sommaire - Neira des Volcans

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sommaire - Neira des Volcans
ISSN : 1774 - 7597
SEPTEMBRE 2016
N° 60
SOMMAIRE
Éditorial : Les larmes de Garou…
Les dossiers "Noirs" 1993 (suite) …
pages 2 à 7
Les ministres sous la 5ème : François Guillaume
(Jean Claude BRUNELIN)
pages 8 à 14
Les sélectionneurs en 2015
(Didier CATHALAN)
pages 15 à 20
ème
Lou Pastre de la Neigre : 11
édition
( Jean Claude BRUNELIN)
pages 21 à 26
Petis Moutonsss
(Gilbert DUFLOS)
pages 27 à 32
La Neira et les Volcans d'Allègre : 9ème édition
(Jean Claude BRUNELIN)
pages 33 à 39
Autres évocations de transhumance
(Jean Claude BRUNELIN)
pages 40 et 41
Un vétérinaire pas trop pressé. Grèzes 1869
(René BORE)
pages 42 et 43
Les mutilés de la Première Guerre Mondiale
(Jean Claude BRUNELIN)
pages 44 à 49
Hommage à Bernard Féminier
(Jean Claude BRUNELIN)
pages 50 et 51
Pourquoi ?
(Yvette MAURIN)
page 52
Le Brexit
(Henri OLLIER)
pages 53 à 55
Histoire du Velay : germanique dans le parler
de Taulhac (suite)
( Hervé QUESNEL-CHALELH)
page 56
Plaser de la revirada : D'un médecin…
Guillaume Tardif
(Hervé QUESNEL-CHALELH)
pages 57 et 58
A lire : Vivre à Verdun suivi de Victoire
(Jean Claude BRUNELIN)
page 59
Les larmes de Garou...
Vous souvenez-vous de Garou, pour l'état civil Pierre Brin,
enfant de l'assistance et du Bouchet-Saint-Nicolas ? Il vivait à
l'assemblée du village. Le père Louis Blanc avait installé dans
les bois du lac un grand tonneau, avec toiture, porte et fenestron : un abri lorsque son troupeau pacageait sur les rives. Garou en avait demandé la clef pour dormir la nuit sur son lit de
mousse et surveiller ses lignes de fond. Ouvrier saisonnier
dans les fermes du plateau, il vendait aussi cueillettes de
champignons et produits de ses pêche et chasse. Il n'aurait pas
fait de mal à une mouche, mais les parents menaçaient les enfants désobéissants de les conduire chez Garou. Il sonnait les
cloches et faisait office de fossoyeur. Rien de tel pour forger
une philosophie : « J'en ai sonné des messes, baptêmes, mariages et enterrements. Le mien ne tardera pas mais ça ne fait
rien, j'ai été fossoyeur du village, alors je suis un habitué de la
mort, je sais comment il faut la prendre. J'ai marché pour aller
jusqu'au clocher, je marcherai bien pour aller jusqu'en audelà ». L'au-delà, il l'a rejoint en 1971, emporté par un coup
de froid, une congestion alors qu'il pêchait. Il a quitté son petit paradis, comme il disait, pour gagner la voie lactée. Depuis
il vagabonde dans les nuages, jamais bien loin de son lac. Il en
a vu des épisodes ! Des savants sont venus avec de drôles
d'engins pour enfoncer de grands tubes dans la vase du fond
du lac, histoire de déranger les poissons. Il a vu rénover son
tonneau qui menaçait ruine, une façon de perpétuer sa légende
sur terre. Comme il est beau son lac vu du ciel, son bleu d'été
quand il reflète l'azur, sa surface gelée ceinte d'arbres givrés
l'hiver. Dernièrement, une armée de techniciens sont venus
expertiser son lac pour l'aménager. Plus tard des gens du pays
ont manifesté leur désaccord. Dans la foule, il en a reconnu,
encore des gamins facétieux de son temps et à qui il faisait
peur. Les mêmes qui ont empêché l'installation d'une vaste
décharge et fait reculer un puissant groupe. Les aménageurs
du Conseil général, surpris, ont d'abord reculé devant l'ire des
gens du pays. Leurs responsables politiques ont annoncé des
travaux plus légers. Finalement, les financements étant engagés, le projet est maintenu, au prix de pressions sur les maires
et la communauté de communes. Un vrai déni de démocratie.
Un vrai saccage du lac : parking géant, voies artificialisées,
abattage d'arbres majestueux, arbustes incongrus, embarcadère
en béton... et tout ça baptisé retour à l'état naturel ! Si vous
passez par là et recevez quelques gouttes de pluie salée malgré
un beau ciel bleu, ne vous inquiétez pas, ce sont les larmes de
Garou, l'homme des bois près de la nature, devant le massacre
de son lac par des écologistes de salon. JCB
coupe entière, et l'Agneau de l'Adret, plus
lourd et destiné aux grandes surfaces.
Le 14 avril 1993, a lieu la pesée des agneaux
Les visites d'élevage se poursuivent en mars
au centre d'élevage de béliers des Cabarets. Il
1993, contrôles de performances et identificaest procédé en même temps à la taille des ontion des agnelles : MM. Dumas le 19 mars,
glons et aux décisions de réforme.
GAEC des Ajoncs le 24 mars, EARL GaugeUne réunion régionale, dédiée à l'informatisaMeige le 26 mars (projet de départ dans le
tion des contrôles, a lieu le 15 avril 1993, à
Doubs).
Cézeyriat au siège de la CMRE, Centre mécanoLe 1er avril 1993, les éleveurs de l'Ardèche
graphique régional. Sont présents : pour la
reçoivent la visite de l'UPRA : Mme Legatte
CMRE Mme Voisin ; pour
Micheline à SaintUPRA Sébastien Barra ;
l'
Peray (éleveuse par
pour l'EDE du Puy-deailleurs de chiens de
Dôme, MM. Gapihan et
berger, Briard et imRudel ; pour l'EDE de la
pressionnants
KoHaute-Loire, Mmes Roche
mondor), MM. Bazin
et Volle, MM. Montagne
Yves (double actif,
et Brunelin. Le départeélevage de lapins
ment du Puy-de-Dôme
angora et produits
développe sa méthode
locaux) et M. Michel
d'organisation basée sur un
(élevage plus tradiseul technicien opérant sur
tionnel couplé avec
38 élevages et transmettant
des volailles) à Saintles données par modem.
Sauveur-de- MontaMM.
Gerbier,
Bernard,
Cathalan
La Haute-Loire intervegut.
nant sur 50 élevages en
Une réunion d'inforpesées et 20 en contrôle simplifié, travaille
mation et de concertation se tient le 9 avril
avec un technicien appuyé par trois peseurs, ce
1993, au centre de Paysat près de Langeac. La
qui a tendance à alourdir quelque peu le circuit.
vente de béliers Noire du Velay est annoncée
Chaque département décrit le matériel de pesée
pour le mercredi 5 mai. Les deux organismes
et le matériel informatique dont il dispose.
évoquent la réorganisation respective de leurs
Mme Voisin décrit les missions de la CMRE :
services. La Chambre d'agriculture fait le point
au niveau de son rôle de CRI, elle sert d'appui
sur les élevages en contrôle de performances et
au contrôle de performances dans les départesur l'évolution du logiciel CPOV, Contrôle de
ments de sa zone ; au niveau national, elle a
performances ovins viande. Le groupe référenpassé un contrat avec l'Institut de l'élevage
ces est constitué de 13 fermes réparties sur le
pour gérer le logiciel CPOV. La phase expéridépartement. Les groupements de producteurs
mentale menée avec les départements de
vont vers une union COPAGNO, réunissant Col'Aveyron, du Puy-de-Dôme et de la Hautepa-Haute-Auvergne (Cantal et Haute-Loire) et
Loire devrait donner lieu à un bilan présenté en
Copa-Dômes (Puy-de-Dôme), basée à Saintjuin au Comité de pilotage qui décidera de sa
Beauzire (Haute-Loire) et animée par Guy
généralisation ou non. Chaque nouveau logiciel
Marchand. Par ailleurs une plateforme ovine,
nécessite une formation des utilisateurs. ChaARCADIE, remplacerait l'entité Centre-Sud,
que modification du logiciel a un coût facturé
dans un grand Massif-Central, chargée de la
au client. Il a ainsi été constitué un fond percommercialisation des animaux d'élevage et de
mettant de procéder rapidement aux modificaboucherie, en particulier les agnelets avec un
tions essentielles et urgentes, pour pallier aux
volume estimé à 260 000 têtes. Il s'agit de
lenteurs d'un financement direct par le miniscontrer et de concurrencer OVINPEX, une orgatère. L'après midi est consacrée aux détails des
nisation privée. Emmanuel Coste présente les
transmissions des informations entre EDE et
activités de la SOFRAG holding active dans la
CMRE et des délais transmission/retour sur site.
vente d'agneaux en carcasses avec un volume
L'assemblée générale de la section a lieu le 5
de 500 000 têtes dont 60 % en découpe (SICA
mai 1993 en matinée, aux Cabarets chez Roger
Grillon, France Agneau Lyon, Sisteron, Alpes
et Yvonne Bernard. Un programme génétique
Provence Viande (APV). Elle présente le Grilplus « musclé » avec recours à l'IA est en cours
lonnet, agnelet de 12 kilos de carcasse en dé-
LES DOSSIERS NOIRS (suite)
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sation mériterait aussi un développement
comme l'aspect environnemental et le rôle du
mouton. Le déroulement de la journée pourrait
être le suivant : matin consacré aux diverses
visites, en car, avec accompagnement et commentaires ; après midi une présentation de
l'UPRA, les aspects économiques et filière, races rustiques et gestion de l'espace. L'organisation du Sommet de l'élevage est ensuite précisée. Position plus centrale et plus grande sur-
de réflexion. L'après midi, 50 béliers sur 64
entrés en centre, issus de 17 élevages, sont
proposés à la vente à des prix variant de 1600
à 2100 francs selon leur valeur génétique.
La section Bizet tient son assemblée générale
et sa vente de béliers le 18 mai 1993. La Compagnie nationale du Rhône expérimente un
entretien des rives du fleuve avec un lot de 10
femelles Bizet. Un lot de 145 agneaux lourds a
été commercialisé pour la fête musulmane de
l'Aïd avec l'entreprise Isnard. La section
compte actuellement 18 élevages dans 8 départements, soit environ 4 000 femelles. L'orientation de la race vers une « aide aux races menacées de disparition » semble se confirmer. Il
faudra cependant une dérogation car l'effectif
actuel est supérieur aux recommandations, en
jouant sur la dispersion géographique de la
race et la nécessité de pratiquer du croisement
industriel. Ce classement implique un maintien
des effectifs sur une période de 5 ans et apporte
un financement de 300 francs par UGB. Le centre d'élevage de béliers présente à la vente 15
jeunes mâles sur les 21 entrés. Il conviendra de
trouver une autre implantation pour le centre
car la ferme de Bonnefont engage une conversion en agriculture biologique et ne pourra
donc plus l'abriter.
Une réunion technique UPRA se tient le 7 juin
1993 au siège à Marmilhat. Un conseil d'administration est prévu en juillet sans doute à
Brioude : élections du bureau et du président,
fonctionnement de l'UPRA et des sections, positionnement par rapport à la filière, politique de
promotion et de communication. L'assemblée
plénière devrait de dérouler en septembre avec
en ligne de mire un forum des financeurs fin
octobre. En terme de promotion, les grands
moments sont toujours le Sommet de l'élevage
à Cournon en octobre et le Salon de Paris au
printemps 1994. Le nouveau papier à en-tête
"Races des Massifs" est en impression. On en
vient à la philosophie du Forum destiné aux
financeurs (OFIVAL, Ministère, FIDAR, Région,
DRAF, Conseils généraux et régionaux...), organismes divers et aussi grand public. Il s'agit
de présenter l'UPRA, sa base de sélection, son
fonctionnement, ses outils et partenariats et
finalement ses besoins de financement. Les
supports devraient être des montages diapos ou
vidéos, plutôt courts et réutilisables en particulier dans l'enseignement agricole, et aussi des
visites bien ciblées : élevages sélectionneurs,
centres d'élevage et SCI, laboratoire d'IA, lots
d'agnelles vieillies... La filière de commerciali-
Emmanuel Coste
face d'exposition devraient assurer une plus
grande visibilité de nos stands. Aire de démonstration et tunnel abritant le concours spécial Rava représentent 400 m2. Chacune des
six races choisit ses options de présentation :
race pure, femelles F1 et produits. Les visites
d'élevages, après leur franc succès de l'an passé, seront reconduites. Nos techniciens porteront blousons sans manches et badges. Les
chemises cartonnées plastifiées seront utilisées
pour délivrer les dépliants de race. Le salon de
Paris n'attire aucune remarque particulière.
Le 10 juin 1993, se tient à Paysat près de Langeac, l'assemblée générale de Fedatest. Après
lecture et approbation du PV de l'année précédente, le rapport d'activités déroule fonctionnement et résultats du troupeau. Les acheteurs
de béliers de croisement à Berrytest se sont
regroupés dans la zone sud et sont demandeurs
de 750 béliers. Les races à viande ont du mal à
fournir des béliers améliorateurs en boucherie.
Le compte rendu financier fait ressortir une
bonne santé de l'entreprise grâce à une bonne
maîtrise des charges et à une réduction des
investissements ce qui pénalise un peu l'avenir.
Les résultats du troupeau sont corrects mais les
subventions plutôt en baisse entraînent une
absence de résultats et donc, sans autofinancement, une difficulté à investir. Le prévisionnel
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contrôlent 650 béliers. Les agnelles commercialisées atteignent un volume de 4000 environ. 20 béliers sont en testage, en ferme et à la
station de Fedatest. En Préalpes, les effectifs
sont de 12 000 femelles dans 58 élevages. Le
testage a démarré en 1989, la SCI en 1991 après
une étape par un centre d'élevage de béliers. En
1992, la SCI comprenait 300 béliers. Les IA se
répartissaient de la façon suivante : 1200 de
testage, 1200 en accouplements raisonnés,
2500 de diffusion hors base de sélection. La
Limousine pratique un schéma de testage exclusivement en ferme.
Le protocole de testage devrait être le suivant
dans les années à venir :
- autonomie du testage en ferme pour les 3
races Lacaune, Préalpes et BMC en 94/95.
- aspect intra-race, étude des antagonismes
effets directs / effets maternels devant entraîner
une confirmation ou une inflexion du schéma.
- évaluation des races et de leur complémentarité ou en partant du principe qu'il y a trop de
races en France, création d'une Blanche du
1993, laisse présager une hausse des charges
(finition des agneaux selon le protocole expérimental, augmentation de l'effectif du troupeau, stabilisation des charges de personnel) et
une augmentation des ventes d'agneaux. Le
résultat devrait être cependant légèrement négatif. Dotation du ministère (44-50) et dotation
Montagne devraient connaître une baisse de 15
%. FEOGA et PDZR sont identiques. Les collectivités territoriales financent des investissements mais pas du fonctionnement. On aborde
aussi diverses questions d'avenir : rôle du mouton dans l'aménagement du territoire, testage
sur les qualités maternelles, vérification de
l'effet et de l'intérêt du croisement, rameau
"Blanc du Sud ". Chaque race présente à Fedatest détaille son schéma de sélection. La Lacaune viande se positionne parfois en diversification du lait. OVITEST travaille sur prolificité
et valeur laitière tout en préservant une
conformation correcte pour la filière viande
(qualités bouchères). La sélection s'appuie sur
une cinquantaine d'éleveurs sélectionneurs et
13 000 brebis. Cette base est un peu insuffisante mais il est difficile de motiver les éleveurs. Le principe est la mise en testage sur
descendance nécessitant 70 % des femelles en
IA. Elle implique une propriété collective des
béliers, moitié produit d'IA et moitié en testage.
La SCI entre 200 à 300 béliers par an, sur qualités maternelles, 100 vendus hors base de sélection et 50 mis en testage choisis dans la moitié
supérieure. Ils sont contrôlés sur croissance,
développement et état d'engraissement. Au
final, 4000 IA sont réalisées à raison de 100 par
bélier en testage. 300 à 500 sont faites à Fedatest considérée comme une ferme normale. Des
agnelles laitières sont utilisées comme support
de testage pour mesurer qualités maternelles et
qualités viande. Annuellement en terme de
diffusion sont pratiquées : 8 000 IA de diffusion « qualités maternelles » hors base de sélection, 25 000 autres IA, 100 béliers de la SCI,
2500 agnelles, le tout hors base de sélection.
La Blanche du Massif-Central s'appuie sur 86
élevages et 31 000 femelles en contrôle. Le
testage a débuté avec 6 béliers puis 8 en ferme,
ce qui s'étant révélé insuffisant, a impliqué un
retour à Fedatest. En 1991, une redéfinition du
schéma de sélection a entraîné une plus grande
implication des éleveurs grâce à un logiciel
d'accouplements raisonnés. En 1992, 5500 IA
dont 2500 de testage ont été réalisées. En 1993,
la structure en prévoit de 6500 à 7000 dont
1000 à 1500 de diffusion. Les 2 stations
Sud. Comment organiser la continuation, croisements alternatifs avec renouvellement : Lacaune 2/3 x BMC 1/3 x mâles BMC = BMC 2/3 x
Lacaune 1/3 x mâles Lacaune...
Le troupeau actuel de Fedatest comprend 1200
femelles. Des IA ont été pratiquées en mai
1992 avec des béliers Lacaune et Préalpes, les
retours assurés par des BMC. Les agneaux nés
en octobre 1992 sont dans un protocole d'étude
de carcasses et d'effets directs. Un lot de lutte
de 350 brebis en septembre 1993 et agnelant en
février-mars, donne lieu sur les agneaux à une
étude de carcasses et d'effet grand-père maternel. Les autres agnelages se déroulent en octobre 1994 et février 1995.
A partir de 1995, se pose la question de l'orientation de l'outil Fedatest ? Les effets grand-père
maternel sont importants et l'on peut s'orienter
vers une brebis « moule à agneaux » avec un
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mie), valorisation et entretien des zones géographiques difficiles (espace), maintien et préservation du monde rural (social). Il convient
de bien affirmer la finalité économique en priorité en se plaçant sur le terrain de la gestion de
l'espace et de la finalité sociale. Les objectifs
sont précisés : améliorer les performances
techniques et la rentabilité des troupeaux de
sélection ; accentuer la diffusion du progrès
génétique au-delà des bases ; conforter et élargir les bases de sélection. Le point faible de
l'organisation est la commercialisation. Une
étude de faisabilité financée par la CEE est envisageable mais le coût d'un commercial semble prohibitif au vu de nos financements. Une
approche globale, sorte de « joint venture »
avec des partenaires locaux, semble plus réaliste. Un éventail des potentialités devrait être
présenté au prochain conseil. Le projet technique est affiné : poursuivre le travail de détection (contrats génétiques, élargissement de la
pratique de l'IA pour améliorer la connexion et
accélérer le progrès génétique), développer des
outils plus performants : modèle animal pour la
valeur laitière, CPOV au niveau des EDE, logiciel de gestion UPRA, logiciel éleveur à des fins
de gestion de troupeau, gestion de la variabilité
génétique au sein des races, préservation du
potentiel de rusticité ; promouvoir la diffusion
des reproducteurs ; promouvoir le rôle de
l'UPRA dans les filières ovines, dans le secteur
agricole en général, dans les domaines de l'entretien de l'espace et de l'aménagement du territoire. Un chapitre est consacré à la promotion/communication : diffusion du nouveau
visage de l'UPRA, réalisation de nouveaux supports de promotion, participations aux manifestations locales et régionales, formation du personnel aux techniques de communication, édition d'une lettre de communication interne,
organisation d'une journée « forum des financeurs » départementaux, régionaux et nationaux. Le travail génétique engagé a indéniablement un intérêt économique : maîtrise du
standard phénotypique, sélection sur les qualités maternelles, évaluation des qualités bouchères des béliers au sein des SCI. La définition
des fonctions de chacun devrait faciliter une
bonne gestion des ressources humaines. Un
point est fait sur les marchés d'exportations.
L'Espagne demande de petits agneaux de type
Lechal (6 kilos de carcasse) et Ternasco un peu
plus lourd. C'est une demande saisonnière,
globalement de décembre à mai, et changeante
d'une année à l'autre. La tendance n'est pas très
objectif de croisement, ou bien sélectionner en
race pure sur les qualités bouchères, ou adopter
une position médiane en destinant au croisement la part des effectifs non intéressante
génétiquement. La grosse masse des agneaux
produits l'est en race pure et la filière ne peut
s'en désintéresser. Elle s'est orientée vers la
découpe à 80 % contre 30 % seulement antérieurement. La région présente un réservoir
unique de femelles rustiques bien adaptées à
leur contexte environnemental.
Une réunion départementale avec la DDA, le 22
juin 1993, fait le point sur les références ovines en Haute-Loire. La PCO 1992 s'établit à
1135 bénéficiaires et 142 625 femelles primées. En 1993, elle est en nette augmentation
avec 1191 élevages et 156 459 animaux. Le
dépassement est de 28 300 femelles mais on
note 14 500 sous-réalisations qu'il s'agit de
mobiliser en particulier par un courrier de la
DDA.
L'UPRA Races Ovines des Massifs tient un
conseil d'administration à Brioude le 7 juillet
1993. Sont traitées en introduction des questions pratiques : modalités de fonctionnement,
date et lieu de l'assemblée générale ; fréquence,
dates et lieux des conseils (Brioude, Lempdes) ; commissions de travail thématiques définies par le conseil : commission administrative
et financière, génétique, filière, promotion. Il
est aussi convenu d'utiliser les nouvelles méthodes de communication pour accélérer communication et diffusion des informations. Le
conseil procède ensuite à l'élection du bureau :
président M. Coste Emmanuel ; un viceprésident par région de programme : Mme
Coudert pour le Limousin, M. Rousset Languedoc-Roussillon, M. Cousteix Auvergne, M.
Saint-Lager Rhône-Alpes ; M. Leydier Maurice secrétaire ; M. Chauvel Jean-Luc trésorier.
La nouvelle entité regroupe 74 000 brebis (1/3
des femelles de la zone) et 259 adhérents. La
Haute-Loire arrive en tête des départements.
Les finalités de l'UPRA sont rappelées : amélioration de la compétitivité des élevages (écono-
5
té (viande de pays, plaisir gustatif...) COPAGO
présente la démarche SOFRAG, association
comprenant groupements et abatteurs autour de
la valorisation d'un produit certifié : l'agneau
de l'Adret. La démarche est centrée sur la traçabilité du produit de l'éleveur au distributeur,
sur un cahier des charges et toute une panoplie
de promotions. Le type d'agneau est classique :
conformation U et R, gras faible et clair, apport
régulier sur l'année. L'objectif serait de 20 000
agneaux dans un premier temps avec une valorisation supérieure de 10 à 15 %. COPAGNO
expérimente la démarche auprès de 10 à 15
éleveurs. L'embauche d'un commercial est
encourageante en raison de la crise économique en Espagne, du tassement de la consommation et des difficultés des entreprises. Cette
production se ressent aussi de l'internationalisation des échanges, de l'intérêt marqué des
centrales d'achat et de la recherche d'un produit
standard à bas prix, de la concurrence du
Royaume Uni et de l'Irlande. Pour l'Italie, la
période favorable s'étend de Pâques à mai /
juin. La demande est diverse : agneaux légers,
agneaux plus lourds, brebis. Cette demande a
été accrue en 1993 par l'irruption d'une épidémie de fièvre aphteuse, et ne se renouvellera
sans doute pas. Le positionnement commercial
sur l'Espagne se caractérise ainsi. La saison
optimale est du 14 juillet au 15 août et ensuite
du 15 novembre au 15 décembre et à Noël. Elle
varie selon les années. La demande est variée :
agneaux rustiques de bergerie, agneaux légers
de 24 à 28 kilos vif, agneaux à viande peu colorée et bien finis. Le demande semble se resserrer sur ce dernier type de produit. Sont
pénalisés les agneaux non finis, bourrus, trop
âgés et parfois les races pigmentées. COPAGNO
dévoile sa stratégie commerciale, à savoir participer à la construction d'une plateforme ovine
nationale. Elle y trouve un intérêt en matière de
poids commercial, garantie de paiement, éventuellement une politique de produits identifiés,
un accès à l'information et une gestion transparente. Les contraintes sont cependant nombreuses : marché fluctuant, imprévisible et spéculatif, difficultés à réguler volumes et qualités. Il
en résulte des difficultés à prévoir et donc à
informer les adhérents. Le marché se resserre
en terme de prix et de qualité. Quant au marché
français, nous sommes positionnés essentiellement sur le débouché naturel des agneaux
rustiques et en particulier le Sud-Est. Les critères de qualité sont bien connus : homogénéité
en terme de poids, teneur en gras et conformation, taille de lot suffisante, poids inférieur à 18
kilos de carcasse, couleur claire de la viande,
bon état d'engraissement en quantité et qualité,
conformation minimale. Ce dernier critère est
important en vente en carcasse, un peu moins
en découpe bien qu'il conditionne un bon rendement et une proportion supérieure de morceaux nobles. La valeur relative de la peau est
toujours à la baisse. La consommation a beaucoup évolué dans le temps. En 1970, l'essentiel
était une production de milieu de gamme. En
1990, le haut de gamme est plus important.
Pour le consommateur la qualité tient à la qualité intrinsèque mais aussi à l'image de la quali-
envisagée au niveau de l'association comprenant actuellement les SICA de Grillon et de
Rémusat ainsi que la société Filliat de SaintEtienne. L'association travaille aussi sur un
agneau de lait destiné au marché français : le
Grillonnet . C'est un agneau léger d'une carcasse inférieure à 12 kilos, bien fini, à viande
claire, d'origine rustique. Ce créneau commercial écoule actuellement 300 à 400 agneaux
semaine avec un objectif de 500 à 600. Le prix
réglé au groupement varie de 350 à 370 francs.
La contrainte est la régularité de fourniture sur
l'année. COPAGNO s'est fixé un objectif de 200
agneaux semaine en 1994. Ces marques évoluent dans un contexte concurrentiel. "Arcadie
agneau languedocien" propose des équivalents
du Grillonnet : agneau Cathare, Catalan et de
Nîmes. L'agneau de l'Adret évolue sur la même
ligne qu'Elovel (Lozère), AFQP, agneau français
de qualité bouchère. Après cet ordre du jour
chargé, le conseil se sépare en fixant la date de
l'assemblée générale au 20 octobre à Brioude.
Le 13 juillet 1993, se tient à Brioude, une réunion technique concernant les logiciels informatiques. Elle réunit l'UPRA (MM. Barra, Perrin), les EDE du Puy-de-Dôme (MM. Gapihan,
Rudel) et de la Haute-Loire (Mme Volle, M.
Brunelin), et des éleveurs représentants les
commissions de contrôles de performances
(MM. Chauvel, Delabre, Rousset). La démarche est nationale mais avec implication de
l'UPRA. Faut-il se raccrocher à des outils exis6
technique avec gestion des données commerciales. Une liaison avec CPOV est prévue.
Se pose aussi le problème de la maintenance de
ces outils informatiques. Elle est assurée actuellement de façon fiable par les ARSOE, ateliers régionaux de saisie dans la chaîne officielle. Cette maintenance est corrective dans le
respect d'un cahier des charges et évolutive
quand il s'agit d'ajouter d'autres fonctions
(nouveau cahier des charges). On peut se poser
aussi la question : quelle société privée est en
mesure de s'investir sur un logiciel ovin « peu
porteur »? Le logiciel développé par l'UPRA
s'intéresse à la gestion des fichiers raciaux, au
programme d'accouplements raisonnés, aux
valorisés fournis aux éleveurs, à la gestion d'un
fichier éleveur. Il côtoie un logiciel national
développé par l'ALGO en cours de test. La
situation actuelle est assez contrastée. Il semble
plus difficile d'adapter un produit à l'existant
national que de « bricoler » un programme
local. Aussi les éleveurs en contrôle officiel qui
ont le plus d'informations ont paradoxalement
le moins de retour et de valorisés ! Il est temps
de sortir de cette situation pour le moins paradoxale : un CPOV allégé, greffer la demande sur
INDICE +, un autre logiciel sobre, avec des fonctions réduites et des sorties efficaces ?
(à suivre…)
tants ou carrément concevoir un outil nouveau ? De forts besoins ont été exprimés au
colloque de Brioude. La présentation d'un précahier des charges a été reprise par l'Institut de
l'élevage. Une enquête envoyée à 25 éleveurs
pressentis et intéressés par un logiciel (retour
de quinze questionnaires sur 25 envoyés) met
en évidence quelques demandes fortes : tenue
inventaire permanent, aide au choix du renouvellement, constitution des lots de lutte, et à un
degré moindre planning de lutte, choix des
réformes et bilans techniques. Le besoin est
donc d'un logiciel pour les sélectionneurs avec
nécessité de récupérer les données de contrôle
de performances ovin. Le logiciel CPOV,
Contrôle de performances ovin viande, pourrait
convenir avec une décentralisation de la saisie
sur les EDE et à terme un retour d'information
dans l'élevage et une alimentation du logiciel
par l'éleveur. Se posent de complexes problèmes à résoudre comme la standardisation du
matériel et la constitution d'interfaces. Plusieurs logiciels existent actuellement. CPOV est
le logiciel utilisé par les EDE pour la gestion du
contrôle de performances ovin. Il est géré par
des techniciens et prend en compte tous les
événements du troupeau : lutte, inventaire,
mise-bas, pesées. En lien avec le CTI, il produit
des valorisés officiels (états agneaux et état
brebis, fichier agneaux). La première version
incluait une gestion de la commercialisation.
