Discours rapporté, genre(s) et médias

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Discours rapporté, genre(s) et médias
Romanica Stockholmiensia
ISBN 978-91-87355-18-9
ISSN 0557-2657
Département d’Études
Romanes et Classiques
Discours rapporté, genre(s) et médias - Françoise Sullet-Nylander, Malin Roitman, Juan-Manuel Lopez-Muñoz, Sophie Marnette et Laurence Rosier (dir)
Les problématiques traitées dans ce volume, comportant quinze articles,
relèvent du discours rapporté et des genres – gender et genres textuels et discursifs – dans les corpus médiatiques. La plus grande partie des contributions
y figurant ont été présentées dans la section : «Discours rapporté, genre et
corpus médiatiques » du colloque Rapporter et être rapporté(e) : une affaire
de genre(s) ? organisé en collaboration avec le groupe de recherche Ci-dit et
tenu à l’Université de Stockholm du 14 au 16 juin 2012.
Discours rapporté, genre(s) et médias
Françoise Sullet-Nylander, Malin Roitman,
Juan-Manuel Lopez-Muñoz, Sophie Marnette et Laurence Rosier (dir.)
ROMANICA STOCKHOLMIENSIA
New series
1. Discours rapporté, genre(s) et médias
Discours rapporté, genre(s) et médias
Sous la direction de Françoise Sullet-Nylander, Malin
Roitman, Juan-Manuel Lopez, Sophie Marnette & Laurence
Rosier,
en collaboration avec Hugues Engel
© Les auteurs et le Département d’études romanes et
classiques de l’Université de Stockholm 2014
ISNN XXXX-XXXX
: 0557-2657
ISSN
ISBN
ISBN XXX-XX-XXXXX-XX-X
: 978-91-87355-18-9
Imprimerie : US-AB, Stockholm 2014
Distributeur : Département d’études romanes et classiques
de l’Université de Stockholm
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Table des matières
Introduction .................................................................................................. 7
Anne-Marie Houdebine : La différenciation sexuelle et sexuée en
linguistique et sémiologie ........................................................................ 13
Elżbieta Biardzka : Humour communicationnel sexué dans les
dialogues de cinéma ................................................................................. 33
Domitille Caillat : Les recours au discours rapporté dans le débat
présidentiel de 2007 : rapport de force et question de genre ........ 45
Dóris Cunha : Le fonctionnement des commentaires des lecteurs
sur les sites du web .................................................................................. 59
Émilie Devriendt : Candidate vs candidat : une loi du genre ? ....... 75
Kjersti Fløttum : La circulation de voix dans le débat sur le
changement climatique : reportages de la COP 17 dans la presse
française ...................................................................................................... 91
Béatrice Fracchiolla : Circulation ordinaire des discours sexistes et
sens symbolique ...................................................................................... 105
Mariem Guellouz : La citation coranique comme stratégie
d’argumentation dans le discours des féministes et progressistes
tunisiens .................................................................................................... 117
Céline Isnel et Élodie Vargas : Les petites annonces matrimoniales
ou comment se rapporter soi-même ? ............................................... 131
Nadine Lucas : La citation marquée en genre et son rôle dans la
presse anglaise en ligne......................................................................... 149
Florence Magnot-Ogilvy : Parole rapportée féminine et discours
économique dans la chronique scandaleuse de la banqueroute de
Law : l’exemple de l’Histoire des finances sous la Régence (1739)
.................................................................................................................... 165
Mairi McLaughlin : Le genre sexué et le discours rapporté dans les
dépêches d’agences de presse ............................................................. 181
Alain Rabatel : La rubrique « Désintox » représente-t-elle de la
même façon la parole des hommes et des femmes politiques ? .. 197
Arnaud Richard et Marion Sandré : Le discours rapporté dans les
débats politiques télévisés femme/homme: le cas Aubry-Hollande
.................................................................................................................... 209
Danièle Torck : Orthotypographie et effets d’interprétation : le cas
des (« )I/indignés( ») dans la presse française/Le Monde ............ 227
Introduction
Comme le titre du présent volume l’indique, les problématiques traitées ici
relèvent du discours rapporté et des genres – gender et genres textuels et
discursifs – dans les corpus médiatiques. La plus grande partie des contributions y figurant ont été présentées dans la section : « Discours rapporté,
genre et corpus médiatiques » du colloque Rapporter et être rapporté(e) :
une affaire de genre(s) ?, qui s’est tenu à l’Université de Stockholm du 14 au
16 juin 2012.
L’un des postulats de départ de cette rencontre scientifique était, entre
autres, que la femme et l’homme expriment, dans leurs productions langagières, une subjectivité particulière. On s’est posé la question de savoir si
cette subjectivité engendre également des façons de rapporter le discours de
l’autre différentes. L’examen de différents types de textes médiatiques a
mené aux questions de recherche suivantes : existe-t-il différentes façons de
rapporter les discours en rapport avec le paramètre du sexe ? Ou bien, si l’on
analyse tel ou tel « événement discursif » (Moirand 2007) dans différents
genres médiatiques, est-il possible de relever des formes de discours rapporté
différentes en fonction du sexe de celle/celui qui prend la parole ? Existe-t-il
des genres et/ou des sous-genres privilégiant la citation féminine plutôt que
la citation masculine ou vice versa ?
