la mobilisation des ressources exposé de cadrage josiane

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la mobilisation des ressources exposé de cadrage josiane
LA MOBILISATION
DES RESSOURCES
JOSIANE RABETOKOTANY
Coordonnatrice de l'Unité d'Appui Technique au
Programme Éducation Pour Tous
Ministère de l'Éducation Nationale et de la
Recherche Scientifique de Madagascar
EXPOSÉ DE CADRAGE
INTRODUCTION
Si les ressources constituent toujours un aspect important et un
objet de préoccupation dans la mise en oeuvre de politiques éducatives, il est logique que la notion de mobilisation des ressources
accompagne les approches dites « programme ». En effet, si un projet vient avec/apporte des ressources, lorsqu'on a un programme on
cherche à mobiliser les ressources pour sa réalisation. Et dans ce
cadre, les ressources ne sont pas seulement financières mais également humaines, les ressources humaines étant considérées comme
acteurs et/ou partenaires du programme.
S’agissant de politiques éducatives, la notion est utilisée généralement tout d’abord au niveau de l’État : mobiliser les ressources
financières et humaines pour la mise en oeuvre du programme, de la
politique éducative du gouvernement. Mais elle s’applique également au niveau local où les programmes et politiques sont directement mis en oeuvre. Il s'agit alors de mobiliser les ressources financières et humaines au niveau local, aux niveaux déconcentrés ou
décentralisés, au niveau des établissements scolaires eux-mêmes, en
vue de la réalisation du programme local, de la politique éducative au
niveau local.
Aussi, en traitant successivement des questions suivantes :
- mobiliser pourquoi ?
- qui mobiliser ?
- quand mobiliser ?
- comment mobiliser ?
l'on considérera à la fois le niveau national et le niveau local.
LES ENJEUX DE LA MOBILISATION : MOBILISER POURQUOI ?
La mise en oeuvre des réformes, des politiques et des stratégies
éducatives requiert des appuis de différents types, des moyens financiers et humains, des idées novatrices, des leçons de l’expérience, une
dynamique et un mouvement d’ensemble. Les expériences passées ont
montré que sans ce mouvement concerté et organisé, sans cette dynamique commune, si l’on s’éparpille, si l’on travaille de façon parcellaire
et/ou seulement ponctuelle, non systémique, l’impact est limité, les
gaspillages sont courants, laissant toutes les parties prenantes insatisfaites.
C'est donc pour une meilleure efficacité, pour une véritable appropriation, un meilleur rendement et une maîtrise des coûts, pour être sûr
de la pertinence et de l’adéquation des politiques, que la mobilisation
doit s'effectuer.
Ainsi, mobiliser signifiera réunir et organiser autour et en vue d'objectifs partagés.
LES DIFFÉRENTES PARTIES PRENANTES : QUI MOBILISER ?
Compte tenu de ces enjeux, ce sont les différentes parties prenantes
du programme qui doivent être mobilisées, c'est-à-dire les acteurs, les
partenaires et les bénéficiaires :
• les acteurs de l’éducation : les enseignants, et les responsables/agents à tous les niveaux , de l'enseignement public
et de l'enseignement privé ;
• les soutiens/partenaires de proximité (parties prenantes
locales qui peuvent aussi être acteurs) : parents, communautés, société civile dont ONG, associations, etc. ;
• les partenaires nationauxd’autres secteurs ou sous-secteurs,
par exemple les universités, la fonction publique, le secteur
de la santé, le ministère des finances ;
• les partenaires internationaux techniques et financiers.
Parmi ces entités à mobiliser, certains sont acteurs directs dans le
programme, notamment de l'enseignement primaire, d’autres constituent des appuis rapprochés ou des appuis stratégiques, financiers
et/ou techniques. Par appui technique, on entend ceux qui contribuent
à la conception, à l'apport d'idées, d'outils et de leçons d'expérience,
d'informations de divers ordres, de remarques et commentaires, autrement dit : l'assistance technique.
Pour chaque action à entreprendre, chacune de ces parties prenantesa desparticularités, descompétences, un mandatou desintérêts
qui indiquent les domaines pour lesquels elle peut ou doit être mobilisée.
LES DIFFÉRENTS STADES : QUAND MOBILISER ?
La mobilisation commence dès l'élaboration des politiques et programmes que l'on envisage de mettre en oeuvre, ceci pour en assurer
l'appropriation, l'effectivité et l'efficacité ultérieures.
En effet, les politiques que l’on s'approprie, ou pour lesquelles il y a
un véritable sentiment d'appartenance, ont plus de chance d'être effectivement mises en oeuvre, de recevoir les appuis nécessaires, au plan
local, national et international. C'est pourquoi, au stade où les politiques
sont élaborées, la mobilisation s'effectue à travers un dialogue politique
mené avec les acteurs et les partenaires. Ce dialogue permet également
d'assurer la pertinence et la faisabilité des politiques. Il porte sur les
objectifs et les stratégies, et l'appropriation se fait à travers lui. On
obtient ainsi une plus grande efficacité dans le stade suivant la mobilisation, c'est-à-dire dans la mise en oeuvre.
En effet, pour pouvoir mettre en oeuvre un programme, il faut des
ressources financières et des ressources humaines. C'est pourquoi ces
deux types de ressources devront faire l'objet de mobilisation.
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La mobilisation des ressources financières
Au plan national
À partir du programme sur lequel il y a eu concertation, la mobilisation des ressources provenant du budget national fait l'objet d'un dialogue particulier avec le ministère des Finances. Ce dialogue se fait en
début de programme, pour assurer un budget pluri-annuel, mais il est
repris, bien entendu, tous les ans, lors de la préparation du budget de l'État. D'autant plus que l’engagement de l’État est naturellement un facteur
qui incite ou encourage les partenaires internationaux à mobiliser leurs
propres ressources.
Et justement, la mobilisation des partenaires internationaux pour les
ressources financières en appui au programme national est aussi l'autre
aspect essentiel. Comme on l'a mentionné auparavant, le fait que le programme soit le fruit d'un dialogue, d'une réflexion partagée, est une des
conditions de l'efficacité de la mobilisation des ressources financières
des partenaires internationaux. Cette mobilisation peut se faire, de façon
très pratique, à partir d'un cadre commun où les activités et les financements requis sont articulés, où les fonds provenant du budget de l'État
sontspécifiésetoù lespartenairessontinvitésà apporter leur appui là où
les financements sont insuffisants. Leur appui peut s'effectuer soit sous
la forme d'aide budgétaire directe (ciblée ou non), soit sous la forme de
fonds additionnels d'aide-programme, soit encore sous la forme d'aideprojet. Il appartient au gouvernement de proposer les priorités sur lesquelles les financements sont requis. Certes, les différents partenaires
peuvent avoir des domaines d'intérêt spécifiques et un dialogue sur les
priorités est alors nécessaire. À ce stade, le leadership du gouvernement
est essentiel pour assurer la cohérence de la mise en oeuvre.
Au plan local
Dans la mise en oeuvre locale du programme, surtout au niveau des
établissements scolaires, une mobilisation de ressources financières est
également possible. En effet, si le programme est réellement approprié,
toutes les parties prenantes y contribuent selon leurs moyens. Ainsi, la
contribution des parents (ou associations de parents d'élèves), des autorités locales (communes, etc.) ou d'autres partenaires intéressés par l'éducation est mobilisée.
Ici encore donc, l'appropriation est la base de la mobilisation. Et de
même que pour la mobilisation sur le plan national, le cadre des activités
etfinancementsrequisestl'outilqui permetde piloter la mobilisation ; au
plan local le plan d'action local est l'instrument utilisé. Ainsi, les différentes contributions et leur articulation pour atteindre les objectifs définis en commun sont clairement lisibles.
La mobilisation des ressources humaines
La mise en oeuvre, même avec des moyens financiers, ne peut s'effectuer que si les ressources humaines sont présentes, actives, adéquates et organisées. C'est pourquoi ce volet est aussi essentiel pour l'effectivité et l'efficacité de l'exécution.
Au plan national aussi bien qu'au plan local, elle commence, comme
nous l'avons vu, dès l'élaboration du programme. Et sur la base de ce qui
a été projeté de concert, la mobilisation dans la mise en oeuvre s'effectue.
Les maîtres mots dans ce cadre sont, d'une part, appropriation, et
d'autre part, coordination-synergie-leadership et pilotage. Comme pour
les ressources financières, la mobilisation s'organise dans le cadre commun des activités et financements.
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En d'autres termes, les ressources humaines sont mobilisées de
façon coordonnée, en synergie, sous le leadership du Ministère. Ces ressources sont soit nationales/locales, appartenant au Ministère de l'Éducation ou non, soit des compétences externes régionales et/ou internationales. Ellessontmobiliséesdansla mise en oeuvre soitpour accomplir
des tâches concrètes définies, soit pour apporter leur expertise dans la
conception des stratégies opérationnelles, dans le suivi et l'évaluation.
Selon l’ampleur et la complexité du programme, selon des compétencesdisponiblesetmobilisables, cette coordination sera plusou moins
difficile, mais elle est toujours nécessaire.
Sur le plan local, le programme général concerté est décliné en programme ou plan d’action local, élaboré par et/ou avec les parties prenantes locales. À cette occasion, les initiatives, idées, innovations locales
– soit venant des acteurs directs, soit venant de la communauté éducative en général, ou autres parties prenantes - sont suscitées, et les acteurs
et partenaires locaux impliqués. Pour le reste, le processus est le même
que celui de la mobilisation sur le plan national.
Ce faisant, au plan national aussi bien que local, se constituent des
réseauxde compétencesmobiliséesetmobilisables, sachanttravailler en
synergie pour des objectifs partagés, dans une approche systémique.
PRINCIPES POUR LA PRATIQUE : COMMENT MOBILISER ?
1. Le principe premier, fondateur dans la mobilisation des ressources,
qu'elles soient financières ou humaines, est celui réitéré dans les
lignes précédentes : l'appropriation.
Celle-ci se fait dans le processus d'élaboration lui-même ; puis dans
une large communication du programme, de ses objectifs et de ses
stratégies ; dans le compte rendu auprès des différentes parties prenantes sur l'avancement de l'exécution du programme, sur l'utilisation
des fonds et sur les impacts obtenus (imputabilité).
2. Le second principe est celui de la coordination : mobiliser de façon
organisée, utiliser les ressources mobilisées de façon coordonnée,
pour assurer la cohérence et nourrir l'appropriation.
3. Allantde pair avecla coordination, nécessairementle leadership : aucune coordination, mise en cohérence n'est possible sans pilotage effectif, celui du premier responsable qui est le ministère de l'Éducation.
4. La concertation sur l'assistance technique : pour assurer la cohérence
et l'appropriation, la mobilisation des ressources humaines externes
doitse faire de façon concertée etpilotée, dansla définition destermes
de référence, le calendrier des interventions, la sélection des consultants. En vue des mobilisations ultérieures aux travaux de l'assistance
technique externe, sousle pilotage du ministère, ilestsouhaitable que
les rapports et recommandations résultant des travaux soient communiqués et commentés par les différents partenaires.
5. Le suivi et l'évaluation : la mobilisation englobe aussi ces activités. Un
mécanisme de suivi qui associe lesdifférentspartenairesetacteursest
un dispositif qui permet le partage et le renforcement mutuel. La collaboration qui se développe dans ce processus est l'occasion de poursuivre la réflexion commune pour rectifier, approfondir, tracer de nouvelles pistes, fixer des échéances. Les différentes parties prenantes
sont ainsi effectivement impliquées et donc mobilisées.
Si le processus de mobilisation développé ci-dessus semble linéaire,
en réalité il ne peut pas et ne doit pas l'être. En effet, assurer l'appropriation se fait de façon continuelle, de même que la mobilisation des ressources financières et humaines. Les principes qui guident la mobilisation traversent donc la pratique quotidienne aussi bien que les moments
stratégiques.
La revue des Échanges
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L’EXPÉRIENCE DE LA MAURITANIE
EN MATIÈRE DE MOBILISATION
DES RESSOURCES
EN FAVEUR DE L’ÉDUCATION
CONTEXTE GÉNÉRAL
Depuis 2001, la Mauritanie met en oeuvre un cadre stratégique de
lutte contre la pauvreté (CSLP) dont l’un des principauxaxes repose sur
le développement des ressources humaines et l’accès aux services
sociaux de base.
Ce programme ambitieux, qui place la valorisation du potentiel
humain au coeur de la problématique du Développement, vise à impulser à l’économie nationale une dynamique nouvelle mieux équilibrée,
plus équitable envers toutes les couches sociales et davantage ancrée
dans la sphère économique des pauvres, et respectueuse de l’environnement.
Cette approche explicitement tournée vers l’instauration d’un
développement humain durable (DHD) confère au système éducatif
une place primordiale, d’où l’intérêt grandissant que lui accorde le
Gouvernement en tant que priorité nationale dans un pays où l’instruction et la formation constituent un investissement de grande valeur
par son rendement social et son apport civilisationnel très constructif.
Cette gamme de facteurs et bien d’autres font que la Mauritanie
est, par tradition et par vocation, une nation essentiellement réceptive
à l’investissement en faveur de l’Éducation tant pour le secteur non formel (Mahadra, Alphabétisation, Socialisation) que pour le système formel d’éducation.
Ainsi l’examen des documents budgétaires sur une période
rétrospective de près de 20 ans montre que la part allouée au
Ministère de l’Éducation se situe dans une fourchette de 20% environ, ce qui constitue un effort énorme dans une époque de pénurie
de ressources.
Le cadre macroéconomique a été relativement favorable ces treize
dernières années. Le taux de croissance annuel du Produit Intérieur
Brut (PIB), au cours de cette période, a atteint 3,6%, en dépassant le
taux annuel de croissance de la population (environ 2%). Comme
résultat, les recettes publiques nationales se sont doublées sur la période considérée. En plus de ces recettes, le pays a bénéficié de ressources supplémentaires sous forme de prêts et dons représentant
près de 8% des recettes de l’État.
LES MÉCANISMES DE FINANCEMENT ET LA MOBILISATION DES RESSOURCES
En dépit des nombreux projets mis en place depuis l’accession du
pays à l’indépendance avec l’appui des bailleurs de fonds, l’État mauritanien est le plus grand « financeur » de l’éducation pour tous ordres
d’enseignement (54,5%) tant au titre du budget de fonctionnement
M. MOHAMED LEMINE
OULD MOULAYE AHMED
qu’il prend entièrement en charge qu’au titre du budget d’investissement.
Les ménages mauritaniens sont lourdement sollicités sur le plan
des dépenses scolaires, à hauteur de près de 14,5% selon une étude
récente.
Si l’État prend entièrement en charge la rémunération des personnels, la fourniture de l’équipement mobilier et attribution des bourses,
les parents supportent une importante contrepartie de l’achat du
matériel et fournitures scolaires, des matériaux et de la main d’oeuvre
locale pour les constructions de salles de classes, et la totalité des
dépenses de transport scolaire (sauf à Nouakchott) et d’habillement
pour les élèves.
Dans le cadre de la coopération bilatérale et multilatérale, l’intervention des partenaires techniques et financiers reste encore modeste
tant au niveau des dons en subventions (15,3%) qu’en termes de prêt
(10,1%), ce qui est loin de la cible fixée par l’initiative 20/20.
Quant aux communes et aux ONG, leur contribution reste très timide avoisinant respectivement 4,1% et 1,1%.
L’amélioration du cadre macroéconomique conjuguée avec la priorité accordée au secteur de l’éducation dans les arbitrages budgétaires
a conduit à ce que les dépenses publiques d’éducation atteignent 4,3%
du PIB ; cette proportion est relativement élevée, si l’on compare aux
3,8% observésdanslespayslesplusperformantspour atteindre la scolarisation primaire universelle. En effet, les dépenses courantes d’éducation représentent 18,1% des dépenses totales de l’État en 2004.
Au niveau des allocations intra-sectorielles, on note la priorité
accordée à l’enseignement fondamental par les pouvoirs publics. En
effet, près de 45,3% du budget de l’Éducation nationale est absorbé
par cet ordre d’enseignement. La valeur moyenne de cette proportion
dans les pays de la sous région est de 50%. Le secondaire absorbe
31,2% du budget de l’éducation contre 1,6% pour le technique et
12,3% pour l’enseignement supérieur.
Depuis 2001, on observe des modifications sensibles dans la
répartition interne des dépenses courantes avec une croissance très
nette de la part des biens et services (de 13,5 à 22,4 %, une augmentation relative de plus de 50 %) qui s’est faite par une réduction concomitante de la part des salaires dans la dépense totale (elle passe de 80
à 73 %). L’analyse de la situation des salaires par niveau d’enseignement montre une logique de hausse du salaire moyen annuel en progressant vers un niveau d’enseignement supérieur. Malgré l’augmentation, en monnaie courante, du salaire moyen du personnel enseignant au niveau des différents ordres d’enseignement, sa valeur réel-
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le a sensiblement baissé au cours des 20 dernières années. Entre 1985
et 2004, le salaire d’un enseignant au niveau de l’enseignement fondamental a perdu 50% de sa valeur réelle dont 14% est perdu entre
1998 et 2004.
SITUATION ET PERSPECTIVES DE LA MOBILISATION DES RESSOURCES
Le Gouvernement, dans le cadre du plan national de développement économique, social et culturel a toujours désigné l’éducation
comme priorité pour le développement de la Mauritanie. Sur la base
de ce plan, des programmes d’actions à court terme, généralement de
deux ans, ont orienté le développement du secteur. Peu de progrès ont
été enregistrés jusqu’en 1990.
Au lendemain de la conférence de Jomtien, le Gouvernement s’est
engagé dans une politique visant à améliorer l’accès et la qualité du
système éducatif. C’est ainsi que plusieurs plans de développement
ont été mis en oeuvre depuis.
Pour la période 1995-2000, les priorités de l’éducation sont formulées dans une lettre de politique sectorielle qui affirme la priorité
accordée à l’enseignement fondamental. L’objectif précis étant d’accroître la capacité pour accueillir tous les enfants de 6 à 11 ans à l’horizon 2000, tout en améliorant les services éducatifs (programmes,
matériels et enseignants). L’approche de planification par projet est
restée prédominante tout au long de cette période.
À la veille du forum de Dakar sur l’éducation, le Gouvernement
conscient des enjeux du millénaire et de la mondialisation s’est
engagé dans la mise en place d’une vaste réforme du système éducatif.
Cette réforme, adoptée en 1999, maintient l’importance accordée
à l’arabe et à la culture nationale, mais engage le système dans une
perspective de modernisation et d’ouverture pour mettre l’école au
service du développement. Les modifications introduites s’inscrivent
dans une politique d’amélioration de la qualité, de la pertinence et de
l’efficacité :
• Unification du système par la suppression des filières linguistiques
créées par la réforme de 1979 ;
• Prolongement de la durée de l’enseignement du premier cycle du
secondaire de 3 à 4 ans ;
• Renforcement de l’enseignement des sciences et introduction de la
physique et de l’informatique dans le premier cycle du secondaire ;
• Renforcement de l’enseignement des langues étrangères (français,
anglais).
Cette réforme éducative est sous-tendue par un Programme
National de Développement du Secteur Éducatif (PNDSE) qui couvre la
période 2001-2010 et inclut pour la première fois la petite enfance et
l’alphabétisation. Sa préparation qui s’est étalée sur près d’une année
a tenu en haleine pendant toute cette période les acteurs les plus
divers du système éducatif : équipes de professionnels multidisciplinaires, parents d’élèves, société civile, partenaires au développement,
décideurs, etc.
L’élaboration et la mise en oeuvre du PNDSE ont constitué des
occasions solennelles pour la sensibilisation des partenaires techniques et financiers sur les aspects prioritaires de la politique éducative ainsi que les difficultés et contraintes auxquelles est confronté le
système dans sa marche vers la réalisation des objectifs fixés au titre
des plans d’action. Les revues, les missions d’évaluation, les rencontres périodiques de suivi offrent autant d’occasions pour asseoir un
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dialogue constructif orienté vers la mobilisation de ressources additionnelles au profit du secteur éducatif.