Un module exportation des données pouvait
permettre la valorisation ou l'exportation des
données vers un tiers possédant un logiciel
standard. INDICE + a été conçu en Limousin
pour des éleveurs non sélectionneurs. Il est
strictement intra-troupeau. Il gère diverses
informations : inventaire, mise-bas, pesées
simplifiées, prévision de mise en lutte et fournit diverses sorties : fiche carrière brebis, module aide au choix des réformes, bilan technique, généalogie, recherche de filiation, maladies, conditions d'agnelage, luttes infertiles,
détection des brebis vides. La voie mâle n'est
pratiquement pas gérée. Un petit module de
sélection permet une indiciation. Certains fichiers sont exportables. Une importation est
possible avec CPOV notamment. Ce logiciel est
utilisé par une vingtaine d'élevages en Limousin, par un technicien dans l'Allier et le Puy-deDôme, en Lorraine et Haute-Normandie (10
éleveurs). Il nécessite un important travail de
saisie par l'éleveur. En PACA/Midi-Pyrénées
démarre la programmation d'un logiciel d'appui
PS : nous avons appris le décès de JeanJacques Merle le 26/05/2016 à Chalinargues
dans le Cantal à l'âge de 68 ans. Jean-Jacques
avait succédé comme directeur de Copa-HauteAuvergne à Michel Souvignet en 1982. Il quittait la direction du groupement en 1992 lors du
regroupement avec Copa-Dômes. Guy Marchand prit alors la direction de la nouvelle entité COPAGNO.
7
de tout et les effets du Plan Marshall tarderaient à
porter leurs fruits. Il s'installe agriculteur en
polyculture-élevage sur la ferme familiale.
Officier de réserve de l’armée de l’Air, il est
rappelé en Algérie en 1956.
Son ascension syndicale et professionnelle
Au retour du lycée, il milite dans le syndicalisme
« Jeunes agriculteurs » dont il franchira
rapidement les niveaux de responsabilité pour en
devenir le président de 1964 à 1968, à la suite de
Michel Debatisse, fer de lance de ces jeunes
générations de paysans encouragées par la volonté
de réforme de la Vème République naissante. Il
occupe ensuite le poste clé de secrétaire général de
la FNSEA de 1975 à 1979 puis la présidence de
1979 à 1986.
Les ministres de l'agriculture sous la Vème
République
Notice biographique
Né le 19 octobre 1932 à Ville-en-Vermois
(Meurthe et Moselle) dans une famille
d’agriculteurs, François Guillaume fait ses études
secondaires à Nancy. Chef d’exploitation agricole
en Lorraine, il est président de la puissante FNSEA
de 1979 à 1986. Après les élections législatives de
mars 1986, gagnées par la Droite, François
Mitterrand nomme Jacques Chirac premier
ministre. François Guillaume accède alors au
poste de ministre de l'agriculture du 20 mars 1986
au 10 mai 1988.
Une enfance paysanne
François Guillaume décrit son enfance dans son
livre « Un paysan au cœur du pouvoir » paru en
2014 aux éditions De Borée dans la collection
Témoignages. Né dans un village de Lorraine, il
fréquente l'école communale où la grande fierté
des maîtres de l'époque est d'envoyer les meilleurs
de leurs élèves à l'Ecole Normale. Il participe aux
travaux de la ferme dans cette société encore très
traditionnelle décrite dans son ouvrage, structurée
autour de personnages hauts en couleurs et
respectés de tous : l’instituteur, le curé, le maire
et de détenteurs de savoirs millénaires : le berger,
le forgeron, le distillateur, le marchand de
bestiaux... Il les met en scène dans ses souvenirs
d'enfants. Nous ne résistons pas au plaisir de
reprendre en annexe son savoureux portrait du
berger.
François Guillaume se dit très influencé par ses
grands-pères, véritables patriarches très attachés à
la terre. « Mon grand-père maternel était bon par
nature, taquin et aussi soudainement emporté qu'il
était jovial quelques minutes auparavant... Mon
grand-père paternel était tout différent. C'était un
patriarche au sens dominateur du terme. Sévère et
fier, il n'admettait aucune faiblesse, ni pour lui ni
pour les autres. Ses jugements étaient
péremptoires et personne, parmi ses fils, n'osait les
contester... » François quitte à 11 ans l'école
primaire et l'insouciance de l'enfance, pour entrer
à Nancy au collège de Malgrange tenu par des
prêtres, dans l'ancienne résidence d'été de
Stanislas, duc de Lorraine, puis à Saint-Sigisbert.
Le recrutement est plutôt bourgeois et le jeune
paysan n'est pas trop à son aise. L'éducation est
spartiate et la nourriture frugale du fait des
réquisitions allemandes. Il vit la honte de
l’effondrement militaire de la France en 1940,
l’occupation allemande, les maquis avant que la
Lorraine ne soit libérée par les Alliés. Pourtant
« les lendemains qui chantent » ont tardé à venir.
L’agriculture sinistrée de l'après-guerre manquait
Michel Debatisse et François Guillaume
Ses engagements sont multiples.
Au titre de ses fonctions syndicales, il siège
au Conseil économique et social de 1964 à 1968
puis de 1979 à 1986 ; au Comité économique et
social européen de 1975 à 1979 ; il préside
le Conseil économique et social de Lorraine de
1980 à 1986. Dirigeant syndical, il participe à
l’élaboration des lois d’orientation agricole de
1960 et 1962. François Guillaume sera l’un des
artisans des « trente glorieuses » de l’agriculture
française, autosuffisante dès le début des années
1970 et 1er pays exportateur mondial de produits
agroalimentaires devant les États-Unis. Ce bond
prodigieux devra être tempéré au niveau européen
par une Politique agricole commune (PAC) source
de bien des affrontements.
Il oeuvrera aussi dans sa Lorraine natale. Pour
aider les agriculteurs à s'adapter aux techniques et
à l’économie modernes, il fonde et préside de
1964 à 1995 l’Association lorraine pour la
promotion en agriculture, un centre de formation
pour adultes situé à Haroué doté d’un internat et
d’une ferme d’application pratique de la
formation. Attaché à la participation des
agriculteurs à la protection du milieu naturel et à
l’embellissement des villages lorrains, il incite à la
8
création du Parc naturel régional de Lorraine qu’il
préside de 1971 à 1980. Président du Comité
économique et social de Lorraine de 1980 à 1986,
François Guillaume s’efforcera de préserver du
démantèlement la sidérurgie lorraine, menacée par
la préférence accordée alors aux sites sur
l’eau : Fos-sur-Mer et Dunkerque. Il obtiendra du
chef de l’État, en avril 1984, un arbitrage qui
préservera pour 20 ans l’essentiel de l’outil
industriel lorrain.
Président de Saint-Hubert Industrie Laitière (700
salariés) de 1981 à 1990, il oriente la société vers
de nouveaux produits : beurres allégés, yaourt au
bifidus actif en complément des transformations
laitières traditionnelles : lait UHT, fromage.
En 1983, il publie « Le Pain de la Liberté » aux
Éditions Jean-Claude Lattès. Edith Cresson et le
Syndicat du livre lui auraient mis des bâtons dans
les roues à cette occasion. Cet ouvrage retrace son
engagement syndical agricole, puis politique pour
un dialogue Nord-Sud équilibré, et sa vision des
problèmes de développement du Tiers-monde.
C'est un plaidoyer pour une profession qui assume
sa mission : Nourrir les hommes.
Ministre de l'agriculture
A la tête de la FNSEA, François Guillaume a
affirmé sa forte personnalité et son talent de
tribun, dans le contexte difficile de l’arrivée au
Pouvoir de la Gauche en 1981 et de celle d’Edith
Cresson à l’Agriculture qui prétendait « casser le
monopole de la FNSEA ». C’est elle qui dut
finalement abandonner la partie après la puissante
ministre de l'agriculture. Avant qu'un nom soit
prononcé, François Guillaume aurait déclaré sans
hésitation : « Moi, je suis prêt ». Jacques Chirac
encaisse et pourquoi pas : François Guillaume a
suffisamment donné pour le RPR et il n'est pas
inintéressant de le voir à l'œuvre. Il est donc
adoubé et contacte Raymond Lacombe, secrétaire
général de la FNSEA, pour lui annoncer « sa
nomination ». Ils ne pourront même pas se
rencontrer et Raymond Lacombe réunit un petit
comité qui le charge d'assurer l'intérim. Il sera
ensuite élu pour succéder à François Guillaume.
Ce dernier prendra souvent mal les critiques de la
FNSEA sur son action au ministère, alors qu'il lui
semble faire son possible. L'opposition syndicale
verra dans cette nomination la mise en lumière de
la prétendue neutralité d'une FNSEA, en conflit
constant avec les précédents locataires socialistes
de la rue de Varennes et du rôle de courroie de
transmission du RPR qu'a tenu le despotique
François Guillaume au sein du monde paysan,
récompensé de ses bons et loyaux services. C'est
l'homme du verrouillage du syndicalisme paysan,
disent-ils. On peut penser que François Guillaume
était sincère mais aussi qu'il avait mesuré les
risques de sa démarche qu'il concevait comme une
mission de défense de l’agriculture française face
aux intérêts contraires américains, allemands ou
britanniques et pour appliquer la Politique agricole
qu’il revendiquait à la tête du grand syndicat
paysan.
Son action au ministère
François Guillaume se sent bien rue de Varennes
malgré ce milieu de courtisans qui n'est pas le
sien. Il décrit l'ambiance étrange et crispé des
conseils des ministres entre un Chirac exaspéré et
le Sphinx Mitterrand. Ce dernier ne semble pas lui
montrer une hostilité particulière bien qu'ils se
soient opposés sur l'extension du circuit
automobile de Magny-Cours qui condamnait le
lycée agricole et des terres agricoles. Il dit
regretter un peu de n'avoir pas convié plus souvent
à sa table des élus influents et des dirigeants
professionnels reconnus. Il octroie des « médailles
» avec réticence et conteste les priorités. La vie
continue sur sa ferme et lors de la relâche estivale
des ministres, il conduit la moissonneuse. Il doit
aussi se séparer de son troupeau laitier devant la
difficulté à trouver un vacher qualifié. Il voit partir
ses vaches Frisonnes avec tristesse et les
Charolaises ne les supplanteront jamais dans son
cœur.
En avril 1986, réunis à Luxembourg depuis cinq
jours, les douze ministres de l’Agriculture de la
Communauté économique européenne ont conclu
un accord sur un gel des prix pour la campagne
1986-1987. Ils se sont également entendus sur une
manifestation de force des 120 000 paysans à
Paris et le triomphe électoral aux élections aux
Chambres d’agriculture, test de représentativité du
monde paysan. Quant à l'accession au poste de
ministre de l'agriculture, les versions divergent
quelque peu.
Jacques Chirac, nommé premier ministre, a
plusieurs personnalités en tête, dont Louis Lauga,
ancien président du CNJA et député RPR des
Landes. Comme de coutume dans les
gouvernements de droite, on demande l'avis de la
puissante FNSEA quand il s'agit de nommer un
9
s'exposer à des oppositions dans son propre camp
ou dans le camp opposé : congrès viticole à
Cognac avec une vive opposition du MODEF, à
Lyon dans le fief de Michel Noir ministre du
Commerce extérieur, congrès de la FNSEA à Brest,
congrès du CNJA avec un « accueil potache »...
Fin septembre 1986, s'ouvre à Punta del Este en
Uruguay, le cycle du GATT. Les Etats-Unis pestent
contre les subventions européennes qui freinent la
concurrence. L'Europe est représentée par Paul
Tran Van Thinh ambassadeur de la CEE à Genève
auprès du GATT, le belge Willy de Klerk
commissaire européen aux Relations extérieurs et
le néerlandais Franz Andriessen
commissaire aux affaires agricoles.
François Guillaume s'y rend avec
Michel Noir, sans invitation. La CEE
accepte finalement la demande des
Etats-Unis d'inscrire l'agriculture
dans les négociations commerciales
et de la faire entrer de fait dans la
mondialisation à l'instar des produits
manufacturés. Et la Commission
européenne réfléchira à une réforme
de la PAC pour faire converger le
fonctionnement européen avec les
injonctions des Etats-unis et de
l'industrie agro-alimentaire.
« Un succès ambigu » titre en
novembre 1986 le mensuel de la
FNSEA : « C’est la première fois que (…) la
spécificité de l’agriculture n’est pas préservée.
Jusqu’à présent, en effet, le secteur agricole avait
bénéficié, au cours des précédentes négociations
internationales, d’un statut particulier. Une analyse
séparée et particulière des problèmes posés
semblait être la règle. La pression de ceux qui
veulent soumettre l’agriculture aux règles de
« droit commun » en sera sans doute
renforcée ». En revanche, pour le nouveau
ministre de l’Agriculture, François Guillaume, la
déclaration d’ouverture du cycle est un texte
« correct » et elle « implique les Américains dans
les négociations, ce qui est essentiel »
(L’Information Agricole, novembre 1986). Ce
cycle de négociations se conclura en 1994 par les
accords
de
Marrakech,
fondateurs
de
l'Organisation mondiale du commerce (OMC).
François Guillaume a sans doute fait son possible
pour ménager les intérêts de l'agriculture
française.
Neuf mois après la nomination de son ancien
président François Guillaume comme ministre de
l’Agriculture, la FNSEA convient dans son mensuel
que : « Si la nécessité de maîtriser la production
est aujourd’hui admise par tous, les trois premières
années (…) ont montré combien la mise en
réforme du marché des céréales, avec
l’instauration d’une taxe de 3 % permettant de
financer les excédents. Sans avoir obtenu tout ce
qu’il réclamait, François Guillaume se satisfait du
démantèlement de moitié des montants
compensatoires, qui autorisera les agriculteurs
français à une légère hausse des prix (1,5 % pour
le vin et les céréales et 3 % pour la viande bovine
et le lait).
En mai 1986, la catastrophe de Tchernobyl met le
gouvernement dans l'embarras. Peu de ministres
osent une communication sauf le ministère de
l'agriculture en conformité avec l'expertise du
professeur Perrin chargé de la
surveillance de la radioactivité
des territoires : « Le territoire
français, en raison de son
éloignement, a été totalement
épargné par les retombées radio
nucléaires ». Quelques lignes
plus loin, il se contredit, puisque
« les hausses de radioactivité
observées n’ont pas posé le
moindre problème d’hygiène
publique ». Trente ans après,
dans un interview, François
Guillaume persiste et signe : « Il
y eut une grande victime, le
Professeur Pellerin (fondateur et
directeur du service central de
protection contre les rayonnements ionisants),
accusé d’avoir volontairement minimisé le risque,
alors qu’il avait fait tout ce qu’il fallait. Il a
observé qu’aucun problème d’hygiène publique ne
se posait, mais il a échoué à se faire entendre,
parce que tous les médias étaient contre lui.
Comme dans la chanson de Guy Béart, à l’instar
de celui qui dit la vérité, il a été exécuté... Il
n’était pas possible de faire reconnaître la vérité
scientifique. Le premier jet de retombées
radioactives n’est pas venu en France mais en
Suède. Tout est arrivé seulement ensuite, quand il
a commencé à pleuvoir. J’étais le plus directement
concerné, parce que mon domaine touchait les
consommateurs. Il fallait réagir. On a interdit la
consommation des épinards en Alsace, puis à
Avignon et en Corse celle des salades. Le quart
Nord-Est a été touché plus tard. Nous avons cédé
à la pression des médias et demandé aux
producteurs de lait de maintenir les vaches à
l’étable, mais quand des champignons arrivés de
Pologne ont été vendus, bizarrement personne n’a
protesté. Notre plus grande crainte était que la
population s‘affole et se rende dans les
supermarchés en vue de stocker de la nourriture..."
Dès le début de son mandat, il se rend aux
invitations des organisations agricoles quitte à
10
application a été difficile et la prise de conscience
pour privilégier les aides directes aux producteurs.
douloureuse. » (L’Information Agricole, décembre
Ce conseil a aussi débloqué la question de la taxe
1986). Il est vrai qu’avant sa nomination, François
européenne sur les matières grasses d'origine
Guillaume n’avait cessé de parcourir la France,
végétale.
effectuant une sorte de campagne électorale
François Guillaume, ministre de l'agriculture, dans
parallèle à celle de sa future majorité
"La Lettre du ministre de l'agriculture" d'octobre
parlementaire
et
martelant
le
même
1987, présente le projet de loi de mutualisation du
discours : « Les excédents sont une chance pour la
Crédit agricole, intitulé "Mutualisation du Crédit
France, il faut continuer à produire et les quotas
agricole : une réforme de bon sens". La loi du 18
laitiers ne sont que le résultat d’une politique
janvier 1988 relative à la mutualisation de la
malthusienne et sans ambition
Caisse nationale de
des
socialistes
au
crédit
pouvoir » (cité
dans
agricole finalise
Vercherand, 1994). C'était
cette
réforme
aussi le refus de toute
consistant à racheter
collaboration
avec
l'Etat
à l'Etat la CNCA,
Caisse nationale de
socialiste alors qu'à la FNSEA
crédit
agricole.
les avis divergeaient. Marcel
Raymond Lacombe,
Deneux, président de la FNPL,
président
de
la
Fédération
nationale
de
FNSEA, n'y était pas
producteurs de lait, était
François Guillaume, Philippe Séguin,
favorable ni Jeanfavorable
à
un
Jacques Chirac
Paul Huchon alors
contingentement
et
se
directeur de la CNCA
présentait
même
comme
pour des raisons que l'on peut comprendre.
l'auteur des quotas qu'il avait découvert lors d'une
Son action au ministère est interrompue par la
visite professionnelle au Canada. François
victoire de François Mitterrand au scrutin de mai
Guillaume demandera même l'exclusion de Marcel
1988. Henri Nallet revient aux affaires.
Deneux. Cette attitude desservira la profession car
la politique des quotas sera gérée par les
La première bataille législative perdue
Jacques Chirac prépare alors les échéances
entreprises laitières au détriment du Conseil
législatives de juin 1988 et se montre soucieux du
national interprofessionnel de l'industrie laitière,
CNIL.
devenir de ses ministres en laissant à chacun le
Une fois parvenu à la tête du ministère, non
choix de sa circonscription. Il lui propose
Villefranche-sur-Saône ou la 3ème circonscription
seulement il ne supprime pas les quotas comme
beaucoup de producteurs l'espéraient, mais il doit
de Meurthe-et-Moselle. François Guillaume
accepter une nouvelle réduction de la production
n'accepte ni parachutage, ni autre circonscription
laitière. Paradoxe de la politique, bien plus tard, la
que celle de sa ferme, le Lunévillois fief d'une
FNPL et la FNSEA se feront même les défenseurs
UDF hostile aux gaullistes et dont l'ancien député
convaincus des quotas quand leur suppression sera
René Haby considère cette candidature comme
annoncée lors de la réforme de la PAC dite « à miune usurpation. Il fait campagne sur les thèmes
suivants : sortir la circonscription du marasme
parcours » en juin 2003.
économique et social actuel par la relance de
Les montants compensatoires monétaires, MCM,
l’emploi, l’appui concret aux entreprises et le
sont une technique utilisée depuis 1969, pour
désenclavement, la formation, les services
neutraliser les effets d'une variation des taux de
sociaux, la revitalisation du secteur rural, le
change entre deux pays, grâce à une unité de
classement de la circonscription en zone
compte européenne baptisée écu. Toutes les fois
bénéficiant des concours financiers européens. Il
que la monnaie d'un pays membre se dévalorisait,
est battu par le candidat du Parti socialiste. Il met
les prix garantis dont ses producteurs agricoles
son activité politique sous le boisseau, se consacre
bénéficiaient étaient revalorisés d'autant en
à sa ferme et passe plus de temps à la présidence
monnaie nationale. Mais, pour éviter que ce
de la laiterie Saint-Hubert. La coopérative Sodiaal
surcroît de revenu ne les avantage, il avait été
acquiert St Hubert en 1990 et recentre les activités
décidé que ce surcroît de revenu ne s'appliquerait
de l’usine de Ludres sur la fabrication de corps
pas aux exportations, grâce à une taxe appelée
gras allégés. Le lait et les produits frais tels que
«montant compensatoire monétaire». Ce dispositif
les yaourts sont repris par d’autres usines de
a été supprimé en 1987, à l'issue du Conseil
Sodiaal. François Guillaume démissionne ou est
européen de Bruxelles des 29 et 30 juin, lorsque la
débarqué selon les versions. Cet échec et le
PAC européenne a abandonné les prix garantis
11
Renonçant à ce mandat, il laissait la place à la
candidature de Gérard Longuet (UDF/RI). François
Guillaume brigue aussi la tête de liste mais
renonce, à la demande de Jacques Chirac, pour
laisser la place à Gérard Longuet devant le
soutenir à la présidentielle de 1995. En
compensation, on lui propose un
poste de vice-président, titre
honorifique et lucratif, qu'il
décline. Au Conseil régional, il va
obtenir
le
classement
du
Lunévillois en zone fragile
donnant accès aux fonds de
revitalisation rurale.
Député
Il est élu aux législatives d'avril
1993, au second tour, malgré un
Front national à 16 %. Il pense
bien
s'impliquer
dans
le
développement local mais aussi
tenir sa place à l'Assemblée. Il est
membre et vice-président de la
Commission des affaires étrangères, membre de la
délégation de l'Assemblée nationale pour les
communautés européennes. Comme au Parlement
européen, il découvre les arrangements entre amis,
les intrigues de cour, les coteries, les dérives
coupables des élus et de leurs partis politiques. En
déplorant l’absence d’exemplarité, les jeux
politiciens, les combines, les arrangements de
complaisance, les scandales tenus sous le
boisseau, il dérange ; mais il prend la défense de
ceux qui se sont refusés à toute compromission et
qui n’ont pas dérogé à la déontologie de l’élu. Il
marque ses distances avec les promotions
politiques trop rapides qui portent préjudice à la
saine gestion des affaires publiques et aux intérêts
de la France. N’étant ni intrigant, ni courtisan
mais, tout au contraire, rigoureux et direct, il n’a
plus la cote auprès de Chirac qui se radicalsocialise pour entrer à l’Elysée et s’y installer pour
deux mandats peu convaincants. François
Guillaume exerce pleinement le sien au Palais
Bourbon hors du clivage Droite-Gauche, ce qui
déplait. Détenteur de trois mandats, le parti lui
demande d'en abandonner et lui suggère la
Région. Il le regrette car il se prive d'une source
importante de financement pour son département.
Son mandat européen et national nécessite une
épuisante navette entre Paris, Bruxelles et
Luxembourg. Il ne renouvellera pas son mandat
européen en 1994, se consacrant à sa
circonscription et à l'Assemblée nationale. Jacques
Chirac refuse une deuxième cohabitation et laisse
la main à Edouard Balladur dans une atmosphère
de fin de règne. François Guillaume déplore en
1994, l'issue défavorable à l'Europe de l'Uruguay
démantèlement de l'entreprise lui laisse « un bleu
à l'âme ».
Député européen
Il postule pour une place dans une liste d'union,
mais
voit
son
positionnement
reculer
inexorablement vers les places inéligibles.
Françoise Balitrand, amie et proche
collaboratrice, intervient auprès de
Jacques Chirac et « le curseur
s'arrête à la douzième place ». C'est
une « campagne sans saveur et
dénuée de passion » à la remorque
de VGE. François Guillaume est
élu membre
du
Parlement
européen, le 25 juillet 1989, où il
est inscrit au groupe du RDE,
Rassemblement
démocratique
européen composé de Français et
d'Irlandais bons vivants et abusant
du scotch. Il est élu vice-président
de l’Assemblée ACP-CEE qui
rassemble des représentants de
cette assemblée et de 70 pays d’Afrique, des
Caraïbes et du Pacifique. Il y développe sa
proposition d’un Plan d’aide au Tiers-Monde
préconisant l’organisation des marchés mondiaux
pour pallier les fluctuations erratiques des prix
agricoles – proposition qu’il avait soutenue à
l’Assemblée générale de la FAO en 1987 après
agrément par le Conseil des ministres européens
de l’Agriculture. Les débats sont assez
académiques, les Africains ne pensent qu'à garder
leurs douillets postes et ainsi le projet
d'organisation des marchés agricoles en faveur du
tiers-monde avance peu. Il note par ailleurs le
puissant travail de lobbying des grandes firmes
internationales auprès des députés.
Il siège aussi à la commission de l'agriculture où
se préparent les concessions faites aux Etats-Unis
dans le cadre du GATT. Il stigmatise à cette
occasion le positionnement de Jacques Delors,
trop laxiste à son goût. Le groupe RDE, à son
instigation, propose une distribution des excédents
aux banques alimentaires. Ce mandat se termine le
18 juillet 1994, il en sort désabusé et le qualifie
« d'illusion du pouvoir ». Il publiera en 1999 aux
Editions Lattès « Le complot des maîtres du
pouvoir » , où il dénonce l’Europe technocratique
et prône une « Europe des Nations ».
Une tentative lorraine
En 1992, François Guillaume pense à un mandat
au Conseil régional de Lorraine. Il se heurte à des
arbitrages nationaux laissant le champ libre à
l'UDF leader d'une liste panachée. Le succès devait
être au rendez-vous face à la candidature de JeanMarie Rausch, maire centriste de Metz élu en
1986 et entré au gouvernement Rocard en 1989.
12
l'agriculture qui ne peut s'accommoder du libreéchange généralisé.
François Guillaume se consacre à ce combat
contre la faim dans le monde, au sein de
l'association "le Plan Guillaume pour un nouvel
ordre économique mondial", articulé autour de 4
axes : une « Opep » des produits agricoles ; la
mise en place de marchés communs dans
l’hémisphère Sud ; un Plan Marshall de type
contractuel au profit des pays de cette zone ; la
création de grands ensembles monétaires à
l’image de la Zone Franc.
Il poursuit aussi son action dans le domaine
économique au sein de la société d’intelligence
stratégique EPEE (il en est Président du Comité
d’Ethique) et de la société Phitech, société de
conception et de fabrication d’équipements pour
mal voyants.
Il est également membre de Debout la France,
dont il est le délégué national au Partenariat avec
l’Afrique et la Méditerranée, mission liée à son
long travail dans la lutte contre la faim dans le
monde et l'élaboration du plan Guillaume.
Dans son dernier ouvrage « Un paysan au cœur du
pouvoir » publié en 2015 aux Editions De Borée,
Collection Témoignages, il décrit son singulier
parcours
de
jeune
agriculteur
appelé
successivement à de hautes responsabilités
syndicales et politiques qui en ont fait l’un des
grands acteurs de l’émancipation économique et
sociale agricole des Trente Glorieuses. Cet écrit
appelle en ces temps d'incertitude les nouvelles
générations à l’effort et à la foi en leur avenir et en
celui de la France. Nous nous en sommes
largement inspiré dans cet article et ne pouvons
que vous inciter à le lire. Vous découvrirez un
lorrain « droit dans ses sabots », pas toujours
impartial mais honnête, pas dupe des faits et
méfaits de la politique, volontaire, rigide comme il
l'a montré dans ses affrontements avec les
ministres socialistes de l'agriculture, viscéralement
de droite, n'acceptant guère la contestation et
surnommé par ses détracteurs, voire ses amis 'le
Kaiser »...
Round. La Commission de Bruxelles accepte un
plafonnement des exportations européennes sans
contreparties américaines. François Guillaume se
consacre à sa circonscription, encourage les
activités économiques, sociales et culturelles. On
lui suggère de créer un village du livre, concept
inventé et réalisé au Pays de Galle. Il sera établi
sur le canton de Baccarat déjà connu par les
cristalleries et l'archéo-site de Deneuvre, à
Fontenoy-la-Goutte. Il favorise aussi la création
du festival de musique baroque à Froville-laRomane, de l’IUT métrologie-contrôle qualité de
Lunéville, de l’élevage de chevaux de sport et de
concours à Rosières-aux-Salines, d’un équipement
sportif et d’accueil au lac de Pierre-Percée, du
Centre école de parachutisme à Azelot, d’un
circuit automobile à Chenevières, d’une maison
médicale à Cirey-sur-Vezouze...
La dissolution de l'assemblée écourte son mandat
en 1997. Elu en juin avec 9 voix d'avance sur
Michel Closse le maire socialiste de Lunéville,
cette élection est invalidée par le Conseil
constitutionnel et il faut retourner aux urnes en
décembre pour un scrutin serré. Il droitise son
discours et invite Charles Pasqua à un meeting sur
le thème de l'immigration. Il l'emporte nettement
avec 55 % des suffrages. Il est membre de la
Commission d'enquête sur la transparence et la
sécurité sanitaire de la filière alimentaire en
France, de la Commission d'enquête sur le recours
aux farines animales dans l'alimentation des
animaux
d'élevage,
la
lutte
contre
l'encéphalopathie spongiforme bovine et les
enseignements de la crise en termes de pratiques
agricoles et de santé publique, de la Commission
spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif
à la bioéthique, de la Délégation de l'Assemblée
nationale pour l'Union européenne.
Il est réélu en juin 2002 avec 53 % des voix face à
Laurence Demonet du Parti socialiste, conseillère
régionale et ne se représente pas en fin de mandat
en 2007.
Le repos du guerrier
Libéré de ses engagements politiques, il consacre
du temps à l'écriture en publiant en 2009 aux
Editions Eyrolles « Vaincre la faim, pour en finir
avec l’inacceptable ». Nourrir les hommes est le
plus grand défi auquel la Communauté
internationale est confrontée et qu'elle n'a pas
relevé au cours du demi-siècle écoulé. Pourtant en
utilisant le potentiel naturel des territoires et leur
ressource humaine, il est possible de doubler en
un quart de siècle la production agricole pour
satisfaire les besoins en nourriture des 10 milliards
d'habitants annoncés pour 2050, à condition de
prendre en compte la nature spécifique de
Jean Claude Brunelin
Sources :
- François Guillaume. Un paysan au cœur du
pouvoir. Editions de Borée. Témoignages. 2015
- Gilles Luneau. La forteresse agricole : une
histoire de la FNSEA. Gilles Fayard 2004
- Sites du Ministère de l'agriculture, Assemblée
nationale, Wikipédia, epee, persee, books.google,
debout-la-france...
