ACCIDENTS DE PLONGÉE

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ACCIDENTS DE PLONGÉE
ACCIDENTS DE PLONGÉE
TABLE DES MATIÈRES
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LES ACCIDENTS BAROTRAUMATIQUES _________________________________________________ 2
L’ACCIDENT ET LA MALADIE DE DÉCOMPRESSION ________________________________________ 11
LES ACCIDENTS BIOCHIMIQUES _____________________________________________________ 17
LA NOYADE ___________________________________________________________________ 21
LE FROID (OU HYPOTHERMIE) ______________________________________________________ 24
LES ACCIDENTS DE PLONGÉE LIBRE _________________________________________________ 26
PROGRAMME FÉDÉRAL SELON LES NIVEAUX
ACCIDENTS
Barotraumatismes
N1
Principe, prévention
ADD
Principe, symptômes,
prévention, paramètres
table/ordi, courbe de sécurité
Causes, prévention
Causes, symptômes,
prévention, conduite à tenir
Prévention
Causes, symptômes,
prévention, conduite à tenir
Causes, symptômes,
prévention, conduite à tenir
Causes, symptômes,
prévention, conduite à tenir
Essoufflement
Froid
Narcose à l’azote
Noyade
N2 / N3
Causes, symptômes,
prévention, conduite à tenir
Causes, symptômes,
prévention, conduite à tenir
Hyperoxie
Accidents de
plongée libre
N4
Causes, symptômes,
prévention, conduite à tenir
Causes, symptômes,
prévention, conduite à tenir
Causes, symptômes,
prévention, conduite à tenir
Causes, symptômes,
prévention, conduite à tenir
Causes, symptômes,
prévention, conduite à tenir
Causes, symptômes,
prévention, conduite à tenir
Causes, symptômes,
prévention, conduite à tenir
Causes, symptômes,
prévention, conduite à tenir
NOTA : Pour les niveaux 3 et 4, s’ ajoutent la formation aux Premiers Secours (CFPS).
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1 LES ACCIDENTS BAROTRAUMATIQUES
Ce sont des accidents mécaniques liés aux variations du volume d’air contenu dans les cavités naturelles de
notre organisme en rapport avec les variations de la pression ambiante.
Leur mécanisme est toujours le même et obéit à la loi de Mariotte :
- à la descente, la pression ambiante augmente et l’air se comprime en diminuant de volume,
- à la remontée, la pression ambiante diminue, l’air se détend alors et augmente de volume.
Pour que la pression à l’intérieur de ces cavités et la pression de la cavité buccale (pression de sortie du
détendeur) s’équilibrent, il faut une libre circulation de l’air.
La pression doublant entre 0 et 10 mètres, c’est dans cette zone que les accidents sont les plus fréquents.
1.1 LE PLAQUAGE DU MASQUE
Cet accident ne survient qu’à la descente.
1.1.1 CAUSE
En augmentant, la pression comprime l’air contenu dans le masque et l’écrase contre le visage. Lorsque la
limite d’élasticité de la jupe est atteinte la dépression provoque un effet de ventouse pouvant entraîner des
lésions oculaires et nasales.
1.1.2 SYMPTÔMES DANS L’EAU
Simple gêne au début, puis douleur et troubles de la vision et/ou saignement de nez.
1.1.3 SYMPTÔMES APRÈS LA PLONGÉE
Hématome des paupières, hémorragie conjonctivale (yeux injectés de sang), troubles visuels, saignement de
nez (épistaxis).
1.1.4 CONDUITE À TENIR
• Durant la plongée
Souffler par le nez. Si cela est impossible, ne pas essayer de décoller le masque, mais provoquer une entrée
d’eau en passant le doigt entre la jupe et la peau.
• Après la plongée
Arrêter l’épistaxis éventuelle en comprimant la narine qui saigne et en inclinant la tête en avant.
Si des troubles oculaires persistent, consulter un ophtalmologiste, sinon l’application d’un collyre antalgique
et antiseptique est suffisante.
1.1.5 PRÉVENTION
• Ne pas trop serrer le masque et souffler régulièrement par le nez au cours de la descente.
1.2 LES SINUS
Cet accident peut survenir à la descente ou à la remontée.
Les sinus frontaux et maxillaires sont des cavités osseuses de la face, recouvertes d’une muqueuse qui
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secrète un mucus s’écoulant dans les fosses nasales par un conduit : l’ostium. Son rôle est d’hydrater l’air
inhalé.
1.2.1 CAUSES
L’ostium peut être obstrué par des mucosités (infection), un polype ou un rétrécissement congénital,
empêchant l’air de circuler entre les sinus et les fosses nasales.
• A la descente
La dépression crée un effet de ventouse sur la muqueuse qui peut alors se décoller.
• A la remontée
La dilatation de l’air écrase la muqueuse contre la paroi osseuse.
1.2.2 SYMPTÔMES
Douleur du sinus concerné (front ou pommettes), augmentant si l’on poursuit sa progression, ou diminuant si
on l’inverse.
1.2.3 CONDUITE À TENIR
• A la descente
Remonter un peu et rincer les fosses nasales. Si les symptômes persistent, ne pas insister et arrêter la
plongée.
• A la remontée
Redescendre de quelques mètres, rincer les fosses nasales, puis remonter très lentement en incluant le
temps de remontée dans le temps de plongée pour le calcul des paliers.
1.2.4 TRAITEMENT
Antalgique, anti-inflammatoire et antibiotiques en cas d’infection.
1.2.5 PRÉVENTION
•
•
•
•
Ne pas plonger en cas d’infection ORL (rhume, sinusite, ...).
Rincer les fosses nasales avant de plonger.
Ne jamais forcer.
Ne jamais prendre de médicament vasoconstricteur avant de plonger (leurs effets pouvant s’épuiser
pendant la plongée).
1.3 LES DENTS
Accident pouvant survenir à la descente (rare) ou à la remontée.
1.3.1 CAUSES
Persistance d’une poche d’air en communication avec l’intérieur de la bouche (carie mal soignée, plombage
défectueux), dont le contenu a du mal à s’équilibrer lors des variations de pression.
• A la descente
L’air comprimé peut provoquer, par aspiration, une irritation du nerf dentaire.
• A la remontée
L’air dilaté, qui ne peut pas s’échapper de la dent assez rapidement, crée une forte pression sur ses parois,
pouvant entraîner son éclatement. Dans ce cas, la forte douleur ressentie peut conduire à la syncope.
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1.3.2 SYMPTÔMES
Douleur violente pouvant persister après la plongée.
1.3.3 CONDUITE À TENIR
• Pendant la plongée
- à la descente, remonter à la moindre douleur.
- à la remontée, redescendre de quelques mètres et remonter lentement en incluant le temps de
remontée dans le temps de plongée pour le calcul des paliers.
• Après la plongée
Prendre un antalgique pour calmer la douleur. Si celle-ci persiste ou en cas d’éclatement de la dent,
consulter un dentiste.
1.3.4 PRÉVENTION
• Faire inspecter ses dents par un spécialiste avant de plonger.
1.4 LES OREILLES
Cet accident peut survenir à la descente ou à la remontée.
Le tympan sépare l’oreille externe, ouverte sur l’extérieur par le conduit auditif, de l’oreille moyenne, qui est
reliée à la cavité buccale par la trompe d’Eustache. Les muscles péristaphylins obturent ce canal dans le
sens cavité buccale -> oreille moyenne, la circulation de l’air s’effectuant naturellement dans l’autre sens.
