les contes de la nuit fiche enseignant
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les contes de la nuit fiche enseignant
FICHE ENSEIGNANT UN FILM POUR TOUS 2012/13 er 1 trimestre Cycle 2 LES CONTES DE LA NUIT Programme de 6 films de Michel Ocelot I 2011 I 1h42 I France Tous les soirs, une fille, un garçon et un vieux technicien se retrouvent dans un petit cinéma abandonné. documentent, Les trois dessinent, amis se inventent, coiffent et se se costument pour interpréter six contes, dans une nuit magique où tout est possible. Tour à tour sorcier, fée, roi puissant, garçon d'écurie, loup garou et belle dame sans merci, ils inventent les plus incroyables décors, cathédrales et paillotes, villes d'or ou forêts profondes, puisant dans les contes antillais, africains, européens, tibétains la matière première de leurs rêves. Reprenant le dispositif de la silhouette et du théâtre d’ombres de Princes et princesse (1998), Michel Ocelot poursuit son travail d’artisan sorcier, hybridant les techniques, les influences culturelles et picturales et réalise six contes enchanteurs dans lesquels l’innocence et la persévérance l’emportent sur la duplicité et la superstition. MICHEL OCELOT, CINEASTE-CONTEUR ET ARTISAN-SORCIER ▪ Jeux d’ombres et de contrastes Après Princes et princesses (1998), entièrement réalisé à la main, Michel Ocelot a progressivement expérimenté sur Kirikou (1998) puis sur Azur et Asmar (2006) l’outil numérique, tout en préservant son identité graphique et narrative, immédiatement reconnaissable : une ligne claire, des dialogues savoureux nourris d’une langue riche, une esthétique contrastée reflétant la duplicité des cœurs de certains personnages. On retrouve également dans tous ses films son goût pour les contes, son attrait pour l’agencement de petites mécaniques et pour la forme courte qu’il compare avec malice à une chansonnette dont la ritournelle ne quitte plus notre tête une fois entendue. Autre particularité qui distingue ses films du reste de la production animée, une maîtrise totale de ses œuvres. Tout comme le vieux technicien dans le cinéma désaffecté, Michel Ocelot est un créateur qui participe à chaque étape de ses films : il écrit l’histoire et les dialogues, dessine les personnages principaux, dirige les animateurs et les acteurs lors de l’enregistrement des voix, participe au montage. A l’image de ses héros qui terrassent le mal par leur honnêteté et leur ruse, le travail du cinéaste se construit sur une éthique inébranlable : rester ouvert à toutes les techniques sans jamais sacrifier aux modes. ▪ Le film de silhouettes ou l’art suggestif des contours Entre Michel Ocelot et le film de silhouettes, c’est une longue histoire d’amour. Les silhouettes en papier découpé de Princes et princesse lui ont permis de trouver sa principale forme d’expression. Aujourd’hui, bien que numérisées et articulées par ordinateur, les silhouettes sont toujours là. Loin de désincarner l’œuvre, l’outil numérique, dans le cas de Michel Ocelot, semble rapprocher ses films du théâtre d’ombres1 et des expériences de pré-cinéma. Tout comme le Garçon Tamtam qui découvre que ce n’est pas l’instrument qui est magique mais ses mains, ce sont les intentions du réalisateur qui dominent l’outil et non le contraire. L’animation de silhouettes est une technique qui consiste à photographier, image par image, des silhouettes noires en papier, découpées et éclairées de dessous. Ses premières inspirations sont à rechercher dans les ombres chinoises et les silhouettes découpées (Étienne de Silhouette). En 1926, la cinéaste allemande Lotte Reininger s’empare de cette technique pour réaliser le premier long métrage d’animation en couleur, Les Aventures du Prince Ahmed. Le travail de Michel Ocelot s’inscrit dans la même démarche. Au fil de ses courts-métrages, ce choix graphique, d’abord motivé par les contraintes économiques, deviendra une véritable marque de fabrique. Comment expliquer un tel engouement ? Certainement parce que l’économie graphique de l’ombre chinoise et l’épure de la représentation renforcent la signification de chaque geste. « Il y a quelque chose de l’art égyptien dans cette technique. En simplifiant à l’extrême, en ne retenant que la courbe la plus pure, les Égyptiens ont saisi la beauté maximum. Le torse est plus beau et lisible de face, les jambes, les fesses et la tête, de profil. C’est dans cet esprit que j’aime la silhouette noire. Quoi qu’on fasse, c’est un signe très fort qui produit une impression extrême sur la rétine. » Autre atout de taille pour un conteur, la silhouette noire « prive » les personnages de couleur de peau et les plonge dans un délicieux anonymat. En bannissant la perspective (les personnages sont à plat), la silhouette crée un monde irréel à la mesure de l’imaginaire de son auteur. Bien sûr, les accents, les costumes, les coiffures, les décors contextualisent chacune des histoires ; mais la silhouette noire possède le pouvoir de nous transporter dans l’universalité du conte, à la fois singulier et universel. ▪ Des arrières-plans luxuriants La véritable magie des Contes de la nuit provient du contraste entre la simplicité poétique des premiers plans et la richesse des arrière-plans : madras, fruits exotiques et végétation luxuriante 1 Le théâtre d’ombres consiste à projeter sur un écran des ombres produites par des silhouettes que l'on interpose dans le faisceau lumineux dans Ti Jean et la Belle-sans-connaître, cathédrale sublime dans La fille-biche et le fils de l’architecte, forêt merveilleuse dans Le Loup Garou, enfin, dans Garçon Tamtam et L’élue de la ville d’or des aplats de couleurs qui soulignent la majesté