Opera Magazine 2007.02 ( PDF )

Transcription

Opera Magazine 2007.02 ( PDF )
DOSSIER SPÉCIAL
LE GRAND RETOUR
DE LA JUIVE
À L’OPÉRA DE PARIS
N°15
UNE FRESQUE ENTRE LUMIÈRE ET TÉNÈBRES
ENTRETIEN AVEC GERARD MORTIER
Février 2007 - 7,50 € - Belgique, Grèce 9 € - Canada 13,50 $ - Suisse 15 FS
LA JUIVE À L’OPÉRA DE PARIS - ENTRETIEN ANNICK MASSIS
L’AGENDA INTERNATIONAL DES SPECTACLES
NOTRE GUIDE CD, DVD, LIVRES, MÉTIERS
PLEINS FEUX SUR L’OPÉRETTE
DÉBUT DE RING À L’OPÉRA NATIONAL DU RHIN
ENTRETIEN AVEC
ANNICK
MASSIS
N°15
“UNE CARRIÈRE, C’EST UNE CONSTRUCTION
SUR TOUTE UNE VIE”
O P É R A
M A G A Z I N E
N U M É R O
M 03108 - 15 - F: 7,50 E
1 5
-
F É V R I E R
2 0 0 7
Marguerite de Valois dans
Les Huguenots à Liège
(2005), rôle créé par la
même cantatrice qu’Eudoxie.
6 - FÉVRIER 2007
JACKY CROISIER/ORW
ENTRETIEN
Le 16 février, la soprano française incarne Eudoxie dans La Juive à l’Opéra National de Paris, théâtre
où elle a fait ses débuts en 1994 dans Le nozze di Figaro. Depuis, elle n’y a chanté que l’opéra
baroque alors que sa carrière, d’envergure désormais internationale, se concentre de plus en plus sur
le répertoire français et italien du XIXe siècle. L’heure de la consécration a enfin sonné !
VLAAMSE OPERA
Annick
Massis
« Une carrière, c’est une construction
sur toute une vie »
Comment le personnage d’Eudoxie est-il
entré à votre répertoire ?
Je l’ai abordé à la Fenice de Venise en 2005, à
l’invitation de Sergio Segalini, dans une production créée au Staatsoper de Vienne en
1999, que je vais d’ailleurs reprendre dans la
capitale autrichienne en 2008. La Juive n’est
certes pas l’opéra le plus représenté dans le
monde, mais je trouve la partition magnifique.
Et puis, si j’adore chanter La traviata et Lucia
di Lammermoor, j’aime bien me confronter à
des ouvrages moins souvent représentés.
Surtout, étant moi-même française, quand il
s’agit d’un titre français effectuant son retour
sur la première scène de l’Hexagone après des
décennies d’absence, comme ce sera le cas à
l’Opéra National de Paris ! La Juive parle de
l'antisémitisme comme on pouvait le concevoir
au XIXe siècle, problème éminemment
contemporain qui se mêle ici à une intrigue
amoureuse adultère,avec des conséquences sur
les têtes couronnées et le pouvoir de l'autorité
religieuse.
Comme Marguerite de Valois dans Les
Huguenots, que vous avez incarnée à
l’Opéra Royal de Wallonie en 2005, le rôle
d’Eudoxie a été conçu pour Julie DorusGras (1805-1896), la soprano belge qui
créa également Teresa dans Benvenuto
Cellini à l’Opéra de Paris. Vous sentezvous à l’aise dans ce type d’écriture ?
Je trouve les rôles de Dorus-Gras très intéressants, car la virtuosité s’y déploie dans un
contexte dramatique prenant. Il n’y a pas que
du décoratif dans Marguerite de Valois et
Eudoxie ! Ce sont deux personnages dont on
peut faire quelque chose, à la condition bien
sûr qu’il n’y ait pas trop de coupures... Le
deuxième acte des Huguenots est quand même
un formidable véhicule pour la reine, où elle
a la possibilité d’exprimer une certaine
gamme de sentiments. Même chose dans le
troisième acte de La Juive, là encore si les
ciseaux n’ont pas supprimé trop de passages !
Ce sont en fait des opéras où chacun des rôles
principaux est bien servi et a l’opportunité de
se mettre en avant.