13
trop riches ; il n'avait quasiment jamais recours au
vétérinaire, car le prix de l'intervention dépassait
généralement la valeur vénale de l'animal. Aussi
prodiguait-il lui-même les soins ordinaires, traitait
les moutons en appliquant sur les onglets meurtris
un onguent de sa fabrication composé de saindoux
et de sulfate de cuivre, après avoir taillé la corne
en excédent avec un solide couteau de poche qui
ne le quittait jamais. Il passait régulièrement son
troupeau dans le pédiluve communal pour éviter
que les blessures interdigitales ne s'enflamment,
ne s'infectent et ne contaminent tout le troupeau.
Sans hésiter, il sacrifiait toute brebis suspectée de
maladie contagieuse, l'enfouissait avec soin après
l'avoir chaulée.
Dans sa solitude, il avait désappris à parler. Il
réservait ses rares paroles à son troupeau pour le
calmer quand il cédait à la panique en pivotant sur
lui-même comme une toupie ; ou bien à ses chiens
en les interpellant en patois alsacien – il avait été
employé dans sa jeunesse en Alsace, car l'accent
guttural germanique convenait mieux, estimait-il,
à la race canine. Il ne s'intéressait à rien d'autre
qu'à la succession des jours et des saisons qui
conditionnent la vie de ses moutons. La nature
était son grand livre : il y observait des choses que
les autres ne voyaient pas. Elle serait son maître
jusqu'à la fin, jusqu'à ce que, pierre parmi les
pierres, il soit rappelé à « la vérité des mondes
immobiles ». La nuit, il lisait dans le champ des
étoiles. Sans s'en lasser, il aimait regarder « briller
sur le clocher jauni la lune comme un point sur un
i ». De toutes les constellations, il ne voulait en
reconnaître qu'une seule : celle du Bélier parce
qu'il pensait qu'elle
attirait le regard de
tous les bergers du
monde. A l'aube,
pensif, il aimait voir
s'éteindre les étoiles.
Le soleil revenu, il
prolongeait sa rêverie,
croyant
découvrir
dans
un
ciel
moutonneux,
l'immense troupeau,
qui l'attendait là-haut.
L'âge venu, il n'avait conservé qu'une trentaine de
brebis. Berger sans terre, il avait trouvé une pâture
pour ses bêtes entre les immeubles inachevés
d'une excroissance urbaine, là où la ville mange la
campagne. Cette cohabitation provisoire, cette
confusion des siècles avaient quelque chose
d'étrange qui poussait à la mélancolie. Pour autant,
elle n'entamait pas la sérénité du berger,
philosophe sans le savoir.
Le berger
Quand l'été touche à sa fin, par tous les temps, la
silhouette du berger se dresse dans la campagne
libérée de ses récoltes. Sa troupe de 500 moutons,
propriété d'un gros éleveur voisin, parcourt les
chaumes pour y glaner les épis restants et se
nourrit des mauvaises herbes qui avaient grandi à
l'abri du blé et que la moissonneuse avait
épargnées. La tradition lui donne ce droit de
pâture que les paysans ne lui contestaient pas, car
ils y trouvaient leur compte : l'avantage d'être
débarrassés de ces plantes adventices avant
qu'elles ne montent en graine pour se renouveler
l'année suivante au détriment des prochaines
semailles. Le berger ne séjourne qu'une semaine
sur notre territoire et je ne voulais rien perdre de
sa présence qui me révélait son art plusieurs fois
millénaire. Pour dormir près de ses brebis, il
dispose d'une roulotte mobile qu'un attelage avait
déposé au centre de son domaine provisoire ; ses
deux chiens couchaient sous son refuge pour
prévenir leur maître de l'attaque éventuelle d'un
prédateur ou de toute tentative de vol dans le
troupeau parqué tout près, les bêtes étant
étroitement enfermées pour la nuit dans un enclos
de barrières mobiles en bois. Le personnage me
fascinait. Je l'observais à distance, solitaire, les
mains fermement accrochées à son bâton symbole,
immobile dans sa longue pèlerine lui tombant à
mi-jambe dont le vert foncé avait souffert des
intempéries, sa pipe émergeant d'une barbe
grisonnante et généreuse, un chapeau de feutre
noir, aux bords affaissés, enfoncé fermement sur
sa tête pour résister aux
bourrasques et avec pour seul
ornement une plume de perdrix,
relief du festin d'un busard qui
planait dans le ciel.
Pensif, « le Charles – en
Lorraine on fait précéder le
prénom d'usage d'un article,
selon une pratique héritée de la
Germanie – surveillait sa troupe.
Et quand un agneau s'en écartait,
il piquait la cuillère de sa
houlette dans le sol meuble pour
en prélever une motte de terre qu'il envoyait en
direction du fautif. C'était le signal qu'attendait le
chien de surveillance d'un des flancs du troupeau
pour filer comme une flèche aux fins de ramener
l'impertinent dans le groupe. Et s'il se révélait
récalcitrant, il le pinçait au-dessus du jarret en
glissant ses crocs sous la peau de l'animal sans le
blesser, à titre d'avertissement. Le berger veillait à
tout. Il prévenait « l'enflure » en dosant le temps
de présence de ses moutons dans les pâturages
14
Les sélectionneurs en 2015
Répartition des adhérents
Sélectionneurs
Utilisateurs
2011
2012
2013
2014
2015
2011
2012
2013
2014
2015
Elevages
15
14
17
17
19
0
2
3
4
3
Brebis
5823
5233
5709
6223
6949
0
534
747
767
670
Le nombre d’adhérents progresse avec les adhésions de Jean-Claude Reynaud et du GAEC des Groseillous
comme sélectionneurs. Gilbert Allemand démissionne avant une cessation d’activité et la reprise de son
exploitation. André Faynel devient sélectionneur et Ludovic Giraudon candidate pour la prochaine
campagne. Les sélectionneurs à la section Noire du Velay de ROM Sélection résident tous en Haute-Loire et
dans la Loire pour un élevage utilisateur. L’effectif progresse (+8 %) dans la section, avec 7 619 femelles,
soit une moyenne de 346 par élevage.
Évolution du haras de béliers des sélectionneurs
Béliers de race pure
ARR/ARR
% ARR/ARR
74
94 %
2010
Nombre total
de béliers
111
Béliers
de croisement
35
Total
76
2011
114
33
81
80
97 %
2012
119
34
85
84
99 %
2013
128
43
85
85
99 %
2014
161
52
109
109
100 %
2015
173
53
120
120
100 %
Années
L'effectif de béliers présents dans les troupeaux augmente de 7 %, avec une moyenne d’un bélier pour 44
brebis. 69 % sont de race Noire du Velay dont 100 % proviennent de la station ou du centre d’élevage. 31 %
sont de races lourdes, en grand majorité des Charolais, répartis dans 10 élevages. 100% des béliers de race
pure sont résistants homozygotes à la tremblante.
15
Performances techniques des brebis
Sélectionneurs
5 meilleurs élevages
Prolificité brebis
171 %
184 %
Productivité brebis
218 %
253 %
Brebis agnelées 2 fois
27 %
37 %
Mâles simples brebis
12,0
13,0
Mâles doubles brebis
10,1
11,0
PAT 30 Valeur Laitière
Évolution des performances techniques
2011
2012
2013
2014
2015
15
14
12
17
19
Prolificité brebis
162,8
165,2
165,7
175,1
171,1
Productivité brebis
210,1
216,8
217,5
229,9
217,5
Brebis agnelées 2 fois
29%
31%
31%
32%
27%
Mâles simples brebis
12,1
12,6
11,9
12,4
12,0
Femelles simples brebis
11,4
11,8
11,1
11,5
11,3
Mâles doubles brebis
9,8
10,1
9,8
10,3
10,1
Femelles doubles brebis
9,3
9,6
9,2
9,7
9,6
Mâles simples agnelles
10,3
11,2
10,3
10,5
10,8
Femelles simples agnelles
10,0
10,7
9,9
10,1
10,4
Mâles doubles agnelles
8,1
8,7
7,9
8,1
8,2
Femelles doubles agnelles
7,6
8,4
7,5
7,8
7,9
Nombre de sélectionneurs
PAT 30 Valeur Laitière
Qualifications génétiques
Seuils de qualification
Les objectifs de la race sont axés principalement sur une amélioration de la valeur laitière des brebis. L’index
de synthèse permet ainsi de qualifier des brebis avec des index prolificité plus faibles, si l’index valeur
laitière est élevé. Les seuils de qualification prennent en compte le coefficient de détermination pour obtenir
une meilleure fiabilité de leurs valeurs. Les mères à béliers et les mères à agnelles sont destinées en priorité
au renouvellement de la base de sélection. Les mères de réserve produisent des agnelles pour la diffusion.
16
Renouvellement de la base de sélection
Évolution du fonctionnement du Centre d’Elevage
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
Nombre d'élevages fournisseurs
16
10
12
12
11
10
14
14
Nombre de béliers entrés
62
50
56
66
67
66
79
69
Origine maternelle Mère à Béliers %
45
84
45
61
66
55
76
59
Mères à Agnelles ou de Réserve %
17
16
55
39
34
36
24
41
Origine paternelle Bélier connu %
100
100
100
100
100
100
100
100
% ARR/ARR
100
100
100
100
100
100
100
100
Nombre de béliers diffusés
41
35
39
42
45
53
54
54
Béliers réformés %
32
30
30
35
33
20
32
22
Centre d’élevage
Le centre d’élevage fournit des béliers issus de brebis qualifiées majoritairement mères à béliers et assure
ainsi une sélection sur la valeur laitière et la prolificité par la diffusion des béliers sélectionnés. La sélection
génétique sur la résistance à la tremblante exige que tous les béliers soient génotypés résistants homozygotes
(ARR/ARR) pour intégrer le centre d’élevage. Les béliers entrés ont systématiquement une paternité connue.
Ceci est indispensable pour gérer la variabilité génétique au sein de la race. Le prix d’achat est fixé à partir
du poids à l’entrée au centre d’élevage valorisé au prix de 3,50 euros par Kg, auquel s’ajoute une plus-value
génétique de 32 euros pour les fils de MB et 25 euros pour ceux de MA. La moyenne de la bande était 39,5 kg
à 103 jours, avec une plus-value de 29 €, pour un montant de 167 € réglés aux sélectionneurs. 78 % des
béliers entrés au centre d’élevage ont été diffusés pour la reproduction, dont 65 % dans la base de sélection.
Les ventes de béliers sont équivalentes à celles de l’année précédente. Le prix de vente moyen de ces 54
béliers est de 454 euros. La pression de sélection exercée sur les critères phénotypiques et sanitaires se
traduit par 14 % de réformes, soit 10 béliers vendus à un tarif moyen de 128 euros. A ceux-là s’ajoutent 5
perte, soit 7% des béliers entrés. Le fichier des béliers utilisés permet d’organiser les ventes de reproducteurs
et d’orienter les choix des éleveurs en fonction des origines disponibles et compatibles avec leurs élevages.
Les ventes de béliers adultes présents chez les sélectionneurs concernent 19 reproducteurs en 2015, au prix
fixé à 270 €.
Évolution du renouvellement en femelles
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
Mères à Béliers %
46
38
33
38
46
28
35
28
Mères à Agnelles %
34
32
39
32
31
35
37
39
Mères Jeunes %
4
8
7
4
3
3
Mères de réserve %
16
22
21
26
19
34
Origines maternelles
Mères non qualifiées %
17
1
22
25
5
7
Répartition des agnelles conservées par les sélectionneurs
19 sélectionneurs ont conservé 1 354 agnelles de renouvellement, soit 71 par élevage. 3 sélectionneurs ont
acheté 71 agnelles, représentant une partie de leur renouvellement, tandis que FEDATEST assure son
renouvellement par l’achat de 97 agnelles auprès de 2 sélectionneurs. Le taux de renouvellement est donc de
20 %, avec plusieurs troupeaux en augmentation d’effectif. 63% des agnelles ont une paternité connue,
résultat en diminution par rapport aux 66 % de 2014. La connaissance de la paternité varie dans de fortes
proportions suivant les élevages : 0 à 100 %, pourtant elle facilite la gestion de la variabilité génétique. 28 %
des agnelles sont filles de mères à béliers, en baisse par rapport aux 35% de 2014, avec des variations selon
les élevages de 0 à 59 %, et 39 % sont filles de mères à agnelles (37 % en 2014). Les agnelles issues de
mères de réserve, mères jeunes ou de brebis non qualifiées en génétique représentent 33 % du
renouvellement. Les agnelles de renouvellement ont un PAT30 moyen de 102 (103 en 2014. Le mode de
naissance moyen est 1,84 (1,88 en 2014); soit 29 % nées simples, 58 % doubles et 12 % triples et plus. Les
index moyens des mères sont + 0,01 en prolificité et + 5,6 en valeur laitière.
Tournées d'inscription
Agnelles
2007
2008
2010
2011
2012
2013
2014
2015
Présentées
2 676 2 200 2 051 1 973
1953
1833
2334
2746
2751
Conservées dans
les élevages
1 369 1 233 1 096 1 098
991
832
1183
1389
1443
Diffusées pour la
reproduction
1 307
962
1001
1151
1357
1312
967
2009
955
875
La diffusion d’agnelles se maintient avec 1312 agnelles vendues par 9 sélectionneurs (1357 par 14
fournisseurs en 2014), dont 31 acquéreurs d’au moins 10 agnelles, soit une moyenne de 41 par achat. Cela
représente 1 agnelle vendue pour 5,3 brebis en sélection.
Le prix de vente des agnelles s’établit ainsi :
- Prix de base à 96 €, à l’âge moyen de 108 jours maximum, pour un poids estimé à 30 kg minimum. Audelà, des frais de vieillissement de 0.50 € par jour sont facturés.
- Plus-value génétique selon la qualification de la mère : mère à béliers : 32 € ; mère à agnelles : 25 € ; mère
de réserve : 15 €
- Frais de participation des utilisateurs à la base de sélection, de 2,10 € par agnelle en 2015.
Ces ventes étaient destinées, outre la Haute-Loire, à des éleveurs de l’Aveyron, du Cantal, la Loire, la
Lozère, le Puy-de-Dôme, la Haute-Saône, la Haute-Savoie et le Tarn-et-Garonne.
Un éleveur belge a choisi d’élever des Noires du Velay conduites en agriculture biologique. Il a acheté 107
agnelles génotypées résistantes homozygotes à la tremblante, auprès de 3 sélectionneurs.
Electronisation
L’utilisation d’un logiciel de gestion de troupeau concerne 20 élevages. L’identification électronique des
cheptels a incité 13 éleveurs à investir dans un outil de lecture des boucles électroniques.
Tremblante
Un programme national de sélection génétique sur la résistance à la tremblante a été mis en place à
l’automne 2001. A partir de 2002, les agnelles de renouvellement chez les sélectionneurs ont été génotypées.
Ces analyses ont permis de déduire des génotypes partiels ou complets de leurs mères. Ces actions ont pour
but de : éliminer l’allèle VRQ ; fournir aux éleveurs des béliers résistants : ARR/ARR ; saturer la base de
sélection en animaux résistants : homozygotes ARR/ARR et hétérozygotes ARR/ARQ. La gestion de la
tremblante au sein de la race nécessite la sélection des reproducteurs génotypés résistants. Ce programme va
18
permettre de diffuser des reproducteurs possédant une qualification sanitaire vis à vis de la tremblante. Les
agneaux au potentiel génétique suffisant pour intégrer le centre d’élevage à l’automne sont tous génotypés,
afin de retenir uniquement ceux possédant deux allèles de résistance à la tremblante. Les agnelles destinées
au renouvellement de la base de sélection ne sont plus génotypées pour la résistance à la tremblante, sauf
pour les nouveaux élevages. Les agnelles diffusées à l’exportation sont systématiquement génotypées, tant
que les troupeaux ne sont pas engagés dans la démarche de CSO tremblante.
Il faut génotyper 1,3 agneau pour rentrer un jeune mâle au centre d’élevage.
La certification tremblante des élevages progresse avec des haras de béliers de race pure résistants
homozygotes. Quelques béliers de croisement sont hétérozygotes, voire pas génotypés.
Pour cette campagne, 15 élevages étaient certifiés niveau 2 et 7 élevages niveau 3.
,LJƉĞƌWƌŽůŝĨŝĐŝƚĠ
L’action dans le cadre du PAMAL, concernant la recherche de gênes majeurs, a permis de mettre en évidence
un deuxième gêne d’hyper prolificité dû à la mutation BMP15, porté par le chromosome X et nommé 5’utr.
Ce dernier gêne a la particularité d’être transmis par les brebis de manière aléatoire à leurs filles et leurs fils,
et par les béliers de façon systématique à leurs filles mais jamais à leurs fils.
Le bilan actuel fourni par l’INRA concerne 3927 femelles ayant agnelé avec une prolificité moyenne de
162%.
Génotypage
Porteuses 5’utr
NN
Porteuses 5’utr
N+
Non porteuses
5’utr
Non génotypées
pour 5’utr
Porteuses 5’utr
NN et N+
Porteuses Lacaune LL
1
-%
0
-%
11
0,2 %
7
0,2 %
1
-%
Porteuses Lacaune L+
6
0,2%
25
0,6 %
183
4,7 %
84
2,1 %
31
7,9 %
12
0,3 %
201
5,1 %
822
21 %
213
5,4 %
4
0,1 %
4
0,1 %
25
0,6 %
32
0,8 %
Non porteuses
Lacaune
Non génotypées pour
L
Porteuses Lacaune LL
et L+
7
0,2 %
194
4,9 %
91
2,3 %
Génotypage
Porteuses 5’utr
NN
Porteuses 5’utr
N+
Non porteuses
5’utr
Porteuses Lacaune LL
220 %
Porteuses Lacaune L+
281 %
217 %
193 %
Non porteuses L ou non génotypées
258 %
186 %
157 %
211 %
Le nombre de béliers adultes issus du centre d’élevage et génotypés correspond à 147 reproducteurs qui ne
sont pas tous présents dans la base de sélection. Parmi ceux-ci, 2 sont porteurs homozygotes (1,4 %) et 25
porteurs hétérozygotes (17 %).
Les jeunes reproducteurs assurant le renouvellement de la base de sélection ont été génotypés pour identifier
ceux porteurs d’un gêne d’hyper prolificité.
Les agnelles de la campagne ont 1 238 résultats connus pour le gêne Lacaune.
17 sont porteuses homozygotes, soit 1,4 %, et 248 sont porteuses hétérozygotes, soit 20 %.
Cette action a aussi été conduite pour les agneaux rentrés au centre d’élevage pour la campagne en cours. Ils
ont tous été génotypés pour les 2 gênes d’hyper prolificité connus.
Le gêne Lacaune a été repéré 18 fois (24 %) et la mutation BMP15 est apparue 11 fois (14 %). Tous les
porteurs sont hétérozygotes. Deux béliers ont la particularité de posséder les 2 gênes.
Assignation de filiation
Le programme PAMAL a permis de réaliser des assignations de parenté pour les agnelles de renouvellement
19
de la base de sélection et les agneaux rentrés au centre d’élevage. Ces analyses ont permis de réaliser des
contrôles de filiation lorsque le père est déclaré et à priori connu. Le père proposé est validé lorsqu’il est
confirmé sur les marqueurs. S’il n’a pas été génotypé, il n’est alors pas vérifiable. L’assignation permet
d’affecter un père lorsqu’il n’est pas connu. Il est assigné quand il est déterminé sur les marqueurs et non
assigné si aucun père n’est affectable grâce aux marqueurs. L’assignation est associée au contrôle de filiation
lorsque le père déclaré est incompatible. Si le père proposé est incompatible et qu’aucun des autres béliers
génotypé ne convient, la parenté est non assignée. Par contre, si un autre des béliers est déterminé sur
marqueurs comme étant le père, la parenté est donc assignée sous le terme de faux assigné.
Les résultats obtenus sur la campagne laissent présager d’un taux d’erreur de paternité de près de 15 %.
Actions de promotion
La randonnée de bergerie en bergerie s'est déroulée en mai du GAEC du Rond Rouge au GAEC des Cabarets.
Le GAEC Jarlier a présenté des agnelles à Tech’Ovin en Septembre à Bellac. Pascal Crespy a présenté brebis
et agnelles au Sommet de l’Elevage à Cournon en Octobre.
L’Association des Producteurs d’Agneaux Noirs du Velay, a pour objectif de soutenir la vente directe des
agneaux produits par ses 25 adhérents, soit près de 3000 agneaux par an. Elle assure la promotion de la
marque Agneau Noir du Velay, par l’organisation de manifestations. Son ambition est de s’appuyer sur
l'ancrage territorial de la race dont le berceau se situe sur le Velay.
Bilan des troupeaux
Elevages
Femelles
Effectif Femelles
agnelées Agnelages Agneaux
moyen agnelées
nés
2 fois
Prolificité
%
Taux de
agnelées 2
mise-bas
fois
Productivité
effectif
moyen
GL
37
41
9
50
90
180%
22%
135%
243%
CF
PG
FA
JG
362
447
191
441
332
407
133
442
81
103
31
142
413
510
164
584
567
867
259
1045
137%
170%
158%
179%
24%
25%
23%
32%
114%
114%
86%
132%
157%
194%
136%
237%
CJM
GRR
GC
GG
LP
FED
270
318
672
53
270
237
242
331
674
49
258
269
71
118
201
0
0
12
313
449
875
49
258
281
522
833
1460
86
457
490
168%
186%
167%
176%
177%
174%
29%
36%
30%
5%
0%
5%
116%
141%
130%
93%
96%
119%
194%
262%
217%
162%
169%
207%
CP
GN
MJ
CHP
329
298
206
194
335
307
206
183
91
71
47
72
426
378
253
255
793
622
436
428
186%
165%
172%
168%
27%
23%
23%
39%
130%
127%
124%
131%
241%
209%
214%
221%
CHF
GPA
178
496
179
513
48
131
227
644
378
1073
167%
167%
27%
26%
116%
130%
193%
216%
RA
RJC
GM
294
94
227
258
121
243
43
0
59
301
121
302
491
187
474
163%
155%
157%
17%
0%
24%
102%
79%
133%
167%
199%
209%
PS
406
330
27
357
517
145%
8%
88%
127%
5983
5812
1348
7160
11985
167%
23%
120%
196%
20
Lou Pastre de la Neigre : 11ème édition
Et me voilà au pont de l'Enceinte, rien à voir
d'ailleurs avec une parturiente. Dans ce peu
d'espace autour d'un méandre du Lignon, des
ingénieurs ingénieux ont réussi à associer deux
ponts routiers (1866) et un pont ferroviaire
métallique (1902). Jean Chervalier apporte des
éléments dans son ouvrage Ponts de Haute-Loire :
"A cet endroit, le Lignon enserre, dans la boucle à
peu près complète qu’il forme entre les Issards et
la Baraque, une colline escarpée sur laquelle est
situé un minuscule hameau (...) En 1600, des
copistes qui ont manifestement commis une
confusion ont orthographié ce lieu-dit La Saincta
que les révolutionnaires se sont empressés de
remplacer par le vocable l’Enceinte". Autrefois,
une cascade coulait en dessous de ces deux ponts.
Aujourd’hui refermée, on l’appelle le trou du Lou
Bragaïre (1850), surnom d'un paysan qui, las de se
faire inonder par la rivière, avait décidé de creuser
la roche pour que l’eau puisse s’échapper. La
charmante petite chapelle a été édifiée en 1854,
par Joseph Maurin, prêtre réfractaire
rescapé de la Révolution et
bienfaiteur d’Yssingeaux et de son
hôpital.
On aperçoit le village de Grazac. Là
aussi je faisais de l'appui technique
chez un éleveur de cette commune,
Jean Ronze de Vendetz, que j'aurai le
plaisir de rencontrer à la fête. Il est
bientôt en retraite et son fils,
actuellement double actif, reprendra
l'exploitation. René Bore (Grazac en
1695. Cahiers de la Haute-Loire.
Année 1988) mentionne ce village
présent dans le Terrier Brevet de
Chabrespine pour 1695, mandement
du seigneur de la Tour Maubourg, et
consacre une étude (Cahiers de la
Haute-Loire. Année 1994) au Prieuré de Grazac
aux XVII et XVIIIème siècles, relevant dès le
XIème siècle de l'abbaye de Cluny.
Un peu plus loin, on ne peut manquer d'
apercevoir le clocher de l'église de Lapte, le plus
haut de la Haute-Loire et offrant un magnifique
panorama. Un peu perdu, il me faut trouver une
route de traverse, étroite et charmante, dans une
symphonie de nuances vertes, du vert foncé des
résineux au vert tendre des feuillus et celui plus
soutenu des prairies. Ce fond vert est éclairé de
jaune sauvage : pissenlits, boutons d'or, genêts,
jonquilles par endroit, et jaune cultivé : colza.
Le temps est variable ce dimanche 8 mai et en
route pour Paulhac de Tence pour cette 11ème
édition. Il y a du vent qui devrait dégager le ciel et
assurer du beau temps, du moins pas de pluie.
Un peu de géographie et d'histoire
De Fay-la-Triouleyre on distingue au loin les
éoliennes qui brassent l'air pur du majestueux
Mézenc en toile de fond. En parlant de Mézenc,
savez-vous qu'à la suite de contestations anciennes
à propos d'herbages, entre les communes des
Estables et de Borée, et d'une grossière erreur
matérielle commise en 1846, le sommet du
Mézenc et la Croix de Boutières sont portés à tort
entièrement en Ardèche sur la commune de
Borée ? Michel Lacroix, géomètre-expert en
retraite, en a fait son cheval de bataille, constitué
un mémoire très argumenté, transmis le tout aux
élus du département qui font la sourde oreille
prétextant une histoire ancienne.
Direction Yssingeaux et une
pensée pour Jacques Barrot qui
a bien oeuvré pour sa
circonscription en l'ouvrant sur
Rhône-Alpes,
décision
prémonitoire et annonciatrice
de notre nouvelle grande
région. Il est temps de
bifurquer sur la direction de
Tence, petit cafouillage dans le
fouillis de petites routes.
Je passe à proximité de
Versilhac où jadis je suivais le
troupeau de Noire du Velay de
Jacques Fayet, petit homme
malicieux, la tête toujours
coiffée d'un vaste béret fort
utile en toutes circonstances.
Un jour que nous identifions des agnelles dans la
bergerie, une fumée sortant du moteur de la
voiture engagée dans le hangar à fourrage, attira
notre attention. Jacques se précipite vers le
véhicule, ouvre le capot, tape avec son béret sur le
câble d'alimentation de la batterie qui avait pris
feu. Il remet son béret, déconnecte la batterie, et
nous retournons continuer notre travail. D'où
l'utilité du béret contre les incendies en zone
rurale ! Doyen du village, l'Association des amis
de Versilhac vient de fêter ses 90 ans, entouré
d'amis, d'élus, de sa femme Lucienne et de leur
nombreuse famille (7 enfants, 11 petits-enfants et
7 arrières petits-enfants). Il faisait partie d'un
CETA, Centre d'études techniques agricoles, celui
d'Yssingeaux,
groupement
d'agriculteurs
progressistes finançant eux-mêmes un technicien
agricole. Un de ses fils a repris l'exploitation.
21
en l'honneur de la sainte Vierge; mon plan est tout
dressé. » Le père Brueyre ouvre, quant à lui, en
1843 la mission du Kiang-nan avec Hangtchéou
pour base, revenant de temps à autres à Zikawei.
Le séminaire démarre le 1er février 1843 avec 23
étudiants et déménage à Song kia-tu en 1853.
Toutes les missions sont confiées aux jésuites
français dans la région à partir de 1845, alors
qu'elle est le théâtre de rébellions de 1853 à 1864.
Il est élu supérieur du Tché-li oriental de 1859 à
1866 et meurt dans le Sienhsien en 1880. Son
apostolat s'exerce dans des temps difficiles
(massacre de 1870 à Tientsin) et il est au début en
but à l'incompréhension du vicaire apostolique de
Nankin, Mgr Louis de Bési, qui quittera la Chine
en 1847. Il a traduit en chinois de nombreux
ouvrages de piété, en particulier sur le Sacré-cœur,
écrit des grammaires et des dictionnaires et il est
surtout connu pour sa traduction de la Bible en
1862.
Revenons à nos moutons, je suis sur la bonne voie
et voici d'ailleurs un superbe panneau annonçant
la vente directe de viande, réalisé par Max
Grangeon, l'éleveur qui nous accueille
aujourd'hui, et son voisin Nicolas Russier, éleveur
de vaches Salers.
La bergerie de Paulhac
Une superbe bergerie en bois émerge d'un
terrassement récent au milieu d'une parcelle
boisée. Pas de problèmes pour se garer, l'espace
est conséquent. Il faut par contre se munir d'un
coupe-vent car les bourrasques de vent du nord
sont violentes et froides.
Les randonneurs sont déjà
nombreux et se pressent
dans la grange aménager en
réfectoire pour se protéger
du vent, s'inscrire pour le
repas auprès de Didier
Cathalan, prendre un café
offert et visiter la bergerie.
Tasse de café brûlant à la
main, je fais de même. Je
lis aussi deux panneaux
fort bien faits, présentant
l'exploitation et son historique. En voici la teneur.
La ferme est située à 1000 m d'altitude entre
Lignon et Lizieux. Elle comporte 50 ha de SAU :
2,7 ha de céréales, 17 ha de prairies temporaires,
30 ha de prairies naturelles dont 10 ha de
parcours. Le parcellaire est morcelé mais proche
du bâtiment. Le fourrage est récolté en foin et
enrubannage. Une amélioration projetée serait
d'aménager des points d'abreuvement dans les
pâturages.
Max Grangeon s'est installé en 2013 en reprenant
le troupeau de ses parents qui tiennent la Ferme-
Je commence à trouver des panneaux indiquant la
fête, un peu tourneboulés par un vent assez
violent. Tence n'est plus loin, bourg entouré jadis
de fortifications pour résister aux attaques des
pilleurs et des brigands. Elles serviront aussi
pendant les guerres de religion et il n'en reste plus
que quelques murs et des douves. En parlant de
religion, il faut que j'évoque Benjamin Brueyre,
né en 1810 à Tence et mort en 1880 dans le
Sienhsien en Chine. Il fait ses études au petit
séminaire et au grand séminaire du Puy-en-Velay.
