Douleurs des membres et des extrémités

Transcription

Douleurs des membres et des extrémités
Module 14 – Médecine Interne
Item 306 : Douleurs des membres et des extrémités
Ph. ARLET – M. LAROCHE – M. VIDAL
Objectifs : Devant des douleurs des membres et des extrémités, argumentez les
principales hypothèses diagnostiques et justifiez les examens complémentaires
pertinents :
I. Introduction :
Les douleurs des membres sont des motifs fréquents de consultation en
médecine générale. Les situations cliniques, les modalités de prise en charge
diagnostiques et thérapeutiques sont extrêmement diverses et variées ; il faudra
donc distinguer les situations en fonction de la topographie et de la sémiologie.
Il faudra toujours avoir en tête les principaux systèmes qui peuvent être atteints
au niveau des membres : système nerveux périphérique ou central, système
vasculaire artériel ou veineux, système ostéo-articulaire, (y compris aponévroses
et capsules) muscles, revêtement dermo épidermique, système adénolymphatique.
II.
Importance de la topographie.
Parfois la simple localisation de la douleur permet d’orienter le
diagnostic : Une douleur d’une articulation superficielle (genou, coude, poignet,
doigts…) est bien localisée à l’articulation. Une douleur irradiant dans un
membre ou un segment de membre est volontiers d’origine neurologique
périphérique. Une douleur siégeant aux extrémités (2 pieds, 2 mains, 2 pieds et
2 mains) constitue un acrosyndrome, dont l’origine vasculaire est fréquente.
Une douleur siégeant d’un côté (membre supérieur et inférieur) évoque une
origine neurologique centrale (organique ou non) En effet, les douleurs de
l’hémicorps (dimidiées) peuvent être dues à des pathologies graves (hémiplégie
vasculaire, douleurs thalamiques) ou au contraire peuvent être dues à une
somatisation ou une hystérie. Une douleur siégeant aux racines des membres
évoque une origine musculaire, quand il ne s’agit pas d’une périarthrite ou d’une
pseudo-polyarthrite.
M. 14 It. 306 Douleurs des membres et des extrémités/ Ph. ARLET- M. LAROCHE - M. VIDAL /février 2003
1
III.
Importance de la sémiologie douloureuse.
Les caractéristiques mêmes de la douleur, recueillies lors d’un
interrogatoire soigneux, permettent souvent d’orienter le diagnostic. Ainsi les
douleurs neuropathiques sont volontiers décrites comme des décharges
électriques, des dysesthésies paresthésies, fourmillements, brûlures. Les
douleurs artérielles apparaissent à l’effort et disparaissent à l’arrêt de l’effort.
La stase veineuse des membres inférieurs donne une sensation de lourdeur
douloureuse en général après une position debout prolongée. Les douleurs
ostéoarticulaires sont habituellement provoquées par le mouvement et calmées
par l’immobilisation de l’articulation ou du segment de membre douloureux.
Les douleurs inflammatoires peuvent être pulsatiles, sont permanentes,
s’accentuent en fin de nuit, s’améliorent avec la mise en mouvement des
articulations (dérouillage matinal)
IV.
L’étape clinique est fondamentale.
C’est une douleur, donc c’est l’interrogatoire et l’examen qui vont faire
le plus souvent le diagnostic. Aux données topographiques et sémiologiques
vont se rajouter les données de l’anamnèse et de l’examen physique ; tout ceci
permettra le plus souvent le diagnostic.
EXEMPLES :
- Une douleur localisée au genou, qui s’accentue à la descente des
escaliers, et qui s’accompagne du signe du blocage et du dérobement
évoque fortement une pathologie méniscale du genou.
- Une douleur des 2 membres inférieurs, à type de coulée de plomb
douloureuse, qui s’installe au bout de 300 m de marche, qui disparaît
au bout de quelques minutes d’arrêt de la marche et qui recommence à
nouveau à 300 m évoque très fortement une artérite des membres
inférieurs.
- Une douleur de type neuropathique qui part de la colonne lombaire,
irradie dans la fesse, à la face postérieure de la cuisse et de la jambe et
qui va jusque dans le pied, accompagnée d’une raideur lombaire
évoque fortement une sciatique d’origine disco radiculaire.
- Une douleur de l’aine, qui s’accompagne d’une boiterie, et qui est
réveillée par l’examen de la mobilité de la hanche évoque fortement
une coxopathie.
- Une douleur de type inflammatoire du gros orteil avec rougeur locale,
douleur au moindre mouvement évoque fortement une crise de goutte.