Ce programme sectoriel de l’Éducation Nationale, qui s’inscrit
dans la vision globale de développement intégré, vise à accompagner
les mesures de Réforme auxquelles est soumis le secteur Éducatif et
qui nécessitent une forte détermination politique matérialisée par une
large mobilisation de ressources financières, matérielles, techniques
et organisationnelles. C’est dans ce cadre, donc, qu’intervient le
Programme National de Développement du Secteur Éducatif (PNDSE),
pour concrétiser l’application judicieuse des orientations de la
Réforme de 1999 qui traduit les profondes aspirations de notre pays en
matière de promotion des ressources humaines et du développement
des services sociaux de base. Ce programme vise à accompagner la
réforme éducative et à créer les conditions favorables à sa réussite en
axant sur les orientations stratégiques suivantes :
- amélioration de l’offre éducative et promotion de la rétention du
système ;
- renforcement de la qualité de l’enseignement et de l’apprentissage ;
- rationalisation de la gestion des ressources humaines, matérielles
et financières ;
- renforcement du pilotage du système selon des normes précises et
des résultas déterminés ;
- résorption des disparités entre genres, entre wilayas et entre
zones ;
- adéquation des formations auxexigences de l’environnement socioéconomique et culturel.
Le Programme National de Développement du Secteur Éducatif
(PNDSE), dans son approche de mobilisation de ressources, rompt
complètement avec la méthode de projet en instaurant une véritable
dynamique partenariale autour du secteur éducatif dans tous ses
aspects.
Cette approche multi partenariale du PNDSE a permis de canaliser
et de mieux coordonner toutes les interventions des différents partenaires techniques et financiers quels que soient leurs domaines préférentiels.
La déclinaison des stratégies du PNDSE en plans d’actions
annuels budgétisés ( PAAB ) que les différents responsables des composantes sont tenus à exécuter et à suivre représente un autre mode
de mobilisation de ressources non moins important impliquant davantage d’acteurs et de partenaires.
Au plan des évolutions stratégiques issues du PNDSE : la mise en
oeuvre des actions et mesures prévues au titre de ces programmes de
réforme a permis au système éducatif de bénéficier principalement de
réformes institutionnelles, administratives et financières, d’activités
de formation des différentes catégories du personnel, de lancement de
travaux sur les infrastructures d’accueil à tous les niveaux scolaires et
de révision des programmes. Ce train de mesures s’est traduit par une
évolution significative des principaux indicateurs.
En termes d’accès
a) Au niveau du Fondamental, le taux brut de scolarisation est
passé de 88,4% en 2001-2002 à 96% en 2003-2004 dépassant la
valeur cible de 91 de la première phase du PNDSE pour 2005 (et les
objectifs initialement fixés de 95% en 2010 pour le PNDSE). Toutefois,
les disparités géographiques demeurent avec les Wilayas du Gorgol,
du Guidimakha et du Brakna ayant des taux bruts de scolarisation res-
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pectivement de 77,5%, de 78,5% et de 88,5% alors que toutes les
autres Wilayas dépassent l’objectif de 91. La parité s’est aussi améliorée avec une proportion de filles qui est passée de 48% en 20012002 à 49,4% en 2003-2004. Ces chiffres demandent à être confirmés
dans le cadre des travaux du RESEN, en particulier, avec l’enquête des
ménages.
De plus, le taux de rétention reste très faible : en moyenne sur 100
enfants entrés en 1AF environ 50 (entre 45 et 55 suivant la méthode de
calcul) atteignent la 6AF, loin de l’objectif fixé par le PNDSE (67 en
2005). Les abandons sont plus marqués entre la 4AF et la 6AF. Il n’y a
pas de disparités significatives entre la rétention des garçons et celle
des filles. Par contre, les disparités régionales en termes de rétention
sont importantes avec les taux les plus faibles et inférieurs à 50 dans le
Gorgol, Guidimakha, Brakna, et Assaba et des taux plus faibles en zone
rurale qu’en zone urbaine. L’insuffisance de l’offre de formation (46,9
des élèves sont dans des écoles incomplètes, 14,4 dans des écoles présentant une discontinuité pédagogique) et les forts taux de redoublement (15,8 en 2003-2004 stable depuis 2001-2002) expliquent pour
moitié la faiblesse de la rétention. D’autres facteurs de type économique (pauvreté, travail des enfants) ou socioculturel (méfiance vis-àvis de l’école, mariage précoce …) jouent aussi un rôle important. Ainsi,
l’intensification de l’effort de construction scolaire, le regroupement
des écoles, l’amélioration de la gestion des enseignants, le recours aux
classes multigrades, la réduction des taux de redoublement et la sensibilisation des inspecteurs, enseignants et familles permettraient d’atteindre un taux de rétention de 73 en 2010.
(b) Au niveau du Secondaire, le nombre de nouveaux entrants, qui
devrait croître progressivement pour atteindre 25 000 en 2005, se situe
en 2003/04 à 19 494. Il est à remarquer que cet effectif est encore loin
de la cible fixée pour 2005, alors qu’en termes de taux de transition
effectif la cible de 50, fixée pour 2005, est dépassée. Cette situation
pourrait s’expliquer par la dégradation continue de la rétention au fondamental. Toutefois, il est nécessaire d’engager d’ores et déjà une
réflexion sur le mode de gestion des établissements de petite taille et
sur la pression que l’enseignement secondaire aura à subir avec une
amélioration de la rétention au niveau du fondamental.
Pour ce qui est de la transition entre le premier et le second cycle,
la maîtrise de l’accès en 4ème AS n’est pas effective ; ce qui a entraîné
un large dépassement de la limitation à 5 000 entrées par an tel que
prévu dans la lettre de politique sectorielle (11050 en 2003-2004).
Quant à la participation des filles au premier cycle, elle connaît une
progression, passant de 43% en 2001-02 à 45,4 en 2003-04.
En termes de qualité
(a) Au niveau du fondamental, le taux de redoublement a augmenté de 1,1 point, passant de 14,7% en 2001-02 à 15,8% en 2003-04
(pour une valeur cible de 9% en 2005). Le ratio élève/maître a augmenté entre 2001-02 et 2003-04, passant de 39,1 à 42,5 dans le
Fondamental (la cible en 2005 est de 44).
Cette situation s’est traduite par des résultats modestes en terme
d'acquisitions des élèves. Les évaluations réalisées au niveau de la 2AF
et la 5AF montrent des taux d’acquisition relativement faibles avec une
tendance à la baisse, notamment au niveau des langues et des disciplines scientifiques. Ces résultats sont inférieurs à ceux constatés dans
les pays de la sous-région.
(b) Au niveau du secondaire, le taux de redoublement a connu une
évolution favorable, passant de 15,9% en 2001-2002 à 13,6% en 2003-
04 (pour une valeur cible de 11% en 2005). Quant au ratio élèves/professeurs, il est passé de 26,7 en 2001-02 à 29,6 en 2003-04 (la cible en
2005 étant 33,3). Le taux de réussite au BEPC a baissé de 45,4% en
2001-02 à 28,8%. En 2003-04, il est à 36,2 points de l’objectif de la première phase du PNDSE qui est de 65%.
En termes de gestion et pilotage du système
Le SIGE et la carte scolaire sont des outils indispensables à un pilotage efficace de la politique éducative. Leur mise en place connaît des
retards préjudiciables à l’atteinte des objectifs fixés. Il importe que les
procédures soient accélérées pour que ces outils soient effectivement
opérationnels avant la fin de la présente phase.
La défaillance des dispositions prises en matière d’affectation/allocation des personnels enseignants est préoccupante. La mise en place
d’un dispositif opérationnel et son application effective constituent une
priorité de premier ordre. Des mécanismes appropriés de suivi-évaluation doivent être envisagés. Les mesures à prendre dans ce cadre doivent faire l’objet d’une concertation large entre les différentes parties
concernées tant au niveau central que régional et départemental.
La mise en place de l’organigramme a été faite de façon formelle,
sans que des mesures d’accompagnement ne soient envisagées pour
assurer une transition efficace vers la décentralisation. Il est urgent que
les contraintes de mise en oeuvre effective de la décentralisation soient
étudiées et que des mesures soient prises pour la rendre opérationnelle.
La gestion financière revêt désormais une importance particulière
dans le contexte de modernisation de l’administration et de la bonne
gouvernance. Les procédures et les mécanismes doivent être rénovés
et les capacités dans ce cadre renforcées dans la perspective du transfert prévu de la gestion des projets éducation et formation vers le MEN.
PRINCIPALES DIFFICULTÉS ET CONTRAINTES
En dépit des efforts louables déployés pour vaincre les difficultés
auxquelles fait face la mise en oeuvre de la réforme, son efficacité
dépend dans une large mesure du degré de mobilisation des ressources en vue d’atténuer l’impact de plusieurs facteurs dont notamment :
• la faiblesse des capacités de planification, de mise en oeuvre et de
suivi-évaluation des plans d’action ;
• l’insuffisance de l’engagement des acteurs et partenaires éducatifs
locaux et régionaux face aux enjeux de mise en oeuvre des stratégies
nationales en matière d’éducation ;
• la faiblesse et la fragilité de la rétention du système dues, entre
autres, aux caractéristiques des intrants, à la vulnérabilité de la
demande scolaire et surtout à l’inadéquation entre l’offre et la
demande ;
• la faiblesse et la discontinuité de l’encadrement et de la formation
sur le terrain des enseignants et des personnels de direction d’écoles et d’établissements ;
• la mauvaise répartition des enseignants conformément à la localisation des besoins réels des structures pédagogiques existantes dans
les écoles et les établissements ;
• l’absence sur le marché de l’emploi d’enseignants qualifiés pour
faire face aux besoins d’enseignement des disciplines scientifiques;
• l’insuffisance de la disponibilité des manuels scolaires et des supports didactiques ;
• le faible niveau des élèves mis en évidence par les différentes évaluations et par les résultats des examens.
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MOBILISATION DES RESSOURCES
POUR LE DÉVELOPPEMENT DE
L’ÉDUCATION DANS LE CADRE
DE L’APPROCHE PROGRAMME
- CAS DU SÉNÉGAL
CONTEXTE AVANT 2000
Il s’agit de décrire la situation du secteur de l’éducation avant la
mise en oeuvre du Programme Décennal de l’Education et de la
Formation (PDEF) en mettant l’accent sur le mode de gestion et le financement pour mieux comprendre les choix du programme.
Gestion du secteur
Depuis 1981, les textes d’orientation portant sur la politique éducative ont témoigné d’une capacité nationale de réflexion collective et
d’une volonté de mieux profiler l’école par rapport au contexte national
et international et aux nouvelles exigences d’efficacité.
Création dès 1993, par Décret 93.789 du 25 juin 1993, des
Inspections d’Académie (IA) et des Inspections Départementales de
l’Education Nationale (IDEN) chargées d’appliquer la politique scolaire
du gouvernement au niveau déconcentré.
Lacunes enregistrées à différents niveaux
• l’insuffisance de la capacité du Ministère de l’Éducation Nationale à
appliquer une approche systémique et par programme, en s’appuyant sur des politiques et des stratégies mieux conçues et rigoureusement planifiées ;
• la rigidité des méthodes et techniques de gestion ;
• l’inefficacité des processus verticaux et horizontaux de communication ;
• l’absence de formation continuée des cadres à une gestion administrative efficace et moderne ;
• la répartition du secteur en sous-secteurs sans liens organiques précis a favorisé l’éclatement de la politique éducative. Cet état de fait
s’est traduit par la non maîtrise des multiples interventions dans le
secteur liées à la présence de plusieurs projets autonomes souvent
financés par des bailleurs différents, sans aucune coordination des
actions. Il s’y ajoute au plan général une tendance centralisante marquée ;
• l’émiettementdescentresde décisionsetle manque de coordination ;
• malgré le transfert de compétences aux structures déconcentrées
du ministère, certaines directions avaient encore du mal à se départir de leurs anciennes prérogatives ;
• la décentralisation avait du mal à se mettre en place au niveau des
communes ;
• au cours de la période précédant le programme Décennal de l’Éducation et de la Formation (PDEF), l’essentiel de l’aide extérieure,
bilatérale ou multilatérale, passait par l’élaboration et la mise en
6
M. MBAYE NDOUMBÉ GUÈYE,
DIRECTEUR DE LA PLANIFICATION
ET DE LA RÉFORME DE L’ÉDUCATION
oeuvre de projets dans presque tous les secteurs, notamment, l’éducation, la santé et l’agriculture…
Diagnostic du financement du secteur
• Le financement de l’éducation au Sénégal, dans un contexte d’ajustement structurel, était subordonné au respect des contraintes
macro-économiques qui visaient la maîtrise des dépenses
publiques et la réduction du déficit budgétaire.
• Le problème du financement de l’éducation se posait en termes de
besoins croissants qui résultaient des objectifs de la scolarisation
universelle à l’horizon 2008 et de la lutte contre l’analphabétisme.
• Le financement du système éducatif ne reposait pas sur les seuls
efforts de l’État. En effet, les collectivités locales, les ménages, les
organisations non gouvernementales (ONG) et les partenaires au
développement contribuaient au financement.
• L’État était le principal bailleur de fonds du système éducatif. De
69,2 milliards de Francs CFA en 1992, la participation de l’État passait à 86,5 milliards de francs CFA en 1996, soit un accroissement de
25%. Mais exprimé en termes réels, le financement public de l’éducation avait diminué d’environ 16% entre 1992 et 1995. Il en va de
même de la part des dépenses publiques dans le PIB qui était tombé
de 4% en 1992 à 3% en 1996.
• Les ménages : droits d’inscription, frais de transport, frais scolaires,
fournitures, manuels, etc. Estimée à 5,8 milliards de francs CFA en
1992, la contribution des ménages est passée à 8,9 milliards en
1996 soit une augmentation de 53,4 % et une croissance annuelle
moyenne de 13,4 %.
• La participation des collectivités décentralisées au financement de
l’éducation est restée très modeste. Elle représentait environ 1 %
des dépenses totales.
• L’aide publique au développement représentait 14% en moyenne
du financement de l’éducation.
• Les contraintes financières auxquelles le Sénégal était confronté faisaient que les dépenses d’investissement dans le système éducatif
évoluaient de manière irrégulière. Alors qu’elles ne s’élevaient qu’à
1 % des dépenses totales d’éducation en 1992, elles ont atteint 9%
en 1994 pour tomber à 1,3 % en 1996. Les dépenses d’investissement dans l’éducation étaient très faibles par rapport aux besoins.
Résultats du secteur
• L’éducation préscolaire a connu une évolution très lente (taux de
préscolarisation 2,7 %).
La revue des Échanges
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• Enseignement élémentaire : le taux brut de scolarisation connaissait
ses premières baisses entre 1990 et 1993 tombant de 56.8% à
54,3% de par l’impuissance de l’État à recruter suffisamment de
maîtres, de construire des salles de classe en nombre suffisant à la
forte croissance démographique qu’enregistrait cette tranche d’âge
de l’élémentaire.
• Le ratio élèves/maître avait augmenté de manière régulière. Il passait de 45,7 élèves/classe en 1970 à 59% en 1997, soit une augmentation de 35,5% (1,5% par an).
• Les ratios des manuels scolaires étaient encore loin du minimum
acceptable. Par exemple, en lecture, il y avait environ un livre pour
six élèves et en calcul un pour dix élèves.
• Les taux de redoublement au niveau de l’élémentaire tournaient
autour de 14%.
• Malgré la multiplicité des innovations pédagogiques et des
réformes de programmes à tous les niveaux pratiquement du système éducatif sénégalais, les rendements scolaires et universitaires
étaient restés faibles.
• Les manuels scolaires étaient très peu disponibles quel que soit le
cycle considéré.
• Les classes avaient pour la plupart des sur effectifs qui compromettaient réellement la qualité des services éducatifs.
• Le matériel pédagogique en général était insuffisant dans les
écoles.
• Le temps d’enseignement était strictement insuffisant.
• Le mode d’évaluation (compositions mensuelles, devoirs écrits journaliers …) était obsolète.
• C’est dans un tel contexte qu’a été élaboré le PDEF avec pour finalités le développement total du secteur de l’éducation (accès, qualité et gestion) de la petite enfance à l’enseignement supérieur avec
deux priorités : l’universalisation de l’enseignement élémentaire et
le développement de la formation professionnelle. Il s’agit du point
de vue méthodologique de rompre avec l’approche projet, de responsabiliser davantage les niveaux déconcentrés, les collectivités
locales et les communautés à la base, d’adopter une approche
systémique ou approche-programme.
APPROCHE PROGRAMME
L’approche programme s’inscrit dans une approche holistique,
systémique qui est une démarche d’harmonisation et d’intégration
des initiatives et des démarches, exigeant la coordination des intervenants. Celle-ci apparaît comme un mécanisme permettant une plus
grande efficacité des actions et obligeant les intervenants à oeuvrer
pour la réalisation d’objectifs identifiés, négociés et stabilisés en commun.
Conditions minimales de réussite de l’approche-programme :
• Le leadership est assuré par le gouvernemen, car le programme est
intégré dans l’administration qui assure les fonctions d’élaboration,
d’exécution et de suivi-évaluation en rapport avec l’ensemble des
acteurs, partenaires et bénéficiaires. Le gouvernement doit faire
preuve d’un engagement politique très fort pour assurer ce leadership, d’une disponibilité entière sur tous les plans : politique, financier, technique…
• Disponibilité d’une masse critique de ressources financières avec
une participation dominante de l’État.
• Bonne coordination et engagement fort des partenaires techniques
et financiers. Ces derniers jouent un rôle important dans le soutien
du programme. L’État ne doit pas les comprendre comme uniquement des bailleurs de fonds, des donateurs, « des apporteurs de
fonds ». Leur apport financier doit arriver en complément des efforts
de l’État. Ils doivent être de véritables partenaires à la fois techniques et financiers.
• La cohérence globale : l’ensemble des interventions techniques se
font dans un cadre cohérent (dans le secteur). Tout s’intègre et participe au même but.
• Harmonisation et mise en commun de l’ensemble des sources de
financement à partir d’un manuel de procédures unique.
• Répartition claire des responsabilités de chaque partie prenante du
programme dans un manuel de procédures générales.
OBJECTIFS DE L’ÉTUDE
• relater l’expérience sénégalaise en matière de mobilisation des ressources (humaines, matérielles et financières) dans le cadre du
Programme Décennal de l’Education et de la Formation ;
• en dégager les forces et les faiblesses.
MÉTHODOLOGIE
Il s’est agi, à partir d’une revue documentaire et du vécu personnel
en qualité de coordonnateur du programme, de faire une description
analytique des différentes étapes du programme (planification, mise
en oeuvre et suivi-évaluation), de faire ressortir tous les éléments relatifs à la mobilisation des ressources, d’en faire une analyse et de dégager les forces et les faiblesses.
PRÉSENTATION SUCCINCTE DU PDEF
Le Programme Décennal de l’Éducation et de la Formation pour le
Sénégal est conçu dans le cadre de l’Initiative Spéciale des Nations
Unies pour l’Afrique. Il s’agit, en définitive, d’articuler l’ambition de la
scolarisation universelle à celle du développement d’une société économiquement forte, socialement structurée et culturellement épanouie.
Quelques orientations :
• la décentralisation et la déconcentration de la gestion du système ;
• la rationalisation de la gestion des ressources matérielles, financières et humaines ;
• la mise en oeuvre d’un nouveau curriculum de l’éducation de base ;
• la libéralisation et la diversification de l’offre d’éducation ;
• l’universalisation de l’achèvement du cycle élémentaire et l’amélioration de l’accès dans les autres cycles ;
• l’orientation de l’enseignement technique et de la formation professionnelle vers le marché du travail ;
• l’élimination des disparités inter et intra régionales et des disparités
entre les sexes à tous les niveaux d’enseignement ;
• un partenariat efficace et bien coordonné.
PROCESSUS DE PLANIFICATION DU PDEF
• Diagnostic du secteur : définition d’une politique ou d’une vision
• Définition des objectifs et des stratégies sous-sectoriels.
• Élaboration un plan d’action sectoriel, qui est une consolidation des
plans d’action du niveau central et décentralisés (plans d’action des
régions et des services centraux. Participent à ces exercices de planification les autorités locales, les autorités scolaires, la société civi-
La revue des Échanges
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le, les communautés à la base, les autorités administratives (gouverneurs, préfets, sous-préfets, mouvements associatifs…), les partenaires techniques et financiers au plan local…
Les établissements scolaires élaborent, avec la participation des
communautés à la base, des projets d’établissement (enseignement moyen et secondaire) et des projets d’école (enseignement
élémentaire) qui sont intégrés dans les Plans Locaux de
Développement de l’Éducation.
L’ensemble des plans régionaux est transmis à la DPRE qui assure
aussi la coordination de l’ensemble des partenaires (partenaires
techniques et financiers, ONG, partenaires sociaux…) au plan national.
Ensuite chaque direction ou service central élabore son plan d’action et le transmet à la DPRE.
