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Finance Immobilière
Finance Immobilière
Procimmo: aucune «bulle»
dans notre immobilier commercial
Immobilier commercial:
la Suisse résiste bien,
pour l’heure, aux difficultés
européennes.
Patrick Richard, administrateur de Procimmo SA, évoque le marché immobilier et les projets
actuels ou futurs de son fonds de placement spécialisé en immobilier d’entreprise.
Patrick Richard, administrateur
de Procimmo SA
- Quelle est la particularité de
votre fonds?
- Atypique à bien des égards, le
Procimmo Swiss Commercial Fund
(PSCF) est un fonds de placement
spécialisé dans l’immobilier commercial. Par «commercial», on entend non seulement les immeubles
de bureau ou les centres commerciaux, mais aussi et surtout les bâtiments industriels et artisanaux. En
outre, le fonds se distingue par sa
politique de loyers bas et par son
positionnement en zone B, hors
des principaux centres urbains de
Suisse. Cette vision entrepreneuriale permet de rendre accessible
à chacun ce type particulier d’immobilier. En effet, le PSCF est actif
dans une niche immobilière où les
particuliers n’aiment pas s’aventurer, faute de pouvoir suffisamment
diversifier leur investissement. Et
que les institutionnels évitent, car
ils ne sont pas équipés pour gérer
ce type d’objets. Au 31 décembre
2011, le fonds dispose d’une fortune brute d’environ 600 millions
de francs pour un capital de 400
millions de francs.
- Quels sont vos projets en cours?
- Le fonds travaille à trois projets
de développement. Le premier se
situe dans la plaine du Rhône, à
Martigny, au bord de l’autoroute
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menant au Col du Grand St-Bernard. Le fonds y construit une
halle industrielle modulable, sur le
modèle de celles déjà réalisées à
Corcelles-près-Payerne et au Montsur-Lausanne. Ce site offrira une
soixantaine de boxes d’une surface
au sol de soixante mètres carrés et
d’une surface utile de cent quinze
mètre carrés. Ces boxes sont faciles
à louer, car ils répondent aux besoins des petites entreprises et des
particuliers: le prix de location est
modéré, les possibilités d’utilisation sont très larges (du simple lieu
de stockage au bureau aménagé, en
passant par le site de production
et l’atelier de travail) et l’adaptabilité des locaux est considérable. La
construction est en cours et les travaux devraient être terminés d’ici à
l’été prochain. En principe, tous les
boxes devraient être loués, ce qui
assure un bon retour sur investissement pour le fonds et participe de la
plus-value qu’il peut assurer à ses
investisseurs.
Le second projet a débuté par
un mini concours d’architectes
au Mont-sur-Lausanne. Il s’agit
d’agrandir et de terminer un bâtiment sis En Budron. Un architecte
a été sélectionné et la demande de
permis de construire est en cours
de préparation. Le budget provisoire est de l’ordre de CHF 7 à 8 mil-
lions. Les travaux devraient débuter
à la fin de l’été 2012, pour environ
12 mois. Au terme de ce projet, le
fonds aura totalement mis en valeur
ce site, acquis de la Fondation de
valorisation des actifs de la BCGE,
et réalisé une très belle affaire immobilière.
Enfin, le troisième projet en préparation concerne la Suisse alémanique, plus particulièrement
le site d’Otelfingen. Le départ du
Tennis Club donne l’opportunité au
fonds de réfléchir à la mise en valeur de ce terrain d’environ 20 000
mètres carrés, situé à cinq minutes
de l’autoroute et à vingt minutes
de Zurich. Idéalement placé, avec
un volume constructible de plus de
100 000 mètres cubes, ce terrain
offre un potentiel très important.
Des discussions sont en cours avec
les principaux constructeurs du
pays et un projet de location est en
phase de développement. En effet,
pour mettre en valeur un tel espace,
il faut travailler main dans la main
avec le ou les futur(s) locataire(s),
afin d’investir avec une garantie
de rendement futur et une sécurité
dans les choix de construction. Ce
projet devrait s’étendre jusqu’en
2014 et nécessiter quelque quarante
millions de francs d’investissement.
Le succès dans l’immobilier étant
également dépendant d’une juste
anticipation, au moins deux autres
projets sont en phase préliminaire
de discussion. Cette approche le
plus en amont possible permet, en
effet, d’optimiser les rendements
du projet et d’en réduire au maximum la genèse.
