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I NFO-SO C IÉ T É Votre site web : www.sdmtl.ca Mars 2012 - Volume 7 TROUVER UNE IMAGE POUR LA COUVERTURE Pangkor Laut Resort Dans ce numéro vous pourrez lire (entre autres) : Mieux comprendre les barrières influençant l’accès aux soins dentaires pour les prestataires d’une aide financière de dernier recours (p. 3) Le rôle du dentiste dans le dépistage, la prévention et la cessation des dépendances aux substances d’abus (p. 9) Pour l’amitié et l’unité de la profession SOMMAIRE Mot de Mot de l’éditeur................... 1 L’accident.............................. 2 Mieux comprendre les barrières influençant l’accès aux soins dentaires pour les prestataires d’une aide financière de dernier recours.................................. 3 Le coin universitaire : Le rôle du dentiste dans le dépistage, la prévention et la cessation des dépendances aux substances d’abus.......... 9 l’éditeur 2012 – une année charnière pour les dentistes ! De nombreux chantiers concernant la profession verront leur aboutissement en 2012. Chacun d’entre nous rêve d’une profession idéale. Mais que signifie le mot «idéal» pour la dentisterie ? Je crois qu’il commence par le respect de chacun dans ses fonctions et dans sa formation. Vous connaissez surement tous cette phrase célèbre de Martin Luther King, «I had a dream» (j’ai fait un rêve). On pourrait dire maintenant, j’ai rêvé à une profession idéale où tout le monde s’accorde et travaille ensemble. J’ai rêvé à une collaboration respectueuse ; j’ai rêvé à un professionnalisme interdisciplinaire ; j’ai rêvé à un changement positif pour la dentisterie, tout cela revient à la même phrase, «I had a dream». Peut-être que les années futures permettront la réalisation de ce rêve. Bulletin d’inscription.......... 22 Dans cette édition, vous trouverez un article portant un coté humaniste par Dre Graziella Jarjoura intitulé «L’accident». Dre Nancy Wassef nous livre un article présentant les difficultés pour l’accessibilité aux soins dentaires pour un certain groupe de la population. Finalement, dans le coin universitaire vous trouverez un article sur le dentiste et les drogues illicites - découvrir, prévenir et aider. Calendrier scientifique....... 23 Sur ce, je vous souhaite une bonne lecture et que vos rêves se réalisent. Claude Monette, B.Sc., M.Sc., D.M.D. Éditeur en chef Conception : SDM et ID-GRAPH Mise en page : ID-GRAPH ID-GRAPH - 514 573-7266 www.idgraph.ca NOTE : Le contenu du présent Bulletin ne peut être reproduit sans l’autorisation de la Société dentaire de Montréal. Les opinions et propos exprimés dans l’Info-Société ne reflètent que la pensée de leurs auteurs et n’engagent en aucune façon la responsabilité de la Société dentaire de Montréal. © 2012 1 Info-Société L’ACCIDENT Extrait du «prophète» De Khalil Gibran «Vos enfants ne sont pas vos enfants, Ce sont les fils et les filles de la vie qui se désire Ils vous traversent mais ne sont pas de vous, Et s’ils vous entourent, ils ne sont pas à vous.» Dre Graziella Jarjoura Shana bouge sur sa chaise… mal à la tête, son œil est douloureux ; elle essaie d’attirer l’attention de sa maman. Il faut lui raconter toute la vérité, mais tout s’est passé tellement vite. Elle se rappelle de la promenade en motoneige dans le bois ; elle était assise en arrière de son papa… elle l’aime et le serre fort, mais ce soir-là, il avait bu et elle a eu peur… trop rapide la motoneige, ralentis papa… Et puis bang, la collision avec l’autre motoneige. Shana vole et retombe sur la glace ; elle ne porte pas de casque… tout va trop vite… le nez qui saigne, les caillots de sang dans la gorge. Elle voudrait dormir, mais il ne faut pas… pourquoi papa ne m’amène-t-il pas à l’hôpital ? Polyana, sa sœur, prend soin d’elle pendant la nuit. Shana a subi un traumatisme crânien, une fracture de la mâchoire et de l’orbite de l’œil et a quelques dents brisées. Depuis ce moment, tout est chamboulé, rien n’est plus pareil ! Maman s’inquiète, a de la douleur, est remplie de colère et d’incompréhension… d’accord papa est irresponsable, mais pourquoi avoir attendu aussi longtemps avant d’être allé à l’hôpital ? Shana, son ange de douceur, se métamorphose… elle montre des signes d’agressivité, d’impatience et ne veut plus écouter ; la douleur est amère ! Le cerveau prend une pause par moments ; il faut répéter, réapprendre à lire et à écrire, commencer les chiffres… elle qui était, parmi les premières de sa classe. Les mots ne sont plus les mêmes, dans la tête de Shana, qui tourne sans cesse… et les cauchemars se font plus fréquents. La réhabilitation s’amorce avec un défilé de spécialistes : en orthopédagogie, ophtalmologie, pédodontie, neurochirurgie… Shana est bien encadrée, de sa maman et grand-maman, et doucement recommence à sourire, même si la concentration n’est plus la même. Société dentaire de Montréal 1 On évite de parler de l’accident. Shana s’ennuie de son papa, mais il est encore trop tôt… le corps et l’âme doivent guérir… il faut leur donner le temps nécessaire. « Quand ton esprit part en vagabond sur le vent, Quel seul et sans réfléchir, tu causes du tort à autrui et donc à toi-même. Et pour avoir commis ce tort tu devras frapper à la porte des bienheureux plus longtemps, sans qu’on t’entende ! » Khalil Gibran - Le prophète 2 MIEUX COMPRENDRE LES BARRIÈRES INFLUENÇANT L’ACCÈS AUX SOINS DENTAIRES POUR LES PRESTATAIRES D’UNE AIDE FINANCIÈRE DE DERNIER RECOURS Nancy Wassef BSc, DMD, MSc Il est généralement reconnu qu’il existe des déterminants sociaux qui ont des répercussions majeures sur la santé. La pauvreté figure parmi ces déterminants et ses effets touchent toutes les dimensions de la santé, incluant la santé dentaire1. Au-delà de la santé en soi, la pauvreté nuit souvent à l’accès aux soins et aux services, ce qui ne fait qu’exacerber le cercle vicieux des facteurs contribuant à la maladie. Contrairement aux soins médicaux, les citoyens québécois doivent prendre en charge les coûts liés aux traitements dentaires. C’est ainsi que les personnes provenant des milieux favorisés et les travailleurs avec des assurances privées ont plus tendance à fréquenter les cabinets privés régulièrement que les personnes provenant des milieux défavorisés. Or, les Québécois recevant une aide financière de dernier recours par le gouvernement sont admissibles au programme des services dentaires où certains traitements dispensés par les dentistes en cabinet privé sont pris en charge par la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ). À première vue, il semble que la contrainte financière pouvant nuire à l’accès pour les personnes en situation de pauvreté serait absente pour les personnes prestataires. Par contre, les statistiques démontrent que seulement 39% des personnes admissibles utilisent le programme gouvernemental des services dentaires2. Ce paradoxe apparent confirme qu’il y a certainement d’autres facteurs ayant des impacts importants sur l’accès aux soins dentaires. Barrières à l’utilisation des soins dentaires par les personnes prestataires d’une aide financière de dernier recours Les personnes prestataires d’une aide financière de dernier recours rencontrent plusieurs barrières nuisant à l’accès aux traitements dentaires. Pour chaque personne, une combinaison unique des barrières est souvent à la source de leurs problèmes. Les barrières principales sont de nature financière, socioculturelle, psychologique et informationnelle. Barrières financières Il existe le mythe que les personnes prestataires d’une aide financière de dernier recours n’ont aucune barrière financière 3 pour accéder aux soins dentaires au Québec puisque certains soins de base sont assurés par la RAMQ. Or, plusieurs d’entre elles doivent débourser les frais d’un transport pour se rendre au cabinet et souvent aussi pour une gardienne pour leurs enfants3. Le Règlement sur l’aide aux personnes et aux familles (2008) stipule qu’une prestation spéciale peut être versée pour les frais de déplacement pour recevoir des soins à l’endroit le plus proche de la résidence de la personne prestataire moyennant une attestation écrite par le dentiste. La personne prestataire doit évidemment utiliser le moyen de transport le moins coûteux selon les circonstances de son déplacement. Toutefois, à moins de recevoir une somme d’argent à l’avance, il est possible que la personne prestataire n’ait pas les moyens pour payer son déplacement, surtout si le rendez-vous a lieu à la fin du mois et que les ressources financières s’épuisent. Autrement, il est possible que le délai de remboursement amplifie les difficultés de survie rencontrées quotidiennement. Une personne prestataire devant prévoir une gardienne pour ses enfants peut également rencontrer des difficultés à se rendre chez le dentiste. Ces contraintes prennent encore plus d’importance si les soins requis s’étalent sur plusieurs séances. Au-delà des coûts réels associés aux déplacements et à la garde des enfants, il y a les coûts anticipés qui empêchent certaines personnes prestataires de consulter le dentiste. Les coûts anticipés prennent la forme de traitements que la personne prestataire pourrait nécessiter, mais qui ne sont pas assurés par la RAMQ. Certaines personnes prestataires préfèrent ignorer leur état de santé dentaire plutôt que d’être obligés de confronter le dentiste et d’avoir à faire un choix entre des traitements non assurés et les autres besoins quotidiens personnels et familiaux4. Info-Société Barrières socioculturelles Étant donné les défis quotidiens qu’affrontent les personnes prestataires d’une aide financière de dernier recours, la santé dentaire est rarement prioritaire5. En conséquence, dans les milieux pauvres, souvent les notions d’hygiène buccale et de prévention ont peu de place. Ces contraintes tracent le chemin vers la négligence et l’indifférence par rapport à la santé buccodentaire6. Les personnes prestataires d’une aide financière de dernier recours évaluent leurs besoins en santé dentaire différemment des professionnels dentaires. Non seulement le volet préventif est peu reconnu chez les personnes prestataires, mais une étude qualitative auprès d’un échantillon de personnes prestataires révéla que, lorsqu’il n’y a pas de douleur ou de cavité visible, certaines d’entre elles considèrent qu’il y aussi une absence de besoin et elles ne consultent pas nécessairement le dentiste7. Au Québec, 40 % de la population générale ne consultant pas le dentiste régulièrement n’en perçoivent pas la nécessité8. Les personnes prestataires vont parfois chez le dentiste pour un nettoyage de dents, mais la façon dont elles perçoivent la maladie dentaire pourrait les amener à refuser le traitement de lésions débutantes et asymptomatiques7. D’ailleurs, une étude française démontre que 20% des usagers de centres de soins gratuits pensent que les soins dentaires sont inutiles ou secondaires9. Lorsqu’une douleur est présente, mais tolérable, les personnes prestataires constatent le besoin de consultation. Par contre, elles vont souvent tenter de diagnostiquer le problème elles-mêmes ou avec l’aide de la famille et des amis plutôt que d’aller chez le dentiste. Parfois, elles vont également essayer de se traiter avec des remèdes maison et de