Quinze articles ont été sélectionnés par le comité scientifique pour la présente publication.
Conférence plénière
Dans la première contribution intitulée « La différenciation sexuelle et
sexuée en linguistique et sémiologie », Anne-Marie Houdebine traite, dans
un premier temps, des impositions linguistiques différenciant les parlers des
hommes et des femmes : pronoms, modalisations, paradigmes lexicaux,
dévalorisation par les connotations, les métaphores injurieuses, etc.
L’analyse montre également l’occultation des femmes sous le genre masculin, et comment la féminisation des noms de métiers les rend visibles socialement. Ensuite l’étude porte sur les impositions socio-culturelles (codages
gestuels, postures, etc.) et leurs figurations dans les images publicitaires
activant les stéréotypes. Enfin, sont analysées les caricatures et leurs modalités critiques, proches d’un discours indirect dénonciateur, sans réitération
énonciative de ce qu’il dénonce.
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Communications
Le travail d’Elżbieta Biardzka intitulé « Humour communicationnel sexué
dans les dialogues de cinéma » traite d’une déviation communicationnelle
entropique affectant le paramètre masculin/féminin qui s’actualise en trois
endroits du dispositif communicationnel. En un premier temps, ce paramètre
est systémique et il est inclus dans le code linguistique qui suggère aux sujets
parlants une certaine représentation linguistique du monde ; en un second
temps, il est de nature discursive et mobilise certaines pratiques discursives
définies comme masculines ou féminines ; et en un troisième temps, il est
relatif à la construction des locuteurs : à leurs compétences linguistiques,
leurs déterminations psychologiques, à leur apparence, à leur mimogestuelle, etc.
L’article de Domitille Caillat, « Les recours au discours rapporté dans le
débat présidentiel de 2007 : rapport de force et question de genre », porte sur
la seule édition du débat de l’entre-deux-tours des élections des présidentielles françaises qui opposa pour la première fois un homme (Nicolas Sarkozy) et une femme (Ségolène Royal). À travers l’étude des phénomènes de
discours rapportés, l’auteure se demande dans quelle mesure cette spécificité
genrée a pu avoir un impact sur le déroulement du débat.
Dans son article intitulé « Le fonctionnement des commentaires des lecteurs sur les sites du web », Dóris Cunha étudie les commentaires des lecteurs postés sur les pages web des médias brésiliens ; elle analyse les mouvements discursifs par rapport au texte source et aux commentaires déjà
postés. Du point de vue des genres, l’analyse montre une grande variation
des formes et indices d’altérité, et des constructions compositionnelles, liée
aux thèmes et à la communauté discursive de chaque site. La variable genre
est, selon l’auteure, capitale en ce qui concerne la problématique du discours
rapporté.
L’étude d’Émilie Devriendt – « Candidate vs candidat : une loi du
genre ? Du discours rapporté dans la presse écrite française au lendemain des
débats télévisés de l’entre-deux-tours » – porte sur la manière dont les propos de femmes et d’hommes politiques sont rapportés dans la presse généraliste, aux lendemains de débats politiques télévisés d’entre-deux-tours en
France : débat de l’élection présidentielle de 2007 (Ségolène Royal – Nicolas
Sarkozy), débat de l’élection présidentielle de 2012 (François Hollande –
Nicolas Sarkozy) et le débat de la primaire socialiste de 2011 (Martine Aubry – François Hollande). L’auteure cherche à déterminer le rôle du genre
dans les séquences discursives à l’étude.
L’étude quantitative et qualitative de Kjersti Fløttum, « La circulation de
voix dans le débat sur le changement climatique : reportages de la COP 17
dans la presse française », porte sur la représentation médiatique des voix
lors du sommet climatique (COP 17, 2011) et pose la question fondamentale de savoir dans quelle mesure les journalistes respectent les normes du
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genre de l’information rapportée ? L’analyse montre que les journalistes
utilisent des citations pour soutenir leur propre agenda et que les textes analysés s’orientent plus vers le genre d’information commentée que le genre
d’information rapportée.
Dans son article intitulé « Circulation ordinaire des discours sexistes et
sens symbolique : la campagne « Mademoiselle, la case en trop ! », Béatrice
Fracchiolla reprend la discussion soulevée en 2011 sur l’utilisation du terme
« Mademoiselle » dans les formulaires administratifs ; d’une part ceux pour
qui la dimension symbolique et politique est suffisante en soi pour être défendue et ceux qui ne la jugeant que symbolique l’estiment secondaire.
L’auteure traite la question à partir de la problématique de la nomination, de
l’adresse et de leur dimension performative : nommer fait exister (comme).
Entre construction sexuée, culturelle et discursive, elle analyse comment
s’opère en langue et en discours la négociation et la modélisation de la parole de l’autre, et de l'adresse à l’autre.