La DPRE, consolide l’ensemble des plans d’action pour donner un
premier draft du plan d’action du PDEF.
Évaluation des coûts, finalisation et validation du plan d’action
après arbitrage.
MOBILISATION DES RESSOURCES
Mobilisation des ressources humaines
La mobilisation des ressources humaines a tourné essentiellement autour des points que sont :
• le recrutement et le maintien en quantité suffisante du personnel
pédagogique dans lequel on retrouve les enseignants craie en main
et le corps d’encadrement ;
• le recrutement et le renforcement des capacités du personnel administratif ;
• le recours aux prestataires de services externes tels que les consultants, les assistants et les contractuels pour certains postes ;
• l’implication optimale et effective de la société civile des collectivités
locales et des communautés dans la prise en charge des problématiques de l’éducation ;
• l’implication active des partenaires techniques et financiers dans le
développement du secteur.
• Grâce à l’instauration de ce système de volontariat et de vacatariat,
des gains substantiels ont été réalisés et ont permis d’accroître l’effectif des personnels enseignants. En trois ans, le coût unitaire
moyen du maître nouvellement recruté est passé d’environ 120 000
FCFA à 70 000CFA soit une réduction presque de moitié du coût unitaire par enseignant à l’élémentaire. Le PDEF a permis en trois ans
(entre 2000 et 2005) le recrutement de 14 361 maîtres dont 12813
volontaires. Ainsi, l’objectif de recrutement de 2 500 volontaires et
vacataires par an a été réalisé voire dépassé au cours de cette première phase.
Mobilisation des ressources financières
Différentes étapes de l’évaluation financière
• Évaluation financière du Plan d’action national : détermination du
coût global du Plan d’Action de la phase.
• Évaluation du financement intérieur (part du pays)
- Part du budget de l’État
- Part des collectivités locales
- Part des ménages
- Part du secteur privé
8
• Évaluation du gap financier : financementà rechercher auprèsdesPTF.
• Financement de la première phase
Part de l’éducation dans les dépenses de fonctionnement
de l’État = 33 %
• Financement de la deuxième phase
Part de l’éducation dans les dépenses de fonctionnement
de l’État = 39,5%
Rôle des différents Partenaires Techniques et Financiers (PTF)
Tout le processus de planification est fait de manière participative avec l’ensemble des acteurs et partenaires de l’éducation (acteurs,
partenaaires sociaux, PTF, société civile, syndicats…), à tous les
niveaux (local et national).
• Les PTF jouent un rôle extrêmement important dans tout le processus
de planification sur le plan technique. Ilsaccompagnentla DPREdepuis
la construction des plans d’action locaux jusqu’au plan d’action national. Ils participent à toutes les rencontres et donnent leur point de vue
technique sur tout ce qui se fait. Cette participation est d’une importance capitale, car facilitant la recherche de financement du fait que les
PTF sont parties prenantes du Plan d’action national élaboré.
• Chaque année, le Ministère de l’Éducation organise une Revue du
Programme qui valide les rapports annuels (technique et financier),
les plans d’action (annuels et de phase), les plans d’opération et
budget annuel ; l’ensemble des acteurs et partenaires de l’éducation participent à cette revue.
CONCLUSION - FORCES ET FAIBLESSES
• Dans l’élémentaire, le développement du système des classes
alternées et le recrutement de « volontaires » après 1995 ont permis
auxpouvoirs publics de réduire les coûts salariauxunitaires par élève
en valeur réelle, et donc d’accroître le nombre d’enseignants et de
relever le taux brut de scolarisation. Le ratio entre le salaire d’un
volontaire et celui d’un enseignant titulaire est de 1 à 5,4 et de 1 à 6,8
lorsqu’il s’agit d’un enseignement en classes alternées. En 2000, les
volontaires qui représentaient plus de 30% des enseignants, n’étaient à l’origine que de 9% des coûts salariaux.
• Aujourd’hui, les corps émergents (volontaires, vacataires, maîtres et
professeurs contractuels) constituent la grande majorité des enseignants. Conscients de leur poids, ils se sont organisés en syndicats
et ont commencé cette année, malgré les efforts de l’État, à perturber le système éducatif par des grèves basées sur des revendications salariales. Si l’État ne parvient pas à trouver avec eux des compromis, le PDEF et l’ensemble du système éducatif vont rencontrer
d’énormes difficultés de gestion et l’atteinte des objectifs en 2010
sera problématique.
• Rendre l’enseignement élémentaire plus efficient en réduisant les
coûts par l’expansion des classes alternées et le recrutement d’instituteurs volontaires et contractuels, et en mettant au point des
modules de formation professionnelle préparatoire peu coûteux.
• La difficulté du gouvernement à déplacer les ressources de l’enseignement supérieur et à mettre en place une politique de recouvrement des coûts basée sur des principes d’équité s’est traduite par
une plus grande inégalité dans la répartition des dépenses
publiques au sein du secteur de l’éducation et a rendu nécessaire
une compression des financements publics pour l’enseignement
élémentaire et l’enseignement moyen.
Suite à la page 18
La revue des Échanges
NUMÉRO 3, 2006
LA PROFESSIONNALISATION
DE LA GESTION SCOLAIRE :
DÉFIS, ENJEUX ET PISTES
D’ACTION
L’intérêt et les discours sur la professionnalisation du personnel
d’encadrement de l’éducation s’inscrivent dans un ensemble de
réformes. Ces réformes visent la transformation des services publics
dans une perspective de modernisation suivant des paradigmes à la
fois idéologiques et pragmatiques qui ne sont pas sans s’inspirer du
New Public Management, mais aussi, sous certains aspects, de l’évolution des conceptions et des compétences des personnes qui oeuvrent au sein de ces organisations. À certains égards, il en est de même
de l’intérêt manifesté pour la décentralisation, pour la privatisation et
pour la politisation de services dits « de proximité » comme c’est le cas
pour l’éducation (Aucoin, 2002). Les réformes engagées dans ces
domaines sont souvent regroupées sous une thématique associée à la
« nouvelle gouvernance de l’éducation », une thématique fort intéressante et qu’il y a lieu d’approfondir plus amplement ; les présentes
Assises Francophones de la gestion scolaire en sont un moment privilégié.
Dans le cadre de cette intervention, je vais restreindre mon analyse à la problématique de la « professionnalisation » : celle-ci renvoie à
des référents très riches, qui ne sont pas toutefois exempts de conflits
sémantiques et même linguistiques.
Après avoir circonscrit la définition du concept, seront traitées la
question de l’évaluation et des nouvelles régulations qui sont inhérentes à un processus engagé de professionnalisation. Je terminerai
par l’identification d’un certain nombre de pistes d’action susceptibles
de reconnaître et de baliser la professionnalisation de la gestion scolaire.
DE QUOI PARLE-T-ON AU JUSTE ?
La notion de profession réfère à des univers sémantiques quelque
peu différents selon la langue de Molière ou de Shakespeare et cela se
traduit souvent par des incompréhensions et des problèmes de communication, notamment lors des rencontres internationales.
En langue française, « profession » réfère à une occupation déterminée dont on peut tirer des moyens d’existence1. À titre d’exemple,
ce que nous appelons la « formation professionnelle » est une préparation à l’occupation d’un métier qui est source de revenus et qui favorise une plus grande autonomie de la personne. « Être professionnel »
c’est alors être une personne du métier qui témoigne d’une habileté
démontrée et reconnue à exercer les tâches associées à ce métier. La
notion de métier réfère au contenu du travail, aux compétences à maîtriser et aux qualifications pour l’exercer. Par exemple, un ingénieur
peut référer à sa profession (« ma profession est en danger car la pré-
GUY PELLETIER, PH.D.
UNIVERSITÉ DE SHERBROOKE
paration est inadéquate ») ou à l’exercice de son métier (« mon métier
exige des nerfs solides »). Dans un même sens, au sein de mon université, nous avons des programmes préparatoires aux différents
métiers2 de l’éducation qui sont pour nous des professions.
En langue anglaise, on retrouve une partie de ce sens, mais aussi
un autre sens qui commence à se répandre au sein de la lingua franca3 . En anglais, « professionnal » est davantage associée au statut et
au prestige accordés à l’exercice de certaines occupations par rapport
à d’autres et notamment par rapport aux métiers auxquels on associe
le mot « vocational ».
Il existe des échelles de prestige des professions dont les principaux indicateurs de classification sont la nature de la formation
d’accès et de la formation continue pour maintenir les compétences,
les marges d’autonomie dans l’exercice des tâches, la complexité du
jugement décisionnel et, bien sûr, la reconnaissance économique
et/ou symbolique. En conséquence, en anglais, être un « professionnel » c’est avoir un statut occupationnel valorisé. En somme, lorsque
les membres d’une occupation donnée – comme les directions d’établissement – revendiquent d’être traités comme des « professionnels » cela fait davantage référence au sens anglo-saxon du terme et
cela se traduit par une demande de valorisation de la fonction, de la
création d’un statut reconnu, protégé et enchâssé dans une réglementation officielle, d’une autorité décisionnelle accrue et de meilleures
conditions générales de travail.
Bref, en acceptant de réaliser cette intervention, j’ai eu la conviction que je m’engageais sur une pente savonneuse où il y a un certain
discours digne de la tour de Babel au regard de la professionnalisation
du personnel d’encadrement de l’éducation. Cela transparaît d’ailleurs
dans plusieurs écrits associés à ces Assises dont l’Enquête sur la gestion de l’éducation dans l’espace francophone réalisée pour
l’Organisation internationale de la Francophonie (2006). Grosso
modo, lorsque l’on demande auxautorités de tutelle ministérielles leur
avis au regard de la professionnalisation de la gestion scolaire, ces
dernière se montrent très favorables à ce que le personnel d’encadrement ait des « comportements professionnels » dans le sens historique français du terme. Mais, lorsque la question est posée à du personnel de direction des écoles, l’on y est favorable parce qu’il faut améliorer le statut et les conditions d’exercice du travail de direction. On
comprendra que l’on est ici davantage dans le sens historique anglosaxon du terme.
Ceci étant dit, les langues évoluent et cela est une chose intéressante. D’ailleurs, aujourd’hui en langue française, on a forgé le mot
La revue des Échanges
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professionnalité 4 pour décrire la démarche, tant objective que subjective, que les membres d’une occupation donnée réalisent pour mieux
baliser et faire évoluer leur identité collective, ses tenants et ses aboutissants.
Au Québec, pays de contrastes et d’hybridation linguistique comme beaucoup de pays présents à ces Assises -, nous utilisons les
deux sens de la notion de profession et de professionnel et cela tient
beaucoup à la grande réforme de l’éducation qui a été engagée dans
les années 60. Par exemple, l’idée qu’une université réalise une formation professionnelle est maintenant couramment admise depuis le
début des années 1970, dans les suites de l’universitarisation d’un
ensemble élargi de programmes de formation préparatoire à l’exercice
d’occupations complexes comme celles de l’éducation. Dans d’autres
régions francophones, cette démarche a été réalisée par la suite ou est
encore objet de préoccupations immédiates. Par exemple, les personnes qui suivent l’actualité universitaire française pourront témoigner des nombreux enjeux et débats qui s’y déroulent avec la montée
de la « professionnalisation des universités » dans les suites des
accords de Bologne5. On peut observer des situations similaires en
Belgique et en Suisse, mais aussi en Europe à l’extérieur de l’espace
francophone et latin.
En fait, nous assistons à une homogénéisation de plus en plus
importante des politiques et des pratiques en éducation et cela est
étroitement lié à la mondialisation des échanges humains, à la circulation des marchandises, des idées… y compris celles portant sur les
réformes éducatives. Le discours sur la professionnalisation s’inscrit
dans ce sérail international et, de par sa nature, il contribue à la mise
en réseau et à la vitalisation d’une véritable communauté de pratiques
en gestion de l’éducation. À cet égard, il faut rendre justice aux efforts
réalisés par des organismes comme l’AFIDES dans le domaine - mais
particulièrement à l’AFIDES - et aux organisations qui soutiennent ce
regroupement international de directeurs d’établissement.
À notre avis, le discours de plus en plus présent sur la « professionnalisation de la gestion scolaire » n’est pas un effet de mode, mais s’inscrit parmi les nouvelles conceptions de la régulation des systèmes éducatifsoù, somme toute, ilya desgainsmanifestespour lesunsetlesautres.
Car la logique de la professionnalisation du personnel d’encadrement
s’inscrit dans une orientation favorisant à la fois une autonomie accrue
pour celui-ci, mais aussi une plus grande respon-sabilisation de ces derniers à l’égard des résultats. En conséquence, la professionnalisation du
personnel d’encadrement invite, tout comme la décentralisation, à une
nouvelle configuration des régulations en jeu dans le pilotage et la direction du système éducatif où, au sein de ce dernier, l’évaluation et la reddition de comptesprennentune ampleur nouvelle. Aborder la question de
la professionnalisation de la gestion scolaire, c’est donc aussi accorder
une attention particulière à l’importance qu’a prise aujourd’hui l’évaluation au sein des systèmes éducatifs.
ÉVALUATION ET PROFESSIONNALISATION
Il y a exactement dix ans j’avais débuté un article - que je n’ai
jamais terminé - et qui s’intitulait rien de moins que « La fin de l’évaluation ». Je comparais alors la montée tous azimuts de l’intérêt de l’époque pour l’évaluation comme s’inscrivant dans le processus de fabrication des utopies et qu’une fois passé son « effet de mode », d’autres
préoccupations occuperaient l’agenda des uns et des autres.
Je n’ ai jamais eu le temps de terminer ce texte et, ma foi, il en est
peut-être mieux ainsi… Je n’ai pas eu le temps, notamment , parce que,
10
de façon paradoxale, j’ai été très sollicité par des opérations d’évaluation et cela, dans différents pays et pour différents objets. De plus, à
ma grande surprise, j’ai écrit régulièrement sur la question de l’évaluation, de ses problématiques, de ses protocoles et de ses pratiques6.
C’est probablement mieux de ne pas avoir été un oracle de malheur annonçant la « fin de l’évaluation » parce que rien ne fut tel depuis
une décennie et, si bien des discours sur l’évaluation ont définitivement une place au monde d’Utopia, plusieurs autres remplissent d’importantes fonctions sociales, symboliques et politiques.
L’évaluation est bien là pour durer et perdurer, et sa contribution
est incontournable à la nouvelle gouvernance de l’éducation, notamment au regard de la décentralisation et de la professionnalisation.
De fait, l’évaluation comme mode d’octroi de valeur, comme outil
de reconnaissance, de distinction et de classification, voire de modelage, s’est considérablement développée, notamment dans les suites
des enquêtes nationales et internationales comme celles du PISA de
l’OCDE, du TIMMS et de l’IALS.
Ces comparaisons internationales ont d’importants effets structurants sur l’évolution actuelle des systèmes éducatifs où l’on assiste à
leur harmonisation progressive tant au niveau des pratiques pédagogiques que des pratiques de gestion. Des approches évaluatives sont
à l’origine de ce phénomène et l’évaluation en tant que telle est devenue un objet majeur d’intérêt. En fait, en éducation, non seulement l’évaluation est une préoccupation constante, elle s’est de plus déployée
par niveaux successifs de l’élève aux autres élèves, de la classe aux
autres classes, de l’établissement aux autres établissements et,
aujourd’hui, de l’État aux autres États avec l’évaluation comparée des
systèmes éducatifs. Bien sûr, ces « évaluations » ont parfois un
caractère expéditif et ont leurs limites, mais elles existent et doivent
être considérées à la fois sous des angles méthodologiques et politiques.
Si les objets d’évaluation se sont multipliés au sein des différents
systèmes éducatifs, l’efficacité de l’évaluation elle-même est souvent
très peu évaluée car elle est devenue un puissant instrument politique
de contrôle, d’encadrement et de pilotage (Bouvier, 1998). Entre
autres, elle permet d’octroyer aux autorités de tutelle de l’éducation
des capacités de contrôle et d’information dont elles ont besoin pour
s’assurer que des milliers de personnes poursuivent le plus possible
les objectifs fixés par elles. Cela est notamment le cas de l’évaluation
associée à la gestion par résultats qui se déclinent souvent par une
« obligation de résultats ».
À bien des égards, le discours de plus en plus généralisé sur la professionnalisation des métiers de l’éducation s’inscrit dans cette
logique réactualisée des fonctions régulatrices de l’évaluation. En
somme, la professionnalisation permettrait d’activer les mécanismes
de régulation associés à l’ajustement personnel et professionnel de soi
par rapport à un cadre de référence normé et explicite, mais aussi à
l’ajustement entre pairs sans une intervention de nature hiérarchique.
Pour préciser ce constat, il est utile de revenir sur la notion de régulation.
RÉGULATION ET PROFESSIONNALISATION
Avant de poursuivre l’analyse, il est nécessaire de mieux définir
cette notion de régulation, car elle est au coeur même d’un dispositif
évaluatif associé à l’octroi d’une reconnaissance professionnelle aux
membres d’une occupation donnée.
La revue des Échanges
NUMÉRO 3, 2006
Utilisée dès le XIXe siècle dans des disciplines comme la biologie,
ou dans des techniques comme la mécanique, cette notion réfère,
selon Caguilhem (1990), à trois conceptions majeures : la première est
celle d’une ou des relations d’interaction entre éléments instables, la
deuxième est celle de critères ou de repères à respecter (par exemple,
les règles) et, enfin, la troisième est celle de comparateur comme, par
exemple, l’existence d’un référentiel normatif. Au regard de notre propos, c’est davantage aux deux dernières conceptions que la notion de
régulation est contributive à une compréhension plus éclairée de la
professionnalisation.
Ainsi, réguler consisterait à l’ajustement, conformément à des
règles implicites (relevant le plus souvent de l’apprentissage de l’action entre pairs) et explicites (relevant le plus souvent de consignes, de
normes ou de règles formulées par l’autorité de tutelle), d’une pluralité
de mouvements ou d’actes (et de leurs effets) que leur diversité de
nature et leur succession temporelle rendraient d’abord mutuellement
étrangers. Ces normes et ces règles établissent aussi un cadre éthique
et déontologique qui contribue à baliser l’exercice du jugement professionnel.
L’intérêt porté à la régulation est au coeur même de l’intention et
de l’analyse de la coordination de l’action. Ainsi, la notion de régulation en sciences sociales est souvent associée à une intentionnalité
normative d’atteindre un équilibre optimal prédéterminé suivant un
cadre éthique défini. Perspective qui est bien celle que l’on retrouve
dans une approche d’évaluation par les résultats où ces derniers
constituent un objectif fixé à atteindre… et dont il faut rendre compte.
Reynaud (1989) identifie trois types de régulation : la régulation
contrainte, la régulation autonome et la régulation conjointe. Pour cet
auteur, toute régulation sociale est d’abord une régulation conjointe
construite à la rencontre de plusieurs légitimités. Surpassant la distinction entre une régulation contrainte (dont l’origine est l’autorité qui
impose des règles) et une régulation autonome (ayant pour source l’interaction « libre » entre les acteurs), il démontre qu’il existe de fait,
dans la réalité, une régulation conjointe, fruit de la confrontation de
ces deux sources de régulation, qui organise la vie et la culture de
chaque unité sociale ou organisationnelle.
Régulation contrainte
Régulation conjointe
Régulation autonome
Professionnalisation
Autorité traditionnelle
Figure 1 – Régulation et professionnalisation
Dans cette perspective, à la source de l’intérêt croissant pour la
professionnalisation de la gestion scolaire, c’est la remise en question
d’une autorité hiérarchique traditionnelle reposant essentiellement
sur une régulation de contrôle qui est questionnée en faveur de la
reconnaissance de l’importance de la régulation autonome et de la
régulation conjointe. Rappelons que la première repose sur l’autocontrôle en regard de règles professionnelles explicites alors que la seconde, sur l’ajustement mutuel entre pairs expérimentés du métier et
soucieux de l’évolution positive de ce dernier. Nous retrouvons ici les
règles explicites et implicites mentionnées auparavant mais cette foisci le regard porte sur l’acteur et non sur les règles.
Ainsi, être considéré comme « un professionnel » c’est d’abord,
d’une part, être capable de s’ajuster soi-même par l’intermédiaire d’une
régulation autonome sans l’imposition d’une régulation de contrôle de
proximité, que cette dernière se manifeste sous une forme d’inspection
ou de supervision ; d’autre part, c’est être attentif et de savoir composer avec la régulation conjointe. Cette dernière est le lieu de l’autorégulation avec les pairs, avec les collègues, et de rapports négociés avec
ses supérieurs.