maîtriser la douleur avec des analgésiques disponibles à la pharmacie sans prescription5. Les personnes prestataires considèrent que la consultation en cabinet privé est le dernier recours lorsque la douleur culmine à une intensité intolérable. La plupart du temps, la douleur empiète sur les fonctions quotidiennes comme le sommeil et la mastication7. Il n’est pas rare que les personnes prestataires attendent plus d’un mois avant de consulter le dentiste et qu’elles cessent de se faire soigner une fois que la douleur a disparu, peu importe si le traitement est complet ou non4. Au Québec, 42 % des personnes prestataires d’une aide financière de dernier recours n’ont pas de diplôme d’études secondaires10. La différence du niveau d’éducation produit un effet culturel qui peut engendrer des difficultés de communication entre la personne prestataire et le professionnel11. D’un côté, la personne prestataire décrit parfois ses symptômes d’une façon qui est difficile à comprendre pour le dentiste. Au revers de la médaille, le dentiste n’est pas toujours bien outillé pour savoir comment communiquer adéquatement avec la personne prestataire. Les différences culturelles se retrouvent aussi lors de la proposition des plans de traitement par le dentiste et lors du choix de traitement par le patient11. Entre autres, les personnes prestataires sont parfois obligées de choisir l’extraction d’une dent plutôt que d’accepter le traitement visant la conservation des dents comme recommandé par le dentiste. Pour certaines personnes prestataires, l’absence de recours aux soins dentaires est le résultat de perceptions que les dentistes sont malhonnêtes et que les traitements sont inefficaces et ne font que retarder une perte éventuelle des dents. En plus, certaines personnes prestataires se perçoivent comme étant vulnérables sur la chaise du dentiste et elles pensent que le dentiste abusera de son autorité pour leur imposer des traitements non nécessaires12. Barrières psychologiques La situation de pauvreté vécue par les personnes prestataires peut produire des sentiments de honte et une faible estime de soi rendant les premiers pas en cabinet dentaire irréalisables13. L’obligation des personnes prestataires de divulguer à la secrétaire dentaire leur situation financière amplifie ces sentiments en plus d’enfreindre parfois sur la confidentialité de la vie privée du patient, surtout lorsque celui-ci doit confirmer son statut de prestataire dans une salle d’attente pleine d’étrangers3. Le budget restreint des personnes prestataires fait en sorte que leurs activités sociales peuvent être grandement limitées. À la longue, ces limites causent un retrait de la société culminant en une absence de soutien social. Ce rejet sociétal peut faire en sorte que la personne prestataire perd son estime de soi déjà fragilisée et qu’elle ne valorise plus sa santé malgré des besoins importants. Ainsi, la réinsertion sociale sous la forme d’une visite en cabinet privé peut devenir une étape difficilement franchissable surtout si les traitements dentaires sont perçus comme étant hors de la portée socioéconomique du patient3. Les peurs jouent aussi un très grand rôle dans les barrières empêchant les personnes prestataires d’une aide financière de dernier recours à consulter le dentiste. Comme plusieurs individus de la population générale, il y a des personnes prestataires qui ont peur de subir de la douleur lors des traitements dentaires. Souvent, les personnes prestataires ne consultent le dentiste que lorsqu’elles jugent que la douleur de leur problème est pire que la douleur qu’elles pensent ressentir pendant le traitement7. Une autre forme de peur exprimée par des Société dentaire de Montréal 4 personnes prestataires est celle d’être rejeté ou stigmatisé par les professionnels dentaires et leur équipe13. Une étude aux États-Unis démontre que les parents d’enfants assurés par Medicaid ont vécu des interactions négatives avec l’équipe dentaire lors de rendez-vous en cabinet privé. En particulier, les parents rapportaient le manque de respect, la discrimination et un sentiment d’infériorité lors des consultations avec leurs enfants14. Barrières informationnelles Le régime gouvernemental de services dentaires ne couvre pas nécessairement tous les soins requis pour préserver la santé dentaire des personnes prestataires d’une aide financière de dernier recours. La compréhension des détails se complique davantage avec les délais de carence qui s’imposent. Le résultat est que les personnes prestataires ne sont pas toujours au courant de tous les soins auxquels elles ont droit. Même les personnes prestataires de longue date ayant consulté des dentistes dans le passé sont parfois incertaines de leur couverture. Les membres de l’équipe dentaire sont en mesure de fournir les explications nécessaires, mais plusieurs personnes prestataires ne sont pas à l’aise de s’informer auprès d’eux3. Difficultés rencontrées par les dentistes lors de la fréquentation des personnes prestataires d’une aide financière de dernier recours dans leur cabinet privé Les dentistes perçoivent des difficultés lorsqu’ils reçoivent des patients qui sont prestataires d’une aide financière de dernier recours dans leur cabinet. Des problèmes au niveau de l’observance par les patients du fonctionnement du cabinet et des lacunes issues de l’assurance offerte par la RAMQ font état des plaintes principales des professionnels dentaires. L’observance Plusieurs dentistes constatent que les personnes prestataires d’une aide financière de dernier recours manquent leurs rendez-vous plus souvent que les autres patients. Une étude française convoquant des personnes avec et sans une couverture gouvernementale à subir un examen dentaire a démontré que 13 % des bénéficiaires de la couverture gratuite ne se sont pas présentés à leur rendez-vous contre 8 % des autres personnes (p < 0,001)11. Certaines personnes prestataires rapportent des absences à des rendez-vous parce qu’elles ne sont pas à l’aise avec le traitement en cours. Ainsi, elles préfèrent manquer le rendez-vous plutôt que de confronter les recommandations du dentiste avec une opinion personnelle discordante7. 5 Même lorsque les personnes prestataires d’une aide financière de dernier recours se présentent pour leur rendez-vous, les dentistes éprouvent de la résistance relativement à l’acceptation des plans de traitements dentaires. Le refus de traitement est souvent lié au manque de connaissances dentaires, à la faible importance accordée à la santé dentaire, aux contraintes financières et aux perceptions que les dentistes sont malhonnêtes et que les traitements sont inefficaces15. Pour les dentistes, le maintien d’une santé dentaire optimale est très difficile quand les patients refusent les traitements proposés7. Avec la consultation dentaire viennent habituellement des conseils ou des instructions pour l’amélioration ou le maintien de la santé dentaire. Les recommandations varient des instructions pour l’hygiène de base jusqu’aux consignes postopératoires. Les personnes prestataires d’une aide financière de dernier recours ne respectent pas toujours les recommandations qui leur sont données. Il est possible que leurs autres préoccupations issues de leur précarité rendent difficile l’observance des conseils. Il est également possible que les explications fournies par le dentiste ne soient pas adéquatement assimilées par les personnes prestataires. Plusieurs dentistes ressentent une frustration lorsque les personnes prestataires présentent un état buccal qui aurait dû être contrôlé par les instructions données. Les dentistes pensent parfois qu’ils perdent leur temps à essayer d’améliorer l’état buccodentaire de ces patients et ils peuvent montrer de la réticence à s’investir dans leur santé par la suite15. Les tarifs de la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) Un certain nombre de services dentaires de base sont assurés par la RAMQ pour les personnes prestataires d’une aide financière de dernier recours. Or, les tarifs sont considérablement plus bas que ceux suggérés par l’Association des chirurgiens dentistes du Québec (ACDQ) et facturés aux patients non assurés par la couverture gouvernementale. Cette différence rend la pratique dentaire auprès des personnes prestataires difficilement rentable pour le dentiste traitant. Au besoin, les personnes prestataires peuvent choisir des traitements qui ne sont pas assurés par la RAMQ, mais les patients sont responsables d’acquitter les honoraires. Parfois, le dentiste accepte des versements sur une période de temps prolongée pour aider les patients à s’offrir leurs traitements; par contre, cette pratique est de moins en moins courante parce qu’il y a des personnes qui ne sont pas fidèles à leur arrangement. Dans de tels cas, le dentiste peut refuser de poursuivre les traitements du patient délinquant. Info-Société Perception par les dentistes des personnes prestataires d’une aide financière de dernier recours En 2007, un sondage auprès des dentistes québécois révéla que plusieurs d’entre eux ont des perceptions négatives des personnes prestataires d’une aide financière de dernier recours qu’ils rencontrent dans leur cabinet. Certains dentistes pensent que les personnes prestataires ont un manque de motivation, une hygiène dentaire déficiente, des habitudes de vie malsaines, une personnalité déplaisante, de la difficulté à comprendre les instructions données, un vocabulaire désagréable, une faible éducation et une mauvaise attitude par rapport au travail16. Ces perceptions, jumelées avec les difficultés discutées ci-dessus, amènent certains dentistes à mettre en œuvre des stratégies qui nuisent à l’accès aux traitements en cabinet privé. Entre autres, les stratégies d’exclusion incluent l’annulation des rendez-vous de rappel, l’exigence de l’auto-confirmation des rendez-vous, de la difficulté à prendre un rendez-vous, des rendez-vous d’une durée plus courte, des pénalités pour les rendez-vous manqués, la référence du patient à un autre dentiste, la non- participation à la RAMQ par le dentiste et moins d’instructions d’hygiène données au patient16. CONCLUSION Le comportement de la personne prestataire sera modifié par les barrières qu’elle rencontre lorsqu’elle veut accéder aux soins dentaires. Chaque personne prestataire a sa combinaison de barrières qui lui est particulière. Par exemple, certaines personnes prestataires vont être plus vulnérables sur le plan psychologique souffrant beaucoup de peurs et de problèmes reliés à la confiance en soi. D’autres personnes prestataires peuvent avoir plus de difficultés avec les barrières financières, particulièrement si elles ont des enfants à leur charge. Le comportement des personnes prestataires sera aussi modifié par la couverture gouvernementale. Sachant que certains soins sont couverts, les personnes prestataires peuvent être motivées à consulter le dentiste et recevoir les soins nécessaires. Néanmoins, sachant que plusieurs soins sont non seulement absents de la couverture gouvernementale, mais qu’ils sont également hors de leur portée socio-économique, d’autres personnes prestataires seront beaucoup plus réticentes à se rendre en cabinet privé. être positive pour certains dentistes et