Il existe deux types d’accidents dont les causes sont identiques :
- la différence de pression entre l’oreille externe et l’oreille moyenne peut déformer le tympan jusqu’à la
rupture,
- la différence de pression entre les oreilles moyennes gauche et droite entraîne un vertige alterno-barique.
1.4.1 CAUSES
• A la descente
Avec l’augmentation de la pression ambiante, le tympan se déforme vers l’intérieur jusqu’à la limite de son
élasticité. Si la pression continue d’augmenter, il peut se rompre, laissant l’eau envahir l’oreille moyenne.
• A la remontée
C’est le phénomène inverse, le tympan se déforme vers l’extérieur.
1.4.2 SYMPTÔMES
La douleur du tympan croît avec sa distension. Sa rupture est ressentie comme un véritable “coup de
poignard” pouvant provoquer une syncope avec risque de noyade.
L’invasion d’eau dans l’oreille moyenne entraîne des lésions de l’oreille interne où se situent la cochlée et les
canaux semi-circulaires, avec apparition de vertiges, de nausées et de troubles de l’audition qui persistent
après la sortie de l’eau.
1.4.3 CONDUITE À TENIR
• A la descente comme à la remontée
Il faut cesser sa progression dès que l’on ressent la moindre gêne au niveau de l’oreille et revenir à la
profondeur où elle disparaît. Si une remontée lente est nécessaire, inclure sa durée dans le temps de
plongée pour le calcul des paliers.
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• Après la plongée
S’il n’y a pas de perforation du tympan, instiller des gouttes auriculaires antalgiques anti-inflammatoires et
antiseptiques. S’il y a perforation consulter un médecin. En cas de troubles de l’audition et de signes
neurologiques, hospitaliser la victime dans un centre hyperbare.
1.4.4 PRÉVENTION
Avant la plongée
• Pas de gouttes auriculaires antalgiques pour ne pas masquer les premiers signes révélateurs d’une
distension du tympan.
• S’assurer qu’il n’y a pas de corps étranger (bouchon de cérumen) dans le conduit auditif. De même, il
peut être nécessaire de percer la cagoule au niveau des oreilles.
A la descente
• Les muscles péristaphylins ne pouvant se relâcher que par une manœuvre volontaire, il faut donc bien
maîtriser au moins l’une d’entre elles (cf. tableau des différentes méthodes d’équilibration ci-dessous).
• Ne pas pratiquer la manœuvre de Valsalva après l’apparition d’une gêne auriculaire mais anticiper. C’est
la pression ambiante qui doit compenser la légère surpression provoquée dans l’oreille moyenne en
soufflant doucement par le nez pincé.
A la remontée
• Pas de manœuvre de Valsalva.
Après la plongée
• Bien rincer les oreilles à l’eau douce ou avec une solution antiseptique.
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SCHÉMA DE L’OREILLE
1.
2.
3.
Pavillon
Conduit auditif externe
Tympan
Osselets
4.
Marteau
5.
Enclume
6.
Etrier
7.
8.
9.
10.
11.
Caisse du tympan
Trompe d’Eustache
Vestibule
Canaux semi-circulaires
Limaçon (cochlée)
Nerf auditif
12. Nerf cochléaire
13. Nerf vestibulaire
14.
15.
Muscles péristaphylins
Fenêtre ronde
6
MÉTHODES D’ÉQUILIBRATION DES OREILLES
MANŒUVRES À LA DESCENTE
Déglutition Méthode la plus simple. Consiste à simuler une déglutition. Elle ne présente aucun
danger sauf chez le sujet aérophagique (colique du scaphandrier).
Valsalva
Consiste à simuler une expiration par le nez, nez pincé et bouche fermée. Méthode la
plus connue mais aussi la plus traumatisante. Car elle provoque une hyperpression
dans l’ensemble des voies respiratoires d’où les risques :
- de « coup de piston » sur les fenêtres ronde et ovale avec retentissement sur l’appareil
cochléo-vestibulaire par effet cumulatif des micro-chocs.
- de passage de bulles d’azote dans la grande circulation lorsque la manœuvre est
réalisée pendant une phase de décompression. C’est l’hyperpression pulmonaire.
Conséquence : cette manœuvre ne doit s’utiliser qu’à la descente, jamais à la
remontée.
Frenzel
Consiste à amorcer une déglutition en ayant la langue plaquée contre le palais, en
prononçant le son « KE ». Cette méthode ne crée une hyperpression qu’au-dessus de la
glotte (moins traumatisante que Valsalva).
Béance
Tubaire
Volontaire
Peut se pratiquer également à la remontée. Elle permet l’ouverture « passive » des
trompes d’Eustache. Il n’y pas d’hyperpression. C’est de loin la méthode la moins
traumatisante, mais aussi la plus difficile à réaliser. Pour des questions de
positionnement anatomique, elle n’est pas réalisable par tous les individus.
MANŒUVRE À LA REMONTÉE
Toynbee
Méthode inverse de Valsalva. Nez pincé, bouche fermée, simuler une déglutition.
1.5 LA SURPRESSION PULMONAIRE
Cet accident ne survient qu’à la remontée.
C’est le plus grave des accidents barotraumatiques. Il peut être associé à un accident de décompression.
Les victimes sont, le plus souvent, des plongeurs débutants lors d’une plongée à faible profondeur.
1.5.1 CAUSES ET MÉCANISME
En remontant, tout obstacle à l’expiration, spasme de la glotte (par inhalation d’eau), blocage du détendeur
ou encore manœuvre de Valsalva, va emprisonner l’air dans les poumons où il va se détendre en entraînant,
une distension des alvéoles pulmonaires jusqu’à la limite de leur élasticité, puis leur rupture. Les lésions
pulmonaires vont s’aggraver jusqu’à la surface, avec l’effraction de la plèvre (pneumothorax), puis du
médiastin (pneumo-médiastin), l’air libéré envahissant les tissus sous-cutanés à la base du cou créant un
emphysème sous-cutané.
L’éclatement des alvéoles est hémorragique et diminue la surface d’échange gazeux empêchant l’hématose
de se faire correctement.
Le pneumothorax entraîne une rétraction du poumon et le pneumomédiastin une compression du cœur
provoquant très rapidement une importante gêne respiratoire (dyspnée).
Des bulles d’air vont passer dans la circulation sanguine par les quatre veines pulmonaires, elles rejoignent
le ventricule gauche qui va les envoyer par l’aorte dans la grande circulation. Au niveau de la crosse de
l’aorte partent les artères sous-clavières et carotides qui vont distribuer le sang artériel vers la tête et irriguer
le système nerveux central.
Au cours de leur progression, les vaisseaux sanguins se dichotomisent (ils se divisent en vaisseaux de
calibre de plus en plus petit). Des bulles d’air peuvent s’y coincer et provoquer une embolie gazeuse
cérébrale, empêchant le sang de progresser et d’oxygéner les tissus environnants. Ceux-ci risquent de se
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nécroser si l’anoxie (manque d’oxygène) se prolonge.
Ces embolies peuvent se produire au niveau du muscle cardiaque qui, en bloquant la circulation coronaire,
provoquent un infarctus du myocarde.
1.5.2 SYMPTÔMES
L’accident sera d’autant plus grave que la remontée a été rapide, la plongée profonde, et que l’obstruction est
survenue en fin d’inspiration.
Les signes sont immédiats dès l’émersion, survenant parfois dans l’eau.
• Au stade de la distension alvéolaire
- gène respiratoire,
- douleurs thoraciques d’intensité variable,
- sensation d’essoufflement.