Il entre dans la compagnie de Jésus en septembre
1831, fait son noviciat à Chieri, puis en Suisse,
étudie la philosophie à Mélan, Fribourg, tout en
étant professeur scolastique, puis à Vals-près-lePuy. C'est alors qu'il est choisi en 1841 pour partir
en mission pour la Chine avec deux confrères, les
pères François Estève et Claude Gotteland. C'est
la première mission jésuite depuis leur expulsion
au XVIIIe siècle. Il y avait en 1840, 200 000
chrétiens marginalisés et persécutés, sur tout le
territoire, dont s'occupaient prêtres chinois et
missionnaires européens nouvellement arrivés.
Les trois jésuites débarquent à Wusong près de
Shanghai, en juillet 1842. Le père Gotteland qui
dirige la mission avait reçu pour instruction de
reprendre la tradition jésuite de travaux
scientifiques, tandis que les deux autres prêtres
devaient se consacrer à l'apostolat. Le Père
Brueyre est soutenu par une forte spiritualité
mariale et s'efforce dès le départ de pourvoir aussi
aux moyens matériels de la population. Les
jésuites s'installent en 1847
dans
le
village
de
Zikawei au
sud
de
Shanghai, et reçoivent un
grand
terrain
(agrandi
ensuite par des terres
achetées par la compagnie
de Jésus de France) offert
par les descendants de Xu
Guangqi
qui,
restés
catholiques,
avaient
maintenu l'entretien d'une
petite chapelle, près de sa
tombe. Les pères construisent une église et
ouvrent un collège, le collège Saint-Ignace, pour
les fils de familles de lettrés. Ils sont rejoint deux
ans après par 5 autres jésuites de Vals dont Joseph
Gonnet (1815-1895), ami du père Brueyre. Le
père Gonnet dans une de ses premières lettres, ne
se trouve pas trop dépaysé : « Cette petite
promenade me rappelle délicieusement nos
montagnes du Velay et du Vivarais; je me
propose bien de la renouveler, lorsque l'occasion
s'en présentera. Si la liberté des cultes était
entière, on pourrait bâtir là une très belle chapelle
22
Le deuxième panneau situe l'exploitation dans son
environnement.
La bergerie de Paulhac est économiquement
viable. Elle valorise bien ses produits dans des
circuits locaux : bouchers, ferme auberge,
SuperU ; vente directe ; valorisation de la laine
dans la filière cosmétique. Le recours à une CUMA
réduit largement l'investissement en matériel.
Pourtant le nécessaire investissement bâtiment est
lourd à amortir. L'autre point faible est une forte
pression foncière.
La bergerie de Paulhac est responsable et vivable.
Max Grangeon est administrateur de sa CUMA et à
l'Association des producteurs d'agneaux Noir du
Velay. Le contact avec les clients est une
ouverture sur l'extérieur et il pratique aussi
l'entraide familiale. Il est cependant nécessaire de
pratiquer un faible prélèvement de salaire les
premières années pour favoriser la bonne mise en
place de la structure.
La bergerie de Paulhac est écologiquement
responsable : vente sur un rayon de 50 km
maximum, choix du bois pour la construction,
race locale adaptée au territoire, compostage du
fumier, culture de méteil (mélanges de céréales et
protéagineux).
Elle
manque
cependant
d'autonomie fourragère en foin et céréale. Elle
consomme aussi du plastique pour l'enrubannage,
technique indispensable pour un fourrage de
qualité.
Les producteurs fermiers
Le vent assez soutenu en a fait replier deux dans
le stockage de fourrages. La Ferme-Auberge « La
Cabriole » de Paulhachon de Tence, présente de
délicieux fromages de chèvres et Max Grangeon
de la viande d'agneau sous vide. Laura Bouilhol
d'Yssingeaux commercialise ses confitures maison
« Les surprises d'Elise » et prépare à la demande
Auberge « La Cabriole » à Paulhachon de Tence,
dans une ancienne ferme rénovée. Catherine et
Bernard Grangeon pratiquent une cuisine de
terroir avec les produits de la ferme : fromage de
chèvre en salade, charcuterie maison, râpées,
volailles, lapins, agneau brayaude (Noir du Velay),
fromages blancs, beurre, sarrasson, et desserts
maison : crème brûlée, tartes...
La bergerie a été construite en 2014, vaste
rectangle de 1400 m2 occupé pour deux tiers par
le logement des animaux. Deux tapis
automatiques assurent l'affouragement. Deux
couloirs latéraux surélevés permettent une bonne
surveillance des animaux. La grange attenante
permet le stockage du fourrage.
Le troupeau est constitué de 300 brebis Noire du
Velay en sélection, 80 agnelles de renouvellement
et 7 béliers. Les résultats techniques sont bons
avec une productivité de 1,62 agneaux produits
par brebis et par an. Une partie des agnelles sont
vendues à la reproduction et les agneaux
commercialisés en partie en vente directe.
Notre jeune éleveur entame une démarche de
diversification en production de fruits rouges à
savoir 0,3 ha de cassis qu'il pense convertir en bio.
Il produit du sirop et vend les fruits en l'état. La
production de fruits rouges dans les Monts du
Velay, avec d'abord la fraise, a démarré en 1960
sur la commune de Saint-Jeures, tout près de
Tence. L'altitude permet une très bonne qualité de
fruit et un créneau de commercialisation
favorable. En 1987, les quotas laitiers obligent les
éleveurs à chercher des revenus d’appoint. La
même année voit le jour le Syndicat des
producteurs de fruits rouges des Monts du Velay
avec treize adhérents, ils seront cinquante en
1991. Les marques “Perles Rouges des Monts du
Velay” pour la fraise et la framboise et “Perles
Noires des Monts du Velay” pour la myrtille
cultivée sont déposées. En 1997, augmentation
des surfaces et des quantités nécessitent la
création d’une structure commerciale, le GIE des
producteurs de fruits rouges des Monts du Velay.
Installé dans un nouveau bâtiment à Saint-Jeures,
le GIE commercialise aujourd’hui 540 tonnes de
petits fruits rouges produits par 50 exploitants
majoritairement de la Haute-Loire, avec à sa tête
Denis
Chirouze,
responsable
technicocommercial. La gamme est composée de fraises
de saison (Elsanta et Sonata, 200 T) et de Mara
des Bois (35 T), de framboises (202 T), de
groseilles (maquereaux, rouges et blanches, 93 T),
de mûres (20 T) et de myrtilles (4 T). Mais le
produit phare du GIE, c’est la framboise ( produite
sous abris, variéés Meecker à 80 % et Tulameen )
en terme de chiffre d'affaires et d'image de
marque.
des petits gourmands de savoureuses crêpes. A
l'extérieur, la remorque présentoir de Pierre-Louis
Sarda de Freycenet de Saint-Jeures, ancien
éleveur de brebis, décline ses fabrications de
charcuterie : jambon, jambonneau, jambonnette
boudin, lard, pâté de tête, godiveaux, filet mignon,
grillaton... Il pratique un élevage de plein air, avec
des porcs lourds indispensables pour améliorer
tenue et qualité gustative de la viande.
L'alimentation est garantie sans OGM. Il utilise un
savoir-faire familial dans la tradition de la Haute23
sombre des sapins. Les brebis font quelques
escapades ramenées par les chiens.
Par un chemin défoncé, nous traversons une coupe
de bois, stères empilées et troncs couchés
attendant leur transport à la scierie Moulin
installée à Dunières. En 1916, la scierie
d’Alexandre Moulin est implantée à quelques
kilomètres du site actuel, à Pont de Chirat sur la
commune de Dunières. En 1967, Maurice et René
Moulin prennent la direction de la société suite au
décès de leur père, et la modernise constamment.
Maurice Moulin, en 2002, rachète les parts de son
frère et d’autres actionnaires afin de devenir
actionnaire unique. L'entreprise transforme
actuellement plus de 250 000 m³ de bois chaque
année. Elle assure principalement une activité
de sciage (bois de charpente, d’ossature, de
couverture, de structure et de coffrage), grâce à
des infrastructures modernes et performantes. Son
matériel lui permet de compléter son offre avec
des
prestations
complémentaires,
comme
le séchage et le rabotage. La
scierie
s’approvisionne
principalement
sur
les
massifs
forestiers
d’Auvergne
(Livradois,
Meygal,
Mézenc,
Margeride) et de RhôneAlpes (Pilat, Roannais,
Haut
Forez,
Beaujolais,Vercors)
à
dominante de résineux. La
scierie adhère à une gestion
durable des forêts, le
développement
durable
désignant
un
développement qui répond
aux besoins de la génération
actuelle sans mettre en
danger l’approvisionnement
des générations à venir.
Les résineux laissent place
aux feuillus, aux hêtres qui laissent passer lumière
et soleil. Les brebis s'étirent en des chemins
bordés de murs moussus. Leurs étoiles blanches et
les couleurs multicolores de leurs boucles
d'oreilles se détachent sur fond de toison noire.
Une petite halte près du Lignon permet de
rassembler les suivants, avant de remonter au
village de Salettes puis en direction de
Mazelgirard. Le profil du terrain devient plus
abrupt et les brebis s'inquiètent d'un troupeau de
chevaux dans un belle prairie protégée seulement
par un fil. Elles rejoignent les chevaux indignés
qui, crinières au vent, galopent, s'éloignent,
reviennent sur les brebis pour les intimider. Un
vrai western, magnifique spectacle et malgré les
Loire. Il transforme sur l'exploitation et
commercialise en circuit court, à domicile et à
« La Ferme des Paysans » à Monistrol-sur-Loire.
En 2001, quelques agriculteurs s'unissent pour
créer la SARL le Panier Paysan et mettre en place
un magasin de vente situé dans Monistrol-surLoire, pour commercialiser eux-même leurs
productions. Actuellement, ils sont
30
producteurs fermiers (9 associés, 21 dépôts
vendeurs) à proposer leur gamme de produits en
tenant le magasin à tour de rôle. 10 ans plus tard,
devant la demande accrue de la clientèle, le
magasin doit évoluer et s'agrandir mais reste sur la
zone du Pêcher à Monistrol. Jean-Régis Charreyre
du Pêcher de Tence fait lui aussi partie de cette
organisation et présente sa production de
fromages de brebis, à l'extérieur dans sa remorque
présentoir : rondelet, tomme, yaourt, grand rond,
moelleux, pérail... J'ai eu la chance de côtoyer son
père, Jean Charreyre, éleveur de brebis viande et
administrateur de la Fédération départementale
ovine, un homme charmant mais
ne s'en laissant pas compter.
Ayant eu d'autres expériences
humaines et professionnelles, il
défendait une autre vision du
syndicalisme agricole et prônait,
bien seul à vrai dire, un salaire
minimum professionnel agricole
assurant un revenu décent pour
qui travaillait sur sa ferme. Son
fils s'installant à sa suite, la
petite exploitation n'était pas
suffisante pour assurer un
revenu. Il devait donc s'orienter
vers un élevage de brebis
laitières de race Lacaune et une
transformation directe.
La randonnée
Il est temps de sortir un lot de
brebis de la bergerie. Elles sont
effrayées par la lumière du
dehors, le vent et surtout la foule des randonneurs
qu'il faut écarter pour leur laisser le passage. Elles
marchent vite, surprises de cette sortie
inhabituelle, talonnées par les marcheurs.
L'éleveur peinent à contenir leur énergie même si
quelques-unes arrachent au passage des touffes
d'herbe tendre. Nous passons par prés et petits
bois de hêtres. Il y a sans doute près de 200
randonneurs qui s'étirent avec le rythme rapide du
troupeau. Nous passons à proximité des Balayes,
et effectivement les genêts d'or illuminent le sous
bois. Nous descendons en direction de Salettes, au
bord du Lignon, et croisons de superbes maisons
aux murs de moellons de granit doré. Pousses
tendres et merisiers en fleurs atténuent le vert
24
cimetières protestants. Le décret du 23 prairial an
XII (12 juin 1804) précise : « Dans les communes
où l’on professe plusieurs cultes, chaque culte doit
avoir un lieu d’inhumation particulier ; et dans le
cas où il n’y aurait qu’un seul cimetière, on le
partagera par des murs, haies ou fossés, en autant
de parties qu’il y aura de cultes différents avec
une entrée particulière pour chacune et en
proportionnant ces espaces au nombre d’habitants
de chaque culte ». Cette histoire mouvementée
explique les trois catégories de cimetières
protestants que l’on trouve aujourd’hui en
France : les grands cimetières protestants dans les
régions à forte dominante protestante, les
cimetières familiaux dans les régions où les
protestants n’étaient pas admis dans les cimetières
catholiques, les carrés protestants dans l’enceinte
des cimetières communaux.
Nous arrivons à Béraudon, dans de grands prés
émaillés de fleurs de pissenlits, près de la route, et
passé le hameau, les brebis sont parquées dans un
enclos, sans doute heureuses de ce répit à l'ombre
d'un bosquet de pins sur une petite éminence de
terrain. La marche reprend, sans les brebis, en
direction d'abord de Paulhachon puis de Paulhac
au terme d'une superbe randonnée printanière à
l'abri du vent toujours soutenu.
Le repas
Je coupe vers l'arrière de la bergerie où brûlent les
feux pour les grillades et retrouvent des têtes
connues, jeunes et moins jeunes : Sébastien
Dumas, David Galland, Jean Ronze le presque
retraité, Gilles Boussit, Jean-Louis Chapelle
voisin de Pierre Liotard, Aurélien Teyssier qui a
subi des dégâts de loups... Les autres s'activent
dans le stockage transformé pour l'occasion en
vaste salle à manger, qui à la buvette, qui à la
préparation des casse-croûtes : André Faynel,
Olivier Bernard, Max Grangeon, Georges
Philibert, Jérémy Masson... et bien sûr Didier
Cathalan à la synchronisation ! La chaîne de
distribution démarre avec en bout de piste Pascal
Crespy dans le rôle du distributeur de boissons.
Ce sont les épouses des éleveurs qui officient à la
distribution des copieux repas : un sandwich de
bon pain avec terrine d'agneau et saucisses
grillées, un autre avec deux variétés de fromage
de pays, tarte aux pommes et café... et eau à
volonté. L'ambiance est joyeuse et les
conversations bourdonnent. Quelques jeunes
gourmands vont déguster une crêpe à la confiture
maison. Repas fini, je m'attable un instant avec
deux fidèles anciens : Jean Galland un peu moins
alerte mais toujours blagueur, Marcel Crespy
toujours joyeux... et leurs compagnes. On parle du
bon vieux temps ! Je fais aussi une rapide visite à
la famille Dumas.
efforts des bergers, il est bien difficile de les
ramener dans le droit chemin. Un petit bac offre
un bain rapide au chien border d'une sympathique
randonneuse. Nous rejoignons une petite route et
il faut garer le troupeau pour laisser passer un
véhicule. Le chemin descend dans une combe et
remonte par un étroit sentier bordé de murs en
pierres sèches et de noisetiers. Le troupeau s'étire
ainsi que les promeneurs. Puis nous parcourons un
large chemin forestier, bordé de hêtres
majestueux. Nous passons au lieu-dit Freydier, le
pays froid.
Les brebis s'agglomèrent à nouveau, pelote
compacte de laine noire, et débouchent sur une
clairière avec de curieux enclos, en fait de petits
cimetières familiaux protestants. Nous sommes en
effet dans un secteur dénommé la « Montagne »,
décrite par Christian Maillebouis, périmètre
comprenant les communes du Chambon-surLignon, du Mazet Saint-Voy et parties de Tence,
Saint-Jeures, Les Vastres, Fay-sur-Lignon, aux
frontières de l'Ardèche et de la Haute-Loire. Sur
ce plateau, à mille mètres d'altitude, la Réforme
s'est implantée il y a plus de quatre siècles. A
proximité des fermes, s'observent encore
aujourd'hui de petits cimetières familiaux
réformés, parfois à l'abandon. Le problème de
l’inhumation des protestants s’est posé dès que la
Réforme a été considérée comme une hérésie par
l’Eglise catholique : les cimetières paroissiaux
étant des « lieux saints », l’inhumation d’un
protestant devient impossible. Les protestants
durent alors s’organiser autrement et créer des
cimetières spécifiques, sans lien avec un lieu de
culte. La révocation de l’Édit de Nantes en 1685
interdit le culte protestant et les protestants sont
exclus de leurs cimetières. Pendant les longues
années du « Désert », les protestants qui refusent
de se convertir vont ensevelir leurs morts
clandestinement, « dans les terres », dans un
champ appartenant à la famille du décédé. Ainsi
est née la tradition des cimetières de famille :
quelques tombes dans un jardin, un pré, un espace
non cultivé, enclos ou non par des murs. Une
certaine tolérance s’installe à partir de 1760, et les
communautés réformées peuvent réaffirmer leur
foi publiquement et créer de nouveaux cimetières.
Mais il faut attendre l’Édit de tolérance de 1787
pour que l’existence civile des protestants soit
reconnue. Il prescrit que les villes et villages
devront avoir « un terrain convenable et décent »
pour l’inhumation de ceux auxquels la sépulture
ecclésiastique est refusée. Les troubles de la
Révolution passés, Bonaparte rétablit la liberté
religieuse et l’égalité des cultes dans le cadre du
Concordat et des articles organiques de 1802. La
nouvelle législation organise l’existence des
25
différentes font connaître notre brebis locale. Je
prends moi aussi congé et revient sur Le Puy par
un autre itinéraire que je connais mieux.
Cette région du Haut-Lignon présente une surface
cristalline recouverte sur sa partie par des
formations volcaniques comme le pic du Lizieux,
suc phonolithique
vieux de 12,7 millions
d’années, caractérisé par ses coulées de lave
visqueuse et son dôme de lave. Il représente le
point de sortie d'une lave visqueuse qui s'est étalée
de part et d'autre pour donner le plateau situé à sa
base. Le sommet cerné par les éboulis de la
dernière période glaciaire, offre un superbe
panorama sur l'ensemble des sucs du Mézenc et
du Meygal.
Voici le Mazet-Saint-Voy, région marquée par le
fait religieux, haut lieu du protestantisme local.
Paroisse et église dédié à Saint Voy (Sancti Evodi)
remontent à 1021. Au XVIème siècle, sous
l'impulsion de leur curé, les paroissiens de SaintVoy adoptent les idées réformées. Puis, c'est la
période fratricide des guerres de religions. En
1598, l'Edit de Nantes permet aux protestants de
Saint-Voy de construire un temple qui est détruit
en 1679. A la veille de la Révolution (1787), un
Edit de Tolérance reconnaît aux protestants une
citoyenneté à part entière. Le temple actuel du
Mazet a été construit en 1822.
Je reprends ensuite la D15 par Foumourette, Les
Balayes, Boussoulet et me reviennent des
souvenirs d'hiver neigeux et
verglacés ! Le paysage est rieur
au printemps, les champs
piquetés
de
bouquets de
jonquilles, mais les hivers sont
souvent rigoureux quand souffle
la burle. Je descends sur SaintJulien-Chapteuil puis Orzilhac
(renommé jadis pour sa faïence)
et Brives-Charensac chamboulé
par les travaux colossaux de la
déviation du Puy-en-Velay.
Voici donc la fin de cette 11ème
édition trez réussie, sur la belle exploitation de ce
jeune éleveur prometteur, dans un secteur
inhabituel, avec un public nouveau de l'est du
département.
Juste
une
petite
critique
constructive. Certains participants étaient déçus de
partir si vite, et je partage ce point de vue. Il
manquait quelques animations dans l'après midi
où une autre petite randonnée thématique.
Alors rendez-vous l'an prochain pour une autre
célébration de la Noire du Velay !
Les animations
Les repas touchent à leur fin et des animations se
préparent. Il faut sortir du chaud abri de la grange
et suivre un lot de brebis dans le pré au delà de la
route. Olivier Bernard s'apprête à faire une
démonstration de chien de berger avec son jeune
Border Toros, couché dans l'herbe, langue
pendante et prêt à en découdre avec un petit lot de
brebis, pendant que son maître expose les
principes à appliquer pour un bon dressage. Au
début, il est conseillé de disposer les brebis dans
une clôture en cercle, pour observer le
comportement du jeune chien : indifférence,
agressivité, recherche de contrôle. Olivier évoque
ensuite les principaux postes de dressage : port de
la laisse et contrainte, importance du nom avant
chaque ordre,
rappel, marche au pied, les
positions : assis-couché, couché à distance, stop,
directions... Il termine par une démonstration avec
son chien puis avec un autre non entraîné d'un
promeneur. Il conclut en indiquant que le dressage
d'un chien... et de son maître, est un travail qui ne
s'improvise et conseille aux candidats de suivre
une formation dispensée par l 'Association
départementale des chiens de troupeau.
Le groupe se replie vers la bergerie où Aurélien
Teyssier prépare une démonstration de tonte sur
des agnelles, assisté par son jeune fils. Il faut
installer méticuleusement le chantier : carré de
contreplaqué pour placer la brebis, potence de la
tondeuse
électrique,
plastique pour déposer la
toison et ainsi ne pas la
souiller de paille de litière,
sac pour entreposer la
laine...
Un
opérateur
attrape
une
brebis
qu'Aurélien assoit tout en
souplesse entre ses jambes
et commence à tondre par
le ventre puis en larges
arcs concentriques sur les
flancs, pour finir par le
dos. L'agnelle repart, un peu égarée, allégée de sa
laine roulée et empilée dans un sac. Le tondeur a
la possibilité de se suspendre avec une sangle
abdominale pour soulager les reins lors d'un
chantier de tonte important. On est loin de la tonte
d'antan aux forces ou aux ciseaux !
Finie la fête !
La fête est finie et les visiteurs commencent à
partir apparemment satisfaits de cette journée.
Didier Cathalan me présente le nouvel animateur
de la race Blanche du Massif Central qu'il côtoie à
l'UPRA régionale. Avec Olivier Bernard, le
président en exercice de la section Noire, nous
évoquons les deux fêtes de la Noire qui bien que
Jean Claude Brunelin
26
Petits moutonsss…
Ndlr : Les deux textes qui suivent écrits par Gilbert Duflos décrivent la
naissance des fêtes d'Allègre. Toute activité humaine procède de rencontres qui
souvent cristallisent les énergies locales et créent un événement… En voici
encore la démonstration…
« Arrête, arrête la voiture ! Regarde les petits moutonsss… Et ils sont noirs ! »
Je gare la voiture aussi près que je peux du troupeau qui pacage tranquillement dans la
pente qui monte au-dessus de la route entre Salettes et Allègre.
Mon père descend, comme irrésistiblement attiré, traverse la route et se plante en bas
du talus.
« Arrête, arrête la voiture… Vois les petits moutons noirs ! »
Ce ne fut ainsi que la première fois.
Puis, à chaque fois que nous apercevions un troupeau, tout en sortant de la voiture il
rectifiait en imitant à la fois Jouvet, Arnaudy ou Fernandel interprétant Albert Topaze
l’instituteur modeste de Pagnol :
« Les moutons étaient en sureté dans un parc. Les moutonsss… »
Il raconte d’une voix douce. Que dit-il aux petites brebis qui ont toutes tourné la tête
vers lui ? Je n’entends pas tout car c’est entre lui et elles. Comme des confidences. Peutêtre des secrets que seuls elles et lui partagent désormais.
Cela se passe ainsi à chaque fois que nous venons en son pays natal qu’il a tenu à me
faire connaître dès que j’ai été en âge de conduire une voiture.
« Nous sommes des petits Vellaves ».
Nous prenons les petites routes quasiment au hasard. On ne risque pas de se perdre,
toujours à proximité d’un village. De virage en virage, et il n’y en pas un seul de droit, il
jalonne nos promenades de souvenirs… et de troupeaux de brebis Noires, comme le petit
poucet les jalonnait son chemin de cailloux blancs.
Nous ne connaissions l’avenir ni lui ni moi, mais déjà il le façonnait. Je ne vois jamais une
brebis noire du Velay sans entendre « Les petits moutonsss… ».
Ϯϳ
En 2000, parce que mon père m’avait appris à aimer le Velay et les gens d’ici et parce
que l’année était symbolique, j’achetai un tas de pierres au quartier du Château, en haut
d’Allègre, perché à 1100m d’altitude. Habitant encore Paris, je venais périodiquement,
rêvant de découvrir un chantier bien avancé. Déceptions répétées…
Mon père s’en alla en 2001 à 95 ans. En 2003 je m’installai place du Marchédial, audessus du Café du Marché, chez Destable, chez Puech, vé Tyibo. Il fallut six ans pour
faire de mon tcher quelque chose ressemblant à une maïsou.
Mais depuis que mon père n’est plus, ce sera comme le dit Prévert « la maison qui n’est
pas Ma maison »…
Venant gratter les joints, je passe devant la maison voisine, un peu en retrait. A l’étage,
un monsieur, l’air sévère. Il respire de l’oxygène une partie de la journée. Il me regarde
aller et venir. J’essaie de sourire à mon futur voisin. Mes sourires niais hésitent comme
moi entre le respectueux, l’amène et l’amical, les uns me paraissant trop familiers et les
autres trop distants. Bref je me demande quelle attitude adopter, espérant en l’amitié et
redoutant d’être rejeté en tant que spécimen urbain importé.
Les beaux jours venant, toujours sous oxygène, il ouvre la fenêtre.
— Bonjour monsieur.
— Bonjour…
Petit à petit il ouvre plus que la fenêtre, un peu de son cœur aussi.
— Entre, allons, on causera.
Assis de chaque côté de la table de la salle, devant un ballon de rouge aigrelet, on
échange. Drôles de paroissiens !
Que peut bien venir faire ici ce mouchu de la ville ?
— J’habite Paris, mais je suis né en Bretagne. Mon père est né ici, à Allègre…
— Ah bon ! Alors tu as une raison d’être venu ici.
— J’espère que les travaux seront terminés en deux ans ?
Lui, il sait, et hausse le menton, dubitatif. Bien plus tard il m’expliquera ce que je ne
pouvais savoir, depuis ma capitale. « Mes ueï que sabem, tu é ieou ».
Je finis par lui demander le métier qu’il exerçait.
Devinez quoi… Fermier au Monteil de Vernassal, outre des pouars et des vaches Salers, il
tenait un bon troupeau de brebis. Une centaine de jolies bêtes. Pas tout à fait en race
pure. Quelques étoiles blanches sur les têtes et quelques nez blancs montraient qu’il y
avait du Bizet ou du bélier blanc là-dessous. Ancienne mieux que vieille, la bâtisse n’était
pas entretenue par les propriétaires. Un soir, au moment de la belote, un galandage s’est
effondré…
Fatigué, il avait cessé son activité à soixante ans et avait acheté une maison de bourg à
Allègre avec ses maigres économies. Enfin chez lui. Tranquille pour ses vieux jours. Il
faisait des jardins pour faire bouillir la marmite.
Tant que la santé... « Quo touchi… » Ça tousse.
Peu à peu il raconte, en français, ponctuant de mots en Patois, veillant à ce que
j’apprenne. Mais progressivement.
D’anecdotes en leçons de choses et en sages points de vue, avec des mots aussi précis
que simples, soulignés de regards parfaitement droits, et scandant de ses bonnes
grosses mains, il fait solidement germer et mûrir la petite graine que mon père avait
semée : « les petits moutonsss, et ils sont noirs… »
Ϯϴ
— J’ai toujours sorti mes brebis, même dans la neige juste pour une heure ou deux.
Je passais premier et je les menais manger ce qu’on trouvait. Ça les stimulait. Elle est
rustique, la Noire, mais délicate. Elle ne mange pas n’importe quoi. Elle tourne autour
des joncs et des herbes dures. Elle aime le terrain sec, même pentu, raide, ça ne la gêne
pas. Le sol humide lui donne le piétin. Elle demande de l’attention et du soin. Il faut
observer, deviner ce qui va et ce qui ne va pas.
Je le tenais pour un taiseux. Non.
Il observe. Comme avec ses brebis. Une fois qu’on a mérité sa confiance, c’est un
merveilleux conteur. Il explique les mots particuliers que je ne pourrais pas comprendre
sans lui. Les journées sont trop courtes.
Ce qu’il aime le mieux raconter, c’est son métier. Ses brebis noires. La neira. Il raconte
comment il nourrissait les agneaux en découpant le quartirou, les petits légumes. La
branche de genêt que piquaient les Paysans qui ne voulaient pas qu’il mène ses brebis
sur leur pré. Il raconte les Nautes, avec la Blanche, Tinette, l’abreuvoir. Les conneries qui
se faisaient quand on était nombreux à la maïsou, au Monteil.
Bourru mais tellement attentif. Attentionné. A un de ses copains qui lui rend visite et
attaque en Patois : « Parle français, sinon le p’tiot ne comprendra pas. »
Un jour, il sort d’une boite en fer son chéquier et d’un geste le fait glisser jusqu’à moi :
« Tiens, tu l’écriras. » Tout était dit. D’un mot.
Plus tard : « Tu ne me lâcheras pas la main, hein ? »
Il n’avait plus d’illusions et, ne crût peut-être qu’à moitié à ma promesse. A mes
compliments il répondait par la négative. « Bah, tu es bien att’lé avec moi… »
« Moi je vais partir, mais toi tu vas rester là ? »
Au U, l’après-midi du six février 2008, quand il est parti, il n’était pas seul.
C’est promis, le René du Monteil, on fera quelque chose à Allègre pour La Neira.
Mais sans troupeau, on fait comment ?
Eh oui, on fera !
NB : les mots de patois local issu de l’Occitan sont donnés en phonétique.
Ϯϵ
Petits moutonsss…
Le René du Monteil, qui racontait si bien ses brebis noires du Velay, s’en était allé en
février 2008.
C’était promis, on ferait quelque chose pour La Neira.
Mais sans troupeau, comment s’y prendre ?
La vie fait bien les choses. Quelques fois.
Trois mois après que René s’en soit allé, le hasard me fait connaître Stéphane.
Il est d’Allègre, élu municipal, berger et de plus c’est le président de la Sélection de la
Noire.