négative pour d’autres. Les dentistes sont plus motivés à soigner les personnes prestataires qui respectent l’organisation du cabinet et qui valorisent leur santé dentaire. Mais les personnes prestataires qui semblent avoir peu de respect pour l’équipe dentaire et qui sont négligentes au niveau de leur santé peuvent susciter des sentiments négatifs chez l’ensemble de l’équipe dentaire. L’attitude des dentistes est particulièrement importante parce que ce sont eux qui établissent l’organisation de leur clinique. La couverture gouvernementale va aussi influencer l’organisation de la clinique, surtout chez les dentistes ayant une clientèle élevée de personnes prestataires, parce que les tarifs modiques établis par la RAMQ peuvent compromettre la survie de la clinique. Finalement, ce sont tous ces éléments ensemble qui vont faciliter ou nuire à l’accès aux services dentaires pour les personnes prestataires d’une aide financière de dernier recours. La formation en médecine dentaire touche très peu les divers aspects sociaux influençant la vie des patients. En général, les dentistes savent quelles précautions prendre pour un patient diabétique ou une femme enceinte. Mais savent-ils traiter un patient en situation de pauvreté? Savent-ils quels effets cette situation a sur sa santé buccodentaire et sa capacité d’obtenir des soins? L’éducation des professionnels de la santé est un premier pas vers la compréhension de la réalité des personnes en situation de pauvreté et l’amélioration de l’accès aux soins dentaires. L’auteur désire remercier Christophe Bedos et Jacques Durocher pour avoir révisé la première version de cet article. Le comportement des personnes prestataires d’une aide financière de dernier recours influence la perception et les attitudes que les dentistes développent envers elles. Cette influence peut Société dentaire de Montréal 6 RÉFÉRENCES (1) de la Fuente-Hernandez J, Acosta-Gio AE. The effect of poverty on access to oral health care. J Am DentAssoc 2007;138:14431445. (2) RAMQ. Tableau SD.05: Évolution du programme de services dentaires pour les prestataires d’une aide financière de dernier recours âgés de 10 ans et plus, rémunération à l’acte - Services dentaires, Québec, 2005-2009. 2010. 21-12-2010. Ref Type: Online Source (3) À l’écoute les uns des autres: Les prestataires de l’assistance-emploi parlent aux professionnels de la santé buccodentaire. [DVD], Montréal: Université McGill; 2007. (4) Bedos C, Brodeur J-M, Benigeri M, Olivier M. Dental care pathway of Quebecers after a broken filling. Community Dental Health 2004;21:139-146. (5) Mertz E, Manuel-Barkin CE, Isman BA, O’Neill EH. Improving oral health care systems in California: A report of the California Dental Access Project. 1-250. 2000. San Francisco, The Centerforthe Health Professions, University of California. Ref Type: Report (6) Jamieson L, Thomson M. Dental health, dental neglect, and use of services in adult Dunedin population sample. New Zealand Dental Journal 2002;98:4-8. (7) Bedos C, Brodeur J-M, Levine A, Richard L, Boucheron L, Mereus W. Perception of dental illness among persons receiving public assistance in Montréal. American Journal of Public Health 2005;95:1340-1344. (8) Brodeur J-M, Payette M, Olivier M, Chabot D, Benigeri M, Williamson S. Étude 1994-1995 sur la santé buccodentaire des adultes québécois de 35 à 44 ans. 1-159. 1995. Montréal, Ministère de la Santé et des Services sociaux, Direction des communications. Ref Type: Report LA SOCIÉTÉ DENTAIRE DE MONTRÉAL CONSEIL D’ADMINISTRATION 2011-2012 PRÉSIDENT Dr Claude Bissonnette TRÉSORIER Dr Mario Auger BIENVENUE AUX NOUVEAUX MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ DENTAIRE DE MONTRÉAL Dr Stefan Ciobanu Dre Pauline Phang Dr Dominic Côté Dr Dave Rioux Dre Mélanie Campese Dre Elissar Srouji Dr Ahmed-Zouhir Chiali Dr Laurent Franco Dr François Gagnon Dr Bassel Kano Dre Sonia Lapointe COMITÉ INFO-SOCIÉTÉ Dr Claude Monette Dre Marie-Claude Michaud Dre Louma Neeme COMITÉ SCIENTIFIQUE Dre Nada Malouf COMITÉ RECRUTEMENT ET COMMANDITE Dre Graziella Jarjoura (9) Beynet A, Menahem G. Problèmes dentaires et précarité. Questions d’économie de la santé 2002;48:1-6. (10) Remarais F-H, Crépeau F. Rapport statistique sur la clientèle des programmes d’assistance sociale. 1-14. 2008. Québec, Direction de la statistique et du soutien aux expérimentations, Direction générale adjointe de la recherche de l’évaluation et de la statistique, Ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale (MESS). Ref Type: Report (11) Borgès Da Silva G, Minguet-Fabbri J, Orgebin JY, Herter G, Chanut G, Mabriez JC. Qualité des soins dentaires et inégalités sociales de santé. Revue Médicale de l’Assurance Maladie 2002;33:193-200. (12) Bedos C, Brodeur J-M, Boucheron L et al. The dental care pathway of welfare recipients in Quebec. Social Science & Medicine 2003;57:2089-2099. (13) Un grand défi pour la profession: L’accès aux soins buccodentaires des populations vulnérables. Journées dentaires internationales du Québec; Montréal: 2008. (14) Mofidi M, Rozier G, King R. Problems with access to dental care for Medicaid-insured children: What caregivers think. American Journal of Public Health 2002;92:53-58. (15) Freeman R. Barriers to accessing and accepting dental care. British Dental Journal 1999;187:81-84. (16) Arpin S. Perceptions et offre de services des dentistes à l’égard des personnes en situation de pauvreté [ Département de médecine sociale et préventive, Faculté de médecine, Université de Montréal; 2007. 7 Info-Société SECRÉTARIAT Francine Desgagné 4730, rue Messier Montréal (Québec) H2H 2J1 Tél. : 514 328-1551 [email protected] www.sdmtl.ca Heures d’ouverture du bureau : Lundi : 9h à 17h Mardi : 9h à 12h Mercredi : 9h à 17h Jeudi : 9h à 12h Société dentaire de Montréal 8 LE COIN UNIVERSITAIRE 2. Un désir irrépressible de continuer à consommer malgré les conséquences négatives qu’engendre la substance ; Chers collègues, Plusieurs d’entre nous ont du faire face de plus en plus à une clientèle qui consomme des substances illicites. Dr Denys Ruel Dans cet article, deux jeunes étudiants de la faculté dentaire de l’Université de Montréal partagent avec vous un travail qu’ils ont réalisé au CLSC des Faubourgs de Montréal dans le cadre de leur stage. Bonne lecture. 3. Le soulagement ressenti lors de la consommation ; Mathieu Vachon et Shawn Blanchard Provenance : Travail dirigé par Dr Ruel et complété à l’Université de Montréal, en coopération avec la bibliothèque du CLSC des Faubourgs de Montréal - 2010 INTRODUCTION En tant que stagiaires à la clinique dentaire du CLSC des Faubourgs de Montréal, nous avons eu à traiter des personnes avec des problèmes de consommation de toutes sortes. Suite à plusieurs traitements dentaires, nous nous sommes questionnés à savoir si notre rôle en tant que chirurgien dentiste, devait se limiter à fournir les soins dentaires nécessaires ou si nous pouvions faire notre part pour aider nos patients à cesser de consommer. Nous avons donc décidé de faire ce projet dans lequel nous parlerons du rôle du dentiste, des drogues et de leurs méfaits ainsi que du dépistage, de la prévention et de la cessation des dépendances aux substances d’abus. 9 1. Impossibilité de résister au besoin de consommer ; 2. Accroissement de la tension interne, de l’anxiété avant la consommation habituellement ; LE RÔLE DU DENTISTE DANS LE DÉPISTAGE, LA PRÉVENTION ET LA CESSATION DES DÉPENDANCES AUX SUBSTANCES D’ABUS. La dentisterie est bien souvent perçue comme une profession très technique et spécialisée où le dentiste se restreint à traiter les problèmes bucco-dentaires. Cependant, la profession à beaucoup évoluer au fil du temps. Le dentiste d’aujourd’hui ne se limite plus seulement à guérir, il possède en effet un champ La dépendance peut être physique et/ou psychologique et se caractérise par les symptômes généraux suivants (2) : Lors de la lecture de ce travail dirigé, vous constaterez que le rôle du dentiste devient de plus en plus important dans le dépistage et l’aide vis-à-vis cette clientèle problématique. Denys F. Ruel B.Sc, DMD, D,E,E.S. LE RÔLE DU DENTISTE ET DE SON ÉQUIPE 3. Des changements physiologiques et psychologiques lors du sevrage. d’action plus vaste faisant de lui un professionnel de la santé avec un rôle important à jouer en matière de prévention. Maintenant, revient-il aux chirurgiens dentistes d’intervenir en matière de dépendance aux drogues ? Le cas échéant, se sentent-ils compétents pour intervenir ? Avant même de répondre à ces questions, il est tout d’abord très important de définir ce qu’est un «abus de substance». Info-Société Il s’agit de consommer une substance afin de modifier ou contrôler l’humeur ou l’état d’esprit d’une manière qui est illégale ou qui peut nuire à soi-même ou à autrui (1). L’abus de substance peut mener à la dépendance. Trois facteurs peuvent nous indiquer qu’il y a dépendance soit (1) : 1. Une augmentation de la consommation de la substance ; 4. Le sentiment de perte de contrôle de soi pendant la consommation. Il est important de comprendre qu’une dépendance ne s’installe jamais du jour au lendemain. C’est donc dire qu’un patient peut abuser de certaines substances pendant un certain temps sans toutefois en être encore dépendant. Donc, si l’on intervient rapidement avec le patient, la dépendance pourrait être évitée (1). C’est pourquoi il est primordial de dépister un abus à un stade précoce, afin de venir en aide au patient le plus tôt possible. Malheureusement, trop souvent les intervenants en toxicomanie sont consultés lorsque le patient éprouve déjà une conduite addictive. C’est pour cette raison qu’ils ont besoin de partenaires, parmi les intervenants de santé primaire, qu’ils soient médecins généralistes, pharmaciens ou chirurgiens dentistes (3). En effet, le dentiste occupe une position stratégique pour prévenir ou détecter des dépendances et informer sur leurs méfaits et ce pour plusieurs raisons. Premièrement, ils ont l’opportunité de voir leurs patients chaque 6 à 12 mois, ce qui permet un meilleur suivi du patient. Deuxièmement, comme nous le savons et comme nous allons le voir, la bouche reflète assez fidèlement l’hygiène de vie d’un patient. Par le fait même nous sommes en mesure de voir si le patient a une bonne hygiène corporelle, une bonne alimentation ou des problèmes bucco-dentaires qui témoignent d’une mauvaise hygiène, de carences alimentaires ou mêmes de certaines maladies systémiques. Troisièmement, le dentiste doit tenir compte des facteurs de risques des traitements qu’il doit effectuer. Plusieurs drogues, nous allons le voir, sont un obstacle au succès de certains traitements. Par exemple, la cigarette est un facteur de risque lorsqu’on prévoit faire des chirurgies parodontales ou la pose d’implants dentaires (4). C’est pourquoi le dentiste est appelé à donner des conseils pour faciliter la guérison soit d’une pathologie ou de la région soignée. C’est d’ailleurs ce que nous retrouvons à l’article 28 de la loi sur les dentistes : «le dentiste peut, dans l’exercice de sa profession, donner des conseils permettant de prévenir les maladies des dents, de la bouche ou des maxillaires et promouvoir les moyens favorisant une bonne dentition». Ces conseils