sommaire - Neira des Volcans
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sommaire - Neira des Volcans
ISSN : 1774 - 7597 SEPTEMBRE 2016 N° 60 SOMMAIRE Éditorial : Les larmes de Garou… Les dossiers "Noirs" 1993 (suite) … pages 2 à 7 Les ministres sous la 5ème : François Guillaume (Jean Claude BRUNELIN) pages 8 à 14 Les sélectionneurs en 2015 (Didier CATHALAN) pages 15 à 20 ème Lou Pastre de la Neigre : 11 édition ( Jean Claude BRUNELIN) pages 21 à 26 Petis Moutonsss (Gilbert DUFLOS) pages 27 à 32 La Neira et les Volcans d'Allègre : 9ème édition (Jean Claude BRUNELIN) pages 33 à 39 Autres évocations de transhumance (Jean Claude BRUNELIN) pages 40 et 41 Un vétérinaire pas trop pressé. Grèzes 1869 (René BORE) pages 42 et 43 Les mutilés de la Première Guerre Mondiale (Jean Claude BRUNELIN) pages 44 à 49 Hommage à Bernard Féminier (Jean Claude BRUNELIN) pages 50 et 51 Pourquoi ? (Yvette MAURIN) page 52 Le Brexit (Henri OLLIER) pages 53 à 55 Histoire du Velay : germanique dans le parler de Taulhac (suite) ( Hervé QUESNEL-CHALELH) page 56 Plaser de la revirada : D'un médecin… Guillaume Tardif (Hervé QUESNEL-CHALELH) pages 57 et 58 A lire : Vivre à Verdun suivi de Victoire (Jean Claude BRUNELIN) page 59 Les larmes de Garou... Vous souvenez-vous de Garou, pour l'état civil Pierre Brin, enfant de l'assistance et du Bouchet-Saint-Nicolas ? Il vivait à l'assemblée du village. Le père Louis Blanc avait installé dans les bois du lac un grand tonneau, avec toiture, porte et fenestron : un abri lorsque son troupeau pacageait sur les rives. Garou en avait demandé la clef pour dormir la nuit sur son lit de mousse et surveiller ses lignes de fond. Ouvrier saisonnier dans les fermes du plateau, il vendait aussi cueillettes de champignons et produits de ses pêche et chasse. Il n'aurait pas fait de mal à une mouche, mais les parents menaçaient les enfants désobéissants de les conduire chez Garou. Il sonnait les cloches et faisait office de fossoyeur. Rien de tel pour forger une philosophie : « J'en ai sonné des messes, baptêmes, mariages et enterrements. Le mien ne tardera pas mais ça ne fait rien, j'ai été fossoyeur du village, alors je suis un habitué de la mort, je sais comment il faut la prendre. J'ai marché pour aller jusqu'au clocher, je marcherai bien pour aller jusqu'en audelà ». L'au-delà, il l'a rejoint en 1971, emporté par un coup de froid, une congestion alors qu'il pêchait. Il a quitté son petit paradis, comme il disait, pour gagner la voie lactée. Depuis il vagabonde dans les nuages, jamais bien loin de son lac. Il en a vu des épisodes ! Des savants sont venus avec de drôles d'engins pour enfoncer de grands tubes dans la vase du fond du lac, histoire de déranger les poissons. Il a vu rénover son tonneau qui menaçait ruine, une façon de perpétuer sa légende sur terre. Comme il est beau son lac vu du ciel, son bleu d'été quand il reflète l'azur, sa surface gelée ceinte d'arbres givrés l'hiver. Dernièrement, une armée de techniciens sont venus expertiser son lac pour l'aménager. Plus tard des gens du pays ont manifesté leur désaccord. Dans la foule, il en a reconnu, encore des gamins facétieux de son temps et à qui il faisait peur. Les mêmes qui ont empêché l'installation d'une vaste décharge et fait reculer un puissant groupe. Les aménageurs du Conseil général, surpris, ont d'abord reculé devant l'ire des gens du pays. Leurs responsables politiques ont annoncé des travaux plus légers. Finalement, les financements étant engagés, le projet est maintenu, au prix de pressions sur les maires et la communauté de communes. Un vrai déni de démocratie. Un vrai saccage du lac : parking géant, voies artificialisées, abattage d'arbres majestueux, arbustes incongrus, embarcadère en béton... et tout ça baptisé retour à l'état naturel ! Si vous passez par là et recevez quelques gouttes de pluie salée malgré un beau ciel bleu, ne vous inquiétez pas, ce sont les larmes de Garou, l'homme des bois près de la nature, devant le massacre de son lac par des écologistes de salon. JCB coupe entière, et l'Agneau de l'Adret, plus lourd et destiné aux grandes surfaces. Le 14 avril 1993, a lieu la pesée des agneaux Les visites d'élevage se poursuivent en mars au centre d'élevage de béliers des Cabarets. Il 1993, contrôles de performances et identificaest procédé en même temps à la taille des ontion des agnelles : MM. Dumas le 19 mars, glons et aux décisions de réforme. GAEC des Ajoncs le 24 mars, EARL GaugeUne réunion régionale, dédiée à l'informatisaMeige le 26 mars (projet de départ dans le tion des contrôles, a lieu le 15 avril 1993, à Doubs). Cézeyriat au siège de la CMRE, Centre mécanoLe 1er avril 1993, les éleveurs de l'Ardèche graphique régional. Sont présents : pour la reçoivent la visite de l'UPRA : Mme Legatte CMRE Mme Voisin ; pour Micheline à SaintUPRA Sébastien Barra ; l' Peray (éleveuse par pour l'EDE du Puy-deailleurs de chiens de Dôme, MM. Gapihan et berger, Briard et imRudel ; pour l'EDE de la pressionnants KoHaute-Loire, Mmes Roche mondor), MM. Bazin et Volle, MM. Montagne Yves (double actif, et Brunelin. Le départeélevage de lapins ment du Puy-de-Dôme angora et produits développe sa méthode locaux) et M. Michel d'organisation basée sur un (élevage plus tradiseul technicien opérant sur tionnel couplé avec 38 élevages et transmettant des volailles) à Saintles données par modem. Sauveur-de- MontaMM. Gerbier, Bernard, Cathalan La Haute-Loire intervegut. nant sur 50 élevages en Une réunion d'inforpesées et 20 en contrôle simplifié, travaille mation et de concertation se tient le 9 avril avec un technicien appuyé par trois peseurs, ce 1993, au centre de Paysat près de Langeac. La qui a tendance à alourdir quelque peu le circuit. vente de béliers Noire du Velay est annoncée Chaque département décrit le matériel de pesée pour le mercredi 5 mai. Les deux organismes et le matériel informatique dont il dispose. évoquent la réorganisation respective de leurs Mme Voisin décrit les missions de la CMRE : services. La Chambre d'agriculture fait le point au niveau de son rôle de CRI, elle sert d'appui sur les élevages en contrôle de performances et au contrôle de performances dans les départesur l'évolution du logiciel CPOV, Contrôle de ments de sa zone ; au niveau national, elle a performances ovins viande. Le groupe référenpassé un contrat avec l'Institut de l'élevage ces est constitué de 13 fermes réparties sur le pour gérer le logiciel CPOV. La phase expéridépartement. Les groupements de producteurs mentale menée avec les départements de vont vers une union COPAGNO, réunissant Col'Aveyron, du Puy-de-Dôme et de la Hautepa-Haute-Auvergne (Cantal et Haute-Loire) et Loire devrait donner lieu à un bilan présenté en Copa-Dômes (Puy-de-Dôme), basée à Saintjuin au Comité de pilotage qui décidera de sa Beauzire (Haute-Loire) et animée par Guy généralisation ou non. Chaque nouveau logiciel Marchand. Par ailleurs une plateforme ovine, nécessite une formation des utilisateurs. ChaARCADIE, remplacerait l'entité Centre-Sud, que modification du logiciel a un coût facturé dans un grand Massif-Central, chargée de la au client. Il a ainsi été constitué un fond percommercialisation des animaux d'élevage et de mettant de procéder rapidement aux modificaboucherie, en particulier les agnelets avec un tions essentielles et urgentes, pour pallier aux volume estimé à 260 000 têtes. Il s'agit de lenteurs d'un financement direct par le miniscontrer et de concurrencer OVINPEX, une orgatère. L'après midi est consacrée aux détails des nisation privée. Emmanuel Coste présente les transmissions des informations entre EDE et activités de la SOFRAG holding active dans la CMRE et des délais transmission/retour sur site. vente d'agneaux en carcasses avec un volume L'assemblée générale de la section a lieu le 5 de 500 000 têtes dont 60 % en découpe (SICA mai 1993 en matinée, aux Cabarets chez Roger Grillon, France Agneau Lyon, Sisteron, Alpes et Yvonne Bernard. Un programme génétique Provence Viande (APV). Elle présente le Grilplus « musclé » avec recours à l'IA est en cours lonnet, agnelet de 12 kilos de carcasse en dé- LES DOSSIERS NOIRS (suite) 2 sation mériterait aussi un développement comme l'aspect environnemental et le rôle du mouton. Le déroulement de la journée pourrait être le suivant : matin consacré aux diverses visites, en car, avec accompagnement et commentaires ; après midi une présentation de l'UPRA, les aspects économiques et filière, races rustiques et gestion de l'espace. L'organisation du Sommet de l'élevage est ensuite précisée. Position plus centrale et plus grande sur- de réflexion. L'après midi, 50 béliers sur 64 entrés en centre, issus de 17 élevages, sont proposés à la vente à des prix variant de 1600 à 2100 francs selon leur valeur génétique. La section Bizet tient son assemblée générale et sa vente de béliers le 18 mai 1993. La Compagnie nationale du Rhône expérimente un entretien des rives du fleuve avec un lot de 10 femelles Bizet. Un lot de 145 agneaux lourds a été commercialisé pour la fête musulmane de l'Aïd avec l'entreprise Isnard. La section compte actuellement 18 élevages dans 8 départements, soit environ 4 000 femelles. L'orientation de la race vers une « aide aux races menacées de disparition » semble se confirmer. Il faudra cependant une dérogation car l'effectif actuel est supérieur aux recommandations, en jouant sur la dispersion géographique de la race et la nécessité de pratiquer du croisement industriel. Ce classement implique un maintien des effectifs sur une période de 5 ans et apporte un financement de 300 francs par UGB. Le centre d'élevage de béliers présente à la vente 15 jeunes mâles sur les 21 entrés. Il conviendra de trouver une autre implantation pour le centre car la ferme de Bonnefont engage une conversion en agriculture biologique et ne pourra donc plus l'abriter. Une réunion technique UPRA se tient le 7 juin 1993 au siège à Marmilhat. Un conseil d'administration est prévu en juillet sans doute à Brioude : élections du bureau et du président, fonctionnement de l'UPRA et des sections, positionnement par rapport à la filière, politique de promotion et de communication. L'assemblée plénière devrait de dérouler en septembre avec en ligne de mire un forum des financeurs fin octobre. En terme de promotion, les grands moments sont toujours le Sommet de l'élevage à Cournon en octobre et le Salon de Paris au printemps 1994. Le nouveau papier à en-tête "Races des Massifs" est en impression. On en vient à la philosophie du Forum destiné aux financeurs (OFIVAL, Ministère, FIDAR, Région, DRAF, Conseils généraux et régionaux...), organismes divers et aussi grand public. Il s'agit de présenter l'UPRA, sa base de sélection, son fonctionnement, ses outils et partenariats et finalement ses besoins de financement. Les supports devraient être des montages diapos ou vidéos, plutôt courts et réutilisables en particulier dans l'enseignement agricole, et aussi des visites bien ciblées : élevages sélectionneurs, centres d'élevage et SCI, laboratoire d'IA, lots d'agnelles vieillies... La filière de commerciali- Emmanuel Coste face d'exposition devraient assurer une plus grande visibilité de nos stands. Aire de démonstration et tunnel abritant le concours spécial Rava représentent 400 m2. Chacune des six races choisit ses options de présentation : race pure, femelles F1 et produits. Les visites d'élevages, après leur franc succès de l'an passé, seront reconduites. Nos techniciens porteront blousons sans manches et badges. Les chemises cartonnées plastifiées seront utilisées pour délivrer les dépliants de race. Le salon de Paris n'attire aucune remarque particulière. Le 10 juin 1993, se tient à Paysat près de Langeac, l'assemblée générale de Fedatest. Après lecture et approbation du PV de l'année précédente, le rapport d'activités déroule fonctionnement et résultats du troupeau. Les acheteurs de béliers de croisement à Berrytest se sont regroupés dans la zone sud et sont demandeurs de 750 béliers. Les races à viande ont du mal à fournir des béliers améliorateurs en boucherie. Le compte rendu financier fait ressortir une bonne santé de l'entreprise grâce à une bonne maîtrise des charges et à une réduction des investissements ce qui pénalise un peu l'avenir. Les résultats du troupeau sont corrects mais les subventions plutôt en baisse entraînent une absence de résultats et donc, sans autofinancement, une difficulté à investir. Le prévisionnel 3 contrôlent 650 béliers. Les agnelles commercialisées atteignent un volume de 4000 environ. 20 béliers sont en testage, en ferme et à la station de Fedatest. En Préalpes, les effectifs sont de 12 000 femelles dans 58 élevages. Le testage a démarré en 1989, la SCI en 1991 après une étape par un centre d'élevage de béliers. En 1992, la SCI comprenait 300 béliers. Les IA se répartissaient de la façon suivante : 1200 de testage, 1200 en accouplements raisonnés, 2500 de diffusion hors base de sélection. La Limousine pratique un schéma de testage exclusivement en ferme. Le protocole de testage devrait être le suivant dans les années à venir : - autonomie du testage en ferme pour les 3 races Lacaune, Préalpes et BMC en 94/95. - aspect intra-race, étude des antagonismes effets directs / effets maternels devant entraîner une confirmation ou une inflexion du schéma. - évaluation des races et de leur complémentarité ou en partant du principe qu'il y a trop de races en France, création d'une Blanche du 1993, laisse présager une hausse des charges (finition des agneaux selon le protocole expérimental, augmentation de l'effectif du troupeau, stabilisation des charges de personnel) et une augmentation des ventes d'agneaux. Le résultat devrait être cependant légèrement négatif. Dotation du ministère (44-50) et dotation Montagne devraient connaître une baisse de 15 %. FEOGA et PDZR sont identiques. Les collectivités territoriales financent des investissements mais pas du fonctionnement. On aborde aussi diverses questions d'avenir : rôle du mouton dans l'aménagement du territoire, testage sur les qualités maternelles, vérification de l'effet et de l'intérêt du croisement, rameau "Blanc du Sud ". Chaque race présente à Fedatest détaille son schéma de sélection. La Lacaune viande se positionne parfois en diversification du lait. OVITEST travaille sur prolificité et valeur laitière tout en préservant une conformation correcte pour la filière viande (qualités bouchères). La sélection s'appuie sur une cinquantaine d'éleveurs sélectionneurs et 13 000 brebis. Cette base est un peu insuffisante mais il est difficile de motiver les éleveurs. Le principe est la mise en testage sur descendance nécessitant 70 % des femelles en IA. Elle implique une propriété collective des béliers, moitié produit d'IA et moitié en testage. La SCI entre 200 à 300 béliers par an, sur qualités maternelles, 100 vendus hors base de sélection et 50 mis en testage choisis dans la moitié supérieure. Ils sont contrôlés sur croissance, développement et état d'engraissement. Au final, 4000 IA sont réalisées à raison de 100 par bélier en testage. 300 à 500 sont faites à Fedatest considérée comme une ferme normale. Des agnelles laitières sont utilisées comme support de testage pour mesurer qualités maternelles et qualités viande. Annuellement en terme de diffusion sont pratiquées : 8 000 IA de diffusion « qualités maternelles » hors base de sélection, 25 000 autres IA, 100 béliers de la SCI, 2500 agnelles, le tout hors base de sélection. La Blanche du Massif-Central s'appuie sur 86 élevages et 31 000 femelles en contrôle. Le testage a débuté avec 6 béliers puis 8 en ferme, ce qui s'étant révélé insuffisant, a impliqué un retour à Fedatest. En 1991, une redéfinition du schéma de sélection a entraîné une plus grande implication des éleveurs grâce à un logiciel d'accouplements raisonnés. En 1992, 5500 IA dont 2500 de testage ont été réalisées. En 1993, la structure en prévoit de 6500 à 7000 dont 1000 à 1500 de diffusion. Les 2 stations Sud. Comment organiser la continuation, croisements alternatifs avec renouvellement : Lacaune 2/3 x BMC 1/3 x mâles BMC = BMC 2/3 x Lacaune 1/3 x mâles Lacaune... Le troupeau actuel de Fedatest comprend 1200 femelles. Des IA ont été pratiquées en mai 1992 avec des béliers Lacaune et Préalpes, les retours assurés par des BMC. Les agneaux nés en octobre 1992 sont dans un protocole d'étude de carcasses et d'effets directs. Un lot de lutte de 350 brebis en septembre 1993 et agnelant en février-mars, donne lieu sur les agneaux à une étude de carcasses et d'effet grand-père maternel. Les autres agnelages se déroulent en octobre 1994 et février 1995. A partir de 1995, se pose la question de l'orientation de l'outil Fedatest ? Les effets grand-père maternel sont importants et l'on peut s'orienter vers une brebis « moule à agneaux » avec un 4 mie), valorisation et entretien des zones géographiques difficiles (espace), maintien et préservation du monde rural (social). Il convient de bien affirmer la finalité économique en priorité en se plaçant sur le terrain de la gestion de l'espace et de la finalité sociale. Les objectifs sont précisés : améliorer les performances techniques et la rentabilité des troupeaux de sélection ; accentuer la diffusion du progrès génétique au-delà des bases ; conforter et élargir les bases de sélection. Le point faible de l'organisation est la commercialisation. Une étude de faisabilité financée par la CEE est envisageable mais le coût d'un commercial semble prohibitif au vu de nos financements. Une approche globale, sorte de « joint venture » avec des partenaires locaux, semble plus réaliste. Un éventail des potentialités devrait être présenté au prochain conseil. Le projet technique est affiné : poursuivre le travail de détection (contrats génétiques, élargissement de la pratique de l'IA pour améliorer la connexion et accélérer le progrès génétique), développer des outils plus performants : modèle animal pour la valeur laitière, CPOV au niveau des EDE, logiciel de gestion UPRA, logiciel éleveur à des fins de gestion de troupeau, gestion de la variabilité génétique au sein des races, préservation du potentiel de rusticité ; promouvoir la diffusion des reproducteurs ; promouvoir le rôle de l'UPRA dans les filières ovines, dans le secteur agricole en général, dans les domaines de l'entretien de l'espace et de l'aménagement du territoire. Un chapitre est consacré à la promotion/communication : diffusion du nouveau visage de l'UPRA, réalisation de nouveaux supports de promotion, participations aux manifestations locales et régionales, formation du personnel aux techniques de communication, édition d'une lettre de communication interne, organisation d'une journée « forum des financeurs » départementaux, régionaux et nationaux. Le travail génétique engagé a indéniablement un intérêt économique : maîtrise du standard phénotypique, sélection sur les qualités maternelles, évaluation des qualités bouchères des béliers au sein des SCI. La définition des fonctions de chacun devrait faciliter une bonne gestion des ressources humaines. Un point est fait sur les marchés d'exportations. L'Espagne demande de petits agneaux de type Lechal (6 kilos de carcasse) et Ternasco un peu plus lourd. C'est une demande saisonnière, globalement de décembre à mai, et changeante d'une année à l'autre. La tendance n'est pas très objectif de croisement, ou bien sélectionner en race pure sur les qualités bouchères, ou adopter une position médiane en destinant au croisement la part des effectifs non intéressante génétiquement. La grosse masse des agneaux produits l'est en race pure et la filière ne peut s'en désintéresser. Elle s'est orientée vers la découpe à 80 % contre 30 % seulement antérieurement. La région présente un réservoir unique de femelles rustiques bien adaptées à leur contexte environnemental. Une réunion départementale avec la DDA, le 22 juin 1993, fait le point sur les références ovines en Haute-Loire. La PCO 1992 s'établit à 1135 bénéficiaires et 142 625 femelles primées. En 1993, elle est en nette augmentation avec 1191 élevages et 156 459 animaux. Le dépassement est de 28 300 femelles mais on note 14 500 sous-réalisations qu'il s'agit de mobiliser en particulier par un courrier de la DDA. L'UPRA Races Ovines des Massifs tient un conseil d'administration à Brioude le 7 juillet 1993. Sont traitées en introduction des questions pratiques : modalités de fonctionnement, date et lieu de l'assemblée générale ; fréquence, dates et lieux des conseils (Brioude, Lempdes) ; commissions de travail thématiques définies par le conseil : commission administrative et financière, génétique, filière, promotion. Il est aussi convenu d'utiliser les nouvelles méthodes de communication pour accélérer communication et diffusion des informations. Le conseil procède ensuite à l'élection du bureau : président M. Coste Emmanuel ; un viceprésident par région de programme : Mme Coudert pour le Limousin, M. Rousset Languedoc-Roussillon, M. Cousteix Auvergne, M. Saint-Lager Rhône-Alpes ; M. Leydier Maurice secrétaire ; M. Chauvel Jean-Luc trésorier. La nouvelle entité regroupe 74 000 brebis (1/3 des femelles de la zone) et 259 adhérents. La Haute-Loire arrive en tête des départements. Les finalités de l'UPRA sont rappelées : amélioration de la compétitivité des élevages (écono- 5 té (viande de pays, plaisir gustatif...) COPAGO présente la démarche SOFRAG, association comprenant groupements et abatteurs autour de la valorisation d'un produit certifié : l'agneau de l'Adret. La démarche est centrée sur la traçabilité du produit de l'éleveur au distributeur, sur un cahier des charges et toute une panoplie de promotions. Le type d'agneau est classique : conformation U et R, gras faible et clair, apport régulier sur l'année. L'objectif serait de 20 000 agneaux dans un premier temps avec une valorisation supérieure de 10 à 15 %. COPAGNO expérimente la démarche auprès de 10 à 15 éleveurs. L'embauche d'un commercial est encourageante en raison de la crise économique en Espagne, du tassement de la consommation et des difficultés des entreprises. Cette production se ressent aussi de l'internationalisation des échanges, de l'intérêt marqué des centrales d'achat et de la recherche d'un produit standard à bas prix, de la concurrence du Royaume Uni et de l'Irlande. Pour l'Italie, la période favorable s'étend de Pâques à mai / juin. La demande est diverse : agneaux légers, agneaux plus lourds, brebis. Cette demande a été accrue en 1993 par l'irruption d'une épidémie de fièvre aphteuse, et ne se renouvellera sans doute pas. Le positionnement commercial sur l'Espagne se caractérise ainsi. La saison optimale est du 14 juillet au 15 août et ensuite du 15 novembre au 15 décembre et à Noël. Elle varie selon les années. La demande est variée : agneaux rustiques de bergerie, agneaux légers de 24 à 28 kilos vif, agneaux à viande peu colorée et bien finis. Le demande semble se resserrer sur ce dernier type de produit. Sont pénalisés les agneaux non finis, bourrus, trop âgés et parfois les races pigmentées. COPAGNO dévoile sa stratégie commerciale, à savoir participer à la construction d'une plateforme ovine nationale. Elle y trouve un intérêt en matière de poids commercial, garantie de paiement, éventuellement une politique de produits identifiés, un accès à l'information et une gestion transparente. Les contraintes sont cependant nombreuses : marché fluctuant, imprévisible et spéculatif, difficultés à réguler volumes et qualités. Il en résulte des difficultés à prévoir et donc à informer les adhérents. Le marché se resserre en terme de prix et de qualité. Quant au marché français, nous sommes positionnés essentiellement sur le débouché naturel des agneaux rustiques et en particulier le Sud-Est. Les critères de qualité sont bien connus : homogénéité en terme de poids, teneur en gras et conformation, taille de lot suffisante, poids inférieur à 18 kilos de carcasse, couleur claire de la viande, bon état d'engraissement en quantité et qualité, conformation minimale. Ce dernier critère est important en vente en carcasse, un peu moins en découpe bien qu'il conditionne un bon rendement et une proportion supérieure de morceaux nobles. La valeur relative de la peau est toujours à la baisse. La consommation a beaucoup évolué dans le temps. En 1970, l'essentiel était une production de milieu de gamme. En 1990, le haut de gamme est plus important. Pour le consommateur la qualité tient à la qualité intrinsèque mais aussi à l'image de la quali- envisagée au niveau de l'association comprenant actuellement les SICA de Grillon et de Rémusat ainsi que la société Filliat de SaintEtienne. L'association travaille aussi sur un agneau de lait destiné au marché français : le Grillonnet . C'est un agneau léger d'une carcasse inférieure à 12 kilos, bien fini, à viande claire, d'origine rustique. Ce créneau commercial écoule actuellement 300 à 400 agneaux semaine avec un objectif de 500 à 600. Le prix réglé au groupement varie de 350 à 370 francs. La contrainte est la régularité de fourniture sur l'année. COPAGNO s'est fixé un objectif de 200 agneaux semaine en 1994. Ces marques évoluent dans un contexte concurrentiel. "Arcadie agneau languedocien" propose des équivalents du Grillonnet : agneau Cathare, Catalan et de Nîmes. L'agneau de l'Adret évolue sur la même ligne qu'Elovel (Lozère), AFQP, agneau français de qualité bouchère. Après cet ordre du jour chargé, le conseil se sépare en fixant la date de l'assemblée générale au 20 octobre à Brioude. Le 13 juillet 1993, se tient à Brioude, une réunion technique concernant les logiciels informatiques. Elle réunit l'UPRA (MM. Barra, Perrin), les EDE du Puy-de-Dôme (MM. Gapihan, Rudel) et de la Haute-Loire (Mme Volle, M. Brunelin), et des éleveurs représentants les commissions de contrôles de performances (MM. Chauvel, Delabre, Rousset). La démarche est nationale mais avec implication de l'UPRA. Faut-il se raccrocher à des outils exis6 technique avec gestion des données commerciales. Une liaison avec CPOV est prévue. Se pose aussi le problème de la maintenance de ces outils informatiques. Elle est assurée actuellement de façon fiable par les ARSOE, ateliers régionaux de saisie dans la chaîne officielle. Cette maintenance est corrective dans le respect d'un cahier des charges et évolutive quand il s'agit d'ajouter d'autres fonctions (nouveau cahier des charges). On peut se poser aussi la question : quelle société privée est en mesure de s'investir sur un logiciel ovin « peu porteur »? Le logiciel développé par l'UPRA s'intéresse à la gestion des fichiers raciaux, au programme d'accouplements raisonnés, aux valorisés fournis aux éleveurs, à la gestion d'un fichier éleveur. Il côtoie un logiciel national développé par l'ALGO en cours de test. La situation actuelle est assez contrastée. Il semble plus difficile d'adapter un produit à l'existant national que de « bricoler » un programme local. Aussi les éleveurs en contrôle officiel qui ont le plus d'informations ont paradoxalement le moins de retour et de valorisés ! Il est temps de sortir de cette situation pour le moins paradoxale : un CPOV allégé, greffer la demande sur INDICE +, un autre logiciel sobre, avec des fonctions réduites et des sorties efficaces ? (à suivre…) tants ou carrément concevoir un outil nouveau ? De forts besoins ont été exprimés au colloque de Brioude. La présentation d'un précahier des charges a été reprise par l'Institut de l'élevage. Une enquête envoyée à 25 éleveurs pressentis et intéressés par un logiciel (retour de quinze questionnaires sur 25 envoyés) met en évidence quelques demandes fortes : tenue inventaire permanent, aide au choix du renouvellement, constitution des lots de lutte, et à un degré moindre planning de lutte, choix des réformes et bilans techniques. Le besoin est donc d'un logiciel pour les sélectionneurs avec nécessité de récupérer les données de contrôle de performances ovin. Le logiciel CPOV, Contrôle de performances ovin viande, pourrait convenir avec une décentralisation de la saisie sur les EDE et à terme un retour d'information dans l'élevage et une alimentation du logiciel par l'éleveur. Se posent de complexes problèmes à résoudre comme la standardisation du matériel et la constitution d'interfaces. Plusieurs logiciels existent actuellement. CPOV est le logiciel utilisé par les EDE pour la gestion du contrôle de performances ovin. Il est géré par des techniciens et prend en compte tous les événements du troupeau : lutte, inventaire, mise-bas, pesées. En lien avec le CTI, il produit des valorisés officiels (états agneaux et état brebis, fichier agneaux). La première version incluait une gestion de la commercialisation. Un module exportation des données pouvait permettre la valorisation ou l'exportation des données vers un tiers possédant un logiciel standard. INDICE + a été conçu en Limousin pour des éleveurs non sélectionneurs. Il est strictement intra-troupeau. Il gère diverses informations : inventaire, mise-bas, pesées simplifiées, prévision de mise en lutte et fournit diverses sorties : fiche carrière brebis, module aide au choix des réformes, bilan technique, généalogie, recherche de filiation, maladies, conditions d'agnelage, luttes infertiles, détection des brebis vides. La voie mâle n'est pratiquement pas gérée. Un petit module de sélection permet une indiciation. Certains fichiers sont exportables. Une importation est possible avec CPOV notamment. Ce logiciel est utilisé par une vingtaine d'élevages en Limousin, par un technicien dans l'Allier et le Puy-deDôme, en Lorraine et Haute-Normandie (10 éleveurs). Il nécessite un important travail de saisie par l'éleveur. En PACA/Midi-Pyrénées démarre la programmation d'un logiciel d'appui PS : nous avons appris le décès de JeanJacques Merle le 26/05/2016 à Chalinargues dans le Cantal à l'âge de 68 ans. Jean-Jacques avait succédé comme directeur de Copa-HauteAuvergne à Michel Souvignet en 1982. Il quittait la direction du groupement en 1992 lors du regroupement avec Copa-Dômes. Guy Marchand prit alors la direction de la nouvelle entité COPAGNO. 