M. 14 It. 306 Douleurs des membres et des extrémités/ Ph. ARLET- M. LAROCHE - M. VIDAL /février 2003
2
- Une douleur neuropathique avec paresthésies de la main et des doigts
survenant volontiers la nuit avec à l’examen un signe de TINEL
évoque un syndrome du canal carpien.
- Les douleurs des extrémités avec cyanose survenant au froid évoquent
le syndrome de Raynaud.
- Une douleur cervicale irradiant à l’épaule, au bras, à l’avant-bras avec
paresthésies dans certains doigts évoque fortement une névralgie
cervico-brachiale dont l’origine est presque toujours disco-radiculaire.
Particularités des douleurs des pieds
Une douleur du pied retentit très vite sur la marche.
L’interrogatoire et l’examen doivent donc porter là-dessus, et en
particulier sur les rapports avec les chaussures. Souvent, les déformations
du pied dues à l’arthrose qui sont très fréquentes avec l’âge entraînent des
douleurs à la marche surtout par conflit et blessure superficielle avec la
chaussure.
V. Stratégie des examens para cliniques
Lorsqu’on suspecte une douleur d’origine neuromusculaire, on prescrira
une électromyographie qui peut aider au diagnostic.
Lorsqu’on suspecte une douleur musculaire, s’il s’agit d’un problème
localisé ou post-traumatique, on pourra préciser par une échographie. Si l’on
envisage une pathologie musculaire diffuse, on prescrira un dosage d’enzymes
plasmatiques : CPK, aldolase, LDH.
Si l’on suspecte une douleur d’origine ostéo articulaire on prescrira une
radiographie standard de l’os ou de l’articulation suspecte, en faisant
systématiquement les 2 côtés pour améliorer la sensibilité de l’examen.
Si l’on suspecte une pathologie veineuse ou artérielle on prescrira une
étude echodoppler centrée sur le diagnostic évoqué (suspicion de phlébite, de
thrombose artérielle, d’anévrisme)
L’imagerie moderne (IRM, scanner) peut être prescrite parfois en
première intention lorsque la suspicion diagnostique est forte et précise, et dans
des pathologies ou la radio standard n’apporte pas grand chose (Exemple :
suspicion de pathologie méniscale du genou) : IRM ou arthroscanner
Il peut arriver que les radios standard soient prescrites pour le diagnostic
différentiel : Exemple : devant une sciatique disco-radiculaire typique, la radio
standard n’a pas grand intérêt, car il n’y a aucune corrélation clinicoradiologique. Les signes radio d’arthrose lombaires sont très fréquents, et les
hernies discales au scanner aussi. Cela ne fait pas le diagnostic ; c’est la clinique
qui se suffit à elle-même. Cependant, devant une sciatalgie qui dure plus d’une
dizaine de jours, on peut faire une radio du bassin de face et de la colonne
M. 14 It. 306 Douleurs des membres et des extrémités/ Ph. ARLET- M. LAROCHE - M. VIDAL /février 2003
3
lombaire de face et de profil, surtout pour éliminer une lésion osseuse de type
lacune, décalcification, signes de métastases osseuses.
La scintigraphie osseuse, centrée sur la partie de membre douloureuse
peut être prescrite lorsque le diagnostic étiologique n’est pas évident. Elle
permettra d’orienter le clinicien vers la présence ou l’absence d’une pathologie
osseuse à un endroit donné : tumeur, infection, fracture de fatigue,
algodystrophie…
VI. Les pathologies fréquentes à ne pas oublier
Quelques pathologies douloureuses fréquentes peuvent être d’origine
infectieuse en particulier panaris, abcès, érysipèle, adénopathie, zona.
Le diagnostic de canal lombaire étroit est parfois difficile à poser devant
des douleurs des membres inférieurs atypiques et une claudication inhabituelle.
Chez le sportif, ou à la suite d’un effort intense ou prolongé il est possible
de rencontrer tendinites, élongations et claquages.
Chez l’enfant trois pathologies sont à considérer : chez le plus jeune, la
synovite de hanche ou « rhume » de hanche. Chez le préadolescent et
l’adolescent, les apophysites de croissance touchant le genou et le talon ne sont
pas rares.
Enfin, les troubles de la statique du pied pouvant entraîner une
aaponévrosite plantaire (se traduisant à la radio simple par des épines
calcanéennes), l’hallux valgus à l’origine d’une zone de frottement portant un
durillon qui peut devenir inflammatoire et hyperalgique. La maladie de Morton
quant-à elle, est la traduction douloureuse d’un névrome du nerf interdigital.
********
M. 14 It. 306 Douleurs des membres et des extrémités/ Ph. ARLET- M. LAROCHE - M. VIDAL /février 2003
4