s’ils sont écoutés et appliqués, entraîneront un sevrage de la substance consommée. Le dentiste se trouve donc en bonne position pour la lutte contre les dépendances (5), car les conseils donnés par un professionnel de la santé envers lequel nous avons confiance, sont très influençant. En effet, les gens ont tendance à écouter et croire davantage leur dentiste ou médecin lorsque ces derniers les avisent de cesser de consommer une substance d’abus que lorsqu’il s’agit d’un conseil d’un ami. Or, le dentiste doit profiter de cette confiance qu’on lui donne, sans toutefois en abuser, pour éduquer son patient (6). Quatrièmement, nous devons prescrire et administrer des médicaments et parmi eux, plusieurs ont des effets adverses avec des substances comme l’alcool, le tabac et d’autres drogues. Selon la Société dentaire de Montréal Federal Drug Administration, plus de la moitié des 100 drogues les plus prescrites contiennent des ingrédients qui ont des effets adverses avec l’alcool et 2500 morts sont rapportés annuellement dû à cette combinaison létale (1). Il est donc de notre devoir d’avertir le patient, mais également au patient de nous aviser qu’il a des problèmes de consommation. Bien entendu, si on explique au patient qu’il est primordial pour sa santé et son bienêtre de nous avertir de ses problèmes de consommation pour éviter des complications opératoires et/ou des interactions médicamenteuses, celui-ci sera plus à l’aise de nous en parler s’il comprend l’importance de cette information. Cinquièmement selon une étude de Miller et associés, il a été démontré que la plupart des patients s’attendent à ce que les professionnels de la santé les questionnent sur leurs habitudes de vie et qu’ils s’intéressent à leur poids, leur consommation d’alcool, de cigarettes et à leur condition physique (7). Le dentiste ne devrait donc pas s’abstenir d’aborder de tels sujets par peur de déplaire à sa clientèle mais plutôt se sentir à l’aise puisque les patients s’attendent à ce genre de questions. Par contre, les patients informeront plus souvent l’équipe dentaire avant même de le dire au dentiste (1). Pour cette raison, il est d’une importance primordiale que le dentiste éduque tout son personnel, ses hygiénistes et ses assistantes afin qu’ils contribuent au dépistage des dépendances. Sixièmement, selon l’article 2.01 du code de déontologie des dentistes, il est de notre devoir de participer à l’amélioration de la santé publique. Nous savons maintenant que le dentiste a bel et bien un rôle à jouer dans le traitement des dépendances et que les patients s’attendent à recevoir de leur aide. Cependant, intervenir de la bonne façon n’est pas si simple et nécessite des connaissances en toxicomanie et en 10 intervention, ainsi que des considérations éthiques et légales. C’est sur ces sujets que nous allons se pencher dans les prochaines pages pour vous donner les ressources nécessaires afin de réaliser des interventions efficaces. LES DROGUES ET LEURS MÉFAITS Pour être en mesure de dépister un usage abusif d’une quelconque drogue, il faut d’abord et avant tout connaître cette drogue, ces effets physiques et psychiques ainsi que les signes extérieurs qui témoignent de l’usage abusif de cette drogue. Voici donc une description des principales drogues et de leurs effets. A. STIMULANTS DU SYSTÈME NERVEUX CENTRAL Drogues qui stimulent le SNC. 1. TABAC : 1.1.Généralités : «Le tabac est la deuxième substance psychoactive la plus consommée dans le monde après la caféine» (2). Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, il y aurait 1,3 milliard (33% des gens âgés de 15 ans et plus) de fumeurs à travers la planète. Le tabac est la deuxième cause de mortalité mondiale après le VIH/SIDA avec un total de 5 millions de personnes par année (8). Aux États-Unis, 45,8 millions (22,5%) de personnes fument la cigarette (9). 70% d’entre eux affirment vouloir arrêter de fumer, mais seulement une petite quantité en sont capables dû à la forte dépendance que cause la nicotine (10). À chaque jour, 3000 enfants et adolescents deviennent de nouveaux consommateurs (9). Chaque année 440 000 morts sont directement attribuables au tabac et 35 000 à la fumée secondaire. Parmi ce nombre, 33% meurent de problème cardiovasculaire, 28% du cancer du poumon, 11 22% de problèmes respiratoires et au moins 7% d’un cancer autre que celui du poumon. Un fumeur meurt en moyenne 10 ans plus jeune qu’un non-fumeur (10) . Au Canada, le taux de tabagisme chez les personnes de 15 ans et plus a passé de 25% (6,1 millions de personnes) en 1999 à 18% (4,9 millions de personnes) en 2008 (11). Pour ce qui est du Québec, le pourcentage de fumeurs a passé de 28% en 1999 à 18% en 2009 (12). De plus, «il y a une nette corrélation entre la consommation de cigarettes et celle d’autres psychotropes. La dépendance au tabac est commune chez les utilisateurs d’autres drogues. La prévalence des fumeurs se situe entre 85 et 100% chez les sujets qui consomment de manière abusive de l’alcool, des opiacés et de la cocaïne. Plusieurs études démontrent une corrélation entre le degré de dépendance à l’alcool et la dépendance au tabac. Les alcooliques ont tendance à fumer davantage et à subir plus d’échecs lorsqu’ils tentent de s’abstenir de la cigarette» (13). 1.2. Effets à court terme (13) : Chez les non-fumeurs, les premières bouffées de cigarette peuvent causer des effets désagréables comme des étourdissements, des maux de tête, une irritation de la gorge, de la toux, une faiblesse, des tremblements, des vomissements, de la diarrhée et des crampes abdominales. Par contre, chez les fumeurs, le tabac provoque une poussée d’énergie, suivi d’une sensation de calme, de relaxation et de satisfaction. Les autres effets à court terme du tabac sont les suivants : • Réduction de l’anxiété, de l’irritabilité et du stress • Augmentation de la vigilance • Facilitation de la mémoire, de l’attention et de la concentration • Constriction des vaisseaux sanguins • Augmentation du rythme et du débit cardiaques Info-Société • Augmentation de la pression artérielle • Augmentation des sécrétions bronchiques • Relaxation musculaire • Diminution de l’appétit • Augmentation du métabolisme de base • Augmentation de la température corporelle 1.3. Effets à long terme (13) : Le tabac consommé sur une longue période de temps peut entrainer de graves problèmes de santé et même causer la mort. Le tabac affecte plusieurs systèmes dont le système respiratoire, le système cardiovasculaire et le système gastrointestinal. Il contient aussi plusieurs substances carcinogènes responsables du cancer du poumon, de la bouche, du pharynx, du larynx, de l’estomac, de l’œsophage, du pancréas, de la vessie, du rein et du col de l’utérus. De plus, le tabagisme augmente les chances d’avoir des cataractes, de souffrir d’ostéoporose, de diabète de type 2, d’avoir des problèmes de goût, d’odorat, de cicatrisation ainsi que des problèmes de sommeil. L’usage du tabac est également néfaste sur la grossesse et peut causer des problèmes au nouveau-né. 1.4. Pathologies orofaciales : Plusieurs lésions et pathologies sont associées à l’usage du tabac. En voici la liste : • Halitose (14) • Xérostomie (14) • Gingivite ulcéro-nécrotique (14) • Parodontite : Aux États-Unis, 50% des parodontites chez les adultes ont été attribués à la cigarette (9). • Pigmentation extrinsèque : Le goudron présent dans le tabac se dissout dans la salive et cause une coloration brune au niveau de la surface lingual des incisives inférieures. Pour les adeptes du tabac à chiquer cette coloration se retrouve à l’endroit où il place leur tabac (14). • Langue chevelue : Accumulation de kératine au niveau des papilles filiformes de la surface dorsale de la langue. Les papilles hypertrophiques sont colorées par le tabac, ce qui peut donner une coloration noire à la région affectée de la langue (14). • Stomatite nicotinique : C’est une forme de kératose accompagnée d’inflammation. Elle se présente sous forme de papules blanches avec un centre érythémateux et se voit surtout au niveau du palais dur et parfois au palais mou. On la retrouve surtout chez les fumeurs de pipe et de cigare, car elle causée par la chaleur (14). • Lésion blanche associées à l’utilisation du tabac à chiquer : Lésion blanche ou grisâtre opalescente avec une surface verruqueuse d’apparence ridée lui donnant une texture semblable à celle du cuir. Ce type de tabac cause également plusieurs problèmes dentaires et parodontaux comme une récession gingivale et une perte d’os alvéolaire à l’endroit où le tabac est placé. Il peut aussi causer la carie lorsqu’il contient du sucre (14). • Leucoplasie : Terme clinique pour décrire une lésion blanche de la muqueuse buccale. Représente 85% de toutes les lésions prémalignes de la cavité buccale. La présence de dysplasie épithéliale ou de carcinome épidermoïde est confirmée histologiquement dans 5 à 25% des cas. Dans le reste des cas il s’agit d’une hyperkératose (14). • Érythroplasie : Lésion rouge de la muqueuse buccale (14). • Érythroleucoplasie : Lésion blanche sur une zone érythémateuse. À l’histologie, elle démontre souvent un degré de dysplasie épithéliale plus avancée que la leucoplasie (14). • Carcinome épidermoïde. Tumeur maligne la plus fréquente en bouche. Représente environ 94% de tous les cas de cancer buccal. Les sites les plus souvent affectés par ordre de fréquence sont : la langue (surface latérale et ventrale), la lèvre inférieure, le plancher de la bouche, le palais mou et l’oropharynx. Les gencives, le coussin rétromolaire et la muqueuse buccale peuvent aussi être atteints. Le carcinome épidermoïde peut se présenter sous plusieurs formes (leucoplasie, érythroplasie, érythroleucoplasie, ulcération chronique, masse exophytique, lésion verruqueuse…), par contre la présence d’induration, de fixation et d’ulcération est souvent notée (14). 1.5. Considérations cliniques : Le tabagisme est souvent associé à un haut taux d’échec pour les traitements parodontaux ainsi qu’à un faible taux d’ostéointégration des implants dentaires. De plus, la guérison des lésions en bouche se fait plus lentement (9). Un examen buccal fréquent est très important pour essayer de dépister le plus tôt possible les lésions prémalignes. Le dentiste devrait également parler des conséquences du tabac sur la santé à ses patients et leurs donner toutes les ressources nécessaires pour qu’ils puissent arrêter. Il est aussi important de tenir compte des nombreuses interactions médicamenteuses avec le tabac avant de prescrire certains médicaments. 2. COCAÏNE : (poudre, crack, rock, freebase) 2.1. Généralités : La cocaïne est une fine poudre blanche qui peut être prisée (reniflée), injectée par voie intraveineuse ou fumée. Le crack, aussi appelé ‘’rock’’ ou ‘’freebase’’, est un mélange de cocaïne, de bicarbonate de sodium et d’eau (2). 