Mariem Guellouz s’intéresse aux débats sur le voile, la polygamie, la lapidation et l’homosexualité sur la scène médiatique arabe. Elle analyse en
particulier des textes médiatiques qui touchent aux droits et aux libertés de la
femme. Les féministes et progressistes tunisiens usent différentes stratégies
rhétoriques dans leurs discours. Dans leurs écrits, ils ont recours au discours
rapporté et spécifiquement à la citation coranique et au hadith du prophète
afin de défendre leurs opinions laïques. La citation coranique est ainsi considérée comme une stratégie discursive et argumentative, d’où le titre de
l’article : « La citation coranique comme stratégie d’argumentation dans le
discours des féministes et progressistes tunisiens ».
Céline Isnel et Élodie Vargas, les auteures de l’article « Les petites annonces matrimoniales ou comment se rapporter soi-même ? », se penchent
sur un corpus de petites annonces matrimoniales et de rencontres. Elles
s’efforcent de montrer que, dans le genre de texte à l’étude, la construction
langagière varie selon l’identité sexuelle et soulignent que se rapporter soimême permet de mieux se vendre.
Nadine Lucas, auteure de l’article intitulé « La citation marquée en genre
et son rôle dans la presse anglaise en ligne », s’intéresse aux formes marquées en genre de la citation. Après avoir constaté la rareté des locutrices
dans la presse Internet en anglais, l’auteure se penche sur les formes féminines de la citation qui ont un rôle important pour structurer l’article.
Portant sur un corpus d’une tout autre nature – une chronique économique
de Marmont du Hautchamp (1739) –, l’étude de Florence Magnot-Ogilvy,
« Parole rapportée féminine et discours économique dans la chronique scandaleuse de la banqueroute de Law : l’exemple de l’Histoire des finances sous
la Régence (1739) », analyse les divers emplois du discours rapporté féminin
et s’intéresse à la sexuation du discours économique au XVIIIe siècle – c’està-dire à une époque où les discours de savoir sont rarement placés dans la
bouche de personnages féminins.
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Le travail de Mairi McLaughin – « Le genre sexué et le discours rapporté dans les dépêches d’agences de presse » – porte sur un corpus de dépêches
recueillies dans une agence de presse à la fin de l’année 2005. Les agences
de presse jouant un rôle important dans la circulation de l’information,
l’auteure cherche à déterminer si le genre sexué d’une source citée influe sur
la manière dont sa voix est intégrée par le journaliste d’agence.
Dans son article « La rubrique “Désintox” représente-t-elle de la même
façon la parole des hommes et des femmes politiques ? La variable genrée au
prisme de la sélection des informations et de la syntaxe », Alain Rabatel
explore la question de savoir si, dans la rubrique « Désintox » du quotidien
Libération, la représentation des paroles des femmes politiques bénéficie du
même traitement que celle des hommes, ou si des variations peuvent être
repérées, tant au niveau de la façon de rapporter les paroles que de les reformuler ou de les discuter.
Arnaud Richard et Marion Sandré travaillent sur les discours rapportés
dans un débat politique télévisé, celui des primaires socialistes en octobre
2011, au cours duquel s’affrontaient Martine Aubry et Françoise Hollande.
Ils cherchent à montrer les différences entre les deux candidats quant à la
façon de rapporter les discours en circulation au moment du débat et
s’intéressent également aux cas où chacun des candidats rapporte son propre
discours, celui de son interlocuteur ainsi que celui d’un tiers à l’interaction.
L’article de Danièle Torck portant le titre « Orthotypographie et effets
d’interprétation : le cas des (« )I/indignés( ») dans la presse française/Le
Monde » est une réflexion sur les choix opérés par le journal Le Monde en
particulier quant à l’« orthotypographie » du substantif « Indignés », désignant les participants aux mouvements de révolte et de protestation qui ont
marqué l’année 2011. L’auteure s’intéresse en particulier aux îlots textuels
(Authier-Revuz 1996) dans l’écriture journalistique française et à la signification de la majuscule et des guillemets. La question de l’interprétation du
choix dominant fait par Le Monde (minuscule et guillemets) est posée dans
le contexte politique, social et médiatique d’un moment discursif (Moirand
2007) marqué par un mot-événement (Indignés) et par son inspirateur (Stéphane Hessel).
Ajoutons enfin que deux autres publications issues du colloque Rapporter et
être rapporté(e) : une affaire de genre(s) ? verront le jour prochainement au
sein de la revue scientifique belge Le discours et la langue.
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Nous remercions les auteur∙e∙s pour leurs contributions et adressons nos plus
chaleureux remerciements à notre collègue Hugues Engel pour son aide précieuse avec la mise en forme de l’ouvrage.
Les éditeurs scientifiques :
Françoise Sullet-Nylander
Malin Roitman
Juan-Manuel Lopez
Sophie Marnette
Laurence Rosier
Bibliographie
Authier-Revuz, J. (1996) : « Remarques sur la catégorie de l’îlot textuel », Cahiers
du français contemporain 3 : 91-115.
Moirand, S. (2007) : Les discours de la presse quotidienne. Observer, analyser,
comprendre, Paris, PUF.
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