• Dans les cas plus graves, les symptômes découlent des dégâts mécaniques sur la fonction ventilatoire
et des conséquences neurologiques des embolies gazeuses :
- violente douleur thoracique lors de la sortie de l’eau,
- détresse ventilatoire avec une toux produisant des crachats sanglants,
- état général altéré : teint livide, extrémités froides et cyanosées, la victime est angoissée, désorientée et a
des difficultés à s’exprimer.
• Les signes neurologiques sont très divers en fonction des territoires lésés :
- troubles de la sensibilité au niveau des membres : fourmillements, engourdissements (paresthésies),
- troubles de motricité : faiblesse musculaire (hémiparésie) voire paralysie d’une moitié du corps
(hémiplégie),
- troubles de la parole, visuels ou auditifs,
- céphalées, nausées, vomissements,
- convulsions, voire coma, avec arrêt respiratoire et cardiaque pouvant entraîner la mort.
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SCHÉMA DU POUMON
1.
2.
3.
4.
5.
6.
Emphysème sous-cutané
Diaphragme
Passage de l’air entre les feuillets
de la plèvre (Pneumothorax)
Embolie pulmonaire
Artère pulmonaire
Hémothorax
7.
8.
9.
10.
11.
12.
13.
Embolie coronaire
Médiastin
Ventricule gauche
Oreillette gauche
Aorte
Bronches souches
Trachée
1.5.3 CONDUITE À TENIR
1) Alerter les secours qui mobiliseront les moyens les plus rapides pour évacuer la victime vers un centre
hospitalier spécialisé équipé d’un caisson hyperbare multiplace.
2) Déséquiper la victime et la sortir le plus rapidement possible de l’eau. L’installer en position semi-assise
avec les jambes surélevées.
3) Pratiquer les gestes de secourisme pour faire face à une détresse vitale immédiate (ventilation artificielle,
massage cardiaque),
4) Mettre la victime sous oxygénothérapie normobare à un débit de 15 l /min.
5) Si la victime est consciente lui faire boire de l’eau plate.
6) Ne pas donner d’aspirine car le plus souvent, la victime choquée ne peut renseigner sur une éventuelle
contre-indication, digestive ou allergique, à l’acide acétylsalicylique. De plus, cela peut aggraver
l’hémorragie. Son utilité ne serait justifiée que dans le cas d’un accident de décompression associé avec
une simple distension alvéolaire et en l’absence d’une arrivée rapide des secours.
7) Ne pas réimmerger la victime pour la recomprimer.
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1.5.4 PRÉVENTION
• Remonter lentement, en expirant régulièrement, surtout à partir de dix mètres, et en regardant la surface
(en basculant la tête en arrière) pour empêcher la fermeture complète de la glotte.
• Respecter les contre-indications médicales à la plongée (asthme mal traité, bronches à clapets).
• Ne pas donner d’air de son détendeur à un apnéiste.
• Ne pas retenir sa respiration lorsque l’on plonge en bouteille (photographie sous-marine).
1.6 LES INTESTINS ET L’ESTOMAC (COLIQUE DU SCAPHANDRIER)
Cet accident ne survient qu’à la remontée.
1.6.1 CAUSES
L’air, avalé dans l’estomac lors de la descente ou dû à la fermentation dans les intestins, se dilate à la
remontée, ce qui crée une surpression dans le tube digestif pouvant aller, dans l’estomac, jusqu’à la
perforation (au niveau d’une zone fragilisée par un ulcère par exemple).
1.6.2 SYMPTÔMES
Des ballonnements abdominaux à la douleur violente pouvant conduire à une syncope.
1.6.3 CONDUITE À TENIR
Essayer d’évacuer les gaz par voie buccale ou rectale.
Remonter lentement en incluant le temps de remontée dans le temps de plongée pour le calcul des paliers.
1.6.4 PRÉVENTION
• Avant de plonger, proscrire les boissons gazeuses et les féculents.
• Éviter de déglutir lors des manœuvres d’équilibrage des oreilles à la descente.
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2 L’ACCIDENT ET LA MALADIE DE DÉCOMPRESSION
L’accident de décompression (ADD), c’est l’accident que redoutent le plus les plongeurs sportifs, car chacun
d’eux peut en être victime, qu’il soit débutant ou confirmé, jeune ou plus âgé, et quelle que soit la profondeur
d’immersion.
Aux débuts de la plongée, en scaphandre pieds lourds, on constatait que les scaphandriers qui remontaient
après plusieurs heures passées dans l’eau, présentaient souvent des troubles neurologiques, dont ils
conservaient fréquemment des séquelles quand ils n’entraînaient pas leur mort.
Les scientifiques qui ont étudié ce problème ont apporté de nombreuses réponses, nous permettant de
mieux comprendre, aujourd’hui, ce qui se passe dans l’organisme lorsqu’il est soumis à un milieu hyperbare.
2.1 RAPPELS DE BIOPHYSIQUE
A la pression atmosphérique, l’air que nous respirons se compose de 20,9% d’oxygène, qui est consommé
en partie par notre organisme, et de 79 % d’azote, qui lui ne l’est pas, et est éliminé par l’expiration.
Lorsque la pression ambiante augmente lors de l’immersion, la pression partielle d’azote augmente
également et une partie de ce gaz se dissout dans les tissus en vertu de la loi de Henry (à température
donnée la quantité de gaz dissous à saturation dans un liquide est proportionnelle à la pression que ce gaz
exerce sur ce liquide).
Rappelons que le corps humain est constitué d’environ 60 % d’eau.
L’azote se dissout plus vite dans les tissus courts (sang, graisses, système nerveux) que dans les tissus
longs (muscles, os). On a ainsi déterminé dans l’organisme des modèles à compartiments qui ont permis de
calculer les tables de décompression en tenant compte des différents tissus et de leur vitesse de saturation
respective. Les tables MN90 ont ainsi été établies sur la base de douze tissus.
Sept facteurs conditionnent la dissolution d’un gaz dans un liquide (tissu) :
- la nature du liquide : différence entre tissus courts et longs,
- la nature du gaz : l’azote,
- la pression : augmente avec la profondeur,
- la température : la solubilité d’un gaz diminue lorsque la température augmente, mais la température du
corps humain est considérée comme constante,
- le temps : la dissolution de l’azote augmente avec la durée de la plongée de façon exponentielle,
- la surface de contact : plus elle est grande, plus la vitesse de dissolution augmente.
- l’agitation : les efforts du plongeur augmentent la dissolution.
En cours de plongée, chaque tissu passe par différentes phases :
- à la descente, il peut encore dissoudre de l’azote, il est en sous saturation.
- après un certain temps de plongée au fond, il continue à absorber de l’azote jusqu’à saturation.
- à la remontée, la pression partielle d’azote diminue avec la pression ambiante, l’azote retrouve sa forme
gazeuse, mais il est éliminé moins vite que ne décroît la pression ambiante, il y a effet de sursaturation. Audelà d’une valeur critique, il y a risque de libération anarchique des bulles.
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2.2 CAUSES
• A la remontée
L’azote qui reprend sa forme gazeuse est ramené par la circulation veineuse au cœur droit, puis par les
artères pulmonaires aux poumons où il est éliminé par la respiration. Les tissus, principalement les courts
(graisse et sang), sont en sursaturation.
• Si la remontée est trop rapide ou si les paliers ne sont pas respectés
La valeur critique est dépassée. Des micro-bulles se forment alors dans les tissus et s’associent entre elles
pour former des bulles plus volumineuses qui, soumises à la loi de Mariotte, vont encore grossir pendant la
remontée.
Des bulles se développent localement (in situ) et lèsent par compression les tissus concernés.
D’autres s’engagent dans le système circulatoire.