Le discours sur la valorisation de la professionnalité des enseignants a suscité, et suscite toujours, un intérêt manifeste pour les responsables de l’encadrement de ces derniers qui voudraient bien ne pas
être confinésà assumer desfonctionsde régulation de contrôle. Car, l’échafaudage progressifetcumulatifde relationspatronalesetsyndicales
qui se sont enlisées dans une dynamique de jeux de pouvoirs associés
essentiellement au « contrôle de la régulation de contrôle » ont conduit
bien des milieux scolaires à vivre des rapports gangrenés qui sont loin
d’être souhaitables au sein d’une institution éducative. De plus, la multiplication des règles associées à la « régulation de contrôle » et des
jeux et contre-jeux qu’elles génèrent rendent de plus en plus inopérant
l’exercice des fonctions de pilotage et de coordination, voire de
construction d’un accord quotidien dans la réa-lisation d’un travail collaboratif et encore moins dans la conduite d’une réforme. Dans ce
contexte, il est fort compréhensible que l’intérêt pour la professionnalisation des enseignants et pour leur « empowerment7 » a souvent été
porté davantage par des responsables de l’encadrement que par des
structures syndicales. Les premiers y voyant une avenue permettant
une nouvelle forme de régulation, les deuxièmes y voyant un affaiblissement potentiel ou réel d’une expertise acquise à composer avec
l’exercice d’une régulation de contrôle dont celle de se limiter à une
contestation tous azimuts à l’égard de « ceux d’en face »….
Par ailleurs, la valorisation d’une régulation conjointe ne peut s’inscrire qu’au sein d’un processus de décentralisation conduisant à une
plus grande autonomie locale, dont notamment celle des unités de base
du système que sont les établissements scolaires. Ce faisant, l’intérêt
pour la professionnalisation et ses éléments régulateurs interpelle de
façon majeure les pratiques traditionnelles de gestion des écoles.
JEUX ET ENJEUX D’UNE PROFESSIONNALITÉ ÉMERGENTE
Avec le développement croissant et la complexification des
connaissances et des savoirs, de nombreux champs de pratiques professionnelles ont été touchés par un mouvement de professionnalisation qui a modifié l’univers de la niche des occupations traditionnellement associées à une professionnalité reconnue et valorisée, soit
celles des professions dites « libérales ».
Parmi les critères majeurs de la reconnaissance d’un statut professionnel à une occupation, celui de la complexité de la tâche et de l’incertitude face aux résultats de l’action sont les plus fréquemment
La revue des Échanges
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11
signalés8. Cette complexité invite à la mise en place d’un processus
long et continu de formation et de socialisation axé sur des compétences identifiées et normées de haut niveau, compétences jugées
nécessaires à l’exercice d’une activité professionnelle de qualité. Par
essence, l’évaluation est omniprésente à toutes les étapes conduisant
de l’analyse des pratiques professionnelles au repérage des compétences à formaliser et à codifier. Elle est aussi présente lors de leur validation et de leur maîtrise par les membres de la profession. À cet
égard, on comprendra toute l’importance du rôle qu’ont à jouer les
associations professionnelles de direction d’établissement et, plus largement, l’ensemble du personnel d’encadrement.
Mais, pour que l’évaluation puisse jouer son plein rôle dans le cadre
d’une démarche de professionnalisation, ilestnécessaire qu’ilexiste une
base de connaissances rigoureuses et suffisantes de pratiques exemplaires (« best practices ») du métier, base qui réponde à des normes
reconnuesd’efficacité etqui soitl’objetd’une légitimité partagée tantpar
les membres de l’occupation que par les autres intervenants en contact
avec ces derniers dont, bien sûr, les autorités de tutelle.
En résumé, quatre éléments fondamentaux témoignent de l’existence d’une profession :
1. la présence d’activités complexes reconnues comme telles dont la
réalisation nécessite des compétences élevées ;
2. la reconnaissance d’un statut spécifique qui distingue cette occupation des autres, dont celles de proximité, comme l’enseignement
dans le cas de la gestion de l’éducation ;
3. l’existence d’un corpus de connaissances scientifiques évolutives et
pragmatiques qui permet de reconnaître les pratiques jugées exemplaires et de les codifier à des fins de communication ;
4. enfin, l’existence de pratiques de socialisation et de formation qui
permet aux personnes qui occupent la fonction de s’approprier ces
connaissances codifiées et de les traduire en savoirs d’intervention
dans la construction évolutive de leur identité professionnelle.
Figure 2 – Composantes de la professionnalisation
Statut
spécifique
reconnu
Connaissances
scientifiques et
Professionnalisation
pratiques
exemplaires
Formation
et
socialisation
Tâches
complexes et
compétences
élevées
Or, d’une part, suivant les pays et particulièrement ceux qui sont
représentés à ces Assises, on peut observer de très grandes différences au regard de ces différents critères. Par exemple, en certains
endroits, la fonction de directeur d’établissement n’a pas de statut, la
formation initiale et continue est souvent endémique, voire absente, et
la personne en poste de direction a souvent une autonomie décision-
12
nelle très limitée. Par ailleurs, les efforts de recherche sont encore à
maintenir pour la constitution d’une base de connaissances rigoureuses permettant de codifier les pratiques jugées exemplaires et pour
leur traduction suivant les contextes et les ressources disponibles.
D’autre part, de façon paradoxale, dans la plupart des pays, les
critères déterminant l’existence d’une profession sont davantage présents et visibles chez le personnel enseignant que chez le personnel de
direction des écoles. En effet, au cours des dernières décennies, une
attention régulière a été portée à la formation tant initiale que continue
des enseignants, des référentiels métiers ont été élaborés, les
recherches sur l’analyse du métier ont été nombreuses et continuent
de l’être, les investissements de ces activités de recherche et de production des connaissances dans les réformes et les nouvelles pratiques sont réels et valorisés ; plusieurs associations professionnelles
associées à des ordres d’enseignement ou à des matières disciplinaires ou encore des ONG remplissent d’importantes fonctions d’animation, de formation et de socialisation professionnelles (colloques,
journées d’études, bulletins d’information, site WEB, etc.), Dans un
même esprit, les grands organismes subventionnaires ont encouragé
et soutenu la formation en cours d’emploi des enseignants, notamment de ceux qui n’avaient pu bénéficier de formation initiale.
L’analyse de la situation du personnel de direction des établissements révèle, à maints égards, une réalité fort différente. Car, si d’aucuns reconnaissent que le métier a sa spécificité, qu’il est devenu plus
complexe, plus exigeant et que son exercice nécessite des compétences élevées, bien des éléments qui caractérisent une profession
manquent à l’appel ou sont en définition. Dans le cadre des prochains
paragraphes, nous allons aborder un questionnement ouvrant sur des
pistes potentielles d’action soucieuses des contextes nationaux différenciés.
QUESTIONNEMENT ET PISTES D’ACTION SUR LES SENTIERS DE LA
PROFESSIONNALISATION
D’entrée de jeu, rappelons que la construction d’une professionnalité pour les membres d’une occupation est un chemin à voies multiples et partagées entre plusieurs intervenants et acteurs. On ne
devient pas professionnel par un phénomène de génération spontanée parce que l’on vient de se proclamer comme tel, pas plus qu’on
ne le devient par décret gouvernemental.
En fonction des quatre éléments fondamentaux identifiés précédemment explorons les possibilités d’action à entrevoir à partir d’un
questionnement approprié.
1) La présence d’activités complexes reconnues comme telles
dont la réalisation nécessite des compétences élevées.
La direction d’un établissement scolaire n’a jamais été en soi une
sinécure et elle est devenue de plus en plus exigeante au point même
que l’on assiste en maints endroits à une véritable crise de recrutement. Dans un même sens, est bien terminée la période – si cette
période a vraiment existé! – où l’on considérait que la direction de l’école était le simple relais administratif des hautes autorités ministérielles. La massification de l’éducation, les contraintes de ressources,
la reddition de comptes au regard de la réussite scolaire et bien
d’autres facteurs ont contribué à rendre la gestion des écoles de plus
en plus complexe.
De plus, un ensemble de travaux et de recherches ont confirmé ce
que d’aucuns avaient souvent pu observer… Les compétences de la
personne à la direction de l’établissement scolaire contribuaient à la
La revue des Échanges
NUMÉRO 3, 2006
mobilisation de ce dernier pour une meilleure réussite pour tous. En
effet, la qualité de la gestion d’un établissement contribue à un
ensemble d’effets composites – tout ne relève pas de la seule responsabilité de la direction – à la réussite des élèves.
Au regard de ces observations, l’on pourrait se demander au sein
de chacun des pays participant aux Assises :
• Est-ce qu’au sein de votre pays, l’on a observé que les tâches des
dirigeants des établissements scolaires se sont complexifiées au
cours des années ? A-t-on procédé à des analyses de tâches ?
• Est-ce que l’on perçoit une différence dans le fonctionnement des
écoles qui serait associée au style de gestion ou aux compétences
maîtrisées de la personne qui le dirige ?
• Est-il devenu de plus en plus difficile de recruter des directions d’écoles compétentes à assumer leur fonction ?
2) La reconnaissance d’un statut spécifique qui distingue cette
occupation des autres dont celles de proximité comme l’enseignement
L’accroissement de la complexité dans l’exercice d’une fonction
tend à la spécialiser et à la différencier des autres, y compris de celles
de relative proximité. Les mouvements engagés ou annoncés de
décentralisation/déconcentration et de responsabilisation des établissements scolaires conduisent à un accroissement des responsabilités managériales au sein de celui-ci. En conséquence, en maints
endroits, on aura vu émerger et reconnaître, de façon progressive, le
caractère spécifique de la gestion des écoles au sein des métiers de l’éducation. Cette reconnaissance ne prend pas nécessairement – ni
exclusivement d’ailleurs – une forme législative, elle peut dans une
« démarche étapiste » se décliner de différentes façons.
Au regard de ces observations, l’on pourrait se demander au sein
de chacun des pays participant aux Assises :
• Est-ce qu’au sein de votre pays, on a assisté à la mise en place d’une
démarche progressive de différenciation des tâches entre le dirigeant de l’établissement et le personnel enseignant qui y oeuvrent ?
Sinon, quelle est la situation actuelle ?
• Est-ce qu’un profil de compétences de la directrice ou du directeur
d’école a été établi ? Si oui, est-ce que ce dernier est utilisé à des fins
de sélection, d’évaluation et de promotion ? Sinon, comment
devient-on directrice ou directeur d’école ?
• Si au sein de votre pays, le statut de la direction d’établissement est
maintenant enchâssé dans un texte réglementaire, pouvez-vous signaler les principales caractéristiques de ce statut, de ses prérogatives et de ses limites ? S’il ne l’est pas, un tel sujet est-il envisageable et comment se réaliserait-il ?
3) L’existence d’un corpus de connaissances scientifiques évolutives et pragmatiques qui permet de reconnaître les pratiques jugées
exemplaires
Cette composante des caractéristiques contributives à la professionnalisation de la gestion scolaire transcende les réalités nationales
et interpelle la contribution de plusieurs partenaires internationaux. De
plus, comme nous l’avons déjà signalé, les efforts de recherche se
poursuivent pour la constitution d’une base de connaissances rigoureuses permettant de codifier les pratiques jugées exemplaires.
Il est aussi essentiel que ces efforts ne se limitent pas aux pays
mieux nantis. À cet effet, il y a d’ailleurs lieu de signaler les efforts
remarquables des chercheurs des pays émergents dans le domaine et
les importantes contributions de l’ADEA, de l’IIPE et d’autres organismes - dont la CONFEMEN - pour le soutien à la recherche dans le
domaine de l’organisation et la gestion de l’éducation9. Toutefois, cet
effort de recherche est insuffisant s’il n’existe pas des stratégies de
communication permettant de diffuser les résultats auprès de l’ensemble des décideurs concernés, y compris ceux oeuvrant à la direction des écoles.
Au regard de ces observations, l’on pourrait se demander au sein
de chacun des pays participant aux Assises :
• Dans quelle mesure, les connaissances produites portant sur la gestion efficace et de qualité des établissements scolaires sont-elles
mises à profit lors de l’élaboration des politiques éducatives ? Si oui,
peut-on donner des exemples ? Sinon, comment pourrait-on améliorer la situation ?
• Existe-t-il des efforts de recherche soutenus par les autorités afin
d’identifier les caractéristiques des écoles qui réussissent particulièrement bien dans des conditions difficiles ? Si oui, peut-on donner
des exemples ? Sinon, comment serait-il possible de le faire ?
• Existe-t-il des stratégies et des méthodes (colloques, séminaires,
communiqués de presse, etc.) permettant de faire connaître les
connaissances acquises sur la gestion et le fonctionnement des
écoles de qualité ? Si oui, peut-on témoigner d’expériences particulièrement bien réussies ? Sinon, que pourrait-il être possible de réaliser à court terme et dans un plus long terme ?
4) L’existence de pratiques de socialisation et de formation permettant la construction évolutive d’une identité professionnelle partagée
Des quatre éléments fondamentaux retenus dans les éléments
contributifs à la professionnalisation de la gestion scolaire, l’existence
de pratiques de socialisation et de formation permettant la construction évolutive d’une identité professionnelle partagée est sans aucun
doute la plus importante et celle qui est située en amont des autres.
Comme signalé précédemment, on ne devient pas « professionnel par
génération spontanée ou par décret », la professionnalité émerge et se
construit lorsque les membres d’une occupation ont amorcé un processus de socialisation reposant sur des échanges de plus en plus soutenus, par une mise en réseau structuré des uns et des autres, par la
création d’associations professionnelles nationales et, éventuellement, par le maillage de ces dernières avec des associations de pairs
d’autres pays. Ce processus de socialisation est à l’origine même de la
circulation des informations et des connaissances sur les pratiques
exemplaires, de l’institutionnalisation progressive de programmes initiaux et continus de formation et de la reconnaissance éventuelle de la
spécificité du métier.
Au regard de ces observations, l’on pourrait se demander au sein
de chacun des pays participant aux Assises :
• Existe-t-il des regroupements ou des associations de dirigeants scolaires qui sont orientés sur le partage et l’amélioration des pratiques ? Si oui, quelles sont leurs principales caractéristiques et activités ? Sinon, y a-t-il un intérêt à mettre en place de tels regroupements et quels en sont les défis ?
• Existe-t-il des sessions de formation d’introduction à la fonction de
direction des écoles et de perfectionnement en cours d’emploi ? Si
oui, quelles en sont les principales caractéristiques et est-ce que les
membres qui ont l’expérience du métier participent à la définition
des contenus et à la prestation des formations ? Sinon, qu’est-il possible d’envisager à cette fin ?
• Existe-t-il des sessions de formation supérieure (université, grandes
écoles, instituts…) en gestion de l’éducation ? Si oui, quelles en sont
La revue des Échanges
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13
Tableau synthèse
Les composantes et leur questionnement
Outil de diagnostic et de programmation
1) Présence d’activités complexes et de compétences élevées
Est-ce qu’au sein de votre pays, l’on a observé que les tâches des dirigeants des établissements scolaires se sont complexifiées au cours des années ? A-t-on procédé à des analyses de tâches ?
Est-ce que l’on perçoit une différence dans le fonctionnement des écoles qui serait associée au style de gestion ou aux compétences maîtrisées de la personne qui le dirige ?
Est-il devenu de plus en plus difficile de recruter des directions d’école compétentes à
assumer leur fonction ?
2) Reconnaissance d’un statut spécifique
Est-ce qu’au sein de votre pays, on a assisté à la mise en place d’une démarche progressive de différenciation des tâches entre le dirigeant de l’établissement et le personnel
enseignant qui y oeuvrent ? Sinon, quelle est la situation actuelle ?
Est-ce qu’un profil de compétences de la directrice ou du directeur d’école a été établi ? Si
oui, est-ce que ce dernier est utilisé à des fins de sélection, d’évaluation et de promotion ?
Sinon, comment devient-on directrice ou directeur d’école ?
Si, au sein de votre pays, le statut de la direction d’établissement est maintenant
enchâssé dans un texte réglementaire, pouvez-vous signaler les principales caractéristiques de ce statut, de ses prérogatives et de ses limites ? S’il ne l’est pas, un tel sujet estil envisageable et comment se réaliserait-il ?
3) Existence de connaissances scientifiques et pragmatiques sur les pratiques exemplaires
Dans quelle mesure, les connaissances produites portant sur la gestion efficace et de
qualité des établissements scolaires sont-elles mises à profit lors de l’élaboration des
politiques éducatives ? Si oui, peut-on donner des exemples ? Sinon, comment pourraiton améliorer la situation ?
Existe-t-il des efforts de recherche soutenus par les autorités afin d’identifier les caractéristiques des écoles qui réussissent particulièrement bien dans des conditions difficiles ?
Si oui, peut-on donner des exemples ? Sinon, comment serait-il possible de le faire ?
Existe-t-il des stratégies et des méthodes (colloques, séminaires, communiqués de presse, etc.) permettant de faire connaître les connaissances acquises sur la gestion et le fonctionnement des écoles de qualité ? Si oui, peut-on témoigner d’expériences particulièrement bien réussies ? Sinon, que pourrait-il être possible de réaliser à court terme et dans
un plus long terme ?
4) Existence de pratiques de socialisation et de formation
Existe-t-il des regroupements ou des associations de dirigeants scolaires qui sont
orientés sur le partage et l’amélioration des pratiques ? Si oui, quelles sont leurs principales caractéristiques et activités ? Sinon, y a-t-il un intérêt à mettre en place de tels
regroupements et quels en sont les défis ?
Existe-t-il des sessions de formation d’introduction à la fonction de direction des écoles
et de perfectionnement en cours d’emploi ? Si oui, quelles en sont les principales caractéristiques et est-ce que les membres qui ont l’expérience du métier participent à la définition des contenus et à la prestation des formations ? Sinon, qu’est-il possible d’envisager
à cette fin ?
Existe-t-il des sessions de formation supérieure (université, grandes écoles, instituts…) en
gestion de l’éducation ? Si oui, quelles en sont les principales caractéristiques et est-ce
que les membres qui ont l’expérience du métier participent à la définition des contenus
et à la prestation des formations ? Sinon, qu’est-il possible d’envisager à cette fin ?
14
La revue des Échanges
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État des lieux
Pistes potentielles d’action
les principales caractéristiques et est-ce que les membres qui ont
l’expérience du métier participent à la définition des contenus et à la
prestation des formations ? Sinon, qu’est-il possible d’envisager à
cette fin ?
Selon les réponses obtenues à ce questionnement en douze
points, on pourrait apprécier et baliser, suivant les pays, la démarche
parcourue ou à parcourir à l’égard de la professionnalisation de la gestion de l’éducation. Par ailleurs, les questions soulevées révèlent aussi
des pistes d’action susceptibles d’être mobilisées pour accompagner
et soutenir la professionnalisation du métier de dirigeant en éducation.
Enfin, elles permettent aussi d’évaluer le niveau de professionnalisation d’un métier donné.
CONCLUSION
La professionnalisation de la gestion scolaire est déjà engagée en
maints endroits et la tenue des présentes Assises ne peut que témoigner de cette démarche. Certes, suivant les régions, sa réalisation progressive empruntera des chemins dont les trajectoires seront vraisemblablement différentes. Mais, il est important de demeurer attentif au
fait que la professionnalisation de la gestion scolaire ne peut pas se
limiter à un discours fleuve sur le sujet ou à une simple opération de
changement cosmétique.
La professionnalisation de la gestion scolaire s’inscrit dans un
ensemble de processus qui transforme la conception du pilotage et de
l’organisation du système éducatif. Elle est étroitement associée à la
mise en place de nouvelles régulations qui accompagnent des politiques de décentralisation/déconcentration, d’ouverture partenariale
avec les communautés de proximité et de reddition de comptes.
Les membres d’une occupation ne deviennent pas des « professionnels » par auto-proclamation ou par décret gouvernemental. De
même, on ne devient pas professionnel « seul », on le devient « avec
les autres » et pour une qualité de services « aux autres ». L’élaboration
d’une nouvelle identité professionnelle collective pour le personnel de
direction est une démarche de « coconstruction » qui implique aussi
une redéfinition des identités professionnelles des membres des
autres occupations oeuvrant au sein de la famille éducative. En
somme, une professionnalisation réelle et signifiante de la gestion scolaire ne peut faire l’économie d’une professionnalisation valorisée et
reconnue du personnel enseignant. De plus, là où il existe des corps
d’inspection10, une attention particulière devra être accordée à l’évolution de leur statut et de leurs nouveaux rôles au temps de la professionnalisation de la gestion scolaire.