7 de tout et les effets du Plan Marshall tarderaient à porter leurs fruits. Il s'installe agriculteur en polyculture-élevage sur la ferme familiale. Officier de réserve de l’armée de l’Air, il est rappelé en Algérie en 1956. Son ascension syndicale et professionnelle Au retour du lycée, il milite dans le syndicalisme « Jeunes agriculteurs » dont il franchira rapidement les niveaux de responsabilité pour en devenir le président de 1964 à 1968, à la suite de Michel Debatisse, fer de lance de ces jeunes générations de paysans encouragées par la volonté de réforme de la Vème République naissante. Il occupe ensuite le poste clé de secrétaire général de la FNSEA de 1975 à 1979 puis la présidence de 1979 à 1986. Les ministres de l'agriculture sous la Vème République Notice biographique Né le 19 octobre 1932 à Ville-en-Vermois (Meurthe et Moselle) dans une famille d’agriculteurs, François Guillaume fait ses études secondaires à Nancy. Chef d’exploitation agricole en Lorraine, il est président de la puissante FNSEA de 1979 à 1986. Après les élections législatives de mars 1986, gagnées par la Droite, François Mitterrand nomme Jacques Chirac premier ministre. François Guillaume accède alors au poste de ministre de l'agriculture du 20 mars 1986 au 10 mai 1988. Une enfance paysanne François Guillaume décrit son enfance dans son livre « Un paysan au cœur du pouvoir » paru en 2014 aux éditions De Borée dans la collection Témoignages. Né dans un village de Lorraine, il fréquente l'école communale où la grande fierté des maîtres de l'époque est d'envoyer les meilleurs de leurs élèves à l'Ecole Normale. Il participe aux travaux de la ferme dans cette société encore très traditionnelle décrite dans son ouvrage, structurée autour de personnages hauts en couleurs et respectés de tous : l’instituteur, le curé, le maire et de détenteurs de savoirs millénaires : le berger, le forgeron, le distillateur, le marchand de bestiaux... Il les met en scène dans ses souvenirs d'enfants. Nous ne résistons pas au plaisir de reprendre en annexe son savoureux portrait du berger. François Guillaume se dit très influencé par ses grands-pères, véritables patriarches très attachés à la terre. « Mon grand-père maternel était bon par nature, taquin et aussi soudainement emporté qu'il était jovial quelques minutes auparavant... Mon grand-père paternel était tout différent. C'était un patriarche au sens dominateur du terme. Sévère et fier, il n'admettait aucune faiblesse, ni pour lui ni pour les autres. Ses jugements étaient péremptoires et personne, parmi ses fils, n'osait les contester... » François quitte à 11 ans l'école primaire et l'insouciance de l'enfance, pour entrer à Nancy au collège de Malgrange tenu par des prêtres, dans l'ancienne résidence d'été de Stanislas, duc de Lorraine, puis à Saint-Sigisbert. Le recrutement est plutôt bourgeois et le jeune paysan n'est pas trop à son aise. L'éducation est spartiate et la nourriture frugale du fait des réquisitions allemandes. Il vit la honte de l’effondrement militaire de la France en 1940, l’occupation allemande, les maquis avant que la Lorraine ne soit libérée par les Alliés. Pourtant « les lendemains qui chantent » ont tardé à venir. L’agriculture sinistrée de l'après-guerre manquait Michel Debatisse et François Guillaume Ses engagements sont multiples. Au titre de ses fonctions syndicales, il siège au Conseil économique et social de 1964 à 1968 puis de 1979 à 1986 ; au Comité économique et social européen de 1975 à 1979 ; il préside le Conseil économique et social de Lorraine de 1980 à 1986. Dirigeant syndical, il participe à l’élaboration des lois d’orientation agricole de 1960 et 1962. François Guillaume sera l’un des artisans des « trente glorieuses » de l’agriculture française, autosuffisante dès le début des années 1970 et 1er pays exportateur mondial de produits agroalimentaires devant les États-Unis. Ce bond prodigieux devra être tempéré au niveau européen par une Politique agricole commune (PAC) source de bien des affrontements. Il oeuvrera aussi dans sa Lorraine natale. Pour aider les agriculteurs à s'adapter aux techniques et à l’économie modernes, il fonde et préside de 1964 à 1995 l’Association lorraine pour la promotion en agriculture, un centre de formation pour adultes situé à Haroué doté d’un internat et d’une ferme d’application pratique de la formation. Attaché à la participation des agriculteurs à la protection du milieu naturel et à l’embellissement des villages lorrains, il incite à la 8 création du Parc naturel régional de Lorraine qu’il préside de 1971 à 1980. Président du Comité économique et social de Lorraine de 1980 à 1986, François Guillaume s’efforcera de préserver du démantèlement la sidérurgie lorraine, menacée par la préférence accordée alors aux sites sur l’eau : Fos-sur-Mer et Dunkerque. Il obtiendra du chef de l’État, en avril 1984, un arbitrage qui préservera pour 20 ans l’essentiel de l’outil industriel lorrain. Président de Saint-Hubert Industrie Laitière (700 salariés) de 1981 à 1990, il oriente la société vers de nouveaux produits : beurres allégés, yaourt au bifidus actif en complément des transformations laitières traditionnelles : lait UHT, fromage. En 1983, il publie « Le Pain de la Liberté » aux Éditions Jean-Claude Lattès. Edith Cresson et le Syndicat du livre lui auraient mis des bâtons dans les roues à cette occasion. Cet ouvrage retrace son engagement syndical agricole, puis politique pour un dialogue Nord-Sud équilibré, et sa vision des problèmes de développement du Tiers-monde. C'est un plaidoyer pour une profession qui assume sa mission : Nourrir les hommes. Ministre de l'agriculture A la tête de la FNSEA, François Guillaume a affirmé sa forte personnalité et son talent de tribun, dans le contexte difficile de l’arrivée au Pouvoir de la Gauche en 1981 et de celle d’Edith Cresson à l’Agriculture qui prétendait « casser le monopole de la FNSEA ». C’est elle qui dut finalement abandonner la partie après la puissante ministre de l'agriculture. Avant qu'un nom soit prononcé, François Guillaume aurait déclaré sans hésitation : « Moi, je suis prêt ». Jacques Chirac encaisse et pourquoi pas : François Guillaume a suffisamment donné pour le RPR et il n'est pas inintéressant de le voir à l'œuvre. Il est donc adoubé et contacte Raymond Lacombe, secrétaire général de la FNSEA, pour lui annoncer « sa nomination ». Ils ne pourront même pas se rencontrer et Raymond Lacombe réunit un petit comité qui le charge d'assurer l'intérim. Il sera ensuite élu pour succéder à François Guillaume. Ce dernier prendra souvent mal les critiques de la FNSEA sur son action au ministère, alors qu'il lui semble faire son possible. L'opposition syndicale verra dans cette nomination la mise en lumière de la prétendue neutralité d'une FNSEA, en conflit constant avec les précédents locataires socialistes de la rue de Varennes et du rôle de courroie de transmission du RPR qu'a tenu le despotique François Guillaume au sein du monde paysan, récompensé de ses bons et loyaux services. C'est l'homme du verrouillage du syndicalisme paysan, disent-ils. On peut penser que François Guillaume était sincère mais aussi qu'il avait mesuré les risques de sa démarche qu'il concevait comme une mission de défense de l’agriculture française face aux intérêts contraires américains, allemands ou britanniques et pour appliquer la Politique agricole qu’il revendiquait à la tête du grand syndicat paysan. Son action au ministère François Guillaume se sent bien rue de Varennes malgré ce milieu de courtisans qui n'est pas le sien. Il décrit l'ambiance étrange et crispé des conseils des ministres entre un Chirac exaspéré et le Sphinx Mitterrand. Ce dernier ne semble pas lui montrer une hostilité particulière bien qu'ils se soient opposés sur l'extension du circuit automobile de Magny-Cours qui condamnait le lycée agricole et des terres agricoles. Il dit regretter un peu de n'avoir pas convié plus souvent à sa table des élus influents et des dirigeants professionnels reconnus. Il octroie des « médailles » avec réticence et conteste les priorités. La vie continue sur sa ferme et lors de la relâche estivale des ministres, il conduit la moissonneuse. Il doit aussi se séparer de son troupeau laitier devant la difficulté à trouver un vacher qualifié. Il voit partir ses vaches Frisonnes avec tristesse et les Charolaises ne les supplanteront jamais dans son cœur. En avril 1986, réunis à Luxembourg depuis cinq jours, les douze ministres de l’Agriculture de la Communauté économique européenne ont conclu un accord sur un gel des prix pour la campagne 1986-1987. Ils se sont également entendus sur une manifestation de force des 120 000 paysans à Paris et le triomphe électoral aux élections aux Chambres d’agriculture, test de représentativité du monde paysan. Quant à l'accession au poste de ministre de l'agriculture, les versions divergent quelque peu. Jacques Chirac, nommé premier ministre, a plusieurs personnalités en tête, dont Louis Lauga, ancien président du CNJA et député RPR des Landes. Comme de coutume dans les gouvernements de droite, on demande l'avis de la puissante FNSEA quand il s'agit de nommer un 9 s'exposer à des oppositions dans son propre camp ou dans le camp opposé : congrès viticole à Cognac avec une vive opposition du MODEF, à Lyon dans le fief de Michel Noir ministre du Commerce extérieur, congrès de la FNSEA à Brest, congrès du CNJA avec un « accueil potache »... Fin septembre 1986, s'ouvre à Punta del Este en Uruguay, le cycle du GATT. Les Etats-Unis pestent contre les subventions européennes qui freinent la concurrence. L'Europe est représentée par Paul Tran Van Thinh ambassadeur de la CEE à Genève auprès du GATT, le belge Willy de Klerk commissaire européen aux Relations extérieurs et le néerlandais Franz Andriessen commissaire aux affaires agricoles. François Guillaume s'y rend avec Michel Noir, sans invitation. La CEE accepte finalement la demande des Etats-Unis d'inscrire l'agriculture dans les négociations commerciales et de la faire entrer de fait dans la mondialisation à l'instar des produits manufacturés. Et la Commission européenne réfléchira à une réforme de la PAC pour faire converger le fonctionnement européen avec les injonctions des Etats-unis et de l'industrie agro-alimentaire. « Un succès ambigu » titre en novembre 1986 le mensuel de la FNSEA : « C’est la première fois que (…) la spécificité de l’agriculture n’est pas préservée. Jusqu’à présent, en effet, le secteur agricole avait bénéficié, au cours des précédentes négociations internationales, d’un statut particulier. Une analyse séparée et particulière des problèmes posés semblait être la règle. La pression de ceux qui veulent soumettre l’agriculture aux règles de « droit commun » en sera sans doute renforcée ». En revanche, pour le nouveau ministre de l’Agriculture, François Guillaume, la déclaration d’ouverture du cycle est un texte « correct » et elle « implique les Américains dans les négociations, ce qui est essentiel » (L’Information Agricole, novembre 1986). Ce cycle de négociations se conclura en 1994 par les accords de Marrakech, fondateurs de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). François Guillaume a sans doute fait son possible pour ménager les intérêts de l'agriculture française. Neuf mois après la nomination de son ancien président François Guillaume comme ministre de l’Agriculture, la FNSEA convient dans son mensuel que : « Si la nécessité de maîtriser la production est aujourd’hui admise par tous, les trois premières années (…) ont montré combien la mise en réforme du marché des céréales, avec l’instauration d’une taxe de 3 % permettant de financer les excédents. Sans avoir obtenu tout ce qu’il réclamait, François Guillaume se satisfait du démantèlement de moitié des montants compensatoires, qui autorisera les agriculteurs français à une légère hausse des prix (1,5 % pour le vin et les céréales et 3 % pour la viande bovine et le lait). En mai 1986, la catastrophe de Tchernobyl met le gouvernement dans l'embarras. Peu de ministres osent une communication sauf le ministère de l'agriculture en conformité avec l'expertise du professeur Perrin chargé de la surveillance de la radioactivité des territoires : « Le territoire français, en raison de son éloignement, a été totalement épargné par les retombées radio nucléaires ». Quelques lignes plus loin, il se contredit, puisque « les hausses de radioactivité observées n’ont pas posé le moindre problème d’hygiène publique ». Trente ans après, dans un interview, François Guillaume persiste et signe : « Il y eut une grande victime, le Professeur Pellerin (fondateur et directeur du service central de protection contre les rayonnements ionisants), accusé d’avoir volontairement minimisé le risque, alors qu’il avait fait tout ce qu’il fallait. Il a observé qu’aucun problème d’hygiène publique ne se posait, mais il a échoué à se faire entendre, parce que tous les médias étaient contre lui. Comme dans la chanson de Guy Béart, à l’instar de celui qui dit la vérité, il a été exécuté... Il n’était pas possible de faire reconnaître la vérité scientifique. Le premier jet de retombées radioactives n’est pas venu en France mais en Suède. Tout est arrivé seulement ensuite, quand il a commencé à pleuvoir. J’étais le plus directement concerné, parce que mon domaine touchait les consommateurs. Il fallait réagir. On a interdit la consommation des épinards en Alsace, puis à Avignon et en Corse celle des salades. Le quart Nord-Est a été touché plus tard. Nous avons cédé à la pression des médias et demandé aux producteurs de lait de maintenir les vaches à l’étable, mais quand des champignons arrivés de Pologne ont été vendus, bizarrement personne n’a protesté. Notre plus grande crainte était que la population s‘affole et se rende dans les supermarchés en vue de stocker de la nourriture..." Dès le début de son mandat, il se rend aux invitations des organisations agricoles quitte à 10 application a été difficile et la prise de conscience pour privilégier les aides directes aux producteurs. douloureuse. » (L’Information Agricole, décembre Ce conseil a aussi débloqué la question de la taxe 1986). Il est vrai qu’avant sa nomination, François européenne sur les matières grasses d'origine Guillaume n’avait cessé de parcourir la France, végétale. effectuant une sorte de campagne électorale François Guillaume, ministre de l'agriculture, dans parallèle à celle de sa future majorité "La Lettre du ministre de l'agriculture" d'octobre parlementaire et martelant le même 1987, présente le projet de loi de mutualisation du discours : « Les excédents sont une chance pour la Crédit agricole, intitulé "Mutualisation du Crédit France, il faut continuer à produire et les quotas agricole : une réforme de bon sens". La loi du 18 laitiers ne sont que le résultat d’une politique janvier 1988 relative à la mutualisation de la malthusienne et sans ambition Caisse nationale de des socialistes au crédit pouvoir » (cité dans agricole finalise Vercherand, 1994). C'était cette réforme aussi le refus de toute consistant à racheter collaboration avec l'Etat à l'Etat la CNCA, Caisse nationale de socialiste alors qu'à la FNSEA crédit agricole. les avis divergeaient. Marcel Raymond Lacombe, Deneux, président de la FNPL, président de la Fédération nationale de FNSEA, n'y était pas producteurs de lait, était François Guillaume, Philippe Séguin, favorable ni Jeanfavorable à un Jacques Chirac Paul Huchon alors contingentement et se directeur de la CNCA présentait même comme pour des raisons que l'on peut comprendre. l'auteur des quotas qu'il avait découvert lors d'une Son action au ministère est interrompue par la visite professionnelle au Canada. François victoire de François Mitterrand au scrutin de mai Guillaume demandera même l'exclusion de Marcel 1988. Henri Nallet revient aux affaires. Deneux. Cette attitude desservira la profession car la politique des quotas sera gérée par les La première bataille législative perdue Jacques Chirac prépare alors les échéances entreprises laitières au détriment du Conseil législatives de juin 1988 et se montre soucieux du national interprofessionnel de l'industrie laitière, CNIL. devenir de ses ministres en laissant à chacun le Une fois parvenu à la tête du ministère, non choix de sa circonscription. Il lui propose Villefranche-sur-Saône ou la 3ème circonscription seulement il ne supprime pas les quotas comme beaucoup de producteurs l'espéraient, mais il doit de Meurthe-et-Moselle. François Guillaume accepter une nouvelle réduction de la production n'accepte ni parachutage, ni autre circonscription laitière. Paradoxe de la politique, bien plus tard, la que celle de sa ferme, le Lunévillois fief d'une FNPL et la FNSEA se feront même les défenseurs UDF hostile aux gaullistes et dont l'ancien député convaincus des quotas quand leur suppression sera René Haby considère cette candidature comme annoncée lors de la réforme de la PAC dite « à miune usurpation. Il fait campagne sur les thèmes suivants : sortir la circonscription du marasme parcours » en juin 2003. économique et social actuel par la relance de Les montants compensatoires monétaires, MCM, l’emploi, l’appui concret aux entreprises et le sont une technique utilisée depuis 1969, pour désenclavement, la formation, les services neutraliser les effets d'une variation des taux de sociaux, la revitalisation du secteur rural, le change entre deux pays, grâce à une unité de classement de la circonscription en zone compte européenne baptisée écu. Toutes les fois bénéficiant des concours financiers européens. Il que la monnaie d'un pays membre se dévalorisait, est battu par le candidat du Parti socialiste. Il met les prix garantis dont ses producteurs agricoles son activité politique sous le boisseau, se consacre bénéficiaient étaient revalorisés d'autant en à sa ferme et passe plus de temps à la présidence monnaie nationale. Mais, pour éviter que ce de la laiterie Saint-Hubert. La coopérative Sodiaal surcroît de revenu ne les avantage, il avait été acquiert St Hubert en 1990 et recentre les activités décidé que ce surcroît de revenu ne s'appliquerait de l’usine de Ludres sur la fabrication de corps pas aux exportations, grâce à une taxe appelée gras allégés. Le lait et les produits frais tels que «montant compensatoire monétaire». Ce dispositif les yaourts sont repris par d’autres usines de a été supprimé en 1987, à l'issue du Conseil Sodiaal. François Guillaume démissionne ou est européen de Bruxelles des 29 et 30 juin, lorsque la débarqué selon les versions. Cet échec et le PAC européenne a abandonné les prix garantis 11 Renonçant à ce mandat, il laissait la place à la candidature de Gérard Longuet (UDF/RI). François Guillaume brigue aussi la tête de liste mais renonce, à la demande de Jacques Chirac, pour laisser la place à Gérard Longuet devant le soutenir à la présidentielle de 1995. En compensation, on lui propose un poste de vice-président, titre honorifique et lucratif, qu'il décline. Au Conseil régional, il va obtenir le classement du Lunévillois en zone fragile donnant accès aux fonds de revitalisation rurale. Député Il est élu aux législatives d'avril 1993, au second tour, malgré un Front national à 16 %. Il pense bien s'impliquer dans le développement local mais aussi tenir sa place à l'Assemblée. Il est membre et vice-président de la Commission des affaires étrangères, membre de la délégation de l'Assemblée nationale pour les communautés européennes. Comme au Parlement européen, il découvre les arrangements entre amis, les intrigues de cour, les coteries, les dérives coupables des élus et de leurs partis politiques. En déplorant l’absence d’exemplarité, les jeux politiciens, les combines, les arrangements de complaisance, les scandales tenus sous le boisseau, il dérange ; mais il prend la défense de ceux qui se sont refusés à toute compromission et qui n’ont pas dérogé à la déontologie de l’élu. Il marque ses distances avec les promotions politiques trop rapides qui portent préjudice à la saine gestion des affaires publiques et aux intérêts de la France. N’étant ni intrigant, ni courtisan mais, tout au contraire, rigoureux et direct, il n’a plus la cote auprès de Chirac qui se radicalsocialise pour entrer à l’Elysée et s’y installer pour deux mandats peu convaincants. François Guillaume exerce pleinement le sien au Palais Bourbon hors du clivage Droite-Gauche, ce qui déplait. Détenteur de trois mandats, le parti lui demande d'en abandonner et lui suggère la Région. Il le regrette car il se prive d'une source importante de financement pour son département. Son mandat européen et national nécessite une épuisante navette entre Paris, Bruxelles et Luxembourg. Il ne renouvellera pas son mandat européen en 1994, se consacrant à sa circonscription et à l'Assemblée nationale. Jacques Chirac refuse une deuxième cohabitation et laisse la main à Edouard Balladur dans une atmosphère de fin de règne. François Guillaume déplore en 1994, l'issue défavorable à l'Europe de l'Uruguay démantèlement de l'entreprise lui laisse « un bleu à l'âme ». Député européen Il postule pour une place dans une liste d'union, mais voit son positionnement reculer inexorablement vers les places inéligibles. Françoise Balitrand, amie et proche collaboratrice, intervient auprès de Jacques Chirac et « le curseur s'arrête à la douzième place ». C'est une « campagne sans saveur et dénuée de passion » à la remorque de VGE. François Guillaume est élu membre du Parlement européen, le 25 juillet 1989, où il est inscrit au groupe du RDE, Rassemblement démocratique européen composé de Français et d'Irlandais bons vivants et abusant du scotch. Il est élu vice-président de l’Assemblée ACP-CEE qui rassemble des représentants de cette assemblée et de 70 pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique. Il y développe sa proposition d’un Plan d’aide au Tiers-Monde préconisant l’organisation des marchés mondiaux pour pallier les fluctuations erratiques des prix agricoles – proposition qu’il avait soutenue à l’Assemblée générale de la FAO en 1987 après agrément par le Conseil des ministres européens de l’Agriculture. Les débats sont assez académiques, les Africains ne pensent qu'à garder leurs douillets postes et ainsi le projet d'organisation des marchés agricoles en faveur du tiers-monde avance peu. Il note par ailleurs le puissant travail de lobbying des grandes firmes internationales auprès des députés. Il siège aussi à la commission de l'agriculture où se préparent les concessions faites aux Etats-Unis dans le cadre du GATT. Il stigmatise à cette occasion le positionnement de Jacques Delors, trop laxiste à son goût. Le groupe RDE, à son instigation, propose une distribution des excédents aux banques alimentaires. Ce mandat se termine le 18 juillet 1994, il en sort désabusé et le qualifie « d'illusion du pouvoir ». Il publiera en 1999 aux Editions Lattès « Le complot des maîtres du pouvoir » , où il dénonce l’Europe technocratique et prône une « Europe des Nations ». Une tentative lorraine En 1992, François Guillaume pense à un mandat au Conseil régional de Lorraine. Il se heurte à des arbitrages nationaux laissant le champ libre à l'UDF leader d'une liste panachée. Le succès devait être au rendez-vous face à la candidature de JeanMarie Rausch, maire centriste de Metz élu en 1986 et entré au gouvernement Rocard en 1989. 12 l'agriculture qui ne peut s'accommoder du libreéchange généralisé. François Guillaume se consacre à ce combat contre la faim dans le monde, au sein de l'association "le Plan Guillaume pour un nouvel ordre économique mondial", articulé autour de 4 axes : une « Opep » des produits agricoles ; la mise en place de marchés communs dans l’hémisphère Sud ; un Plan Marshall de type contractuel au profit des pays de cette zone ; la création de grands ensembles monétaires à l’image de la Zone Franc. Il poursuit aussi son action dans le domaine économique au sein de la société d’intelligence stratégique EPEE (il en est Président du Comité d’Ethique) et de la société Phitech, société de conception et de fabrication d’équipements pour mal voyants. Il est également membre de Debout la France, dont il est le délégué national au Partenariat avec l’Afrique et la Méditerranée, mission liée à son long travail dans la lutte contre la faim dans le monde et l'élaboration du plan Guillaume. Dans son dernier ouvrage « Un paysan au cœur du pouvoir » publié en 2015 aux Editions De Borée, Collection Témoignages, il décrit son singulier parcours de jeune agriculteur appelé successivement à de hautes responsabilités syndicales et politiques qui en ont fait l’un des grands acteurs de l’émancipation économique et sociale agricole des Trente Glorieuses. Cet écrit appelle en ces temps d'incertitude les nouvelles générations à l’effort et à la foi en leur avenir et en celui de la France. Nous nous en sommes largement inspiré dans cet article et ne pouvons que vous inciter à le lire. Vous découvrirez un lorrain « droit dans ses sabots », pas toujours impartial mais honnête, pas dupe des faits et méfaits de la politique, volontaire, rigide comme il l'a montré dans ses affrontements avec les ministres socialistes de l'agriculture, viscéralement de droite, n'acceptant guère la contestation et surnommé par ses détracteurs, voire ses amis 'le Kaiser »... Round. La Commission de Bruxelles accepte un plafonnement des exportations européennes sans contreparties américaines. François Guillaume se consacre à sa circonscription, encourage les activités économiques, sociales et culturelles. On lui suggère de créer un village du livre, concept inventé et réalisé au Pays de Galle. Il sera établi sur le canton de Baccarat déjà connu par les cristalleries et l'archéo-site de Deneuvre, à Fontenoy-la-Goutte. Il favorise aussi la création du festival de musique baroque à Froville-laRomane, de l’IUT métrologie-contrôle qualité de Lunéville, de l’élevage de chevaux de sport et de concours à Rosières-aux-Salines, d’un équipement sportif et d’accueil au lac de Pierre-Percée, du Centre école de parachutisme à Azelot, d’un circuit automobile à Chenevières, d’une maison médicale à Cirey-sur-Vezouze... La dissolution de l'assemblée écourte son mandat en 1997. Elu en juin avec 9 voix d'avance sur Michel Closse le maire socialiste de Lunéville, cette élection est invalidée par le Conseil constitutionnel et il faut retourner aux urnes en décembre pour un scrutin serré. Il droitise son discours et invite Charles Pasqua à un meeting sur le thème de l'immigration. Il l'emporte nettement avec 55 % des suffrages. Il est membre de la Commission d'enquête sur la transparence et la sécurité sanitaire de la filière alimentaire en France, de la Commission d'enquête sur le recours aux farines animales dans l'alimentation des animaux d'élevage, la lutte contre l'encéphalopathie spongiforme bovine et les enseignements de la crise en termes de pratiques agricoles et de santé publique, de la Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique, de la Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne. Il est réélu en juin 2002 avec 53 % des voix face à Laurence Demonet du Parti socialiste, conseillère régionale et ne se représente pas en fin de mandat en 2007. Le repos du guerrier Libéré de ses engagements politiques, il consacre du temps à l'écriture en publiant en 2009 aux Editions Eyrolles « Vaincre la faim, pour en finir avec l’inacceptable ». Nourrir les hommes est le plus grand défi auquel la Communauté internationale est confrontée et qu'elle n'a pas relevé au cours du demi-siècle écoulé. Pourtant en utilisant le potentiel naturel des territoires et leur ressource humaine, il est possible de doubler en un quart de siècle la production agricole pour satisfaire les besoins en nourriture des 10 milliards d'habitants annoncés pour 2050, à condition de prendre en compte la nature spécifique de Jean Claude Brunelin Sources : - François Guillaume. Un paysan au cœur du pouvoir. Editions de Borée. Témoignages. 