1 Vania Lederman, Numéro d

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1 Vania Lederman, Numéro d
Vania Lederman, [email protected]
Numéro d’immatriculation : 01324870
Séminaire comportement dysfonctionnel au travail. Hiver 2003-2004.
F. Tschan & S. Facchin
Frost, P. & Robinson, S. L. (1999). The toxic handler : Organizational hero and
casualty. Harvard Business Review, july-august, 97-106
Certaines caractéristiques dans le milieu du travail sont reconnues comme pouvant contribuer
à l'apparition de diverses souffrances émotionnelles, comme un climat de travail tendu, un
contexte de réorganisation de l'entreprise, des surcharges de travail, etc.
La violence psychologique, qui est la plus répandue en milieu du travail, peut s'exercer de
différentes façons par des comportements inopportuns, et offensants, comme des remarques
humiliantes, plaisanteries, railleries, qui peuvent avoir des conséquences très importantes sur
une personne, un groupe…
Les employés peuvent également être confrontés à des licenciements, ou encore à des
changements dans l'entreprise. On trouve dans certaines organisations des personnes qui
tentent de gérer les souffrances engendrées par de telles mesures. Ils sont les médiateurs entre
la direction générale et les cadres, ils sont appelés les "toxic handlers".
Leur contribution au bien-être de l'entreprise reste cependant encore bien méconnue, et
souvent pas appréciée à sa juste valeur.
Ces sauveurs de l'entreprise interviennent à plusieurs niveaux, afin d'éviter qu'une dégradation
du climat du travail et des relations entre personnes ne prennent trop d'ampleur. Ils veulent
informer et faire prendre conscience de l'existence d'un phénomène, et des moyens pour les
prévenir.
Le rôle de cette recherche est de comprendre ce que font les "toxic handlers", pourquoi ils le
font et comment les organisations peuvent les aider. Il est en effet intéressant, dans un
environnement où le business est un maître-mot, de se pencher sur ces personnes. Cette étude
veut montrer que le succès provient d'idées nouvelles, originales, émises par des personnes
intelligentes impliquées émotionnellement, mais avec le risque de s'essouffler suite à un
dysfonctionnement dans l'entreprise ou en réponse à une situation de souffrance.
Les "toxic handlers" sauvent donc souvent les entreprises mais payent malheureusement un
lourd prix pour cela.
L'article de Frost et Robinson met en évidence le rôle de plusieurs "toxic handlers" en
montrant de quelle manière ils gèrent les souffrances émotionnelles :
Michael est un haut directeur de projet dans une compagnie de services publics, et voilà
environ 10 ans qu'il réussit dans son métier. Il est à la tête d'une équipe de 24 ingénieurs qui
travaillent rapidement et font bénéficier l'organisation de leurs idées créatives. Tout se passe
bien jusqu'au jour où le directeur général de l'entreprise fait de Michael, son bras droit, c'est-àdire celui qui lui ferait les rapports de ce qui se passe au sein de la compagnie. Le directeur se
moquait de ses employés, les intimidait, ce qui n'était pas sans conséquences pour les
managers. En effet certains sont hospitalisés ou se voient dans l'obligation de partir plus tôt.
Michael joue le rôle de médiateur entre le directeur général et ses collègues qui viennent se
confier à lui, et lui font part de leurs frustrations. Il se charge également de traduire les
directives du chef, et essaye toujours de faire preuve de diplomatie. C'est une charge très
lourde à porter étant donné qu'il se doit d'être présent à la fois sur le devant de la scène et à la
fois, se tenir au courant de ce qui se passe en coulisse. Il faut suivre les gens, trouver les mots
qui apaisent, faire preuve de compassion…
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Il est important de relever que les "toxic handlers" agissent volontairement, mais souvent
inconsciamment.
LE ROLE DES "TOXIC HANDLERS" :
Leur travail ne se limite pas à une donnée, mais consiste en des tâches variées plus ou moins
complexes.
Alexandra est vice-présidente dans une grande institution financière à New York.
Techniquement parlant, elle est responsable des comptes, mais en réalité elle passe au moins
la moitié de son temps à conseiller ses collaborateurs. Elle fait la médiation entre la grande
équipe administrative de la banque et le flux constant de nouveaux directeurs de gestion tout
juste sortis de l'école et plein d'ambitions pour leur carrière. Malheureusement, ils en viennent
souvent à négliger le côté humain. Alexandra s'efforce donc de leur faire comprendre qu' ils
ne sont pas là pour donner des ordres aux personnes qui les entourent. Elle remarque à quel
point ces derniers mettent une pression constante aux employés qui en subissent les
conséquences.