Eudoxie n’est-elle pas moins intéressante
que Rachel sur le plan dramatique ?
Non, car l’une est le pendant de l’autre, est
indispensable à l’autre.Pour que Rachel prenne
toute sa force,il faut absolument le contrepoids
dramatique d’Eudoxie et vice versa. Ce sont
elles les deux pivots de l’intrigue, sans qui rien
n’arriverait, et c’est bien parce que Léopold est
écartelé entre son épouse et son amante que
tout commence.Ce n’est ensuite pas par hasard
que Halévy a écrit ce formidable duo entre les
deux femmes au début de l’acte IV. Pour
Eudoxie, c’est d’une certaine manière le point
d’orgue de tout ce qui s’est passé dans les actes
précédents, vocalement comme dramatiquement. On a généralement tendance à cataloguer les deux héroïnes : Rachel serait « l’expressive » et Eudoxie « la décorative ». C’est
faux et, quand je suis en scène, je fais tout pour
démontrer le contraire. J’espère que les spectateurs s’en rendent compte.
OPÉRA MAGAZINE - 7
ENTRETIEN ANNICK MASSIS
MICHELE CROSERA
L’année 2006 a été notamment marquée
par vos débuts au Festival de Salzbourg
dans Lucio Silla, spectacle aujourd’hui
inclus dans l’édition DVD des opéras de
Mozart chez Universal. Quel souvenir en
gardez-vous ?
Il s’agissait à la fois de mes débuts au Festival
et dans le rôle de Giunia.Quand j’ai chanté Les
Pêcheurs de perles à Venise, en 2004, Marcello
Viotti m’a proposé de participer au Lucio Silla
qu’il préparait en coproduction entre Salzbourg
et la Fenice pour l’été 2006. J’ai accepté. Viotti
nous a malheureusement quittés dans l’intervalle, mais le projet est allé jusqu’à son terme
avec un autre chef. Étant donné la différence
d’ouverture de scène entre la Fenice et le
Manège des Rochers de Salzbourg, il nous a
fallu tout refaire dans les quelques semaines
séparant les représentations dans les deux villes.
Un travail passionnant,conduit sous la houlette
de Jürgen Flimm. Giunia était ma première
héroïne d’opera seria mozartien,j’espère qu’elle
ne sera pas la dernière ! Je suis par exemple très
attirée par Aspasia dans Mitridate, avec cette
même pureté dans l’expression des sentiments.
Prise de rôle d’Eudoxie
à Venise (2005).
Quelles sont les difficultés vocales
d’Eudoxie ?
Il faut jongler entre les aspects très légers de
l’écriture, à son entrée par exemple, et les plus
dramatiques. Plus on avance dans l’opéra, plus
la tessiture s’abaisse, devient plus tendue, plus
lyrique, voire dramatique dans le duo avec
Rachel. J’ajoute des ornementations, bien sûr,
là où la partition les réclame, mais pas trop
quand même : on est chez Halévy, pas dans la
musique italienne.On repère certes l’influence
italienne, de Rossini notamment, mais il y a
quelque chose de typiquement français dans ce
rôle,dans la transparence,la clarté de l’écriture.
En ce sens, je trouve Eudoxie moins « italienne » que Marguerite de Valois.
Quels sont vos passages préférés ?
Dramatiquement, vous vous en doutez, le duo
avec Rachel à l’acte IV. Musicalement, le pre8 - FÉVRIER 2007
mier air, avec ses mouvements très contrastés,
qui offrent à l’interprète une possibilité d’expression double, triple, voire quadruple !
Eudoxie est encore dans le sourire, même s’il
y a l’anticipation de la tragédie à venir. J’aime
aussi beaucoup le Boléro de l’acte III,que je n’ai
malheureusement jamais eu le plaisir de chanter et qui sera une fois encore coupé à la
Bastille. Je le déplore mais il faut reconnaître
que, des trois interventions majeures
d’Eudoxie,c’est la moins intéressante,la moins
soutenue sur le plan dramatique.
Mais pourquoi coupe-t-on des opéras
comme Les Huguenots ou La Juive ?
Peut-être parce que chefs et metteurs en scène
jugent que la partition comporte des moments
moins intéressants que d'autres, comme privés d'intensité dramatique. Et c'est vrai que
certains passages sont plus faibles.
