélos utilitaires électriques. Un service qui combine donc deux modes de transport alternatifs. ©VERT CHEZ VOUS L 30 N°65 ■ SUPPLY CHAIN MAGAZINE - JUIN 2012 Tous les arrondissements parisiens desservis « VoKoli » dessert l’ensemble des arrondissements parisiens. Au départ du port de Tolbiac (13e), elle effectue un allerretour quotidien sur la Seine jusqu’à Grenelle (15e). Au fur et à mesure des 10 escales, les vélos utilitaires électriques sont débarqués puis sillonnent les rues parisiennes pour livrer les destinataires. Les marchandises à livrer sont chargées sur les berges du port de Tolbiac tôt dans la matinée, entre 7 h et 8h30. Elles sont acheminées sur le quai directement depuis les entrepôts des clients ou depuis celui de Vert chez Vous, situé à Pantin (Seine-Saint-Denis). « Nous sommes censés pouvoir accueillir entre 2.500 et 3.000 colis (de moins de 30 kg) par jour », annonce Gilles Manuelle, Directeur de Vert chez Vous. Dans un premier temps, les marchandises sont triées par arrondissement puis chaque chauffeur réalise un second tri ©J. FUSTIER Gilles Manuelle, Directeur de Vert chez Vous VISITE EN IMAGES Déchargement des marchandises d’un client sur la berge du port de Tolbiac ©J. FUSTIER ©J. FUSTIER Ces colis sont ensuite déposés dans un caisson de transbordement ©J. FUSTIER Des triporteurs sur mesure A la cible, 18 vélos réaliseront les tournées de livraison. « Il faut compter 45 minutes pour préparer les véhicules et 1 h 30 pour distribuer les marchandises », précise Gilles Manuelle. En moyenne, les livreurs reviennent sur la péniche deux escales après avoir l’avoir quittée. A titre d’illustration, lors de l’escale du port du Louvre (au pont Royal), la première équipe remonte sur la péniche alors que la troisième la quitte. Le bateau rentre au port de Tolbiac vers 18 h 30 et reste à disposition des livreurs qui effectuent les dernières livraisons jusqu’à 20 h. Chaque tripoteur ayant une capacité de livraison de 8 m3 par jour (à raison de quatre tournées de livraison quotidienne par chauffeur), la capacité globale d’emport est de 144 m3 par jour pour l’ensemble de la flotte. Ces véhicules, conçus spécifiquement, sont une des grandes fiertés de Vert chez Vous qui souhaite garder le nom de la marque secret… Ils sont pensés (étroits et hauts) de manière à optimiser leur capacité de charge tout en limitant leur encombrement dans la circulation. Ils fonctionnent avec une assistance électrique au pédalage. Le moteur s’actionne quand le livreur pédale. La batterie est prévue pour parcourir une vingtaine de La péniche stationne au port de Tolbiac, sa première escale ©J. FUSTIER par zone de tournées. Cinq escales sont réalisées dans chaque sens (Tolbiac, Henri IV, Louvre, Gros Caillou et Grenelle). « Les véhicules qui partent de Tolbiac livrent les 12e et 13e arrondissements de Paris », explique Gilles Manuelle. Placées dans un caisson de transbordement, les marchandises, destinées aux autres arrondissements, sont hissées à bord de la péniche à l’aide d’une grue. La péniche est prête à partir ! Ce sont les livreurs qui préparent euxmêmes sur la péniche leur tournée de livraison. Le chef d’équipe apporte d’éventuels ajustements. A chaque escale, des livreurs quittent la péniche pour desservir une partie des colis dans les arrondissements avoisinant l’escale. Les triporteurs chargés de marchandises sont sortis du fond de la cale et déposés à quai par la grue. La conception de la « caisse », dans laquelle les tripoteurs sont manutentionnés, a été réalisée conjointement par Euroflots et Vert chez Vous. ©J. FUSTIER Nous avons eu la chance de passer une matinée à bord de la péniche « VoKoli ». Voici quelques photos pour vous sentir au cœur de l’action ! La grue hisse à bord de la péniche le caisson de transbordement qui contient les colis Chargement du caisson de transbordement dans la cale de la péniche JUIN 2012 - SUPPLY CHAIN MAGAZINE ■ N°65 31 RETOUR D’EXPÉRIENCE ©J. FUSTIER VISITE EN IMAGES (SUITE) Stationnement de la péniche au port Henri IV, sa deuxième escale. ©J. FUSTIER Déchargement du caisson de transbordement sur la berge du port Henri IV. ©J. FUSTIER ©J. FUSTIER … puis déchargement des tripoteurs sur la berge… Dépose du caisson de transbordement sur la berge du port Henri IV… ©J. FUSTIER … et départ des livreurs sur les triporteurs pour livrer les arrondissements avoisinants. ©J. FUSTIER Vue depuis la cabine de pilotage de la péniche. ©J. FUSTIER Arrivée de la péniche à l’escale la plus à l’Ouest de Paris (Grenelle). 32 N°65 ■ SUPPLY CHAIN MAGAZINE - JUIN 2012 kilomètres (selon le poids transporté, les reliefs, le nombre d’arrêts et de reprises et le chauffeur). Tous les vélos disposent de deux batteries, dont une en recharge sur le bateau, même si en théorie une seule batterie suffit pour une journée type. Ils sont équipés d’un système de suspension. Outre ce matériel innovant, Vert chez Vous mise sur les ressources humaines en proposant des CDI (contrats à durée indéterminée) aux livreurs et des rémunérations attractives (1.800 € brut par mois ainsi qu’un panier repas quotidien). Un moyen efficace de constituer une équipe impliquée et durable. Une solution dédiée au B2B Ce nouveau service cible les flux de colis B2B. Vert chez Vous en distribue d’ores et déjà pour plusieurs clients : Raja, Saint Gobain Distribution, Sanofi, Laboratoires Wala (Dr. Haus- chka), Jacquet et Veolog Fashion. Des discussions sont actuellement en cours avec d’autres sociétés. Futur axe de développement : la réalisation d’enlèvements, un levier intéressant pour optimiser les retours. Par ailleurs, Vert chez Vous ne compte pas s’arrêter en si bon chemin et revendique dès à présent l’ambition de dupliquer cette organisation dans les 25 plus grandes villes de France. Et ce, en démarrant par Toulouse en septembre. « Nous souhaitons nous développer dans le reste de la France en concluant des partenariats avec des entreprises locales », nous révèle Gilles Manuelle. Bien entendu, le modèle s’adaptera aux possibilités de pratiquer ou non du transport fluvial au sein des villes. En résumé, les avantages de cette solution sont légion : bénéfices environnementaux grâce à l’absence d’émissions de CO2 des triporteurs, réduction des nuisances sonores, limitation des problèmes de congestion des routes, etc. Sans compter qu’elle anticipe les difficultés de livraison que posera le très probable futur péage urbain dans Paris… « D’un point de vue économique, ce service n’est pas facturé plus cher qu’une solution thermique classique », assure Gilles Manuelle. Une nouvelle qui réjouira les chargeurs soucieux de rendre plus propre leur distribution urbaine à moindre coût ! ■ JULIA FUSTIER