2.2. Effets à court terme : L’effet est de très courte durée. «Son usage provoque une euphorie fébrile, un sentiment de puissance intellectuelle et physique et une suppression de la fatigue, de l’appétit et de la douleur» Société dentaire de Montréal (2). Le rythme cardiaque et respiratoire augmente, les pupilles se dilatent, les muqueuses buccales s’assèchent. Si l’individu a consommé du crack les lèvres peuvent être très gercées ou saignantes (15). Après, la période d’euphorie, une sensation de malaise (dysphorie) et d’anxiété s’installe ce qui pousse le consommateur à répéter la prise» (2). «De fortes doses peuvent entrainer une forte agitation, de la paranoïa, un comportement changeant ou violent, des tremblements, une mauvaise coordination, des mouvements convulsifs, des hallucinations, des maux de tête, des douleurs ou des pressions dans la poitrine, des nausées, une vision floue, de la fièvre, des spasmes musculaires, des convulsions et la mort» (16). 2.3. Effets à long terme : «Les utilisateurs chroniques qui consomment des doses élevées et qui traversent des épisodes de consommation excessive, puis des périodes d’abstinence peuvent présenter des sautes d’humeur, de l’agitation, une excitabilité extrême, des troubles du sommeil, une attitude soupçonneuse, des hallucinations et des délires, des troubles de l’appétit, une perte de poids, de la constipation et de l’impuissance» (16). On associe également la consommation de cocaïne à des troubles du rythme cardiaque et une hypertension artérielle qui peuvent être à l’origine d’accidents cardiovasculaires. La cocaïne enlève aussi les inhibitions et pousse le consommateur à divers comportements indésirables ou même criminels ce qui peut conduire à des actes de violence ou d’agression sexuelle. Un risque de transmission d’hépatites A, B et C est possible avec le matériel utilisé pour renifler la cocaïne et lorsqu’injectée des risques de contracter le virus du SIDA et des hépatites B et C sont possibles (2). 2.4. Pathologies orofaciales : «Les signes caractéristiques que présente un utilisateur chronique de cocaïne prisée 12 sont la congestion nasale et des écoulements de nez, les narines gercées et une perforation du septum nasal» (16). En bouche, il est possible de retrouver une perforation du palais, des lésions gingivales, une érosion des surfaces dentaires et des caries dentaires (17). Parfois, les consommateurs de cocaïne frottent la poudre sur la gencive pour obtenir un soulagement des douleurs buccales ou pour tester la pureté de la drogue. Cette méthode cause de l’inflammation gingivale, une gencive qui saigne beaucoup et une desquamation épithéliale (18). 2.5. Considérations cliniques : Les traitements dentaires devraient se faire entre 6 et 24 après la dernière consommation de cocaïne pour éviter les complications surtout lorsque le dentiste doit utiliser un anesthésique local avec épinéphrine ou des cordes à rétracter (17). 3. MÉTHAMPHÉTAMINE (speed, crystal,meth, ice) 3.1. Généralités : Elle fait partie de la classe des amphétamines. Disponible sous forme de poudre. Peut se prendre par voie orale, se fumer, se reniflée ou s’injecter (16). 3.2. Effets à court terme : Les effets de la méthamphétamine sont imprévisibles. Certaines personnes peuvent ressentir un accroissement d’énergie, de la vivacité d’esprit et un sentiment de bien-être, alors que d’autres peuvent éprouver des crises de paniques et de l’anxiété (15). La consommation de méthamphétamine à court terme peut produire beaucoup d’autres effets, notamment un rythme cardiaque et respiratoire rapide, une hausse de la pression sanguine, une transpiration excessive, la dilatation des pupilles, un assèchement de la bouche et des grincements de dents (bruxisme). «Il est possible que le consommateur devienne volubile, agité, excité ou 13 qu’il se sente puissant, supérieur, agressif, hostile, qu’il se conduise d’une façon bizarre ou répétitive. L’absorption de très fortes doses provoque des rougeurs, une pâleur, un rythme cardiaque très rapide ou irrégulier, des tremblements, une grave paranoïa, des hallucinations effrayantes. Ces substances peuvent entraîner la mort par rupture de vaisseaux sanguins dans le cerveau, par insuffisance cardiaque ou par une fièvre très élevée. La violence, accidentelle ou autre, est la principale cause de décès liée à la consommation d’amphétamines» (16). 3.3. Effets à long terme : «Les consommateurs chroniques de doses élevées peuvent souffrir de malnutrition ou d’une psychose liée aux amphétamines, un trouble mental ressemblant à la schizophrénie. Ils sont susceptibles de devenir violent. Les impuretés injectées avec la drogue peuvent obstruer ou affaiblir les petits vaisseaux sanguins. Il peut s’ensuivre des lésions rénales, des affections pulmonaires, des accidents vasculaires cérébraux ou d’autres affections des tissus» (16). Les consommateurs peuvent également porter des lésions à la peau (causées par le grattage compulsif de la peau à la suite d’hallucinations tactiles donnant à penser que des insectes rampent sous la peau). Ils peuvent aussi ressentir de l’anxiété ou de la tension, constater une diminution de l’appétit et perdre du poids et développer des mouvements corporels répétitifs (15). 3.4. Pathologies orofaciales : Les personnes qui consomment de la méthamphétamine sont réputées pour avoir plusieurs problèmes dentaires à un point tel que dans la littérature, on utilise l’expression ‘’bouche meth’’ pour qualifier la bouche des consommateurs de cette drogue. Une étude de Shetty & coll., a remarqué que les consommateurs ont souvent des douleurs au niveau des dents, des caries rampantes, des dents manquantes ou fracturées et des dents Info-Société avec de l’abrasion. La consommation de méthamphétamine causerait également de la xérostomie, du bruxisme et des problèmes au niveau de l’articulation temporo-mandibulaire. Cependant, les résultats de cette étude montrent aussi que les utilisateurs par voie intraveineuse ont un taux significativement plus haut de problèmes dentaires que les utilisateurs qui fument ou qui inhalent la méthamphétamine (19). Selon Laslett & Crofts, les problèmes dentaires ne seraient pas nécessairement causés par la méthamphétamine, mais plutôt à une négligence de l’hygiène dentaire, à des traumas, et à une mauvaise alimentation (20). C’est ce que conclut aussi une étude effectuée par Morio, Marshall, Qian & Morgan. Selon eux, il est vrai que les utilisateurs de méthamphétamine ont plus de caries que les non-utilisateurs. Par contre, ils ont aussi une moins bonne alimentation, ils se brossent moins les dents et ont des habitudes qui favorisent la formation de caries rampantes (21). 3.5. Considérations cliniques : Les dentistes sont dans une excellente position pour faire le diagnostic précoce d’une consommation abusive de méthamphétamine. Ces patients devraient recevoir de bonnes instructions d’hygiènes et des conseils nutritionnels (21). De plus, plusieurs consommateurs se soucient de leur apparence dentaire. Leur donner les soins nécessaires afin qu’ils retrouvent une bonne estime de soi peut être un point tournant pour les aider à vaincre leur dépendance (19). B. DÉPRESSEURS NERVEUX CENTRAL DU SYSTÈME Drogues qui ralentissent le SNC. 1. ALCOOL (bière, vin, apéritif, spiritueux) 1.1. Généralités : Aux États-Unis, 14 millions de personnes rencontrent les critères d’alcoolisme (22). Au Canada, l’âge moyen lors de la première consommation est de 16 ans. En 2009, 89% des personnes de 15 ans et plus avaient consommé de l’alcool au moins une fois dans leur vie (15). 1.2. Effets à court terme : Les effets engendrés dépendent du taux d’alcool dans le sang. Dans un ordre chronologique, l’alcool, à faible dose, détend, procure un sentiment d’euphorie, une baisse de l’inhibition, une altération de l’attention puis du jugement. À forte dose, l’alcool provoque un état d’ivresse caractérisé par une diminution des perceptions sensorielles donc par un manque de coordination, de la difficulté à marcher, à articuler et à voir (23). Des troubles de la mémoire, des étourdissements et des vomissements peuvent aussi se manifester. Puis à très forte dose, l’alcool cause l’inconscience, le coma et même la mort (400 mg/ 100 ml de sang) dus à une dépression du système respiratoire (2). 1.3. Effets à long terme : L’alcoolisme affecte de multiples organes et est la source de plusieurs problèmes de santé. Parmi ceux-ci, on retrouve des maladies du foie (cirrhose), du pancréas (pancréatite), du système nerveux, des troubles gastro-intestinaux, cardiovasculaires, sanguins (hémorragies, anémie), hormonaux et une augmentation de la prévalence de certains cancers (bouche, langue, œsophage, estomac, foie) (2). La consommation d’alcool pendant la grossesse peut entraîner des retards de développement chez l’enfant avant et après la naissance ainsi que des problèmes d’apprentissage et de comportements (16). 1.4. Pathologies orofaciales : Les pathologies buccales associées à l’alcool ne se manifestent pas après une simple consommation mais résultent plutôt d’une consommation sur une base régulière et excessive. Elles sont plus souvent dues à une combinaison entre un manque d’hygiène, la présence de lipopolysaccharides dans leurs consommations et une nutrition pauvre en éléments nutritifs. De plus, l’alcool réduirait la production de salive et diminuerait son effet tampon (sialadénose). Tous ces facteurs peuvent causer de l’halitose, une glossite, une chéilite angulaire, des ulcérations buccales, des gingivites, des parodontites et un édentement total ou partiel. Les dents restantes peuvent montrer des signes d’érosions dues à l’alcool, à l’acidité des breuvages, aux vomissements ou aux reflux gastriques. Également, une forte corrélation existe entre alcoolisme et tabagisme. Cette polyconsommation, augmente considérablement les parodontites et les risques de cancer buccal (22). 1.5. Considérations cliniques : Il est très important de donner des bonnes instructions d’hygiènes aux patients puisque selon certaines études (Bofetta, Adami, Muci & Nyrèn, 2001; Züller, Herrmann, Kreiss & Heller, 1993) la microflore buccale des personnes alcoolique pourrait contribuer au cancer buccal. À cet égard, un examen buccal complet est de mise pour dépister les signes précurseurs du cancer buccal. Un examen, une prophylaxie et une application de fluor 1% aux 3 mois sont conseillés. Vu les risques de parodontites, les principaux traitements devraient consister à un surfaçage et à un détartrage. Les patients nécessitant d’importantes chirurgies et qui sont alcooliques depuis longtemps, devraient passer une évaluation médicale incluant des tests sanguins et hépatiques afin d’éviter des complications durant et après l’opération (22) comme un saignement excessif, une cicatrisation difficile, une infection ou même une ostéomyélite (24). La prescription de salive artificielle est recommandée pour ceux souffrant de xérostomie. De plus, plusieurs médicaments sont à éviter de prescrire du aux multiples interactions médicamenteuses avec l’alcool et aux problèmes de foie Société dentaire de Montréal souvent rencontrés chez les alcooliques (22). 2. ANALGÉSIQUES OPIOÏDES (morphine, héroïne) : 2.1. Généralités : Ces deux opiacés proviennent du plan de pavot. L’héroïne est obtenue à partir de la morphine et elle est, la plupart du temps, injectée par voie intraveineuse après avoir été diluée et chauffée. Elle peut aussi être prisée ou fumée (2). L’héroïne consommée passe dans la circulation sanguine pour se rendre au cerveau où elle redevient de la morphine (15). 