C'est un travail très délicat demandant beaucoup de diplomatie car il ne faut vexer personne.
Alexandra passe de heures à écouter les managers qui lui font part de leurs craintes, de leur
sentiment d'insécurité face une éventuelle fusion avec une autre banque par exemple.
Les "toxic handlers"apaisent les souffrances dans une organisation de cinq façons :
Ils écoutent de manière empathique :
Ils ne vont pas juger une personne et vont faire preuve de compassion. Ils ne sont pas là pour
faire des réprimandes, mais pour essayer de réparer les dégâts causés.
Ils suggèrent des solutions :
Par exemple, ils donnent des conseils sur la manière de s'adresser à la direction pour éviter les
confrontations.
Ils interviennent derrière la scène pour prévenir les souffrances :
Les "toxic handlers" agissent dès qu'un soupçon de souffrances pointe à l'horizon. Il arrive
qu'un employé qui perd confiance en lui à cause d'un patron trop exigeant soit obligé de
changer de département contre sa volonté. Le "toxic handler", par souci de sauvegarder
l'estime et l'image de l'employé, interviendra en le plaçant dans un service plus adéquat sans
même que l'employé ait connaissance de toutes les démarches réalisées en coulisse.
Ils écoutent et "portent" les confidences des autres :
En confiant leurs secrets aux "toxic handlers", les employés arrivent à se décharger de leurs
peurs au sujet d'une éventuelle fusion et des conséquences que cela engendrerait. Les "toxic
handlers" sont aussi à l'écoute des soucis que pourrait avoir un directeur général qui se
soulagera , par exemple, en confiant des informations au sujet d'un licenciement.
Ils reformulent les messages difficiles :
Les "toxic handlers"sont souvent les porte-parole de la direction. Ils adoucissent les discours
des patrons et permettent ainsi à l'équipe de se focaliser sur les directives.
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LES "TOXIC HANDLERS" REMPLISSENT UN BESOIN
Les "toxic handlers" existent depuis longtemps, étant donné que des souffrances ont toujours
été présentes, mais c'est seulement depuis quelques années que deux tendances ont intensifié
ce besoin :
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Les bouleversements incessants d'une entreprise lors de son expansion engendrent des
restructurations nécessaires et importantes pour l'évolution et la survie de l'entreprise.
Elles peuvent créer parfois des sentiments de confusion, de peur, et de colère parmi les
employés.
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La compression du personnel est l'autre tendance qui augmente le besoin d'avoir des
"toxic handlers". Une compagnie licenciant des employés provoque des sentiments
d'angoisse parmi le personnel restant qui se demande qui sera le prochain à partir. Les
"toxic handlers" calment donc les esprits et redirigent l'énergie de ces personnes dans
le travail.
Parfois, les "toxic handlers" se voient charger d'appliquer une nouvelle politique de
réorganisation basée sur la promotion de la performance plutôt que sur l'ancienneté.
Cependant, il arrive qu'ils se heurtent à des réticences telles que le chef est contraint
d'abandonner cette politique.
Les organisations sont elles-mêmes toxiques dans le sens où elles génèrent systématiquement
des angoisses à travers leur politique d'action en exigeant toujours plus de leurs employés. La
compétition peut stimuler mais aussi nuire à l'organisation qui pourrait alors être qualifiée de
malhonnête. Quand des erreurs surviennent, personne n'endosse la responsabilité mais
s'efforce au contraire de tout faire pour dissimuler les fautes.
Les "toxic handlers" existent aussi car le monde du business a des "toxic bosses". On
rencontre en effet parfois certains patrons avides de pouvoir, qui ont besoin de contrôler de
très près ce que font les personnes travaillant pour eux.
Les "toxic bosses" travaillent souvent avec un "toxic handler". Ce dernier diminue les craintes
du patron et empêche que certaines situations ne prennent une ampleur considérable. Les
"toxic handlers" essayent de faire du mieux qu'ils peuvent pour que les organisations
continuent à fonctionner normalement.