2015 - Gilles Luneau. La forteresse agricole : une histoire de la FNSEA. Gilles Fayard 2004 - Sites du Ministère de l'agriculture, Assemblée nationale, Wikipédia, epee, persee, books.google, debout-la-france... 13 trop riches ; il n'avait quasiment jamais recours au vétérinaire, car le prix de l'intervention dépassait généralement la valeur vénale de l'animal. Aussi prodiguait-il lui-même les soins ordinaires, traitait les moutons en appliquant sur les onglets meurtris un onguent de sa fabrication composé de saindoux et de sulfate de cuivre, après avoir taillé la corne en excédent avec un solide couteau de poche qui ne le quittait jamais. Il passait régulièrement son troupeau dans le pédiluve communal pour éviter que les blessures interdigitales ne s'enflamment, ne s'infectent et ne contaminent tout le troupeau. Sans hésiter, il sacrifiait toute brebis suspectée de maladie contagieuse, l'enfouissait avec soin après l'avoir chaulée. Dans sa solitude, il avait désappris à parler. Il réservait ses rares paroles à son troupeau pour le calmer quand il cédait à la panique en pivotant sur lui-même comme une toupie ; ou bien à ses chiens en les interpellant en patois alsacien – il avait été employé dans sa jeunesse en Alsace, car l'accent guttural germanique convenait mieux, estimait-il, à la race canine. Il ne s'intéressait à rien d'autre qu'à la succession des jours et des saisons qui conditionnent la vie de ses moutons. La nature était son grand livre : il y observait des choses que les autres ne voyaient pas. Elle serait son maître jusqu'à la fin, jusqu'à ce que, pierre parmi les pierres, il soit rappelé à « la vérité des mondes immobiles ». La nuit, il lisait dans le champ des étoiles. Sans s'en lasser, il aimait regarder « briller sur le clocher jauni la lune comme un point sur un i ». De toutes les constellations, il ne voulait en reconnaître qu'une seule : celle du Bélier parce qu'il pensait qu'elle attirait le regard de tous les bergers du monde. A l'aube, pensif, il aimait voir s'éteindre les étoiles. Le soleil revenu, il prolongeait sa rêverie, croyant découvrir dans un ciel moutonneux, l'immense troupeau, qui l'attendait là-haut. L'âge venu, il n'avait conservé qu'une trentaine de brebis. Berger sans terre, il avait trouvé une pâture pour ses bêtes entre les immeubles inachevés d'une excroissance urbaine, là où la ville mange la campagne. Cette cohabitation provisoire, cette confusion des siècles avaient quelque chose d'étrange qui poussait à la mélancolie. Pour autant, elle n'entamait pas la sérénité du berger, philosophe sans le savoir. Le berger Quand l'été touche à sa fin, par tous les temps, la silhouette du berger se dresse dans la campagne libérée de ses récoltes. Sa troupe de 500 moutons, propriété d'un gros éleveur voisin, parcourt les chaumes pour y glaner les épis restants et se nourrit des mauvaises herbes qui avaient grandi à l'abri du blé et que la moissonneuse avait épargnées. La tradition lui donne ce droit de pâture que les paysans ne lui contestaient pas, car ils y trouvaient leur compte : l'avantage d'être débarrassés de ces plantes adventices avant qu'elles ne montent en graine pour se renouveler l'année suivante au détriment des prochaines semailles. Le berger ne séjourne qu'une semaine sur notre territoire et je ne voulais rien perdre de sa présence qui me révélait son art plusieurs fois millénaire. Pour dormir près de ses brebis, il dispose d'une roulotte mobile qu'un attelage avait déposé au centre de son domaine provisoire ; ses deux chiens couchaient sous son refuge pour prévenir leur maître de l'attaque éventuelle d'un prédateur ou de toute tentative de vol dans le troupeau parqué tout près, les bêtes étant étroitement enfermées pour la nuit dans un enclos de barrières mobiles en bois. Le personnage me fascinait. Je l'observais à distance, solitaire, les mains fermement accrochées à son bâton symbole, immobile dans sa longue pèlerine lui tombant à mi-jambe dont le vert foncé avait souffert des intempéries, sa pipe émergeant d'une barbe grisonnante et généreuse, un chapeau de feutre noir, aux bords affaissés, enfoncé fermement sur sa tête pour résister aux bourrasques et avec pour seul ornement une plume de perdrix, relief du festin d'un busard qui planait dans le ciel. Pensif, « le Charles – en Lorraine on fait précéder le prénom d'usage d'un article, selon une pratique héritée de la Germanie – surveillait sa troupe. Et quand un agneau s'en écartait, il piquait la cuillère de sa houlette dans le sol meuble pour en prélever une motte de terre qu'il envoyait en direction du fautif. C'était le signal qu'attendait le chien de surveillance d'un des flancs du troupeau pour filer comme une flèche aux fins de ramener l'impertinent dans le groupe. Et s'il se révélait récalcitrant, il le pinçait au-dessus du jarret en glissant ses crocs sous la peau de l'animal sans le blesser, à titre d'avertissement. Le berger veillait à tout. Il prévenait « l'enflure » en dosant le temps de présence de ses moutons dans les pâturages 14 Les sélectionneurs en 2015 Répartition des adhérents Sélectionneurs Utilisateurs 2011 2012 2013 2014 2015 2011 2012 2013 2014 2015 Elevages 15 14 17 17 19 0 2 3 4 3 Brebis 5823 5233 5709 6223 6949 0 534 747 767 670 Le nombre d’adhérents progresse avec les adhésions de Jean-Claude Reynaud et du GAEC des Groseillous comme sélectionneurs. Gilbert Allemand démissionne avant une cessation d’activité et la reprise de son exploitation. André Faynel devient sélectionneur et Ludovic Giraudon candidate pour la prochaine campagne. Les sélectionneurs à la section Noire du Velay de ROM Sélection résident tous en Haute-Loire et dans la Loire pour un élevage utilisateur. L’effectif progresse (+8 %) dans la section, avec 7 619 femelles, soit une moyenne de 346 par élevage. Évolution du haras de béliers des sélectionneurs Béliers de race pure ARR/ARR % ARR/ARR 74 94 % 2010 Nombre total de béliers 111 Béliers de croisement 35 Total 76 2011 114 33 81 80 97 % 2012 119 34 85 84 99 % 2013 128 43 85 85 99 % 2014 161 52 109 109 100 % 2015 173 53 120 120 100 % Années L'effectif de béliers présents dans les troupeaux augmente de 7 %, avec une moyenne d’un bélier pour 44 brebis. 69 % sont de race Noire du Velay dont 100 % proviennent de la station ou du centre d’élevage. 31 % sont de races lourdes, en grand majorité des Charolais, répartis dans 10 élevages. 100% des béliers de race pure sont résistants homozygotes à la tremblante. 15 Performances techniques des brebis Sélectionneurs 5 meilleurs élevages Prolificité brebis 171 % 184 % Productivité brebis 218 % 253 % Brebis agnelées 2 fois 27 % 37 % Mâles simples brebis 12,0 13,0 Mâles doubles brebis 10,1 11,0 PAT 30 Valeur Laitière Évolution des performances techniques 2011 2012 2013 2014 2015 15 14 12 17 19 Prolificité brebis 162,8 165,2 165,7 175,1 171,1 Productivité brebis 210,1 216,8 217,5 229,9 217,5 Brebis agnelées 2 fois 29% 31% 31% 32% 27% Mâles simples brebis 12,1 12,6 11,9 12,4 12,0 Femelles simples brebis 11,4 11,8 11,1 11,5 11,3 Mâles doubles brebis 9,8 10,1 9,8 10,3 10,1 Femelles doubles brebis 9,3 9,6 9,2 9,7 9,6 Mâles simples agnelles 10,3 11,2 10,3 10,5 10,8 Femelles simples agnelles 10,0 10,7 9,9 10,1 10,4 Mâles doubles agnelles 8,1 8,7 7,9 8,1 8,2 Femelles doubles agnelles 7,6 8,4 7,5 7,8 7,9 Nombre de sélectionneurs PAT 30 Valeur Laitière Qualifications génétiques Seuils de qualification Les objectifs de la race sont axés principalement sur une amélioration de la valeur laitière des brebis. L’index de synthèse permet ainsi de qualifier des brebis avec des index prolificité plus faibles, si l’index valeur laitière est élevé. Les seuils de qualification prennent en compte le coefficient de détermination pour obtenir une meilleure fiabilité de leurs valeurs. Les mères à béliers et les mères à agnelles sont destinées en priorité au renouvellement de la base de sélection. Les mères de réserve produisent des agnelles pour la diffusion. 16 Renouvellement de la base de sélection Évolution du fonctionnement du Centre d’Elevage 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 Nombre d'élevages fournisseurs 16 10 12 12 11 10 14 14 Nombre de béliers entrés 62 50 56 66 67 66 79 69 Origine maternelle Mère à Béliers % 45 84 45 61 66 55 76 59 Mères à Agnelles ou de Réserve % 17 16 55 39 34 36 24 41 Origine paternelle Bélier connu % 100 100 100 100 100 100 100 100 % ARR/ARR 100 100 100 100 100 100 100 100 Nombre de béliers diffusés 41 35 39 42 45 53 54 54 Béliers réformés % 32 30 30 35 33 20 32 22 Centre d’élevage Le centre d’élevage fournit des béliers issus de brebis qualifiées majoritairement mères à béliers et assure ainsi une sélection sur la valeur laitière et la prolificité par la diffusion des béliers sélectionnés. La sélection génétique sur la résistance à la tremblante exige que tous les béliers soient génotypés résistants homozygotes (ARR/ARR) pour intégrer le centre d’élevage. Les béliers entrés ont systématiquement une paternité connue. Ceci est indispensable pour gérer la variabilité génétique au sein de la race. Le prix d’achat est fixé à partir du poids à l’entrée au centre d’élevage valorisé au prix de 3,50 euros par Kg, auquel s’ajoute une plus-value génétique de 32 euros pour les fils de MB et 25 euros pour ceux de MA. La moyenne de la bande était 39,5 kg à 103 jours, avec une plus-value de 29 €, pour un montant de 167 € réglés aux sélectionneurs. 78 % des béliers entrés au centre d’élevage ont été diffusés pour la reproduction, dont 65 % dans la base de sélection. Les ventes de béliers sont équivalentes à celles de l’année précédente. Le prix de vente moyen de ces 54 béliers est de 454 euros. La pression de sélection exercée sur les critères phénotypiques et sanitaires se traduit par 14 % de réformes, soit 10 béliers vendus à un tarif moyen de 128 euros. A ceux-là s’ajoutent 5 perte, soit 7% des béliers entrés. Le fichier des béliers utilisés permet d’organiser les ventes de reproducteurs et d’orienter les choix des éleveurs en fonction des origines disponibles et compatibles avec leurs élevages. Les ventes de béliers adultes présents chez les sélectionneurs concernent 19 reproducteurs en 2015, au prix fixé à 270 €. Évolution du renouvellement en femelles 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 Mères à Béliers % 46 38 33 38 46 28 35 28 Mères à Agnelles % 34 32 39 32 31 35 37 39 Mères Jeunes % 4 8 7 4 3 3 Mères de réserve % 16 22 21 26 19 34 Origines maternelles Mères non qualifiées % 17 1 22 25 5 7 Répartition des agnelles conservées par les sélectionneurs 19 sélectionneurs ont conservé 1 354 agnelles de renouvellement, soit 71 par élevage. 3 sélectionneurs ont acheté 71 agnelles, représentant une partie de leur renouvellement, tandis que FEDATEST assure son renouvellement par l’achat de 97 agnelles auprès de 2 sélectionneurs. Le taux de renouvellement est donc de 20 %, avec plusieurs troupeaux en augmentation d’effectif. 63% des agnelles ont une paternité connue, résultat en diminution par rapport aux 66 % de 2014. La connaissance de la paternité varie dans de fortes proportions suivant les élevages : 0 à 100 %, pourtant elle facilite la gestion de la variabilité génétique. 28 % des agnelles sont filles de mères à béliers, en baisse par rapport aux 35% de 2014, avec des variations selon les élevages de 0 à 59 %, et 39 % sont filles de mères à agnelles (37 % en 2014). Les agnelles issues de mères de réserve, mères jeunes ou de brebis non qualifiées en génétique représentent 33 % du renouvellement. Les agnelles de renouvellement ont un PAT30 moyen de 102 (103 en 2014. Le mode de naissance moyen est 1,84 (1,88 en 2014); soit 29 % nées simples, 58 % doubles et 12 % triples et plus. Les index moyens des mères sont + 0,01 en prolificité et + 5,6 en valeur laitière. Tournées d'inscription Agnelles 2007 2008 2010 2011 2012 2013 2014 2015 Présentées 2 676 2 200 2 051 1 973 1953 1833 2334 2746 2751 Conservées dans les élevages 1 369 1 233 1 096 1 098 991 832 1183 1389 1443 Diffusées pour la reproduction 1 307 962 1001 1151 1357 1312 967 2009 955 875 La diffusion d’agnelles se maintient avec 1312 agnelles vendues par 9 sélectionneurs (1357 par 14 fournisseurs en 2014), dont 31 acquéreurs d’au moins 10 agnelles, soit une moyenne de 41 par achat. Cela représente 1 agnelle vendue pour 5,3 brebis en sélection. Le prix de vente des agnelles s’établit ainsi : - Prix de base à 96 €, à l’âge moyen de 108 jours maximum, pour un poids estimé à 30 kg minimum. Audelà, des frais de vieillissement de 0.50 € par jour sont facturés. - Plus-value génétique selon la qualification de la mère : mère à béliers : 32 € ; mère à agnelles : 25 € ; mère de réserve : 15 € - Frais de participation des utilisateurs à la base de sélection, de 2,10 € par agnelle en 2015. Ces ventes étaient destinées, outre la Haute-Loire, à des éleveurs de l’Aveyron, du Cantal, la Loire, la Lozère, le Puy-de-Dôme, la Haute-Saône, la Haute-Savoie et le Tarn-et-Garonne. Un éleveur belge a choisi d’élever des Noires du Velay conduites en agriculture biologique. Il a acheté 107 agnelles génotypées résistantes homozygotes à la tremblante, auprès de 3 sélectionneurs. Electronisation L’utilisation d’un logiciel de gestion de troupeau concerne 20 élevages. L’identification électronique des cheptels a incité 13 éleveurs à investir dans un outil de lecture des boucles électroniques. Tremblante Un programme national de sélection génétique sur la résistance à la tremblante a été mis en place à l’automne 2001. A partir de 2002, les agnelles de renouvellement chez les sélectionneurs ont été génotypées. Ces analyses ont permis de déduire des génotypes partiels ou complets de leurs mères. Ces actions ont pour but de : éliminer l’allèle VRQ ; fournir aux éleveurs des béliers résistants : ARR/ARR ; saturer la base de sélection en animaux résistants : homozygotes ARR/ARR et hétérozygotes ARR/ARQ. La gestion de la tremblante au sein de la race nécessite la sélection des reproducteurs génotypés résistants. Ce programme va 18 permettre de diffuser des reproducteurs possédant une qualification sanitaire vis à vis de la tremblante. Les agneaux au potentiel génétique suffisant pour intégrer le centre d’élevage à l’automne sont tous génotypés, afin de retenir uniquement ceux possédant deux allèles de résistance à la tremblante. Les agnelles destinées au renouvellement de la base de sélection ne sont plus génotypées pour la résistance à la tremblante, sauf pour les nouveaux élevages. Les agnelles diffusées à l’exportation sont systématiquement génotypées, tant que les troupeaux ne sont pas engagés dans la démarche de CSO tremblante. Il faut génotyper 1,3 agneau pour rentrer un jeune mâle au centre d’élevage. La certification tremblante des élevages progresse avec des haras de béliers de race pure résistants homozygotes. Quelques béliers de croisement sont hétérozygotes, voire pas génotypés. Pour cette campagne, 15 élevages étaient certifiés niveau 2 et 7 élevages niveau 3. ,LJƉĞƌWƌŽůŝĨŝĐŝƚĠ L’action dans le cadre du PAMAL, concernant la recherche de gênes majeurs, a permis de mettre en évidence un deuxième gêne d’hyper prolificité dû à la mutation BMP15, porté par le chromosome X et nommé 5’utr. Ce dernier gêne a la particularité d’être transmis par les brebis de manière aléatoire à leurs filles et leurs fils, et par les béliers de façon systématique à leurs filles mais jamais à leurs fils. Le bilan actuel fourni par l’INRA concerne 3927 femelles ayant agnelé avec une prolificité moyenne de 162%. Génotypage Porteuses 5’utr NN Porteuses 5’utr N+ Non porteuses 5’utr Non génotypées pour 5’utr Porteuses 5’utr NN et N+ Porteuses Lacaune LL 1 -% 0 -% 11 0,2 % 7 0,2 % 1 -% Porteuses Lacaune L+ 6 0,2% 25 0,6 % 183 4,7 % 84 2,1 % 31 7,9 % 12 0,3 % 201 5,1 % 822 21 % 213 5,4 % 4 0,1 % 4 0,1 % 25 0,6 % 32 0,8 % Non porteuses Lacaune Non génotypées pour L Porteuses Lacaune LL et L+ 7 0,2 % 194 4,9 % 91 2,3 % Génotypage Porteuses 5’utr NN Porteuses 5’utr N+ Non porteuses 5’utr Porteuses Lacaune LL 220 % Porteuses Lacaune L+ 281 % 217 % 193 % Non porteuses L ou non génotypées 258 % 186 % 157 % 211 % Le nombre de béliers adultes issus du centre d’élevage et génotypés correspond à 147 reproducteurs qui ne sont pas tous présents dans la base de sélection. Parmi ceux-ci, 2 sont porteurs homozygotes (1,4 %) et 25 porteurs hétérozygotes (17 %). Les jeunes reproducteurs assurant le renouvellement de la base de sélection ont été génotypés pour identifier ceux porteurs d’un gêne d’hyper prolificité. Les agnelles de la campagne ont 1 238 résultats connus pour le gêne Lacaune. 17 sont porteuses homozygotes, soit 1,4 %, et 248 sont porteuses hétérozygotes, soit 20 %. Cette action a aussi été conduite pour les agneaux rentrés au centre d’élevage pour la campagne en cours. Ils ont tous été génotypés pour les 2 gênes d’hyper prolificité connus. Le gêne Lacaune a été repéré 18 fois (24 %) et la mutation BMP15 est apparue 11 fois (14 %). Tous les porteurs sont hétérozygotes. Deux béliers ont la particularité de posséder les 2 gênes. Assignation de filiation Le programme PAMAL a permis de réaliser des assignations de parenté pour les agnelles de renouvellement 19 de la base de sélection et les agneaux rentrés au centre d’élevage. Ces analyses ont permis de réaliser des contrôles de filiation lorsque le père est déclaré et à priori connu. Le père proposé est validé lorsqu’il est confirmé sur les marqueurs. S’il n’a pas été génotypé, il n’est alors pas vérifiable. L’assignation permet d’affecter un père lorsqu’il n’est pas connu. Il est assigné quand il est déterminé sur les marqueurs et non assigné si aucun père n’est affectable grâce aux marqueurs. L’assignation est associée au contrôle de filiation lorsque le père déclaré est incompatible. Si le père proposé est incompatible et qu’aucun des autres béliers génotypé ne convient, la parenté est non assignée. Par contre, si un autre des béliers est déterminé sur marqueurs comme étant le père, la parenté est donc assignée sous le terme de faux assigné. Les résultats obtenus sur la campagne laissent présager d’un taux d’erreur de paternité de près de 15 %. Actions de promotion La randonnée de bergerie en bergerie s'est déroulée en mai du GAEC du Rond Rouge au GAEC des Cabarets. Le GAEC Jarlier a présenté des agnelles à Tech’Ovin en Septembre à Bellac. Pascal Crespy a présenté brebis et agnelles au Sommet de l’Elevage à Cournon en Octobre. L’Association des Producteurs d’Agneaux Noirs du Velay, a pour objectif de soutenir la vente directe des agneaux produits par ses 25 adhérents, soit près de 3000 agneaux par an. Elle assure la promotion de la marque Agneau Noir du Velay, par l’organisation de manifestations. Son ambition est de s’appuyer sur l'ancrage territorial de la race dont le berceau se situe sur le Velay. Bilan des troupeaux Elevages Femelles Effectif Femelles agnelées Agnelages Agneaux moyen agnelées nés 2 fois Prolificité % Taux de agnelées 2 mise-bas fois Productivité effectif moyen GL 37 41 9 50 90 180% 22% 135% 243% CF PG FA JG 362 447 191 441 332 407 133 442 81 103 31 142 413 510 164 584 567 867 259 1045 137% 170% 158% 179% 24% 25% 23% 32% 114% 114% 86% 132% 157% 194% 136% 237% CJM GRR GC GG LP FED 270 318 672 53 270 237 242 331 674 49 258 269 71 118 201 0 0 12 313 449 875 49 258 281 522 833 1460 86 457 490 168% 186% 167% 176% 177% 174% 29% 36% 30% 5% 0% 5% 116% 141% 130% 93% 96% 119% 194% 262% 217% 162% 169% 207% CP GN MJ CHP 329 298 206 194 335 307 206 183 91 71 47 72 426 378 253 255 793 622 436 428 186% 165% 172% 168% 27% 23% 23% 39% 130% 127% 124% 131% 241% 209% 214% 221% CHF GPA 178 496 179 513 48 131 227 644 378 1073 167% 167% 27% 26% 116% 130% 193% 216% RA RJC GM 294 94 227 258 121 243 43 0 59 301 121 302 491 187 474 163% 155% 157% 17% 0% 24% 102% 79% 133% 167% 199% 209% PS 406 330 27 357 517 145% 8% 88% 127% 5983 5812 1348 7160 11985 167% 23% 120% 196% 20 Lou Pastre de la Neigre : 11ème édition Et me voilà au pont de l'Enceinte, rien à voir d'ailleurs avec une parturiente. Dans ce peu d'espace autour d'un méandre du Lignon, des ingénieurs ingénieux ont réussi à associer deux ponts routiers (1866) et un pont ferroviaire métallique (1902). Jean Chervalier apporte des éléments dans son ouvrage Ponts de Haute-Loire : "A cet endroit, le Lignon enserre, dans la boucle à peu près complète qu’il forme entre les Issards et la Baraque, une colline escarpée sur laquelle est situé un minuscule hameau (...) En 1600, des copistes qui ont manifestement commis une confusion ont orthographié ce lieu-dit La Saincta que les révolutionnaires se sont empressés de remplacer par le vocable l’Enceinte". Autrefois, une cascade coulait en dessous de ces deux ponts. Aujourd’hui refermée, on l’appelle le trou du Lou Bragaïre (1850), surnom d'un paysan qui, las de se faire inonder par la rivière, avait décidé de creuser la roche pour que l’eau puisse s’échapper. La charmante petite chapelle a été édifiée en 1854, par Joseph Maurin, prêtre réfractaire rescapé de la Révolution et bienfaiteur d’Yssingeaux et de son hôpital. On aperçoit le village de Grazac. Là aussi je faisais de l'appui technique chez un éleveur de cette commune, Jean Ronze de Vendetz, que j'aurai le plaisir de rencontrer à la fête. Il est bientôt en retraite et son fils, actuellement double actif, reprendra l'exploitation. René Bore (Grazac en 1695. Cahiers de la Haute-Loire. Année 1988) mentionne ce village présent dans le Terrier Brevet de Chabrespine pour 1695, mandement du seigneur de la Tour Maubourg, et consacre une étude (Cahiers de la Haute-Loire. Année 1994) au Prieuré de Grazac aux XVII et XVIIIème siècles, relevant dès le XIème siècle de l'abbaye de Cluny. Un peu plus loin, on ne peut manquer d' apercevoir le clocher de l'église de Lapte, le plus haut de la Haute-Loire et offrant un magnifique panorama. Un peu perdu, il me faut trouver une route de traverse, étroite et charmante, dans une symphonie de nuances vertes, du vert foncé des résineux au vert tendre des feuillus et celui plus soutenu des prairies. Ce fond vert est éclairé de jaune sauvage : pissenlits, boutons d'or, genêts, jonquilles par endroit, et jaune cultivé : colza. Le temps est variable ce dimanche 8 mai et en route pour Paulhac de Tence pour cette 11ème édition. Il y a du vent qui devrait dégager le ciel et assurer du beau temps, du moins pas de pluie. Un peu de géographie et d'histoire De Fay-la-Triouleyre on distingue au loin les éoliennes qui brassent l'air pur du majestueux Mézenc en toile de fond. En parlant de Mézenc, savez-vous qu'à la suite de contestations anciennes à propos d'herbages, entre les communes des Estables et de Borée, et d'une grossière erreur matérielle commise en 1846, le sommet du Mézenc et la Croix de Boutières sont portés à tort entièrement en Ardèche sur la commune de Borée ? Michel Lacroix, géomètre-expert en retraite, en a fait son cheval de bataille, constitué un mémoire très argumenté, transmis le tout aux élus du département qui font la sourde oreille prétextant une histoire ancienne. Direction Yssingeaux et une pensée pour Jacques Barrot qui a bien oeuvré pour sa circonscription en l'ouvrant sur Rhône-Alpes, décision prémonitoire et annonciatrice de notre nouvelle grande région. Il est temps de bifurquer sur la direction de Tence, petit cafouillage dans le fouillis de petites routes. Je passe à proximité de Versilhac où jadis je suivais le troupeau de Noire du Velay de Jacques Fayet, petit homme malicieux, la tête toujours coiffée d'un vaste béret fort utile en toutes circonstances. Un jour que nous identifions des agnelles dans la bergerie, une fumée sortant du moteur de la voiture engagée dans le hangar à fourrage, attira notre attention. Jacques se précipite vers le véhicule, ouvre le capot, tape avec son béret sur le câble d'alimentation de la batterie qui avait pris feu. Il remet son béret, déconnecte la batterie, et nous retournons continuer notre travail. D'où l'utilité du béret contre les incendies en zone rurale ! Doyen du village, l'Association des amis de Versilhac vient de fêter ses 90 ans, entouré d'amis, d'élus, de sa femme Lucienne et de leur nombreuse famille (7 enfants, 11 petits-enfants et 7 arrières petits-enfants). Il faisait partie d'un CETA, Centre d'études techniques agricoles, celui d'Yssingeaux, groupement d'agriculteurs progressistes finançant eux-mêmes un technicien agricole. Un de ses fils a repris l'exploitation. 