- Quels sont les derniers développements dans le commerce de
détail et comment financez-vous
votre fonds?
- Le PSCF est peu engagé dans les
immeubles accueillants des commerces de détail et c’est certainement une chance. En effet, ce
secteur souffre passablement de
la force du franc et du peu d’appétence des consommateurs pour
dépenser ou pour acheter suisse.
Entre la psychose véhiculée quotidiennement par les médias, la
possibilité d’économiser quelques
francs en allant au-delà des frontières et les incertitudes qui pèsent
sur l’avenir, beaucoup renoncent à
acheter auprès des commerçants
suisses. Les grandes chaînes de distribution sortent leur épingle du jeu
et peuvent compter sur des réserves
importantes, alors que les petits
commerces rencontrent davantage
de difficultés. Mais notre fonds Procimmo ne souffrira pas trop des difficultés rencontrées dans le retail,
car il est stratégiquement très bien
positionné.
En termes de financement, le PSCF
dispose de 70% de capitaux propres
et de 30% de capitaux étrangers, ce
qui est extrêmement sain dans le
monde de l’immobilier. Le levier
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M A I – J U I N 2 012
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permet au fonds d’augmenter son
rendement, sans mettre en danger
sa pérennité et sa solidité. Au cours
de ces derniers mois, le fonds a diversifié ses banques créancières. A
cet effet, il a lancé un appel d’offres,
afin de négocier des contrats cadres
de crédit avec plusieurs établissements. Les conditions obtenues
sont excellentes et tant que le fonds
conserve sa politique prudente et
raisonnable, son financement est
assuré.
Les échéances des prêts sont échelonnées sur les dix prochaines années de manière régulière, ce qui
permet de lisser le risque de fluctuation des taux. Actuellement, le
fonds dispose également d’une partie d’emprunt à court terme pour
profiter de conditions historiquement favorables. Pour l’heure, cette
structure d’endettement paraît optimale et rien n’indique qu’elle doive
changer au cours des prochains
mois. A cet égard, le fonds observe
un certain recul et une forte dose
de prudence, pour ne pas réagir à
l’actualité du jour ou de la semaine,
mais asseoir sa politique et sa stratégie dans la durée.
- En Europe, on évoque des problèmes de refinancement. Quelles
sont les vues de Procimmo sur la
situation générale et comment s’y
adapte-t-il?
- Pour les banques suisses, le fonds
représente un débiteur sain et solide et elles recherchent ce type
d’affaires. Cela permet au fonds de
bénéficier de bonnes conditions
d’emprunt.
Pour l’heure, le fonds n’envisage
pas de remontée rapide et brutale
des taux. Le fonds table davantage
sur une stabilité à court et moyen
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terme, puis sur une possible hausse
des taux, qui devrait être progressive. Procimmo estime que la BNS
contrôlera la hausse pour éviter des
réactions trop violentes sur le marché. Certes, il ne restera pas insensible à une hausse des taux d’intérêt, mais cette éventualité ne devrait
pas trop peser sur ses résultats. En
termes de rendement, une hausse
des taux entraînerait une hausse de
l’indice suisse des prix à la consommation, qui pourrait être reportée
sur les loyers. Dans le même temps,
cette hausse des loyers influencerait positivement la valorisation
des immeubles, compensant ainsi,
du moins partiellement, la hausse
du taux d’escompte. Il faudrait assurément compter sur un certain
décalage dans la compensation des
effets susmentionnés, mais aucune
grande surprise n’en est attendue.
Quant à l’environnement économique plus général, la Suisse résiste
bien, pour l’heure, aux difficultés
européennes. Certaines mesures
complémentaires seront peut-être
prises par la BNS pour continuer à
affaiblir le franc et pour limiter la
surchauffe dans les prix des maisons individuelles et des appartements en propriété par étages,
principalement en Suisse romande,
mais il est de la responsabilité de
chacun de ne pas céder aux emportements et aux dérapages évoqués
au quotidien par les médias et de
continuer à vivre normalement en
produisant et en dépensant localement. Ces mesures combinées sont
les meilleures réponses à donner et
elles constituent la plus grande garantie de stabilité pour la Suisse. n
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Propos recueillis
par François Berset
«Les échéances des prêts
sont échelonnées
sur les dix prochaines
années de manière
régulière, ce qui permet
de lisser le risque
de fluctuation des taux».