"TOXIC HANDLER" EST UNE VOCATION
La fonction des "toxic handlers" va au-delà d'un simple métier. Ils y trouvent les récompenses
pour tout ce que cela leur apporte intérieurement car ils sont rarement reconnus dans la
compagnie. Parfois, les "toxic handlers" émergent de leur position dans l'organisation et
proviennent en général du département des ressources humaines. Mais, la plupart du temps,
ils se retrouvent dans ce rôle par leurs collègues qui se tournent vers eux, car se sont des
personnes dignes de confiance, calmes, et qui ne porteront pas de jugements. Les "toxic
handlers" s'avèrent en effet être souvent des êtres doués de grande tolérance envers les
souffrances, et savent faire preuve d'empathie.
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Cependant, des personnes sceptiques, réticentes, pensent que les "toxic handlers" sont
déséquilibrés émotionnellement. Mais, dans cette recherche, on a trouvé des managers
professionnels sensibles à l'aspect humain de leur organisation. Ils arrivent à accomplir les
objectifs de l'organisation tout en gardant l'esprit des affaires. La gestion des souffrances
émotionnelles est l'une de leur préoccupation principale. Le métier de "toxic handler" est une
vocation à part entière.
LES SEQUELLES DU "TOXIC HANDLER"
S'occuper des souffrances émotionnelles d'une organisation est vital pour la santé de
l'entreprise, mais malheureusement cela se fait au détriment de la santé des "toxic
handlers".Quand ils occupent ce rôle pendant une trop longue période, ou qu'ils sont sans
cesse exposés à des problèmes émotionnels, ou encore lorsqu'ils sont confrontés à une
entreprise toxique depuis longtemps, les répercussions négatives sont particulièrement élevées
pour eux.
Il est en effet courant de rencontrer des "toxic handlers" usés psychologiquement et
physiquement mais aussi professionnellement qui doivent alors prendre du recul en
s'éloignant de l'entreprise pendant un temps plus ou moins long. La plupart des "toxic
handlers" sont sujets à beaucoup de stress, ont des maux de dos, des maux de tête…
Dave Marsing est un exemple des effets néfastes que peut engendrer ce rôle : il effectuait la
liaison entre toutes les parties de la compagnie et faisait face à toutes les émotions. De
l'extérieur, il était la personne qui apaisait tout le monde et qui rendait possible de continuer le
travail, mais intérieurement il était très agité, ne dormait plus, et avait perdu l'appétit.
Quelques mois après, il eut une crise cardiaque et mourut à l'âge de 36 ans!
Plusieurs managers stressés reconnaissent avoir eu une dépression, des palpitations
cardiaques, des insomnies, diverses infections virales, et sont plus susceptibles d'avoir des
crises cardiaques. Le stress entrave le bon fonctionnement du système immunitaire.
Le "toxic handler" s'implique totalement au point d'avoir des répercussions sur sa vie privée.
Contrairement au travailleur sur un site radioactif, il n'a pas de combinaison protectrice, et est
donc exposé à des zones dangereuses.
PRISE EN CHARGE DES "TOXIC HANDLERS"
Etant donné l'existence de risques importants pour la santé des "toxic handlers", chaque
organisation se doit de les soutenir du mieux qu'elle peut.
Reconnaître que des "toxic handlers" existent et qu'ils jouent un rôle critique est le premier
pas que chacun doit faire.
Les "toxic handlers" ne sont pas toujours bien admis dans une entreprise qui a comme valeur
prioritaire la compétence technique et non la compétence humaine. Le fait de s'occuper des
souffrances est encore considéré comme étant le travail d'une femme. On voit donc ici à quel
point des préjugés peuvent influencer les perceptions et sont ancrés dans la société. On
reconnaît difficilement les efforts fournis par les "toxic handlers", qui sont peu gratifiés dans
l'entreprise par les cadres.
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Certains managers pensent que parler de leurs sentiments auraient des répercussion négatives
sur leur carrière, alors remercier les "toxic handlers" leur est encore moins imaginable. Les
auteurs de la recherche pensent néanmoins que la reconnaissance porterait rapidement ses
fruits et permettrait aux "toxic handlers" de ne pas rester à l'écart et avoir une place dans
l'organisation.
Aucune compagnie ne peut se permettre que ses employés talentueux s'usent au risque d'avoir
une réputation d'être un lieu où l'on ne soucie pas des sentiments de son personnel.
Laisser Partager leurs expériences
Il arrive parfois que les "toxic handlers" forment leur propre groupe pour se soutenir
mutuellement. Le danger est de ne pas demander de l'aide à temps étant donné qu'ils pensent
avoir des capacités suffisantes pour subir la souffrance.