Avec l’office de tourisme des Portes d’Auvergne, on cherchait des solutions pour soutenir
la fête votive de la Saint-Martin. Comme beaucoup d’anciennes foires, la nôtre s’étiolait.
Et si Stéphane montait ses brebis noires à la fête ? Il veut bien, mais à la mi-novembre il
peut faire froid et certaines années agneaux et brebis sont déjà rentrés. Je ne suis pas à
Allègre depuis bien longtemps, mais j’ai constaté que oui, c’est trop aléatoire.
Début mai, avec son frère Eddy et d’autres bergers et passionnés des chiens de
troupeau, Steph donne un coup demain à Lou Pastre de la Neigre, au Monastier. La
journée est consacrée à la brebis noire. Elle a repris l’idée de la fête de Bains qui avait
été la première à attirer l’attention sur celui qu’on appelle alors le Mouton Noir de Bains
et qu’on nommera ensuite la Brebis Noire du Velay.
Une fête c’est bien, mais, quand la cause est belle, patrimoniale et locale, pourquoi pas
deux fêtes, amies, à deux moments complémentaires de l’année ?
Quel meilleur moment pour monter à nos visiteurs les spécialités du Velay que les
grandes vacances d’été ?
Le premier dimanche d’août est choisi. L’association de La Neira est créée.
Elle va être tenue, la promesse faite au René du Monteil et, à travers lui, à la Noire du
Velay.
Après quelques réunions avec Didier Cathalan, animateur de la race ovine vellave, le
programme est mis au point. La journée s’appellera « La Neira des volcans d’Allègre » !
Autour de Steph un groupe de copains et copines est partant. Je suis supposé organiser
l’événement. En fait c’est le groupe qui montre le chemin… Ils ont l’habitude. Ils savent
faire. Moi j’apprends.
Steph me conseille d’aller voir son oncle. Après le décès de son arrière-grand-père qui lui
avait fait aimer la brebis noire quand il était tout gamin, Stéphane a calqué son attitude
sur celle de cet oncle, frère de son grand-père paternel.
Il s’appelle René. Lui aussi… Le René de Combolivier.
ϯϬ
Quinze jours plus tard je lui rends visite. Accueillant, ouvert, tout en longueur. Il a une
solide réputation d’homme droit, honnête, qui soigne et nourrit bien de ses bêtes en
tirant parti de ce qu’offre la nature. Plein d’humour et d’autodérision.
— Il ne reste de moi que les quatre montants… et l’piston.
Né en 26, il est venu tout jeune à Combolivier, anciennement « combe Oyer », au Sud en
bas d’Allègre, sur des terres qui descendent du Mont-Baury à la Borne. Il y est fermier
avant d’acquérir la petite bouaria. L’ambiance est de la même humble et rude nature
qu’au Monteil de Vernassal. On voit le ciel à travers le toit et le chat n’a pas besoin qu’on
lui ouvre la porte pour se faufiler entre les planches. La burle non plus.
Outre quelques vaches pour le lait, des bœufs pour le travail, René se monte un petit
troupeau de brebis. Les pentes s’y prêtent bien que les fonds soient un peu humides
comme en témoignent les vieux pibles.
Il est un peu plus jeune que les moutonniers et bergers qui ont travaillé à retrouver la
souche de la Neira, sélectionner les plus jolies bêtes, les reproduire et multiplier.
Travailler à plusieurs leur permet d’échanger les béliers et d’éviter la consanguinité.
L’argent n’est pas abondant à Combolivier. Il faut nourrir les trois générations de la
maisonnée. Dé quiy témps les agneaux croisés sont plus appréciés et se vendent mieux
dans les foires. Bien qu’il les aime et en connaisse les qualités, René ne prend pas ce qui
était alors un risque : se monter en brebis noires de race pure. Il les croise avec des
anglaises plus charpentées. Les « soundounes » (South-Down). Ainsi peuplée d’une
soixantaine de têtes, sa bergerie est colorée, du blanc au noir…
Entre les foires, il monte à Allègre vendre ses agneaux. Les deux René s’y retrouvent
parfois et se respectent, jouissant l’un comme l’autre de la meilleure réputation de
bergers sérieux et respectueux de la nature… La Neira ?
— Elle se désaisonne facilement et elle fait souvent des bessons. Elle est très
maternelle avec ses agneaux… Mais elle n’a que deux mamelles, alors quand il naît trois
ou quatre p’tiots, on arrive à faire adopter ce qui sont en trop par des mères qui n’en ont
eu qu’un. Il faut savoir s’y prendre mais on y arrive.
René explique, détaille, précis. Toujours avec douceur et modestie. Jamais pour ce
mettre en avant. D’autres ne le font que trop… Il est tranquille, mesuré, jamais égotique,
ni faux modeste.
Observateur de l’autre. Mon père me manque, il le sent dès les premières visites et me
fait la bise. Geste affectueux, fruit de sa capacité d’observation et d’empathie développée
par son métier. Il en faut, de la qualité d’observation, pour comprendre les bêtes.
Généreux en amitié, et riche d’amis, René est apprécié pour son expertise. On l’appelle
ici pour des débardages difficiles, là pour aider aux moissons ou pour éliminer les taupes.
D’expérience, il sait exactement ce dont il est capable, ne se surestimant ni ne se sousestimant.
Son ambition ? Bien faire le travail.
Avec ses bœufs, sortant un automobiliste d’un fossé, ferme mais sans se fâcher : « Tu
me laisses faire, sinon je m’en irai ! »
Il a des expressions bien à lui ou populaires, ou ramassées auprès des Anciens quand il
n’était que jeune. Il adore surprendre l’ex parisien par un mot que je n’attends pas. C’est
un jeu et nous aimons autant l’un que l’autre. A lui de trouver le bon mot français ou
d’occitan vellave. A moi de le saisir au vol avant qu’il tombe par terre…
ϯϭ
Apprenant que l’enterrement d’un vieux copain vient d’avoir lieu :
— Je ne suis pas allé à son enterrement, mais il ne viendra pas non plus au mien.
Un mal implacable et douloureux le ronge peu à peu, qui finira par avoir raison de lui.
« La terre m’attire… »
La première édition de La Neira va avoir lieu bientôt, le premier dimanche d’août 2008. Il
brûle d’y participer car la cause lui semble opportune et juste.
— Je monterai Princesse, la jument.
Mais il souffre trop. Princesse restera au pré ce dimanche-là. On descendra des plateaux
du repas de midi, à lui, son épouse et leur fille. Et on ne pourra que l’embrasser plus fort
que d’habitude.
A’tyi !… Voilà pourquoi à Allègre on fête La Neira le premier dimanche du mois d’août.
Vaï bien lo cóp la Neira, en soi c’est déjà une raison suffisante ! Ajouter une journée de
fête qui parle d’Allègre, de nostre Velai, de nos volcans, de nos spécialités fermières et
artisanales, en soi cela aussi est déjà suffisant.
Mais La Neira, on la fête aussi avec nos visiteurs en souvenir de celles et ceux qui ont
porté haut nos valeurs.
Mes ja que sabem, tu e jo… Mais déjà, nous avons compris, toi et moi que ce sont aussi
des souvenirs de belles rencontres qui ont motivé La Neira.
On me pardonnera de mettre de côté un petit bout de la fête pour mon père… Ses yeux
gris-bleu disent combien il était heureux de faire la conversation à nos petits moutonsss
du Velay. Arrête, arrête la voiture... Vois, ils sont noirs !
NB. Les mots de patois local issu de l’Occitan sont donnés en phonétique.
ϯϮ
et de paille s'annonce bien, du moins pour les
orges. Le Bar se profile à l'horizon, vert sombre,
massif et évasé en son centre sur fond de céréales
dorées. Allègre paraît bien frêle sur son flanc. Des
panneaux avec une silhouette de brebis noire
confirment la direction et le programme.
Maintenant il faut escalader la route pour atteindre
le bourg et sa potence impressionnante. Le
château d'origine, ravagé par les flammes en 1698,
devait en imposer par sa taille et montrer la
puissance des seigneurs locaux. Nous n'en avons
pas de représentation réaliste, seulement des
interprétations. Une petite route à droite permet
d'accéder au quartier de Fonteline et au collège
du Mont Bar scolarisant environ 240 élèves. Le
pré à usage de parking est encore accessible.
D'autres randonneurs arrivent, se préparent :
chaussures, bâtons, sac, et hésitent sur la tenue à
prendre car le fond de l'air est frais malgré le
soleil. Je fais de même et me dirige sur le site en
pleine effervescence.
La Néira et les Volcans d’Allègre :
9ème édition
Cette année je pars du Puy-en-Velay pour me
rendre sur le site de la fête. Pas de souci en terme
de météo, un temps calme, ensoleillé, frais avec
un vent de nord / nord-est, idéal pour une
randonnée. Le donjon de Polignac est toujours
aussi majestueux. Je bifurque à la Pierre Plantée
en longeant la vaste zone artisanale de Nolhac qui
ne cesse de se développer. Et me voici déjà à
traverser la coquette petite ville de Saint-Paulien,
la Ruessium antique, un temps capitale galloromaine du Velay. Le musée Michel Pomarat
rappelle ce passé prestigieux. Des campagnes de
fouilles archéologiques dans le quartier des
Aurouzes donnent lieu chaque année à quelques
trouvailles d'importance. Dès la sortie de la petite
bourgade, l'on ne tarde pas à voir se dresser à
l'horizon le puissant Mont Bar. Nous sommes déjà
sur la commune de Céaux-d'Allègre et un curieux
pont attire mon regard au niveau du village de
Chadernac que la route contourne. Céauxd'Allègre est bordé à l'ouest par la Borne
occidentale et traversé dans un axe nord / sud par
la Borne orientale. Leur confluence forme la
Borne dans le territoire de Lissac. Notre route
La mise en place
C'est encore un peu tôt mais pourtant artisans et
producteurs fermiers s'installent tranquillement
sollicitant Gilbert Duflos, le grand organisateur de
l'événement. En fait les mécanismes sont bien
rôdés car chacun reprend en principe
l'emplacement de l'an passé. Les premiers
arrivants, se présentent déjà pour réserver le repas
de midi qui se déroulera dans la salle communale
ou en extérieur sous une vaste structure acquise
par l'Association. Chaque emplacement offre
environ 250 places assises mais vu l'affluence les
places seront chères ! Je prends la file, avec JeanNoël fidèle au poste, en dégustant avec plaisir un
bon café et un excellent foie grillé, le tout offert
par La Neira. La caisse arrive et les préposés
s'installent. Le livre sur la Neira est aussi en
vente. Ticket en poche, je jette un œil à la salle de
restauration avec la chaîne qui se met en place et
d'impressionnantes piles de plateaux repas. Les
feux pour cuire l'agneau sont en batterie derrière
le bâtiment et dégagent une belle fumée. C'est
qu'il va falloir assurer et ne pas mollir pour
approvisionner la chaîne. En arrière-plan, le
bâtiment du réseau chaleur est maintenant
opérationnel, programme d'envergure pour la
commune car il s'étend sur une distance de deux
kilomètres. De gros travaux ont eu lieu pour faire
passer les canalisations rue de Fonteline. Le
réseau débute derrière la salle polyvalente avec
l'installation de deux chaudières bois à plaquettes
forestières et d'une chaudière fioul, laquelle
assurera la continuité de la distribution en cas de
panne. Le tracé desservira notamment la MAS et le
secteur des Narcisses, la rue du Mont-Bar (de La
traverse la Borne orientale sur un pont moderne en
béton, délaissant un pont ancien, plus en amont,
assez remarquable. Sa longue chaussée est longée
par des parapets en pierre. L'ouvrage est percé à la
base de voûtelettes permettant astucieusement
l'évacuation des crues. Une arche voûtée en plein
cintre laisse le passage au cours d'eau. La route est
bordée d'ails sauvages bleutés. On peut en récolter
les têtes remplies de graines odorantes, en
condiment avec des légumes ou du poisson. La
nature est rayonnante. Les prés verts promettent
une récolte abondante de regain après des
fenaisons au-dessus de la moyenne, sans être
d'une grande qualité. Les balles rondes de paille
dorée commencent à envahir le paysage au grè des
moissons déjà bien entamées. La récolte de grain
33
Allègre et la plaine environnante. Les framboisiers
ponctuent le chemin, accompagnés de ronciers, de
fraises des bois, de sorbiers, taches rouges dans cet
univers vert. Je discute avec Stéphane comme à
l'habitude. Les récoltes se présentent bien, foin et
regain, céréales, lentilles, maïs. Mais on est jamais à
l'abri d'un accident climatique, en particulier la grêle
qui anéantit tout sur son passage, les efforts d'une
année. La transformation des produits et la vente en
circuit court fonctionnent bien avec cependant des
trous de production pour les agneaux. Stéphane
pense à étaler un peu plus les agnelages pour éviter
ces creux. Le lait livré aux entreprises a connu une
chute importante de prix et un manque à gagner
important. Il faudra peut-être favoriser les autres
productions si la baisse des prix se confirme et
concentrer la production sur des vaches
performantes. Il convient aussi de développer
l'autonomie alimentaire de l'exploitation, voir avec
une remise en cause de la culture de maïs onéreuse
et déséquilibrée en matière azotée, au profit de
prairies artificielles de type mélange suisse avec une
part importante de légumineuses. Nous évoquons
aussi les autres éleveurs de la race, les anciens en
retraite et les jeunes qui reprennent le flambeau. Ces
fêtes sont aussi la rencontre du milieu rural et citadin
pour une plus grande compréhension mutuelle,
également un pont entre les générations. A un
embranchement quelques brebis font une incursion
rapide dans un champ de céréales, leurs têtes noires
et soyeuses émergeant des épis dorés. Le chien veille
au grain et la récréation ne dure pas ! Nous sommes
arrêtés par un barrage de tables érigées par les
administrateurs du Crédit agricole qui offrent
Poste à la maison de retraite) ou encore l'église. Il
pourra évoluer au fur et à mesure de l'avancement
du projet. L'approvisionnement des chaudières
bois est confié à Produits forestiers d'Auvergne
avec un produit composé de plaquettes forestières
(50 %), d'écorces et chutes courtes (20 %) et de
connexes de scierie (30 %). Le camion podium de
Radio Craponne est en place à proximité des
cabanes de bergers et de deux brebis noires bien
dociles "encastounées " avec trois petits agneaux.
Ils feront la joie des enfants désireux de toucher
leurs douces toisons. Les membres de
l'Association portent de beaux tee-shirts rouge,
pas moyen de les rater pour un renseignement ! Je
fais un petit tour des exposants et un tour de
prairie, au-dessus du Musée du Mont-Bar et de
l'Office de tourisme des Portes d'Auvergne, pour
repérer les animations de l'après midi : une
centaine de brebis parquées en haut du champ et à
l'ombre côté chaufferie au bois, les chevaux
d'Auvergne qui se préparent pour accompagner la
randonnée. Je rencontre l'ami Jean-Pierre
passionné par cette race. Il est temps de partir
pour le tour du Mont-Bar, un trajet de 5 km
environ, à mi-hauteur, sur une piste facile et
recouverte d'une fine pouzzolane assez compacte
et douce à fouler.
La randonnée
Les chevaux démarrent et gagnent l'arrière du
podium : voiture attelée tirée par deux chevaux, l'un
gris pommelé et l'autre tacheté léopard, et cavaliers.
Eddy assisté de son border « Gandhi » fait sortir les
brebis du parc, mais effrayées par la foule des
randonneurs, elles prennent la fuite, se faufilant
entre les voitures pour se réfugier devant le collège.
Elles se calment un peu. Les chevaux partiront
devant et le troupeau suivra à distance devançant les
nombreux randonneurs, pas loin de 400 selon les
organisateurs. Un record ! Les photographes se
placent pour réaliser les meilleurs clichés sans gêner
la progression des animaux. Les photos numériques
des brebis Noires, de la Fête, du Marché sont à
envoyer à " [email protected] " avant l'hiver.
Le jury récompensera ses préférées par un cadeau
souvenir et les mettra en ligne sur le
site www.brebis-noire-velay.org.
J'accompagne
Stéphane qui de son fouet ralentit les brebis
impatientes. Elles le suivent, bien groupées et
emmenées par une brebis plus âgée, toujours en tête
et très docile. Stéphane la connaît bien, une meneuse
toujours utile dans un troupeau. Stéphane était un
peu inquiet car le lot comportait de nombreuses
agnelles. Mais tout se passe bien. La marche est
rapide, le chemin assez large et les randonneurs
disciplinés. Les sapins et épicéas dispensent
d'épaisses plages ombrées. Des coupes ont été
pratiquées pour permettre des perspectives sur
rafraîchissements et fruits secs très appréciés. Les
chevaux ont passé le barrage pour des raisons de
sécurité. Stéphane parque les brebis à l'entrée d'une
carrière et lorsque les randonneurs sont rassasiés
34
demande le silence pour une présentation du
volcanisme local par Jean-Noël Borget du CPIE. Ce
volcan de type strombolien, cône tronqué
surmonté d'une cuvette, culmine à 1175 mètres et
fait face à un autre volcan, le mont Baury sur les
flancs duquel se blottit le village d'Allègre. La
dernière éruption du volcan remonte à environ
790 000 ans et pourtant le mont Bar compte parmi
les plus jeunes des volcans du Velay dont l'âge
s'échelonne de treize millions à quelques centaines
de milliers d'années. Il est unique en Europe, c'est
en effet le seul volcan de type strombolien qui
abrite dans son cratère une tourbière, favorisée
par le creusement d'un drain en 1821 pour
assécher le lac qui se trouvait alors dans son
cratère. Jean-Noël conseille aux promeneurs de
visiter cette tourbière. Il note l'étonnante
correspondance entre la brebis noire à la toison
pouzzolane et le volcanisme ambiant, une sorte de
mimétisme. Il passe la parole à Jean Claude
Brunelin qui évoque la race Noire du Velay, son
sauvetage in extremis face à un courant de
« modernisation » de l'agriculture, dans les années
1970. Cette race préservée, il s'agissait de la faire
connaître par un bulletin de liaison, une petite
revue baptisée le « Souffle de la Neira », par des
fêtes célébrant d'anciennes transhumances et enfin
de la commercialiser localement en grande
surface, en boucherie, en circuits courts sous une
marque déposée « Agneau noir des Monts du
Velay ». Il est temps de repartir par un chemin
ascendant, au milieu d'une agréable hêtraie. Les
chevaux prennent les devants et les randonneurs
se rangent pour laisser passer le troupeau. Les
brebis peinent un peu sur la pente mais restent
groupées tandis que la caravane des suiveurs
s'étire graduellement. Elles doivent sentir le retour
au calme du pâturage qui n'est plus très loin. Voici
en effet leur parc où elles se mettent en pelote et
tournent en rond. Puis elles se calment et en plein
soleil chôment comme on dit en langage mouton.
Leurs têtes disparaissent pour se protéger des
mouches et insectes piqueurs et elles présentent
leurs dos comme la fameuse tortue de boucliers
des légions romaines.
pour le repas de midi et les animations de l'après
midi. Certains passent après le repas dominical
histoire d'activer la digestion. L'on y rencontre
aussi des connaissances : Paul et Odette qui
prennent le repas puis partent pour les
Fourmofolies d'Ambert qui fête son délicieux
fromage. Ma grand-mère en fabriquait dans son
hameau des Echelettes au-dessus d'Ambert. Les
fourmes s'égouttaient dans des chéneaux de bois
et ensuite s'affinaient dans les caves humides des
« sagnes ». J'en ai encore l'odeur dans le nez et la
saveur dans la bouche, ma madeleine à moi ! Le
groupe folklorique du Velay présente quelques
danses de l'ancien temps et la buvette ne désemplit
pas pour un apéritif musical bien gagné, bière bien
fraîche, rosé au pamplemousse ou à la cerise...,
après s'être délesté du matériel de marche. C'est le
moment des politiques qui montent sur la scène.
Stéphane, avant de les introduire, dit un petit mot
pour remercier le public de sa fidélité. Cette fête
est pour lui un pont entre générations et entre
milieux urbain et rural. Il rappelle le rôle
nourricier de l'agriculture en général et dans nos
régions la production de produits sains et en
circuits courts. L'agriculture traverse en ce
moment des turbulences comme dans d'autres
professions sans doute et il faut rester solidaires et
unis. Il donne le micro au maire d'Allègre, M.
Gilbert Meyssonier, qui salue les promoteurs de
cette fête, Gilbert Duflos et Stéphane Charrat,
devenue incontournable. Marie-Agnès Petit,
conseillère départementale et régionale, intervient
en mettant l'accent sur la qualité de nos produits
locaux dont fait partie l'agneau noir du Velay.
Laurent Duplomb, maire de Saint-Paulien et
président de la Chambre d'agriculture, souligne les
difficultés de l'agriculture et le besoin qu'elle a
d'être soutenue car partie intégrante de notre
économie locale. Jean-Pierre Vigier, député de la
circonscription, assure de son soutien à
l'agriculture départementale et en particulier aux
produits locaux. Il félicite aussi les organisateurs
de tels événements aptes à rapprocher les
mentalités et souhaite une bonne journée à tous.
Le repas
Nous rejoignons le site et les nombreux touristes
attendant le repas en appréciant le groupe
folklorique du Velay devant le podium de radio
Craponne et en visitant les divers stands. Il faut
dire que cette fête est un peu à la carte et chacun y
picore ce qui lui plait. La matinée est consacrée
aux randonneurs, sans doute près de 400 cette
année, souvent en famille, gens du cru ou touristes
de fort loin parfois comme en attestent les plaques
minéralogiques des véhicules. D'autres arrivent
35
printemps (tramise), osier, viorne sauvage,
noisetier, pour en faire surgir pailhas, corbeilles,
ruches, solides paniers… On ne présente plus
Clément Maurin spécialiste de la viorne et Jean
Faynel le virtuose du pailhas. Pas loin de lui,
Alain Pouzols a renoué avec l'art de son grandpère et travaille avec élégance osier, noisetier et
viorne. A l'extérieur deux autres spécialistes
s'affairent dont un qui recouvre une bonbonne de
Après cet intermède de tradition, il faut prendre la
file et progresser vers les plateaux repas et la
chaîne. C'est le pic d'affluence et la file progresse
lentement. C'est aussi un temps pour discuter avec
les voisins. Je rencontre un touriste né à SaintEtienne et habitant à Annonay, en camping car
avec sa famille, un véhicule un peu ancien. Arrivé
hier et devant les difficultés à trouver un
restaurant, il est reparti faire des provisions à
l'Intermarché de Saint-Paulien. Spécialiste de
pétanque, il connaît bien et apprécie le site du Puy
où il a joué près de la fontaine du Breuil. Nous
arrivons aux plateaux repas garnis au passage d'un
menu concocté avec des produits bien de chez
nous : charcuteries d’agneau noir (saucisson
d'agneau noir médaillé aux Fermiers d'Or),
grillades d’agneau noir, salade de Lentilles Vertes
du Puy, fromages du Velay, clafoutis moelleux aux
fruits rouges, pain de tradition, café. Il faut aussi
garder son ticket pour le tirage de la tombola le
soir à 17 heures. L'agréable salle des fêtes est
quasiment pleine et je tente ma chance à
l'extérieur, en vain, et retour à la case départ où je
trouve une place et m'installe fatigué de la
randonnée et de l'attente. En fin de repas je fais
connaissance avec mon voisin d'en face, né au
Puy-en-Velay. Son père travaillait à la SNCF et
avait connu très tôt la maladie du président
François Mitterrand. En effet, une voiture spéciale
avec tout un équipement médical, avait priorité
absolue sur tous les convois. Lui-même travaillait
dans l'administration des impôts et nous nous
sommes trouvés des connaissances communes. Le
monde est vraiment petit et la Haute-Loire en
particulier. Autre paradoxe, il avait pratiqué dans
sa jeunesse la boule lyonnaise mais n'aimait pas
trop la pétanque comme ma précédente
rencontre ! Je sors de la salle et passe à ma voiture
pour m'alléger un peu car il commence à faire très
chaud. En attendant le début des animations, je
parcours les stands.
verre.
Dans l'Atelier de Maméas-Bas, Dominique Rochet
modèle le bois avec une prédilection pour les
fruitiers : pommier, poirier, merisier, noyer,
vinaigrier vert et blanc… et en tire de multiples
objets élégants et des formes proches de l'état de
nature.
Les produits du cuir sont présents avec en
particulier une superbe collection de ceintures, en
provenance de Fleur de cuir, l'atelier de
maroquinerie de Leslie Sabathe installée à
Allègre.
Non loin nous découvrons une collection de sacs à
main très colorés.
Les laines du Forez montrent leurs magnifiques
réalisations. Christine Becouze de Cournon présente ses
élégants bijoux réalisés à la main en pâte
polymère.
Un stand attire l'œil et flatte les narines, savons et
savonnettes de couleurs tendres pour tout les
goûts : ortie, rose trémière, cade, du Velay (lait de
vache, verveine, lentille), lait de brebis, lait
d'ânesse, abricot, framboise, miel, poudre de
Perlinpinpin...
Les artisans
La dentelle du Puy a toujours sa place avec de
belles réalisations. Monique Gourbière, une
passionnée, continue à transmettre ce savoir faire.
Elle pratique cet art depuis vingt ans et enseigne
"ce chant des fuseaux" à ses élèves. Elle expose
au Centre Georges Sand dentelle, peinture et
sculpture. Nous avons remarqué un tableau de
dentelles avec brebis noires et tracteur et une
ferme miniature du plus bel effet.
Un couvige s'affaire à l'extérieur devant des
spectateurs ébahis par la dextérité des dentellières.
La vannerie traditionnelle est encore de la fête
avec plusieurs artisans qui préparent, entremêlent
des matériaux aussi divers que paille de seigle de
Les producteurs fermiers
Producteurs de fruits rouges, Marie-Claire et
Dominique Reynier-Bissuel sont installés à
Aubaron sur la commune de Fix-Saint-Geneys. Ils
cultivent framboises, groseilles, cassis, fraises
qu'ils vendent en l'état ou sous forme de
délicieuses confitures. Ils gèrent aussi des gîtes
ruraux pour une découverte de cette attachante
36
patrimoines et savoir ruraux, la défense de la
qualité des produits fermiers, notamment par
l’agriculture biologique.
En Haute-Loire, les CIVAM proposent 5 groupes de
bases : Civam produits fermiers, Association
régionale miels de montagne, Civam apicole du
Velay, Accueil paysan, Civam « Les Pays de la
Haute-Loire ». Ils organisent et participent à la
Foire Concours de Fromages Fermiers, au Roi de
l'Oiseau, à la Foire Concours au Miel à Aiguilhe et
à la foire de la Patate à Solignac-sur-Loire.
région.
Hélène et Daniel Perrrin, pains d'épicier,
confituriers, de Saint-Victor-sur-Arlanc présentent
leurs savoureuses confitures de figues, quetsches,
griottes, pêches-framboises, leurs célèbres pâtes
de fruits les Bouchées de Saint-Victor, des sirops
et de l'hypocras. Daniel est un passionné de radio
et son musée mérite le détour.
Le miel de Christiane Farget, apicultrice à
Taulhac, est le reflet de notre riche flore. Avec son
mari, elle propose aussi un gîte de caractère à
Menteyres.
Le Gaec de Combe d'Azou commercialise ses
charcuterie d'agneau noir : pâté et saucisson
médaillé aux Fermiers d'Or, et ses viandes sous
vide. Turion Pierre des Nautes de Vernassal présente un
joli stand de légumes bio : oignons, potimarrons…
fort bien mis en scène dans des paniers en
vannerie.
Julien Soubeyre des Crozes de Roche-en-Régnier,
présente en vente directe ses volailles fermières
élevées en plein air : poulets, pintades et canards.
La boulangerie d'Allègre propose différentes
variétés de pain, viennoiseries, gâteaux et glaces
prises d'assaut l'après midi.
Guy Trescarte confectionne pour les gourmands
de délicieuses crêpes à la farine de lentille et
propose un stand d'information des CIVAM.
La Calendreta
Un stand très coloré aux couleurs de l'Occitanie
présentait les activités de la Calendreta velava,
outil important pour la préservation de notre
langue occitane et sa transmission aux jeunes
générations. L’occitan est la première langue
écrite en Europe après le latin, transmise depuis
plus de 1000 ans, langue de culture et de création
artistique depuis les Trobadors (localement : Pèire
Cardenal), en passant par Frederic Mistral (Prix
Nobel de littérature 1904).
Calandreta (en occitan petite alouette) est une
école
maternelle
et
primaire
bilingue
occitan/français. L’enseignement en Calandreta
est basé sur un bilinguisme précoce à partir duquel
l’enfant apprendra plus facilement d’autres
langues. C'est une école associative, dispensant un
enseignement respectant le programme de
l’Education nationale, suivant une pédagogie
adaptée. La langue de l’école est l’occitan parlé en
Velay, Calandreta s’appuie sur ce socle culturel
pour aborder l’environnement et le monde
d’aujourd’hui. Un enseignement en immersion
linguistique est donné dès la maternelle et des
choix pédagogiques s’inspirent des méthodes
Oury et Freinet. Ils visent à favoriser l’autonomie
des enfants et à les rendre acteurs de la vie de
groupe.