Eudoxie, Giunia, peut-être Aspasia... que
d’emplois virtuoses ! Souhaitez-vous vous
spécialiser dans ce type d’écriture ?
Pas du tout ! Je viens par exemple d’aborder
Juliette à Vienne. Elle vocalise certes dans la
Valse, mais cela n’en fait pas pour autant un
emploi virtuose. Même chose pour Ophélie,
Philine, Leïla des Pêcheurs de perles, ou pour
Violetta qui me fascine. À part dans « Sempre
libera », on cherche là encore les coloratures...
Je n’ai jamais voulu, par exemple, aborder la
Reine de la Nuit, que l’on m’a proposée à plusieurs reprises. C’est trop suraigu, trop stratosphérique ! J’ai en revanche travaillé Pamina
il y a quinze ans, à une époque où j’étais persuadée que je ferais uniquement carrière dans
les opéras de Mozart – l’expérience a prouvé
que je me trompais ! –, et j’en ai chanté des
extraits avec un immense plaisir. Mais je ne l’ai
jamais interprétée en entier, tout simplement
parce qu’on ne me l’a jamais demandé.
Quelle est la note la plus élevée sur
laquelle vous vous sentez à l’aise ?
Cela dépend de la manière dont le rôle est écrit.
Je dirais contre-Mi, contre-Mi bémol. Je fais
bien sûr des Fa en exercice, mais je ne veux pas
insister car cela finit par tirer la voix vers le haut,
ce qui n’est pas du tout l’objectif que je recherche. Mon but est d’obtenir davantage de
confort dans le médium et le bas médium,
indispensable pour les rôles qui constituent
mon répertoire de base aujourd’hui, et pour
ceux auxquels je rêve. À l’heure actuelle, pour
ce qui est du dramatisme dans l’écriture vocale,
Pendant vos premières années de
carrière, vous avez beaucoup fréquenté le
répertoire des XVIIe et XVIIIe siècles : Lully,
Rameau, Haendel... Vous intéresse-t-il
toujours ?
C’est une musique chère à mon cœur. Je la
connaissais mal auparavant et j’ai pris un
immense plaisir à la découvrir,en commençant
avec Marc Minkowski. Je la chante moins
aujourd’hui tout simplement parce que je
m’oriente dans d’autres directions, essentiellement le bel canto et le répertoire français du
XIXe.On peut alterner Haendel avec Bellini et
Donizetti, car il y a une
filiation évidente entre le
bel canto baroque et
romantique. C’est plus
difficile s’agissant de Lully
et Rameau... Après
Matilde di Shabran, La
sonnambula et La traviata, il me faudrait travailler énormément pour
plier à nouveau mon
instrument au style extrêmement spécifique de
l’opéra français des XVIIe
et XVIIIe siècles.Pendant
des années, c’est vrai, j’ai
jonglé d’un style à l’autre
mais le moment vient où une voix se pose, où
l’on éprouve le besoin de la « calibrer » dans un
certain répertoire. Cela n'empêche pas la prise
de risque, ni la conquête de nouveaux rôles : je
ne cesse de les enchaîner. Même Rosina est
d’une certaine manière un nouvel emploi,
puisque je ne l’avais fait qu’une fois et en français. Sur le strict plan vocal, un certain nombre de choses se sont mises en place,de manière
définitive, et c’est sur cette base que j’entends
maintenant me développer. Ceci posé, si un
projet dans le baroque français ou italien me
séduit vraiment, pourquoi pas ?
“ Je me vois
mal faire
carrière avec
cinq ou six
rôles ! ”
Le Festival Rossini vous at-il proposé d’autres
opéras ensuite ?
Torvaldo e Dorliska, mais ce
n’était pas pour moi.
Maintenant, j’attends de
voir... J’adorerais y chanter
Amenaide dans Tancredi, un
personnage dont je me sens
très proche, davantage par
exemple que de Semiramide.