Dans le système veineux, elles finissent par se bloquer en interrompant la circulation de retour, provoquant
une asphyxie du territoire drainé, en particulier au niveau médullaire par blocage des plexus veineux
épiduraux. Les capacités d’élimination pulmonaire étant dépassées, l’accumulation des bulles au niveau des
alvéoles entraîne une hypertension veineuse aggravant le retour veineux.
Certaines bulles parviennent à franchir le filtre pulmonaire par des shunts artéro-veineux et partent par le
système veineux pulmonaire vers le cœur gauche qui les envoie dans la grande circulation (artères
coronaires, carotides). Ce phénomène n’est pas lié à la quantité d’azote dissoute, mais à la taille des
bulles et au pouvoir filtrant du poumon pour une personne donnée.
2.3 SYMPTÔMES
Parfois précoces, dès les paliers, les symptômes évoquant un accident de décompression peuvent être
retardés par rapport à l’émersion (jusqu’à douze heures après). Ils peuvent parfois passer inaperçus au
début ou être minimisés par la victime. Les accidents les plus graves surviennent généralement dans un
délai très court, dans le quart d’heure suivant la sortie de l’eau.
2.3.1 SIGNES GÉNÉRAUX
- une grande fatigue inhabituelle,
- la tête lourde, une sensation de vertige,
- un état nauséeux, à ne pas confondre avec le mal de mer,
- une difficulté à uriner,
- un sentiment d’angoisse.
2.3.2 SIGNES BÉNINS : ACCIDENTS DE TYPE 1 DUS AU DÉVELOPPEMENT DES BULLES « IN SITU »
(OU BULLES STATIONNAIRES)
• Bulles localisées dans le tissu graisseux sous-cutané :
- picotements et démangeaisons (puces) avec gonflement douloureux (moutons).
• Bulles localisées dans les ligaments et tendons en regard des articulations les plus sollicitées par les
plongeurs(épaule, coude, hanche, genou):
- vive douleur à la mobilisation (bends).
Ces symptômes peuvent annoncer un accident grave.
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2.3.3 SIGNES VESTIBULAIRES
La formation de bulles dans l’oreille interne entraîne des vertiges, des nausées, et des troubles de l’équilibre.
2.3.4 SIGNES NEUROLOGIQUES ÉVOQUANT UN ACCIDENT GRAVE DE TYPE 2
Les symptômes dépendent de la localisation des embolies gazeuses.
• En périphérie (embolies veineuses) :
- douleurs violentes au bas du dos et déficit moteur évoquant des lésions médullaires,
- sensation de fourmillement dans les membres inférieurs (paresthésies),
- parésie, voire paralysie d’un ou des deux membres (paraplégie), mise en évidence par un test de Babinski
positif (extension des orteils en éventail à l’excitation de la plante du pied, d’arrière en avant, avec l’ongle ou
une pointe mousse).
• Les bulles artérielles progressent vers le système nerveux central, pouvant toucher n’importe quelle zone
du cerveau entraînant :
- l’altération de n’importe quelle fonction (parole, vue, audition),
- des crises convulsives,
- une hémiparésie ou une hémiplégie,
- un coma, voire la mort.
2.3.5 SIGNES PULMONAIRES
Le dégazage massif d’azote, lors d’une remontée très rapide sans palier, peut entraîner une accumulation de
bulles bloquant la circulation pulmonaire. La dyspnée (gêne respiratoire) ressentie très tôt dans l’eau, dès
l’émersion ou quelques minutes après, peut évoluer vers la détresse respiratoire et entraîner une défaillance
cardiaque.
2.3.6 SIGNES CARDIAQUES
Au niveau du cœur l’obstruction des coronaires provoque un infarctus du myocarde plus ou moins étendu,
ressenti comme une violente douleur thoracique irradiant dans la mâchoire et le bras gauche, pouvant
entraîner un arrêt cardiaque.
2.3.7 LA MALADIE DE DÉCOMPRESSION
Dans les minutes et les heures qui suivent l’accident, les emboles qui bloquent la circulation sont le siège
d’une réaction inflammatoire constituant autour d’eux une véritable coque de fibrine, de leucocytes et de
plaquettes formant une barrière au traitement pour les dissoudre, entraînant la nécrose des tissus concernés
et des séquelles irréversibles.
2.4 CONDUITE À TENIR
1) Alerter les secours et prévenir le service de médecine hyperbare le plus rapidement possible. Le
pronostic dépend de la rapidité avec laquelle la victime sera mise en caisson de recompression
hyperbare.
2) Déséquiper et allonger la victime en position déclive, jambes surélevées (position de Trendelenburg).
3) Mettre la victime sous oxygénothérapie normobare, cela permet une accélération de l’évacuation de
l’azote circulante et une meilleure oxygénation des tissus ischémiés. Le débit sera de 15 l/min quelle que
soit la réserve disponible ; donner moins équivaut à ne rien donner du tout.
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4) Si la victime est consciente, après s’être assuré qu’elle ne présente aucune contre-indication à la prise
d’aspirine, lui en faire absorber 500 mg dissous dans de l’eau plate, pour prévenir la maladie de
décompression. Le faire rapidement car après un délai d’une demi-heure, cela s’avère inutile.
5) Faire boire régulièrement de l’eau plate à la victime pour compenser la réduction du volume sanguin.
6) Ne pas réimmerger la victime.
7) Recueillir un maximum d’informations auprès de la victime et de ses camarades de palanquée sur les
circonstances de survenue de l’accident. Bien noter les paramètres de la plongée (profondeur, temps
passé au fond, remontée, température de l’eau, tables utilisées, ...), les rassembler sur une fiche qui
suivra la victime et permettra au médecin hyperbariste de programmer une recompression adaptée (des
modèles plastifiés sont disponibles auprès des comités régionaux de la FFESSM).
8) Faire examiner par un médecin spécialiste hyperbare les camarades de palanquée de la victime,
même s’ils ne présentent aucun trouble.
2.5 PRÉVENTION
Pendant la plongée
• Le seul moyen pour le plongeur d’éliminer correctement l’azote gazeux restitué par les tissus lors de son
retour à la surface est de remonter lentement et de respecter les paliers de décompression donnés
par les tables de décompression ou l’ordinateur de plongée.
• Dans le cadre de la plongée loisir, il est recommandé de ne pas laisser l’organisme se saturer en azote et
de plonger dans la courbe de sécurité, la vitesse de remontée est alors la seule protection du
plongeur et ne devrait pas dépasser 10 mètres par minute comme le préconise la plupart des
ordinateurs.
• Il est, de plus, conseillé d’effectuer un palier de sécurité de 3 minutes entre 3 et 5 mètres, et de
remonter très lentement entre 3 mètres et la surface (au moins une minute).
Après la plongée
En fin de plongée, l’organisme n’est pas complètement désaturé d’azote, il convient donc :
• De ne pas faire d’effort important pendant plusieurs heures,
• De ne pas faire d’apnée pendant au moins six heures car en bloquant la respiration on interrompt
l’élimination de l’azote,
• De ne pas prendre l’avion ni monter en altitude avant au moins douze heures,
• De boire abondamment de l’eau plate pour lutter contre la déshydratation.
2.6 RÉFLEXIONS SUR LES PROCÉDURES DE DÉCOMPRESSION
Les tables MN90, utilisées en plongée loisir actuellement, préconisent une vitesse de remontée de 15 à 17
mètres par minute et des paliers à 6 et 3 mètres pour des profondeurs de plongée n’excédant pas quarante
cinq mètres. Cependant, les données scientifiques actuelles tendent à ramener la vitesse de remontée aux
alentours de 10 mètres par minute. Ainsi les tables Bühlman recommandent une vitesse de 12 mètres par
minute, celles du ministère du travail une vitesse de 10 mètres par minute et l’on parle même de la ramener
à 8 mètres par minute dans un proche avenir.