Les CIVAM
Les CIVAM, Centres d’Initiatives pour Valoriser
l’Agriculture et le Milieu rural, articulent leurs
actions sur « Un développement durable pour des
campagnes vivantes et solidaires ». Ils sont
organisés en Fédération nationale, 12 Fédérations
régionales, 200 groupes locaux, 150 animateurs et
techniciens et plus de 40 000 acteurs du monde
rural. Ce réseau national d’associations est né
dans les années 1950 sur l’initiative
d’enseignants, d’agriculteurs et de ruraux. Les
CIVAM se sont fondés sur les valeurs des
mouvements de l’Education Populaire, avec pour
principal dessein de permettre aux familles
agricoles d’accéder à une véritable autonomie
grâce à la formation. Sur le département, ils se
sont trouvés en concurrence avec les services de
développement des Chambres d'agriculture. Au
fil des années et des crises agricoles, les CIVAM se
sont engagés vers d’autres modes de
développement. Ils ont contribué à la recherche de
solutions valorisant au mieux le potentiel humain
et productif du milieu rural : la diversification des
activités, l’aide à l’installation en milieu rural de
nouveaux actifs, la reconstitution de liens entres
les populations urbaines et rurales, l’éducation du
consommateur et du citoyen, la valorisation des
Depuis 2003, l’école Calandreta Velava PèireCardenal proposait cet enseignement dans le
bassin du Puy-en-Velay. Elle est maintenant
installée rue Norbert-Rousseau, près de la gare et
compte 33 élèves. Les cours se déroulent dans les
bâtiments de l'école maternelle et primaire SaintNorbert. « Nous cherchions de nouveaux locaux,
raconte Virginie Waucquiez, présidente de l'école
37
produit sur cette fête en intermède aux autres
animations : démonstration de chiens, évolutions
des chevaux. Quatre musiciens accordéonistes
sont installés sur le podium et rythment les danses
et saynètes commentées au micro par une
animatrice du groupe. Deux d'entre eux ont aussi
accompagnés la randonnée. Réfugié à l'ombre, un
nombreux public de tous âges apprécie le
spectacle, enfants assis au sol et personne âgées
radieuses aux premières loges. Ces scènes de vie
villageoise leur remettent en mémoire le temps
d'antan.
associative franco-occitane. Une maman a vu
l'annonce et en a parlé à Saint-Norbert. L'école
cherchait une solution pour occuper des salles
vides qui correspondait à ce qu'il nous fallait».
Chaque entité garde donc son contenu
pédagogique propre et ne fait des concessions que
sur les horaires de récréation ou l'horaire de la
cantine.
La calandreta Ribeirona de Lavaudieu, quant à
elle, a ouvert ses portes en 2015 dans un logement
privé qui est aussi l’ancienne école de garçons,
une solution temporaire.
Le stand présentait des documents d'information
et des petits gâteaux les « Calendrounets »,
savoureux sablés en forme de croix occitane.
Le cheval d'Auvergne
Ses aptitudes
Nous vous l'avons déjà présenté mais un petit
rappel n'est pas inutile.
Egalement appelé jument de Fay en Haute Loire,
ragot du Béage en Ardèche, Lozero en Lozère,
Aumontois, en Aveyron, Cantalou dans le Cantal
ou encore ragot d’Auvergne dans le Puy de Dôme,
c’est un petit cheval de montagne du Massif
central connu par des écrits dès 1660 dans un livre
de Puvinel. Toutes ces régions avaient leur cheval
de travail, un petit équidé rustique, docile et
Les autres animaux
Soulon Bernard présente poules de plusieurs
espèces et lapins. Les enfants se pressent près des
cages. Son élevage est à Freycenet de Borne et il
élève ses volailles en plein air avec des produits
naturels.
Et bien sûr le cheval d'Auvergne représenté par de
beaux spécimens est de retour sur la fête, non pour
un concours, mais pour des démonstrations
diverses mais nous y reviendrons.
Voilà j'ai fait mon tour sans oublier un exposant
j'espère… Mais les animations vont commencer, il
est près de 15 heures le temps est toujours
magnifique et le public encore plus nombreux.
Les animations de l'après midi
Le groupe folklorique Le Velay
Il comporte une quarantaine de membres
actuellement, tous passionnés de culture locale. Il
est ancien, fondé en 1933 par un musicien de
talent, Jean Pitacco, pour être le témoin de la vie
de nos ancêtres du Velay vers les années 18901930. Cela implique une reproduction scrupuleuse
des us et coutumes, musiques et chants, danses et
costumes, parler vellave, vieux métiers… La tache
est difficile mais enthousiasmante. Les
remarquables costumes reproduisent au détail près
ceux de nos aïeux. Ils sont agrémentés des dorures
indispensables : Rose du Velay (pendentif ancien
en forme de rosace à pampille, or serti de grenats),
Saint-Esprit (pendentif ancien « Saint Esprit »
Vellave en or jaune agrémenté de grenats sertis et
d’émail blanche et verte), épingles de coiffes. Les
membres ont élaboré des spectacles qui
reproduisent des tranches de vie culturelle et
populaire. L'histoire locale est racontée à travers
danses (bourrées, polkas, mazurkas...), scènes de
théâtre et chants, reliés par un fil conducteur : vie
paysanne, dentelle, fête de village, mariage… Le
groupe s'adapte aux diverses situations. Il se
polyvalent pour répondre à la demande des
petites exploitations, du transport léger et de
l’armée. Ce débouché se maintient jusqu’au 19ème
siècle. Mécanisation galopante et évolution des
modes de vie accélèrent sa disparition. Le modèle
initial avait cependant été gardé par quelques
éleveurs pratiquant l’équitation ou ayant des
troupeaux en altitude. A partir de 1997, les
membres fondateurs ont créé l’Association de
sauvegarde et de relance du cheval d’Auvergne.
On dénombrait alors seulement 32 chevaux.
L’association a travaillé sur le cloisonnement des
groupes d’élevage apparentés, un programme
d’élevage visant à améliorer les qualités
d’ensemble et l’augmentation du nombre des
naissances.
Actuellement le cheval d’Auvergne est apprécié
en tourisme équestre et en équitation de loisirs
38
compétitions de dressage constituent l'évaluation
de cette progression et permettent aux cavaliers de
tous niveaux de faire la démonstration de cette
entente.
dans sa région d'origine, car il est bien adapté à
l'environnement de moyenne montagne. Il peut
également tracter des attelages légers. Leur
présence est appréciée dans les écoles d'équitation
grâce à leur physionomie et leur caractère qui
rassurent les débutants. Ils sont également prisés
pour les compétitions de TREC, Techniques de
randonnée équestre de compétition.
Il peut être employé comme cheval de travail
en maraîchage, pour l’entretien des vignes et au
débardage.
Une démonstration de dressage
Les organisateurs ont clos et aménagé la partie
inférieure du pré pour cette démonstration : tronc
d'arbre à enjamber, passage à gué figuré par du
film plastique, petits obstacles à sauter.
Une séance de dressage commence par une phase
de détente qui prépare le cheval au travail puis des
exercices comme des déplacements latéraux.
Le cavalier se présente ensuite sur le pré, passe le
gué franchement à plusieurs reprises, enjambe
sans hésiter le tronc d'arbre. Puis son cavalier le
lance pour sauter les trois obstacles successifs
dans une belle envolée.
Deux jeunes cavalières viennent ensuite avec des
chevaux peu expérimentés qui refusent le passage
du gué. Une cavalière descend alors de sa monture
et entraîne son cheval par la longe. Rassuré, il la
suit et passe l'obstacle. Elle remonte en selle et
retente le passage. Après quelques hésitations, le
cheval le passe mais en biais pour en raccourcir la
durée ! Finalement l'autre cheval passera aussi le
gué en suivant de près la première cavalière. Non
sans difficultés, ils passent aussi le tronc d'arbre.
Une cavalière conduit sa jument à la longe sur les
différents obstacles et tente de lui faire mettre un
sabot sur un plot.
Les chiens de troupeaux
La dernière cavalière dirige son cheval à la longe
vers le troupeau de brebis
Eddy, le frère de Stéphane fait évoluer les brebis
avec son chien "Gandhi", un Border Collie très
actif. Il rassemble les brebis et les fait évoluer
dans le pré au gré des commandements de son
maître, bondit, virevolte, s'aplatit en arrêt, repart
et ramène la troupe. C'est un chien rarement au
contact direct du troupeau. Il reste à distance dans
des manœuvres d'encerclement. Sous les ordres de
son maître, il tente de faire approcher les brebis du
cheval. Progressivement les animaux se calment
et cohabitent calmement, moment fort et
symbolique de rapprochement entre ces deux
races locales rescapées et sauvées par des éleveurs
passionnés.
La fin de soirée
La Tombola est tirée vers 17 heures. Danses du
Velay se poursuivent jusqu'au soir et pour les plus
enthousiastes ou les retardataires, un repas est
aussi prévu le soir pour mettre un terme à cette
belle journée.
A la prochaine…
Un autre belle fête réussie et maintenant bien
implantée dans cette belle région d'Allègre. Merci
aux organisateurs pour ce parfum d'authenticité.
C'est par de telles manifestations que l'on montre
simplement les solides traditions de notre terroir,
sur le plan des paysages, de l'artisanat, des
produits naturels de qualité.
Le dressage est une discipline essentielle
puisqu'elle
éprouve
la
qualité
de
la
communication entre le cheval et son cavalier.
C'est la première discipline pratiquée par le
débutant qui devra tout au long de sa vie de
cavalier affiner ses gestes et attitudes pour obtenir
une attention optimum de sa monture. Les
Alors rendez vous à Allègre en août 2017.
39
dans un parcours d'obstacles recréant les
conditions d'un travail de gardiennage et de
conduite de troupeau, authentique association
Autres évocations de transhumances
La grande transhumance a depuis longtemps
disparu dans notre département. Quelques
troupeaux estivent encore sur les hauteurs du
Cantal, du Sancy, de Pierre-sur-Haute, de
Lozère. Les grands troupeaux monastiques
pratiquaient jadis une transhumance dite
inverse en allant hiverner en basse Ardèche ou
même aux Baux-de-Provence. Outre la Noire
du Velay, d'autres fêtes célèbrent ces
mouvements de troupeaux à la recherche
d'herbages abondants. Il en est ainsi en
Margeride, région naturelle de transhumance
pour les troupeaux du Midi, et au Lizieux
grâce à un berger originaire d'Arles.
entre l'homme et le chien.
Une mise en scène montre les techniques
anciennes de mise au parc du troupeau, du
tournage du parc, aux abords de la cabane de
berger qui abritait le berger lors de ses
déplacements. Une autre scène décrit la patche,
négociation du prix entre berger et marchand
de moutons.
Les chèvres sont aussi de la fête. On peut les
caresser car elles sont familières et aussi
essayer de les traire… une expérience qui plait
toujours aux enfants et aussi aux adultes.
Pour mettre de l'ambiance, un concours pour
estimer le poids d'une belle génisse de race
Hérens, permettra au gagnant d'emporter une
vraie cloche d'alpage. L'estimation du poids
d'un animal faisait partie des qualités d'un bon
éleveur, tant pour vendre que pour acheter.
Les métiers anciens ne sont pas oubliés avec
des démonstrations de dentellières penchées
sur leur carreaux et faisant chanter les fuseaux.
Les Ateliers de la Bruyère proposent des
démonstrations de feutrage de laine de pays et
exposent leurs réalisations.
Des machines de tous les âges et
en parfait état de marche laissent
apprécier les progrès de la
mécanisation agricole: tracteurs,
curieuse batteuse au fléau…
La vieille langue que parle
encore les Anciens, l'occitan
appelé communément patois,
n'est pas oubliée et l'on peut
s'essayer à une dictée…
Une originalité de cette fête est
l'animation théâtrale sur le
thème du berger "Le conte de la
première bergère du village", un
conte vivant écrit par André
Gibert et mis en scène par
Patrice Marsollier, avec environ
La fête des bergers à Venteuges
Devenue traditionnelle, elle se tient le premier
samedi d'août, cette année le 6 août à
Venteuges. C'est une journée bien particulière
dans cette petite commune de Margeride qui
compte encore 4000 brebis, essentiellement de
race Blanche du Massif central appelée jadis
Blanche de Lozère, et Lacaune pour les
producteurs de lait de brebis. Venteuges se
plait ainsi une fois l'an à célébrer cette vie agripastorale qui a tant marqué ce pays de tradition
ovine. Cette fête est toute simple, autour du
berger avec son troupeau de brebis et ses
chiens. C'est l'occasion de retrouver des savoirfaire et des gestes authentiques avec ceux-là
même qui les ont pratiqués pendant toute leur
vie.
La matinée est consacrée à une randonnée
guidée et contée sur les chemins
qu'empruntaient les bergers. Le
départ est donné à 8 heures près
de la cabane du berger et du
parc de brebis pour revenir à
Venteuges à l'heure du repas.
Les randonneurs sont conviés au
casse-croûte au couteau dans le
pré à l'entrée du village : pain de
seigle, lard, saucisse, fromage
de brebis, gâteaux, vin et café.
L'après midi est consacré à
diverses animations.
Le concours de chiens de berger
met aux prises plusieurs
éleveurs avec leurs chiens. Le
berger commande son chien qui
doit déplacer un lot de brebis
40
Il a gardé la race exploitée en Arles, plus
précisément le Mérinos d'Arles, 200 brebis
environ et leurs 180 agneaux. Cette race élevée
pour les agneaux et la laine, fut améliorée dans
le sud-est de la France au cours du XIXe
siècle, par croisement de brebis locales avec
des béliers mérinos espagnols déposés à la
bergerie impériale d'Arles qui a fortement
contribué à diffuser cette race dans la région à
partir de 1804. Par l'apport de sang mérinos,
race réputée pour sa toison, on cherchait tout
d'abord à produire de la laine. Le mérinos
d'Arles est un mouton de petite taille et doté
d'une grande rusticité. La laine recouvre
l'intégralité du corps, y compris le front, les
joues et les pattes. La tête porte des cornes
enroulées en spirales chez le mâle, Le mérinos
d'Arles est un mouton de petite taille et doté
d'une grande rusticité. La tête porte des cornes
enroulées en spirales chez le mâle. Elevé en
grands troupeaux, il est bien adapté à la
transhumance entre la plaine de Crau et la
haute montagne l'été.
La transhumance partait à 10 heures de la place
centrale au Mazet-Saint-Voy en direction du
village de la Chèze. Arrivé au hameau, il était
possible de prendre un repas, cuit au four à
pain : pain, pizza, estouffe, grillades d'agneau
et tarte.
Des animations, dès l'après-midi, permettaient
de mieux connaître le métier de berger : tonte,
parage de pieds.
40 comédiens amateurs, adultes et enfants, de
Venteuges. Deux représentations se tiennent à
16 h et 17 h 30.
Cette animation fait partie des activités de
l'Association "Chemins en Gévaudan" qui
propose des randonnées : une randonnée par
mois ; randonnées à thème : chemins de
traverse (patrimoine) en février, chemins de
paix en mars, flore en juin, nocturne en
septembre ; grande randonnée d'une semaine
en mai ; week-end en septembre.
"Chemins en Gévaudan" est à l'origine d'autres
animations : concerts, théâtre, causeries,
lecture à voix haute, atelier théâtre, atelier
lecture, atelier patois vivant à Venteuges ; Fête
des bergers à Venteuges le premier samedi
d'août.
Elle produit d'autre part La Feuille Bleue, un
bulletin mensuel donnant le compte-rendu des
activités de l'association et le programme du
mois.
Transhumance du Lizieux
Yves Jouffrey, originaire justement de régions
transhumantes et berger à "La Bataille" au
Mazet-Saint-Voy, a eu l'idée d'évoquer cette
pratique ancestrale.
Un nom prédestiné pour cette ferme qu’Yves
et sa compagne Claire ont achetée en janvier
2012 et qui marque l’aboutissement de longues
démarches et de pas mal d'échecs ." Cela
restera un peu notre bataille à nous, c’est sûr !
Ici aussi les vents se battent. Les jours où la
burle se lève, ça me rappelle un peu le mistral.
Cela fait maintenant trois ans que nous
travaillons sur ce projet " explique Yves.
Originaire d’Arles, lui-même fils et petit fils de
bergers, « les brebis, je suis né avec », comme
il aime à dire. Impossible de s'installer dans sa
région natale essentiellement à cause du prix
du foncier, alors comme son épouse est
originaire du Mazet, ils ont saisi cette
opportunité.
Depuis, chaque année, cette randonnée avec les
moutons et les brebis, entourée de promeneurs,
est l'occasion de fêter cet animal à laine et de
faire connaître les produits d'Yves Jouffrey,
qui enfile cape et chapeau, long bâton à la
main. Son idée est de vendre sa production en
circuit court et à terme de proposer des plats
cuisinés à base d'agneau et de produits locaux
comme le chou... de vieilles recettes de sa
grand-mère !
41
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À l’automne 1869, nous sommes à la fin du Second Empire, mais personne ne l’imagine, en
revanche on a une préoccupation immédiate dans la commune de Grèzes, située à quelques kilomètres
de Saugues, car un fléau vient de la toucher : la rage.
Le 25 octobre 1869, l’adjoint au maire de Grèzes, Jean-Claude Mazel1, écrit au préfet2 pour
l’informer, « en exécution de l’arrêt du Conseil d'État du 19 juillet 1746, que la maladie de la rage
vient de se manifester dans la commune et notamment au village de Grèzes ». Il décrit ensuite ce qui a
été observé :
Pendant le mois de septembre et aux premiers jours d’octobre plusieurs chiens atteints
d’hydrophobie avaient parcouru le pays. Le 6 octobre surtout un chien de berger d’origine inconnue
s’est jeté au milieu des bêtes à cornes du village de Grèzes et en a mordu un grand nombre, avant-hier
une vache appartenant au sieur Antoine Salgues et hier une génisse appartenant au sieur Joseph Ombret
ont donné des signes non équivoques de cette terrible maladie. Ces deux bêtes faisaient partie du
troupeau attaqué le 6 octobre3. Il est fort à craindre que bon nombre de bêtes ne soient infectées.
En conséquence il demande au préfet « d’envoyer d’urgence le vétérinaire que bon vous
semblera pour prévenir les accidents qui sont imminents. Je ne doute pas que dans votre haute
sollicitude vous ne donniez des ordres précis pour arriver à ce résultat ». En attendant le spécialiste, il
indique les mesures décidées : « les précautions nécessaires en pareil cas ont été prises par mes soins.
Les animaux malades sont séquestrés. Tous les chiens suspects ont été abattus. Et je ne laisserai point
abattre les animaux malades ou qui peuvent le devenir avant l’arrivée du vétérinaire afin qu’il puisse
s'édifier d’une manière exacte ».
Le préfet, dès le 27 octobre, s’adresse à « M. Pascal, vétérinaire de la 2e circonscription » qu’il
« invite » à se rendre à Grèzes afin de se « concerter avec l’autorité municipale pour prendre les
mesures exigées en pareil cas » et lui demande de lui « adresser aussitôt que possible un premier
rapport sur cette affection et sur les moyens employés pour la combattre ». Il précise enfin que pour le
paiement de ses honoraires le vétérinaire devra joindre à ses « états de dépenses une copie de la
présente lettre » qui a donc valeur d’ordre de mission.
Un second courrier relatif à la rage arrive sur le bureau du préfet, c’est une lettre de son
collègue de la Lozère, datée du 29 octobre, qui lui signale qu’il est « informé que des chiens
hydrophobes4 parcourent depuis quelque temps le canton de Langogne ». Il cite le cas d’un employé
du chemin de fer qui « vient de mourir dans d’horribles souffrances, victime d’une morsure qui lui fut
fatale le 12 août dernier dans la ville de Langogne, par un chien enragé ».
En conséquence, il a donné des instructions « pour qu’il soit pris immédiatement des mesures par les
autorités locales en vue de prévenir de nouveaux malheurs » et précise « J’ai cru devoir porter à votre
connaissance les faits qui précèdent afin que, de votre côté, vous puissiez, s’il y a lieu, prendre telles
mesures que vous jugerez convenables ». Il est évident que les limites départementales ne sont pas des
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frontières pour les animaux et les maladies et il est préférable d’étendre les mesures au-delà d’une
circonscription territoriale.
À Grèzes, on est toujours dans l’attente du vétérinaire, aussi le 31 octobre, Jean-Claude Mazel,
l’adjoint de Grèzes, écrit une nouvelle fois au préfet, il rappelle son courrier du 25 et ajoute :
Je vous prierai donc instamment d’envoyer le vétérinaire afin qu’il puisse enrayer les progrès de la
maladie. On n’évalue pas à moins de 40 le nombre de bêtes mordues par ce chien. Le 24 la rage s’est
déclarée chez deux vaches. Le 27 deux autres ont manifesté les mêmes symptômes. Aujourd’hui 31, une
cinquième bête vient encore de donner des signes certains de la maladie. Les propriétaires de Grèzes
sont dans la consternation, ils vous supplient de donner des ordres afin que le vétérinaire que vous
voudrez bien désigner ne mette aucun retard à se rendre à Grèzes pour aviser comme il l’entendra aux
moyens à prendre sur les animaux mordus chez qui la maladie ne s’est point encore manifestée.
Le 2 novembre, le préfet qui a fait son travail, s’adresse une nouvelle fois au vétérinaire, mais
désormais fois ce n’est plus une « invitation » à se rendre sur place :
Le 27 octobre dernier j’ai eu l’honneur de vous inviter à vous transporter à Grèzes et à vous
concerter avec l’autorité municipale pour arrêter les progrès de la rage parmi les bêtes à cornes mordues
par des chiens hydrophobes.
M. le maire me rappelant cette affaire je vous prie de ne pas différer plus longtemps de vous rendre
sur les lieux et de prendre les mesures exigées en pareil cas.
Le lendemain, 3 novembre, le Préfet adresse un courrier aux maires des communes de SaintHaon, Rauret, Saint-Étienne-du-Vigan, Pradelles, Monistrol-d’Allier, Alleyras, Saint-Christophed’Allier et Vabres, les informant que « des chiens hydrophobes parcourent les bords de l’Allier et [ont]
mordu quelques personnes » et il ajoute :
La loi vous a donné les moyens de parer aux événements fâcheux que pourraient occasionner les
chiens dangereux. D’après l’arrêté général du 27 messidor an V, vous pouvez faire tuer ceux qui se
trouveraient dans cet état et prescrire de tenir à l’attache les chiens mordus ».
Dans l’intérêt de la sécurité publique je vous recommande de prendre les mesures destinées à
prévenir de nouveaux malheurs.
Les documents ne nous permettent pas d’aller plus loin dans cette affaire, on peut penser que le
vétérinaire s’est enfin rendu à Grèzes, mais nous retenons de ces quelques lettres qu’en cette fin de
XIXe siècle, la rage est un véritable fléau qui peut avoir de graves conséquences humaines mais aussi
économiques5 en décimant une partie du cheptel.
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supplémentaire de la légion d’honneur est
même créée en 1932 pour les mutilés à 100 %.
Ces médailles envoient bien un signe à celui
qui la voit et distingue celui qui la porte. Mais
cela a-t-il suffi ? Certes, des campagnes de
presse ont été organisées pour héroïser les
soldats blessés, pour magnifier leurs infirmités.
Le sacrifice d’une vie entière, la gloire et la
compassion étaient-elles une compensation
suffisante pour oublier la guerre, pour dépasser
leurs handicaps et les mutilations de leur chair
et de leur esprit ?
Le législateur va s'emparer du problème et
élaborer deux lois dont nous donnons le contenu.
La loi de 1916 s’adressera aux seuls militaires
(et pas à leurs ayants droits), et le classement
se fera selon la composition de leurs familles. Celle de 1923 s’adressera aux militaires et
enfin aux ayants droits : veuves et orphelins
mais aussi aux « compagnes ». Et le classement se fera par rapport à la gravité des blessures.
Les mutilés de la Première Guerre
Mondiale
Des médailles, des pensions, des emplois
Proportionnellement à sa population, la France
est, parmi les belligérants de la Première
Guerre mondiale, le pays qui a perdu le plus
grand nombre d’hommes : un soldat sur cinq y
est mort (plus d’1,4 million au total). Mais
c’est sans compter plus de trois millions de
blessés dont près d’un million a droit au versement d’une pension d’invalidité (600 000
invalides, 300 000 mutilés et amputés, 42 000
aveugles, 15 000 gueules cassées). 100 000
« soldats de la honte », marqués psychologiquement par la guerre, ne furent jamais pris en
considération mais plutôt stigmatisés comme
lâches, tout comme les « mutilés volontaires ».
Le visage de la France a totalement changé au
lendemain de la Grande Guerre. Les gueules
cassées, les mutilés dans leur fauteuil roulant,
les amputés en béquille, ou ceux dont la manche vide est glissée dans la poche de la veste,
les aveugles. Tous les jours, ils rappellent à la
population les horreurs de la guerre et les sacrifices qu’ils ont subis dans leur chair pour la
patrie. Mais cette patrie est-elle reconnaissante ? Les regards détournés, les fiançailles
rompues, les difficultés professionnelles ne
sont-ils pas autant de symboles du malaise de
la population face à leurs handicaps ? Valait-il
La loi du 17 avril 1916
Le bénéfice de la Loi ne vaut que pour 5 ans à
dater du jour de la fin des hostilités. Mais heureusement cette échéance sera à de multiples
reprises prorogée. L’avantage n’est pas fonction du grade, ni de la durée de service. Il est
fonction de la composition de famille et non de
la gravité des blessures. La gravité des blessures permet d’entrer dans la catégorie, mais
ensuite c’est la composition de famille qui
décide du reste. Pour obtenir un poste, il faut
en avoir les diplômes et les qualifications intellectuelles et physiques. Il n’y a pas de dérogations et les exigences sont lourdes. Des commissions militaires décident si quelqu’un est ou
non apte à exercer une profession. Si la profession exige un diplôme, il faut, sans discussion,
avoir au préalable ce diplôme. En cas d’ex
aequo pour un poste, la préférence ira au père
de famille la plus nombreuse, puis à celui dont
l’infirmité est la plus grande, puis à celui qui a
eu le meilleur classement aux examens. Les
postes à fournir ne sont guère attractifs. Il y a
cependant quelques exceptions : instituteurs,
conducteurs de travaux, facteurs-receveurs,
télégraphistes, et aussi quelques bizarreries :
gardiens de phare. Aucune société ne pourra
plus répondre à des adjudications si elle
n’accepte pas de reprendre en son sein des
invalides de guerre. Les militaires, même parfaitement valides, qui exerçaient avant guerre
mieux mourir pour obtenir la gloire ? Il y a
bien eu les médailles octroyées par l’Etat, en
reconnaissance de leur bravoure, de leur courage, de leur exemplarité. Une petite étoile
rouge dont le nombre dépend du nombre de
blessures est instaurée en 1916. Une catégorie
44
Seine réceptionnant un nombre beaucoup plus
élevé de demandes d'emploi que les autres. La
plupart obtiennent un emploi à Paris ou dans
ses banlieues. La loi leur réserve 600 types
d’emplois divers, représentant 240 000 postes
de travail. Ces emplois appartiennent aux quatre catégories de qualification, la catégorie 1
renvoyant aux fonctions qui sollicitent un haut
niveau de qualification et la catégorie 4 à celles
qui en nécessitent pas ou peu. La loi vise ainsi
à répondre aux profils professionnels de l'ensemble des victimes de guerre, des plus aux
moins instruites ou aptes physiquement. Mais
dans la réalité, la majorité des emplois que les
victimes de guerre demandent et obtiennent
appartiennent à la quatrième catégorie, la plus
accessible. Aussi petit soit le salaire que leur
procure ces postes qui ne requièrent pas ou peu
de qualification, il leur est nécessaire pour
survivre, car la pension de guerre était insuffisante. Hormis les pensions des grands invalides (infirmes à 85 % ou plus) dont le montant
leur permet d'être à l'abri du besoin, les autres
ont une valeur essentiellement symbolique
pour les engager à se réinsérer socialement.
En 1928, une veuve de simple soldat non
remariée touche une pension annuelle de 4,64
francs par jour, alors que le
prix d'un kilo de pain s'élève
à 2,11 francs et le litre de lait
à 1,45 francs. Il faut ajouter
les frais nécessaires pour se
loger et se chauffer. Ainsi,
devenir ouvrière d'une manufacture de tabac ou gérante de
cabine téléphonique, dont le
salaire procure en 1929 entre
22 et 25 francs par jour est le
meilleur moyen pour une
veuve de trouver une situation
stable, d'autant plus stable que
c'est en tant que titulaires et
non qu'auxiliaires temporaires
que les bénéficiaires de la loi
de 1923 sont recrutés dans la
fonction publique. L’Etat est
dans les faits le seul qui appliquera le droit. La loi du 26
avril 1924 sur l'emploi obligatoire des mutilés
de la guerre dans les exploitations industrielles,
commerciales, agricoles et forestières est très
peu, voire pas du tout appliquée. La réparation
due par l'Etat à l'invalide revêt deux formes :
l'indemnité représentée par la pension et la
faculté donnée à l'invalide de surmonter
un emploi dans une société ont priorité sur les
militaires invalides mais qui n’exerçaient pas
d’emploi dans cette société. Cette préférence
commence dès la promulgation de la loi, mais
pour un nombre restreint du total des postes à
pourvoir. La loi ne sera valable pour tous les
postes à pourvoir qu’une fois la guerre terminée. Cette loi très restrictive est revue après la
fin du conflit.
La loi du 30 Janvier 1923
Elle s’adresse à un bien plus large public : non
seulement 1 million d’invalides, mais aussi
600 000 veuves et 550 000 orphelins de guerre
avec en plus les victimes civiles féminines et
masculines qui se voient accorder un accès
prioritaire à ces emplois. Dans les faits, quelques 150 000 victimes de guerre ont pu bénéficier d'un emploi réservé, c'est à dire moins de
10 %. Les mutilés sont en grande majorité des
célibataires sans enfant, « grands mutilés »
avec des probabilités réduites de mariage. Les
bénéficiaires féminines sont pour les trois
quarts des mères de famille nombreuses. En
1923, la très grande majorité des victimes de
guerre ont déjà plus de 30 ans, les combattants
et donc les veuves des combattants, sont restés
mobilisés plusieurs années. La loi s'adapte
d'ailleurs à cette réalité
démographique en stipulant que ces ayants droit
peuvent faire acte de
candidature sans condition d'âge. Dans le même
temps, les dispositions de
la loi, initialement valables pour cinq ans, sont
constamment prorogées,
et permettent ainsi aux
victimes de guerre de
postuler un emploi réservé jusqu'en décembre
1939. Ainsi celles qui
sont nommées au cours
des années 1930 ont alors
en moyenne une quarantaine d'années. Ces mutilés, veuves, orphelins et victimes civiles ont pu
faire valoir leur droit sur l'ensemble des territoires placés sous autorité française, métropole
et colonies, à tous les échelons administratifs,
des communes aux ministères. Néanmoins, la
plupart ont déposé leur candidature dans les
corps d'armée des grandes villes, celui de la
45
l’handicap à l’embauche pour malgré tout
avoir une carrière compatible avec ses aptitudes physiques et professionnelles. Ces deux
formes de réparation se complètent : l'Etat doit
à l'invalide la pension et le reclassement social. La France, qui a perdu 1 408 000 de ses
enfants, morts ou disparus a besoin, pour son
relèvement économique, de l'effort laborieux
de tous les autres, valides comme invalides.