Il y a une poésie, un quelque
chose d’intimiste dans
Amenaide auquel je ne résiste pas. Je suis également attachée à Rosina, que je retrouverai
aux Arènes de Vérone l’été prochain, dans une
nouvelle production de Hugo de Ana. J’aime
jouer, j’aime m’amuser, et c’est un rôle qui
donne la possibilité de faire du théâtre. Ce sera
mon premier opéra de Rossini depuis Matilde
di Shabran. Et je suis sûre que je l’interprèterai
d’une manière différente après l’expérience de
Matilde et du Comte Ory.
Le Comte Ory, justement. N’est-ce pas
l’opéra que vous avez le plus chanté ?
Peut-être, avec Lucia di Lammermoor. Et je ne
dirais pas non si on me proposait de le refaire,
dans une nouvelle mise en scène. D’emblée,
c’est un opéra qui m’a séduite,je ne pourrais pas
vous dire pourquoi,sinon peut-être parce qu’on
s’y amuse follement ! Je suis arrivée à un
Vous avez enregistré en première
mondiale des titres comme Margherita
d’Anjou de Meyerbeer ou Elvida et
Francesca di Foix de Donizetti. Êtes-vous
attirée par l’inédit ?
AMATI BACCIARDI
Dans cette perspective, n’y avait-il pas un
risque à aborder Matilde di Shabran pour
vos débuts au Festival Rossini de Pesaro,
en 2004 ?
Une folie, mais je ne la regrette pas un
instant ! Le rôle est à la fois très grave et très
aigu. Il est également très long et très
« bavard », avec énormément de notes à chanter. En plus, il réclame énormément d’abattage, aussi bien vocal que scénique. Et puis j’ai
beaucoup aimé la production, un élément
essentiel s’agissant d’un ouvrage qu’il faut
absolument voir à la scène. Le disque n’en
offre qu’une image partielle. Le plus difficile
dans Matilde, c’est le grand air final, qui arrive
après plus de quatre heures de représentation,
pendant lesquelles il a déjà fallu donner beaucoup de soi-même. Cela m’a
énormément intéressée de
tenter l’expérience.
moment où il revenait à la mode, où plusieurs
coproductions se montaient à travers l’Europe.
Du coup, j’y ai fait mes grands débuts internationaux au Festival de Glyndebourne en 1997,
je l’ai repris à Florence, à l’Opéra-Comique...
On a fini par m’identifier à la Comtesse Adèle,
ce qui,d’ailleurs,ne m’a absolument pas gênée.
Les gens ont toujours tendance à vous figer
dans une certaine catégorie d’emplois, mais je
crois que tout le monde a compris aujourd’hui
que je pouvais faire autre chose.
Débuts à Pesaro :
Matilde di Shabran
(2004).
Débuts à Salzbourg
l’été dernier : Giunia
dans Lucio Silla.
CLÄRCHEN & MATTHIAS BAUS
je ne vais pas au-delà de Violetta.Juliette a également sa part de dramatisme et venir à bout
de l’Air du poison n’est pas une mince affaire
pour une voix comme la mienne ! Il faut en
effet que je fasse attention à ne pas dépasser les
limites de mon instrument, que je respecte sa
structure naturelle.
SON CALENDRIER
■ La Juive (Eudoxie). Opéra National de
Paris. 16, 20, 24, 28 février, 3, 6, 10, 14,
18, 20 mars.
■ Don Giovanni (Donna Anna). Teatro Verdi
de Trieste. 31 mars, 3, 5, 7, 15 avril.
■ Gloria de Poulenc. Salle Pleyel. 25, 26
avril.
■ Il barbiere di Siviglia (Rosina). Arènes de
Vérone. 14, 19, 26 juillet, 8, 11, 14, 18, 25,
30 août.
■ Lucia di Lammermoor (rôle-titre).
Metropolitan Opera de New York. 16, 20, 25
octobre.
■ Roméo et Juliette (Juliette). Staatsoper
de Vienne. 22, 25, 28 novembre.
OPÉRA MAGAZINE - 9
VILLE DE NICE
GTG/ISABELLE MEISTER
ENTRETIEN ANNICK MASSIS
Les deux Folies : Lucia à Nice (2003)
et Ophélie à Genève (2006).