21 en l'honneur de la sainte Vierge; mon plan est tout dressé. » Le père Brueyre ouvre, quant à lui, en 1843 la mission du Kiang-nan avec Hangtchéou pour base, revenant de temps à autres à Zikawei. Le séminaire démarre le 1er février 1843 avec 23 étudiants et déménage à Song kia-tu en 1853. Toutes les missions sont confiées aux jésuites français dans la région à partir de 1845, alors qu'elle est le théâtre de rébellions de 1853 à 1864. Il est élu supérieur du Tché-li oriental de 1859 à 1866 et meurt dans le Sienhsien en 1880. Son apostolat s'exerce dans des temps difficiles (massacre de 1870 à Tientsin) et il est au début en but à l'incompréhension du vicaire apostolique de Nankin, Mgr Louis de Bési, qui quittera la Chine en 1847. Il a traduit en chinois de nombreux ouvrages de piété, en particulier sur le Sacré-cœur, écrit des grammaires et des dictionnaires et il est surtout connu pour sa traduction de la Bible en 1862. Revenons à nos moutons, je suis sur la bonne voie et voici d'ailleurs un superbe panneau annonçant la vente directe de viande, réalisé par Max Grangeon, l'éleveur qui nous accueille aujourd'hui, et son voisin Nicolas Russier, éleveur de vaches Salers. La bergerie de Paulhac Une superbe bergerie en bois émerge d'un terrassement récent au milieu d'une parcelle boisée. Pas de problèmes pour se garer, l'espace est conséquent. Il faut par contre se munir d'un coupe-vent car les bourrasques de vent du nord sont violentes et froides. Les randonneurs sont déjà nombreux et se pressent dans la grange aménager en réfectoire pour se protéger du vent, s'inscrire pour le repas auprès de Didier Cathalan, prendre un café offert et visiter la bergerie. Tasse de café brûlant à la main, je fais de même. Je lis aussi deux panneaux fort bien faits, présentant l'exploitation et son historique. En voici la teneur. La ferme est située à 1000 m d'altitude entre Lignon et Lizieux. Elle comporte 50 ha de SAU : 2,7 ha de céréales, 17 ha de prairies temporaires, 30 ha de prairies naturelles dont 10 ha de parcours. Le parcellaire est morcelé mais proche du bâtiment. Le fourrage est récolté en foin et enrubannage. Une amélioration projetée serait d'aménager des points d'abreuvement dans les pâturages. Max Grangeon s'est installé en 2013 en reprenant le troupeau de ses parents qui tiennent la Ferme- Je commence à trouver des panneaux indiquant la fête, un peu tourneboulés par un vent assez violent. Tence n'est plus loin, bourg entouré jadis de fortifications pour résister aux attaques des pilleurs et des brigands. Elles serviront aussi pendant les guerres de religion et il n'en reste plus que quelques murs et des douves. En parlant de religion, il faut que j'évoque Benjamin Brueyre, né en 1810 à Tence et mort en 1880 dans le Sienhsien en Chine. Il fait ses études au petit séminaire et au grand séminaire du Puy-en-Velay. Il entre dans la compagnie de Jésus en septembre 1831, fait son noviciat à Chieri, puis en Suisse, étudie la philosophie à Mélan, Fribourg, tout en étant professeur scolastique, puis à Vals-près-lePuy. C'est alors qu'il est choisi en 1841 pour partir en mission pour la Chine avec deux confrères, les pères François Estève et Claude Gotteland. C'est la première mission jésuite depuis leur expulsion au XVIIIe siècle. Il y avait en 1840, 200 000 chrétiens marginalisés et persécutés, sur tout le territoire, dont s'occupaient prêtres chinois et missionnaires européens nouvellement arrivés. Les trois jésuites débarquent à Wusong près de Shanghai, en juillet 1842. Le père Gotteland qui dirige la mission avait reçu pour instruction de reprendre la tradition jésuite de travaux scientifiques, tandis que les deux autres prêtres devaient se consacrer à l'apostolat. Le Père Brueyre est soutenu par une forte spiritualité mariale et s'efforce dès le départ de pourvoir aussi aux moyens matériels de la population. Les jésuites s'installent en 1847 dans le village de Zikawei au sud de Shanghai, et reçoivent un grand terrain (agrandi ensuite par des terres achetées par la compagnie de Jésus de France) offert par les descendants de Xu Guangqi qui, restés catholiques, avaient maintenu l'entretien d'une petite chapelle, près de sa tombe. Les pères construisent une église et ouvrent un collège, le collège Saint-Ignace, pour les fils de familles de lettrés. Ils sont rejoint deux ans après par 5 autres jésuites de Vals dont Joseph Gonnet (1815-1895), ami du père Brueyre. Le père Gonnet dans une de ses premières lettres, ne se trouve pas trop dépaysé : « Cette petite promenade me rappelle délicieusement nos montagnes du Velay et du Vivarais; je me propose bien de la renouveler, lorsque l'occasion s'en présentera. Si la liberté des cultes était entière, on pourrait bâtir là une très belle chapelle 22 Le deuxième panneau situe l'exploitation dans son environnement. La bergerie de Paulhac est économiquement viable. Elle valorise bien ses produits dans des circuits locaux : bouchers, ferme auberge, SuperU ; vente directe ; valorisation de la laine dans la filière cosmétique. Le recours à une CUMA réduit largement l'investissement en matériel. Pourtant le nécessaire investissement bâtiment est lourd à amortir. L'autre point faible est une forte pression foncière. La bergerie de Paulhac est responsable et vivable. Max Grangeon est administrateur de sa CUMA et à l'Association des producteurs d'agneaux Noir du Velay. Le contact avec les clients est une ouverture sur l'extérieur et il pratique aussi l'entraide familiale. Il est cependant nécessaire de pratiquer un faible prélèvement de salaire les premières années pour favoriser la bonne mise en place de la structure. La bergerie de Paulhac est écologiquement responsable : vente sur un rayon de 50 km maximum, choix du bois pour la construction, race locale adaptée au territoire, compostage du fumier, culture de méteil (mélanges de céréales et protéagineux). Elle manque cependant d'autonomie fourragère en foin et céréale. Elle consomme aussi du plastique pour l'enrubannage, technique indispensable pour un fourrage de qualité. Les producteurs fermiers Le vent assez soutenu en a fait replier deux dans le stockage de fourrages. La Ferme-Auberge « La Cabriole » de Paulhachon de Tence, présente de délicieux fromages de chèvres et Max Grangeon de la viande d'agneau sous vide. Laura Bouilhol d'Yssingeaux commercialise ses confitures maison « Les surprises d'Elise » et prépare à la demande Auberge « La Cabriole » à Paulhachon de Tence, dans une ancienne ferme rénovée. Catherine et Bernard Grangeon pratiquent une cuisine de terroir avec les produits de la ferme : fromage de chèvre en salade, charcuterie maison, râpées, volailles, lapins, agneau brayaude (Noir du Velay), fromages blancs, beurre, sarrasson, et desserts maison : crème brûlée, tartes... La bergerie a été construite en 2014, vaste rectangle de 1400 m2 occupé pour deux tiers par le logement des animaux. Deux tapis automatiques assurent l'affouragement. Deux couloirs latéraux surélevés permettent une bonne surveillance des animaux. La grange attenante permet le stockage du fourrage. Le troupeau est constitué de 300 brebis Noire du Velay en sélection, 80 agnelles de renouvellement et 7 béliers. Les résultats techniques sont bons avec une productivité de 1,62 agneaux produits par brebis et par an. Une partie des agnelles sont vendues à la reproduction et les agneaux commercialisés en partie en vente directe. Notre jeune éleveur entame une démarche de diversification en production de fruits rouges à savoir 0,3 ha de cassis qu'il pense convertir en bio. Il produit du sirop et vend les fruits en l'état. La production de fruits rouges dans les Monts du Velay, avec d'abord la fraise, a démarré en 1960 sur la commune de Saint-Jeures, tout près de Tence. L'altitude permet une très bonne qualité de fruit et un créneau de commercialisation favorable. En 1987, les quotas laitiers obligent les éleveurs à chercher des revenus d’appoint. La même année voit le jour le Syndicat des producteurs de fruits rouges des Monts du Velay avec treize adhérents, ils seront cinquante en 1991. Les marques “Perles Rouges des Monts du Velay” pour la fraise et la framboise et “Perles Noires des Monts du Velay” pour la myrtille cultivée sont déposées. En 1997, augmentation des surfaces et des quantités nécessitent la création d’une structure commerciale, le GIE des producteurs de fruits rouges des Monts du Velay. Installé dans un nouveau bâtiment à Saint-Jeures, le GIE commercialise aujourd’hui 540 tonnes de petits fruits rouges produits par 50 exploitants majoritairement de la Haute-Loire, avec à sa tête Denis Chirouze, responsable technicocommercial. La gamme est composée de fraises de saison (Elsanta et Sonata, 200 T) et de Mara des Bois (35 T), de framboises (202 T), de groseilles (maquereaux, rouges et blanches, 93 T), de mûres (20 T) et de myrtilles (4 T). Mais le produit phare du GIE, c’est la framboise ( produite sous abris, variéés Meecker à 80 % et Tulameen ) en terme de chiffre d'affaires et d'image de marque. des petits gourmands de savoureuses crêpes. A l'extérieur, la remorque présentoir de Pierre-Louis Sarda de Freycenet de Saint-Jeures, ancien éleveur de brebis, décline ses fabrications de charcuterie : jambon, jambonneau, jambonnette boudin, lard, pâté de tête, godiveaux, filet mignon, grillaton... Il pratique un élevage de plein air, avec des porcs lourds indispensables pour améliorer tenue et qualité gustative de la viande. L'alimentation est garantie sans OGM. Il utilise un savoir-faire familial dans la tradition de la Haute23 sombre des sapins. Les brebis font quelques escapades ramenées par les chiens. Par un chemin défoncé, nous traversons une coupe de bois, stères empilées et troncs couchés attendant leur transport à la scierie Moulin installée à Dunières. En 1916, la scierie d’Alexandre Moulin est implantée à quelques kilomètres du site actuel, à Pont de Chirat sur la commune de Dunières. En 1967, Maurice et René Moulin prennent la direction de la société suite au décès de leur père, et la modernise constamment. Maurice Moulin, en 2002, rachète les parts de son frère et d’autres actionnaires afin de devenir actionnaire unique. L'entreprise transforme actuellement plus de 250 000 m³ de bois chaque année. Elle assure principalement une activité de sciage (bois de charpente, d’ossature, de couverture, de structure et de coffrage), grâce à des infrastructures modernes et performantes. Son matériel lui permet de compléter son offre avec des prestations complémentaires, comme le séchage et le rabotage. La scierie s’approvisionne principalement sur les massifs forestiers d’Auvergne (Livradois, Meygal, Mézenc, Margeride) et de RhôneAlpes (Pilat, Roannais, Haut Forez, Beaujolais,Vercors) à dominante de résineux. La scierie adhère à une gestion durable des forêts, le développement durable désignant un développement qui répond aux besoins de la génération actuelle sans mettre en danger l’approvisionnement des générations à venir. Les résineux laissent place aux feuillus, aux hêtres qui laissent passer lumière et soleil. Les brebis s'étirent en des chemins bordés de murs moussus. Leurs étoiles blanches et les couleurs multicolores de leurs boucles d'oreilles se détachent sur fond de toison noire. Une petite halte près du Lignon permet de rassembler les suivants, avant de remonter au village de Salettes puis en direction de Mazelgirard. Le profil du terrain devient plus abrupt et les brebis s'inquiètent d'un troupeau de chevaux dans un belle prairie protégée seulement par un fil. Elles rejoignent les chevaux indignés qui, crinières au vent, galopent, s'éloignent, reviennent sur les brebis pour les intimider. Un vrai western, magnifique spectacle et malgré les Loire. Il transforme sur l'exploitation et commercialise en circuit court, à domicile et à « La Ferme des Paysans » à Monistrol-sur-Loire. En 2001, quelques agriculteurs s'unissent pour créer la SARL le Panier Paysan et mettre en place un magasin de vente situé dans Monistrol-surLoire, pour commercialiser eux-même leurs productions. Actuellement, ils sont 30 producteurs fermiers (9 associés, 21 dépôts vendeurs) à proposer leur gamme de produits en tenant le magasin à tour de rôle. 10 ans plus tard, devant la demande accrue de la clientèle, le magasin doit évoluer et s'agrandir mais reste sur la zone du Pêcher à Monistrol. Jean-Régis Charreyre du Pêcher de Tence fait lui aussi partie de cette organisation et présente sa production de fromages de brebis, à l'extérieur dans sa remorque présentoir : rondelet, tomme, yaourt, grand rond, moelleux, pérail... J'ai eu la chance de côtoyer son père, Jean Charreyre, éleveur de brebis viande et administrateur de la Fédération départementale ovine, un homme charmant mais ne s'en laissant pas compter. Ayant eu d'autres expériences humaines et professionnelles, il défendait une autre vision du syndicalisme agricole et prônait, bien seul à vrai dire, un salaire minimum professionnel agricole assurant un revenu décent pour qui travaillait sur sa ferme. Son fils s'installant à sa suite, la petite exploitation n'était pas suffisante pour assurer un revenu. Il devait donc s'orienter vers un élevage de brebis laitières de race Lacaune et une transformation directe. La randonnée Il est temps de sortir un lot de brebis de la bergerie. Elles sont effrayées par la lumière du dehors, le vent et surtout la foule des randonneurs qu'il faut écarter pour leur laisser le passage. Elles marchent vite, surprises de cette sortie inhabituelle, talonnées par les marcheurs. L'éleveur peinent à contenir leur énergie même si quelques-unes arrachent au passage des touffes d'herbe tendre. Nous passons par prés et petits bois de hêtres. Il y a sans doute près de 200 randonneurs qui s'étirent avec le rythme rapide du troupeau. Nous passons à proximité des Balayes, et effectivement les genêts d'or illuminent le sous bois. Nous descendons en direction de Salettes, au bord du Lignon, et croisons de superbes maisons aux murs de moellons de granit doré. Pousses tendres et merisiers en fleurs atténuent le vert 24 cimetières protestants. Le décret du 23 prairial an XII (12 juin 1804) précise : « Dans les communes où l’on professe plusieurs cultes, chaque culte doit avoir un lieu d’inhumation particulier ; et dans le cas où il n’y aurait qu’un seul cimetière, on le partagera par des murs, haies ou fossés, en autant de parties qu’il y aura de cultes différents avec une entrée particulière pour chacune et en proportionnant ces espaces au nombre d’habitants de chaque culte ». Cette histoire mouvementée explique les trois catégories de cimetières protestants que l’on trouve aujourd’hui en France : les grands cimetières protestants dans les régions à forte dominante protestante, les cimetières familiaux dans les régions où les protestants n’étaient pas admis dans les cimetières catholiques, les carrés protestants dans l’enceinte des cimetières communaux. Nous arrivons à Béraudon, dans de grands prés émaillés de fleurs de pissenlits, près de la route, et passé le hameau, les brebis sont parquées dans un enclos, sans doute heureuses de ce répit à l'ombre d'un bosquet de pins sur une petite éminence de terrain. La marche reprend, sans les brebis, en direction d'abord de Paulhachon puis de Paulhac au terme d'une superbe randonnée printanière à l'abri du vent toujours soutenu. Le repas Je coupe vers l'arrière de la bergerie où brûlent les feux pour les grillades et retrouvent des têtes connues, jeunes et moins jeunes : Sébastien Dumas, David Galland, Jean Ronze le presque retraité, Gilles Boussit, Jean-Louis Chapelle voisin de Pierre Liotard, Aurélien Teyssier qui a subi des dégâts de loups... Les autres s'activent dans le stockage transformé pour l'occasion en vaste salle à manger, qui à la buvette, qui à la préparation des casse-croûtes : André Faynel, Olivier Bernard, Max Grangeon, Georges Philibert, Jérémy Masson... et bien sûr Didier Cathalan à la synchronisation ! La chaîne de distribution démarre avec en bout de piste Pascal Crespy dans le rôle du distributeur de boissons. Ce sont les épouses des éleveurs qui officient à la distribution des copieux repas : un sandwich de bon pain avec terrine d'agneau et saucisses grillées, un autre avec deux variétés de fromage de pays, tarte aux pommes et café... et eau à volonté. L'ambiance est joyeuse et les conversations bourdonnent. Quelques jeunes gourmands vont déguster une crêpe à la confiture maison. Repas fini, je m'attable un instant avec deux fidèles anciens : Jean Galland un peu moins alerte mais toujours blagueur, Marcel Crespy toujours joyeux... et leurs compagnes. On parle du bon vieux temps ! Je fais aussi une rapide visite à la famille Dumas. efforts des bergers, il est bien difficile de les ramener dans le droit chemin. Un petit bac offre un bain rapide au chien border d'une sympathique randonneuse. Nous rejoignons une petite route et il faut garer le troupeau pour laisser passer un véhicule. Le chemin descend dans une combe et remonte par un étroit sentier bordé de murs en pierres sèches et de noisetiers. Le troupeau s'étire ainsi que les promeneurs. Puis nous parcourons un large chemin forestier, bordé de hêtres majestueux. Nous passons au lieu-dit Freydier, le pays froid. Les brebis s'agglomèrent à nouveau, pelote compacte de laine noire, et débouchent sur une clairière avec de curieux enclos, en fait de petits cimetières familiaux protestants. Nous sommes en effet dans un secteur dénommé la « Montagne », décrite par Christian Maillebouis, périmètre comprenant les communes du Chambon-surLignon, du Mazet Saint-Voy et parties de Tence, Saint-Jeures, Les Vastres, Fay-sur-Lignon, aux frontières de l'Ardèche et de la Haute-Loire. Sur ce plateau, à mille mètres d'altitude, la Réforme s'est implantée il y a plus de quatre siècles. A proximité des fermes, s'observent encore aujourd'hui de petits cimetières familiaux réformés, parfois à l'abandon. Le problème de l’inhumation des protestants s’est posé dès que la Réforme a été considérée comme une hérésie par l’Eglise catholique : les cimetières paroissiaux étant des « lieux saints », l’inhumation d’un protestant devient impossible. Les protestants durent alors s’organiser autrement et créer des cimetières spécifiques, sans lien avec un lieu de culte. La révocation de l’Édit de Nantes en 1685 interdit le culte protestant et les protestants sont exclus de leurs cimetières. Pendant les longues années du « Désert », les protestants qui refusent de se convertir vont ensevelir leurs morts clandestinement, « dans les terres », dans un champ appartenant à la famille du décédé. Ainsi est née la tradition des cimetières de famille : quelques tombes dans un jardin, un pré, un espace non cultivé, enclos ou non par des murs. Une certaine tolérance s’installe à partir de 1760, et les communautés réformées peuvent réaffirmer leur foi publiquement et créer de nouveaux cimetières. Mais il faut attendre l’Édit de tolérance de 1787 pour que l’existence civile des protestants soit reconnue. Il prescrit que les villes et villages devront avoir « un terrain convenable et décent » pour l’inhumation de ceux auxquels la sépulture ecclésiastique est refusée. Les troubles de la Révolution passés, Bonaparte rétablit la liberté religieuse et l’égalité des cultes dans le cadre du Concordat et des articles organiques de 1802. La nouvelle législation organise l’existence des 25 différentes font connaître notre brebis locale. Je prends moi aussi congé et revient sur Le Puy par un autre itinéraire que je connais mieux. Cette région du Haut-Lignon présente une surface cristalline recouverte sur sa partie par des formations volcaniques comme le pic du Lizieux, suc phonolithique vieux de 12,7 millions d’années, caractérisé par ses coulées de lave visqueuse et son dôme de lave. Il représente le point de sortie d'une lave visqueuse qui s'est étalée de part et d'autre pour donner le plateau situé à sa base. Le sommet cerné par les éboulis de la dernière période glaciaire, offre un superbe panorama sur l'ensemble des sucs du Mézenc et du Meygal. Voici le Mazet-Saint-Voy, région marquée par le fait religieux, haut lieu du protestantisme local. Paroisse et église dédié à Saint Voy (Sancti Evodi) remontent à 1021. Au XVIème siècle, sous l'impulsion de leur curé, les paroissiens de SaintVoy adoptent les idées réformées. Puis, c'est la période fratricide des guerres de religions. En 1598, l'Edit de Nantes permet aux protestants de Saint-Voy de construire un temple qui est détruit en 1679. A la veille de la Révolution (1787), un Edit de Tolérance reconnaît aux protestants une citoyenneté à part entière. Le temple actuel du Mazet a été construit en 1822. Je reprends ensuite la D15 par Foumourette, Les Balayes, Boussoulet et me reviennent des souvenirs d'hiver neigeux et verglacés ! Le paysage est rieur au printemps, les champs piquetés de bouquets de jonquilles, mais les hivers sont souvent rigoureux quand souffle la burle. Je descends sur SaintJulien-Chapteuil puis Orzilhac (renommé jadis pour sa faïence) et Brives-Charensac chamboulé par les travaux colossaux de la déviation du Puy-en-Velay. Voici donc la fin de cette 11ème édition trez réussie, sur la belle exploitation de ce jeune éleveur prometteur, dans un secteur inhabituel, avec un public nouveau de l'est du département. Juste une petite critique constructive. Certains participants étaient déçus de partir si vite, et je partage ce point de vue. Il manquait quelques animations dans l'après midi où une autre petite randonnée thématique. Alors rendez-vous l'an prochain pour une autre célébration de la Noire du Velay ! Les animations Les repas touchent à leur fin et des animations se préparent. Il faut sortir du chaud abri de la grange et suivre un lot de brebis dans le pré au delà de la route. Olivier Bernard s'apprête à faire une démonstration de chien de berger avec son jeune Border Toros, couché dans l'herbe, langue pendante et prêt à en découdre avec un petit lot de brebis, pendant que son maître expose les principes à appliquer pour un bon dressage. Au début, il est conseillé de disposer les brebis dans une clôture en cercle, pour observer le comportement du jeune chien : indifférence, agressivité, recherche de contrôle. Olivier évoque ensuite les principaux postes de dressage : port de la laisse et contrainte, importance du nom avant chaque ordre, rappel, marche au pied, les positions : assis-couché, couché à distance, stop, directions... Il termine par une démonstration avec son chien puis avec un autre non entraîné d'un promeneur. Il conclut en indiquant que le dressage d'un chien... et de son maître, est un travail qui ne s'improvise et conseille aux candidats de suivre une formation dispensée par l 'Association départementale des chiens de troupeau. Le groupe se replie vers la bergerie où Aurélien Teyssier prépare une démonstration de tonte sur des agnelles, assisté par son jeune fils. Il faut installer méticuleusement le chantier : carré de contreplaqué pour placer la brebis, potence de la tondeuse électrique, plastique pour déposer la toison et ainsi ne pas la souiller de paille de litière, sac pour entreposer la laine... Un opérateur attrape une brebis qu'Aurélien assoit tout en souplesse entre ses jambes et commence à tondre par le ventre puis en larges arcs concentriques sur les flancs, pour finir par le dos. L'agnelle repart, un peu égarée, allégée de sa laine roulée et empilée dans un sac. Le tondeur a la possibilité de se suspendre avec une sangle abdominale pour soulager les reins lors d'un chantier de tonte important. On est loin de la tonte d'antan aux forces ou aux ciseaux ! Finie la fête ! La fête est finie et les visiteurs commencent à partir apparemment satisfaits de cette journée. Didier Cathalan me présente le nouvel animateur de la race Blanche du Massif Central qu'il côtoie à l'UPRA régionale. Avec Olivier Bernard, le président en exercice de la section Noire, nous évoquons les deux fêtes de la Noire qui bien que Jean Claude Brunelin 26 Petits moutonsss… Ndlr : Les deux textes qui suivent écrits par Gilbert Duflos décrivent la naissance des fêtes d'Allègre. Toute activité humaine procède de rencontres qui souvent cristallisent les énergies locales et créent un événement… En voici encore la démonstration… « Arrête, arrête la voiture ! Regarde les petits moutonsss… Et ils sont noirs ! » Je gare la voiture aussi près que je peux du troupeau qui pacage tranquillement dans la pente qui monte au-dessus de la route entre Salettes et Allègre. Mon père descend, comme irrésistiblement attiré, traverse la route et se plante en bas du talus. « Arrête, arrête la voiture… Vois les petits moutons noirs ! » Ce ne fut ainsi que la première fois. Puis, à chaque fois que nous apercevions un troupeau, tout en sortant de la voiture il rectifiait en imitant à la fois Jouvet, Arnaudy ou Fernandel interprétant Albert Topaze l’instituteur modeste de Pagnol : « Les moutons étaient en sureté dans un parc. Les moutonsss… » Il raconte d’une voix douce. Que dit-il aux petites brebis qui ont toutes tourné la tête vers lui ? Je n’entends pas tout car c’est entre lui et elles. Comme des confidences. Peutêtre des secrets que seuls elles et lui partagent désormais. Cela se passe ainsi à chaque fois que nous venons en son pays natal qu’il a tenu à me faire connaître dès que j’ai été en âge de conduire une voiture. « Nous sommes des petits Vellaves ». Nous prenons les petites routes quasiment au hasard. On ne risque pas de se perdre, toujours à proximité d’un village. De virage en virage, et il n’y en pas un seul de droit, il jalonne nos promenades de souvenirs… et de troupeaux de brebis Noires, comme le petit poucet les jalonnait son chemin de cailloux blancs. Nous ne connaissions l’avenir ni lui ni moi, mais déjà il le façonnait. Je ne vois jamais une brebis noire du Velay sans entendre « Les petits moutonsss… ». Ϯϳ En 2000, parce que mon père m’avait appris à aimer le Velay et les gens d’ici et parce que l’année était symbolique, j’achetai un tas de pierres au quartier du Château, en haut d’Allègre, perché à 1100m d’altitude. Habitant encore Paris, je venais périodiquement, rêvant de découvrir un chantier bien avancé. Déceptions répétées… Mon père s’en alla en 2001 à 95 ans. En 2003 je m’installai place du Marchédial, audessus du Café du Marché, chez Destable, chez Puech, vé Tyibo. Il fallut six ans pour faire de mon tcher quelque chose ressemblant à une maïsou. Mais depuis que mon père n’est plus, ce sera comme le dit Prévert « la maison qui n’est pas Ma maison »… Venant gratter les joints, je passe devant la maison voisine, un peu en retrait. A l’étage, un monsieur, l’air sévère. Il respire de l’oxygène une partie de la journée. Il me regarde aller et venir. J’essaie de sourire à mon futur voisin. Mes sourires niais hésitent comme moi entre le respectueux, l’amène et l’amical, les uns me paraissant trop familiers et les autres trop distants. Bref je me demande quelle attitude adopter, espérant en l’amitié et redoutant d’être rejeté en tant que spécimen urbain importé. Les beaux jours venant, toujours sous oxygène, il ouvre la fenêtre. — Bonjour monsieur. — Bonjour… Petit à petit il ouvre plus que la fenêtre, un peu de son cœur aussi. — Entre, allons, on causera. Assis de chaque côté de la table de la salle, devant un ballon de rouge aigrelet, on échange. Drôles de paroissiens ! Que peut bien venir faire ici ce mouchu de la ville ? — J’habite Paris, mais je suis né en Bretagne. Mon père est né ici, à Allègre… — Ah bon ! Alors tu as une raison d’être venu ici. — J’espère que les travaux seront terminés en deux ans ? Lui, il sait, et hausse le menton, dubitatif. Bien plus tard il m’expliquera ce que je ne pouvais savoir, depuis ma capitale. « Mes ueï que sabem, tu é ieou ». Je finis par lui demander le métier qu’il exerçait. Devinez quoi… Fermier au Monteil de Vernassal, outre des pouars et des vaches Salers, il tenait un bon troupeau de brebis. Une centaine de jolies bêtes. Pas tout à fait en race pure. Quelques étoiles blanches sur les têtes et quelques nez blancs montraient qu’il y avait du Bizet ou du bélier blanc là-dessous. Ancienne mieux que vieille, la bâtisse n’était pas entretenue par les propriétaires. Un soir, au moment de la belote, un galandage s’est effondré… Fatigué, il avait cessé son activité à soixante ans et avait acheté une maison de bourg à Allègre avec ses maigres économies. Enfin chez lui. Tranquille pour ses vieux jours. Il faisait des jardins pour faire bouillir la marmite. Tant que la santé... « Quo touchi… » Ça tousse. Peu à peu il raconte, en français, ponctuant de mots en Patois, veillant à ce que j’apprenne. Mais progressivement. D’anecdotes en leçons de choses et en sages points de vue, avec des mots aussi précis que simples, soulignés de regards parfaitement droits, et scandant de ses bonnes grosses mains, il fait solidement germer et mûrir la petite graine que mon père avait semée : « les petits moutonsss, et ils sont noirs… » Ϯϴ — J’ai toujours sorti mes brebis, même dans la neige juste pour une heure ou deux. Je passais premier et je les menais manger ce qu’on trouvait. Ça les stimulait. Elle est rustique, la Noire, mais délicate. Elle ne mange pas n’importe quoi. Elle tourne autour des joncs et des herbes dures. Elle aime le terrain sec, même pentu, raide, ça ne la gêne pas. Le sol humide lui donne le piétin. Elle demande de l’attention et du soin. Il faut observer, deviner ce qui va et ce qui ne va pas. Je le tenais pour un taiseux. Non. Il observe. Comme avec ses brebis. Une fois qu’on a mérité sa confiance, c’est un merveilleux conteur. Il explique les mots particuliers que je ne pourrais pas comprendre sans lui. Les journées sont trop courtes. Ce qu’il aime le mieux raconter, c’est son métier. Ses brebis noires. La neira. Il raconte comment il nourrissait les agneaux en découpant le quartirou, les petits légumes. La branche de genêt que piquaient les Paysans qui ne voulaient pas qu’il mène ses brebis sur leur pré. Il raconte les Nautes, avec la Blanche, Tinette, l’abreuvoir. Les conneries qui se faisaient quand on était nombreux à la maïsou, au Monteil. Bourru mais tellement attentif. Attentionné. A un de ses copains qui lui rend visite et attaque en Patois : « Parle français, sinon le p’tiot ne comprendra pas. » Un jour, il sort d’une boite en fer son chéquier et d’un geste le fait glisser jusqu’à moi : « Tiens, tu l’écriras. » Tout était dit. D’un mot. Plus tard : « Tu ne me lâcheras pas la main, hein ? » Il n’avait plus d’illusions et, ne crût peut-être qu’à moitié à ma promesse. A mes compliments il répondait par la négative. « Bah, tu es bien att’lé avec moi… » « Moi je vais partir, mais toi tu vas rester là ? » Au U, l’après-midi du six février 2008, quand il est parti, il n’était pas seul. C’est promis, le René du Monteil, on fera quelque chose à Allègre pour La Neira. Mais sans troupeau, on fait comment ? Eh oui, on fera ! NB : les mots de patois local issu de l’Occitan sont donnés en phonétique. Ϯϵ Petits moutonsss… Le René du Monteil, qui racontait si bien ses brebis noires du Velay, s’en était allé en février 2008. C’était promis, on ferait quelque chose pour La Neira. Mais sans troupeau, comment s’y prendre ? La vie fait bien les choses. Quelques fois. Trois mois après que René s’en soit allé, le hasard me fait connaître Stéphane. Il est d’Allègre, élu municipal, berger et de plus c’est le président de la Sélection de la Noire. Avec l’office de tourisme des Portes d’Auvergne, on cherchait des solutions pour soutenir la fête votive de la Saint-Martin. Comme beaucoup d’anciennes foires, la nôtre s’étiolait. Et si Stéphane montait ses brebis noires à la fête ? Il veut bien, mais à la mi-novembre il peut faire froid et certaines années agneaux et brebis sont déjà rentrés. Je ne suis pas à Allègre depuis bien longtemps, mais j’ai constaté que oui, c’est trop aléatoire. Début mai, avec son frère Eddy et d’autres bergers et passionnés des chiens de troupeau, Steph donne un coup demain à Lou Pastre de la Neigre, au Monastier. La journée est consacrée à la brebis noire. Elle a repris l’idée de la fête de Bains qui avait été la première à attirer l’attention sur celui qu’on appelle alors le Mouton Noir de Bains et qu’on nommera ensuite la Brebis Noire du Velay. Une fête c’est bien, mais, quand la cause est belle, patrimoniale et locale, pourquoi pas deux fêtes, amies, à deux moments complémentaires de l’année ? Quel meilleur moment pour monter à nos visiteurs les spécialités du Velay que les grandes vacances d’été ? Le premier dimanche d’août est choisi. L’association de La Neira