Pour le reclassement social, la sélection se fait
en deux temps. Tout d'abord, les candidats
doivent prouver qu'ils remplissent les conditions pour postuler à l'emploi qu'ils désirent, en
fournissant les documents administratifs
correspondants : médicaux, militaires et civils
(composition de famille et diplômes). Ensuite,
ils sont soumis à des épreuves d'aptitude physique et professionnelle. Les épreuves sont
difficiles car il ne saurait être question de
transformer les administrations en œuvres de
charité. Les épreuves que doivent passer les
candidats sont d'un niveau de difficulté comparable aux examens des candidats ordinaires. A
l'issue de ces épreuves, les commissions délivrent ou non le certificat attendu. Une fois en
poste, les candidats sont souvent soumis à un
stage probatoire plus ou moins long à l'issue
duquel ils peuvent être remerciés ou titularisés. Dans ce cas, ils obéissent aux mêmes rè-
le droit de recours des ayants droit devant le
Conseil d'Etat et la création d'une commission
de contrôle dont la fonction est de veiller à
l'application de la loi et d'en repérer les différentes violations. Cette commission, qui s'informe principalement auprès des victimes de
guerre, est tenue de remettre un rapport annuel
au ministre des pensions, publié ensuite au
Journal Officiel. Les parlementaires ont pris
de nombreuses dispositions pour favoriser le
reclassement des victimes de guerre face à des
administrations souvent réticentes. Mais ces
dispositions s'avèrent inefficaces, le nombre de
reclassés étant bien inférieur à leurs prévisions.
Ce résultat jugé décevant par les parlementaires n'est pas à mettre sur le compte d'une quelconque désaffection des victimes de guerre. Au
contraire, elles tentent de faire valoir leur droit
de manière massive, mais celui-ci est rarement
satisfait. Les informations statistiques révèlent que la proportion de candidats classés ne
représentent jamais plus de la moitié des postulants. Les victimes de guerre font cependant
tout pour se recaser et accroître leur chance
d'être classées. Elles déposent en moyenne
deux demandes chacune et, si elles n'ont pas
obtenu satisfaction, renouvèlent leur candidature aux trimestres suivants, parfois pendant
plusieurs années. La principale raison de ce
semi-échec est l'existence d'une forte discordance entre l'offre et la demande. Le nombre
des emplois est très élevé et pourrait donc numériquement répondre à la demande. Mais ils
ne correspondent pas aux profils professionnels des candidats qui ont pour la plupart un
niveau de qualification assez faible. Pour les
emplois de 2ème ou 3ème catégorie qui requièrent
des aptitudes physiques et professionnelles
assez élevées, le nombre de postes excèdent
souvent le nombre de candidats, tandis que les
emplois de 4ème catégorie, quoique rares, sont
abondamment postulés. Les insatisfactions ne
se font pas entendre seulement au niveau de la
sélection qui précède le classement, elles se
manifestent aussi au moment de l’attribution
de la localisation du poste. En effet, il est courant que les candidats ne soient pas affectés
dans le lieu géographique qu'ils auraient souhaité. C'est souvent le cas des candidats provinciaux ; la plupart préfèreraient rester dans
leur région, mais ils sont contraints de venir à
Paris, seul endroit où un emploi leur est proposé rapidement. S'ils ne s'en contentent pas, ils
peuvent attendre plusieurs mois voire plusieurs années avant d'être nommés là où ils le
gles de mutation, de traitement et de discipline
que tous leurs autres collègues. Alors que la
loi de 1916 classait les « reçus » en fonction de
leur situation de famille, la loi de 23 les classe
en fonction de la gravité de leurs blessures. Les
veuves et compagnes, qui ne sont pas atteintes
physiquement, sont classées d'après leur nombre d'enfants. Enfin, toutes les décisions ou
informations relatives aux emplois réservés
sont rendues publiques : listes de classement,
nominations, offres d'emploi, composition des
différentes commissions, et sont publiées au
Journal Officiel. Pour servir de garde fous,
deux autres dispositions sont mises en place :
46
veulent. Ce problème des candidats déracinés
ne sera jamais résolu. La procédure n’est pas
en outre fort documentée. La liste des emplois
réservés est tenue par les brigades de gendarmerie à la disposition des victimes de la
guerre, liste sèche sans aucun renseignement
complémentaire, aucune explication, aucune
précision. Il en résulte des malentendus et un
surcroît de travail pour l’administration submergée de demandes inutiles. Les postulants
consultent donc la liste et choisissent l’emploi
d’après sa dénomination, sans trop savoir en
quoi il consiste au juste. Les commissions médicales et professionnelles sont également mises en cause. De l'avis des victimes de guerre
leur évaluation est trop sévère, exigeant parfois
un niveau d'aptitudes injustifié au regard de
l'emploi sollicité. C'est pourquoi la commission de contrôle révise ces demandes à la
baisse. Les administrations, quant à elles, ne se
plient que très difficilement aux termes de la
loi de 1923, usant pour la contourner de toutes
sortes de stratagèmes. L'un des plus aisés et
probablement des plus pratiqués est de ne pas
déclarer le nombre réel d'emplois vacants,
quand ceux-ci sont comblés par du personnel
auxiliaire. Une pratique plus subtile est de
créer de nouveaux postes, non répertoriés dans
la nomenclature des emplois réservés, assurant
exactement les mêmes fonctions sous couvert
d'une nouvelle dénomination. Les parlementaires ripostent. Ces deux « astuces » sont combattues par la loi prorogative de 1928. Dans les
commissions médicales et professionnelles
devra siéger un invalide de guerre. Tout nouveau poste ne pourra être créé que par une loi,
et non un décret ou une circulaire du département administratif. Pour ces nouveaux postes
créés, une proportion d'emploi réservée sera
systématiquement envisagée. Ces mesures de
la fin des années 1920 semblent avoir eu quelques effets. Certaines administrations, comme
par exemple celle des Postes et Télégraphes,
remplissent progressivement leurs obligations
envers les victimes de guerre. Au final, le bilan
vaut ce qu’il vaut, mais le schéma global a été
repris, en 1946, pour reclasser les victimes de
la Seconde Guerre mondiale.
Le problème de l'abandon des terres.
La question des terres abandonnées pendant la
guerre vient d'être posée devant l'opinion par
un projet de loi et par un décret que nous avons
publiés.
Quelles sont les causes de cet abandon des
terres ?
Avant la guerre, il y avait l'exode rural, mais
l'abandon ne se faisait que pour des terres de
mauvaise rendement et sur une échelle insignifiante.
Depuis l'ouverture des hostilités, d'excellentes
parcelles sont aujourd'hui improductives. Ce
sont elles que visent le projet et le décret ministériels.
La principale cause de ces abandons est évidemment la mobilisation des exploitants habituels : propriétaires, fermiers, métayers, régisseurs, ouvriers... Par elle, le manque de maind'œuvre qui existait déjà auparavant a été largement agrandi. Puis le défaut de personnel
s'est doublé d'un défaut des moyens d'exploitation par suite des réquisitions d'attelages, des
difficultés de transport, du renchérissement du
prix des matières premières, qui ont privé les
agriculteurs des objets indispensables à leurs
travaux. On a bien cherché des palliatifs. Le
ministre de la Guerre et celui de l'Agriculture
ont fait des efforts méritoires, mais la pénurie
d'hommes vigoureux reste toujours une grosse
entrave à la reprise de la vie agricole. Beaucoup de femmes se sont mises courageusement
à l'œuvre pour remplacer le mari absent, mais
d'autres, malheureusement, ayant des allocations de 100 francs et plus par mois, estiment
qu'au lieu de se donner de la peine pour travailler, il vaut mieux vivre à ne rien faire avec la
petite rente de l'Etat.
La conduite d'un domaine exige, du reste, certaines connaissances qu'une femme ne possède
pas toujours.
A ces causes de l'abandon des terres, qui sont
directement d'ordre militaire, s'ajoutent celles
dont le caractère principal est d'ordre économique. Avec la prolongation des hostilités,
bien des exploitants ont épuisé leurs ressources. De nombreux propriétaires sont euxmêmes dans l'impossibilité d'avancer les capitaux que réclame la culture. Un nouveau facteur est encore intervenu, qui a compliqué la
situation dans les exploitations faites par métayage. A son entrée dans le domaine, le métayer reçoit du propriétaire un cheptel dont il
est comptable. Il doit le restituer en argent ou
en nature à sa sortie. La différence en plus ou
Le cas de l'agriculture
La guerre a décimé les campagnes et provoqué
un abandon accéléré des terres. Les causes en
sont analysées dans l'article suivant publiée
dans La Vie Agricole. 1916. N° 11.
47
Cote d'Or. Ecole d'agriculture de Châtillon-surSeine.
Creuse. Ecole pratique de Genouillac
Doubs. Ecole de laiterie de Mamirolle.
Eure. Institut militaire belge de Port-Villez
près Vernon.
Gers. Ferme école de la Hourre. Ecole d'apprentissage agricole à Auch.
Gironde. Ecole pratique de la Réole.
Haute-Garonne. Ecole pratique de Ondes.
Haute-Marne. Ecole nationale d'osiériculture
de de vannerie de Fayl-Billot.
Hérault. Ecole nationale d'agriculture de
Montpellier.
Ille-et-Vilaine. Ecole nationale d'agriculture de
Rennes.
Jura. Ecole de laiterie de Poligny.
Loire. Ecole de mutilés de Saint-Etienne.
Loire-Inférieure. Ecole pratique de GrandJouan.
en moins revient à chacun par moitié. Or, les
hostilités ont amené une hausse considérable
du bétail : un cheptel de 10 000 francs avant la
guerre, valait 13 ou 14 000 francs il y a quelques mois. Des métayers en ont profité pour
vider les étables, quelquefois même à l'insu du
propriétaire. Puis, après avoir réalisé du coup
un beau bénéfice, ils s'en sont allés à la ville
où, pour les récompenser d'avoir quitté la terre,
l'Etat leur alloue généreusement, chaque jour,
une allocation de chômage !
Enfin, dans certaines régions, la direction des
exploitations est rendue très difficile aux femmes par les prétentions des travailleurs.
Le sort des mutilés agricoles
Pour pallier à cette pénurie de main d'œuvre
dans les campagnes, le ministère de l'agriculture souhaite que même les mutilés retournent à la terre ou du moins dans leur village
quitte à pratiquer un
métier d'artisan rural.
Ainsi se mettent en
place des établissements de rééducation
agricole dans un certain nombre de départements, liste publiée
dans la Vie Agricole
de 1916, numéro 49.
Cette même revue
publie des articles de
propagande pour ces
établissements. Nous
en reprenons certains.
Oise. Institut agricole de Beauvais.
Rhône. Institut agricole de Limonest près
Lyon.
Saône-et-Loire. Ecole pratique de Fontaines.
Seine-et-Oise. Ecole nationale d'horticulture de
Versailles. Ecole nationale d'agriculture de
Grignon.
Bergerie nationale de Rambouillet. Centre de
rééducation agricole de la ferme de Champagne près Juvisy.
Yonne. Ecole pratique de la Brosse.
Liste des établissements de rééducation
agricole par département
Allier. Etablissement agricole de Sept-Fons par
Dompierre-sur-Bèbre, destiné aux aveugles de
guerre. L'Association Valentin Haüy pour le
Bien des aveugles leur a assuré le concours
d'un agriculteur aveugle comme formateur.
L'établissement agricole est tenu par des moines trappistes.
Ariège. Ferme école de Royat
Aveyron. Ecole d'agriculture de Montagnac,
par Gages
Cantal. Ecole d'agriculture d'Aurillac
Charente. Ecole pratique de l'Oisellerie
Charente-Inférieure. Ecole de laiterie de Surgères. Ecole de tonnellerie de Saintes.
Cher. Ferme école de Montlouis
.
La remise au travail des mutilés
(par M. Souchon, professeur à la Faculté
de Droit, secrétaire général de la Fédération des Mutilés. La Vie agricole. 1916.
N° 38)
Quand la mutilation amène des impossibilités
trop grandes, on cherche une spécialité, et elle
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faire œuvre patriotique, en faisant place chez
eux à un mutilé. Seulement, il faut le former.
On pourra, dans ce but, mettre des hommes
présentant toutes les garanties morales nécessaires en pension chez des gardes de l'Etat qui
leur apprendront leur métier. Ce sera une heureuse collaboration entre l'initiative privée
payant les frais, et l'administration apportant la
compétence de son personnel. Il est à remarquer, d'ailleurs, qu'il ne s'agit plus là seulement
de réhabituer à l'ancien métier et nous sommes
déjà, comme d'ailleurs avec les écoles en vue
de spécialités agricoles, dans le domaine de la
rééducation.
Il y a aussi à tenir compte de considérations de
l'ordre social et de l'ordre moral.
On ne doit pas apprendre le même métier à un
citadin et à un rural.
L'homme du village doit y retourner. Un effort
considérable est à faire pour ne pas le déraciner. Il pourra très utilement , s'il ne peut pas
continuer à travailler le sol, se faire tailleur,
cordonnier ou bourrelier. Chacun de ses métiers, malgré la concurrence grandissante des
villes, peut convenablement nourrir son
homme, fût-ce seulement par les réparations,
en lui donnant une assez grande indépendance ; il est d'ailleurs à remarquer que la rééducation pour la campagne doit être comprise
autrement que celle pour la ville. Quant un
mutilé est destiné à rentrer dans son village,
par exemple comme tailleur ou cordonnier, il
n'est pas nécessaire qu'il soit devenu un ouvrier
particulièrement habile. Il serait même dangereux de pousser sa rééducation trop loin, car
alors il trouverait de gros salaires qui l'empêcheraient de retourner chez lui. Au contraire,
s'il s'agit d'un homme qu a des attaches urbaines, qu'il ne saurait être question de diriger
vers la campagne, la rééducation doit être
beaucoup plus complète.
se trouve toujours dans l'infinie variété des
métiers agricoles.
La Société des agriculteurs de France, toujours
à l'affût du bien à faire, est entrée dans cette
voie. Grâce a ses soins, l'Ecole de Beauvais est
prête à recevoir des grands blessés. La Fédéra-
tion des mutilés y enverra quelques-uns de ses
protégés.
D'autres tentatives presque analogues doivent
également être mentionnées. C'est ainsi que M.
Hanotaux à organisé une école de bergers à
Rambouillet. L'idée est très heureuse. On sait,
en effet, combien est déplorable le manque de
bergers. Ils ont pourtant de beaux gages, et le
métier peut très bien être fait par des amputés
de bras, beaucoup plus difficiles à employer
que des hommes privés d'une jambe. Le ministère de l'Agriculture ne s'est pas non plus désintéressé d'une question si capitale pour les
intérêts de la culture et pour ceux de nos blessés, et, grâce à lui, des écoles de rééducation
pour diverses spécialités agricoles apparaissent
sur tous les points du territoire. Disons encore
qu'un projet est à l'étude, relatif aux gardes
forestiers. C'est une situation très enviée par
les mutilés. Mais la plupart d'entre eux ne
soupçonnent pas qu'il s'agit de fonctions difficiles et qu'on ne s'improvise pas garde forestier. Il appartiendra à l'Etat de faire une place
aux grands blessés dans le recrutement de ses
gardes, et la direction générale des forêts ne
manquera pas, sans doute, de suivre l'exemple
d'autres administrations, par exemple des
contributions indirectes qui ont très heureusement institué un concours spécial pour les soldats victimes de la guerre. Mais, en dehors de
là, nombre de propriétaires seraient heureux de
( à suivre…)
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Adieu Bernard...
J'ai connu Bernard Féminier à la fin des années 1990. Je travaillais encore à la Chambre d'agriculture et
publiais avec François Ranchoux notre petite revue « Le Souffle de la Neira ». Bernard, d'une grande
curiosité intellectuelle, avait déniché dans un point de distribution un exemplaire de la revue. Il était passé
nous voir pour s'enquérir de notre démarche. Par la suite, il publia un article enthousiaste intitulé « A propos
de la brebis noire de Bains... » dans le Bulletin de la Société académique du Puy-en-Velay de l'année 1999. Il
passait en revue les sept premiers numéros de notre publication et signalait les articles qui l'avaient
particulièrement intéressé. Sa conclusion est élogieuse : « En conclusion, il faut féliciter jean Claude
Brunelin d'avoir su créer un environnement culturel d'une telle qualité autour de la brebis noire de Bains et
d'avoir introduit un brin de poésie, de rêve et d'imagination dans un domaine où il n'est le plus souvent
question que de rentabilité et de productivité ». Très intéressé, je suivais depuis longtemps les compte-rendus
de la Société académique dont Bernard faisait partie du conseil d'administration. C'est donc tout
naturellement que je lui ai demandé de me parrainer pour en faire partie, ce qu'il fit avec une grande
gentillesse.
Bernard a vécu sa jeunesse au gré des affectations de son père qui travaillait à la SNCF. Ainsi il est né le 27
septembre 1923, à Saint-Germain-des Fossés dans l'Allier, un important carrefour ferroviaire. Il a passé une
bonne partie de son enfance à Langogne en Lozère, département d'origine de son père. Il entame ensuite son
cycle secondaire au PNDF de 1934 à 1941 et obtient son bac Math-Elem. Le Frère Joseph Paulhan (Frère
Nozier) est de sa parenté et n'est sans doute pas étranger au choix de cet établissement. Le Frère Paulhan,
décédé le 5 mars 1948, est organiste, professeur de dessin et photographe. Remarquant le bon coup de crayon
de Bernard, il participera peut être à son orientation après le bac. Bernard passe un concours d'entrée aux
Ponts et Chaussées. Il est reçu et y fera toute sa carrière, principalement à Pradelles et Saint-Julien-Chapteuil,
accédant au grade d'ingénieur des Travaux publics. Je ne l'ai pas connu pendant sa vie active mais il a dû être
très compétent et très
attaché aux personnes qu'il
côtoyait, en particulier les
maires qu'il connaissait tous.
Il prend sa retraite en 1982.
Il se marie avec Louise qui
travaille dans l'administration
des Impôts. Elle racontait
parfois les débuts héroïques
lorsque les
calculettes
n'existaient pas encore. Les
Impôts sous-traitaient les
calculs à des particuliers et
Louise
en
vérifiait
l'exactitude. Ils ont eu deux
filles, Chantal, et Françoise
qu'ils ont la douleur de perdre
prématurément en 2006.
Cette peine sera atténuée par
la naissance de 4 petitsenfants et 6 arrières-petitsenfants. Ils habitent un bel
appartement
vers
les
colonnes Michelet et ont
une résidence secondaire
dans le bourg ancien de
Bouzols. L'âge et la fatigue
venant, ils s'en sépareront.
Bernard s'intéresse de près
au patrimoine de Pradelles et
publie en 1963 une
plaquette intitulée « Pradelles
et ses environs ». L'heure
de la retraite ayant sonné, il
va pouvoir se consacrer à sa
passion pour histoire et
patrimoine local au travers
de Société dites savantes : Le
Puy Ville d'Art, Cahiers de
la
Haute-Loire,
Société
académique, Revue du
Vivarais,
Almanach
de
Brioude, Almanach de
l'Eveil et du Renouveau... Il
livre de nombreux articles sur des sujets très variés, montrant ainsi sa grande curiosité intellectuelle. Il publie
régulièrement dans l'Eveil, articles d'histoire locale ou billets d'humeur toujours humoristiques et jamais
blessants. En 1999, on le sollicite pour les commentaires d'un livre illustré de cartes postales « Le-Puy-enVelay et ses environs. Mémoire en images. Sutton Editions ». Nous reprenons dans le Souffle de la Neira une
de ses passionnantes études « Agronomes et agriculteurs progressistes en Velay au 19ème siècle » publiée en
2001 dans les Cahiers de la Haute-Loire. Nous le sollicitons aussi pour la publication collective « 100 ans
d'agriculture en Haute » éditée par la Chambre d'agriculture en 2000, où il nous avait brossé à grands traits
les caractéristiques de ce 19ème siècle. Il est impossible de répertorier toutes ses publications tant elles sont
nombreuses et variées. Inutile de préciser qu'il était connu comme le loup blanc aux archives
départementales et municipales.
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De par sa formation, il aimait le patrimoine bâti et l'architecture. Mais je crois qu'il préférait les hommes.
C'était un vrai bottin de la vie ponote et rien ne lui était étranger. Il connaissait toutes les familles qui
comptaient dans la vie de la cité et sur plusieurs générations. Il était intarissable sur les anecdotes drôles ou
graves qui jalonnaient leur parcours.
Nous parlions souvent de jardinage car il le pratiquait encore dernièrement. Un de ses jardins possédait une
vigne et il produisait un peu de vin. Il m'avait un jour donné de la semence de haricots à rames. Son dernier
jardin était en bordure de Borne. Il passait plus de temps, disait-il, à parler avec les passants qu'à cultiver ses
légumes !
Nous avions aussi évoqué les pays du Sud-Est asiatique, le Vietnam en particulier. Au travers d'une
association caritative, ils avaient parrainé l'éducation d'enfants de ce pays très attachant.
Bernard était de constitution frêle et agile, toujours positif dans le regard qu'il posait sur ce monde dont il
avait connu bien des changements. Il n'avait pas adopté l'ordinateur (bien que Louise ait fait une tentative), ni
téléphone portable. Il préférait le crayon et le papier pour ses recherches et ses nombreux dossiers. Il aimait
faire connaître ses découvertes mais n'y attachait pas grande importance.
Il se déplaçait en vélo, toujours peu habillé et bien entendu sans casque. Des vélos, il en a consommé un
certain nombre : perdus parfois, volés car il ne mettait pas d'antivol. Dernièrement, il circulait encore à vélo.
Quand je lui faisais la remarque que c'était imprudent, il riait, me disant que comme il ne roulait pas très
droit, des automobilistes le traitaient de « vieux c.. »
Il oubliait aussi régulièrement en
réunion
gabardine
et
chapeau. Lui et Louise, adorable
couple, vif et pimpant, ne
craignaient pas le froid, de vrais
ponots habitués aux rigueurs
du climat.
Bernard avait une forte propension
à l'endormissement en cours
de réunion. Il ne devait dormir que
d'un œil, tel le chat, car il
avait toujours des commentaires
pertinents sur la conférence
du jour. J'ai connu une telle
propension chez un ancien
collègue de travail. Une sorte de
mise en veille comme dans
nos ordinateurs !
On rencontrait le couple partout, en
toutes
saisons,
à
la
bibliothèque
municipale,
à
l'Université pour tous, aux
diverses expositions de toutes
natures, au kiosque du Fer à
Cheval pour une aubade musicale...
Ils étaient de plus en plus
proches, Louise devenant plus
fragile. Fin 2015, Bernard a
eu un problème de santé, une
fracture du col du fémur
dont il s'est bien remis. Puis je ne
les ai plus revus en ville.
Après enquête, il est apparu qu'ils
étaient tous deux en maison
de retraite, Louise dans un autre
service, à Bel Horizon, nom
justifié par le vaste panorama sur le bassin du Puy et non par l'horizon plutôt sombre promis aux résidents de
cet établissement. Je lui ai rendu visite un matin car l'après midi, il passait du temps avec son épouse. Il avait
une chambre agréable donnant sur les jardins. Je l'ai trouvé assez en forme, s'ennuyant un peu malgré ses
abonnements à l'Eveil et à la Croix dont il appréciait les analyses pertinentes. Nous avons parlé de la
démolition du PNDF, des études qu'il y avait faites. Il participait à toutes les activités de la maison de retraite,
conférences, animations, cours de gymnastique...Dans l'établissement de retraite, il avait du mal à trouver des
interlocuteurs pour discuter Je suis revenu quinze jours plus tard lui donner le dernier numéro du Souffle de
la Neira. Il n'était pas dans sa chambre mais je l'ai aperçu en séance de gymnastique. J 'ai attendu mais
comme la séance menaçait de durer, je suis parti lui laissant la revue sur son lit. De passage à la bibliothèque
municipale et feuilletant l'Eveil, j'ai trouvé l'avis de décès de Louise, trop tard pour assister à ses obsèques.
Un mois plus tard, jour pour jour, une amie m'apprenait son décès alors que j'étais en Ardèche chez mes
enfants.
Bernard, en relative bonne santé, a dû lâcher prise au décès de Louise. Lorsque je suis en ville ou à la
bibliothèque, je me prends à les chercher des yeux tant ils faisaient partie du paysage ponot. Catholiques
pratiquants, j'ose espérer qu'ils sont réunis tous deux, les inséparables, dans l'au delà et qu'ils ont retrouvé
leurs connaissances disparues avant eux et qui leur manquaient cruellement. Bernard a dû les retrouver avec
joie et rattraper le temps perdu !
Jean Claude Brunelin
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POURQUOI ?
Je voulais, comme à l’habitude, plaisanter un peu nos amis Anglais et leur sortie de l’Europe. Cela fait
longtemps que nous leur avons pardonné d’avoir brûlé Jeanne d’Arc ; et si l’on n’aime pas la panse de brebis
farcie, eux n’aiment pas les escargots, donc « balle au centre ».
Et puis, il y a eu la série d’attentats. Lisa, une de mes petites-filles, était sur la Promenade des Anglais, juste
à l’endroit où le camion a semé le carnage. Par un bienheureux hasard, elle est partie cinq minutes avant le
passage du camion meurtrier. Mais tous les autres ? Les enfants, surtout. Ce sont eux qui réclament avec le
plus d’insistance d’aller voir la débauche de lumières des feux d’artifice, c’est une distraction familiale par
excellence. Tristes personnages qui tuent de pauvres petits innocents avec parents, grands parents… Il y
avait, paraît-il, trente pour cent de musulmans parmi les victimes. Point de regret d’avoir assassiné les leurs,
juste cet éloge funèbre : « ils seront considérés comme martyrs et iront au Paradis d’Allah ».Maintenant,
chaque jour amène son lot de morts ; nul pays n’est épargné. Hier encore, deux hommes ont égorgé un brave
curé de 86 ans qui disait paisiblement sa messe, dans l’église d’une bourgade bien tranquille. Des Croyants
ces assassins ? Non ! Car, bien que je ne sois pas une spécialiste du Coran, il me semble qu’il est écrit que le
plus grand respect est dû aux personnes âgées.
Je viens de publier un roman,
Vivre à Verdun, suivi de
Victoire
traitant
de
la
Résistance en Auvergne. Pour
les écrire, j’ai compulsé
nombres
de
documents,
visionné des téléfilms et me
suis rappelé ces heures
tragiques sous la botte nazie..
Même si je n’étais qu’une
petite fille de six ans, je me
souviens de beaucoup de
choses, je ressens encore, à 80
ans, le poids de l’occupant, la
menace permanente. Puis la
joie de la Libération, mais
aussi les purges, les femmes
tondues alors que beaucoup
n’avaient fait qu’aimer un
homme sans tenir compte de
sa nationalité. Et puis, il y a eu
le retour des hommes, des
femmes, des enfants qui
avaient séjourné dans les
camps de concentration. Bien peu de survivants, hélas…
Ces livres étaient pour moi comme un devoir de mémoire, la plus précise possible pour que nos enfants se
souviennent, mais sans haine. Que plus jamais la barbarie des Nazis puisse se reproduire sous une forme ou
une autre.
Croyez moi, on ne ressort pas indemne d’une telle démarche.
Hélas, la barbarie est de retour, une barbarie aveugle qui ne frappe que des innocents. Et au nom d’un Dieu,
mais quel Dieu ? Pour se venger des Croisades d’il y a 800 ans ? De la colonisation ? Pour dresser les
différentes communautés les unes contre les autres ? Et à entendre certaines paroles de nos hommes ou
femmes d’Etat, ça marche ! Comment le commun des Européens, entre autres des Français, peut-il
s’empêcher d’avoir un regard méfiant en face d’un musulman. C’est humain : qui se cache derrière ce
visage ? La plupart du temps, un brave homme, une brave femme. Mais si c’était un extrémiste ? Attention,
prudence, évitons ces gens -là !
Mon travail, il y a 25 ans, m’a amenée à intervenir dans des familles algériennes. Que sont-ils devenus ?
Qu’es-tu devenue, Madame B ., qui préparais des pâtisseries de ton pays quand tu savais que je venais. Tu
avais tenté sans succès de m’apprendre à faire le thé à la menthe, tu m’avais même rapporté de vacances
dans ton pays, l’Algérie, une « vraie » théière. Et toi, madame M. , qui ne parlais pas un mot de français. Ta
fillette de six ans servait d’interprète, confortablement installée sur mes genoux. Elle m’a même demandé un
jour si je voulais bien la prendre pour petite-fille, pour quelques jours, avait-elle précisé. Et toi, Monsieur B.,
qui me disais : « On me traite de sale arabe, alors que j’ai combattu dans les rangs français en Algérie, que
mon père est mort durant le dernière guerre, mon grand-père à Verdun. Je suis Français ».
Nous avons pas mal voyagé en pays musulman. Partout, nous avons été reçus avec gentillesse. Qu’êtes vous
devenus, toi, la petite femme de chambre tunisienne qui posais tous les soirs sur notre oreiller une fleur
d’hibiscus ? Toi, Adel, notre guide égyptien, professeur à la faculté du Caire, qui as su avec simplicité nous
faire aimer ton pays. Qu’êtes-vous devenus, vous qui viviez du tourisme, ces touristes qui n’osent plus
venir ? Nous gardons le souvenir de vous tous, nous aurions tant aimé revenir…
Voilà, je n’ai plus le cœur à rire en ce moment. Mais je vais me reprendre, retrouver mon optimisme habituel,
pour vous conter quelques histoires à rire.