2.2. Effets à court terme : Les effets de l’héroïne sont imprévisibles, en partie parce que les consommateurs ne connaissent pas le niveau de pureté de la drogue qu’ils achètent (15). Lorsqu’elle est injectée, les usagers ressentent immédiatement une sensation dite orgasmique (‘’rush’’) de très courte durée qui est suivie par de l’euphorie et de la somnolence. Un bien-être persiste et supprime l’anxiété et la douleur tant physique que mental. L’individu peut avoir de la difficulté à se concentrer (23). Des nausées, des vertiges ainsi qu’un ralentissement du rythme respiratoire et cardiaque peuvent se produire après le rush (2). Certains signes physiques et symptômes nous permettent de croire que l’individu a consommé de l’héroïne. Nous retrouvons entre autres : une sècheresse buccale, une contraction des pupilles, une réduction de l’appétit, de la transpiration, de la constipation et de la rétention urinaire (16). 2.3. Effets à long terme : Chez les usagers fréquents, le plaisir intense des premières consommations ne dure que quelques semaines. La dose et la fréquence doivent alors être augmentées pour obtenir les mêmes effets ce qui cause une forte dépendance. Chez les héroïnomanes, les symptômes d’un sevrage peuvent apparaître 5 à 12 heures 14 après la dernière injection. Ces symptômes ressemblent à ceux d’une grippe (sueurs abondantes, spasmes musculaires, frissons, grelottements) et sont accompagnés d’anxiété. Les symptômes sont à leur plus fort après 36 à 72 heures de sevrage et se traduisent par des troubles gastro-intestinaux, des pupilles dilatées et la chair de poule. L’individu peut devenir agressif et souffrir de délire paranoïde. Un surdosage provoque une dépression cardiorespiratoire et peut être mortel. De plus, les injecteurs de drogues par voie intraveineuse sont à risques de contractés des maladies telles le VIH, l’hépatite B et C et d’autres infections s’ils utilisent des aiguillent contaminées (1). 2.4. Pathologies orofaciales : Les conséquences orales dues à la consommation d’héroïne résultent en grande partie d’une négligence pour les soins dentaires et d’une mauvaise alimentation. Parmi ces conséquences, nous retrouvons, la carie rampante, la parodontite, la candidose, la dysplasie de la muqueuse et le bruxisme (25). 2.5. Considérations cliniques : Le dentiste devrait mettre l’emphase sur l’importance d’une bonne hygiène ainsi que sur les conseils alimentaires. Il devrait suivre ce type de patient régulièrement, faire des applications de fluor et prescrire des sialagogues lorsque nécessaire (25). 3. GHB (drogue du viol, liquid ecstasy, liquid X, fantasy) : 3.1. Généralités : On le vend souvent sous forme liquide incolore et inodore. Le GHB peut aussi être vendu sous forme de poudre blanche ou de capsules. Dissout dans un verre d’alcool, il n’a ni odeur, ni saveur. Il est surtout consommé dans des partys raves. Il est parfois administré à l’insu d’une personne dans le but de la voler ou la violer. 15 3.2. Effets à court terme : «L’augmentation progressive de la dose se traduit, dans l’ordre croissant, par les réactions suivantes : diminution de l’anxiété, relaxation musculaire, désinhibition, euphorie, sédation, somnolence, incoordination des mouvements, hypnose, anesthésie générale, coma et puis la mort. À forte dose, le GHB peut aussi provoquer des convulsions, des hallucinations, un ralentissement cardiaque, de l’hypotension, une dépression respiratoire et de l’inconscience» (2). L’utilisateur peut avoir des pertes de mémoire, des nausées, des vomissements et de la diarrhée. Il peut également se sentir étourdi et ce jusqu’à plusieurs jours après la consommation (15). On surnomme ce produit drogue du viol, car il cause de l’amnésie et une désinhibition sexuelle chez la victime surtout lorsqu’il est consommé avec de l’alcool (2). 3.3. Effets à long terme : La prise quotidienne peut causer une tolérance et entraîner une dépendance chez l’individu. Un arrêt pourrait alors causer des symptômes de sevrages caractérisés par de l’anxiété, de la confusion et du délire, des hallucinations, de la paranoïa, de l’insomnie et des tremblements (15). C. HALLUCINOGÈNES Drogues qui affectent la perception, les émotions et les processus psychologiques. Ils déforment les perceptions sensorielles et peuvent causer des hallucinations (16). 1. LSD (acide, buvard) : 1.1. Généralités : C’est l’hallucinogène le plus consommé (16). Il se présente généralement sous la forme de buvards (papiers imprégnés d’une goutte d’une solution de LSD) ou de comprimés (2). Info-Société 1.2. Effets à court terme : Les effets du LSD sont imprévisibles et peuvent varier d’un individu à l’autre, d’une consommation à l’autre ou même au cours du même épisode de consommation. Le trip dure entre 5 et 12 heures. Le consommateur peut passer par multitudes d’émotions qui vont du bien-être, de la joie, et de l’émerveillement jusqu’à la peur, à la panique, à l’agressivité, à la confusion et à l’angoisse profonde. Ces effets désagréables sont appelés «mauvais voyage» (bad trip). Le LSD peut aussi causer une distorsion des sens et de la perception, engendrer des effets visuels intenses (hallucinations) et une altération du jugement. Au niveau physique, l’usager peut avoir des engourdissements, une augmentation du rythme cardiaque, des étourdissements, une dilatation des pupilles, une diminution de l’appétit, un assèchement des muqueuses buccales, des frissons, des nausées et des tremblements (15). 1.3. Effets à long terme : La consommation prolongée de LSD peut provoquer, notamment : une psychose, une dépression, une bouffée délirante et des épisodes de récurrence (flashbacks) (15). 2. ECSTASY (MDMA): 2.1. Généralités : Se présente généralement sous forme de comprimés de différentes couleurs avec un motif gravé. 2.2. Effets à court terme : «L’ecstasy provoque tout d’abord une légère anxiété, une augmentation de la tension artérielle, une accélération du rythme cardiaque, la contraction des muscles de la mâchoire, des grincements de dents, la peau devient moite et la bouche sèche. Par la suite l’usager ressent une sensation de bien-être et de satisfaction, une relaxation, une réduction de la sensation de fatigue, une confiance en soi et une diminution de ses inhibitions. Ceci s’accompagne d’une exacerbation des sens, d’une facilitation de l’expression des émotions et d’une plus grande communication avec autrui. Cette phase de sensations agréables est généralement suivie d’une phase où l’individu devient fatigué, triste, déprimé et de mauvaise humeur» (2). L’individu peut également avoir des hallucinations et éprouver de la paranoïa (15). De plus, l’usage de l’ecstasy provoque une déshydratation de l’organisme et une hausse de la température. Ceci peut être dangereux dans des endroits où il fait chaud et que la personne fait de l’activité physique comme de la danse. «Cette augmentation de la température corporelle, conjuguée à la hausse de la tension artérielle et de la fréquence cardiaque, peut entraîner une insuffisance rénale ou cardiaque, un accident vasculaire cérébral et des crises convulsives.» 2.3. Effets à long terme : L’utilisation à long terme peut causer une perte de poids, un épuisement chronique, de la fatigue, des douleurs musculaires, de l’anxiété, et une dépression. Certains peuvent aussi avoir des flashbacks, des idées délirantes, des hallucinations et des symptômes psychotiques qui persistent. Selon des études sur les animaux, l’ecstasy peut endommager certaines cellules du cerveau. Cependant, d’autres recherches sont nécessaires pour évaluer la toxicité neurologique de l’ecstasy chez l’humain (15). 2.4. Pathologies orofaciales : L’ecstasy peut causer de la xérostomie, du bruxisme et des risques de développer de l’érosion au niveau des dents. Des changements au niveau de la muqueuse ont aussi été observés (26). 2.5. Considérations cliniques : L’utilisation récente d’ecstasy peut interférer avec les traitements dentaires (26). D. CANNABIS Bien qu’il s’agisse d’un hallucinogène, le cannabis produit aussi un effet dépresseur et accroît le rythme cardiaque (16). 1. CANNABIS (marijuana, haschisch) 1.1. Généralités : En 2002, environ 3 millions de Canadiens de 15 ans et plus, soit 12,2%, ont dit avoir consommé du cannabis, c’est-à-dire de la marijuana ou du haschich, au moins une fois au cours des 12 mois qui ont précédé l’enquête. C’est une augmentation significative par rapport à 1994 où la proportion était de 7,4%. Près de la moitié des consommateurs (47%) prenaient de la drogue moins d’une fois par mois. 10% en consommait chaque semaine et une autre tranche de 10%, tous les jours. En pourcentage du nombre total de personnes de 15 ans et plus, 1,1% des Canadiens consommaient du cannabis quotidiennement. Au Québec, la moyenne est au dessus de la moyenne nationale avec un total de 14% chez les 15 ans et plus (27). 1.2. Effets à court terme : Les effets sont variables. Généralement, l’usager devient euphorique (sensation de bien-être et de satisfaction) et éprouve une envie spontanée de rire (2). Cette sensation peut s’accompagner d’une augmentation des perceptions sensorielles et d’une distorsion de la perception du temps, de l’espace et de l’image de soi. Il peut aussi y avoir une augmentation de l’appétit, particulièrement pour les friandises (23). Les principaux effets physiques causés par la consommation de cannabis sont les suivants : gonflement des vaisseaux sanguins (yeux rouges), diminution de la salivation (bouche sèche), augmentation du rythme cardiaque et hypoglycémie (2). 1.3. Effets à long terme : terme cause des problèmes au système respiratoire, car le joint est souvent composé d’un mélange de tabac et de cannabis. «D’ailleurs, à poids égal, le cannabis fumé fournit 50 % plus de goudron qu’une marque populaire de tabac fort. En outre, la concentration de certains agents cancérigènes retrouvés dans le goudron de la marijuana est plus élevée que celle d’un même poids de goudron de tabac. Enfin, une cigarette de cannabis est habituellement inhalée plus profondément et retenue plus longtemps dans les poumons qu’une cigarette ordinaire. Ainsi, une cigarette de cannabis peut théoriquement causer autant de problèmes pulmonaires que 4 à 10 cigarettes ordinaires» (2). Une consommation excessive causerait une perte de motivation, d’intérêt et d’ambition ainsi que des difficultés de concentration (syndrome d’amotivation). Cependant, ce syndrome est controversé et doit être étudié plus profondément (2). Des troubles de l’humeur et des hallucinations peuvent également être observés (23). 1.4. Pathologies orofaciales : Les utilisateurs de cannabis ont généralement une moins bonne santé buccale que les non-utilisateurs, avec un risque plus élevé de caries dentaires et de maladies parodontales. Comme mentionné auparavant, la fumée de cannabis contient des agents carcinogènes au même titre que celle du tabac. Par le fait même, fumer du cannabis peut causer des dysplasies et des lésions prémalignes. Les utilisateurs sont également plus sujets aux infections orales possiblement à cause de l’effet immunosuppresseur du cannabis (28). 