En résumé, par effet domino, nous assistons depuis quelques
années à une volonté de professionnalisation accrue du personnel de
l’éducation. Certaines réformes engagées en font même l’un de leurs
objectifs premiers11. De fait, en ce début de millénaire, la réforme des
réformes de l’éducation interpelle au plus au point la place faite dans
l’école au quotidien aux rapports d’encadrement et d’accompagnement de proximité. La professionnalisation des acteurs de la première
ligne de l’activité éducative constitue aujourd’hui une donne incontournable afin d’assurer à « l’Éducation pour tous » la meilleure réussite possible pour tous. Et pour que cette professionnalisation puisse se
réaliser à l’échelle de l’établissement scolaire, l’incubateur premier de
celle-ci est bien son personnel de direction.
En définitive, si la professionnalisation en éducation ne relève pas
que d’un discours volontariste, voire utopique, bien des défis sont
encore au rendez-vous. Mais aucun n’est insurmontable. Dans le cadre
de ce texte, plusieurs pistes d’action ont été signalées qui peuvent
contribuer à l’engagement dans une démarche évolutive d’une professionnalisation de la gestion scolaire. L’avenir de demain se construit
aujourd’hui dans et par l’action de ses acteurs.
NOTES
Référence : Le Robert. Dictionnaire historique de la langue
française, 2000, p. 1767
2 Voir site www.usherbrooke.ca/education/
3 De fait, Le Robert. Dictionnaire historique de la langue
française (2000, p. 1767) signale que la déclinaison actuelle
autour du mot profession relève de l’influence de l’angais sur
le français.
4 Référence : Renald Legendre (2005). Dictionnaire actuel de
l’éducation. 3e édition. P. 1088
5 À cet effet, plusieurs colloques ont été réalisés en France sur
le sujet au cours des dernières années dont une rencontre
internationale du Réseau de recherche en éducation et formation tenue en septembre 2005 à Montpellier.
6 Voir, entre autres, à ce sujet, Pelletier, 1995a, 1997, 1998,
2001a, 2001b, 2004a et 2005.
7 Il s’agit d’une orientation favorisant le développement de
l’autonomie professionnelle et le renforcement des équipes
de travail.
8 Voir, entre autres, Chapoulie (1973), Carbonneau (1993),
Pelletier (1995b), Dubar (2000) et Brassard (2004).
9 Voir, entre autres, les travaux réalisés par l’ADEA dont l’étude
publiée en 2006 et portant sur seize écoles africaines de
quatre pays différents.
10 L’évolution du corps d’inspection constitue en soi un objet
majeur d’analyse. La revue française Administration et éducation de décembre 2005 a consacré un numéro thématique
sur le sujet avec le titre combien révélateur de « L’inspection
en questions ».
11 C’est le cas notamment de la nouvelle réforme de l’éducation
de la Tunisie et du Québec.
1
Références
Aucoin, P. (2002). La fonction publique comme organisation apprenante : Maintenir le mouvement de réforme dans la fonction punlique. Dans La modernisation de la gouvernance : une première
exploration. Ottawa : Centre canadien de gestion.
Bouvier, A. (1998). Évaluation ou pilotage au sein des organisations
de formation ? Dans Pelletier, G. (dir.) L’évaluation institutionnelle de l’éducation, Montréal : Éditions de l’AFIDES, pp. 137-150.
Brassard, A. (2004). La professionnalisation de la fonction de direction d’un établissement scolaire et le développement du champ
d’études de l’administration de l’éducation. Éducation et francophonie, XXXII (2), pp36-61.
Caguilhem, G., (1990) « Régulation (Épistémologie) » Dans : Enciclopaedia
Universalis, Paris : Enciclopaedia Universalis France S.A
Carbonneau, M. (1993). Modèle de formation et professionnalisation
de l’enseignement : analyse critique de tendances nord-américaines. Revue des sciences de l’éducation. XIX (1), pp 33-57.
Chapoulie, J.-M. (1973). Sur l’analyse sociologique des groupes professionnels. Revue française de sociologie, 14, pp. 86-114.
Dubar, C. (2000). La socialisation. Construction des identités sociales
et professionnelles. Paris : Armand Colin.
Pelletier, G. (1995a). L'analyseur analysé : Regard sur la nouvelle évaluation
des programmes de formation à l'enseignement du Québec. Dans
Fonctionnement de l'évaluation dans les systèmes de formation - Évaluation du fonctionnement des systèmes de formation de l'Association
Suite à la page 18
La revue des Échanges
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15
LE CHEF D’ÉTABLISSEMENT
ET LA GESTION
DES ÉTABLISSEMENTS SCOLAIRES
AU CONGO
À travers cet exposé, nous proposons de présenter l’expérience
congolaise en matière de formation des chefs d’établissement et de
gestion des établissements scolaires.
CRITÈRES DE NOMINATION DU CHEF D’ÉTABLISSEMENT
Cf. Arrêté N° 2258/MENSTJSCA-CAB-DGASG-DPAA-SAA-BA 1 du 20
août 1992.
- Être enseignant de l’ordre considéré ou agent assimilé ;
- Avoir une ancienneté de service de cinq ans au moins ;
- Avoir exercé les fonctions de directeur des études, de surveillant
général ou de chef des travaux en ce qui concerne les établissements
du secondaire.
Les nominations sont prononcées par le Ministre sur proposition
de l’inspecteur et du directeur départemental de l’enseignement.
FORMATION DES CHEFS D’ÉTABLISSEMENT
Cf. Arrêté N° 2260/MENSTJSCA-CAB-DGASG-DPAA-SAA-BA 1 du
20 août 1992.
La formation des chefs d’établissement comprend deux volets : la
formation initiale et la formation continue.
La formation initiale concerne les nouveaux promus. Elle a lieu
avant la prise effective des fonctions et dure au mois trois semaines.
(Mais dans la pratique, ces derniers temps, elle a lieu au cours de
l’année scolaire.)
La formation continue intéresse l’ensemble des chefs d’établissement en activité. Elle a une durée d’au moins trois jours chaque année,
et suivie de journées d’information selon les besoins.
QUI ASSURE LA FORMATION ?
Au niveau national, c’est le groupe opérationnel national (G.O.N.),
dont le cahier de charge est le suivant :
• veille à la mise en place des groupes opérationnels départementaux
(G.O.D.) ;
• élabore et organise la formation des membres des G.O.D. ;
• assiste les G.O.D. lors des premiers stages de formation des chefs
d’établissement ;
• arrête les modalités d’évaluation du dispositif de formation et de la
formation elle-même ;
• assure une fonction de suivi et de régulation du dispositif ;
• assure la logistique de la formation ;
• valide les plans individuels de formation des stagiaires ;
16
• constitue une force de proposition en direction des autorités hiérarchiques.
Public cible : Inspecteurs membres des G.O.D. et chefs d’établissement scolaire.
Au niveau des départements, les groupes opérationnels des
départements assurent le relais. Leur cahier de charge comprend les
missions suivantes :
• ont la charge de poursuivre la formation des chefs d’établissement
dans leur département ;
• assurent la logistique de la formation dans leur département ;
• assurent une fonction de suivi et de régulation du dispositif.
Compétences exigées des membres des G.O.D.
• concevoir et élaborer un plan de formation ;
• organiser, animer et évaluer un stage de formation des chefs d’établissement ;
• en assurer le suivi ;
• maîtriser les techniques de formation des adultes.
COMPÉTENCES À INSTALLER CHEZ LES CHEFS D’ÉTABLISSEMENTS
(extrait du Référentiel de formation des chefs d’établissement
publié par le ministère de l’Éducation)
Champ personnel
Compétences
Capacités
Aptitudes à la relation S’exprimer pour être compris par les autres
(simplicité).
Comprendre l’autre (humanité).
Se présenter.
Appréhender globalement une situation
(adaptabilité).
Relativiser l’importance d’un événement (maîtrise de soi).
Observer, écouter.
Aptitudes à l’innovation Curiosité intellectuelle et sens critique.
Promotion des initiatives d’autrui.
Prendre des initiatives.
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Champ pédagogique. L’élève : formation et devenir
Compétences
Mobiliser les ressources de l’établissement afin de permettre à chaque élève
de développer au
mieux ses potentialités
Favoriser l’insertion de
l’élève dans une communauté éducative.
-Favoriser l’émergence des
projets personnels des
élèves, en tenir compte lors
des conseils de classe.
Capacités
Analyser les caractéristiques de la population scolaire reçue
Créer les conditions optimales au sein
de la classe en privilégiant les critères
pédagogiques pour :
- répartir les services d’enseignement ;
- établir l’emploi du temps ;
- constituer les classes ;
- inciter à la mise en oeuvre de pratiques
adaptées (harmonisation des critères,
développement de pratiques pédagogiques).
Mise en application du règlement intérieur.
Développement d’activités éducatives.
Être attentif aux conditions de vie quotidienne des élèves.
Capacités
Inscriptions, suivi de leur scolarité,
aides scolaires, examens
Notation, mutation, promotion,
absences, congés, distinctions honorifiques, etc.
Assurer la sécurité des personnes et des
biens : conformité des installations,
hygiène, sécurité, exercices d’évacuation.
La communication
Favoriser l’émergence des
projets personnels des
élèves, en tenir compte lors
des conseils de classe
Champ administratif
La gestion des moyens horaires et humains
Compétences
Identifier les grandes
étapes d’une préparation
de rentrée scolaire.
Capacités
Réaliser une prévision d’effectifs.
Élaborer une structure prévisionnelle.
Calculer les besoins en fonction de cette
structure.
Procéder à des choix péda- Évaluer les conséquences sur les
gogiques en fonction du moyens en personnel de l’établisseprojet de l’établissement et ment.
Connaître les contraintes réglemendes moyens disponibles.
taires.
Réaliser une répartition de services.
Confectionner un emploi du temps.
La gestion financière
Compétences
Être capable de situer le
rôle du chef d’établissement dans le cadre de la
comptabilité publique.
Élaborer une politique
budgétaire.
Suivre et contrôler l’exécution du budget.
La gestion administrative
Compétences
Organiser les services des
différents personnels (directeur(trice) des études,
chef des travaux, surveillant(e) général(e), secrétaires) dans le respect
du statut de chacun.
Gérer la scolarité des élèves.
Gérer les personnels.
Gérer les locaux et les installations.
Prévoir les travaux à réaliser (calendrier, coût)
Prévoir les équipements à
mettre en place (calendrier,
coût)
La communication interne
Compétences
Analyser, décrire et évaluer
le dispositif de communication interne de l’établissement.
Connaître les techniques
de communication
Organiser la concertation
au sein de la communauté
éducative
Capacités
Savoir, pour information donnée :
- cibler son public en recherchant ce qui
est utile, pertinent, exploitable ;
- déterminer le canal pertinent ;
- déterminer le moment favorable
La communication externe : relations établissement/environnement
Trois compétences sont à installer :
1. Situer l’établissement dans son environnement administratif, culturel, économique et politique.
2. Connaître les compétences de divers partenaires.
3. Établir des relations et faire connaître son établissement.
Capacités
Le pilotage d’un établissement : notion de projet
Analyser la situation financière de l’établissement.
Maîtriser les contraintes techniques
administratives et financières.
Élaborer un projet de budget.
Compétences
Savoir analyser la situation
de son établissement.
Savoir définir des objectifs.
Choisir les modalités d’action.-
La revue des Échanges
NUMÉRO 3, 2006
Capacités
Distinguer objectifs généraux et opérationnels à court et moyen terme.
Assurer la cohérence avec les objectifs
nationaux et départementaux.
Mesurer le degré de faisabilité.
Classer et hiérarchiser les priorités.
17
LA GESTION DES ÉTABLISSEMENTS SCOLAIRES
Cf. Arrêté n° 550/MENRSTET-CAB-DGAS du 3 avril 1996, instituant
les organes délibérants dans les établissements publics nationaux.
Ces organes sont :
• le conseil d’administration qui a des compétences décisionnelles (budget-programme, compte financier, règlement intérieur…) et consultatives et qui implique toute la communauté éducative ;
• le conseil de discipline, pour lessanctionspositivesetnégatives, face au
règlement intérieur ;
• le conseil des professeurs ou des maîtres, pour examiner les questions
d’ordre pédagogique intéressantla vie de l’établissement: avancement
desprogrammes, rendementsscolaires, innovationspé-dagogiques… ;
• le conseil de classe chargé d’examiner lesquestionspédagogiquesintéressantla vie de la classe : effectifs, présences, absences, retards, résultats, pourcentages de succès ou d’échec et qui statue sur le cas de
chaque élève.
Les objectifs visés sont, entre autres :
• améliorer l’environnement d’apprentissage ;
• mobiliser et gérer efficacement les ressources financières nécessaires
au bon fonctionnement de l’établissement ;
• assurer une répartition équitable des enseignants entre les classes ;
• optimiser leschancesde réussite desélèves(moinsde redoublementet
des abandons nuls) ;
• favoriser l’installation chez les élèves des connaissances et des compétences prescrites par le cursus.
Tous ces enseignements sont consignés dans un recueil de conseils
qui constitue le vade-mecum du chefd’établissementpublié par le ministère de l’éducation et intitulé « Guide du chef d’établissement, aide à la gestion des établissements scolaires ».
CONCLUSION
Le chef d’établissement est au coeur de l’action éducative. Il est avant
tout un pédagogue, un analyste, un communicateur et un manager.
Il y a une corrélation forte et positive entre la réussite des élèves et le
mode de gestion des établissements scolaires.
Suite de la page 16
pour le développement des méthodologies d'évaluation en éducation
Europe. Genève : ADMÉE.
Pelletier, G. (1995b). De la professionnalisation des chefs d'établissement.
La Revue des échanges. Revue de l’Association francophone internationale des directions d'établissement scolaires (soutenu par l’AIF et
l’UNESCO), 12 (1), 25-28. Cet article a été publié à nouveau en 2004
dans un numéro thématique de La revue des échanges. Vol. 21 (2), 1822.
Pelletier, G. (1997). L'évaluation des programmes universitaires québécois : Le cas des formations à l'enseignement. Gestion de l'enseignement supérieur-Higher Education Management. Vol 9, numéro 2,
OCDE/OECD, 75-90.
Pelletier, G. (Dir.) (1998). L’évaluation institutionnelle de l’éducation,
Montréal : Éditions de l’AFIDES.
Pelletier, G. (2001a). Les États généraux sur l’éducation au Québec : processus d’évaluation, de négociations et de décisions politiques. Dans
L. Demailly(Dir.) Évaluer les politiques éducatives. Sens, enjeux et pratiques. Bruxelles : De Boeck Université. 65-76.
18
Suite de la page 8
• La plus grande faiblesse des pouvoirs publics a été d’hésiter à
bâtir un consensus avec les enseignants, les étudiants et les
parents sur les principaux problèmes du secteur et les réformes
envisagées, comme le redéploiement des instituteurs et les procédures de recrutement, le recouvrement des coûts et la limitation
des bourses.
• Les organes de gestion et les tables de concertation mis en place
n’ont pas fonctionné de manière optimale aux niveaux central,
déconcentré et décentralisé ; la participation des collectivités
locales et des communautés à la base a été déficiente dans plusieurs localités.
• La déconcentration a été renforcée mais il s’avère nécessaire d’aller plus en profondeur.
• Les missions de supervision suivies des revues du programme ont
été des moments forts où l’ensemble des acteurs et partenaires
(sociaux, techniques et financiers) se sont penchés de manière
solidaire et objective sur le secteur pour participer à l’évaluation
des efforts, à la redéfnition des politiques et des stratégies, à l’élaboration des plans d’action et plans d’opération et budgets
annuels. Il est cependant nécessaire de mieux les organiser pour
renforcer la participation afin d’éviter que les partenaires techniques et financiers continuent à faire des missions de supervision
tout au long de l’année.
• L’État a fait des efforts importants dans le financement des investissements mais la participation des partenaires techniques et
financiers reste majoritaire. La tendance doit être inversée pour
assurer le leadership le l’État, condition sine qua non d’une plus
grande autonomie et d’une prise en charge plus équilibrée des
différents sous-secteurs.
• L’allocation interne des ressources entre les différents soussecteurs a été déficiente ; l’enseignement supérieur et la formation
professionnelle et technique en ont véritablement souffert.
L’appui budgétaire pour le secteur de l’éducation devrait permettre à l’État ,en rapport avec ses partenaires, de mieux répartir
l’ensemble des financements tout en respectant les grandes priorités et les besoins réels des populations (ouverture d’écoles franco-arabes et appui aux écoles coraniques).
Pelletier, G. (2001b). Décentralisation, régulation et gouvernance des
systèmes éducatifs : un cadre de référence. Dans Pelletier, G. (Dir.).
Autonomie et décentralisation en éducation : entre projet et évaluation. Montréal : Éditions de l’AFIDES. 9-39.
Pelletier, G. (dir.) (2004a). Accompagner les réformes et les innovations en
éducation. Paris : L’Harmattan.
Pelletier, G. (2004b). La décentralisation du système scolaire québécois :
une variation sur un thème majeur.. Dans L. Brunet et M. Saint-Pierre
(dir.). De la décentralisation au partenariat. (p.151-171). Québec :
Presses de l’Université du Québec
Pelletier, G. (2005). De quelques réflexions sur le changement et sur l’art
de diriger le dirigeant. Dans D. Biron, M. Cividini, et J.-F. Desbiens. La
profession enseignante au temps des réformes. Sherbrooke :
Éditions du CRP. Pp 89-122
Reynaud, J-D. (1989) Les règles du jeu. Paris : Armand Collin.
La revue des Échanges
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PROFESSIONNALISATION
DE LA GESTION SCOLAIRE
ÉTUDE DE CAS PRÉSENTÉE
PAR LA FRANCE
PRÉAMBULE
L’objectif des personnels de direction, et plus largement d’encadrement, est la réussite des élèves.
L’environnement des personnels d’encadrement a changé du tout
au tout. De simples exécutants dans l’échelle hiérarchique, ils sont
devenus des acteurs plus autonomes et responsables.
L’Éducation Nationale a longtemps fonctionné sur un modèle très
centralisé ; modèle qui pouvait d’ailleurs être efficace tant que le
nombre d’établissements scolaires était limité et le public scolarisé
assez homogène. Cependant, avec les révolutions scolaires successives qui ont mené à la massification de l’éducation et donc à sa démocratisation, l’État a été amené à redéfinir son rôle et les chefs d’établissement leur manière de fonctionner.
Avec la décentralisation, les collectivités locales sont entrées dans
l’univers scolaire. Le chef d’établissement a donc dû s’ouvrir à leurs
demandes en plus de celles de l’État – travailler avec plusieurs partenaires publics est beaucoup plus complexe et nécessite plus d’autonomie ; l’importance de cette autonomie est encore en débat, car elle
s’accompagne de responsabilités.
Le rôle et les fonctions de l’école sont de plus en plus essentielles
dans une société en mouvement et en s’engageant à former tous les
publics, l’Éducation Nationale rencontre de nouveaux obstacles que
doivent gérer quotidiennement les chefs d’établissement. L’ensemble
de ces défis nous pousse à une réflexion sur la professionnalisation de
la gestion scolaire.
En France, le protocole d’accord signé le 16 novembre 2000 entre
le ministre Jack Lang et le principal syndicat représentatif des personnels de direction a marqué une étape importante dans l’évolution du
statut et des missions des chefs d’établissement dont le métier s’est
profondément transformé dans le contexte d’autonomie renforcée des
établissements. Les établissements d'enseignement sont porteurs de
l'ambition et de la volonté de progrès du système éducatif. Ils sont le
lieu où doivent naître et se développer l'innovation et le changement.
Dans cette perspective, les personnels de direction doivent être les
moteurs de cette dynamique. Il leur appartient de tirer parti du potentiel de créativité des équipes pédagogiques pour mettre en oeuvre des
projets innovants et impulser une véritable politique pédagogique au
service de la réussite de tous les élèves.
Organiser le fonctionnement des établissements en s’appuyant
sur la diversité des compétences et des talents, favoriser l’épanouissement de la vie scolaire sont quelques-unes des nouvelles missions
assignées aux chefs d’établissement.
M. JEAN-CLAUDE RIMBAULT
PRÉSIDENT AFIDES-FRANCE
Ce protocole d’accord a affirmé quatre objectifs essentiels à partir
desquels a été élaboré le référentiel des personnels de direction.