Rendez-vous au prochain numéro du Souffle, les amis !
Yvette Maurin
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LE BREXIT OU LA FIN DES RELATIONS COMPLEXES ENTRE LE ROYAUME
UNI ET L'EUROPE
La journée du 23 juin 2016 marquera l'histoire de l'Union Européenne. Pour la première fois, les citoyens
d'un grand état membre de l'Union Européenne se sont prononcés par leur vote sur la sortie de leur pays de
l' UE.
Ainsi 43 ans après avoir intégré l'Union Européenne, les britanniques vont peut-être quitter l' Europe mais
ont-ils été vraiment européens un jour ?
Pour mieux comprendre comment on en est arrivé là, il est intéressant de faire un historique des relations
mouvementées entre l'Europe et le Royaume-Uni.
Un demi siècle d'atermoiements entre l'Europe et le Royaume Uni.
Et si de Gaulle avait raison ?
En 1957, lorsque les six ont signé le traité de Rome, le RoyaumeUni a refusé de rejoindre la CEE car ils voulaient garder leur
système de libre échange avec les pays du Commonwealth.
Deux ans plus tard, ils ont signé le traité de Stockholm avec
d'autres pays européens (Norvège, Suède, Danemark, Suisse,
Autriche et Portugal) créant l'Association Européenne de Libre
Échange ( AELE).
Cette alliance n'a pas fonctionné et les États-Unis conseillèrent
au Royaume-Uni de négocier leur adhésion à la CEE, ce que fit le
premier ministre Macmillan en 1961.
Les négociations seront difficiles car déjà les britanniques
demandent des dérogations et des exceptions.
Le 14 janvier 1963, Le général de Gaulle président de la République prononce un discours où il se dit hostile
à l'entrée de la Grande Bretagne dans le « marché commun Il s'explique sur sa position que l'on peut très
bien comprendre aujourd'hui.
Nouvelle demande de Wilson en 1967
Le premier ministre conservateur Edwards Heath présente officiellement une nouvelle demande d'adhésion
en 1967 mais de Gaulle toujours au pouvoir en France s'y oppose à nouveau.
Avec la démission de de Gaulle en 1969 , les négociations reprennent, elles vont durer 6 ans. Il y avait bien
sûr la contribution communautaire, la Politique Agricole Commune(PAC), les relations commerciales du
Royaume Uni avec le Commonwealth...
C'est seulement en 1973 que le Royaume Uni rejoint la CEE.
Des contestations dès 1974
Dès 1974 avec la victoire des travaillistes, Harold Wilson annonce qu'il veut renégocier la contribution
britannique au budget communautaire. Avec l'accord de Dublin en 1975, il a obtenu un petit correctif
budgétaire et un léger assouplissement sur les importations néo-zélandaises.
L'arrivée de Margaret Thatcher
En 1979, Margaret Thatcher est élue premier ministre, elle va
prononcer cette phrase célèbre « I want my money back » . De
nouvelles négociations difficiles aboutiront en 1984 à un rabais
de 6,1 milliards d'euros de la contribution britannique.
Il y aura aussi en 1980 cet accord consenti par la France pour
modifier le règlement européen concernant les importations néozélandaises de viande de mouton congelée sans droits de
douane.
Elle s'opposera à la réunification allemande en 1990.
L'arrivée de l'Euro en 2002 sans les anglais
Lors de la présidence britannique du Conseil de L'Europe en 1998, Tony Blair va participer à la préparation
de L'Euro sans que son pays ne choisisse la monnaie unique.
Allemands et Français essayèrent de mettre un terme au rabais britannique en 2005 mais Blair s'y opposa
en mettant dans la balance la révision de la PAC.
La signature difficile du traité de Lisbonne par Gordon Brown en 2010
Ce traité qui avait pour but une meilleure coordination entre tous les membres de l' Union Européenne à été
signé par la Grande Bretagne mais avec une nouvelle exception concernant leur non participation dans le
domaine de la justice et des affaires intérieures.
Cameron et le Brexit
En décembre 2011, le Conseil européen décide de mettre en place un pacte budgétaire auquel s'oppose
David Cameron. Ce dernier en 2013 annonce que s'il est réélu en 2015, il organisera un referendum pour
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consulter le peuple sur le maintien ou non du Royaume-Uni dans l'Union Européenne.
En 2014, il ne veut pas de Jean-Claude Juncker comme président qui sera quand même élu avec le soutien
de tous les autres états membres.
Cette même année, la commission européenne réclame une augmentation de la contribution britannique de
2,1 milliards d'euros basé sur des mécanismes approuvés y compris par le Royaume-Uni.
Cela n’empêche pas David Cameron de refuser cette augmentation.
Nous arrivons ainsi au 23 juin 2016 et le résultat du référendum : 51,9 % de votes favorables à une sortie du
Royaume-Uni de l'Europe.
Depuis David Cameron à démissionné. Que fera son Successeur en l’occurrence Theresa May ?
Quelles conséquences pourraient avoir cette sortie pour les Britanniques et les
autres pays européens dont la France ?
Dans un premier temps, nous ne parlerons pas agriculture que nous traiterons à part.
En fait, le Royaume-Uni était dans l'Europe mais absent de l'Euro, absent de Schengen, absent de l’Europe
de la justice, absent de l’Europe sociale, opposée à l'Europe de la défense...
Beaucoup d'économistes se sont livrés à l'étude de l'impact du Brexit si le Royaume-Uni va jusqu'au bout de
sa sortie de l' Europe, seul l'avenir nous en donnera les conséquences réelles.
Nous vous livrons quelques unes de leurs réflexions.
Pour les britanniques :
Ils devront à priori posséder un visa pour se déplacer en Europe.
Les vacances des britanniques sur le continent leurs coûteront plus cher avec une livre dévalorisée par
rapport à l'Euro et des prix en hausse pour les compagnies comme EasyJet et Ryan Air.
Le rôle de place financière tenue par Londres sera affectée et déjà de grandes banques envisagent
d'implanter leur siège social à Paris ou dans d'autres capitales européennes.
Les expatriés britanniques ( plus de 170 000 en France) se posent beaucoup de questions sur leur avenir (
retraite, couverture maladie...)
L' Écosse qui a voté contre le Brexit envisage par la voix de Nicola Sturgeon ( première ministre) d'organiser
un référendum sur une possible indépendance.
En Irlande du Nord, le parti Sinn Féin demande un référendum sur la réunification de l’île.
De nombreux étudiants européens bénéficient chaque année du programme Erasmus, cela aura un impact
sur l'enseignement universitaire en Angleterre.
La France continuera t-elle a retenir des migrants à Calais ou à les laisser passer librement ?
L'anglais restera t-il une langue de travail dans les institutions européennes ?
On ne connaît pas vraiment aujourd'hui toutes les conséquences du Brexit, certaines pourraient s’avérer
positives même pour les britanniques !
Pour les autres pays européens
La sortie du Royaume-Uni pourrait faire des émules et d'autres pays européens mécontents de
l' UE
pourraient être tentés de la quitter à leur tour.
Politiquement, les anglais ont toujours été des dissidents sur une future évolution en terme de gouvernance.
Leur départ permettra peut-être d'avancer sur plus d'intégration européenne ?
Beaucoup d'échanges commerciaux entre le Royaume-Uni et les autres pays européens se faisaient dans le
cadre d'un marché unique, demain il faudra conclure des accords commerciaux.
Et l'agriculture dans tout ça ?
La Politique agricole commune (PAC) a toujours été l'une des bases de l'intégration communautaire et les
britanniques l'ont toujours combattu.
Pour les britanniques :
Le Royaume-Uni était un « contributeur net », ce qui veut dire que même avec la réduction obtenue en 1984,
ils versaient à l' Europe plus qu'ils ne recevaient.
Il était le 4ème contributaire derrière l' Allemagne, la France et l'Italie.
Les agriculteurs britanniques ne bénéficieraient plus des aides PAC, ce que chiffrent les économistes à une
perte entre 17 000 et 34 000 € par exploitation. Le gouvernement anglais pourra t-il et voudra t-il se
substituer à l' Europe pour aider ses agriculteurs ?
Pour les autres pays européens :
La perte de contribution nette du Royaume-uni de 4,93 millions d'euros devra être absorbée par les autres
pays dont la France. La note serait moins forte pour la France car il y aurait dans la balance la disparition du
rabais « Thatcher » en grande partie supporté par notre pays.
Pour la France en particulier :
Deux secteurs pourraient être fortement impactés : les fruits et la production ovine.
Pour ce qui est du mouton, le comble serait que la réduction des importations directes de mouton anglais ou
indirectes de Nouvelle-Zélande rendent plus cher l'agneau français.
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Cette viande déjà chère pour le consommateur français pourrait le devenir encore plus entraînant une
diminution de la consommation.
Si le taux de change de la livre baisse, le mouton anglais pourrait encore plus concurrencer notre production
nationale.
Décidément, nous aurons toujours des différents avec nos voisins anglais, n'oublions pas qu'ils
ont brûlé Jeanne d'Arc en 1431 au terme d'une guerre de 100 ans !
Pour finir sur une pointe d'humour (anglais bien sûr !), une petite histoire en oc.
Un Françés passa na setmana de vaçancas a Londres. Troba a se lotjar dinc un B e B.
Quand davalèt lo matin de la seconda nuèit, la femna que tenia l'estau i damandèt :
- Bonjorn Mossur, per vostre dejunar, coma volètz vos cacaus « sobre lo plat « o bien « durs » ?
- Vole dos uòus sobre lo plat. I a un que sera caramelisat. L'autre, le botarètz sobre un tòsta completament
brulat d'un latz e marron de l'autre latz. Lo tòsta e los uòus banharon a meitat dinc las favas e la saussa.
Passarètz l'escudèla dinc lo forn, de la façon qu'aquò saguesse chal defòra mas freid dedinc.
- Crese qu'aquò sera pas possible Mossur.
- E perque ? aquò es esactament la mesma besonha que m'avètz beilat per dejunar ièr matin.
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Un français passe une semaine de vacances à Londres.
Il trouve à se loger dans un B and B.
Quand il descendit le matin de la seconde nuit, la
patronne de la maison lui demanda :
- Bonjour Monsieur, pour votre petit-déjeuner, comment
voulez vous vos œufs « sur le plat » ou bien « durs »?
- Je veux deux œufs sur le plat. Il y en a un qui sera
caramélisé. L'autre vous le mettrez sur un toast
complètement brûlé d'un côté et marron de l'autre. Le
toast et les œufs baigneront à moitié dans les haricots et
leur sauce. Vous passerez l’assiette au micro-onde, de
manière à ce que tout soit chaud à l’extérieur et froid à
l’intérieur.
- Je crois que ce ne sera pas possible Monsieur.
- Pourquoi ? C'est exactement ce que vous m'avez servi
au petit-déjeuner hier matin.
Henri OLLIER
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HISTOIRE DU VELAY (suite) À PROPOS DE GERMANIQUE
H Quesnel-Chalelh
TERMES D’ORIGINE GERMANIQUE DANS LE PARLER DE TAULHAC (III)
installar ~ estallar. Installer. Mot dérivé du latin
médiéval *INSTALLARE, mettre (symboliquement
un dignitaire sur une stalle), mot provenant à son
tour du germ. STALL. Cf. allem.: Stuhl (chaise).
jardin / dzardyi’ / Jardin. On emploie aussi le terme
òrt (jardin), mais celui-ci d’origine latine.
« jardin » comme garden en anglais, provient du
germanique. GARDO, enclos.
leca. Lèche. Provient du germanique LEKKON.
Surtout employé dans la locution faire la leca,
flatter sans vergogne, flatter c’est à dire se
comporter en lèche-botte. On parle aussi d’un
lecagima (lèche-crème), lecaplat (lèche-plat), un
lecarèl pour désigner un gourmand.| lecar lécher.
lepar. Lécher. los lecarèls se’n leparan las bochas (les
gourmands s'en lècheront les babines). Ce verbe
possède le même sens que lecar et vient également
du germanique LIPPE, lèvre. Voyez l’anglais lip.
lèste, -a. Leste. Cet adjectif nous est arrivé par
l’italien qui l’avait emprunté au vieil haut allemand
HLESTEN.
lista /yist’a/ ~ /yist’o/ Bande étroite de terre tout en
longueur. De ce fait, parcelle peu intéressante à
exploiter.| Étym.: germ., LISTA, bande.
lòt Lot.| Étym.: franque HLOT, part de terrain
attribué au sort ou par héritage.
maneschaud Maréchal-ferrant.| Étym.: germ.
*MARH-SKALK, valet d’écurie.
marcar Marquer.| Étym.: germ. (ancien nordique)
* MERKI, signe.| remarcar remarquer.| marca
marque, cicatrice, estampille, poinçon.
marcha Marche.| Étym.: germ. MARKA, ce qui
sépare deux territoires d'où passer d'un lieu à un
autre.| marchar marcher.| Étym.: germ. MARKÔN,
parcourir.
marra Pioche.| Étym.: germ. germ. *MARRA, houe.
La locution anar a la marra, aller à la mine (dans
le bassin stéphanois) est assez connu.| - A la
marra ! est un long poème de l’abbé Jean-François
Meiller (1811-1859) sur le départ d’un pauvre paysan à
la mine du bassin de St-Étienne puis du retour au pays
de celui-ci.
martre ~ martra Martre ~ marte.| Étym.: germ.
*MARPOR, martre.
mossa Mousse.| Étym.: germ. *MOSA, mousse.
nafra Blessure (avec un objet coupant), balafre.|
Étym.: germ. *NARWA, cicatrice.
pòcha Poche.| Étym.: germ. *POKKA, poche. La
poche de vêtement aurait été une invention
germanique.| pochada contenu d'une poche.| pochet
gousset.
quitlha [t§E‚`ja] (nf) Quille.| Étym.: germ. *KEGIL,
debout.| quitlhar Glisser, glisser sur la glace en se
maintenant debout.| quitlhon Bâton fourchu
projetté avec un bâton droit (jeu).
rebola [rabu’la] Reboule.| Étym.: haut-allem.,
RÎB(AN), débauche. La reboule en français local
concerne le repas soigné marquant la fin de gros
travaux. On avait l’habitude de tuer le coq pour ce
repas. On disait couramment : a fat la rabola de son
champ (il a terminé de travailler son champ)
rabòt [rabo`] (nm.) Rabot.| Étym.: provient du moyen
néerlandais, *ROBBE, lapin. Le rabot reprend plus
ou moins la forme d’un lapin.| rabotar Raboter.
rafetar Toussoter de temps à autres.| Étym.: germ.
RAFFEN, faire du bruit.
rampelar Boiter (à cause d'une jambe raide).| Étym.:
germ. RAMPA, se crisper, se ramasser sur soi.
ratèla Rate.| Étym.: moyen néerlandais, RATE.
rauba Robe.| Étym.: *RAUBA, butin ; effets
personnels ; robe.
raubar Voler.| Étym.: germ. *RAUBÔN.| raubaire
Voleur.|
reng Rang, andain.| Étym.: germ. *HRING, cercle.|
renjada Rangée.| renjar Ranger, être en rang.
ribòta Ribote.| Étym.: germ. FRÎB(AN), débauche.|
faire ribòta, faire la fête (libations).| ribotaire Fêtard.
ricanaire Ricaneur.| Étym.: germ. *KINNI-,
mâchoire, joue.| ricanar Ricaner.
rostir Rôtir.| Étym.: germ. *RAUSTJAN, rôtir.
tacha Clou long.| Étym.: germ. *TAKKO, chose
pointue.
tapon Bouchon.| Étym.: germ. *TAPPON, boucher.|
taponar Boucher (tonneau, tuyau, trou quelconque)
avec un tapon *.| Locution (fam.) : sèi taponat, je suis
repus.| Étym.: *TAPPON, boucher.
toalha Chemise ; pan de chemise dépassant du
pantalon.| Étym.: germ. *THWAHLJA, serviette.
trapa Trappe.| Étym.: germ. *TRAPA, chute.|
atrapar, Attraper ; premier sens “ tomber dans une
trappe (piège)”.| trapalhon ~ trapon Petite trappe.
trompeta Trompette.| Étym.: germ. *TRUMBA,
trompette.
tròp Trop.| Étym.: germ. , *THROP, entassement.|
tropèl Troupeau.
tròt. Trot.| Étym.: germ. *TROTTON, courir.| trotar
Trotter.
uchièr Huissier.| Étym.: grom. HUCCARE formé sur
HUCCUS proclamation criée, provenant à son tour
du francique *HUKÔN, appeler en criant.
L’occitan ancien avait également, uc « appel »,
ucar ~ uchar, « crier ; faire annoncer par le crieur
public ; vendre aux enchères »; celui qui accomplit
ces actions est l’ucador ~ uchador, « crieur ».
vorma Mousse visqueuse (qui forme un voile sur
l’eau dormante). H. Verdier racontait qu’étant
jeune, son père l’avait envoyé à la « Pépinière »
chercher de la vorma dans des creux d’eau pour
servir à guérir une certaine maladie.| Étym.:
francique. *WORMA, pus.
D’autres langues ont participé à la formation de l’occitan
comme du français en particulier et dans l’ordre, l’arabe,
l’italien, l’espagnol etc. et de nos jours l’anglais.
L’essentiel de ces apports sont dûs aux échanges
commerciaux.
Nous y reviendrons à l’occasion dans la suite de notre
approche de l’histoire vellave. 16/08/16
PLASER DE LA REVIRADA
Nous avons déjà rencontré Guillaume Tardif (1436 - 1492), enfant du Puy qui devint professeur de
rhétorique à Paris, auteur de l’une des toutes premières grammaires (français moyen). C’est aussi un
traducteur en français d’œuvres latines classiques et de son temps, en particulier des Apologues et
fables de Laurens Valla (vers 1493) qui lui-même traduisait en latin le fabuliste grec Ésope VIIe - VIe
siècle A.D. Nous avions donné dans cette revue la fable de la chatte transformée en jeune fille publié
sous le titre de La chata transformada en femna dans le numéro 52, p. 55 du Souffle de la Nèira,
Nous proposons ici la traduction en occitan, imaginant que le ponot Tardif aurait pu chosir cette
langue, la sienne, plutôt que le français.
On trouvera en regard le texte original de Guillaume Tardif à partir duquel est proposée notre
traduction.
D’UN MEDECIN
que garissiá los fòlhs endemoniats
e enrajats,
e comença en latin :
PLURES COLOQUEBANTUR, etc.
OMME
aquò se pòt veire en mais d’un luòc, i a de monde que tròban lur bonur en
*p>ig§P oma
prenent
lurs chins e lurs aucèls per anar chaçar e passar temps. Aquela mena de
^
CÉPlt
monde mancava pas en la vila de Florença.
IbSlÉi! félicité
Sovent, lo paure monde se demandavan coma los riches podian tant prene plaser embé lurs
chins e lurs aucels.
Aquí, un nomat Pal, de Florença per sa naissença, respondiguèt qu’autrescòps en la Ciutat
de Milan, i aviá agut un simple que se mocava fòrt d’aquelos que norrissian de chins e que
portavan d’aucèls. Adóncas, lo monde li demandèron de lur contar la facècia e lo biais bien
joiós d’aquelh simple qu’aviá farcejat los chaçaires.
Pal comencèt de contar e dire qu’en la vila de Milan, i aviát un medecin que garissiá en
pauc de temps los fòls e los endemoniats que lo monde li aduèsian.
Aquí, vos vau contar son biais de garir.
Aqueste medecin aviát un plan-planc bas d-ont aviá fat faire un potz pro large e prigond
qu’èra plen d’una aiga tota pudenta, infècta e freida coma glaça. Quand li aduèsian un
endemoniat, lo medecin eisaminva de qu’aquo-èra que sa malautia, puèis lo fasiá estachar ad
un pal que se trobava aquí ; per quauques us, l’aiga lur montava aus janolhs, aus autres a las
quèissas o pus naut tant coma v-o disiá lo medecin. Los laissava en pena e torment tant que
per la fòrça de la dolor que sentian, lur melancòlia se chamjava e que semblavan garits.
Sufís qu’un jorn, i-un d’aquelos endemoniats
seguèt adut ; a causa de sa fòrta malaudiá, seguèt
botat en l’aiga dusqu’elh ventre e, talament que
ne-n seguèt tormentat, qu’après na quinzenada,
sa malaudiá s’achabèt ; puèis, parlèt com un òme
en plena sandat. Quò fai que demandèt elh
medecin de lo botar fòra, çò que li acordèt a
condicion que sortiguèsse pas delh lo plan-planc
d-ont i aviá lo potz, sotz pena de çais èstre tornat
botat.
D’aquò d’aquí, lo simple seguèt d’acòrd, e v-o
faguèt bien de biais tant que cranhava d’èstre
tornat botat en l’aiga.
Un puits au XIIIe siècle, Dictionnaire raisonné de l'architecture française, !Viollet le Duc.
A chaa pauc lo medecin li permeteguèt un pauc mais de large ; quò fai que per la fin, li
bailèt la permission d’anar dusqu’elh portal de davant, a condicion de lo passar pas. Lo simple
v-o faguèt com aquò, tant qu’aviá pavor de tornar en l’aiga delh potz.
Pr’aquò, un jorn qu’aquelh paure simple e endemoniat se teniá arranda lo portal per sonhar
lo monde, un joine òme que montava una èga venguèt a passar. Aquelh d’aquí portava elh
torn de son ponh, un faucon e menava una tropa de chins. Quò fai que lo simple que lo
veguèt, tot estonat ques èra, creidèt lo chavalièr per li demandar si voliá ben tener solaç embés
elh. Adóncas, lo joine òme s’assarrèt de z-elh, li demandèt çò que voliá e lo simple de dire :
« Belh Sénher, dija me un pauc : de qu’aquo-es que montes e de qu’aquo-es la tropa que
menes e a dequé te sèrvon ? »
Lo joine chaçaire respondiguèt que çò que montava
s’apelava una èga e que çò que portava sobre sa
man èra un faucon per arrapar las catlas e las
perdriç e que çò que menava darrièrs èlh èran de
chins per anar a la chaça amais a la chacilha.
Quò fai que lo simple demandèt quant valiá tota la
chacilha que sabiá arrapar dins tot un an. Lo
chaçaire li respondiguèt qu’aquò se montariá ben a
sèis escuts, se se podian bien vendre.
Tot continent, lo simple demandèt quant ne-n
costariá per norrir l’èga, l’aucèl e los chins. Lo
chaçaire de li respondre que ne-n costava mais de
cinquanta escuts.
« Escouta me, mon amic, vai t-en, que se lo medici ven e apren ta fòlia, te getará dedinc
l’aiga embé los autres fòls e enrabiats ; e lai te botará entrò lo menton e mais encara, bien
mèlhs que tots los autres que sembles lo mèlhs estordit, enrabiat e endemoniat delh monde. A
causa d’aquò, fila per que te vegie pas.
Cette gravure provient de llustrations de Des deduiz de la chasse des bestes sauvaiges et des
oyseaux de proye, auteur non identifié. Pour plus d’informations, visitez Gallica, BNF.
À titre d’information, nous donnons le début de la traduction de G. Tardif en français moyen,
lequel se situe entre l’ancien français et le français moderne.
COMME nous voyons en plusieurs lieux, ils sont aulcunes gens qui prennent leur félicité en chiens et oyseaulx
pour aller chasser et passer temps, desquelz plusieurs estoyent en la ville de Florence, qui continuellement après
eulx menoient chiens pour chasser et mesmement portoient oiseaux, dont s'en esbahyssoient beaucoup les gens
commungs et tellement que souventesfois en faisoient conclusions, demandans les ungs les aultres comme ceulx
là prenoient si grant plaisir en chiens et en oyseaulx.
Là fut ung nommé Paul, natif de Florence, lequel respondit que aultres fois en la Cité de Millan avoit esté ung
fol qui se moquoit fort de ceulx qui les chiens nourissoient et les oiseaulx portoyent. Lors prièrent aulcuns à
cestuy Paul qu'i leur racomptast la facécie et joyeuse manière comnie celluy fol avoit farce les chasseurs.
Si commença Paul à racompter et dire que en la ville de Millan y avoit ung Médecin qui garissoit les folz et les
démoniacles en ung certain temps que ilz luy estoient apportez. Mais la manière de les garir estoit telle. Cestuy
Médecin avoit en sa maison une grande ayre basse, au millieu de laquelle il avoit fait faire ung grant puis, large
et parfond, qui estoit plein d'eaue toute puante et infaicte et froide comme glace. , et, quant on luy apportoit
aulcun démoniacle, le Médecin regardoit la qualité de sa maladie, puis le faisoit lyer dedans ce puis à ung pal,
qui là estoit, si que les ungs estoyent en l'eaue jusques aux genoux, les aultres jusques aux cuysses ou plus hault,
ainsi que le Médecin advisoit, et les faisoit laisser en peine et grant supplice tant que, par véhémence de doulleur
qu'ils sentoyent, leur mélancolie se changeoit et sembloyent estre guariz.
"Ce livre, bien que racontant la terrible bataille de Verdun, n'a pas pour but de cultiver la
haine, mais de garder la mémoire de ce tempslà pour que pareil drame ne se reproduise
plus. A l'horreur des champs de bataille, il
oppose l'amour, le dévouement, l'optimisme,
l'amitié, parfois la gaieté de ces hommes et de
ces femmes qui ne savent pas s'ils seront vivants demain et vivent pleinement tous les
petits ou grands bonheurs qui leurs sont offerts. L'auteure y aborde tout ce qui faisait le
quotidien des Français de cette époque, en
s'efforçant de bannir les sentiments de haine
au profit de la bravoure, de la faiblesse humaine aussi, en semant amour et amitié entre
les héros. Avec l'espoir qu'un simple roman
donne à la jeune génération la connaissance et
la compréhension des événements de ce tempslà."
C'est aussi un roman dédié à toutes les femmes mortes au champ d'honneur et étrangement absentes de nos monuments aux morts et
aux anonymes qui ont résisté à leur façon,
inconscients des risques qu'ils prenaient mais
accomplissant ce qui leur paraissait juste.
C'est un livre témoignage enfin, car l'auteure,
octogénaire, même si elle n'a pas connu la
Grande Guerre, a cependant côtoyé des témoins et vécu notamment chez ses grandsparents maternels à l'ombre des portraits des
poilus, des médailles et des objets de l'artisanat
militaire. Même si l'on n'en parlait pas, l'ombre
planait sur ces campagnes dont les paysans
avaient payé un lourd tribut et où le maréchal
Pétain, vainqueur de la Grande Guerre, jouissait d'un incomparable prestige. Yvette Maurin, bien que très jeune à l'époque, garde encore dans les oreilles le bruit assourdissant des
bottes des troupes allemandes martelant les pavés de ClermontFerrand et aussi à la fin de la guerre
les bombardements terrifiants des
forces alliées sur les usines Michelin proche de son quartier.
C'est un livre d'espoir car son cœur
vibre de joie lorsqu'elle voit flotter
le drapeau européen et elle se dit
alors que ceux qui ont péri lors des
deux guerres ne sont pas morts en
vain.
J'allais oublier : Yvette Maurin est
très branchée et vous pouvez la
retrouver sur : yvettemaurinromanciere.e-monsie.com, et au cas
où vous ne trouveriez pas ses ouvrages en librairie vous pouvez toujours la
contacter, elle pourra peut-être vous dépanner
avec une dédicace en plus !
A LIRE
Vous connaissez forcément Yvette Maurin !
Elle nous régale depuis longtemps de ses chroniques colorées, engagées, drôles, dans le
Souffle de la Neira.
Elle a aussi publié plusieurs livres. Ce n'est pas
tout d'écrire mais il faut publier, pas pour l'argent, il faut être fort connu pour vivre de sa
plume, mais pour faire partager cette expérience aux lecteurs et leur montrer que même à
la retraite on garde foi en l'humanité dans ces
périodes troublées. Les grandes maisons parisiennes laissent peu de place aux éditeurs de
nos provinces qu'ils condamnent à publier des
romans régionaux pour ne pas dire folkloriques, à ressasser des vies d'antan dans la
France profonde pour faire pleurer dans les
chaumières. Un roman est forcément régional
car il puise ses racines dans une région française ou une région du monde. Il serait temps
de réagir contre ses parisianismes ! Bon mais
revenons à notre auteure !
Après quelques refus, les Editions L. Souny en
Limousin publient "La Naïra, il était une foi
en Gévaudan" en 2003 et "La dette d'amour"
en 2004.
Quelques difficultés avec l'éditeur contraignirent Yvette Maurin à repartir en quête de "publicateur". Elle revint aux sources en contractant avec les Editions de la Montmarie d'Olliergues, berceau d'origine de ses ancêtres maternels. Plusieurs livres vont alors paraître :
"Le Chardon rouge" en 2006 ; "Du Rififi au
Paradis" en 2006, chroniques où Père éternel et
saints ont bien des tracas et des réactions…
fort humaines ; "Les Deux Maries" en 2007 ;
"Le Cimetière aux esclaves" en 2008, un roman "guadeloupéen" suite à de
nombreux séjours dans cette île
; "Lison fille du vent" en 2010.
Une visite dans l'enfer de Verdun, lui inspira paradoxalement
un roman plein d'espoir. Ne s'en
tenant pas là, elle imagina une
suite avec les mêmes personnages et leurs descendants lors du
conflit de 39-45. Mais impossible de se faire publier, son éditeur étant entré dans une phase
de turbulence. Et puis voilà qu'il
se remet en selle dans une nouvelle structure : les Editions des
Monts d'Auvergne, et propose à
Yvette Maurin de publier ensemble ses deux romans en 2016 justement
l'année du centenaire de Verdun, sous le double titre "Vivre à Verdun suivi de Victoire".
Voici une partie de la quatrième de couverture.
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¤ Hall du Centre Pierre Cardinal
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