1.5. Considérations cliniques : Les traitements dentaires sur un patient intoxiqué peuvent causer une augmentation de l’anxiété. L’utilisation d’anesthésique local avec épinéphrine peut sérieusement prolonger la tachycardie déjà engendrée par le cannabis (28) . La consommation de cannabis à long Société dentaire de Montréal 16 DÉPISTAGE ET PRÉVENTION Nous connaissons maintenant les principales substances d’abus et leurs méfaits sur la santé. Cependant, il va de soi que le patient ne sera pas toujours sous l’effet de la drogue lorsqu’il viendra nous consulter et qu’il n’aura pas nécessairement de pathologies perceptibles, surtout, s’il en est à un stade débutant de sa consommation. Nous devons donc nous doter de moyens pour dépister ses consommateurs et intervenir efficacement pendant qu’il est encore temps. 1. RÉVISER L’HISTOIRE MÉDICALE Il existe plusieurs méthodes afin de dépister une dépendance chez un patient. Sans aucun doute, la meilleure méthode demeure un bon questionnement lorsque le dentiste effectue la révision de l’histoire médicale. Au début de chaque rendez-vous, le dentiste se doit de réviser et annoter s’il y a eu un changement au niveau de la santé globale et dentaire de son patient depuis la dernière visite. Certains patients ne diront évidemment pas la vérité puisqu’ils ressentiront de la honte et de la culpabilité en l’avouant à leur dentiste. Pour cette raison, il est important de ne jamais juger le patient, et lorsque le dentiste questionne son patient, il se doit en tout temps d’être le plus neutre et empathique possible (1). La confidentialité est primordiale avec tous les patients et lorsqu’on demande de l’information à notre patient, on se doit de mentionner à ce dernier que cette information est importante si l’on veut faire des traitements ou administrer des médicaments et que c’est seulement pour sa propre santé et son bien-être que nous devons connaître ses renseignements (1). Il ne faut pas oublier que par le biais de notre profession, nous possédons une position stratégique pour dépister les dépendances (5). Le patient consulte son médecin puisqu’il fait confiance en celuici. Or, le dentiste doit poser toutes les 17 questions pertinentes afin de maintenir une bonne santé de son patient. Voici quelques questions que l’on ne doit pas omettre dans l’histoire médicale (1) : a) Y a-t-il quelqu’un dans votre famille qui à déjà eu ou a présentement une dépendance à l’alcool ou à toutes autres drogues ? b) Avez-vous déjà eu des problèmes de dépendance à une drogue ? c) Si oui, avez-vous déjà subi des traitements ou êtes-vous toujours sous traitement ? 4. si le patient demande fréquemment pour des prescriptions inhabituelles. L’assistante dentaire et les hygiénistes devraient également être en mesure d’aider le dentiste dans son dépistage car ils peuvent (1) : 1. réviser l’histoire médicale du patient; 2. réviser la santé générale du patient; 3. réviser l’histoire médicamenteuse du patient et l’usage de drogues illicites; 4. observer cliniquement des comportements ou signes étranges chez le patient. De plus, le nom du médecin qui a traité le patient, la durée de l’abstinence, ainsi que le statut actuel du patient devraient être noté dans le dossier médical. Surtout, rappelez-vous qu’il n’existe aucun profil stéréotype d’un toxicomane et que l’on doit questionner tous les patients d’une manière juste et égale, sans porter de préjugé, puisque la dépendance aux drogues peut affecter tous les groupes d’âge (1). Parmi les comportements et signes étranges que l’on peut noter chez une personne dépendante, l’on remarque fréquemment de l’anxiété, de la peur, une dépendance pour les bonbons et aliment sucrés, un pourcentage plus élevé d’infection au virus de l’hépatite, au VIH et à la tuberculose ainsi qu’une tendance plus grande à ne pas vouloir se conformer au plan de traitement (1). 2. ÉDUQUER SON ÉQUIPE DENTAIRE Il faut notamment être prudent lorsqu’on prescrit des médicaments. Un patient qui arrive en urgence en fin de journée se plaignant d’une douleur sévère pourrait seulement venir dans le but d’obtenir une prescription. Donc, une équipe dentaire éduquée et alerte sera en mesure de dépister et prévenir contre les dépendances aux substances d’abus. Le dépistage contre les substances d’abus est un travail d’équipe et ne peut pas être seulement par le dentiste. Toute l’équipe dentaire à son rôle à jouer et se doit de demeurer alerte, car certains signes d’une dépendance peuvent être observés hors de la salle opératoire. Le dentiste se doit alors d’éduquer tout son personnel à propos de l’usage des substances d’abus. À noter que la réceptionniste dentaire est très bien placée pour avertir le dentiste ou le personnel de problèmes potentiels chez un patient. Elle devrait donc être en mesure d’observer (1) : 1. l’apparence générale des patients lorsqu’ils arrivent pour leur rendez-vous; 2. si le ou la patient(e) a une histoire fréquente de rendez-vous manqué; 3. si le ou la patient(e) se plaint souvent pour des raisons douteuses; Info-Société 3. DÉPISTER CONTRE L’ALCOOLISME Pour débuter, il est important de définir ce qu’est l’alcoolisme. Une personne est dite alcoolique lorsqu’elle consomme de l’alcool d’une façon telle que l’on remarque une détérioration dans son comportement social, accompagné d’une dépendance physiologique ou psychologique (1). Plusieurs moyens existent pour savoir si une personne est alcoolique. Tout d’abord, l’histoire médicale peut nous donner de bons indices. Des indicateurs tels de l’insomnie, des maux de tête, des indigestions, des palpitations, de la diarrhée, des dysfonctions sexuelles, de l’anxiété, de l’irritabilité, de la dépression, des traumas, des accidents de voiture et des problèmes de violence peuvent nous laisser présager des problèmes d’alcoolisme (22). Ensuite, il est possible de se fier aux signes et symptômes que l’on peut observer chez un patient souffrant d’abus d’alcool (1) et que l’on retrouve dans la section les drogues et leurs méfaits. Il est aussi possible d’effectuer un dépistage à l’aide du questionnaire DETA (équivalent du questionnaire CAGE en anglais) afin de dépister un usage abusif d’alcool. Le questionnaire contient les questions suivantes (1) : 1. Avez-vous déjà ressenti le besoin de diminuer votre consommation de boissons alcoolisées ? 2. Votre entourage vous a-t-il déjà fait des remarques au sujet de votre consommation ? 3. Avez-vous déjà eu l’impression que vous buvez trop ? 4. Avez-vous déjà eu besoin d’alcool dès le matin pour vous sentir en forme ? Une réponse positive à 2 questions ou plus est un bon indice que le patient à une consommation excessive d’alcool. Il devrait alors être référé à son médecin pour des examens de santé et à un intervenant en toxicomanie par la suite. À noter que ce questionnaire est plus efficace lorsqu’il est rempli en même temps que l’histoire médicale dans une section sur les habitudes de vie incluant par exemple l’exercice physique et la diète (22). 4. DÉPISTER CONTRE LE TABAGISME Le dépistage du tabagisme se fait habituellement lors de la révision de l’histoire médicale. Le dentiste se doit de demander au patient s’il fume et si oui, combien de cigarettes par jour. Si le patient a déjà fumé dans le passé, mais qu’il a arrêté, le dentiste doit s’y intéresser et demander au patient quelles étaient ses habitudes tabagiques. Également, plusieurs signes cliniques mentionnés auparavant témoignent de l’usage de tabac ce qui facilite le dépistage de cette dépendance. 5. INFORMER LE PATIENT À PROPOS DES SUBSTANCES D’ABUS Une méthode que l’on peut employer afin d’éviter qu’une personne commence ou continue à consommer une substance d’abus est de prévenir et d’informer les patients des dangers potentiels des drogues (1). Même si la grande majorité des patients savent que leur dépendance à la drogue est nocive pour eux, peu connaissent les nombreuses répercussions que cette drogue peut entrainer sur leur santé bucco-dentaire. Un patient informé sera alors plus apte à prendre des décisions concernant sa santé. D’ailleurs, comme mentionné auparavant, les patients s’attendent à ce que le dentiste prenne du temps lors du rendez-vous pour livrer des messages de prévention. Prévenir et dépister contre les substances d’abus fait donc partie de l’une de nos multiples responsabilités en tant que dentiste. INTERVENTION L’impact que le dentiste peut jouer dans le dépistage, la prévention et la cessation des substances d’abus demeure malheureusement encore trop peu connu et cloisonné (5). En effet, rares sont les professionnels de la santé et les dentistes qui interviennent, car la plupart ne savent pas comment s’y prendre dans de telles situations. Évidemment, le traitement des toxicomanies n’est pas chose simple et demande beaucoup de connaissances en la matière pour intervenir efficacement. C’est pourquoi des professionnels comme des intervenants en toxicomanie se concentrent à aider cette population qui a Société dentaire de Montréal besoin d’aide. Cependant, le dentiste peut également faire sa part des choses pour lutter contre les dépendances. 1. EN GÉNÉRAL En premier lieu, le dentiste doit se poser la question suivante : quand dois-je référer un patient ? Il est conseillé de référer un patient à un intervenant en toxicomanie lorsque notre dépistage est positif ou lorsque nous avons une évidence que le patient souffre de dépendance envers une drogue. Si le patient à déjà eu recours à des traitements contre son problème de consommation et qu’il a eu de mauvaises expériences dans le passé, il est alors suggéré de le référer à un psychologue ou à un travailleur social (1). En second lieu, le dentiste doit s’assurer d’avertir le patient qu’il le réfère avec un spécialiste qui pourra l’aider. Il est possible que le patient soit réticent à recevoir des traitements d’un intervenant en toxicomanie. L’on doit alors lui mentionner que cette réaction est tout à fait normale, mais qu’il s’agit d’une décision nécessaire pour sa santé et son bien-être (1). Le patient se sentira d’autant plus en sécurité si on lui mentionne que nous travaillerons conjointement avec ce professionnel afin de nous assurer qu’il maintienne une bonne santé bucco-dentaire. En dernier lieu, il est conseillé que le dentiste ou son équipe prennent le temps d’appeler le spécialiste et de prendre un rendez-vous avec le patient avant que celui-ci quitte le cabinet dentaire. De cette manière, on augmente les chances que le patient consulte réellement l’intervenant en toxicomanie. Il est important de se rappeler que le dentiste ne peut pas divulguer une dépendance à une substance d’abus à quiconque, à moins d’avoir préalablement l’autorisation du patient et qu’il ne peut utiliser cette information que pour des fins professionnelles. Le dentiste doit 18 en tout garder le secret professionnel tel que mentionné dans les articles suivant du code de déontologie des dentistes : 3.06.01. Le dentiste doit respecter le secret de tout renseignement de nature confidentielle qui vient à sa connaissance dans l’exercice de sa profession. 3.06.02. Le dentiste ne peut être relevé du secret professionnel qu’avec l’autorisation de son patient ou lorsque la loi l’ordonne. 