est créée. Elle va être tenue, la promesse faite au René du Monteil et, à travers lui, à la Noire du Velay. Après quelques réunions avec Didier Cathalan, animateur de la race ovine vellave, le programme est mis au point. La journée s’appellera « La Neira des volcans d’Allègre » ! Autour de Steph un groupe de copains et copines est partant. Je suis supposé organiser l’événement. En fait c’est le groupe qui montre le chemin… Ils ont l’habitude. Ils savent faire. Moi j’apprends. Steph me conseille d’aller voir son oncle. Après le décès de son arrière-grand-père qui lui avait fait aimer la brebis noire quand il était tout gamin, Stéphane a calqué son attitude sur celle de cet oncle, frère de son grand-père paternel. Il s’appelle René. Lui aussi… Le René de Combolivier. ϯϬ Quinze jours plus tard je lui rends visite. Accueillant, ouvert, tout en longueur. Il a une solide réputation d’homme droit, honnête, qui soigne et nourrit bien de ses bêtes en tirant parti de ce qu’offre la nature. Plein d’humour et d’autodérision. — Il ne reste de moi que les quatre montants… et l’piston. Né en 26, il est venu tout jeune à Combolivier, anciennement « combe Oyer », au Sud en bas d’Allègre, sur des terres qui descendent du Mont-Baury à la Borne. Il y est fermier avant d’acquérir la petite bouaria. L’ambiance est de la même humble et rude nature qu’au Monteil de Vernassal. On voit le ciel à travers le toit et le chat n’a pas besoin qu’on lui ouvre la porte pour se faufiler entre les planches. La burle non plus. Outre quelques vaches pour le lait, des bœufs pour le travail, René se monte un petit troupeau de brebis. Les pentes s’y prêtent bien que les fonds soient un peu humides comme en témoignent les vieux pibles. Il est un peu plus jeune que les moutonniers et bergers qui ont travaillé à retrouver la souche de la Neira, sélectionner les plus jolies bêtes, les reproduire et multiplier. Travailler à plusieurs leur permet d’échanger les béliers et d’éviter la consanguinité. L’argent n’est pas abondant à Combolivier. Il faut nourrir les trois générations de la maisonnée. Dé quiy témps les agneaux croisés sont plus appréciés et se vendent mieux dans les foires. Bien qu’il les aime et en connaisse les qualités, René ne prend pas ce qui était alors un risque : se monter en brebis noires de race pure. Il les croise avec des anglaises plus charpentées. Les « soundounes » (South-Down). Ainsi peuplée d’une soixantaine de têtes, sa bergerie est colorée, du blanc au noir… Entre les foires, il monte à Allègre vendre ses agneaux. Les deux René s’y retrouvent parfois et se respectent, jouissant l’un comme l’autre de la meilleure réputation de bergers sérieux et respectueux de la nature… La Neira ? — Elle se désaisonne facilement et elle fait souvent des bessons. Elle est très maternelle avec ses agneaux… Mais elle n’a que deux mamelles, alors quand il naît trois ou quatre p’tiots, on arrive à faire adopter ce qui sont en trop par des mères qui n’en ont eu qu’un. Il faut savoir s’y prendre mais on y arrive. René explique, détaille, précis. Toujours avec douceur et modestie. Jamais pour ce mettre en avant. D’autres ne le font que trop… Il est tranquille, mesuré, jamais égotique, ni faux modeste. Observateur de l’autre. Mon père me manque, il le sent dès les premières visites et me fait la bise. Geste affectueux, fruit de sa capacité d’observation et d’empathie développée par son métier. Il en faut, de la qualité d’observation, pour comprendre les bêtes. Généreux en amitié, et riche d’amis, René est apprécié pour son expertise. On l’appelle ici pour des débardages difficiles, là pour aider aux moissons ou pour éliminer les taupes. D’expérience, il sait exactement ce dont il est capable, ne se surestimant ni ne se sousestimant. Son ambition ? Bien faire le travail. Avec ses bœufs, sortant un automobiliste d’un fossé, ferme mais sans se fâcher : « Tu me laisses faire, sinon je m’en irai ! » Il a des expressions bien à lui ou populaires, ou ramassées auprès des Anciens quand il n’était que jeune. Il adore surprendre l’ex parisien par un mot que je n’attends pas. C’est un jeu et nous aimons autant l’un que l’autre. A lui de trouver le bon mot français ou d’occitan vellave. A moi de le saisir au vol avant qu’il tombe par terre… ϯϭ Apprenant que l’enterrement d’un vieux copain vient d’avoir lieu : — Je ne suis pas allé à son enterrement, mais il ne viendra pas non plus au mien. Un mal implacable et douloureux le ronge peu à peu, qui finira par avoir raison de lui. « La terre m’attire… » La première édition de La Neira va avoir lieu bientôt, le premier dimanche d’août 2008. Il brûle d’y participer car la cause lui semble opportune et juste. — Je monterai Princesse, la jument. Mais il souffre trop. Princesse restera au pré ce dimanche-là. On descendra des plateaux du repas de midi, à lui, son épouse et leur fille. Et on ne pourra que l’embrasser plus fort que d’habitude. A’tyi !… Voilà pourquoi à Allègre on fête La Neira le premier dimanche du mois d’août. Vaï bien lo cóp la Neira, en soi c’est déjà une raison suffisante ! Ajouter une journée de fête qui parle d’Allègre, de nostre Velai, de nos volcans, de nos spécialités fermières et artisanales, en soi cela aussi est déjà suffisant. Mais La Neira, on la fête aussi avec nos visiteurs en souvenir de celles et ceux qui ont porté haut nos valeurs. Mes ja que sabem, tu e jo… Mais déjà, nous avons compris, toi et moi que ce sont aussi des souvenirs de belles rencontres qui ont motivé La Neira. On me pardonnera de mettre de côté un petit bout de la fête pour mon père… Ses yeux gris-bleu disent combien il était heureux de faire la conversation à nos petits moutonsss du Velay. Arrête, arrête la voiture... Vois, ils sont noirs ! NB. Les mots de patois local issu de l’Occitan sont donnés en phonétique. ϯϮ et de paille s'annonce bien, du moins pour les orges. Le Bar se profile à l'horizon, vert sombre, massif et évasé en son centre sur fond de céréales dorées. Allègre paraît bien frêle sur son flanc. Des panneaux avec une silhouette de brebis noire confirment la direction et le programme. Maintenant il faut escalader la route pour atteindre le bourg et sa potence impressionnante. Le château d'origine, ravagé par les flammes en 1698, devait en imposer par sa taille et montrer la puissance des seigneurs locaux. Nous n'en avons pas de représentation réaliste, seulement des interprétations. Une petite route à droite permet d'accéder au quartier de Fonteline et au collège du Mont Bar scolarisant environ 240 élèves. Le pré à usage de parking est encore accessible. D'autres randonneurs arrivent, se préparent : chaussures, bâtons, sac, et hésitent sur la tenue à prendre car le fond de l'air est frais malgré le soleil. Je fais de même et me dirige sur le site en pleine effervescence. La Néira et les Volcans d’Allègre : 9ème édition Cette année je pars du Puy-en-Velay pour me rendre sur le site de la fête. Pas de souci en terme de météo, un temps calme, ensoleillé, frais avec un vent de nord / nord-est, idéal pour une randonnée. Le donjon de Polignac est toujours aussi majestueux. Je bifurque à la Pierre Plantée en longeant la vaste zone artisanale de Nolhac qui ne cesse de se développer. Et me voici déjà à traverser la coquette petite ville de Saint-Paulien, la Ruessium antique, un temps capitale galloromaine du Velay. Le musée Michel Pomarat rappelle ce passé prestigieux. Des campagnes de fouilles archéologiques dans le quartier des Aurouzes donnent lieu chaque année à quelques trouvailles d'importance. Dès la sortie de la petite bourgade, l'on ne tarde pas à voir se dresser à l'horizon le puissant Mont Bar. Nous sommes déjà sur la commune de Céaux-d'Allègre et un curieux pont attire mon regard au niveau du village de Chadernac que la route contourne. Céauxd'Allègre est bordé à l'ouest par la Borne occidentale et traversé dans un axe nord / sud par la Borne orientale. Leur confluence forme la Borne dans le territoire de Lissac. Notre route La mise en place C'est encore un peu tôt mais pourtant artisans et producteurs fermiers s'installent tranquillement sollicitant Gilbert Duflos, le grand organisateur de l'événement. En fait les mécanismes sont bien rôdés car chacun reprend en principe l'emplacement de l'an passé. Les premiers arrivants, se présentent déjà pour réserver le repas de midi qui se déroulera dans la salle communale ou en extérieur sous une vaste structure acquise par l'Association. Chaque emplacement offre environ 250 places assises mais vu l'affluence les places seront chères ! Je prends la file, avec JeanNoël fidèle au poste, en dégustant avec plaisir un bon café et un excellent foie grillé, le tout offert par La Neira. La caisse arrive et les préposés s'installent. Le livre sur la Neira est aussi en vente. Ticket en poche, je jette un œil à la salle de restauration avec la chaîne qui se met en place et d'impressionnantes piles de plateaux repas. Les feux pour cuire l'agneau sont en batterie derrière le bâtiment et dégagent une belle fumée. C'est qu'il va falloir assurer et ne pas mollir pour approvisionner la chaîne. En arrière-plan, le bâtiment du réseau chaleur est maintenant opérationnel, programme d'envergure pour la commune car il s'étend sur une distance de deux kilomètres. De gros travaux ont eu lieu pour faire passer les canalisations rue de Fonteline. Le réseau débute derrière la salle polyvalente avec l'installation de deux chaudières bois à plaquettes forestières et d'une chaudière fioul, laquelle assurera la continuité de la distribution en cas de panne. Le tracé desservira notamment la MAS et le secteur des Narcisses, la rue du Mont-Bar (de La traverse la Borne orientale sur un pont moderne en béton, délaissant un pont ancien, plus en amont, assez remarquable. Sa longue chaussée est longée par des parapets en pierre. L'ouvrage est percé à la base de voûtelettes permettant astucieusement l'évacuation des crues. Une arche voûtée en plein cintre laisse le passage au cours d'eau. La route est bordée d'ails sauvages bleutés. On peut en récolter les têtes remplies de graines odorantes, en condiment avec des légumes ou du poisson. La nature est rayonnante. Les prés verts promettent une récolte abondante de regain après des fenaisons au-dessus de la moyenne, sans être d'une grande qualité. Les balles rondes de paille dorée commencent à envahir le paysage au grè des moissons déjà bien entamées. La récolte de grain 33 Allègre et la plaine environnante. Les framboisiers ponctuent le chemin, accompagnés de ronciers, de fraises des bois, de sorbiers, taches rouges dans cet univers vert. Je discute avec Stéphane comme à l'habitude. Les récoltes se présentent bien, foin et regain, céréales, lentilles, maïs. Mais on est jamais à l'abri d'un accident climatique, en particulier la grêle qui anéantit tout sur son passage, les efforts d'une année. La transformation des produits et la vente en circuit court fonctionnent bien avec cependant des trous de production pour les agneaux. Stéphane pense à étaler un peu plus les agnelages pour éviter ces creux. Le lait livré aux entreprises a connu une chute importante de prix et un manque à gagner important. Il faudra peut-être favoriser les autres productions si la baisse des prix se confirme et concentrer la production sur des vaches performantes. Il convient aussi de développer l'autonomie alimentaire de l'exploitation, voir avec une remise en cause de la culture de maïs onéreuse et déséquilibrée en matière azotée, au profit de prairies artificielles de type mélange suisse avec une part importante de légumineuses. Nous évoquons aussi les autres éleveurs de la race, les anciens en retraite et les jeunes qui reprennent le flambeau. Ces fêtes sont aussi la rencontre du milieu rural et citadin pour une plus grande compréhension mutuelle, également un pont entre les générations. A un embranchement quelques brebis font une incursion rapide dans un champ de céréales, leurs têtes noires et soyeuses émergeant des épis dorés. Le chien veille au grain et la récréation ne dure pas ! Nous sommes arrêtés par un barrage de tables érigées par les administrateurs du Crédit agricole qui offrent Poste à la maison de retraite) ou encore l'église. Il pourra évoluer au fur et à mesure de l'avancement du projet. L'approvisionnement des chaudières bois est confié à Produits forestiers d'Auvergne avec un produit composé de plaquettes forestières (50 %), d'écorces et chutes courtes (20 %) et de connexes de scierie (30 %). Le camion podium de Radio Craponne est en place à proximité des cabanes de bergers et de deux brebis noires bien dociles "encastounées " avec trois petits agneaux. Ils feront la joie des enfants désireux de toucher leurs douces toisons. Les membres de l'Association portent de beaux tee-shirts rouge, pas moyen de les rater pour un renseignement ! Je fais un petit tour des exposants et un tour de prairie, au-dessus du Musée du Mont-Bar et de l'Office de tourisme des Portes d'Auvergne, pour repérer les animations de l'après midi : une centaine de brebis parquées en haut du champ et à l'ombre côté chaufferie au bois, les chevaux d'Auvergne qui se préparent pour accompagner la randonnée. Je rencontre l'ami Jean-Pierre passionné par cette race. Il est temps de partir pour le tour du Mont-Bar, un trajet de 5 km environ, à mi-hauteur, sur une piste facile et recouverte d'une fine pouzzolane assez compacte et douce à fouler. La randonnée Les chevaux démarrent et gagnent l'arrière du podium : voiture attelée tirée par deux chevaux, l'un gris pommelé et l'autre tacheté léopard, et cavaliers. Eddy assisté de son border « Gandhi » fait sortir les brebis du parc, mais effrayées par la foule des randonneurs, elles prennent la fuite, se faufilant entre les voitures pour se réfugier devant le collège. Elles se calment un peu. Les chevaux partiront devant et le troupeau suivra à distance devançant les nombreux randonneurs, pas loin de 400 selon les organisateurs. Un record ! Les photographes se placent pour réaliser les meilleurs clichés sans gêner la progression des animaux. Les photos numériques des brebis Noires, de la Fête, du Marché sont à envoyer à " [email protected] " avant l'hiver. Le jury récompensera ses préférées par un cadeau souvenir et les mettra en ligne sur le site www.brebis-noire-velay.org. J'accompagne Stéphane qui de son fouet ralentit les brebis impatientes. Elles le suivent, bien groupées et emmenées par une brebis plus âgée, toujours en tête et très docile. Stéphane la connaît bien, une meneuse toujours utile dans un troupeau. Stéphane était un peu inquiet car le lot comportait de nombreuses agnelles. Mais tout se passe bien. La marche est rapide, le chemin assez large et les randonneurs disciplinés. Les sapins et épicéas dispensent d'épaisses plages ombrées. Des coupes ont été pratiquées pour permettre des perspectives sur rafraîchissements et fruits secs très appréciés. Les chevaux ont passé le barrage pour des raisons de sécurité. Stéphane parque les brebis à l'entrée d'une carrière et lorsque les randonneurs sont rassasiés 34 demande le silence pour une présentation du volcanisme local par Jean-Noël Borget du CPIE. Ce volcan de type strombolien, cône tronqué surmonté d'une cuvette, culmine à 1175 mètres et fait face à un autre volcan, le mont Baury sur les flancs duquel se blottit le village d'Allègre. La dernière éruption du volcan remonte à environ 790 000 ans et pourtant le mont Bar compte parmi les plus jeunes des volcans du Velay dont l'âge s'échelonne de treize millions à quelques centaines de milliers d'années. Il est unique en Europe, c'est en effet le seul volcan de type strombolien qui abrite dans son cratère une tourbière, favorisée par le creusement d'un drain en 1821 pour assécher le lac qui se trouvait alors dans son cratère. Jean-Noël conseille aux promeneurs de visiter cette tourbière. Il note l'étonnante correspondance entre la brebis noire à la toison pouzzolane et le volcanisme ambiant, une sorte de mimétisme. Il passe la parole à Jean Claude Brunelin qui évoque la race Noire du Velay, son sauvetage in extremis face à un courant de « modernisation » de l'agriculture, dans les années 1970. Cette race préservée, il s'agissait de la faire connaître par un bulletin de liaison, une petite revue baptisée le « Souffle de la Neira », par des fêtes célébrant d'anciennes transhumances et enfin de la commercialiser localement en grande surface, en boucherie, en circuits courts sous une marque déposée « Agneau noir des Monts du Velay ». Il est temps de repartir par un chemin ascendant, au milieu d'une agréable hêtraie. Les chevaux prennent les devants et les randonneurs se rangent pour laisser passer le troupeau. Les brebis peinent un peu sur la pente mais restent groupées tandis que la caravane des suiveurs s'étire graduellement. Elles doivent sentir le retour au calme du pâturage qui n'est plus très loin. Voici en effet leur parc où elles se mettent en pelote et tournent en rond. Puis elles se calment et en plein soleil chôment comme on dit en langage mouton. Leurs têtes disparaissent pour se protéger des mouches et insectes piqueurs et elles présentent leurs dos comme la fameuse tortue de boucliers des légions romaines. pour le repas de midi et les animations de l'après midi. Certains passent après le repas dominical histoire d'activer la digestion. L'on y rencontre aussi des connaissances : Paul et Odette qui prennent le repas puis partent pour les Fourmofolies d'Ambert qui fête son délicieux fromage. Ma grand-mère en fabriquait dans son hameau des Echelettes au-dessus d'Ambert. Les fourmes s'égouttaient dans des chéneaux de bois et ensuite s'affinaient dans les caves humides des « sagnes ». J'en ai encore l'odeur dans le nez et la saveur dans la bouche, ma madeleine à moi ! Le groupe folklorique du Velay présente quelques danses de l'ancien temps et la buvette ne désemplit pas pour un apéritif musical bien gagné, bière bien fraîche, rosé au pamplemousse ou à la cerise..., après s'être délesté du matériel de marche. C'est le moment des politiques qui montent sur la scène. Stéphane, avant de les introduire, dit un petit mot pour remercier le public de sa fidélité. Cette fête est pour lui un pont entre générations et entre milieux urbain et rural. Il rappelle le rôle nourricier de l'agriculture en général et dans nos régions la production de produits sains et en circuits courts. L'agriculture traverse en ce moment des turbulences comme dans d'autres professions sans doute et il faut rester solidaires et unis. Il donne le micro au maire d'Allègre, M. Gilbert Meyssonier, qui salue les promoteurs de cette fête, Gilbert Duflos et Stéphane Charrat, devenue incontournable. Marie-Agnès Petit, conseillère départementale et régionale, intervient en mettant l'accent sur la qualité de nos produits locaux dont fait partie l'agneau noir du Velay. Laurent Duplomb, maire de Saint-Paulien et président de la Chambre d'agriculture, souligne les difficultés de l'agriculture et le besoin qu'elle a d'être soutenue car partie intégrante de notre économie locale. Jean-Pierre Vigier, député de la circonscription, assure de son soutien à l'agriculture départementale et en particulier aux produits locaux. Il félicite aussi les organisateurs de tels événements aptes à rapprocher les mentalités et souhaite une bonne journée à tous. Le repas Nous rejoignons le site et les nombreux touristes attendant le repas en appréciant le groupe folklorique du Velay devant le podium de radio Craponne et en visitant les divers stands. Il faut dire que cette fête est un peu à la carte et chacun y picore ce qui lui plait. La matinée est consacrée aux randonneurs, sans doute près de 400 cette année, souvent en famille, gens du cru ou touristes de fort loin parfois comme en attestent les plaques minéralogiques des véhicules. D'autres arrivent 35 printemps (tramise), osier, viorne sauvage, noisetier, pour en faire surgir pailhas, corbeilles, ruches, solides paniers… On ne présente plus Clément Maurin spécialiste de la viorne et Jean Faynel le virtuose du pailhas. Pas loin de lui, Alain Pouzols a renoué avec l'art de son grandpère et travaille avec élégance osier, noisetier et viorne. A l'extérieur deux autres spécialistes s'affairent dont un qui recouvre une bonbonne de Après cet intermède de tradition, il faut prendre la file et progresser vers les plateaux repas et la chaîne. C'est le pic d'affluence et la file progresse lentement. C'est aussi un temps pour discuter avec les voisins. Je rencontre un touriste né à SaintEtienne et habitant à Annonay, en camping car avec sa famille, un véhicule un peu ancien. Arrivé hier et devant les difficultés à trouver un restaurant, il est reparti faire des provisions à l'Intermarché de Saint-Paulien. Spécialiste de pétanque, il connaît bien et apprécie le site du Puy où il a joué près de la fontaine du Breuil. Nous arrivons aux plateaux repas garnis au passage d'un menu concocté avec des produits bien de chez nous : charcuteries d’agneau noir (saucisson d'agneau noir médaillé aux Fermiers d'Or), grillades d’agneau noir, salade de Lentilles Vertes du Puy, fromages du Velay, clafoutis moelleux aux fruits rouges, pain de tradition, café. Il faut aussi garder son ticket pour le tirage de la tombola le soir à 17 heures. L'agréable salle des fêtes est quasiment pleine et je tente ma chance à l'extérieur, en vain, et retour à la case départ où je trouve une place et m'installe fatigué de la randonnée et de l'attente. En fin de repas je fais connaissance avec mon voisin d'en face, né au Puy-en-Velay. Son père travaillait à la SNCF et avait connu très tôt la maladie du président François Mitterrand. En effet, une voiture spéciale avec tout un équipement médical, avait priorité absolue sur tous les convois. Lui-même travaillait dans l'administration des impôts et nous nous sommes trouvés des connaissances communes. Le monde est vraiment petit et la Haute-Loire en particulier. Autre paradoxe, il avait pratiqué dans sa jeunesse la boule lyonnaise mais n'aimait pas trop la pétanque comme ma précédente rencontre ! Je sors de la salle et passe à ma voiture pour m'alléger un peu car il commence à faire très chaud. En attendant le début des animations, je parcours les stands. verre. Dans l'Atelier de Maméas-Bas, Dominique Rochet modèle le bois avec une prédilection pour les fruitiers : pommier, poirier, merisier, noyer, vinaigrier vert et blanc… et en tire de multiples objets élégants et des formes proches de l'état de nature. Les produits du cuir sont présents avec en particulier une superbe collection de ceintures, en provenance de Fleur de cuir, l'atelier de maroquinerie de Leslie Sabathe installée à Allègre. Non loin nous découvrons une collection de sacs à main très colorés. Les laines du Forez montrent leurs magnifiques réalisations. Christine Becouze de Cournon présente ses élégants bijoux réalisés à la main en pâte polymère. Un stand attire l'œil et flatte les narines, savons et savonnettes de couleurs tendres pour tout les goûts : ortie, rose trémière, cade, du Velay (lait de vache, verveine, lentille), lait de brebis, lait d'ânesse, abricot, framboise, miel, poudre de Perlinpinpin... Les artisans La dentelle du Puy a toujours sa place avec de belles réalisations. Monique Gourbière, une passionnée, continue à transmettre ce savoir faire. Elle pratique cet art depuis vingt ans et enseigne "ce chant des fuseaux" à ses élèves. Elle expose au Centre Georges Sand dentelle, peinture et sculpture. Nous avons remarqué un tableau de dentelles avec brebis noires et tracteur et une ferme miniature du plus bel effet. Un couvige s'affaire à l'extérieur devant des spectateurs ébahis par la dextérité des dentellières. La vannerie traditionnelle est encore de la fête avec plusieurs artisans qui préparent, entremêlent des matériaux aussi divers que paille de seigle de Les producteurs fermiers Producteurs de fruits rouges, Marie-Claire et Dominique Reynier-Bissuel sont installés à Aubaron sur la commune de Fix-Saint-Geneys. Ils cultivent framboises, groseilles, cassis, fraises qu'ils vendent en l'état ou sous forme de délicieuses confitures. Ils gèrent aussi des gîtes ruraux pour une découverte de cette attachante 36 patrimoines et savoir ruraux, la défense de la qualité des produits fermiers, notamment par l’agriculture biologique. En Haute-Loire, les CIVAM proposent 5 groupes de bases : Civam produits fermiers, Association régionale miels de montagne, Civam apicole du Velay, Accueil paysan, Civam « Les Pays de la Haute-Loire ». Ils organisent et participent à la Foire Concours de Fromages Fermiers, au Roi de l'Oiseau, à la Foire Concours au Miel à Aiguilhe et à la foire de la Patate à Solignac-sur-Loire. région. Hélène et Daniel Perrrin, pains d'épicier, confituriers, de Saint-Victor-sur-Arlanc présentent leurs savoureuses confitures de figues, quetsches, griottes, pêches-framboises, leurs célèbres pâtes de fruits les Bouchées de Saint-Victor, des sirops et de l'hypocras. Daniel est un passionné de radio et son musée mérite le détour. Le miel de Christiane Farget, apicultrice à Taulhac, est le reflet de notre riche flore. Avec son mari, elle propose aussi un gîte de caractère à Menteyres. Le Gaec de Combe d'Azou commercialise ses charcuterie d'agneau noir : pâté et saucisson médaillé aux Fermiers d'Or, et ses viandes sous vide. Turion Pierre des Nautes de Vernassal présente un joli stand de légumes bio : oignons, potimarrons… fort bien mis en scène dans des paniers en vannerie. Julien Soubeyre des Crozes de Roche-en-Régnier, présente en vente directe ses volailles fermières élevées en plein air : poulets, pintades et canards. La boulangerie d'Allègre propose différentes variétés de pain, viennoiseries, gâteaux et glaces prises d'assaut l'après midi. Guy Trescarte confectionne pour les gourmands de délicieuses crêpes à la farine de lentille et propose un stand d'information des CIVAM. La Calendreta Un stand très coloré aux couleurs de l'Occitanie présentait les activités de la Calendreta velava, outil important pour la préservation de notre langue occitane et sa transmission aux jeunes générations. L’occitan est la première langue écrite en Europe après le latin, transmise depuis plus de 1000 ans, langue de culture et de création artistique depuis les Trobadors (localement : Pèire Cardenal), en passant par Frederic Mistral (Prix Nobel de littérature 1904). Calandreta (en occitan petite alouette) est une école maternelle et primaire bilingue occitan/français. L’enseignement en Calandreta est basé sur un bilinguisme précoce à partir duquel l’enfant apprendra plus facilement d’autres langues. C'est une école associative, dispensant un enseignement respectant le programme de l’Education nationale, suivant une pédagogie adaptée. La langue de l’école est l’occitan parlé en Velay, Calandreta s’appuie sur ce socle culturel pour aborder l’environnement et le monde d’aujourd’hui. Un enseignement en immersion linguistique est donné dès la maternelle et des choix pédagogiques s’inspirent des méthodes Oury et Freinet. Ils visent à favoriser l’autonomie des enfants et à les rendre acteurs de la vie de groupe. Les CIVAM Les CIVAM, Centres d’Initiatives pour Valoriser l’Agriculture et le Milieu rural, articulent leurs actions sur « Un développement durable pour des campagnes vivantes et solidaires ». Ils sont organisés en Fédération nationale, 12 Fédérations régionales, 200 groupes locaux, 150 animateurs et techniciens et plus de 40 000 acteurs du monde rural. Ce réseau national d’associations est né dans les années 1950 sur l’initiative d’enseignants, d’agriculteurs et de ruraux. Les CIVAM se sont fondés sur les valeurs des mouvements de l’Education Populaire, avec pour principal dessein de permettre aux familles agricoles d’accéder à une véritable autonomie grâce à la formation. Sur le département, ils se sont trouvés en concurrence avec les services de développement des Chambres d'agriculture. Au fil des années et des crises agricoles, les CIVAM se sont engagés vers d’autres modes de développement. Ils ont contribué à la recherche de solutions valorisant au mieux le potentiel humain et productif du milieu rural : la diversification des activités, l’aide à l’installation en milieu rural de nouveaux actifs, la reconstitution de liens entres les populations urbaines et rurales, l’éducation du consommateur et du citoyen, la valorisation des Depuis 2003, l’école Calandreta Velava PèireCardenal proposait cet enseignement dans le bassin du Puy-en-Velay. Elle est maintenant installée rue Norbert-Rousseau, près de la gare et compte 33 élèves. Les cours se déroulent dans les bâtiments de l'école maternelle et primaire SaintNorbert. « Nous cherchions de nouveaux locaux, raconte Virginie Waucquiez, présidente de l'école 37 produit sur cette fête en intermède