Quant aux paliers, leur niveau n’a aucune raison scientifique, et ne correspond, pour des simplifications de
calcul, qu’à des multiples de 10 pieds (Haldane, qui élabora les premières tables, était anglais !). Il n’y a
aucune règle précise pour les niveaux des paliers. Il est possible de calculer une décompression centimètre
par centimètre. En pratique, il est difficile de respecter des paliers à une profondeur précise. Il faut tenir
compte de la houle, du courant, des vagues, de son lestage et du nombre de plongeurs au pendeur, qui
14
rendent parfois difficile le maintien dans le plan horizontal.
De plus, on sait depuis peu que, jusqu’à 7 mètres de profondeur, il n’y a pas de risque de saturation des
tissus par l’azote. Des professionnels ont effectué pendant plusieurs années des plongées en cumulant leurs
paliers de 3 mètres à 6 mètres (en suivant les tables MN90). On a constaté que, ne subissant pas les
turbulences de la surface, ils étaient plus stables au palier et en meilleure forme à la sortie. Aucun accident
de décompression n’a été à déplorer et les contrôles par Doppler n’ont pas montré de dégazage plus
important que la normale chez ces plongeurs. En regard de ces résultats, le ministère du travail s’oriente vers
des tables dont le dernier palier serait à 5 ou 6 mètres.
Quelques points de la courbe de sécurité des tables MN90
Profondeur de plongée
(en mètres)
Temps maximum de plongée sans palier
(en minutes)
12
15
20
25
30
35
40
45
135
70
40
20
10
10
5
5
2.7 FACTEURS FAVORISANT LES ACCIDENTS DE DÉCOMPRESSION
Dans 80 % des accidents répertoriés, au moins un des facteurs favorisant suivant a été constaté :
- l’âge : après quarante ans, le système cardio-vasculaire pouvant être plus fragile,
- l’inaptitude médicale non respectée ou un antécédent d’accident de plongée,
- l’excès pondéral,
- la consommation régulière de tabac, d’alcool ou de drogue,
- la prise de certains médicaments,
- la déshydratation : il faut boire de l’eau plate avant et après la plongée,
- la fatigue, le stress,
- une mauvaise préparation physique ou psychologique,
- le froid : il diminue l’élimination de l’azote, il faut donc avoir une combinaison bien adaptée à la température
de l’eau et à sa taille ; prévoir une alimentation riche en sucres lents (riz, pâtes, pommes de terre, ...)
lorsque l’on plonge en eau froide.
- les efforts physiques importants avant, pendant et après la plongée,
- l’essoufflement : l’augmentation de la pression partielle de dioxyde de carbone dans le sang favorise les
accidents de décompression,
- l’hyperpression pulmonaire : l’augmentation de la pression intra-pulmonaire consécutive à une
manœuvre de Valsalva ou à un gonflage à la bouche du gilet de sécurité durant la phase de
décompression, provoque une augmentation de la pression sanguine pulmonaire permettant à des bulles
d’azote de franchir le filtre pulmonaire,
15
- les mauvaises conditions météorologiques : vent, mer agitée, houle importante, froid, ne permettant pas
d’effectuer les paliers dans de bonnes conditions,
- les plongées successives :
• Effectuer la plus profonde en premier,
• En cas de séjour prolongé au rythme de deux plongées par jour, se ménager une journée de repos après
le quatrième ou le cinquième jour.
- les plongées à profil dangereux :
• Commencer la plongée à la profondeur la plus importante,
• Eviter les variations de profondeur type Yo-Yo.
Pour les plongées techniques type remontée assistée au gilet de sécurité :
•
•
•
•
Bien respecter la vitesse de remontée,
Effectuer les exercices en début de plongée, en limitant au maximum le temps passé au fond,
Ne pas effectuer plus de deux remontées de 40 mètres ou quatre de 20 mètres,
Eviter de percer la surface, s’arrêter vers 5 mètres, redescendre dès l’exercice terminé et effectuer un
palier de cinq minutes à mi-profondeur, comme dans le cas d’une remontée rapide,
• Majorer les temps de palier,
• Remonter très lentement entre 5 mètres et la surface.
16
3 LES ACCIDENTS BIOCHIMIQUES
Les gaz respirés par le plongeur (02, N2, CO2) deviennent toxiques pour l’organisme dès lors que leur
pression partielle franchit certains seuils.
3.1 LA NARCOSE À L’AZOTE (OU IVRESSE DES PROFONDEURS)
L’azote produit sur l’organisme des effets narcotiques dès lors qu’il atteint une PpN2 de 4 b (40 m). Mais des
troubles peuvent apparaître chez les individus les plus sensibles à partir de PpN2 =3,2 b (30m).
3.1.1 MÉCANISME
Les études actuelles montrent que la narcose à l’azote est due à l’altération de la transmission de l’influx
nerveux (sensitif et moteur) à travers les synapses qui relient les neurones (= cellules nerveuses) entre eux.
L’altération provient de la fixation de l’azote sur les protéines qui synthétisent les médiateurs chimiques à
l’origine de l’influx nerveux.
3.1.2 SYMPTÔMES
Ils surviennent pour des profondeurs variables selon le plongeur, selon l’état de fatigue, l’entraînement à la
plongée en profondeur.
Ces symptômes ressemblent bien à ceux de l’ivresse :
• Engourdissement physique et psychique
Grande lassitude, jambes et bras lourds.
Fonctions intellectuelles ralenties avec idées obsessionnelles. Augmentation du dialogue intérieur. Retard de
réponse sur signe.
• Troubles de l’humeur
L’individu éprouve une sensation agréable, grisante. Il devient indifférent ou agressif vis-à-vis de ses
coéquipiers.
• Troubles de perception
L’appréhension du réel est perturbée. Il y a un décalage entre le moment où l’individu voit et celui où il sait ce
qu’il voit.
Vision double ou floue.
• Troubles du schéma corporel
Le plongeur a l’impression de se dédoubler et de se voir plonger.
• Troubles de l’orientation espace-temps
Disparition de la notion de durée.
Vertiges. Le plongeur ne sait plus où sont la surface et le fond. Il peut continuer à descendre, aggravant son
cas.
• Troubles de la mémoire immédiate
D’un instant à l’autre, le plongeur oublie ce qu’il est en train de faire => gestes répétitifs.
• Troubles de l’idéation
Difficultés pour le plongeur à se concentrer et à raisonner. Ses idées changent très rapidement comme dans
un film en accéléré. Lectures fréquentes des instruments sans qu’il y ait interprétation de ces lectures.
• Déstructuration de la conscience (dans les cas les plus graves)
Comportement incohérent : arrachage du masque, de l’embout, ...
La narcose à l’azote peut se compliquer d’une noyade, d’un accident de décompression, d’une surpression
pulmonaire.
17
3.1.3 CONDUITE À TENIR
Diminuer la PpN2 en remontant jusqu’à disparition des symptômes. Ne pas redescendre, la plongée est
terminée. Très souvent, le plongeur ne se souvient de rien.
3.1.4 PRÉVENTION
• Prendre conscience des risques de la narcose
• Se maintenir en bonne condition physique (ne pas plonger en cas de fatigue)
• S’entraîner progressivement aux plongées profondes (sachant que la plongée sportive ne devrait pas
dépasser la profondeur de 40 m).
3.2 L’ESSOUFFLEMENT
Certainement l’accident de plongée le plus fréquent, il peut survenir en nage avec palme, en scaphandre ou
en apnée. L’essoufflement peut entraîner une narcose, un accident de décompression, une surpression
pulmonaire ou une noyade.