3.06.03. Le dentiste, aux fins de préserver le secret professionnel : 1° doit garder confidentiel ce qui est venu à sa connaissance dans l’exercice de sa profession ; 2° doit s’abstenir de tenir ou de participer à des conversations indiscrètes au sujet d’un patient ou des services qui lui sont rendus ; 3° doit prendre les moyens raisonnables à l’égard des personnes qui collaborent avec lui ou qui exercent ses activités au sein de la société où il exerce ses activités professionnelles pour que soit préservé le secret professionnel ; 4° ne peut divulguer les faits ou confidences dont il a eu connaissance sauf avec l’autorisation écrite de son patient ou lorsque la loi l’ordonne ; 5° ne doit pas révéler qu’une personne a fait appel à ses services lorsque ce fait est susceptible de causer un préjudice à cette personne à moins que la matière du cas ne l’exige. Ceci veut dire que le dentiste peut référer le patient à un intervenant en toxicomanie seulement si le patient est avisé et d’accord. Il est primordial de respecter notre patient si l’on désire garder sa confiance. 2. ALCOOLISME Comme mentionné auparavant, le rôle primaire du dentiste face à un patient souffrant d’alcoolisme est d’être en mesure 19 de dépister ce problème et ensuite savoir le référer à un professionnel adéquat. Cependant, un dentiste sera en mesure de mieux suivre le progrès de son patient si ce dernier est au courant des traitements que son patient reçoit. Les composantes principales du traitement contre l’alcoolisme sont la confrontation, la désintoxication et la réhabilitation. La confrontation consiste à combattre le déni du patient, c’est-à-dire le convaincre que sa consommation d’alcool abusive cause de nombreux méfaits sur sa santé et le motiver à suivre un traitement. La désintoxication consiste à éliminer totalement l’alcool du corps et protéger le patient contre les effets sérieux du sevrage. Ce stade dure environ cinq jours et nécessite l’administration de médicaments pour remplacer l’alcool. La médicamentation sera diminuée graduellement pour diminuer les symptômes du sevrage. La réhabilitation consiste à garder le patient motivé à ne pas consommer et à s’habituer à un style de vie sans alcool. Cette partie du traitement inclut des interventions psychosociales telles qu’une thérapie cognitive du comportement ou bien une thérapie avec des groupes d’aide comme Alcooliques Anonymes (A.A.) (22). Durant la phase de réhabilitation, le patient est souvent tenté de retomber dans l’alcool. Heureusement, il existe trois médicaments que le médecin peut lui prescrire soit la naltrexone, l’acamprosate et le disulfiram. Ces deux premiers médicaments vont permettre de combattre la tentation de consommer de l’alcool et le dernier va produire des sensations désagréables chez le patient lorsque celui-ci consomme de l’alcool (22). Par contre, il est important de noter que ces médicaments ne seront pas prescrits par le dentiste, mais plutôt par le médecin. 3. TABAGISME Tout d’abord, il est important de Info-Société comprendre que le tabac est une substance qui provoque une forte addiction. Selon des personnes avec des dépendances à plusieurs drogues, celle au tabac s’agit de la plus difficile à se défaire (6). D’ailleurs, la majorité des fumeurs auront besoins de plusieurs tentatives pour vaincre leur dépendance. Il ne faut donc pas croire que si le patient recommence à fumer qu’il s’agit d’un échec ou d’un cas perdu. Il s’agit plutôt d’un phénomène normal dans la tentative de cesser de fumer (9). Les cinq étapes principales d’intervention sont les suivantes (5 A’s en anglais) : demander (Ask), conseiller (Advise), évaluer (Assess), assister (Assist) et suivre (Arrange). La première étape consiste à demander aux patients des informations sur leur consommation. La deuxième étape est de conseiller le patient de façon claire et personnalisée d’arrêter de fumer en lui expliquant pourquoi. La troisième étape est d’évaluer la motivation du patient à arrêter de fumer. Bien entendu, on ne peut pas faire le travail seul, le patient doit vouloir arrêter de fumer. La quatrième étape est d’assister le patient dans sa démarche en lui donnant les ressources et les moyens nécessaires pour y arriver. Finalement la cinquième étape est de faire un suivi pour éviter les rechutes (29). Pour plus d’informations, l’ODQ a fait en 2005 un guide complet à l’intention des dentistes et intitulé : Intervenir auprès des patients fumeurs. Il est disponible en ligne à l’adresse suivante : http://www. ordredesdentistesduquebec.qc.ca/index. html 4. AUTRES DROGUES Comme nous l’avons vu, certaines drogues causent de sérieux problèmes dentaires. Malgré leurs problèmes de consommation, plusieurs personnes continuent de se soucier de leur apparence. Aider ces gens à retrouver leur fonction masticatoire et leur esthétique peut être pour eux une source de motivation à cesser de consommer et qui sait à changer leur vie (19). De plus, certains consomment des drogues, car ils ont des douleurs dentaires. Nous devons donc éliminer toutes les causes de douleurs dentaires possibles pour éviter que nos patients aient mal et consomment pour cette raison. 5. RESSOURCES SUPPLÉMENTAIRES Alcooliques Anonymes : http://aa-quebec.org/AA_Quebec/Templates/index.htm Défi j’arrête j’y gagne : http://www.defitabac.qc.ca/defi/fr/index.html Maison Jean Lapointe : http://www.maisonjeanlapointe.com/accueil.html ODQ : http://www.ordredesdentistesduquebec.qc.ca/index.html Parlons drogue : http://www.parlonsdrogue.com Santé Canada : http://www.hc-sc.gc.ca/hc-ps/index-fra.php CONCLUSION Le dentiste a donc un grand rôle à jouer dans le dépistage et la prévention des dépendances aux substances d’abus. Suite au dépistage d’une consommation, le dentiste doit souvent référer le patient à d’autres spécialistes pour que ce dernier reçoive l’aide nécessaire. Le dentiste doit également fournir les soins dentaires requis pour la santé et le bien-être du patient en tenant compte des risques occasionnés par la consommation de drogues. C’est pourquoi, médecins, intervenants en toxicomanie et dentistes doivent collaborer pour permettre aux patients de retrouver une vie saine. BIBLIOGRAPHIE 1. Newman CC, Bolton LW. Substance abuse and the dental patient … What’s the connection? Dental Assistant, The. 2003;Jan-Feb. 2. Québec (Province). Comité permanent de lutte à la toxicomanie. Drogues : savoir plus, risquer moins. Éd. québécoise. ed. Montréal: Stanké; 2003. 3. Addictologie et Santé Bucco-Dentaire. Colloque National de Santé Publique; Paris2007. 4. TOBACCO-USE PREVENTION AND CESSATION: DENTISTRY’S ROLE IN PROMOTING FREEDOM FROM TOBACCO. J Am Dent Assoc. 2000 August 1, 2000;131(8):1137-43. 5. Olesinski M. Une bonne santé bucco-dentaire pour lutter contre les addictions. Psychotropes. 2009;Vol. 15(2009/2):128. 6. Mecklenburg R. Tobacco prevention and control in dental practice: the future. J Dent Educ. 2001 April 1, 2001;65(4):375-84. 7. Miller PM, Ravenel MC, Shealy AE, Thomas S. Alcohol screening in dental patients: The prevalence of hazardous drinking and patients’ attitudes about screening and advice. J Am Dent Assoc. 2006 December 1, 2006;137(12):1692-8. 8. Esson KM, Leeder SR, santé Omdl. The millennium development goals and tobacco control : an opportunity for global partnership. Geneva, Switzerland: World Health Organization; 2004; xviii, 101]. Available from: http://www.who.int/tobacco/publications/mdg_ final_for_web.pdf. 9. Walsh MM, Ellison JA. Treatment of Tobacco Use and Dependence: The Role of the Dental Professional. J Dent Educ. 2005 May 1, 2005;69(5):521-37. 10. Schroeder SA. What to Do With a Patient Who Smokes. JAMA. 2005 July 27, 2005;294(4):482-7. 11. 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Être membre de la Société dentaire de Montréal, c’est : • Accumuler des unités exigées par l’Ordre des dentistes en assistant gratuitement aux conférences • Repas du midi ou du soir offerts gratuitement lors des conférences • Site d’emploi disponible sans frais pour afficher un poste et rechercher des employé(e)s Nom : Prénom : Adresse de correspondance : COÛT DE LA COTISATION ANNUELLE Adresse (suite) : Tél. bureau : Télécopieur : Tél. résidence : Courriel : Payé par : Chèque Mastercard Visa Dentiste de 65 ans et plus 300,00 $ Dentiste diplômé depuis moins d’un an 300,00 $ Hygiéniste 350,00 $ 4730 rue Messier, Montréal (Québec) H2H 2J1 Signature : Info-Société 500,00 $ S.V.P. libeller votre chèque à l’ordre de la Société dentaire de Montréal et le poster, accompagné du présent formulaire dûment rempli au : Date d’expiration 21 Dentiste diplômé depuis une année ou plus, mais âgé(e) de moins de 65 ans Société dentaire de Montréal 22 Voici les adresses de nos divers lieux de conférence CONFÉRENCES SCIENTIFIQUES DE LA SOCIÉTÉ DENTAIRE DE MONTRÉAL CALENDRIER DES ACTIVITÉS PRINTEMPS 2012 Vendredi 16 mars 2012 - Journée (6 unités) Tournée de l’ODQ Conférencier : Dre Stéphane Schwartz ou Dr Duy-Dat Vu Sujet : Dentisterie pédiatrique Lieu : Le Nouvel Hôtel Le Nouvel Hôtel 1240 René-Lévesque Ouest à Montréal Tél. : 514 931-8841 Henry Schein 3403 rue Griffith à Ville St-Laurent Tél. : 514 337-3368 AVIS 1. Politique de l’Ordre des dentistes. L’article 4.2A stipule que : «Pour toute activité de formation continue se déroulant sur le territoire du Québec, chaque dentiste doit posséder sa carte de formation continue et la présenter lors de l’activité afin de pouvoir obtenir ses unités de formation». 2. Note : Ceux qui veulent souper lors des rencontres doivent obligatoirement confirmer leur présence selon les indications écrites dans le programme scientifique ou les avis que la SDM vous adresse. NOTE : Vous n’êtes pas dans la région de Montréal ou vous ne pouvez pas vous déplacer pour assister à nos conférences ? Mardi 24 avril 2012 - Soirée (3 unités) Conférencière : Dre Rania Azzi Sujet : Revue de produits et d’instrumentation en hygiène dentaire Lieu : Le Nouvel Hôtel Grâce à nos e-conférences, disponibles sur notre site web, vous pouvez vous perfectionner et accumuler des unités de formation tout en étant tranquillement installés dans votre salon ou à votre cabinet. 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Cette e-conférence est offerte en partenariat avec l’Ordre des dentistes du Québec Mardi 8 mai 2012 - Soirée (3 unités) Assemblée générale et conférence Conférencière : Rose-Ange Proteau Sujet : Prévenir et réduire les douleurs Lieu : Le Nouvel Hôtel Conférencier : Dre Sophie Labelle - Unités : 6 Résumé de la formation : Cette présentation permet aux participants de se familiariser avec les urgences médicales les plus susceptibles d’arriver en milieu dentaire et de développer une réponse efficace à une urgence médicale, entre autres les problèmes d’ordre cardiaque, glycémique, allergique, etc. Pour atteindre cet objectif, des urgences seront détaillées tout en faisant une revue des médicaments de la trousse d’urgence recommandée par l’Ordre des dentistes du Québec. Une attention particulière sera apportée sur la prévention de ces urgences médicales. De plus, des protocoles pouvant aider lors d’urgences médicales seront suggérés afin d’aider l’équipe dentaire à bien gérer le stress venant d’une situation d’urgence. Des points particuliers pour une bonne organisation en vue d’urgence seront apportés afin de faire prendre conscience des embûches potentielles que réserve le milieu dentaire. Rendez-vous sur notre site web au http://www.sdmtl.ca/pages/Education.html 23 Info-Société Société dentaire de Montréal 24 Info-Société