Ces quatre objectifs :
- clarifier les missions et les responsabilités du chef d’établissement,
- créer les conditions d’un pilotage et d’un fonctionnement efficaces
au sein de l’établissement,
- reconnaître le rôle des chefs d’établissements, les accompagner,
- valoriser et accompagner les trajectoires professionnelles.
LE RÉFÉRENTIEL
Les missions du chef d’établissement
Le chef d’établissement représente l’État
Il est donc porteur des finalités et objectifs définis par le ministre.
Il inscrit son action dans le cadre défini par les textes législatifs et
réglementaires.
Il est garant de la sécurité des personnes et des biens de l’établissement.
Le chef d’établissement dirige l’établissement
Il impulse et conduit la politique pédagogique et éducative de l’établissement.
- Expression locale de la politique académique, menée dans le cadre
de l’autonomie de l’établissement, cette politique vise la réussite de
tous les élèves, et de chacun d’entre eux.
- Le chef d’établissement pilote le projet d’établissement en y associant tous les acteurs et partenaires de la communauté éducative, il
suscite et fédère les initiatives dans le cadre du futur conseil pédagogique dont la création est en préparation.
- Il est garant de l’efficacité de l’organisation pédagogique, traduction
nécessaire de l’intérêt général du service public d’éducation ; sa collaboration avec les corps d’inspection permet d’assurer la qualité
des enseignements et de la vie scolaire.
Il préside le conseil d’administration de l’établissement, il en est
l’exécutif .
Il prépare et exécute le budget de l’établissement voté par le
conseil d’administration.
Il anime, gère et développe les ressources humaines de l’établissement.
Il représente l’établissement.
- Il négocie avec les collectivités territoriales compétentes, inscrit
La revue des Échanges
NUMÉRO 3, 2006
19
l’établissement dans un réseau local d’établissements et développe
tous les partenariats nécessaires.
Les domaines d’activités - Diriger un établissement
Représentant de l’État, placé sous l’autorité du recteur et de l’inspecteur d’académie, directeur des services départementaux de l’éducation nationale, le chef d’établissement est garant, dans son établissement.
- de la cohérence d’une politique académique, expression de la politique nationale, dans laquelle s’inscrivent ses objectifs ;
- de la cohérence de l’action éducative telle qu’elle est portée par le
projet d’établissement, délibéré en conseil d’administration.
Représentant de l’établissement, il prend, dans le cadre d’une
lettre de mission, les initiatives liées à l’autonomie pour atteindre les
objectifs fixés. Il agit directement ou dans le cadre de délégations
claires données à ses collaborateurs.
I – Conduire une politique pédagogique et éducative d’établissement au service de la réussite des élèves, en y associant
l’ensemble des membres de la communauté éducative.
- conduire l’élaboration, la formalisation et le suivi du projet d’établissement, dans le cadre des orientations ministérielles et académiques et dans le cadre des attributions du conseil d’administration ;
- présider et animer le futur conseil pédagogique de l’établissement,
les conseils d’enseignement… ;
- constituer les classes et les groupes d’élèves ;
- répartir la DHG et les services d’enseignement, concevoir et réaliser
les emplois du temps ;
- assurer l’organisation des enseignements dans le respect des textes
réglementaires et en fonction du projet ;
- développer les pédagogies de soutien et d’aide individualisée au
bénéfice, notamment, des élèves en difficulté d’apprentissage.
Réguler et harmoniser les modalités et le rythme d’évaluation des
apprentissages des élèves
- bâtir une politique de l’établissement relative aux conseils de classe
et à l’évaluation des élèves ;
- s’inscrire dans une collaboration avec les corps d’inspection, particulièrement en ce qui concerne le contrôle de l’efficacité des enseignements dispensés (cahiers de textes, régularité des travaux
donnés et des procédures d’évaluation…) ;
- organiser les examens.
- créer les conditions d’un accueil des élèves dans l’établissement en
dehors des heures de cours (restauration, clubs, maison des
lycéens, internat, attentes dues au ramassage scolaire…) ;
- organiser et suivre le fonctionnement du secteur médico-social (infirmerie, fonds d’action collégien ou lycéen, bourses…) ;
- impulser et organiser une politique d’éducation à la santé (prévention des conduites à risque, installation et suivi des travaux du
comité d’éducation à la santé et à la citoyenneté (CESC) ;
- s’impliquer dans la vie de l’association sportive.
Établir, organiser et maintenir le dialogue aveclesparentsdesélèves.
II – Conduire et animer la gestion de l’ensemble des ressources humaines
- assurer une gestion prévisionnelle des personnels ;
- assurer l’accompagnement des nouveaux personnels, ainsi que des
personnels en difficulté (relations ad hoc avec les corps d’inspection
et les autorités de rattachement) ;
- participer à l’élaboration et à l’évaluation du plan de formation des
personnels (besoins du service / besoins de l’agent) ;
- valoriser les initiatives et les réussites des personnels, détecter les
potentialités ;
- faire de la notation annuelle une occasion d’échanges, d’aide et de
valorisation ;
- gérer et accompagner les personnels non titulaires (CES/CEC, aideséducateurs, vacataires…).
Définir les principes d’organisation des services de l’ensemble des
personnels, dans le cadre de leur statut.
Utiliser au mieux le potentiel de remplacement à disposition de l’établissement.
Organiser la communication interne à l’établissement, s’assurer
de sa qualité.
Organiser et maintenir le dialogue avec les représentants des personnels de l’établissement.
III – Assurer les liens avec l’environnement
Cet aspect est essentiel pour les lycées technologiques et professionnels qui doivent nécessairement mettre en place une politique de
partenariat avec le monde économique (entreprises,branches professionnelles) afin de favoriser l’alternance (stages en entreprises) et les
coopérations/échanges de savoirs faire (plate-forme technologique).
Conduire une politique d’orientation
- favoriser les conditions d’émergence du projet personnel de l’élève ;
- concevoir avec le conseil d’administration la politique d’orientation
en fonction des dispositions nationales et académiques, mettre en
oeuvre les procédures en y associant notamment les conseillers
d’orientation-psychologues ;
- piloter le suivi de l’insertion.
Participer à des réseaux d’établissements
- envisager l’orientation des élèves, les propositions de modifications
de la carte des formations, la mutualisation des innovations pédagogiques… au niveau d’un bassin de formation ;
- s’impliquer dans les activités de formation continue des adultes ;
- collaborer avec les autres établissements dans le conseil de ZEP.
Conduire une politique éducative
- suivre l’assiduité et la ponctualité (présences, absences) ;
- favoriser les modalités d’expression des élèves (conseil de la vie
lycéenne, conseil des délégués…) ;
Assurer, avec le gestionnaire, les relations indispensables avec la
collectivité territoriale de rattachement pour :
- le fonctionnement de l’établissement ;
- la maintenance, la modernisation et la sécurité des locaux.
20
La revue des Échanges
NUMÉRO 3, 2006
Organiser et maintenir le dialogue
- avec les associations de parents d’élèves ;
- avec les collectivités territoriales, les partenaires sociaux, les partenaires culturels et sportifs, les acteurs de l’économie locale (taxe
d’apprentissage…) ;
- avec les autres administrations de l’État (justice, police, gendarmerie…) ;
- avec les médias.
- savoir identifier et reconnaître la hiérarchie des normes (politiques
et administratives) ;
- connaître les champs de compétences du chef d’établissement et de
chacun de ses interlocuteurs habituels ;
- connaître les fondements juridique et administratif du fonctionnement de l’établissement et ses règles de fonctionnement budgétaire et financier ;
- savoir apprécier les conditions de mise en jeu (d’exercice) de sa responsabilité.
IV – Administrer l’établissement
Fixer des objectifs, déléguer des domaines d’activités à ses collaborateurs en fonction de leurs compétences et des textes qui régissent
leurs missions.
• Les collaborateurs du chef d’établissement : les cadres de l’établissement :
- Le proviseur-adjoint : personnel de direction, c’est le collaborateur
direct du chef d’etablissement (seules les fonctions d’ordonnateur
–domaine budgétaire- ne peuvent pas lui être déléguées) ;
- Le gestionnaire : personnel de l’administration scolaire, chargé de
la gestion matérielle et financière de l’établissement ; responsable
de l’organisation des services, du suivi des personnels techniciens,ouvriers et de service ;
- Le chef des travaux (lycée technologique et professionnel) : personnel enseignant, est responsable de l’organisation, du suivi des
enseignements technologiques, professionnels et du partenariat
avec le monde économique (entreprises,branches professionnelles) ;
- Le conseiller principal d’éducation : personnel d’éducation, est responsable du service « vie scolaire » (vie de l’élève au quotidien ; activités éducatives ; relations avec les familles).
Conduire l’élaboration du budget, le soumettre à la délibération du
conseil d’administration, l’exécuter (exercer la fonction d’ordonnateur).
Assurer l’ordre et la sécurité des élèves, des personnels et des
biens.
Conduire l’élaboration, la rédaction et l’actualisation du règlement
intérieur, être le garant de son application.
Organiser les élections aux différents conseils, commissions et
conférences, les préparer et les présider (notamment le conseil d’administration), assurer leur suivi (actes…).
Utiliser les outils pertinents pour :
- analyser le fonctionnement de l’établissement et en rendre compte ;
- préparer et présenter le bilan annuel ;
- prévoir l’évolution des effectifs (et des besoins en personnel subséquents) pour la rentrée suivante.
Les compétences requises du chef d’établissement
Savoir administrer l’établissement
- connaître l’organisation générale de l’État, de l’Éducation nationale,
de l’établissement ;
Savoir construire dans la concertation la politique pédagogique et
éducative de l’établissement
• Savoir construire cette politique (projet d’établissement) à partir
d’une connaissance :
· des modes d’apprentissage des enfants et des adolescents ;
· des comportements des jeunes et des adultes ;
· des parcours des élèves, de leurs forces et potentialités, de la nature de leurs difficultés ;
· des programmes d’enseignement, des référentiels ;
· des grands objectifs qui y sont attachés.
• Être capable, dans le cadre d’un dialogue avec l’encadrement
de l’académie (recteur, inspecteur d’académie, et leurs
conseillers techniques) d’établir les liens nécessaires entre des
orientations nationales et académiques et l’établissement
dans son contexte.
Savoir impulser, animer et conduire cette politique pédagogique
et éducative
Pour gérer et développer les ressources humaines de l’établissement, savoir :
- agir suivant la réglementation et la déontologie de la gestion de personnels ;
- repérer les forces et les difficultés chez les personnels ;
- valoriser, encourager, aider ;
- évaluer la manière d’exercer son métier, l’implication personnelle.
Pour mobiliser les individus et travailler en équipe, savoir :
- analyser, synthétiser, formaliser les éléments d’une politique, d’un
projet ;
- créer les conditions d’existence d’équipes, notamment de l’équipe
de direction, les animer, s’y impliquer ;
- écouter, prendre en compte les avis, négocier ;
- solliciter l’expertise ;
- déléguer (fixer des objectifs, demander un compte-rendu) ;
- décider.
Pour piloter un dispositif, savoir :
fixer des objectifs ;
analyser une situation, mesurer et formaliser les écarts ;
élaborer et mettre en oeuvre des stratégies ;
réguler (reformuler les problèmes pour qu’ils deviennent traitables),
évaluer ;
- mesurer le degré d’atteinte des objectifs, en rendre compte ;
- utiliser, de façon pertinente et en rapport avec le dispositif piloté,
des outils statistiques simples.
-
La revue des Échanges
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21
Pour communiquer, savoir :
- organiser la concertation et les échanges d’information ;
- expliciter des politiques ;
- valoriser les actions, les réussites et les résultats d’équipes et d’individus ;
- communiquer en cas de crise.
Rendre possible le travail collectif, le faciliter, le développer.
Savoir écouter et entendre ce qui est dit de la fonction, et de la
façon dont on l’exerce.
servations, de signes puisés dans différents outils et mis en relation
avec des référents multiples.
Le diagnostic permet de dégager les points forts et les points
faibles d'une situation en fonction des ressources et des contraintes
en présence.
C'est la première étape d'un processus d'évolution ou de changement, d'une réflexion prospective et stratégique.
Démarche
LE DISPOSITIF D’ÉVALUATION DES PERSONNELS DE DIRECTION
Le contexte
• Les établissements d'enseignement sont porteurs de l'ambition
et de la volonté de progrès du système éducatif.
• Ils sont le lieu où doivent naître et se développer l'innovation et
le changement.
Dans cette perspective, les personnels de direction doivent être
les moteurs de cette dynamique ; leur action doit s'inscrire dans la
perspective d'une politique résolument moderne de l'encadrement.
Le cadre
• Une formation initiale et continue à la fois ancrée sur la réalité
professionnelle et plus ambitieuse dans sa dimension universitaire.
• Un véritable dispositif d'évaluation fondé sur le principe d'une
lettre de mission fixant les objectifs pour une durée de trois à quatre
ans et établi sur la base d'un diagnostic de l'établissement.
Un questionnement
L'observation de l'établissement peut être amorcée par une série
de questions :
- quelle population d'élèves accueillons-nous ?
- quelles sont leurs ambitions ?
- avec qui travaillons-nous et de quelle façon ?
- quelles sont nos ressources ?
- comment nous inscrivons-nous dans les orientations du système
éducatif ?
- quelles valeurs voulons-nous privilégier ? Égalité des chances, épanouissement des élèves, efficacité scolaire.
- quels sont nos principes de fonctionnement ?
- quels sont les enjeux qui se présentent à nous ? Enjeux pédagogiques et éducatifs, enjeu social, enjeu organisationnel, enjeu institutionnel, enjeu collectif et managérial.
Cette première étape permet de dégager les atouts et les difficultés de l'établissement, de mettre en perspective des orientations,
de déterminer des objectifs d'action.
Les modalités
• Tout chef d'établissement nouvellement nommé doit, au cours
du 1er trimestre, établir le diagnostic de son nouvel établissement.
• Le recteur adresse une lettre de mission fixant les objectifs assignés au chef d'établissement.
• Il appartient au chef d'établissement d'établir de la même façon
la lettre de mission de ses adjoints.
• L'évaluation a lieu à l'issue d'une période de trois ans ; période
ponctuée chaque année du rapport d'étape établi par le chef d'établissement ; rapport sur le fonctionnement pédagogique et matériel du
lycée.
LE DIAGNOSTIC D’ÉTABLISSEMENT
Essai de définition :
C'est la description d'un état qui permet de :
- cerner la réalité du fonctionnement d'un établissement dans son
contexte, dans son histoire ;
- d'élaborer des hypothèses d'évolution à partir d'informations, d'ob-
22
Une description de l'établissement
Elle caractérise l'environnement géographique et économique,
le type d'établissement, ses particularités, ses spécificités, son histoire.
La vérification des hypothèses de travail
Elle impose une interrogation du tableau de bord de l'établissement.
Le tableau de bord compile l'ensemble des données objectives
quantitatives et qualitatives, qui concernent l'établissement.
On distingue trois catégories d'indicateurs :
Les indicateurs d'entrée : état des locaux, caractéristiques des
élèves (âges, évaluations), des personnels, des partenaires, des interlocuteurs.
Les indicateurs de gestion : utilisation des moyens d'enseignement, structures, budget, fonctionnement des instances participatives
et décisionnelles, fonctionnement de la vie scolaire.
Les indicateurs de sortie : Rrsultats aux examens et/ou
épreuves certificatives, flux d'orientation, suivi de cohorte, redoublements.
Ces indicateurs sont déterminés à partir de grands champs d'observation qui peuvent être classés comme suit :
Suite à la page 25
La revue des Échanges
NUMÉRO 3, 2006
PROFESSIONNALISATION DE LA
GESTION SCOLAIRE
DISPOSITIFS DE FORMATION DES
GESTIONNAIRES SCOLAIRES
DE LA GUINÉE
Le système éducatif constitue un élément important de la problématique nationale de développement économique et social d’un pays.
À cet égard, le Gouvernement de la République de Guinée, s’est
engagé dans un vaste programme de réhabilitation de son système
éducatif, pour le rendre plus performant et plus pertinent.
Actuellement, le système éducatif guinéen est piloté par trois
ministères qui sont le Ministère de l’Enseignement Pré-universitaire et
de l’Éducation Civique, le Ministère de l’Enseignement Technique et de
la Formation Professionnelle et le Ministère de l’Enseignement
Supérieur et de la Recherche Scientifique. Le système éducatif a fait un
bond prodigieux au cours des vingt dernières années, en faisant passer le taux de scolarisation de moins de 30% en 1985 à près de 80%
en 2005.
La République de Guinée, à l’instar de tous les pays en développement, s’est engagée à promouvoir l’éducation pour tous (EPT) à l’horizon 2015. Cette décision accueillie avec enthousiasme par les populations a suscité, en dehors des actions de l’État, la participation
accrue des différents partenaires (partenaires techniques et financiers,
société civile, communautés bénéficiaires) dans le processus de financement et de la gestion du système éducatif.
Cette volonté politique a amené l’État et les partenaires au développement à améliorer considérablement l’accès, notamment en
construisant de nombreuses salles de classe et en formant beaucoup
de maîtres.
La multiplication des écoles au primaire, au secondaire, au technique et professionnel, la création des universités dans les grands
centres urbains, ont conduit les autorités de l’éducation à changer de
paradigme en passant progressivement d’un mode de gestion centralisé à un mode décentralisé.
Ce changement est également dû à la volonté de démocratisation
de l’éducation, aux exigences de transparence des différents partenaires et à l’impérieuse nécessité de reddition des comptes des
acteurs.
FORMATION DES GESTIONNAIRES DU PRIMAIRE ET DU SECONDAIRE
Le dispositif de formation des gestionnaires est piloté par le service de la formation des personnels du Ministère de l’Enseignement Préuniversitaire et de l’Éducation Civique. Les gestionnaires de l’élémentaire et du secondaire sont recrutés sur le tas et se forment à la tâche.
Cependant ils bénéficient de formations à la carte à travers plusieurs
initiatives locales et/ou interventions des partenaires. On peut citer
entre autres :
· la formation des inspecteurs du primaire à Dakar ;
· la formation à distance des directeurs d’écoles primaires ayant 6
classes et plus par le RESAFAD avec la coopération française ;
· la formation des animateurs du secondaire (APES) avec la coopération canadienne ;
· la formation à distance des principaux et proviseurs des collèges et
lycées.
Il faut mentionner que l’Institut Supérieur des Sciences de l’Éducation de Guinée (ISSEG) a dans son mandat la formation des chefs d’établissement. Avec la révision actuelle des programmes de cette institution, la prise en charge de ce volet important de la formation des
chefs d’établissement du secondaire est envisagée.
DISPOSITIF DE FORMATION DES GESTIONNAIRES D’ÉTABLISSEMENTS
TECHNIQUES ET PROFESSIONNELS
Au niveau du Ministère de l’Enseignement Technique et de la
Formation Professionnelle, la formation des gestionnaires d’établissements techniques et professionnels consistait, jusque dans un passé
récent, à assurer le perfectionnement des personnels de direction des
écoles. Ce personnel, composé généralement d’enseignants choisis
en raison de leur expérience, ne bénéficiait pas de formation formelle,
mais plutôt des formations à la carte en fonction des nécessités du
moment.
En 1994, la lettre de politique sous sectorielle de l’enseignement
technique et de la formation professionnelle a mis un accent particulier sur le développement et la gestion des ressources humaines dans
le contexte de la décentralisation de la gestion scolaire.
Cette décentralisation doit permettre aux autorités du niveau
déconcentré de participer activement à la planification, au financement et à l’évaluation des activités de formation. Dans la perspective
du développement des relations école/milieu, il est également prévu
de mettre en place des partenariats et des conseils d’établissement
afin de rendre plus transparente la gestion des institutions de formation et privilégier une plus grande implication de la communauté dans
la vie de l’école.
L’ampleur des tâches que doivent désormais assumer les gestionnaires du système renouvelé de l’enseignement technique et
de la formation professionnelle exige qu’ils soient des professionnels.
À cet effet, des axes de développement ont été définis et des
besoins de formation identifiés pour les gestionnaires de manière
générale et pour les gestionnaires d’établissements en particulier.
La revue des Échanges
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23
Ces axes sont :
• la professionnalisation de la fonction de gestionnaire ;
• la participation des gestionnaires d’établissements à la gestion du
système ;
• la modernisation et la mise à jour continue des compétences ;
• la coordination de la formation continue et de la prévision des
besoins en personnel de gestion ;
• la promotion du leadership et du travail d’équipe ;
• la responsabilité sociale du personnel de gestion des établissements.