Les "toxic handlers" peuvent rencontrer périodiquement des professionnels qui sont formés
pour les aider à diminuer leur stress et les diverses tensions subies.
Les experts permettent aux "toxic handlers" de voir, de comprendre, et de mesurer le niveau
de tensions auquel ils sont confrontés. Ils les aident à tenir compte des signes envoyés par leur
corps . Les experts apprennent également aux "toxic handlers" à dire non de temps en temps,
sans que cela veuille dire que l'on ne se préoccupe pas du problème de l'autre ou des
problèmes l'organisation.
Mettre les "toxic handlers" en zone sûre
Quand le "toxic handler" montre des signes de surmenage, on va le retirer de la situation
stressante en l'envoyant par exemple quelques jours ailleurs. Avec diplomatie, on peut par
exemple prétexter une conférence à l'étranger pour qu'il ne se sente pas trahi et penser que l'on
cherche à se débarrasser de lui.
Une recherche, faite en 1995 sur les habitudes des chefs dans le business, confirme à quel
point prendre des pauses, partir quelques jours, est important pour le bien-être de l'individu.
Cependant, quand les souffrances sont trop importantes, le fait de prendre de courtes pauses
n'est pas suffisant pour remettre sur pied un "toxic handler" et l'entreprise doit alors prendre
des mesures adaptées comme par exemple nommer la personne dans une partie de la
compagnie moins sujette aux souffrances émotionnelles.
Model sain de comportement d'"un toxic handler"
Il est en effet essentiel que le "toxic handler" se sente bien afin de pouvoir aider les autres.
Il faut toujours essayer de maintenir un niveau de calme optimal, et surtout insister à ce que le
"toxic handler" ait un équilibre entre son travail et sa vie privée. Il est essentiel de passer plus
de temps avec sa famille, de faire plus d'exercices…
LES "TOXIC HANDLERS" DEMODES?
La question est de savoir si l'entreprise peut gérer seule les douleurs émotionnelles qui
surviennent ?
Dans certaines occasions, les employés ont eu la possibilité d'exprimer leur tristesse et leur
colère.
La recherche montre que des consultants extérieurs, engagés par l'entreprise, peuvent remplir
le rôle de "toxic handler" pendant une période de changements. Les employés vont partager
leurs craintes avec ces consultants qui leur garantissent un contexte d'anonymat. Ces "toxic
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handlers" informels aident les employés à se décharger de leurs peines et à identifier les
moyens pour les diminuer. Les consultants externes sont plus objectifs que les "toxic
handlers". Cependant quand un employé souffre, il aura tout de même plus de mal à aller vers
le consultant, à moins qu'il ne soit sûr que ce dernier ne connaisse vraiment le fonctionnement
de l'entreprise.
Les compagnies peuvent gérer les souffrances émotionnelles en donnant l'opportunité aux
employés de suivre des formations sur le stress et ses conséquences. Ces formations
diminueraient le besoin de "toxic handlers", car les gens deviendraient plus capables de
s'occuper de leurs propres émotions. Il existe différents programmes qui utilisent entre autres
des techniques de mise en situation. On apprend, par exemple, aux employés à reconnaître des
moments stressants par des images, des films…
CONCLUSION
La recherche s'est heurtée à quelques résistances, mais la plupart du temps les cadres dont elle
parle, se rendent compte que leur organisation peut être la cause de tristesse, de craintes et de
confusions. Beaucoup de personnes arrivent à gérer leurs propres émotions tout en se souciant
des autres.
Cette recherche a mis en évidence que finalement les cadres et les managers avaient été
soulagés car c'était la première fois qu'ils étaient capables de parler des malaises au sein de
l'organisation. Il faut noter qu'il est impossible et pas recommandé d'enlever toutes les failles
émotionnelles d'une organisation. Rappelons que les souffrances dans les organisation ne
viennent pas que des restrictions du personnel, d'un mauvais patron, ou encore des
changements, mais du fait que des individus cherchent à tout prix à atteindre l'excellence.
Il est essentiel de prendre en charge les employés le plus tôt possible et de ne pas attendre que
les souffrances aient provoqué des dégâts irréparables. Un employé en bonne santé, bien dans
sa peau est un élément clé pour le succès d'une entreprise et de la société, à long terme!!
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