3.2.1 MÉCANISME
L’essoufflement est dû à l’augmentation de la pression partielle de dioxyde de carbone (Pp CO2) dans le
sang.
L’air contient 0,03 % de CO2. A des concentrations plus élevées, il est toxique pour l’organisme. Des troubles
apparaissent à partir de 2 % et la syncope hypercapnique à 7 %, soit pour une Pp CO2 de 0,07 bar.
L’augmentation du CO2 dans le sang (hypercapnie) peut être provoquée :
- par une inhalation excessive de CO2 : pollution de l’air de la bouteille, gaz d’échappement d’un moteur,
tuba trop long et trop étroit ne permettant pas le renouvellement de l’air respiré.
- par une production excessive de CO2 par l’organisme due :
. à un effort physique excessif (palmage trop rapide ou contre le courant).
. au froid qui diminue le rythme respiratoire donc l’élimination du CO2 par la respiration, et augmente
les dépenses énergétiques.
. aux décharges d’adrénaline provoquées par le stress qui modifient la respiration.
. à un défaut du matériel (détendeur défectueux, robinet de conservation mal ouvert) qui oblige à
forcer sa respiration.
La Pp CO2 augmente avec la profondeur. Ainsi, 1,5 % de CO2 à la surface, soit une Pp CO2 de 0,015 bar,
sera bien toléré n’entraînant qu’une légère augmentation de la fréquence respiratoire. A 40 mètres, la Pp
CO2 sera de 0,075 bar, provoquant une syncope hypercapnique et la noyade.
L’augmentation de la Pp CO2 entraîne une accélération du rythme respiratoire avec majoration de
l’inspiration au détriment de l’expiration, diminuant l’élimination du CO2 et favorisant l’hypercapnie.
3.2.2 SYMPTÔMES
• En surface
Respiration rapide, maux de tête, éventuellement vomissements.
• En plongée
Respiration de plus en plus rapide, superficielle et inefficace, palpitations, agitation, voire panique avec
risques de perte du détendeur, de noyade, ou de remontée trop rapide pouvant provoquer une surpression
pulmonaire ou un accident de décompression. Au-dessous de 20 mètres, la narcose aggrave les troubles du
comportement.
18
3.2.3 CONDUITE À TENIR
• Cesser tout effort, en particulier de palmage.
• Essayer de ralentir sa respiration en expirant profondément.
• Faire à ses camarades de palanquée le signe « Je suis essoufflé ».
• Remonter lentement pour faire diminuer la Pp CO2, assisté par un équipier. L’assistant doit saisir la
victime par une sangle du gilet, la regarder afin de la rassurer et lui maintenir l’embout en bouche si
besoin. En général, les signes d’essoufflement disparaissent avant l’arrivée en surface. Il faut néanmoins
continuer la remontée et interrompre la plongée.
• En surface, gonfler le gilet et respirer à l’air libre ou au tuba si la mer est agitée.
• Mettre la victime au repos, la réchauffer et éventuellement lui faire inhaler de l’oxygène.
3.2.4 PRÉVENTION
• Éviter les efforts intenses avant et pendant la plongée (palmage lent et ample, pas de geste inutile,
lest correct, respiration régulière).
• Avoir une bonne protection contre le froid grâce à une combinaison adaptée à sa taille et à la température
de l’eau.
• Plonger sans angoisse, dans un climat de confiance en soi, en ses compagnons de palanquée et en son
matériel.
• Vérifier le bon fonctionnement de son détendeur et l’ouverture correcte de sa bouteille.
• Réagir dès les premiers symptômes et ne pas hésiter à prévenir ses coéquipiers.
• En nage avec palmes, avoir un tuba suffisamment large et pas trop long.
3.3 L’HYPOXIE ET L’ANOXIE
La limite basse de tolérance de l’O2 est de 0,17 b. De 0,17 b à 0,12 b, on parlera d’hypoxie. En deçà, on
parlera d’anoxie.
Ce type de problème est inclus dans plusieurs types de mécanismes accidentels qui vont être décrits ciaprès (noyade, accidents de plongée libre).
3.4 L’HYPEROXIE
L’hyperoxie se définit pour PpO2 > 1,6 b. Deux types d’accidents peuvent survenir en fonction de la PpO2 et
de la durée d’exposition. Ce sont l’effet Paul BERT et l’effet LORRAIN-SMITH.
3.4.1 EFFET PAUL BERT
L’effet Paul BERT peut survenir chez le plongeur en scaphandre autonome à l’air évoluant à de très grandes
profondeurs, ou à faible profondeur, lors de l’utilisation de mélanges respiratoires suroxygénés (nitrox,
oxygène pur).
3.4.1.1 MÉCANISME
La toxicité de l’oxygène se manifeste à partir de PpO2 > 1,6 b. Les cellules nerveuses et musculaires sont
alors touchées en priorité.
3.4.1.2 SYMPTÔMES
Les symptômes varient selon la PpO2, la durée d’exposition et de la susceptibilité individuelle :
- vision double (diplopie),
- contraction des muscles péri-orbiculaires,
- crampes,
19
- malaise général,
- nausées,
- crise d’épilepsie (qui intervient dans un délai variable) avec ses 3 phases :
• une phase tonique avec contraction intense de tous les muscles interdisant toute remontée (risque de
surpression pulmonaire)
• une phase clonique de convulsions avec morsure de la langue et émissions d’urine
• une phase résolutive où le sujet, inerte, reprend progressivement conscience mais avec une amnésie de
la crise
Les conséquences pathologiques d’une telle crise sont celles de sa survenue dans l’eau : noyade, remontée
rapide avec surpression pulmonaire ou accident de décompression.
3.4.1.3 TRAITEMENT
Soustraire la victime de la source d’hyperoxie mais ne la remonter qu’à partir de la phase résolutive. Traiter
éventuellement les accidents associés.
3.4.1.4 PRÉVENTION
Rester dans la zone d’évolution où PpO2 < 1,6 b.
3.4.2 EFFET LORRAIN-SMITH
L’effet LORRAIN-SMITH peut survenir pour une exposition prolongée en hyperbarie, cas des plongeurs
professionnels, ou lors d’un traitement en caisson par oxygénothérapie hyperbare.
3.4.2.1 MÉCANISME
Lors d’une exposition de plusieurs heures à des pressions partielles d’oxygène (PpO2) supérieures à 0,5 b
environ, des altérations du surfactant et des cellules de la paroi alvéolaire se produise et provoquent une
altération des échanges gazeux. Les mêmes symptômes peuvent apparaître également à la suite d’une
exposition à l’oxygène pur pour une durée dépassant 24 heures à la pression atmosphérique.
3.4.2.2 SYMPTÔMES
Les symptômes sont dans l’ordre croissant de gravité :
- une gêne respiratoire,
- une toux,
- des brûlures rétro-sternales,
- un œdème pulmonaire.
3.4.2.3 TRAITEMENT
Soustraire la victime de la source d’hyperoxie et l’évacuer vers un centre spécialisé.
3.4.2.4 PRÉVENTION
Limiter les temps d’exposition lorsque PpO2 > 0,5 b.
20
4 LA NOYADE
La noyade est une asphyxie aiguë due à l’inondation des voies respiratoires, aboutissant, en l’absence de
réanimation, à un arrêt cardio-ventilatoire.
Elle est responsable en plongée de la plupart des décès, compliquant le plus souvent un accident préexistant
(narcose, essoufflement, panique, surpression pulmonaire, syncope, ...).