Pour ces différents axes, les formations préconisées sont les suivantes :
- Gestion générale
- Développement organisationnel
- Travail d’équipe
- Gestion des ressources humaines
- Gestion de la formation
- Gestion des ressources matérielles
- Gestion financière et comptable
- Gestion de la production
- Curriculum
- Relations publiques
C’est pour matérialiser l’importance que la réforme accorde aux
ressources dans le système renouvelé qu’une Direction Nationale a été
créée pour s’occuper spécialement des questions de formation des
personnels. Ainsi, la Direction Nationale de la Formation et du
Perfectionnement Professionnel des Personnels (DNFPPP) est le service du ministère qui s’occupe de la planification et de la coordination
des différentes activités de formation initiale et continue des personnels (enseignants et gestionnaires).
Au niveau opérationnel, l’École Normale des Professeurs
d’Enseignement Technique et Professionnel (ENPETP) est chargée de la
mise en oeuvre des différentes formations à travers ses départements
de la formation des gestionnaires et celui de la formation des formateurs.
Chacun de ces départements comprend les sections ci-après :
· la section des programmes ;
· la section innovation et recherche ;
· la section animation pédagogique.
Le département de la formation des gestionnaires qui est concerné
par la préoccupation de l’heure, est tenu par 13 professeurs qui ont
tous bénéficié d’une formation universitaire de second cycle en éducation. Quatre d’entre eux sont, en plus, titulaires d’un diplôme d’études supérieures spécialisées en administration scolaire.
Le régime pédagogique de l’École Normale des Professeurs
d’Enseignement Technique et Professionnel prévoit une formation initiale continue d’une année au département de la formation des gestionnaires, suivie de stages pratiques dans des établissements ou
entreprises associés. Pour le développement et le perfectionnement
des gestionnaires évoluant actuellement dans le système, une formation continue modulaire, sur mesure et/ou à la carte est prévue. Les
variantes suivantes sont prévues :
24
Variante 1 : Formation périodique de deux à quatre semaines à
l’ENPETP
Pendant la période qui sera retenue, le groupe de gestionnaires
ciblé par le module de formation vient suivre une formation intensive
théorique avec études de cas à l’ENPETP. À l’issue de la session, les
gestionnaires retournent dans leurs institutions avec des exercices et
des thèmes à traiter. Une mission de supervision du département de la
formation des gestionnaires fait ensuite une mission dans les établissements pour effectuer le suivi rapproché.
Variante 2 : Formation intensive de deux modules dans les chefslieux des régions
Les gestionnaires des différents établissements professionnels et
techniques de chaque région seront regroupés au chef-lieu pour recevoir une formation intensive. Un formateur ou une formatrice du département fera le déplacement pour la circonstance.
À la fin de la formation, le formateur laisse des exercices et des
recueils de textes des modules qui feront l’objet de formation suivante.
Variante 3 : Formation à distance
À l’image de la formation à distance en administration scolaire
donnée à une trentaine de cadres du ministère de l’ETFP, une formation
modulaire à distance peut être envisagée. Dans ce cas, le département
préparera des cours contenant des notions théoriques soutenues par
des recueils de textes de certains auteurs, ainsi que des exercices et
des études de cas pour une durée de un à deux mois à l’issue de laquelle une formation intensive dans les chefs lieux des régions ou au
département pourront être organisées. Des suivis sur le terrain seront
planifiés pour s’assurer que les formations ont été intégrées aux pratiques de gestion des gestionnaires.
En 1998, le Ministère de l’Enseignement Technique et de la
Formation Professionnelle, en partenariat avec l’Université du Québec
à Trois-Rivières, avait déjà assuré la formation en Administration
Scolaire d’un noyau de vingt-huit cadres du Ministère et des Établissements avant la mise en place de l’École Normale des Professeurs
d’Enseignement Technique et Professionnel. Cette formation, qui s’est
étendue sur trois ans, était une formation à distance de dix cours comprenant quinze modules chacun.
Chacun des cours était expédié de l’université aux étudiants qui
avaient quinze semaines de lecture, d’exercices d’application, de travaux de groupes et de travaux de sessions.
Après les quinze semaines, le professeur titulaire du cours se rendait en Guinée où il organisait pendant deux semaines un séminaire
intensif à l’issue duquel il faisait l’évaluation du cours.
L’avantage de la formation à distance est que les cadres inscrits au
programme continuent à travailler normalement. Ils n’interrompent
leurs activités qu’au moment des séminaires intensifs.
Les résultats visés par ce programme de formation étaient de donner des compétences aux gestionnaires de premier niveau pour qu’ils
puissent :
• mieux comprendre l'ensemble du processus de restructuration ainsi
que les différents axes d'intervention touchant la planification de
l'ET/FP, la gestion pédagogique et l'adéquation E/F/E, la gestion des
ressources humaines, administratives et financières, la gestion des
établissements de l'ET/FP, etc. ;
La revue des Échanges
NUMÉRO 3, 2006
•
·
·
·
implanter au sein de leur unité administrative la culture organisationnelle du système renouvelé de l'ET/FP ;
mettre en place les divers plans d'action issus des besoins de leur unité administrative et des besoins liés à la restructuration de l’ET/FP ;
instaurer, gérer et évaluer, au sein de leur unité administrative, les projets d'amélioration retenus en réponse à leur milieu environnant ;
développer des capacités à motiver et à superviser administrativement et professionnellement leur personnel enseignant et non enseignant.
CONCLUSION
Les dispositifs de formation des gestionnaires des établissements en République de Guinée ont consisté jusqu’à date à du perfectionnement
des directeurs d’écoles et à quelques formations diplômantes, dont celle des inspecteurs du secondaire et du primaire, et la formation en administration scolaire de trente cadres du METFP.
Vu la complexité des tâches auxquelles doivent désormais faire face les gestionnaires des établissements, le perfectionnement de ceux qui
sont en poste et la formation initiale des futurs, sont devenus des priorités.
La relance de cette formation à l’ISSEG et la création au sein de l’ENPETP du département de la formation des gestionnaires sont la preuve de
la volonté du système éducatif guinéen de professionnali-ser la fonction des gestionnaires d’établissements.
Suite de la page 22
Le contexte et le public scolaire
· Les élèves dans leur rapport à l'environnement
· Les parcours et les comportements scolaires
· La réussite scolaire
CONCLUSION / PROPOSITIONS D’ACTIONS
Les ressources humaines
· Les personnels toutes catégories confondues
· Les compétences manifestées sur le plan individuel et collectif
· L'implication dans la vie de l'établissement
· L'organisation de l'établissement
Le projet établissement
· Le degré d'adhésion de la communauté éducative et la façon dont il
est mis en oeuvre
· Les stratégies utilisées pour le construire
· Les activités conduites au sein de l'établissement
Les ressources matérielles
· La situation financière
· Les choix budgétaires
· La situation matérielle
· Les équipements
La relation de l'établissement à son environnement
· Le projet pédagogique au regard du projet académique et des
objectifs nationaux
· Les relations avec les élus et les responsables locaux et les politiques des collectivités locales
· La relation avec les milieux socio-économiques et la mise en oEuvre
de la formation continue
· Les relations entre établissements notamment au sein des bassins
d'éducation et de formation
Pour conclure, je dirai :
• que le métier de chef d’établissement est un métier riche à la
fois par sa diversité et par les responsabilités qu'il met en jeu.
• que le Directeur doit être - là où il se trouve – le moteur de la
dynamique d'innovation et de changement.
Quelques propositions d’actions :
• une ecriture/réécriture du référentiel de compétences en l’actualisant, l’adaptant aux réalités/contraintes/priorités nationales ;
• un recrutement national par voie de concours ;
• une formation initiale en alternance :
- en responsabilite dans un établissement en tant qu’adjoint avec
un « pair tuteur »
- en regroupement pour des sessions théoriques de formation répondant aux objectifs ci-après :
. représenter l’institution et agir comme cadre du système
éducatif
. développer une expertise au service de la politique éducative.
. piloter des organisations complexes
. évaluer et contrôler les dispositifs et les acteurs
. communiquer en situation professionnelle
. contribuer à la gestion des ressources humaines
• une formation continue de haut niveau
. réseaux d’échanges/savoirs avec les pairs et les universitaires
. analyse des pratiques professionnelles
C'est alors que l’«« expertise » des chefs d’établissement sera
reconnue et qu’ils pourront exiger la considération (morale et financière) que les personnels d'encadrement sont en droit d'attendre.
Cette considération passe notamment par l’octroi d’un véritable
statut de personnel de direction/encadrement avec une formation initiale et continue de haut niveau et une valorisation/accompagnement
des trajectoires professionnelles tout au long de la vie.
La revue des Échanges
NUMÉRO 3, 2006
25
MANUELS SCOLAIRES POUR TOUS :
GESTION DE LA FOURNITURE DES
MANUELS SCOLAIRES POUR
L’ENSEIGNEMENT DE BASE
UN CADRE DE DISCUSSION 1
ADRIAAN VERSPOOR
CONSULTANT INTERNATIONAL
EN ÉDUCATION
UNE CONDITION NÉCESSAIRE POUR LA QUALITÉ
Les manuels scolaires, quelle qu’en soit la forme, ont toujours
occupé une place essentielle dansla scolarisation. Maisc’estseulement
après l’invention de l’imprimerie qu’il a été possible de produire massivement des manuels scolaires. Cela a permis de s’engager dans la scolarisation de masse, d’abord dans les pays d’Europe occidentale puis
dans le reste du monde. Aujourd’hui, au sein des populations du monde
industrialisé, très peu seraient capables d’imaginer une école avec des
élèves ne disposant pas de matériels imprimés. Pourtant, dans de nombreux pays en développement, de telles écoles existent, malgré les
efforts considérables des parents, des gouvernements et des partenairesdu développement. Pour eux, remettre à chaque élève un jeu complet de manuels scolaires n’est encore qu’un idéal. Un récent examen de
l’expérience de la Banque mondiale en matière de fourniture de manuels
scolaires en Afrique a révélé que des ratios d’utilisation de livres en commun allant de 1 livre pour 2 ou 3 élèves demeuraient très répandus
(Banque mondiale, 2002), et que c’est encore pire dans des écoles
situées dans des zones reculées (Read et al. 2001). Un document d’appui du Forum de l’EPT tenu en 2000 résumait ainsi la situation :
La norme de l’approvisionnement en manuels scolaires s’est détériorée durant les années 1970 et 1980 en Afrique et dans une grande partie de l’Amérique latine et de l’Asie. En 1990, elle était très inférieure au
ratio souhaitable d’un livre par élève. Des matériels de lecture et autres
matériels didactiques supplémentaires étaient même plus rares, et souvent de mauvaise qualité. Au cours des années 1990, la situation s’est
améliorée dans quelques pays grâce, dans une large mesure, aux financements extérieurs d’organismes internationaux, aux gouvernements et
aux organisations de la société civile (OSC), mais globalement la fourniture de manuels scolaires est demeurée faible. Les manuels scolaires
étaient en particulier rares dans les zones rurales, et même s’ils étaient
disponibles, ils n’étaient pas utilisés de manière efficace. (Montagnes,
2001, p.1)
Le document de réflexion de la biennale (2003) de l’ADEA « Le défi de
l’apprentissage : améliorer la qualité de l’éducation dans l’Afrique subsaharienne » souligne que l’octroi adéquat d’intrants essentiels est une
condition nécessaire, mais non suffisante, de l’apprentissage. Les matériels didactiques, les manuels scolaires en particulier sont identifiés dans
l’enquête comme les intrants les plus prometteurs pour l’amélioration de
la qualité (Verspoor, 2006). Une étude initiale effectuée pour la Banque
mondiale (Heyneman, FarrelletSepulveda-Stuardo, 1981) etbasée sur des
études réalisées au Brésil, au Chili, au Salvador, en Équateur, en Inde, en
Iran, en Malaisie, en Thaïlande et en Ouganda, concluait ainsi :
26
L’expérience a montré qu’un investissement en manuels scolaires
génère des gains d’apprentissage ; et il est plus probable que cela résulte d’un investissement en manuels scolaires que d’autres interventions
en éducation, comme la formation des enseignants. (p.245)
D’autres études, de Fuller (1986), Fuller et Clarke (1994) ont pertinemment confirmé ces constatations. Ainsi que le notent Heneveld et
Craig (1996) :
L’impact de l’utilisation d’un manuel scolaire est bien plus grand
dans les pays africains en raison de leur pénurie, en comparaison de
l’abondance des manuels scolaires disponibles dans les pays industrialisés. Les faits empiriques montrent que les enfants des pays en
développement qui ont accès aux manuels scolaires et autres matériels
d’apprentissage apprennent plus que ceux qui n’y ont pas accès. Les
manuels scolaires sont le seul matériel didactique et sont particulièrement efficaces lorsque les enseignants les utilisent en suivant les guides
de l’enseignant. (p.20)
Michaelowa (2003) et Michaelowa et Wechler (2005) montrent dans
l’analyse du PASEC et d’autres données que le lien entre manuels scolaires et l’apprentissage scolaire est fort et constamment positif. Toutes
choses étant égales par ailleurs, les élèves des classes où chacun d’eux
a un manuel scolaire en français et en mathématiques ont des résultats
de 6,6 à 8 pointsde pourcentage supérieursà ceuxdesélèvesqui ne disposent pas de manuels scolaires. Une différence de 8 points de pourcentage correspond à environ 18 % desrésultatsmoyensetestdonctrès
significatif. Le coefficient des manuels scolaires de français est en général considérable et éloquent même dans les modèles où l’on a bien pris
soin d’éliminer le biais de l’origine socio-économique.
Lesrésultatsde cesrecherchesmontrentque pour chacune desprincipales matières, chaque élève devrait disposer des manuels scolaires.
Un changement permettant de passer d’une situation où il n’y a aucun
livre à une couverture totale de la classe par le ratio d’un livre par élève
accroît les performances de l’élève d’un écart-type compris entre 5 et
20 % en fonction des matières, des années d’études et des paramètres
de la régression. Cet effet est plus important dans les années d’études
inférieuresqu’auxniveauxplusavancésoù l’impactd’une utilisation partagée des manuels scolaires s’avère moins négatif. (Michaelowa et
Wechtler, 2006). Les effets sont également plus importants lorsque les
manuels scolaires en langues africaines accompagnent l’emploi de ces
langues comme outil d’apprentissage en particulier pour les premières
années d’études (Michaelowa, 2003).
Lesmanuelsscolairesne sontpasseulementefficaces, ilssontaussi
parmi les plus rentables dans le processus de l’éducation. Une étude
La revue des Échanges
NUMÉRO 3, 2006
coût-efficacité détaillée des intrants dans la scolarisation au Brésil
(Encadré 1) montre que les investissements en manuels scolaires s’autofinancent.
Dès que les écoles ont un niveau acceptable de manuels scolaires, la
différence tient à la manière dont ils sont employés dans la pratique de
l’enseignement. La simple mise à disposition des manuels scolaires ne
garantit pas leur utilisation (Lockheed et Verspoor [1991]), et ne garantit
pas non plus une amélioration des performances des élèves. Par
exemple, une étude récente réalisée au Kenya a révélé que les meilleurs
élèves étaient les principaux bénéficiaires d’une augmentation de l’offre
de manuels scolaires (Glewwe et al, 2000). Une formation appropriée
des enseignants à l’utilisation des livres s’avère nécessaire pour débloquer des gains en matière de performance d’apprentissage pour tous les
élèves.
Maisilseraiterroné de ne pasreconnaître l’importance desmatériels
didactiques autres que les manuels scolaires. Les guides des enseignants par exemple constituent un moyen comparativement peu coûteux et hautement efficace pour améliorer l’enseignement. Les bibliothèques, celle de la classe comme celle de l’école, les kits de mathématiquesetde sciences, ainsi que lestableauxmurauxpeuventsouventêtre
fournis à des coûts inférieurs par élève, en particulier s’ils peuvent être
partagés par plusieurs enseignants.
GESTION DE LA FOURNITURE DES MANUELS SCOLAIRES
Nonobstant le consensus presque unanime sur l’importance des
manuels scolaires à l’amélioration de la qualité de l’éducation et des
investissements se chiffrant en centaines de millions de dollars en vue
d’atteindre l’objectif d’établir des programmes viables de fourniture de
manuels, peu de pays ont atteint cet objectif. Dès 1985 déjà, Barbara
Searle, dans le General Operational Review of Textbooks, publié par la
Banque mondiale, a trouvé que sur neuf projets examinés, trois seulement ont permis de mettre en place des systèmes d’approvisionnement
en manuels scolaires qui fonctionnent. Elle a constaté que « tous les projets manifestent des lacunes sous tous les aspects de l’approvisionnement en manuels scolaires : livres de mauvaise qualité, systèmes de distribution inadaptés, incapacité de mettre en place et de maintenir les
calendriers de production, modalités de traitement des commandes de
papier inadéquates, activités de formation des enseignants sans correspondance avec l’édition des livres, mauvaise coordination entre l’élaboration des programmes scolaires et celle des manuscrits, et surtout incapacité de mettre en place des institutions capables de fournir des livres
de bonne qualité après l’achèvement du projet » (p.25).
Une récente publication qui examine les projets de manuels scolaires en Afrique subsaharienne appuyés par la Banque Mondiale de
1985 à 2000 (Banque Mondiale, 2000) a conclu que malgré les efforts
soutenus et la dotation de 350 millions de dollars pour les matériels
didactiques à travers près des trois-quarts de ses projets éducatifs « de
nombreux élèves de l’Afrique subsaharienne ne peuvent toujours pas
accéder aux manuels scolaires. Bien que les manuels scolaires ont été
produits, ils ne sont toujours pas disponibles pour les élèves » (p.5).
Dans la préface à la publication, le conseiller principal en éducation
de la Banque Mondiale pour la région Afrique note que même s’il existe
plus de concurrence en matière d’approvisionnement en manuels scolaires grâce à la libéralisation et à un plus grand choix contribuant à des
améliorations dans l’élaboration de manuscrits, l’édition, la production,
la distribution, ainsi que l’approvisionnement et une plus grande disponibilité des manuels scolaires rédigés dans les langues nationales pour
l’éducation primaire peuvent avoir favorisé l’apprentissage des élèves,
Encadré 1: Le rapport coût-efficacité des investissements dans les manuels scolaires
Une étude des écoles primaires rurales au Brésil
(Harbison et Hanushek 1992) a examiné la rentabilité de
divers facteurs en mesurant le coût par élève des différents intrants de l'école et en mesurant les résultats
(output) en termes de points obtenus aux contrôles de
langue et de mathématiques, ainsi que les taux également d’abandon et de redoublement.
L'efficacité de l'investissement dans le matériel didactique léger (les manuels et les outils d'écriture) a été
comparée à l'investissement dans le matériel lourd
(constructions et équipements des écoles), en termes de
changement réalisé dans les pourcentages des taux
d’abandon et de redoublement pour une dépense
donnée. La rentabilité a été mesurée au moyen de deux
indicateurs : nombre d’années gagnées et dollars épargnés par l'investissement. Le montant des dollars épargnés est obtenu en se multipliant les années économisées par le coût moyen annuel par élève. Les résultats sont surprenants. Un dollar investi en matériel léger
(les manuels et les outils d'écriture) rapporte 9,67 dollars en gain d'efficacité directe d'amélioré généré par
l’amélioration des flux à travers le système.
L'investissement dans le matériel léger, y compris les
manuels, était bien plus rentable que l'investissement
dans le matériel lourd.
Source : Woodhall (1997)
trois principaux défis restent : « d’abord, des tentatives d’établir un
financement durable pour l’approvisionnement en manuels scolaires
grâce à des projets de récupération de divers types de coûts ont échoué.
… Dans la plupart des cas, cependant, une solution durable serait vraisemblablement que les gouvernements prévoient une ligne budgétaire
adéquate dans leur budget de l’éducation pour ces crédits essentiels de
la même manière qu’ils le font pour le paiement des salaires des enseignants. Ensuite, de nombreux pays ont besoin d’améliorer leurs
systèmes de distribution pour veiller à ce que les manuels scolaires
qu’ils fournissent parviennent au niveau des écoles de manière ponctuelle et sûre. Enfin, les enseignants doivent être formés à l’utilisation
efficace des manuels scolaires » (p. v).