aux autres animations : démonstration de chiens, évolutions des chevaux. Quatre musiciens accordéonistes sont installés sur le podium et rythment les danses et saynètes commentées au micro par une animatrice du groupe. Deux d'entre eux ont aussi accompagnés la randonnée. Réfugié à l'ombre, un nombreux public de tous âges apprécie le spectacle, enfants assis au sol et personne âgées radieuses aux premières loges. Ces scènes de vie villageoise leur remettent en mémoire le temps d'antan. associative franco-occitane. Une maman a vu l'annonce et en a parlé à Saint-Norbert. L'école cherchait une solution pour occuper des salles vides qui correspondait à ce qu'il nous fallait». Chaque entité garde donc son contenu pédagogique propre et ne fait des concessions que sur les horaires de récréation ou l'horaire de la cantine. La calandreta Ribeirona de Lavaudieu, quant à elle, a ouvert ses portes en 2015 dans un logement privé qui est aussi l’ancienne école de garçons, une solution temporaire. Le stand présentait des documents d'information et des petits gâteaux les « Calendrounets », savoureux sablés en forme de croix occitane. Le cheval d'Auvergne Ses aptitudes Nous vous l'avons déjà présenté mais un petit rappel n'est pas inutile. Egalement appelé jument de Fay en Haute Loire, ragot du Béage en Ardèche, Lozero en Lozère, Aumontois, en Aveyron, Cantalou dans le Cantal ou encore ragot d’Auvergne dans le Puy de Dôme, c’est un petit cheval de montagne du Massif central connu par des écrits dès 1660 dans un livre de Puvinel. Toutes ces régions avaient leur cheval de travail, un petit équidé rustique, docile et Les autres animaux Soulon Bernard présente poules de plusieurs espèces et lapins. Les enfants se pressent près des cages. Son élevage est à Freycenet de Borne et il élève ses volailles en plein air avec des produits naturels. Et bien sûr le cheval d'Auvergne représenté par de beaux spécimens est de retour sur la fête, non pour un concours, mais pour des démonstrations diverses mais nous y reviendrons. Voilà j'ai fait mon tour sans oublier un exposant j'espère… Mais les animations vont commencer, il est près de 15 heures le temps est toujours magnifique et le public encore plus nombreux. Les animations de l'après midi Le groupe folklorique Le Velay Il comporte une quarantaine de membres actuellement, tous passionnés de culture locale. Il est ancien, fondé en 1933 par un musicien de talent, Jean Pitacco, pour être le témoin de la vie de nos ancêtres du Velay vers les années 18901930. Cela implique une reproduction scrupuleuse des us et coutumes, musiques et chants, danses et costumes, parler vellave, vieux métiers… La tache est difficile mais enthousiasmante. Les remarquables costumes reproduisent au détail près ceux de nos aïeux. Ils sont agrémentés des dorures indispensables : Rose du Velay (pendentif ancien en forme de rosace à pampille, or serti de grenats), Saint-Esprit (pendentif ancien « Saint Esprit » Vellave en or jaune agrémenté de grenats sertis et d’émail blanche et verte), épingles de coiffes. Les membres ont élaboré des spectacles qui reproduisent des tranches de vie culturelle et populaire. L'histoire locale est racontée à travers danses (bourrées, polkas, mazurkas...), scènes de théâtre et chants, reliés par un fil conducteur : vie paysanne, dentelle, fête de village, mariage… Le groupe s'adapte aux diverses situations. Il se polyvalent pour répondre à la demande des petites exploitations, du transport léger et de l’armée. Ce débouché se maintient jusqu’au 19ème siècle. Mécanisation galopante et évolution des modes de vie accélèrent sa disparition. Le modèle initial avait cependant été gardé par quelques éleveurs pratiquant l’équitation ou ayant des troupeaux en altitude. A partir de 1997, les membres fondateurs ont créé l’Association de sauvegarde et de relance du cheval d’Auvergne. On dénombrait alors seulement 32 chevaux. L’association a travaillé sur le cloisonnement des groupes d’élevage apparentés, un programme d’élevage visant à améliorer les qualités d’ensemble et l’augmentation du nombre des naissances. Actuellement le cheval d’Auvergne est apprécié en tourisme équestre et en équitation de loisirs 38 compétitions de dressage constituent l'évaluation de cette progression et permettent aux cavaliers de tous niveaux de faire la démonstration de cette entente. dans sa région d'origine, car il est bien adapté à l'environnement de moyenne montagne. Il peut également tracter des attelages légers. Leur présence est appréciée dans les écoles d'équitation grâce à leur physionomie et leur caractère qui rassurent les débutants. Ils sont également prisés pour les compétitions de TREC, Techniques de randonnée équestre de compétition. Il peut être employé comme cheval de travail en maraîchage, pour l’entretien des vignes et au débardage. Une démonstration de dressage Les organisateurs ont clos et aménagé la partie inférieure du pré pour cette démonstration : tronc d'arbre à enjamber, passage à gué figuré par du film plastique, petits obstacles à sauter. Une séance de dressage commence par une phase de détente qui prépare le cheval au travail puis des exercices comme des déplacements latéraux. Le cavalier se présente ensuite sur le pré, passe le gué franchement à plusieurs reprises, enjambe sans hésiter le tronc d'arbre. Puis son cavalier le lance pour sauter les trois obstacles successifs dans une belle envolée. Deux jeunes cavalières viennent ensuite avec des chevaux peu expérimentés qui refusent le passage du gué. Une cavalière descend alors de sa monture et entraîne son cheval par la longe. Rassuré, il la suit et passe l'obstacle. Elle remonte en selle et retente le passage. Après quelques hésitations, le cheval le passe mais en biais pour en raccourcir la durée ! Finalement l'autre cheval passera aussi le gué en suivant de près la première cavalière. Non sans difficultés, ils passent aussi le tronc d'arbre. Une cavalière conduit sa jument à la longe sur les différents obstacles et tente de lui faire mettre un sabot sur un plot. Les chiens de troupeaux La dernière cavalière dirige son cheval à la longe vers le troupeau de brebis Eddy, le frère de Stéphane fait évoluer les brebis avec son chien "Gandhi", un Border Collie très actif. Il rassemble les brebis et les fait évoluer dans le pré au gré des commandements de son maître, bondit, virevolte, s'aplatit en arrêt, repart et ramène la troupe. C'est un chien rarement au contact direct du troupeau. Il reste à distance dans des manœuvres d'encerclement. Sous les ordres de son maître, il tente de faire approcher les brebis du cheval. Progressivement les animaux se calment et cohabitent calmement, moment fort et symbolique de rapprochement entre ces deux races locales rescapées et sauvées par des éleveurs passionnés. La fin de soirée La Tombola est tirée vers 17 heures. Danses du Velay se poursuivent jusqu'au soir et pour les plus enthousiastes ou les retardataires, un repas est aussi prévu le soir pour mettre un terme à cette belle journée. A la prochaine… Un autre belle fête réussie et maintenant bien implantée dans cette belle région d'Allègre. Merci aux organisateurs pour ce parfum d'authenticité. C'est par de telles manifestations que l'on montre simplement les solides traditions de notre terroir, sur le plan des paysages, de l'artisanat, des produits naturels de qualité. Le dressage est une discipline essentielle puisqu'elle éprouve la qualité de la communication entre le cheval et son cavalier. C'est la première discipline pratiquée par le débutant qui devra tout au long de sa vie de cavalier affiner ses gestes et attitudes pour obtenir une attention optimum de sa monture. Les Alors rendez vous à Allègre en août 2017. 39 dans un parcours d'obstacles recréant les conditions d'un travail de gardiennage et de conduite de troupeau, authentique association Autres évocations de transhumances La grande transhumance a depuis longtemps disparu dans notre département. Quelques troupeaux estivent encore sur les hauteurs du Cantal, du Sancy, de Pierre-sur-Haute, de Lozère. Les grands troupeaux monastiques pratiquaient jadis une transhumance dite inverse en allant hiverner en basse Ardèche ou même aux Baux-de-Provence. Outre la Noire du Velay, d'autres fêtes célèbrent ces mouvements de troupeaux à la recherche d'herbages abondants. Il en est ainsi en Margeride, région naturelle de transhumance pour les troupeaux du Midi, et au Lizieux grâce à un berger originaire d'Arles. entre l'homme et le chien. Une mise en scène montre les techniques anciennes de mise au parc du troupeau, du tournage du parc, aux abords de la cabane de berger qui abritait le berger lors de ses déplacements. Une autre scène décrit la patche, négociation du prix entre berger et marchand de moutons. Les chèvres sont aussi de la fête. On peut les caresser car elles sont familières et aussi essayer de les traire… une expérience qui plait toujours aux enfants et aussi aux adultes. Pour mettre de l'ambiance, un concours pour estimer le poids d'une belle génisse de race Hérens, permettra au gagnant d'emporter une vraie cloche d'alpage. L'estimation du poids d'un animal faisait partie des qualités d'un bon éleveur, tant pour vendre que pour acheter. Les métiers anciens ne sont pas oubliés avec des démonstrations de dentellières penchées sur leur carreaux et faisant chanter les fuseaux. Les Ateliers de la Bruyère proposent des démonstrations de feutrage de laine de pays et exposent leurs réalisations. Des machines de tous les âges et en parfait état de marche laissent apprécier les progrès de la mécanisation agricole: tracteurs, curieuse batteuse au fléau… La vieille langue que parle encore les Anciens, l'occitan appelé communément patois, n'est pas oubliée et l'on peut s'essayer à une dictée… Une originalité de cette fête est l'animation théâtrale sur le thème du berger "Le conte de la première bergère du village", un conte vivant écrit par André Gibert et mis en scène par Patrice Marsollier, avec environ La fête des bergers à Venteuges Devenue traditionnelle, elle se tient le premier samedi d'août, cette année le 6 août à Venteuges. C'est une journée bien particulière dans cette petite commune de Margeride qui compte encore 4000 brebis, essentiellement de race Blanche du Massif central appelée jadis Blanche de Lozère, et Lacaune pour les producteurs de lait de brebis. Venteuges se plait ainsi une fois l'an à célébrer cette vie agripastorale qui a tant marqué ce pays de tradition ovine. Cette fête est toute simple, autour du berger avec son troupeau de brebis et ses chiens. C'est l'occasion de retrouver des savoirfaire et des gestes authentiques avec ceux-là même qui les ont pratiqués pendant toute leur vie. La matinée est consacrée à une randonnée guidée et contée sur les chemins qu'empruntaient les bergers. Le départ est donné à 8 heures près de la cabane du berger et du parc de brebis pour revenir à Venteuges à l'heure du repas. Les randonneurs sont conviés au casse-croûte au couteau dans le pré à l'entrée du village : pain de seigle, lard, saucisse, fromage de brebis, gâteaux, vin et café. L'après midi est consacré à diverses animations. Le concours de chiens de berger met aux prises plusieurs éleveurs avec leurs chiens. Le berger commande son chien qui doit déplacer un lot de brebis 40 Il a gardé la race exploitée en Arles, plus précisément le Mérinos d'Arles, 200 brebis environ et leurs 180 agneaux. Cette race élevée pour les agneaux et la laine, fut améliorée dans le sud-est de la France au cours du XIXe siècle, par croisement de brebis locales avec des béliers mérinos espagnols déposés à la bergerie impériale d'Arles qui a fortement contribué à diffuser cette race dans la région à partir de 1804. Par l'apport de sang mérinos, race réputée pour sa toison, on cherchait tout d'abord à produire de la laine. Le mérinos d'Arles est un mouton de petite taille et doté d'une grande rusticité. La laine recouvre l'intégralité du corps, y compris le front, les joues et les pattes. La tête porte des cornes enroulées en spirales chez le mâle, Le mérinos d'Arles est un mouton de petite taille et doté d'une grande rusticité. La tête porte des cornes enroulées en spirales chez le mâle. Elevé en grands troupeaux, il est bien adapté à la transhumance entre la plaine de Crau et la haute montagne l'été. La transhumance partait à 10 heures de la place centrale au Mazet-Saint-Voy en direction du village de la Chèze. Arrivé au hameau, il était possible de prendre un repas, cuit au four à pain : pain, pizza, estouffe, grillades d'agneau et tarte. Des animations, dès l'après-midi, permettaient de mieux connaître le métier de berger : tonte, parage de pieds. 40 comédiens amateurs, adultes et enfants, de Venteuges. Deux représentations se tiennent à 16 h et 17 h 30. Cette animation fait partie des activités de l'Association "Chemins en Gévaudan" qui propose des randonnées : une randonnée par mois ; randonnées à thème : chemins de traverse (patrimoine) en février, chemins de paix en mars, flore en juin, nocturne en septembre ; grande randonnée d'une semaine en mai ; week-end en septembre. "Chemins en Gévaudan" est à l'origine d'autres animations : concerts, théâtre, causeries, lecture à voix haute, atelier théâtre, atelier lecture, atelier patois vivant à Venteuges ; Fête des bergers à Venteuges le premier samedi d'août. Elle produit d'autre part La Feuille Bleue, un bulletin mensuel donnant le compte-rendu des activités de l'association et le programme du mois. Transhumance du Lizieux Yves Jouffrey, originaire justement de régions transhumantes et berger à "La Bataille" au Mazet-Saint-Voy, a eu l'idée d'évoquer cette pratique ancestrale. Un nom prédestiné pour cette ferme qu’Yves et sa compagne Claire ont achetée en janvier 2012 et qui marque l’aboutissement de longues démarches et de pas mal d'échecs ." Cela restera un peu notre bataille à nous, c’est sûr ! Ici aussi les vents se battent. Les jours où la burle se lève, ça me rappelle un peu le mistral. Cela fait maintenant trois ans que nous travaillons sur ce projet " explique Yves. Originaire d’Arles, lui-même fils et petit fils de bergers, « les brebis, je suis né avec », comme il aime à dire. Impossible de s'installer dans sa région natale essentiellement à cause du prix du foncier, alors comme son épouse est originaire du Mazet, ils ont saisi cette opportunité. Depuis, chaque année, cette randonnée avec les moutons et les brebis, entourée de promeneurs, est l'occasion de fêter cet animal à laine et de faire connaître les produits d'Yves Jouffrey, qui enfile cape et chapeau, long bâton à la main. Son idée est de vendre sa production en circuit court et à terme de proposer des plats cuisinés à base d'agneau et de produits locaux comme le chou... de vieilles recettes de sa grand-mère ! 41 hŶǀĠƚĠƌŝŶĂŝƌĞƉĂƐƚƌŽƉƉƌĞƐƐĠ ;'ƌğnjĞƐϭϴϲϵͿ À l’automne 1869, nous sommes à la fin du Second Empire, mais personne ne l’imagine, en revanche on a une préoccupation immédiate dans la commune de Grèzes, située à quelques kilomètres de Saugues, car un fléau vient de la toucher : la rage. Le 25 octobre 1869, l’adjoint au maire de Grèzes, Jean-Claude Mazel1, écrit au préfet2 pour l’informer, « en exécution de l’arrêt du Conseil d'État du 19 juillet 1746, que la maladie de la rage vient de se manifester dans la commune et notamment au village de Grèzes ». Il décrit ensuite ce qui a été observé : Pendant le mois de septembre et aux premiers jours d’octobre plusieurs chiens atteints d’hydrophobie avaient parcouru le pays. Le 6 octobre surtout un chien de berger d’origine inconnue s’est jeté au milieu des bêtes à cornes du village de Grèzes et en a mordu un grand nombre, avant-hier une vache appartenant au sieur Antoine Salgues et hier une génisse appartenant au sieur Joseph Ombret ont donné des signes non équivoques de cette terrible maladie. Ces deux bêtes faisaient partie du troupeau attaqué le 6 octobre3. Il est fort à craindre que bon nombre de bêtes ne soient infectées. En conséquence il demande au préfet « d’envoyer d’urgence le vétérinaire que bon vous semblera pour prévenir les accidents qui sont imminents. Je ne doute pas que dans votre haute sollicitude vous ne donniez des ordres précis pour arriver à ce résultat ». En attendant le spécialiste, il indique les mesures décidées : « les précautions nécessaires en pareil cas ont été prises par mes soins. Les animaux malades sont séquestrés. Tous les chiens suspects ont été abattus. Et je ne laisserai point abattre les animaux malades ou qui peuvent le devenir avant l’arrivée du vétérinaire afin qu’il puisse s'édifier d’une manière exacte ». Le préfet, dès le 27 octobre, s’adresse à « M. Pascal, vétérinaire de la 2e circonscription » qu’il « invite » à se rendre à Grèzes afin de se « concerter avec l’autorité municipale pour prendre les mesures exigées en pareil cas » et lui demande de lui « adresser aussitôt que possible un premier rapport sur cette affection et sur les moyens employés pour la combattre ». Il précise enfin que pour le paiement de ses honoraires le vétérinaire devra joindre à ses « états de dépenses une copie de la présente lettre » qui a donc valeur d’ordre de mission. Un second courrier relatif à la rage arrive sur le bureau du préfet, c’est une lettre de son collègue de la Lozère, datée du 29 octobre, qui lui signale qu’il est « informé que des chiens hydrophobes4 parcourent depuis quelque temps le canton de Langogne ». Il cite le cas d’un employé du chemin de fer qui « vient de mourir dans d’horribles souffrances, victime d’une morsure qui lui fut fatale le 12 août dernier dans la ville de Langogne, par un chien enragé ». En conséquence, il a donné des instructions « pour qu’il soit pris immédiatement des mesures par les autorités locales en vue de prévenir de nouveaux malheurs » et précise « J’ai cru devoir porter à votre connaissance les faits qui précèdent afin que, de votre côté, vous puissiez, s’il y a lieu, prendre telles mesures que vous jugerez convenables ». Il est évident que les limites départementales ne sont pas des ͳǦǡ ǡǡ ǯǯ±Ǧ Ǥǡǡ°ǡ °Ǣ±ͳʹ ͳʹͷǡ±ǡͳͷͳǡ °ǦǦ ǡ±Ǥȋ ǡ ±± ǡ ± ǡ ȋǣȀȀǤ Ǥ ȀȀͲͲͲ͵ͷͷͷͲ ͷ ͶͶͳȌǤ ʹǡ ǦͳͺʹͳͺͲǤ ͵±ǯ ±±ǡǯ ǯȋȌǤ ͶǯȋǯȌ±Ǥ Ͷʹ frontières pour les animaux et les maladies et il est préférable d’étendre les mesures au-delà d’une circonscription territoriale. À Grèzes, on est toujours dans l’attente du vétérinaire, aussi le 31 octobre, Jean-Claude Mazel, l’adjoint de Grèzes, écrit une nouvelle fois au préfet, il rappelle son courrier du 25 et ajoute : Je vous prierai donc instamment d’envoyer le vétérinaire afin qu’il puisse enrayer les progrès de la maladie. On n’évalue pas à moins de 40 le nombre de bêtes mordues par ce chien. Le 24 la rage s’est déclarée chez deux vaches. Le 27 deux autres ont manifesté les mêmes symptômes. Aujourd’hui 31, une cinquième bête vient encore de donner des signes certains de la maladie. Les propriétaires de Grèzes sont dans la consternation, ils vous supplient de donner des ordres afin que le vétérinaire que vous voudrez bien désigner ne mette aucun retard à se rendre à Grèzes pour aviser comme il l’entendra aux moyens à prendre sur les animaux mordus chez qui la maladie ne s’est point encore manifestée. Le 2 novembre, le préfet qui a fait son travail, s’adresse une nouvelle fois au vétérinaire, mais désormais fois ce n’est plus une « invitation » à se rendre sur place : Le 27 octobre dernier j’ai eu l’honneur de vous inviter à vous transporter à Grèzes et à vous concerter avec l’autorité municipale pour arrêter les progrès de la rage parmi les bêtes à cornes mordues par des chiens hydrophobes. M. le maire me rappelant cette affaire je vous prie de ne pas différer plus longtemps de vous rendre sur les lieux et de prendre les mesures exigées en pareil cas. Le lendemain, 3 novembre, le Préfet adresse un courrier aux maires des communes de SaintHaon, Rauret, Saint-Étienne-du-Vigan, Pradelles, Monistrol-d’Allier, Alleyras, Saint-Christophed’Allier et Vabres, les informant que « des chiens hydrophobes parcourent les bords de l’Allier et [ont] mordu quelques personnes » et il ajoute : La loi vous a donné les moyens de parer aux événements fâcheux que pourraient occasionner les chiens dangereux. D’après l’arrêté général du 27 messidor an V, vous pouvez faire tuer ceux qui se trouveraient dans cet état et prescrire de tenir à l’attache les chiens mordus ». Dans l’intérêt de la sécurité publique je vous recommande de prendre les mesures destinées à prévenir de nouveaux malheurs. Les documents ne nous permettent pas d’aller plus loin dans cette affaire, on peut penser que le vétérinaire s’est enfin rendu à Grèzes, mais nous retenons de ces quelques lettres qu’en cette fin de XIXe siècle, la rage est un véritable fléau qui peut avoir de graves conséquences humaines mais aussi économiques5 en décimant une partie du cheptel. ± ͳʹʹͲͳͷ ͷǯ °ǡǡðͳͺ͵͵ǡǦ± Ǽ ǯ ȏȐ ± Ǣ ²±±°± ͳðͳͺͳͺιͳͶ ǡͳͳʹǡǤǽȋͶͺȌǤ Ͷ͵ supplémentaire de la légion d’honneur est même créée en 1932 pour les mutilés à 100 %. Ces médailles envoient bien un signe à celui qui la voit et distingue celui qui la porte. Mais cela a-t-il suffi ? Certes, des campagnes de presse ont été organisées pour héroïser les soldats blessés, pour magnifier leurs infirmités. Le sacrifice d’une vie entière, la gloire et la compassion étaient-elles une compensation suffisante pour oublier la guerre, pour dépasser leurs handicaps et les mutilations de leur chair et de leur esprit ? Le législateur va s'emparer du problème et élaborer deux lois dont nous donnons le contenu. La loi de 1916 s’adressera aux seuls militaires (et pas à leurs ayants droits), et le classement se fera selon la composition de leurs familles. Celle de 1923 s’adressera aux militaires et enfin aux ayants droits : veuves et orphelins mais aussi aux « compagnes ». Et le classement se fera par rapport à la gravité des blessures. Les mutilés de la Première Guerre Mondiale Des médailles, des pensions, des emplois Proportionnellement à sa population, la France est, parmi les belligérants de la Première Guerre mondiale, le pays qui a perdu le plus grand nombre d’hommes : un soldat sur cinq y est mort (plus d’1,4 million au total). Mais c’est sans compter plus de trois millions de blessés dont près d’un million a droit au versement d’une pension d’invalidité (600 000 invalides, 300 000 mutilés et amputés, 42 000 aveugles, 15 000 gueules cassées). 100 000 « soldats de la honte », marqués psychologiquement par la guerre, ne furent jamais pris en considération mais plutôt stigmatisés comme lâches, tout comme les « mutilés volontaires ». Le visage de la France a totalement changé au lendemain de la Grande Guerre. Les gueules cassées, les mutilés dans leur fauteuil roulant, les amputés en béquille, ou ceux dont la manche vide est glissée dans la poche de la veste, les aveugles. Tous les jours, ils rappellent à la population les horreurs de la guerre et les sacrifices qu’ils ont subis dans leur chair pour la patrie. Mais cette patrie est-elle reconnaissante ? Les regards détournés, les fiançailles rompues, les difficultés professionnelles ne sont-ils pas autant de symboles du malaise de la population face à leurs handicaps ? Valait-il La loi du 17 avril 1916 Le bénéfice de la Loi ne vaut que pour 5 ans à dater du jour de la fin des hostilités. Mais heureusement cette échéance sera à de multiples reprises prorogée. L’avantage n’est pas fonction du grade, ni de la durée de service. Il est fonction de la composition de famille et non de la gravité des blessures. La gravité des blessures permet d’entrer dans la catégorie, mais ensuite c’est la composition de famille qui décide du reste. Pour obtenir un poste, il faut en avoir les diplômes et les qualifications intellectuelles et physiques. Il n’y a pas de dérogations et les exigences sont lourdes. Des commissions militaires décident si quelqu’un est ou non apte à exercer une profession. Si la profession exige un diplôme, il faut, sans discussion, avoir au préalable ce diplôme. En cas d’ex aequo pour un poste, la préférence ira au père de famille la plus nombreuse, puis à celui dont l’infirmité est la plus grande, puis à celui qui a eu le meilleur classement aux examens. Les postes à fournir ne sont guère attractifs. Il y a cependant quelques exceptions : instituteurs, conducteurs de travaux, facteurs-receveurs, télégraphistes, et aussi quelques bizarreries : gardiens de phare. Aucune société ne pourra plus répondre à des adjudications si elle n’accepte pas de reprendre en son sein des invalides de guerre. Les militaires, même parfaitement valides, qui exerçaient avant guerre mieux mourir pour obtenir la gloire ? Il y a bien eu les médailles octroyées par l’Etat, en reconnaissance de leur bravoure, de leur courage, de leur exemplarité. Une petite étoile rouge dont le nombre dépend du nombre de blessures est instaurée en 1916. Une catégorie 44 Seine réceptionnant un nombre beaucoup plus élevé de demandes d'emploi que les autres. La plupart obtiennent un emploi à Paris ou dans ses banlieues. La loi leur réserve 600 types d’emplois divers, représentant 240 000 postes de travail. Ces emplois appartiennent aux quatre catégories de qualification, la catégorie 1 renvoyant aux fonctions qui sollicitent un haut niveau de qualification et la catégorie 4 à celles qui en nécessitent pas ou peu. La loi vise ainsi à répondre aux profils professionnels de l'ensemble des victimes de guerre, des plus aux moins instruites ou aptes physiquement. Mais dans la réalité, la majorité des emplois que les victimes de guerre demandent et obtiennent appartiennent à la quatrième catégorie, la plus accessible. Aussi petit soit le salaire que leur procure ces postes qui ne requièrent pas ou peu de qualification, il leur est nécessaire pour survivre, car la pension de guerre était insuffisante. Hormis les pensions des grands invalides (infirmes à 85 % ou plus) dont le montant leur permet d'être à l'abri du besoin, les autres ont une valeur essentiellement symbolique pour les engager à se réinsérer socialement. En 1928, une veuve de simple soldat non remariée touche une pension annuelle de 4,64 francs par jour, alors que le prix d'un kilo de pain s'élève à 2,11 francs et le litre de lait à 1,45 francs. Il faut ajouter les frais nécessaires pour se loger et se chauffer. Ainsi, devenir ouvrière d'une manufacture de tabac ou gérante de cabine téléphonique, dont le salaire procure en 1929 entre 22 et 25 francs par jour est le meilleur moyen pour une veuve de trouver une situation stable, d'autant plus stable que c'est en tant que titulaires et non qu'auxiliaires temporaires que les bénéficiaires de la loi de 1923 sont recrutés dans la fonction publique. L’Etat est dans les faits le seul qui appliquera le droit. La loi du 26 avril 1924 sur l'emploi obligatoire des mutilés de la guerre dans les exploitations industrielles, commerciales, agricoles et forestières est très peu, voire pas du tout appliquée. La réparation due par l'Etat à l'invalide revêt deux formes : l'indemnité représentée par la pension et la faculté donnée à l'invalide de surmonter un emploi dans une société ont priorité sur les militaires invalides mais qui n’exerçaient pas d’emploi dans cette société. Cette préférence commence dès la promulgation de la loi, mais pour un nombre restreint du total des postes à pourvoir. La loi ne sera valable pour tous les postes à pourvoir qu’une fois la guerre terminée. Cette loi très restrictive est revue après la fin du conflit. La loi du 30 Janvier 1923 Elle s’adresse à un bien plus large public : non seulement 1 million d’invalides, mais aussi 600 000 veuves et 550 000 orphelins de guerre avec en plus les victimes civiles féminines et masculines qui se voient accorder un accès prioritaire à ces emplois. Dans les faits, quelques 150 000 victimes de guerre ont pu bénéficier d'un emploi réservé, c'est à dire moins de 10 %. Les mutilés sont en grande majorité des célibataires sans enfant, « grands mutilés » avec des probabilités réduites de mariage. Les bénéficiaires féminines sont pour les trois quarts des mères de famille nombreuses. En 1923, la très grande majorité des victimes de guerre ont déjà plus de 30 ans, les combattants et donc les veuves des combattants, sont restés mobilisés plusieurs années. La loi s'adapte d'ailleurs à cette réalité démographique en stipulant que ces ayants droit peuvent faire acte de candidature sans condition d'âge. Dans le même temps, les dispositions de la loi, initialement valables pour cinq ans, sont constamment prorogées, et permettent ainsi aux victimes de guerre de postuler un emploi réservé jusqu'en décembre 1939. Ainsi celles qui sont nommées au cours des années 1930 ont alors en moyenne une quarantaine d'années. Ces mutilés, veuves, orphelins et victimes civiles ont pu faire valoir leur droit