En plongée avec scaphandre, elle s’accompagne souvent d’un accident de décompression, l’azote dissout
ne pouvant plus s’éliminer par la respiration.
4.1 MÉCANISME
L’irruption de liquide dans les alvéoles pulmonaires provoque, quelle que soit sa nature, un œdème
pulmonaire lésionnel avec hypoxie (le sang circulant au contact des alvéoles ne pouvant plus s’enrichir en
O2).
On distingue :
- les noyades primaires par inondation directe des poumons en respirant dans l’eau (lors d’un
essoufflement, d’une narcose, de la perte du tuba),
- les noyades secondaires par inhalation d’eau à la reprise de la respiration après une perte de
connaissance : syncope lors d’apnée après hyperventilation, hydrocution, syncope hypercapnique, malaise
hypoglycémique.
La noyade évolue schématiquement en quatre phases en l’espace d’environ cinq minutes :
• Apnée volontaire à glotte fermée (spasme réflexe) entraînant une hypercapnie (augmentation du CO2
sanguin).
• Reprise respiratoire réflexe sous forme de halètement (gasping) provoquant l’inondation alvéolaire dans
85 % des cas et dans 15 % des cas un laryngospasme définitif (noyade par asphyxie avec poumons
secs).
• Apnée et collapsus vasculaire (chute de la pression artérielle). C’est le stade ultime ou la victime peut
reprendre spontanément sa respiration si elle est repêchée.
• Apnée définitive entraînant convulsions, perte de connaissance et arrêt cardiaque.
4.2 SYMPTÔMES
On distingue quatre stades :
• Aquastress
La victime est consciente mais angoissée, fatiguée, refroidie. Elle a bu « une bonne tasse », mais il n’y a pas
eu d’inhalation d’eau et sa respiration est normale.
• Petite hypoxie
Mêmes symptômes que pour l’aquastress mais avec des difficultés à respirer. On constate une cyanose des
extrémités (doigts violacés) et une tachycardie (rythme cardiaque accéléré). On retrouve des signes
d’inhalation à l’auscultation.
• Grande hypoxie
La victime est obnubilée ou inconsciente, en détresse respiratoire, présentant un début de collapsus avec
chute tensionnelle et bradycardie (le pouls est lent et difficile à prendre). L’auscultation montre un œdème
aigu du poumon (OAP).
• Anoxie
21
La victime est en phase comateuse avec arrêt cardio-respiratoire imminent.
4.3 CONDUITE À TENIR
Elle sera la même quel que soit le site de la noyade, mer, lac, rivière ou piscine.
Les chances de survie de la victime dépendent de la durée de son immersion, mais aussi de la rapidité et de
l’efficacité des secours.
1)
Sortir la victime le plus rapidement possible de l’eau (en ménageant le rachis cervical si l’on
soupçonne un traumatisme). L’isoler de l’ambiance humide, la déshabiller, la sécher sans friction, la
recouvrir d’une couverture de survie.
2)
Faire prévenir les secours
SAMU : 15, POMPIERS : 18, VHF : canal 16, portable : 112
3)
Effectuer un bilan des fonctions vitales (conscience, ventilation, circulation)
a/ La victime est consciente et ventile
Allonger la victime en position semi-assise.
Faire inhaler de l’oxygène au masque (15 l/mn).
Surveiller l’état de conscience, la ventilation et le pouls.
b/ La victime est inconsciente et ventile
La placer en position latérale de sécurité (risque de vomissement).
Faire inhaler de l’oxygène au masque (15 l/mn).
Surveiller la ventilation et le pouls carotidien.
c/ La victime est inconsciente et ne ventile plus
Après avoir dégagé les voies aériennes supérieures, débuter immédiatement la ventilation
artificielle par bouche à bouche ou mieux au ballon insufflateur auto-remplisseur muni d’une
chambre de réserve d’O2 qui permet des insufflations avec un pourcentage de près de 100 % d’O2.
Vérifier le pouls carotidien. S’il est présent, continuer la ventilation artificielle et surveiller le pouls.
d/ La victime est inconsciente, ne ventile plus et est en arrêt circulatoire
(pouls carotidien non perçu)
Associer à la ventilation artificielle le massage cardiaque externe.
Dans tous les cas la victime sera hospitalisée le plus rapidement possible même si son état
semble peu alarmant car des complications pulmonaires peuvent apparaître secondairement
(pneumonie, œdème aigu du poumon).
La noyade s’accompagne toujours, en raison de la grande conductivité thermique de l’eau, d’une
hypothermie qui a un effet protecteur cérébral d’autant plus important que la température de l’eau est froide
et que la température centrale corporelle est inférieure à 32°C voire 30°C au moment de l’arrêt cardiaque.
C’est pourquoi la réanimation doit être prolongée. Certains noyés ayant été sauvés après une immersion
de quarante minutes en eau froide.
Les manœuvres de vidange posturale des poumons pour évacuer l’eau sont abandonnées. En effet,
elles sont peu rentables et dangereuses car elles exposent au risque de régurgitation et retardent les gestes
de réanimation, alors que l’on sait maintenant que l’eau des alvéoles passe très rapidement dans la
circulation sanguine.
22
4.4 PRÉVENTION
En règle générale
•
•
•
•
Savoir nager.
Ne pas nager seul et sans surveillance, particulièrement lors de la pratique de l’apnée.
Ne pas présumer de ses forces.
Avoir une bonne condition physique et ne pas se baigner après des excès de modes de vie (alcool, repas
trop copieux, manque de sommeil, prise de sédatifs).
• Se prémunir du froid.
En plongée
• Avoir une bonne condition physique, un entraînement régulier, un bon encadrement, un bon matériel
(combinaison adaptée, ceinture largable facilement, gilet dont on maîtrise bien le fonctionnement, double
détendeur, ...).
• Respecter les règles de sécurité.
• Ne pas oublier son tuba.
23
5 LE FROID (OU HYPOTHERMIE)
L’homme maintient sa température centrale constante autour de 37°C, malgré les variations de température
du milieu dans lequel il se trouve, grâce à un système de régulation : la thermorégulation.
5.1 MÉCANISME
Des récepteurs, les thermorécepteurs, informent le système nerveux central des variations de température
de l’organisme, déclenchant des réactions de lutte :
- contre le froid : frissons et vasoconstriction (diminution du diamètre des vaisseaux et du débit sanguin
périphérique).
- contre la chaleur : sudation et vasodilatation (augmentation du diamètre des vaisseaux et du débit sanguin
périphérique).
Lorsque les moyens de lutte contre le froid sont dépassés, la température centrale s’abaisse, en dessous de
35°C c’est l’hypothermie.
L’eau a une grande conductivité, 25 fois supérieure à celle de l’air. La neutralité thermique dans l’eau
(température pour laquelle il n’y a pas d’échange thermique avec le corps humain) est de 33°C alors qu’elle
est de 25°C dans l’air.
Le plongeur qui évolue dans des eaux dont la température est inférieure à 33°C va subir des pertes
caloriques d’autant plus importantes que l’eau est froide :
- par conduction : par contact direct avec le milieu.
- par convection : due
. au renouvellement de l’eau au contact du corps plus chaud en nageant,
. à la circulation sanguine qui amène du sang chaud vers les tissus cutanés périphériques,
. à la respiration : l’air froid du détendeur est réchauffé puis expiré.
En plongée, les moyens naturels de lutte contre le froid, vasoconstriction et frissons, sont insuffisants c’est
pourquoi il faut s’équiper d’une combinaison.
5.2 SYMPTÔMES
On distingue trois stades :
• Hypothermie légère
- pâleur des téguments et horripilation (les poils se dressent).
- pieds et mains froids.