Je me vois mal faire carrière avec cinq ou six
rôles ! J’aime effectivement beaucoup redécouvrir des partitions oubliées même si, ne
nous leurrons pas,elles ne sont pas toutes d’une
valeur exceptionnelle... Je trouve notamment
très intéressant de prendre la mesure de l’évolution d’un compositeur,celle de Donizetti par
exemple, pendant les neuf années qui séparent
Elvida (1826) de Lucia di Lammermoor (1835).
Sur ce plan, je dois beaucoup à Patric Schmid,
fondateur et directeur artistique de la firme
Opera Rara, dont la disparition en 2005 a été
un choc énorme pour moi. C’est lui qui, après
m’avoir entendue à Glyndebourne, m’a proposé Margherita d’Anjou. Nous avons étudié
ensemble la partition,nous avons commencé à
parler cadences,les heures ont passé,et j’ai succombé à sa passion pour cette musique et ce
répertoire. C’était un homme d’une immense
culture, qui possédait l’une des bibliothèques
les plus phénoménales qu’il m’ait été donné de
voir, et quelqu’un qui éprouvait un immense
respect pour la voix des artistes qu’il engageait,
ce qui n’est pas toujours le cas dans les maisons
de disques...Avec lui,vous étiez certain de vous
reconnaître en écoutant le CD ! Opera Rara
m’a reproposé quelque chose récemment,mais
j’étais déjà prise aux dates prévues pour l’enregistrement.
Candide vient de revenir à l’affiche du
Châtelet et du San Carlo de Naples. D’une
certaine manière, vous avez été une
pionnière avec la production de Robert
Fortune donnée en tournée en France et
en Belgique dans les années 1990...
10 - FÉVRIER 2007
Là encore, je me suis beaucoup amusée.
Cunégonde est un rôle qui demande à la fois
du brillant,des vocalises,du médium aussi.Et,
sur le plan scénique, c’est un régal. Je me verrais mal aborder un personnage d’où la composante théâtrale serait absente. Il faut que
quelque chose me saisisse à l’intérieur, me
pousse à exprimer ce que je ressens au plus profond de mon être.
Comment voyez-vous l’évolution de votre
voix ?
Elle a déjà beaucoup changé depuis mes
débuts, vers davantage de lyrisme et d’assise
dans le médium. J’ai récemment écouté un
enregistrement de La Fille du régiment réalisé
pour France Musique, avec piano, vers les
années 1996-1998. J’avais une voix vraiment
légère à l’époque et j’ai beaucoup travaillé pour
la développer. Et je travaille encore aujourd’hui ! Mais pas seule : j’ai toujours quelqu’un à
mes côtés pour contrôler, quelqu’un en qui j’ai
entière confiance. Il est facile, en effet, de partir dans une mauvaise direction sans s’en rendre compte, et de se retrouver avec un instrument en lambeaux.
Quel regard rétrospectif jetez-vous sur vos
quinze premières années de carrière, sur
cet itinéraire qui, depuis vos débuts au
Capitole de Toulouse en 1991, vous a
conduite sur les plus grandes scènes :
Metropolitan Opera de New York,
Staatsoper de Vienne, Liceu de
Barcelone, Scala de Milan... ?
J’ai eu la chance de ne pas subir de pression à
mes tout débuts, d’apprendre en prenant le
temps de mesurer les enjeux et les risques. Je
venais de nulle part,je ne connaissais personne
dans ce milieu et,d’un coup,j’ai pris la décision
d’arrêter mon métier précédent et de me lancer dans une carrière lyrique. J’avais bien sûr
suivi des cours de chant, mais pas beaucoup, et
j’ai appris sur le tas.Une carrière,pour moi,c’est
un travail de construction,que l’on conduit sur
toute une vie.
Quels nouveaux rôles se profilent maintenant à l’horizon ?
Donna Anna d’abord, à Trieste. Ensuite l’édition française de Lucia di Lammermoor, en
concert au Concertgebouw d’Amsterdam. À
première vue, je préfère l’originale italienne
mais, pour une voix comme la mienne, l’étape
me paraît incontournable. L’impact dramatique et théâtral est très différent, le style d’interprétation aussi. J’aime bien le nouvel air
d’entrée, je trouve en revanche la Folie un ton
au-dessus frustrante ! Cela m’oblige à remonter la voix vers le haut alors que,comme je vous
l’ai dit, je cherche plutôt l’inverse. Le début de
cette scène dans l’édition italienne, écrit très
bas,représente un défi passionnant.Par la suite,
cela me plairait d’aborder Konstanze dans Die
Entführung aus dem Serail, Adina dans L'elisir
d'amore, de reprendre Elvira d'I puritani,
Giulietta d'I Capuleti e i Montecchi,Amina dans
La sonnambula, et plus tard, dans le répertoire
straussien, de me confronter à Arabella, Der
Rosenkavalier et Capriccio...