sur l'ensemble des territoires placés sous autorité française, métropole et colonies, à tous les échelons administratifs, des communes aux ministères. Néanmoins, la plupart ont déposé leur candidature dans les corps d'armée des grandes villes, celui de la 45 l’handicap à l’embauche pour malgré tout avoir une carrière compatible avec ses aptitudes physiques et professionnelles. Ces deux formes de réparation se complètent : l'Etat doit à l'invalide la pension et le reclassement social. La France, qui a perdu 1 408 000 de ses enfants, morts ou disparus a besoin, pour son relèvement économique, de l'effort laborieux de tous les autres, valides comme invalides. Pour le reclassement social, la sélection se fait en deux temps. Tout d'abord, les candidats doivent prouver qu'ils remplissent les conditions pour postuler à l'emploi qu'ils désirent, en fournissant les documents administratifs correspondants : médicaux, militaires et civils (composition de famille et diplômes). Ensuite, ils sont soumis à des épreuves d'aptitude physique et professionnelle. Les épreuves sont difficiles car il ne saurait être question de transformer les administrations en œuvres de charité. Les épreuves que doivent passer les candidats sont d'un niveau de difficulté comparable aux examens des candidats ordinaires. A l'issue de ces épreuves, les commissions délivrent ou non le certificat attendu. Une fois en poste, les candidats sont souvent soumis à un stage probatoire plus ou moins long à l'issue duquel ils peuvent être remerciés ou titularisés. Dans ce cas, ils obéissent aux mêmes rè- le droit de recours des ayants droit devant le Conseil d'Etat et la création d'une commission de contrôle dont la fonction est de veiller à l'application de la loi et d'en repérer les différentes violations. Cette commission, qui s'informe principalement auprès des victimes de guerre, est tenue de remettre un rapport annuel au ministre des pensions, publié ensuite au Journal Officiel. Les parlementaires ont pris de nombreuses dispositions pour favoriser le reclassement des victimes de guerre face à des administrations souvent réticentes. Mais ces dispositions s'avèrent inefficaces, le nombre de reclassés étant bien inférieur à leurs prévisions. Ce résultat jugé décevant par les parlementaires n'est pas à mettre sur le compte d'une quelconque désaffection des victimes de guerre. Au contraire, elles tentent de faire valoir leur droit de manière massive, mais celui-ci est rarement satisfait. Les informations statistiques révèlent que la proportion de candidats classés ne représentent jamais plus de la moitié des postulants. Les victimes de guerre font cependant tout pour se recaser et accroître leur chance d'être classées. Elles déposent en moyenne deux demandes chacune et, si elles n'ont pas obtenu satisfaction, renouvèlent leur candidature aux trimestres suivants, parfois pendant plusieurs années. La principale raison de ce semi-échec est l'existence d'une forte discordance entre l'offre et la demande. Le nombre des emplois est très élevé et pourrait donc numériquement répondre à la demande. Mais ils ne correspondent pas aux profils professionnels des candidats qui ont pour la plupart un niveau de qualification assez faible. Pour les emplois de 2ème ou 3ème catégorie qui requièrent des aptitudes physiques et professionnelles assez élevées, le nombre de postes excèdent souvent le nombre de candidats, tandis que les emplois de 4ème catégorie, quoique rares, sont abondamment postulés. Les insatisfactions ne se font pas entendre seulement au niveau de la sélection qui précède le classement, elles se manifestent aussi au moment de l’attribution de la localisation du poste. En effet, il est courant que les candidats ne soient pas affectés dans le lieu géographique qu'ils auraient souhaité. C'est souvent le cas des candidats provinciaux ; la plupart préfèreraient rester dans leur région, mais ils sont contraints de venir à Paris, seul endroit où un emploi leur est proposé rapidement. S'ils ne s'en contentent pas, ils peuvent attendre plusieurs mois voire plusieurs années avant d'être nommés là où ils le gles de mutation, de traitement et de discipline que tous leurs autres collègues. Alors que la loi de 1916 classait les « reçus » en fonction de leur situation de famille, la loi de 23 les classe en fonction de la gravité de leurs blessures. Les veuves et compagnes, qui ne sont pas atteintes physiquement, sont classées d'après leur nombre d'enfants. Enfin, toutes les décisions ou informations relatives aux emplois réservés sont rendues publiques : listes de classement, nominations, offres d'emploi, composition des différentes commissions, et sont publiées au Journal Officiel. Pour servir de garde fous, deux autres dispositions sont mises en place : 46 veulent. Ce problème des candidats déracinés ne sera jamais résolu. La procédure n’est pas en outre fort documentée. La liste des emplois réservés est tenue par les brigades de gendarmerie à la disposition des victimes de la guerre, liste sèche sans aucun renseignement complémentaire, aucune explication, aucune précision. Il en résulte des malentendus et un surcroît de travail pour l’administration submergée de demandes inutiles. Les postulants consultent donc la liste et choisissent l’emploi d’après sa dénomination, sans trop savoir en quoi il consiste au juste. Les commissions médicales et professionnelles sont également mises en cause. De l'avis des victimes de guerre leur évaluation est trop sévère, exigeant parfois un niveau d'aptitudes injustifié au regard de l'emploi sollicité. C'est pourquoi la commission de contrôle révise ces demandes à la baisse. Les administrations, quant à elles, ne se plient que très difficilement aux termes de la loi de 1923, usant pour la contourner de toutes sortes de stratagèmes. L'un des plus aisés et probablement des plus pratiqués est de ne pas déclarer le nombre réel d'emplois vacants, quand ceux-ci sont comblés par du personnel auxiliaire. Une pratique plus subtile est de créer de nouveaux postes, non répertoriés dans la nomenclature des emplois réservés, assurant exactement les mêmes fonctions sous couvert d'une nouvelle dénomination. Les parlementaires ripostent. Ces deux « astuces » sont combattues par la loi prorogative de 1928. Dans les commissions médicales et professionnelles devra siéger un invalide de guerre. Tout nouveau poste ne pourra être créé que par une loi, et non un décret ou une circulaire du département administratif. Pour ces nouveaux postes créés, une proportion d'emploi réservée sera systématiquement envisagée. Ces mesures de la fin des années 1920 semblent avoir eu quelques effets. Certaines administrations, comme par exemple celle des Postes et Télégraphes, remplissent progressivement leurs obligations envers les victimes de guerre. Au final, le bilan vaut ce qu’il vaut, mais le schéma global a été repris, en 1946, pour reclasser les victimes de la Seconde Guerre mondiale. Le problème de l'abandon des terres. La question des terres abandonnées pendant la guerre vient d'être posée devant l'opinion par un projet de loi et par un décret que nous avons publiés. Quelles sont les causes de cet abandon des terres ? Avant la guerre, il y avait l'exode rural, mais l'abandon ne se faisait que pour des terres de mauvaise rendement et sur une échelle insignifiante. Depuis l'ouverture des hostilités, d'excellentes parcelles sont aujourd'hui improductives. Ce sont elles que visent le projet et le décret ministériels. La principale cause de ces abandons est évidemment la mobilisation des exploitants habituels : propriétaires, fermiers, métayers, régisseurs, ouvriers... Par elle, le manque de maind'œuvre qui existait déjà auparavant a été largement agrandi. Puis le défaut de personnel s'est doublé d'un défaut des moyens d'exploitation par suite des réquisitions d'attelages, des difficultés de transport, du renchérissement du prix des matières premières, qui ont privé les agriculteurs des objets indispensables à leurs travaux. On a bien cherché des palliatifs. Le ministre de la Guerre et celui de l'Agriculture ont fait des efforts méritoires, mais la pénurie d'hommes vigoureux reste toujours une grosse entrave à la reprise de la vie agricole. Beaucoup de femmes se sont mises courageusement à l'œuvre pour remplacer le mari absent, mais d'autres, malheureusement, ayant des allocations de 100 francs et plus par mois, estiment qu'au lieu de se donner de la peine pour travailler, il vaut mieux vivre à ne rien faire avec la petite rente de l'Etat. La conduite d'un domaine exige, du reste, certaines connaissances qu'une femme ne possède pas toujours. A ces causes de l'abandon des terres, qui sont directement d'ordre militaire, s'ajoutent celles dont le caractère principal est d'ordre économique. Avec la prolongation des hostilités, bien des exploitants ont épuisé leurs ressources. De nombreux propriétaires sont euxmêmes dans l'impossibilité d'avancer les capitaux que réclame la culture. Un nouveau facteur est encore intervenu, qui a compliqué la situation dans les exploitations faites par métayage. A son entrée dans le domaine, le métayer reçoit du propriétaire un cheptel dont il est comptable. Il doit le restituer en argent ou en nature à sa sortie. La différence en plus ou Le cas de l'agriculture La guerre a décimé les campagnes et provoqué un abandon accéléré des terres. Les causes en sont analysées dans l'article suivant publiée dans La Vie Agricole. 1916. N° 11. 47 Cote d'Or. Ecole d'agriculture de Châtillon-surSeine. Creuse. Ecole pratique de Genouillac Doubs. Ecole de laiterie de Mamirolle. Eure. Institut militaire belge de Port-Villez près Vernon. Gers. Ferme école de la Hourre. Ecole d'apprentissage agricole à Auch. Gironde. Ecole pratique de la Réole. Haute-Garonne. Ecole pratique de Ondes. Haute-Marne. Ecole nationale d'osiériculture de de vannerie de Fayl-Billot. Hérault. Ecole nationale d'agriculture de Montpellier. Ille-et-Vilaine. Ecole nationale d'agriculture de Rennes. Jura. Ecole de laiterie de Poligny. Loire. Ecole de mutilés de Saint-Etienne. Loire-Inférieure. Ecole pratique de GrandJouan. en moins revient à chacun par moitié. Or, les hostilités ont amené une hausse considérable du bétail : un cheptel de 10 000 francs avant la guerre, valait 13 ou 14 000 francs il y a quelques mois. Des métayers en ont profité pour vider les étables, quelquefois même à l'insu du propriétaire. Puis, après avoir réalisé du coup un beau bénéfice, ils s'en sont allés à la ville où, pour les récompenser d'avoir quitté la terre, l'Etat leur alloue généreusement, chaque jour, une allocation de chômage ! Enfin, dans certaines régions, la direction des exploitations est rendue très difficile aux femmes par les prétentions des travailleurs. Le sort des mutilés agricoles Pour pallier à cette pénurie de main d'œuvre dans les campagnes, le ministère de l'agriculture souhaite que même les mutilés retournent à la terre ou du moins dans leur village quitte à pratiquer un métier d'artisan rural. Ainsi se mettent en place des établissements de rééducation agricole dans un certain nombre de départements, liste publiée dans la Vie Agricole de 1916, numéro 49. Cette même revue publie des articles de propagande pour ces établissements. Nous en reprenons certains. Oise. Institut agricole de Beauvais. Rhône. Institut agricole de Limonest près Lyon. Saône-et-Loire. Ecole pratique de Fontaines. Seine-et-Oise. Ecole nationale d'horticulture de Versailles. Ecole nationale d'agriculture de Grignon. Bergerie nationale de Rambouillet. Centre de rééducation agricole de la ferme de Champagne près Juvisy. Yonne. Ecole pratique de la Brosse. Liste des établissements de rééducation agricole par département Allier. Etablissement agricole de Sept-Fons par Dompierre-sur-Bèbre, destiné aux aveugles de guerre. L'Association Valentin Haüy pour le Bien des aveugles leur a assuré le concours d'un agriculteur aveugle comme formateur. L'établissement agricole est tenu par des moines trappistes. Ariège. Ferme école de Royat Aveyron. Ecole d'agriculture de Montagnac, par Gages Cantal. Ecole d'agriculture d'Aurillac Charente. Ecole pratique de l'Oisellerie Charente-Inférieure. Ecole de laiterie de Surgères. Ecole de tonnellerie de Saintes. Cher. Ferme école de Montlouis . La remise au travail des mutilés (par M. Souchon, professeur à la Faculté de Droit, secrétaire général de la Fédération des Mutilés. La Vie agricole. 1916. N° 38) Quand la mutilation amène des impossibilités trop grandes, on cherche une spécialité, et elle 48 faire œuvre patriotique, en faisant place chez eux à un mutilé. Seulement, il faut le former. On pourra, dans ce but, mettre des hommes présentant toutes les garanties morales nécessaires en pension chez des gardes de l'Etat qui leur apprendront leur métier. Ce sera une heureuse collaboration entre l'initiative privée payant les frais, et l'administration apportant la compétence de son personnel. Il est à remarquer, d'ailleurs, qu'il ne s'agit plus là seulement de réhabituer à l'ancien métier et nous sommes déjà, comme d'ailleurs avec les écoles en vue de spécialités agricoles, dans le domaine de la rééducation. Il y a aussi à tenir compte de considérations de l'ordre social et de l'ordre moral. On ne doit pas apprendre le même métier à un citadin et à un rural. L'homme du village doit y retourner. Un effort considérable est à faire pour ne pas le déraciner. Il pourra très utilement , s'il ne peut pas continuer à travailler le sol, se faire tailleur, cordonnier ou bourrelier. Chacun de ses métiers, malgré la concurrence grandissante des villes, peut convenablement nourrir son homme, fût-ce seulement par les réparations, en lui donnant une assez grande indépendance ; il est d'ailleurs à remarquer que la rééducation pour la campagne doit être comprise autrement que celle pour la ville. Quant un mutilé est destiné à rentrer dans son village, par exemple comme tailleur ou cordonnier, il n'est pas nécessaire qu'il soit devenu un ouvrier particulièrement habile. Il serait même dangereux de pousser sa rééducation trop loin, car alors il trouverait de gros salaires qui l'empêcheraient de retourner chez lui. Au contraire, s'il s'agit d'un homme qu a des attaches urbaines, qu'il ne saurait être question de diriger vers la campagne, la rééducation doit être beaucoup plus complète. se trouve toujours dans l'infinie variété des métiers agricoles. La Société des agriculteurs de France, toujours à l'affût du bien à faire, est entrée dans cette voie. Grâce a ses soins, l'Ecole de Beauvais est prête à recevoir des grands blessés. La Fédéra- tion des mutilés y enverra quelques-uns de ses protégés. D'autres tentatives presque analogues doivent également être mentionnées. C'est ainsi que M. Hanotaux à organisé une école de bergers à Rambouillet. L'idée est très heureuse. On sait, en effet, combien est déplorable le manque de bergers. Ils ont pourtant de beaux gages, et le métier peut très bien être fait par des amputés de bras, beaucoup plus difficiles à employer que des hommes privés d'une jambe. Le ministère de l'Agriculture ne s'est pas non plus désintéressé d'une question si capitale pour les intérêts de la culture et pour ceux de nos blessés, et, grâce à lui, des écoles de rééducation pour diverses spécialités agricoles apparaissent sur tous les points du territoire. Disons encore qu'un projet est à l'étude, relatif aux gardes forestiers. C'est une situation très enviée par les mutilés. Mais la plupart d'entre eux ne soupçonnent pas qu'il s'agit de fonctions difficiles et qu'on ne s'improvise pas garde forestier. Il appartiendra à l'Etat de faire une place aux grands blessés dans le recrutement de ses gardes, et la direction générale des forêts ne manquera pas, sans doute, de suivre l'exemple d'autres administrations, par exemple des contributions indirectes qui ont très heureusement institué un concours spécial pour les soldats victimes de la guerre. Mais, en dehors de là, nombre de propriétaires seraient heureux de ( à suivre…) 49 Adieu Bernard... J'ai connu Bernard Féminier à la fin des années 1990. Je travaillais encore à la Chambre d'agriculture et publiais avec François Ranchoux notre petite revue « Le Souffle de la Neira ». Bernard, d'une grande curiosité intellectuelle, avait déniché dans un point de distribution un exemplaire de la revue. Il était passé nous voir pour s'enquérir de notre démarche. Par la suite, il publia un article enthousiaste intitulé « A propos de la brebis noire de Bains... » dans le Bulletin de la Société académique du Puy-en-Velay de l'année 1999. Il passait en revue les sept premiers numéros de notre publication et signalait les articles qui l'avaient particulièrement intéressé. Sa conclusion est élogieuse : « En conclusion, il faut féliciter jean Claude Brunelin d'avoir su créer un environnement culturel d'une telle qualité autour de la brebis noire de Bains et d'avoir introduit un brin de poésie, de rêve et d'imagination dans un domaine où il n'est le plus souvent question que de rentabilité et de productivité ». Très intéressé, je suivais depuis longtemps les compte-rendus de la Société académique dont Bernard faisait partie du conseil d'administration. C'est donc tout naturellement que je lui ai demandé de me parrainer pour en faire partie, ce qu'il fit avec une grande gentillesse. Bernard a vécu sa jeunesse au gré des affectations de son père qui travaillait à la SNCF. Ainsi il est né le 27 septembre 1923, à Saint-Germain-des Fossés dans l'Allier, un important carrefour ferroviaire. Il a passé une bonne partie de son enfance à Langogne en Lozère, département d'origine de son père. Il entame ensuite son cycle secondaire au PNDF de 1934 à 1941 et obtient son bac Math-Elem. Le Frère Joseph Paulhan (Frère Nozier) est de sa parenté et n'est sans doute pas étranger au choix de cet établissement. Le Frère Paulhan, décédé le 5 mars 1948, est organiste, professeur de dessin et photographe. Remarquant le bon coup de crayon de Bernard, il participera peut être à son orientation après le bac. Bernard passe un concours d'entrée aux Ponts et Chaussées. Il est reçu et y fera toute sa carrière, principalement à Pradelles et Saint-Julien-Chapteuil, accédant au grade d'ingénieur des Travaux publics. Je ne l'ai pas connu pendant sa vie active mais il a dû être très compétent et très attaché aux personnes qu'il côtoyait, en particulier les maires qu'il connaissait tous. Il prend sa retraite en 1982. Il se marie avec Louise qui travaille dans l'administration des Impôts. Elle racontait parfois les débuts héroïques lorsque les calculettes n'existaient pas encore. Les Impôts sous-traitaient les calculs à des particuliers et Louise en vérifiait l'exactitude. Ils ont eu deux filles, Chantal, et Françoise qu'ils ont la douleur de perdre prématurément en 2006. Cette peine sera atténuée par la naissance de 4 petitsenfants et 6 arrières-petitsenfants. Ils habitent un bel appartement vers les colonnes Michelet et ont une résidence secondaire dans le bourg ancien de Bouzols. L'âge et la fatigue venant, ils s'en sépareront. Bernard s'intéresse de près au patrimoine de Pradelles et publie en 1963 une plaquette intitulée « Pradelles et ses environs ». L'heure de la retraite ayant sonné, il va pouvoir se consacrer à sa passion pour histoire et patrimoine local au travers de Société dites savantes : Le Puy Ville d'Art, Cahiers de la Haute-Loire, Société académique, Revue du Vivarais, Almanach de Brioude, Almanach de l'Eveil et du Renouveau... Il livre de nombreux articles sur des sujets très variés, montrant ainsi sa grande curiosité intellectuelle. Il publie régulièrement dans l'Eveil, articles d'histoire locale ou billets d'humeur toujours humoristiques et jamais blessants. En 1999, on le sollicite pour les commentaires d'un livre illustré de cartes postales « Le-Puy-enVelay et ses environs. Mémoire en images. Sutton Editions ». Nous reprenons dans le Souffle de la Neira une de ses passionnantes études « Agronomes et agriculteurs progressistes en Velay au 19ème siècle » publiée en 2001 dans les Cahiers de la Haute-Loire. Nous le sollicitons aussi pour la publication collective « 100 ans d'agriculture en Haute » éditée par la Chambre d'agriculture en 2000, où il nous avait brossé à grands traits les caractéristiques de ce 19ème siècle. Il est impossible de répertorier toutes ses publications tant elles sont nombreuses et variées. Inutile de préciser qu'il était connu comme le loup blanc aux archives départementales et municipales. 50 De par sa formation, il aimait le patrimoine bâti et l'architecture. Mais je crois qu'il préférait les hommes. C'était un vrai bottin de la vie ponote et rien ne lui était étranger. Il connaissait toutes les familles qui comptaient dans la vie de la cité et sur plusieurs générations. Il était intarissable sur les anecdotes drôles ou graves qui jalonnaient leur parcours. Nous parlions souvent de jardinage car il le pratiquait encore dernièrement. Un de ses jardins possédait une vigne et il produisait un peu de vin. Il m'avait un jour donné de la semence de haricots à rames. Son dernier jardin était en bordure de Borne. Il passait plus de temps, disait-il, à parler avec les passants qu'à cultiver ses légumes ! Nous avions aussi évoqué les pays du Sud-Est asiatique, le Vietnam en particulier. Au travers d'une association caritative, ils avaient parrainé l'éducation d'enfants de ce pays très attachant. Bernard était de constitution frêle et agile, toujours positif dans le regard qu'il posait sur ce monde dont il avait connu bien des changements. Il n'avait pas adopté l'ordinateur (bien que Louise ait fait une tentative), ni téléphone portable. Il préférait le crayon et le papier pour ses recherches et ses nombreux dossiers. Il aimait faire connaître ses découvertes mais n'y attachait pas grande importance. Il se déplaçait en vélo, toujours peu habillé et bien entendu sans casque. Des vélos, il en a consommé un certain nombre : perdus parfois, volés car il ne mettait pas d'antivol. Dernièrement, il circulait encore à vélo. Quand je lui faisais la remarque que c'était imprudent, il riait, me disant que comme il ne roulait pas très droit, des automobilistes le traitaient de « vieux c.. » Il oubliait aussi régulièrement en réunion gabardine et chapeau. Lui et Louise, adorable couple, vif et pimpant, ne craignaient pas le froid, de vrais ponots habitués aux rigueurs du climat. Bernard avait une forte propension à l'endormissement en cours de réunion. Il ne devait dormir que d'un œil, tel le chat, car il avait toujours des commentaires pertinents sur la conférence du jour. J'ai connu une telle propension chez un ancien collègue de travail. Une sorte de mise en veille comme dans nos ordinateurs ! On rencontrait le couple partout, en toutes saisons, à la bibliothèque municipale, à l'Université pour tous, aux diverses expositions de toutes natures, au kiosque du Fer à Cheval pour une aubade musicale... Ils étaient de plus en plus proches, Louise devenant plus fragile. Fin 2015, Bernard a eu un problème de santé, une fracture du col du fémur dont il s'est bien remis. Puis je ne les ai plus revus en ville. Après enquête, il est apparu qu'ils étaient tous deux en maison de retraite, Louise dans un autre service, à Bel Horizon, nom justifié par le vaste panorama sur le bassin du Puy et non par l'horizon plutôt sombre promis aux résidents de cet établissement. Je lui ai rendu visite un matin car l'après midi, il passait du temps avec son épouse. Il avait une chambre agréable donnant sur les jardins. Je l'ai trouvé assez en forme, s'ennuyant un peu malgré ses abonnements à l'Eveil et à la Croix dont il appréciait les analyses pertinentes. Nous avons parlé de la démolition du PNDF, des études qu'il y avait faites. Il participait à toutes les activités de la maison de retraite, conférences, animations, cours de gymnastique...Dans l'établissement de retraite, il avait du mal à trouver des interlocuteurs pour discuter Je suis revenu quinze jours plus tard lui donner le dernier numéro du Souffle de la Neira. Il n'était pas dans sa chambre mais je l'ai aperçu en séance de gymnastique. J 'ai attendu mais comme la séance menaçait de durer, je suis parti lui laissant la revue sur son lit. De passage à la bibliothèque municipale et feuilletant l'Eveil, j'ai trouvé l'avis de décès de Louise, trop tard pour assister à ses obsèques. Un mois plus tard, jour pour jour, une amie m'apprenait son décès alors que j'étais en Ardèche chez mes enfants. Bernard, en relative bonne santé, a dû lâcher prise au décès de Louise. Lorsque je suis en ville ou à la bibliothèque, je me prends à les chercher des yeux tant ils faisaient partie du paysage ponot. Catholiques pratiquants, j'ose espérer qu'ils sont réunis tous deux, les inséparables, dans l'au delà et qu'ils ont retrouvé leurs connaissances disparues avant eux et qui leur manquaient cruellement. Bernard a dû les retrouver avec joie et rattraper le temps perdu ! Jean Claude Brunelin 51 POURQUOI ? Je voulais, comme à l’habitude, plaisanter un peu nos amis Anglais et leur sortie de l’Europe. Cela fait longtemps que nous leur avons pardonné d’avoir brûlé Jeanne d’Arc ; et si l’on n’aime pas la panse de brebis farcie, eux n’aiment pas les escargots, donc « balle au centre ». Et puis, il y a eu la série d’attentats. Lisa, une de mes petites-filles, était sur la Promenade des Anglais, juste à l’endroit où le camion a semé le carnage. Par un bienheureux hasard, elle est partie cinq minutes avant le passage du camion meurtrier. Mais tous les autres ? Les enfants, surtout. Ce sont eux qui réclament avec le plus d’insistance d’aller voir la débauche de lumières des feux d’artifice, c’est une distraction familiale par excellence. Tristes personnages qui tuent de pauvres petits innocents avec parents, grands parents… Il y avait, paraît-il, trente pour cent de musulmans parmi les victimes. Point de regret d’avoir assassiné les leurs, juste cet éloge funèbre : « ils seront considérés comme martyrs et iront au Paradis d’Allah ».Maintenant, chaque jour amène son lot de morts ; nul pays n’est épargné. Hier encore, deux hommes ont égorgé un brave curé de 86 ans qui disait paisiblement sa messe, dans l’église d’une bourgade bien tranquille. Des Croyants ces assassins ? Non ! Car, bien que je ne sois pas une spécialiste du Coran, il me semble qu’il est écrit que le plus grand respect est dû aux personnes âgées. Je viens de publier un roman, Vivre à Verdun, suivi de Victoire traitant de la Résistance en Auvergne. Pour les écrire, j’ai compulsé nombres de documents, visionné des téléfilms et me suis rappelé ces heures tragiques sous la botte nazie.. Même si je n’étais qu’une petite fille de six ans, je me souviens de beaucoup de choses, je ressens encore, à 80 ans, le poids de l’occupant, la menace permanente. Puis la joie de la Libération, mais aussi les purges, les femmes tondues alors que beaucoup n’avaient fait qu’aimer un homme sans tenir compte de sa nationalité. Et puis, il y a eu le retour des hommes, des femmes, des enfants qui avaient séjourné dans les camps de concentration. Bien peu de survivants, hélas… Ces livres étaient pour moi comme un devoir de mémoire, la plus précise possible pour que nos enfants se souviennent, mais sans haine. Que plus jamais la barbarie des Nazis puisse se reproduire sous une forme ou une autre. Croyez moi, on ne ressort pas indemne d’une telle démarche. Hélas, la barbarie est de retour, une barbarie aveugle qui ne frappe que des innocents. Et au nom d’un Dieu, mais quel Dieu ? Pour se venger des Croisades d’il y a 800 ans ? De la colonisation ? Pour dresser les différentes communautés les unes contre les autres ? Et à entendre certaines paroles de nos hommes ou femmes d’Etat, ça marche ! Comment le commun des Européens, entre autres des Français, peut-il s’empêcher d’avoir un regard méfiant en face d’un musulman. C’est humain : qui se cache derrière ce visage ? La plupart du temps, un brave homme, une brave femme. Mais si c’était un extrémiste ? Attention, prudence, évitons ces gens -là ! Mon travail, il y a 25 ans, m’a amenée à intervenir dans des familles algériennes. Que sont-ils devenus ? Qu’es-tu devenue, Madame B ., qui préparais des pâtisseries de ton pays quand tu savais que je venais. Tu avais tenté sans succès de m’apprendre à faire le thé à la menthe, tu m’avais même rapporté de vacances dans ton pays, l’Algérie, une « vraie » théière. Et toi, madame M. , qui ne parlais pas un mot de français. Ta fillette de six ans servait d’interprète, confortablement installée sur mes genoux. Elle m’a même demandé un jour si je voulais bien la prendre pour petite-fille, pour quelques jours, avait-elle précisé. Et toi, Monsieur B., qui me disais : « On me traite de sale arabe, alors que j’ai combattu