- sensation de froid et frissons.
- augmentation du rythme respiratoire (polypnée) et cardiaque (tachycardie).
- envie d’uriner.
- conscience normale mais baisse de l’activité psychomotrice.
• Hypothermie modérée et grave
- altération de la conscience.
- peau sèche, froide et dure.
- cyanose des extrémités et des lèvres.
- rigidité musculaire et articulaire.
- ralentissement du rythme cardiaque (bradycardie) et respiratoire (bradypnée).
24
• Hypothermie majeure
- la victime est en état de mort apparente.
- rigidité cadavérique.
- coma profond.
- mydriase.
- bradypnée puis arrêt respiratoire.
- pouls carotidien imprenable, puis arrêt cardiaque.
- mort.
5.3 CONDUITE À TENIR
1)
Enlever la combinaison humide, sécher sans friction, recouvrir avec des vêtements secs et une
couverture de survie.
2)
Faire prévenir les secours
SAMU : 15, POMPIERS : 18, VHF : canal 16, portable : 112
3)
Effectuer un bilan des fonctions vitales (conscience, ventilation, circulation)
a/ La victime est consciente
Si possible donner à boire une boisson chaude et sucrée à avaler lentement, mais jamais d’alcool.
Faire inhaler de l’oxygène en cas de difficultés respiratoires.
Donner de l’aspirine si suspicion d’un accident de décompression.
Surveiller (conscience, ventilation, pouls et coloration).
b/ La victime est inconsciente et ventile
La placer en position latérale de sécurité (risque de vomissement).
Faire inhaler de l’oxygène au masque (15 l/mn).
Surveiller la ventilation et le pouls carotidien.
c/ La victime est inconsciente et ne ventile plus
Après avoir dégagé les voies aériennes supérieures, débuter immédiatement la ventilation
artificielle par bouche à bouche ou mieux au ballon insufflateur auto-remplisseur muni d’une
chambre de réserve d’O2 qui permet des insufflations avec un pourcentage de près de 100 % d’O2.
Vérifier le pouls carotidien. S’il est présent, continuer la ventilation artificielle et surveiller le pouls.
d/ La victime est inconsciente, ne ventile plus et est en arrêt circulatoire
(pouls carotidien non perçu)
Associer à la ventilation artificielle le massage cardiaque externe.
Faire évacuer la victime vers un centre de réanimation en donnant ses paramètres de plongée
afin de traiter un éventuel accident de décompression associé.
5.4 PRÉVENTION
• Être équipé d’une combinaison avec cagoule et des chaussons, adaptés à sa taille et à la température de
l’eau.
• Être en bonne condition physique.
• Avoir une alimentation riche en sucres lents : pâtes, riz, pommes de terre, etc.
• Ne pas absorber d’alcool avant de plonger.
• En plongée, ne pas attendre pour faire le signe « J’ai froid » à ses camarades de palanquée et
entreprendre ensemble la remontée.
25
6 LES ACCIDENTS DE PLONGÉE LIBRE
La pratique de la plongée libre comporte certains risques que l’on peut toujours prévenir, à condition de bien
les connaître.
6.1 ACCIDENTS BAROTRAUMATIQUES
Les barotraumatismes dus au placage de masque, aux dents, aux sinus et aux oreilles sont identiques en
plongée libre et en plongée scaphandre, leur prévention également (cf. Les accidents barotraumatiques dans
ce chapitre).
En plongée libre, il n’y a pas de risques de surpressions pulmonaires sauf si un plongeur avec scaphandre
donne de l’air avec son détendeur à un apnéiste, ce qui est formellement interdit.
6.2 ACCIDENTS BIOPHYSIQUES
L’amélioration des performances de certains champions a fait apparaître le risque d’accidents de
décompression.
Cet accident ne peut survenir que pour des apnées répétées, à des profondeurs importantes (20 à 30
mètres), avec des temps de récupérations trop courts et sur une durée de plusieurs heures.
Par exemple, un pêcheur qui effectue des apnées de 2 minutes à 30 mètres de profondeur, à un rythme de
plus de 12 par heure, pendant plus de quatre heures, a un risque réel de faire un accident de décompression
(connu sous le nom de taravana).
Rappelons qu’il ne faut pas faire d’apnée après une plongée scaphandre tant que l’on a pas complètement
désaturé.
6.3 ACCIDENTS BIOCHIMIQUES
Lors d’une apnée après une inspiration forcée, c’est l’augmentation de la Pp artériolaire de CO2 vers 60 mm
Hg qui provoque le besoin de respirer. Si la reprise de la respiration se fait en immersion, c’est la noyade
(noyade primaire).
6.3.1 SYNCOPE ANOXIQUE
6.3.1.1 MÉCANISME
Elle est due à la diminution de la Pp artériolaire d’O2 en dessous de 40 mm Hg. Cet accident peut survenir en
immersion, quelle que soit la profondeur, ou après avoir fait surface.
6.3.1.2 CAUSE
• L’hyperventilation
L’augmentation de l’amplitude et du rythme des mouvements respiratoires, avant une apnée, diminue la Pp
CO2 (20 mm Hg au lieu de 40 mm) mais ne fait que très peu augmenter la Pp O2.
Pendant l’apnée, l’organisme consomme beaucoup plus d’O2 qu’il ne produit de CO2 aussi la Pp artériolaire
d’O2 va diminuer beaucoup plus vite que n’augmente la Pp artériolaire de CO2 et le seuil d’anoxie qui
provoque la syncope sera atteint plus vite que le seuil d’hypercapnie qui déclenche le besoin de respirer.
Pendant la syncope, la Pp de CO2 remonte pour atteindre 60 mm Hg, provoquant la reprise respiratoire,
entraînant la noyade si le syncopé est en immersion. S’il est en surface et a la tête maintenue hors de l’eau, il
peut reprendre conscience spontanément.
26
6.3.1.3 CONDUITE À TENIR
Remonter la victime à la surface le plus vite possible et lui maintenir la tête hors de l’eau lors de la reprise
inspiratoire. Pratiquer les gestes de secourisme si nécessaire (ventilation artificielle, oxygénothérapie, avec
massage cardiaque externe si besoin).
6.3.2 « RENDEZ-VOUS SYNCOPAL DES SEPT MÈTRES »
Cet accident survient à la remontée lors d’une apnée profonde.
6.3.2.1 CAUSES
Si la cause principale est l’anoxie, d’autres facteurs peuvent être à l’origine de ce type de syncope :
- l’hyperventilation.
- la pression hydrostatique modifie, à la descente, la Pp de CO2 et d’O2, entraînant une impression de
confort pouvant inciter à prolonger dangereusement l’apnée.
- la position du corps, tête en bas à la descente, puis en haut à la remontée, le regard tourné vers la surface,
entraîne une diminution de l’irrigation cérébrale.
- la stimulation du sinus carotidien par les mouvements de la tête peut entraîner une syncope vasovagale.
- la fatigue, le stress, le froid, l’hypoglycémie.
6.4 PRÉVENTION
• Proscrire l’hyperventilation.
• Limiter l’apnée à ses possibilités. Ne pas céder à la tentation de battre des records, que ce soit en
profondeur ou en durée. Faire surface avant de ressentir le besoin de respirer.
• S’accorder un temps de récupération en surface entre deux apnées, d’au moins 3 fois la durée de la
dernière apnée. Bien respirer sans tuba.
• Ne jamais pratiquer l’apnée seul. Toujours en binôme, l’un surveillant les évolutions de l’autre depuis la
surface. Prévenir le surveillant de bassin en début de séance.
• En milieu naturel, réduire le lestage au minimum.
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