du décor (un baobab au milieu de la savane, une pyramide aztèque). Si seules les silhouettes s’animent, les arrières-plans n’en sont pas moins dynamiques et porteurs de mystère : de la profondeur de l’image peut surgir la surprise, la lumière, l’inquiétude et le merveilleux. Michel Ocelot alterne et joue selon les contes entre le vide et le plein, la flamboyance et la sobriété, l’ombre et la lumière, le net et le flou, le dense et le vaporeux. La liste est loin d’être exhaustive tant le procédé permet de construire une multitude de matières. Rappelons nous par exemple le voile de la princesse dans Le Loup Garou ou la pluie d’étoiles explosant l’écran dans La fille biche et le fils de l’architecte. ▪ Un espace multiplane Pour créer ce dynamisme, Michel Ocelot a recours à l’espace multiplane qui consiste à décomposer les différents plans d’un décor sur plusieurs vitres superposées. Ce procédé permet, par une manipulation simple, d’assembler et de composer un arrière-plan dense, enrichi d’un subtil travail chromatique. Les bleus profonds des plans nocturnes du Loup Garou, le feu d’artifice de couleurs de Ti Jean et la Belle-sans-connaître avec ses formes géométriques saturées et les aplats ocre, beiges et jaunes du Garçon Tamtam, donnent à chaque histoire son identité. QUE LE SPECTACLE COMMENCE ! ▪ La salle de cinéma et la cabine de projection : un sas merveilleux Pour abriter ces contes magiques, quel meilleur écrin qu’une petite salle de cinéma ? Dans la séquence d’ouverture, on découvre un cinéma progressivement plongé au cœur de la nuit. La caméra pénètre alors l’espace de ce cinéma désaffecté et le tumulte du jour se tait. Dans cet antre de silence et de travail, nous découvrons deux enfants scénaristes, metteurs en scène et acteurs, et un projectionniste inventif qui les aide à donner corps à leurs créations grâce à une étrange machine, le costumatique. Chacun des six films est donc précédé d’un prologue qui révèle à la fois l’envers du décor (inspiration, documentation, scénario, costume, décors) et le plaisir de conter. Le procédé de création est immuable : après la lecture d’un conte suivie d’une discussion et de recherches documentaires, ils réalisent les histoires projetées à l’écran. Elles apparaissent dans une pyramide lumineuse, qui tel l’iris du cinéma muet, ouvre notre regard sur un trésor. Ne reste qu’un lever de rideau, suivi d’un hululement de hibou, et le spectacle peut commencer ! ▪ Des références littéraires, picturales et culturelles venues des cinq continents Nous sommes conviés à voyager aux Antilles (Ti Jean et la Belle-sans-connaître) en Amérique du sud (L’élue de la ville d’or), en Afrique (Garçon Tamtam), dans la France médiévale (Le Loup Garou, La fille-biche et le fils de l’architecte) mais aussi dans les Enfers, le monde des fées, celui des architectes ou des sorciers. Pour donner corps à ces mondes, les enfants, tout comme le cinéaste, font des recherches graphiques qui inspireront leurs dessins : les costumes du XVème siècle à la cour de Bourgogne (dessins issus de l’ouvrage Les très riches heures du duc de Berry ) pour Le Loup Garou, la végétation et les costumes antillais (les madras) pour Ti Jean et la Belle-sans-connaître, les tankas et mandalas tibétains ainsi que les paysages du peintre Russe Nicolas Roerich pour Le Garçon qui ne mentait jamais, les coiffures africaines pour Garçon Tamtam, les pyramides aztèques pour l’Elue de la ville d’or et les études d’Eugène Viollet-le-Duc pour La fille-biche et le fils de l’architecte. Cette profusion de références littéraires, picturales et mythologiques révèle la permanence du conte, le sens qu’il véhicule et son universalité. Nous retrouvons ainsi dans chaque film les mêmes caractéristiques : des espaces enchanteurs (une forêt initiatrice, un château médiéval, la savane, l’antre des enfers) ; des couples d’amoureux ; un goût certain pour les métamorphoses (La fille biche et le fils de l’architecte, Le Loup Garou) ; une langue riche dans ses accents (Ti Jean et la Belle-sans-connaître, Garçon Tamtam) et dans son vocabulaire ( les « flèches, pinacles, chemins de ronde et gargouilles » de la cathédrale dans La fille-biche et le fils de l'architecte) ; et bien entendu le pouvoir magique de l'amour qui délivre du maléfice (La fillebiche et le fils de l’architecte). Au terme de chaque expérience, le héros terrasse toutes les superstitions (les sorciers de La fille-biche et le fils de l'architecte, L’élue de la ville d’or, Garçon Tamtam) et prodiguent au spectateur l’enseignement subtil de la tolérance. ▪ Des contes revisités librement Tout comme il mélange avec bonheur techniques d'hier et d'aujourd'hui, Michel Ocelot définit son ouvrage non comme un travail d’adaptation, mais plutôt comme un «jonglage» entre différentes cultures. Dans cet exercice d'acrobate, il s'inspire de contes préexistants, mais n'hésite pas à les modifier au grè de sa fantaisie et de la volonté de ses deux petits personnages. Dans le conte original Ti Jean et la Belle-sans-connaître, un prétendant se retrouve au pays des morts et affronte trois épreuves pour épouser la fille aînée. Michel Ocelot transforme cette conclusion et privilégie le libre arbitre du garçon sur la structure classique du conte. Ti jean préfèrera remonter à la surface, au pays des vivants, et retrouver sa doudou plutôt que devenir maitre du royaume des morts. Tout comme Kirikou, Ti jean est l'incarnation gourmande et rusée du triomphe de l'intelligence sur la force. Dans Le Garçon qui ne mentait jamais, les enfants modifient la fin du conte pour le rendre conforme à leur désir et leur morale et faire triompher la vérité et l’amour.