dans les rangs français en Algérie, que mon père est mort durant le dernière guerre, mon grand-père à Verdun. Je suis Français ». Nous avons pas mal voyagé en pays musulman. Partout, nous avons été reçus avec gentillesse. Qu’êtes vous devenus, toi, la petite femme de chambre tunisienne qui posais tous les soirs sur notre oreiller une fleur d’hibiscus ? Toi, Adel, notre guide égyptien, professeur à la faculté du Caire, qui as su avec simplicité nous faire aimer ton pays. Qu’êtes-vous devenus, vous qui viviez du tourisme, ces touristes qui n’osent plus venir ? Nous gardons le souvenir de vous tous, nous aurions tant aimé revenir… Voilà, je n’ai plus le cœur à rire en ce moment. Mais je vais me reprendre, retrouver mon optimisme habituel, pour vous conter quelques histoires à rire. Rendez-vous au prochain numéro du Souffle, les amis ! Yvette Maurin 52 LE BREXIT OU LA FIN DES RELATIONS COMPLEXES ENTRE LE ROYAUME UNI ET L'EUROPE La journée du 23 juin 2016 marquera l'histoire de l'Union Européenne. Pour la première fois, les citoyens d'un grand état membre de l'Union Européenne se sont prononcés par leur vote sur la sortie de leur pays de l' UE. Ainsi 43 ans après avoir intégré l'Union Européenne, les britanniques vont peut-être quitter l' Europe mais ont-ils été vraiment européens un jour ? Pour mieux comprendre comment on en est arrivé là, il est intéressant de faire un historique des relations mouvementées entre l'Europe et le Royaume-Uni. Un demi siècle d'atermoiements entre l'Europe et le Royaume Uni. Et si de Gaulle avait raison ? En 1957, lorsque les six ont signé le traité de Rome, le RoyaumeUni a refusé de rejoindre la CEE car ils voulaient garder leur système de libre échange avec les pays du Commonwealth. Deux ans plus tard, ils ont signé le traité de Stockholm avec d'autres pays européens (Norvège, Suède, Danemark, Suisse, Autriche et Portugal) créant l'Association Européenne de Libre Échange ( AELE). Cette alliance n'a pas fonctionné et les États-Unis conseillèrent au Royaume-Uni de négocier leur adhésion à la CEE, ce que fit le premier ministre Macmillan en 1961. Les négociations seront difficiles car déjà les britanniques demandent des dérogations et des exceptions. Le 14 janvier 1963, Le général de Gaulle président de la République prononce un discours où il se dit hostile à l'entrée de la Grande Bretagne dans le « marché commun Il s'explique sur sa position que l'on peut très bien comprendre aujourd'hui. Nouvelle demande de Wilson en 1967 Le premier ministre conservateur Edwards Heath présente officiellement une nouvelle demande d'adhésion en 1967 mais de Gaulle toujours au pouvoir en France s'y oppose à nouveau. Avec la démission de de Gaulle en 1969 , les négociations reprennent, elles vont durer 6 ans. Il y avait bien sûr la contribution communautaire, la Politique Agricole Commune(PAC), les relations commerciales du Royaume Uni avec le Commonwealth... C'est seulement en 1973 que le Royaume Uni rejoint la CEE. Des contestations dès 1974 Dès 1974 avec la victoire des travaillistes, Harold Wilson annonce qu'il veut renégocier la contribution britannique au budget communautaire. Avec l'accord de Dublin en 1975, il a obtenu un petit correctif budgétaire et un léger assouplissement sur les importations néo-zélandaises. L'arrivée de Margaret Thatcher En 1979, Margaret Thatcher est élue premier ministre, elle va prononcer cette phrase célèbre « I want my money back » . De nouvelles négociations difficiles aboutiront en 1984 à un rabais de 6,1 milliards d'euros de la contribution britannique. Il y aura aussi en 1980 cet accord consenti par la France pour modifier le règlement européen concernant les importations néozélandaises de viande de mouton congelée sans droits de douane. Elle s'opposera à la réunification allemande en 1990. L'arrivée de l'Euro en 2002 sans les anglais Lors de la présidence britannique du Conseil de L'Europe en 1998, Tony Blair va participer à la préparation de L'Euro sans que son pays ne choisisse la monnaie unique. Allemands et Français essayèrent de mettre un terme au rabais britannique en 2005 mais Blair s'y opposa en mettant dans la balance la révision de la PAC. La signature difficile du traité de Lisbonne par Gordon Brown en 2010 Ce traité qui avait pour but une meilleure coordination entre tous les membres de l' Union Européenne à été signé par la Grande Bretagne mais avec une nouvelle exception concernant leur non participation dans le domaine de la justice et des affaires intérieures. Cameron et le Brexit En décembre 2011, le Conseil européen décide de mettre en place un pacte budgétaire auquel s'oppose David Cameron. Ce dernier en 2013 annonce que s'il est réélu en 2015, il organisera un referendum pour 53 consulter le peuple sur le maintien ou non du Royaume-Uni dans l'Union Européenne. En 2014, il ne veut pas de Jean-Claude Juncker comme président qui sera quand même élu avec le soutien de tous les autres états membres. Cette même année, la commission européenne réclame une augmentation de la contribution britannique de 2,1 milliards d'euros basé sur des mécanismes approuvés y compris par le Royaume-Uni. Cela n’empêche pas David Cameron de refuser cette augmentation. Nous arrivons ainsi au 23 juin 2016 et le résultat du référendum : 51,9 % de votes favorables à une sortie du Royaume-Uni de l'Europe. Depuis David Cameron à démissionné. Que fera son Successeur en l’occurrence Theresa May ? Quelles conséquences pourraient avoir cette sortie pour les Britanniques et les autres pays européens dont la France ? Dans un premier temps, nous ne parlerons pas agriculture que nous traiterons à part. En fait, le Royaume-Uni était dans l'Europe mais absent de l'Euro, absent de Schengen, absent de l’Europe de la justice, absent de l’Europe sociale, opposée à l'Europe de la défense... Beaucoup d'économistes se sont livrés à l'étude de l'impact du Brexit si le Royaume-Uni va jusqu'au bout de sa sortie de l' Europe, seul l'avenir nous en donnera les conséquences réelles. Nous vous livrons quelques unes de leurs réflexions. Pour les britanniques : Ils devront à priori posséder un visa pour se déplacer en Europe. Les vacances des britanniques sur le continent leurs coûteront plus cher avec une livre dévalorisée par rapport à l'Euro et des prix en hausse pour les compagnies comme EasyJet et Ryan Air. Le rôle de place financière tenue par Londres sera affectée et déjà de grandes banques envisagent d'implanter leur siège social à Paris ou dans d'autres capitales européennes. Les expatriés britanniques ( plus de 170 000 en France) se posent beaucoup de questions sur leur avenir ( retraite, couverture maladie...) L' Écosse qui a voté contre le Brexit envisage par la voix de Nicola Sturgeon ( première ministre) d'organiser un référendum sur une possible indépendance. En Irlande du Nord, le parti Sinn Féin demande un référendum sur la réunification de l’île. De nombreux étudiants européens bénéficient chaque année du programme Erasmus, cela aura un impact sur l'enseignement universitaire en Angleterre. La France continuera t-elle a retenir des migrants à Calais ou à les laisser passer librement ? L'anglais restera t-il une langue de travail dans les institutions européennes ? On ne connaît pas vraiment aujourd'hui toutes les conséquences du Brexit, certaines pourraient s’avérer positives même pour les britanniques ! Pour les autres pays européens La sortie du Royaume-Uni pourrait faire des émules et d'autres pays européens mécontents de l' UE pourraient être tentés de la quitter à leur tour. Politiquement, les anglais ont toujours été des dissidents sur une future évolution en terme de gouvernance. Leur départ permettra peut-être d'avancer sur plus d'intégration européenne ? Beaucoup d'échanges commerciaux entre le Royaume-Uni et les autres pays européens se faisaient dans le cadre d'un marché unique, demain il faudra conclure des accords commerciaux. Et l'agriculture dans tout ça ? La Politique agricole commune (PAC) a toujours été l'une des bases de l'intégration communautaire et les britanniques l'ont toujours combattu. Pour les britanniques : Le Royaume-Uni était un « contributeur net », ce qui veut dire que même avec la réduction obtenue en 1984, ils versaient à l' Europe plus qu'ils ne recevaient. Il était le 4ème contributaire derrière l' Allemagne, la France et l'Italie. Les agriculteurs britanniques ne bénéficieraient plus des aides PAC, ce que chiffrent les économistes à une perte entre 17 000 et 34 000 € par exploitation. Le gouvernement anglais pourra t-il et voudra t-il se substituer à l' Europe pour aider ses agriculteurs ? Pour les autres pays européens : La perte de contribution nette du Royaume-uni de 4,93 millions d'euros devra être absorbée par les autres pays dont la France. La note serait moins forte pour la France car il y aurait dans la balance la disparition du rabais « Thatcher » en grande partie supporté par notre pays. Pour la France en particulier : Deux secteurs pourraient être fortement impactés : les fruits et la production ovine. Pour ce qui est du mouton, le comble serait que la réduction des importations directes de mouton anglais ou indirectes de Nouvelle-Zélande rendent plus cher l'agneau français. 54 Cette viande déjà chère pour le consommateur français pourrait le devenir encore plus entraînant une diminution de la consommation. Si le taux de change de la livre baisse, le mouton anglais pourrait encore plus concurrencer notre production nationale. Décidément, nous aurons toujours des différents avec nos voisins anglais, n'oublions pas qu'ils ont brûlé Jeanne d'Arc en 1431 au terme d'une guerre de 100 ans ! Pour finir sur une pointe d'humour (anglais bien sûr !), une petite histoire en oc. Un Françés passa na setmana de vaçancas a Londres. Troba a se lotjar dinc un B e B. Quand davalèt lo matin de la seconda nuèit, la femna que tenia l'estau i damandèt : - Bonjorn Mossur, per vostre dejunar, coma volètz vos cacaus « sobre lo plat « o bien « durs » ? - Vole dos uòus sobre lo plat. I a un que sera caramelisat. L'autre, le botarètz sobre un tòsta completament brulat d'un latz e marron de l'autre latz. Lo tòsta e los uòus banharon a meitat dinc las favas e la saussa. Passarètz l'escudèla dinc lo forn, de la façon qu'aquò saguesse chal defòra mas freid dedinc. - Crese qu'aquò sera pas possible Mossur. - E perque ? aquò es esactament la mesma besonha que m'avètz beilat per dejunar ièr matin. ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Un français passe une semaine de vacances à Londres. Il trouve à se loger dans un B and B. Quand il descendit le matin de la seconde nuit, la patronne de la maison lui demanda : - Bonjour Monsieur, pour votre petit-déjeuner, comment voulez vous vos œufs « sur le plat » ou bien « durs »? - Je veux deux œufs sur le plat. Il y en a un qui sera caramélisé. L'autre vous le mettrez sur un toast complètement brûlé d'un côté et marron de l'autre. Le toast et les œufs baigneront à moitié dans les haricots et leur sauce. Vous passerez l’assiette au micro-onde, de manière à ce que tout soit chaud à l’extérieur et froid à l’intérieur. - Je crois que ce ne sera pas possible Monsieur. - Pourquoi ? C'est exactement ce que vous m'avez servi au petit-déjeuner hier matin. Henri OLLIER 55 HISTOIRE DU VELAY (suite) À PROPOS DE GERMANIQUE H Quesnel-Chalelh TERMES D’ORIGINE GERMANIQUE DANS LE PARLER DE TAULHAC (III) installar ~ estallar. Installer. Mot dérivé du latin médiéval *INSTALLARE, mettre (symboliquement un dignitaire sur une stalle), mot provenant à son tour du germ. STALL. Cf. allem.: Stuhl (chaise). jardin / dzardyi’ / Jardin. On emploie aussi le terme òrt (jardin), mais celui-ci d’origine latine. « jardin » comme garden en anglais, provient du germanique. GARDO, enclos. leca. Lèche. Provient du germanique LEKKON. Surtout employé dans la locution faire la leca, flatter sans vergogne, flatter c’est à dire se comporter en lèche-botte. On parle aussi d’un lecagima (lèche-crème), lecaplat (lèche-plat), un lecarèl pour désigner un gourmand.| lecar lécher. lepar. Lécher. los lecarèls se’n leparan las bochas (les gourmands s'en lècheront les babines). Ce verbe possède le même sens que lecar et vient également du germanique LIPPE, lèvre. Voyez l’anglais lip. lèste, -a. Leste. Cet adjectif nous est arrivé par l’italien qui l’avait emprunté au vieil haut allemand HLESTEN. lista /yist’a/ ~ /yist’o/ Bande étroite de terre tout en longueur. De ce fait, parcelle peu intéressante à exploiter.| Étym.: germ., LISTA, bande. lòt Lot.| Étym.: franque HLOT, part de terrain attribué au sort ou par héritage. maneschaud Maréchal-ferrant.| Étym.: germ. *MARH-SKALK, valet d’écurie. marcar Marquer.| Étym.: germ. (ancien nordique) * MERKI, signe.| remarcar remarquer.| marca marque, cicatrice, estampille, poinçon. marcha Marche.| Étym.: germ. MARKA, ce qui sépare deux territoires d'où passer d'un lieu à un autre.| marchar marcher.| Étym.: germ. MARKÔN, parcourir. marra Pioche.| Étym.: germ. germ. *MARRA, houe. La locution anar a la marra, aller à la mine (dans le bassin stéphanois) est assez connu.| - A la marra ! est un long poème de l’abbé Jean-François Meiller (1811-1859) sur le départ d’un pauvre paysan à la mine du bassin de St-Étienne puis du retour au pays de celui-ci. martre ~ martra Martre ~ marte.| Étym.: germ. *MARPOR, martre. mossa Mousse.| Étym.: germ. *MOSA, mousse. nafra Blessure (avec un objet coupant), balafre.| Étym.: germ. *NARWA, cicatrice. pòcha Poche.| Étym.: germ. *POKKA, poche. La poche de vêtement aurait été une invention germanique.| pochada contenu d'une poche.| pochet gousset. quitlha [t§E‚`ja] (nf) Quille.| Étym.: germ. *KEGIL, debout.| quitlhar Glisser, glisser sur la glace en se maintenant debout.| quitlhon Bâton fourchu projetté avec un bâton droit (jeu). rebola [rabu’la] Reboule.| Étym.: haut-allem., RÎB(AN), débauche. La reboule en français local concerne le repas soigné marquant la fin de gros travaux. On avait l’habitude de tuer le coq pour ce repas. On disait couramment : a fat la rabola de son champ (il a terminé de travailler son champ) rabòt [rabo`] (nm.) Rabot.| Étym.: provient du moyen néerlandais, *ROBBE, lapin. Le rabot reprend plus ou moins la forme d’un lapin.| rabotar Raboter. rafetar Toussoter de temps à autres.| Étym.: germ. RAFFEN, faire du bruit. rampelar Boiter (à cause d'une jambe raide).| Étym.: germ. RAMPA, se crisper, se ramasser sur soi. ratèla Rate.| Étym.: moyen néerlandais, RATE. rauba Robe.| Étym.: *RAUBA, butin ; effets personnels ; robe. raubar Voler.| Étym.: germ. *RAUBÔN.| raubaire Voleur.| reng Rang, andain.| Étym.: germ. *HRING, cercle.| renjada Rangée.| renjar Ranger, être en rang. ribòta Ribote.| Étym.: germ. FRÎB(AN), débauche.| faire ribòta, faire la fête (libations).| ribotaire Fêtard. ricanaire Ricaneur.| Étym.: germ. *KINNI-, mâchoire, joue.| ricanar Ricaner. rostir Rôtir.| Étym.: germ. *RAUSTJAN, rôtir. tacha Clou long.| Étym.: germ. *TAKKO, chose pointue. tapon Bouchon.| Étym.: germ. *TAPPON, boucher.| taponar Boucher (tonneau, tuyau, trou quelconque) avec un tapon *.| Locution (fam.) : sèi taponat, je suis repus.| Étym.: *TAPPON, boucher. toalha Chemise ; pan de chemise dépassant du pantalon.| Étym.: germ. *THWAHLJA, serviette. trapa Trappe.| Étym.: germ. *TRAPA, chute.| atrapar, Attraper ; premier sens “ tomber dans une trappe (piège)”.| trapalhon ~ trapon Petite trappe. trompeta Trompette.| Étym.: germ. *TRUMBA, trompette. tròp Trop.| Étym.: germ. , *THROP, entassement.| tropèl Troupeau. tròt. Trot.| Étym.: germ. *TROTTON, courir.| trotar Trotter. uchièr Huissier.| Étym.: grom. HUCCARE formé sur HUCCUS proclamation criée, provenant à son tour du francique *HUKÔN, appeler en criant. L’occitan ancien avait également, uc « appel », ucar ~ uchar, « crier ; faire annoncer par le crieur public ; vendre aux enchères »; celui qui accomplit ces actions est l’ucador ~ uchador, « crieur ». vorma Mousse visqueuse (qui forme un voile sur l’eau dormante). H. Verdier racontait qu’étant jeune, son père l’avait envoyé à la « Pépinière » chercher de la vorma dans des creux d’eau pour servir à guérir une certaine maladie.| Étym.: francique. *WORMA, pus. D’autres langues ont participé à la formation de l’occitan comme du français en particulier et dans l’ordre, l’arabe, l’italien, l’espagnol etc. et de nos jours l’anglais. L’essentiel de ces apports sont dûs aux échanges commerciaux. Nous y reviendrons à l’occasion dans la suite de notre approche de l’histoire vellave. 16/08/16 PLASER DE LA REVIRADA Nous avons déjà rencontré Guillaume Tardif (1436 - 1492), enfant du Puy qui devint professeur de rhétorique à Paris, auteur de l’une des toutes premières grammaires (français moyen). C’est aussi un traducteur en français d’œuvres latines classiques et de son temps, en particulier des Apologues et fables de Laurens Valla (vers 1493) qui lui-même traduisait en latin le fabuliste grec Ésope VIIe - VIe siècle A.D. Nous avions donné dans cette revue la fable de la chatte transformée en jeune fille publié sous le titre de La chata transformada en femna dans le numéro 52, p. 55 du Souffle de la Nèira, Nous proposons ici la traduction en occitan, imaginant que le ponot Tardif aurait pu chosir cette langue, la sienne, plutôt que le français. On trouvera en regard le texte original de Guillaume Tardif à partir duquel est proposée notre traduction. D’UN MEDECIN que garissiá los fòlhs endemoniats e enrajats, e comença en latin : PLURES COLOQUEBANTUR, etc. OMME aquò se pòt veire en mais d’un luòc, i a de monde que tròban lur bonur en *p>ig§P oma prenent lurs chins e lurs aucèls per anar chaçar e passar temps. Aquela mena de ^ CÉPlt monde mancava pas en la vila de Florença. IbSlÉi! félicité Sovent, lo paure monde se demandavan coma los riches podian tant prene plaser embé lurs chins e lurs aucels. Aquí, un nomat Pal, de Florença per sa naissença, respondiguèt qu’autrescòps en la Ciutat de Milan, i aviá agut un simple que se mocava fòrt d’aquelos que norrissian de chins e que portavan d’aucèls. Adóncas, lo monde li demandèron de lur contar la facècia e lo biais bien joiós d’aquelh simple qu’aviá farcejat los chaçaires. Pal comencèt de contar e dire qu’en la vila de Milan, i aviát un medecin que garissiá en pauc de temps los fòls e los endemoniats que lo monde li aduèsian. Aquí, vos vau contar son biais de garir. Aqueste medecin aviát un plan-planc bas d-ont aviá fat faire un potz pro large e prigond qu’èra plen d’una aiga tota pudenta, infècta e freida coma glaça. Quand li aduèsian un endemoniat, lo medecin eisaminva de qu’aquo-èra que sa malautia, puèis lo fasiá estachar ad un pal que se trobava aquí ; per quauques us, l’aiga lur montava aus janolhs, aus autres a las quèissas o pus naut tant coma v-o disiá lo medecin. Los laissava en pena e torment tant que per la fòrça de la dolor que sentian, lur melancòlia se chamjava e que semblavan garits. Sufís qu’un jorn, i-un d’aquelos endemoniats seguèt adut ; a causa de sa fòrta malaudiá, seguèt botat en l’aiga dusqu’elh ventre e, talament que ne-n seguèt tormentat, qu’après na quinzenada, sa malaudiá s’achabèt ; puèis, parlèt com un òme en plena sandat. Quò fai que demandèt elh medecin de lo botar fòra, çò que li acordèt a condicion que sortiguèsse pas delh lo plan-planc d-ont i aviá lo potz, sotz pena de çais èstre tornat botat. D’aquò d’aquí, lo simple seguèt d’acòrd, e v-o faguèt bien de biais tant que cranhava d’èstre tornat botat en l’aiga. Un puits au XIIIe siècle, Dictionnaire raisonné de l'architecture française, !Viollet le Duc. A chaa pauc lo medecin li permeteguèt un pauc mais de large ; quò fai que per la fin, li bailèt la permission d’anar dusqu’elh portal de davant, a condicion de lo passar pas. Lo simple v-o faguèt com aquò, tant qu’aviá pavor de tornar en l’aiga delh potz. Pr’aquò, un jorn qu’aquelh paure simple e endemoniat se teniá arranda lo portal per sonhar lo monde, un joine òme que montava una èga venguèt a passar. Aquelh d’aquí portava elh torn de son ponh, un faucon e menava una tropa de chins. Quò fai que lo simple que lo veguèt, tot estonat ques èra, creidèt lo chavalièr per li demandar si voliá ben tener solaç embés elh. Adóncas, lo joine òme s’assarrèt de z-elh, li demandèt çò que voliá e lo simple de dire : « Belh Sénher, dija me un pauc : de qu’aquo-es que montes e de qu’aquo-es la tropa que menes e a dequé te sèrvon ? » Lo joine chaçaire respondiguèt que çò que montava s’apelava una èga e que çò que portava sobre sa man èra un faucon per arrapar las catlas e las perdriç e que çò que menava darrièrs èlh èran de chins per anar a la chaça amais a la chacilha. Quò fai que lo simple demandèt quant valiá tota la chacilha que sabiá arrapar dins tot un an. Lo chaçaire li respondiguèt qu’aquò se montariá ben a sèis escuts, se se podian bien vendre. Tot continent, lo simple demandèt quant ne-n costariá per norrir l’èga, l’aucèl e los chins. Lo chaçaire de li respondre que ne-n costava mais de cinquanta escuts. « Escouta me, mon amic, vai t-en, que se lo medici ven e apren ta fòlia, te getará dedinc l’aiga embé los autres fòls e enrabiats ; e lai te botará entrò lo menton e mais encara, bien mèlhs que tots los autres que sembles lo mèlhs estordit, enrabiat e endemoniat delh monde. A causa d’aquò, fila per que te vegie pas. Cette gravure provient de llustrations de Des deduiz de la chasse des bestes sauvaiges et des oyseaux de proye, auteur non identifié. Pour plus d’informations, visitez Gallica, BNF. À titre d’information, nous donnons le début de la traduction de G. Tardif en français moyen, lequel se situe entre l’ancien français et le français moderne. COMME nous voyons en plusieurs lieux, ils sont aulcunes gens qui prennent leur félicité en chiens et oyseaulx pour aller chasser et passer temps, desquelz plusieurs estoyent en la ville de Florence, qui continuellement après eulx menoient chiens pour chasser et mesmement portoient oiseaux, dont s'en esbahyssoient beaucoup les gens commungs et tellement que souventesfois en faisoient conclusions, demandans les ungs les aultres comme ceulx là prenoient si grant plaisir en chiens et en oyseaulx. Là fut ung nommé Paul, natif de Florence, lequel respondit que aultres fois en la Cité de Millan avoit esté ung fol qui se moquoit fort de ceulx qui les chiens nourissoient et les oiseaulx portoyent. Lors prièrent aulcuns à cestuy Paul qu'i leur racomptast la facécie et joyeuse manière comnie celluy fol avoit farce les chasseurs. Si commença Paul à racompter et dire que en la ville de Millan y avoit ung Médecin qui garissoit les folz et les démoniacles en ung certain temps que ilz luy estoient apportez. Mais la manière de les garir estoit telle. Cestuy Médecin avoit en sa maison une grande ayre basse, au millieu de laquelle il avoit fait faire ung grant puis, large et parfond, qui estoit plein d'eaue toute puante et infaicte et froide comme glace. , et, quant on luy apportoit aulcun démoniacle, le Médecin regardoit la qualité de sa maladie, puis le faisoit lyer dedans ce puis à ung pal, qui là estoit, si que les ungs estoyent en l'eaue jusques aux genoux, les aultres jusques aux cuysses ou plus hault, ainsi que le Médecin advisoit, et les faisoit laisser en peine et grant supplice tant que, par véhémence de doulleur qu'ils sentoyent, leur mélancolie se changeoit et sembloyent estre guariz. "Ce livre, bien que racontant la terrible bataille de Verdun, n'a pas pour but de cultiver la haine, mais de garder la mémoire de ce tempslà pour que pareil drame ne se reproduise plus. A l'horreur des champs de bataille, il oppose l'amour, le dévouement, l'optimisme, l'amitié, parfois la gaieté de ces hommes et de ces femmes qui ne savent pas s'ils seront vivants demain et vivent pleinement tous les petits ou grands bonheurs qui leurs sont offerts. L'auteure y aborde tout ce qui faisait le quotidien des Français de cette époque, en s'efforçant de bannir les sentiments de haine au profit de la bravoure, de la faiblesse humaine aussi, en semant amour et amitié entre les héros. Avec l'espoir qu'un simple roman donne à la jeune génération la connaissance et la compréhension des événements de ce tempslà." C'est aussi un roman dédié à toutes les femmes mortes au champ d'honneur et étrangement absentes de nos monuments aux morts et aux anonymes qui ont résisté à leur façon, inconscients des risques qu'ils prenaient mais accomplissant ce qui leur paraissait juste. C'est un livre témoignage enfin, car l'auteure, octogénaire, même si elle n'a pas connu la Grande Guerre, a cependant côtoyé des témoins et vécu notamment chez ses grandsparents maternels à l'ombre des portraits des poilus, des médailles et des objets de l'artisanat militaire. Même si l'on n'en parlait pas, l'ombre planait sur ces campagnes dont les paysans avaient payé un lourd tribut et où le maréchal Pétain, vainqueur de la Grande Guerre, jouissait d'un incomparable prestige. Yvette Maurin, bien que très jeune à l'époque, garde encore dans les oreilles le bruit assourdissant des bottes des troupes allemandes martelant les pavés de ClermontFerrand et aussi à la fin de la guerre les bombardements terrifiants des forces alliées sur les usines Michelin proche de son quartier. C'est un livre d'espoir car son cœur vibre de joie lorsqu'elle voit flotter le drapeau européen et elle se dit alors que ceux qui ont péri lors des deux guerres ne sont pas morts en vain. J'allais oublier : Yvette Maurin est très branchée et vous pouvez la retrouver sur : yvettemaurinromanciere.e-monsie.com, et au cas où vous ne trouveriez pas ses ouvrages en librairie vous pouvez toujours la contacter, elle pourra peut-être vous dépanner avec une dédicace en plus ! A LIRE Vous connaissez forcément Yvette Maurin ! Elle nous régale depuis longtemps de ses chroniques colorées, engagées, drôles, dans le Souffle de la Neira. Elle a aussi publié plusieurs livres. Ce n'est pas tout d'écrire mais il faut publier, pas pour l'argent, il faut être fort connu pour vivre de sa plume, mais pour faire partager cette expérience aux lecteurs et leur montrer que même à la retraite on garde foi en l'humanité dans ces périodes troublées. Les grandes maisons parisiennes laissent peu de place aux éditeurs de nos provinces qu'ils condamnent à publier des romans régionaux pour ne pas dire folkloriques, à ressasser des vies d'antan dans la France profonde pour faire pleurer dans les chaumières. Un roman est forcément régional car il puise ses racines dans une région française ou une région du monde. Il serait temps de réagir contre ses parisianismes ! Bon mais revenons à notre auteure ! Après quelques refus, les Editions L. Souny en Limousin publient "La Naïra, il était une foi en Gévaudan" en 2003 et "La dette d'amour" en 2004. Quelques difficultés avec l'éditeur contraignirent Yvette Maurin à repartir en quête de "publicateur". Elle revint aux sources en contractant avec les Editions de la Montmarie d'Olliergues, berceau d'origine de ses ancêtres maternels. Plusieurs livres vont alors paraître : "Le Chardon rouge" en 2006 ; "Du Rififi au Paradis" en 2006, chroniques où Père éternel et saints ont bien des tracas et des réactions… fort humaines ; "Les Deux Maries" en 2007 ; "Le Cimetière aux esclaves" en 2008, un roman "guadeloupéen" suite à de nombreux séjours dans cette île ; "Lison fille du vent" en 2010. Une visite dans l'enfer de Verdun, lui inspira paradoxalement un roman plein d'espoir. Ne s'en tenant pas là, elle imagina une suite avec les mêmes personnages et leurs descendants lors du conflit de 39-45. Mais impossible de se faire publier, son éditeur étant entré dans une phase de turbulence. Et puis voilà qu'il se remet en selle dans une nouvelle structure : les Editions des Monts d'Auvergne, et propose à Yvette Maurin de publier ensemble ses deux romans en 2016 justement l'année du centenaire de Verdun, sous le double titre "Vivre à Verdun suivi de Victoire". Voici une partie de la quatrième de couverture. 59 &RQWDFW-HDQ&ODXGH%581(/,1 6\QGLFDWG ÚOHYDJHGX0RXWRQ1RLUGX9HOD\ 6\QGLFDWG ÚOHYDJHGX0RXWRQ1RLUGX9HOD\ &KDPEUHGಫ$JULFXOWXUH &KDPEUHGಫ$JULFXOWXUH +åWHO,QWHUFRQVXODLUH +åWHO,QWHUFRQVXODLUH %RXOHYDUG%HUWUDQG %RXOHYDUG%HUWUDQG %3 %3 /(38< /(38<(1 (19(/$<&('(; 9(/$<&('(; La revue est disponible gratuitement au Puy-en-Velay : ¤ Chambre d'agriculture, accueil, 1er étage ¤ Hall du Centre Pierre Cardinal ¤ Hall du Centre Roger Fourneyron ¤ Hall de l'ancienne école Jules Ferry, rue Raphaël ¤ FNAC ¤ BIOCOP Echo nature, Aiguilhe ¤ Pharmacie de la Renaissance ¤ Office de Tourisme du Puy Nouveau, votre revue en ligne sur le site : ¤ www.brebis-noire-velay.org/ Vous pouvez aussi recevoir à domicile les 3 numéros annuels moyennant un chèque de 10 € à l'ordre du Syndicat d'élevage du Mouton Noir du Velay. Pour nous contacter directement : Tél. : 04 71 02 43 01 ou [email protected]