PROPOS RECUEILLIS PAR
RICHARD MARTET
SA DISCOGRAPHIE
LE CD
LES ORATORIOS
LES OPÉRAS
M.-A. CHARPENTIER
Te Deum & Messe de minuit
Minkowski / Kozena, Huchet,
Henckens, Smythe, Bindi
Studio 1997. Archiv
BIZET
Les Pêcheurs de perles
Leïla
Viotti / Nakajima, Grassi,
De Donato
Venise 2004. Dynamic
HAENDEL
Dixit Dominus
Minkowski / Kozena, Fulgoni,
Henckens, McLean-Mair, Pujol
Live 1998. Archiv
BOIELDIEU
La Dame blanche
Anna
Minkowski / Delunsch, Brunet,
Blake, Fouchécourt, Naouri
Studio 1996. EMI
La Resurrezione
Minkowski / J. Smith, Maguire,
Ainsley, Naouri
Live 1995. Archiv
DONIZETTI
Elvida
Rôle-titre
Allemandi / Larmore, Gibbons,
Ford, Spagnoli, Catling
Studio 2004. Opera Rara
Gounod : Harmonies célestes
Desnoues, mezzo-soprano.
Gleusteen, violon. Martin, piano.
Vernet, orgue
Studio 1993. Ligia
Francesca di Foix
Rôle-titre
Allemandi / Larmore, Ford,
Spagnoli, Antoniozzi
Studio 2004. Opera Rara
Rossini : Duo d’amore
Semiramide, Tancredi, Le Comte
Ory
Lazzara, contre-ténor. Frizza,
direction
Studio 2000. Forlane
IBERT
Persée et Andromède
Andromède
Latham-Koenig / Moussay,
Beuron, Rouillon
Studio 2002. Avie
Haydn & Mozart : Airs sacrés
D. Inbal, direction
Studio 2003. Cascavelle
LES RÉCITALS
MEYERBEER
Margherita d’Anjou
Rôle-titre
Parry / Barcellona, Ford, Miles,
Previati, Putnins
Studio 2002. Opera Rara
RAMEAU
Anacréon
L’Amour
Minkowski / Gens, del Pozo,
Félix
Studio 1996. Archiv
Hippolyte et Aricie
L’Amour, Une bergère, Une
matelote
Minkowski / Gens, B. Fink,
Fouchécourt, Smythe, Naouri
Versailles 1994. Archiv
ROSSINI
L’inganno felice
Isabella
Minkowski / R. Gimenez, Gilfry,
Spagnoli, Regazzo
Poissy 1996. Erato
Pacini & Mercadante : Arias and
Ensembles
Il corsaro, I Normanni a Parigi, Il
contestabile di Chester, Cesare in
Egitto, Allan Cameron
Cullagh, soprano. Polverelli,
mezzo-soprano. Ford, Tarver,
ténors. Opie, baryton. Parry,
direction
Studio 2004-2005. Opera Rara
LE DVD
BIZET
Les Pêcheurs de perles
Leïla
Viotti / Nakajima, Grassi, De
Donato
Venise 2004. Dynamic
Matilde di Shabran
Rôle-titre
Frizza / Halevy, Florez, Vinco,
Taddia, De Simone
Pesaro 2004. Decca
MOZART
Lucio Silla
Giunia
Netopil / Cangemi, Kleiter,
Bacelli, Saccà, S. Ferrari
Salzbourg 2006. DG
THOMAS
Mignon
Philine
Denève / Vignon, Gabriel,
Ernelier, Cassard, Courtis
Compiègne 1996. Accord
ROSSINI
Le Comte Ory
La Comtesse Adèle
A. Davis / Montague, Shaulis,
Laho, Tézier, Robbins
Glyndebourne 1997. Warner
OPÉRA MAGAZINE - 11