Pernille Askerud (2000) a publié un article intitulé Textbooks for
Developing Countries: Why Projects Fail avançant que : « la défaillance
pour soutenir les projets de manuels scolaires est la plupart du temps
due à un échec de reconnaître les aspects industriel, professionnel et
économique de l’approvisionnement en livres et à l’absence de prise de
décision nationale et de gestion globale… Dans de nombreux pays en
développement, la publication de manuels scolaires est le monopole du
gouvernement, ce qui conduit à une division artificielle entre les publications éducative et commerciale. En conséquence, les projets de
manuels scolaires ont non seulement miné la publication éducative,
mais ont également limité le développement de la publication commerciale. Les monopoles gouvernementaux de la publication éducative
La revue des Échanges
NUMÉRO 3, 2006
27
réduisent les opportunités d’investissements. De même, ils diminuent
l’impact de nombreux projets de manuels scolaires sur l’environnement
général de la lecture. … Trop souvent, les éditeurs éducatifs, qui sont au
cour de l’industrie de l’édition moderne, ont été exclus » (p. 3).
La conclusion de ces publications est univoque : l’échec de l’approvisionnement aux écoles avec une fourniture appropriée de matériels
éducatifs est d’abord et avant tout un échec de la gestion du secteur. La
publication de la Banque Mondiale observe que dans de nombreux cas :
« … MOE a fait preuve d’incapacité pour exécuter toutes les
demandes inscrites dans le cadre d’une conception trop ambitieuse. Le
problème a été particulièrement aigu pour de petits pays avec des fonctionnaires ayant des charges de travail excessives. Des pays n’ont pas
respectés leurs engagements financiers avec l’Agence Internationale de
Développement (AID) demaintenir les stocks financés par la banque et
d’autres donateurs. … La mise en application de projets a également
souffert plusieurs modifications dans le gouvernement et dans le personnel des projets. Des difficultés ont commencé dans la conception de
certains projets en raison de l’échec pour impliquer de manière adéquate des parties prenantes locales dans la planification » (p.3).
L’amélioration de la gestion de l’approvisionnementen manuelsscolaires appelle l’action dans tous les secteurs thématiques sélectionnés
pour les Assises francophones de la gestion scolaire. (Encadré 2).
Encadré 2:
Gestion du secteur éducatif
et fourniture de manuels scolaires
La bonne gouvernance : l’interférence politique, la
négligence et la corruption peuvent aboutir à une offre
inefficiente (Unesco, 2004)
La décentralisation : des systèmes axés sur la demande
fournissent aux écoles des ressources et du choix dans
un environnement de notification concurrentiel
La mobilisation des ressources : la dotation budgétaire
pour les manuels fait partie intégrante des dépenses
récurrentes et, à ce titre, doit être programmée de
manière fiable sur le long terme ; le coût des manuels
doit être intégré dans le choix des programmes scolaires
La promotion des personnels dans les organismes gouvernementaux et dans l’industrie locale de l’édition est
une priorité dans beaucoup de pays.
LEÇONS TIRÉES
Trois tendances significatives peuvent être relevées dans l’approvisionnement en manuels scolaires durant les années 1990 :
• la libéralisation économique avec un plus grand rôle pour le secteur
privé ;
• la décentralisation de la sélection et de l’approvisionnement ;
• l’intégration de l’approvisionnement en manuels scolaires dans des
programmes d’investissement du secteur.
Dans de nombreux cas, ces tendances ont reflété les développements dans l’économie et la conception des programmes de développement du secteur ainsi qu’une réponse aux leçons de l’expérience acquise pendant les décennies antérieures. La plus importante de ces leçons
est ainsi résumée :
28
L’édition publique est en général inefficiente
Dans la plupart des pays africains, l’État a dominé l’édition et la distribution des manuels scolaires durant les deux premières décennies de
leur indépendance. Dans une grande partie de l’Afrique francophone,
une institution spécialisée, l’IPN (InstitutPédagogique National) étaitresponsable de l’élaboration des directives éditoriales, de la rédaction des
manuscrits ainsi que de la mise en service, la publication, l’impression
et/ou l’approbation des manuels scolaires. Au Sénégal et au Togo, le
ministère de l’Éducation avait une responsabilité directe. Dans l’Afrique
anglophone, comme le Kenya etla Tanzanie, desinstitutspédagogiques,
des maisons d’édition publiques et des sociétés d’État chargées de la
distribution avaient le monopole. Des financements extérieurs pour les
imprimeursliésà l’Étatétaientcourants(Read, 2001). Desmonopolesont
généralement eu des conséquences indésirables emportant le marché
pour des éditeurs privés et des vendeurs de livres là où ils existaient ou
interdisant leur émergence là où il n’y en avait pas. Des donateurs ont
constamment reconnu les limites de l’édition publique. Une publication
de l’agence SIDA (Agence suédoise pour le développementinternational)
a observé que, dans les programmes qu’elle a appuyés :
« … en général l’édition gouvernementale n’a pas fonctionné de
manière satisfaisante. Les sociétés d’État sont fréquemment handicapées en raison d’une bureaucratie inefficace, de l’ignorance des coûts
réels ou de l’absence de motivation de la part du personnel » (cité dans
Banque Mondiale, 2001, p. 17).
La libéralisation économique de plus en plus importante a affecté le
secteur du livre en Afrique. Aujourdhui, très peu des États africains
dépendent entièrement d’organismes publics ou parapublics pour produire des manuels scolaires. L’édition de manuels scolaires est maintenant progressivement exécutée en collaboration avec des partenariats
publics et privés, dans lesquels l’État conserve souvent la responsabilité
initiale de l’élaboration des manuels scolaires, tout en cédant partiellement ou totalement des services d’édition, y compris l’écriture, l’édition,
la conception, la production et la livraison au secteur privé grâce à un
appel d’offre national ou international concurrentiel. Cette relation
public-privé assure l’efficacité du secteur privé concurrentiel, maisgarantit, au final le contrôle public.
Un système durable et compétitif d’approvisionnement en manuels
scolaires et autres matériels didactiques nécessite une industrie éditoriale qui puisse créer, produire etfournir desmatérielsavecdesprincipes
commerciaux de récupération des coûts. Pour établir un environnement
facilitant l’édition locale, des gouvernements (par ex. Ouganda,
Tanzanie, Malawi, Ghana et Botswana) ont élaboré des politiques nationales d’approvisionnement en manuels scolaires. Les politiques maximisent l’implication possible du secteur privé dans tous les aspects du
système d’approvisionnement, y compris l’édition, l’impression et la distribution. Dans plusieurs de ces pays, le résultat est une remarquable
revitalisation de l’édition privée et des infrastructures de vente des livres.
Dansquelquespays(par ex. le Kenya), lesancienséditeursmonopolistes
d’État font actuellement concurrence aux maisons d’édition privées.
Les partenariats public-privé nécessitent des systèmes prévisibles et des financements sûrs
Le financement d’une offre régulière de manuels scolaires reste largement tributaire des financements extérieurs. Malheureusement, ces
financements ont été souvent épisodiques, impliquant des approvisionnements très importants de livres qui sont financés irrégulièrement et ne
correspondant pas aux règles nationales - ou même d’organismes -
La revue des Échanges
NUMÉRO 3, 2006
d’approvisionnement. De telles interventions par à-coups génèrent
grandes tentations quant aux interférences politiques et à la corruption,
favorisent les éditeurs multinationaux au détriment des locaux, et aident
rarementau développementetau maintien de systèmeslocauxd’édition
éducative et de distribution. Read et al (2001) incluent une étude de cas
de la Guinée qui est un exemple des pièges imprévisible liés à la coopération avec de nombreux donateurs qui ont des politiques et des procédures totalement différentes qui se greffent sur des systèmes nationaux
d’édition faibles ou défaillants. Dans d’autres pays (comme le Malawi),
ces politiques ont considérablement porté préjudice à l’industrie naissante de l’édition.
Pour établir une source stable de financement national pour l’approvisionnement en manuels scolaires, de nombreux pays (et près de 60 % de
projets financés par la Banque Mondiale) ont réalisé des plans qui visent à
recouvrer toutou partie descoûtsde l’approvisionnementen manuelsscolaires grâce aux ventes ou à des cotisations annuelles. Les recettes étaient
verséesdansun fondsrenouvelable pour être utiliséesau remplissage des
stocksde manuelsscolaires. Même descotisationsfaibles, cependant, ont
représenté des sommes à payer trop importantes pour de nombreuses
familles, l’expérience du Sénégalle confirme. Plusieurstentativesrelatives
au recouvrementdescoûtsontéchoué en raison de la mauvaise gestion ou
de la défaillance des pouvoirs publics pour affecter des financements pour
le partage des coûts. D’autres tentatives ont été abandonnées,car elles
étaient trop compliquées ou inéquitables. Seuls quelques projets survivent et la plupart des pays se sont engagés dans l’approvisionnement de
textes gratuits dans l’éducation primaire.
La durée de vie des livres est courte. Un manuel scolaire qui est utilisé avec soin dure rarement plus de trois à cinq ans. Mais les manuels
scolaires qui sont imparfaitement reliés ou sujets à une forte utilisation,
ne durent pas aussi longtemps. L’approvisionnement annuel, en conséquence, doit être effectué pour remplacer les exemplaires perdus ou
endommagés. Les exemplaires sont également disponibles annuellement pour répondre aux augmentations dues aux inscriptions. Le financement stable nécessitera des dépenses destinées à l’approvisionnement en manuels scolaires aussi bien des dépenses systématiques que
récurrentes qui exigent des dotations annuelles pour assurer une fourniture adéquate de manuels scolaires (et autres matériels didactiques) en
classe. Dans la plupart des cas, néanmoins, une solution durable exigera probablement que les gouvernements inscrivent l’approvisionnement
approprié dans leurs budgets de l’éducation pour ces importants crédits
de la même manière qu’il existe une ligne budgétaire pour le salaire des
enseignants.
Les organismes de financement peuvent aider par une meilleure
coordination de leurs activités et une reconnaissance de l’importance du
développement d’une industrie éditoriale nationale en vue d’approvisionner régulièrement les écoles en manuels scolaires qui reflètent les
conditions et les expériences locales. Des approches sectorielles, des
financements par panier commun et l’appui budgétaire sont favorables à
la création d’un environnementpour la mise en place de politiquesnationales du livre avec des financements prévisibles et fiables.
L’approvisionnement en manuels scolaires bénéficiera de cette tendance vers les programmes d’investissements du secteur sur un horizon de
dix ans, qui permet également une meilleure évaluation de la révision
des programmes d’enseignement et des processus d’élaboration des
manuels scolaires. L’élaboration d’un manuel scolaire nouveau ou sa
révision prend trois ans ; cela se rapproche des quatre ou cinq ans de la
période d’implantation.
L’approvisionnement orienté par la demande est prometteur s’il
est soigneusement planifié et mis en oeuvre
La décentralisation de la sélection et le choix de fourniture des
manuels scolaires ont transformé le système de l’approvisionnement en
manuels scolaires en plusieurs systèmes dans les pays anglophones.
Dans les sociétés africaines, la décentralisation a été poussée par un
mouvementgénéralversla démocratisation etla participation. Maispour
les manuels scolaires, il s’agissait aussi dans de nombreux pays d’une
perception croissante que le système existant ne fonctionnait pas de
manière satisfaisante. Les subventions latentes masquaient les coûts
véritables. Les spécialistes en éducation non qualifiés en matière de
techniques d’imprimerie et d’édition ont souvent pris des décisions qui
pouvaient être pédagogiquement appropriées mais qui étaient inutilement coûteuses. Les livres étaient produits dans des formats peu économiques et à la conception peu rentable. Les systèmes de distribution ont
échoué car les fonds étaient inadéquats pour le transport des entrepôts
régionaux vers les écoles. Les fonctions étaient parfois dispersées entre
plusieursservicesou unitésavecpeu de coordination. Le personnelétait
peu motivé pour respecter les plans de travail ou pour économiser. En
même temps, le désir existait d’impliquer les enseignants, parents,
élèves, associations de parents-enseignants et les organisations nongouvernementales dans les processus de prise de décision. Dans les
pays disposant de faibles structures pour la communication, les décisions prises au niveau central ne sont pas toujours basées sur les nécessités perçues au niveau institutionnel ou du district, et sont souvent
prises longtemps après la mise en oeuvre sur le plan local.
Le passage de la gestion centralisée à la gestion décentralisée est
complexe, il nécessite une planification judicieuse et un phasage progressif. De plus en plus d’éléments de la gestion locale de l’éducation,
utilisant des organismes communautaires ou des associations parents
d’élèves ont été introduits dans la gestion de l’approvisionnement en
manuels scolaires. Avec l’accroissement de la responsabilité, les communautés vont devenir plus actives pour prendre en charge et maintenir
leurs ressources éducatives et assurer leur propre utilisation. La surveillance et l’implication locales sont considérées comme des méthodes
efficaces pour contrôler les abus ; l’implication des parties prenantes,
cependant, a échoué lorsqu’elles ont été considérées insignifiantes.
La décentralisation est une phase importante vers le financement
poussé par l’école (ou la demande). Dans ces systèmes, les écoles disposent d’un pouvoir d’achat obtenu grâce à des fonds réservés (Kenya),
des bons d’achats sous forme de bons de commande locaux (Kenya et
Ouganda) ou de bons de commande pour l’approvisionnement centralisé (Malawi). Le financement poussé par l’école peut aussi intervenir
lorsque les parents acquittent des cotisations (livres) qui sont retenues
au niveau scolaire et utilisées pour acquérir des manuels scolaires et des
matériels éducatifs (Gambie et Lesotho). L’avantage de ces systèmes de
financement par l’école est que la fourniture de manuels scolaires peut
mieux répondre aux besoins définis que ceux des systèmes de gestion
poussés par l’approvisionnement centralisé.
La décentralisation de la sélection au niveau local ou du district permet également l’introduction de multiples choix dans les manuels scolaires. Cela a été mis en oeuvre dans plusieurs pays (par ex. Kenya,
Ghana et Ouganda) et est en cours de planification dans d’autres. Ce
système permet aux enseignants ou aux fonctionnaires des districts de
choisir les livres les mieux adaptés aux besoins et expériences de leurs
élèves, souvent à partir d’une liste approuvée. De nombreux éducateurs
et éditeurs affirment qu’un système à multi-manuels scolaires est par
La revue des Échanges
NUMÉRO 3, 2006
29
nature préférable. Un choixmultiple permetaussi auxenseignants, directeurs d’école ou fonctionnaires des districts, de sélectionner les livres les
mieux adaptés pour répondre aux nécessités et expériences des élèves.
Cela exige une formation spécifique des enseignants à l’emploi des
ouvrages et de leur sélection.
Un choix multiple implique en pratique l’emploi d’éditeurs commerciaux : il les encourage à améliorer leurs produits, à innover et à rénover
les manuels scolaires et les guides des enseignants. Mais cela fragmente aussi le marché et réduit les économies d’échelle.
La distribution reste un défi majeur
Pourvoir de manuels scolaires les écoles et les enfants est le problème majeur de nombreuxpaysafricains. Read (2001) présente lesproblèmes des systèmes publics de distribution qui ont prévalu – avec
quelques notables exceptions – dans la région. Les études de cas de la
Guinée et du Niger indiquent que les pertes nettes de la distribution de
livres s’élèvent entre 50 et 60 %. Les questions relatives à la distribution
de manuels scolaires ont souvent été sous-estimées. Si le coca-cola, la
bière, les allumettes, le riz et d’autres produits de consommation peuvent être distribués dans chaque village d’Afrique, alors pourquoi pas les
manuelsscolaires? Cesdernierssont, cependant, différentsdesproduits
de consommation moins coûteux et ont leurs propres exigences logistiques spécifiques (Encadré 3). La livraison de livres appartenant à l’État
depuis un entrepôt central à des écoles particulières nécessite une structure organisationnelle, une infrastructure appropriée et suffisamment
d’argent. La dotation efficace demande également des informations
actuelles et exactes sur les inscriptions présentes et futures par école,
année d’études et sujet, ainsi que sur les stocks de manuels scolaires.
Ces exigences ne sont pas toujours obtenues, et nombre de livres qui
sont produits ne parviennent pas à l’école. De très nombreux manuels
scolaires sont volumineux et lourds à transporter ; ils peuvent être facilement endommagés en raison d’une manipulation peu soigneuse, d’exposition à l’eau, d’incursion de rongeurs et d’insectes, de moisissure et
de vols. Leur stockage – en centrale, dans des entrepôts intermédiaires
situés dans des bureaux régionaux et de district, et dans les écoles –
nécessite des locaux sûrs et du personnel formé.
Encadré 3 : Manuels scolaires et Coca-cola :
Une comparaison
• L’achat de Coca-cola est quotidien, celui des manuels annuel
• L’investissement dans un stock de manuels dépasse de loin la
capacité de financement des commerçants du village
• L’achat de Coca-cola ne dépend jamais des aléas du financement
public
• Les manuels sont plus susceptibles de subir des intempéries ou
des destructions en boutique que ne le sont les boîtes ou les bouteilles de Coca-cola
• Coca-cola distribue quelques produits de marque ; une école primaire peut requérir plus de 50 titres différents de manuels, et de
l’élève et de l’enseignant, exigeant des systèmes de classement et
de manutention bien sophistiqués
• Les manuels doivent passer des années et exigent une conservation et une protection contre la perte ou la détérioration
• Le personnel de Coca-cola est bien formé et encadré pour les activités qu’ils mènent quotidiennement ; la distribution des manuels
est plutôt saisonnière
Source: Read (2001)
30
Ces conditions sont fréquemment absentes. Le cas du Niger cité par
Read (2001) confirme que les principaux problèmes sont non seulement
le résultat d’un financement inadéquat et de conditions géographiques
et climatiques difficiles, mais peut-être surtout et en particulier la
médiocre organisation :
• mauvaise planification ; les commandes sont souvent effectuées en
retard et sans rapport avec les inscriptions relevées ;
• pasde financementpour lescamionsqui distribuentleslivresdansles
divisions régionales ;
• mauvaise sécurité durant le transport et dans les entrepôts ;
• mauvaise sécurité et absence d’installations de stockage dans les
écoles ;
• marché noir parallèle des manuels scolaires ;
• directeurs d’école sans fonds pour la collecte des livres au niveau du
district.
Ilestsouventdifficile d’aborder cesproblèmesdansdessystèmesde
distribution d’État où le paiement ne dépend pas des résultats en termes
de quantités correctes délivrées aux écoles en bonnes conditions. En
conséquence, leserreursne sontpascorrigéesetlesécolesse retrouvent
avec des stocks qui ne correspondent pas à leurs nécessités. Les
systèmesde distribution publicspassentrarementdescontratsavecdes
transporteurs et des sociétés d’entreposage privés sauf en dernier ressort. Et si cela surgit, c’est souvent trop tard, et avec des budgets insuffisants non contrôlés. Il est surtout possible que les systèmes de distribution publicsontsérieusementporté préjudice auxfragilesréseauxdes
vendeurs de livres privés qui existaient il y a quelques décennies dans
plusieurs pays africains. La (re)construction de ces réseaux demandera
du temps, de la formation et un accès aux crédits.
Ces problèmes ont conduit des pays à examiner des alternatives à la
distribution publique. Plusieurspays, comme la Guinée, ontréussi à intégrer la responsabilité de la livraison à l’école ou au niveau du districtdans
lescontratsd’édition. Le directeur d’école etlesreprésentantsdu comité
de gestion de l’école peuvent ainsi contrôler et signer la livraison. Dans
d’autres pays comme l’Angola et la Zambie, les organisations non gouvernementales ont été impliquées dans la distribution. Les vendeurs de
livres privés sont (ré)apparus au Kenya et en Ouganda.
La qualité des manuels scolaires exige des intrants professionnels de haute qualité
Les bons manuels scolaires sont écrits par des auteurs familiers des
programmes scolaires, ayant une expérience de l’enseignement et
compétents dans l’écriture destinée auxélèves. Ces personnes sont peu
nombreuses dans le monde. La plupart des manuels scolaires - très souvent ce sont des séries couvrant plusieurs années d’études - dans les
pays industrialisés sont écrits par des équipes. Peu de pays africains disposent en nombre suffisant d’auteurs ayant toutes ces compétences. De
même, les éditeurs, illustrateurs et concepteurs spécialistes expérimentés sont souvent en petit nombre. Pourtant, ils sont critiques pour le
développement des manuels scolaires de qualité. L’interaction entre
éducateurs et spécialistes de manuels scolaires durant ce processus est
essentielle pour garantir l’équilibre entre ce qui est souhaitable sur le
plan éducatif et ce qui est faisable et disponible sur le plan économique.
Les décisions relatives aux programmes d’enseignement et à la conception des manuels scolaires impliquent des coûts importants, qui nécessitent d’être examinés attentivement par des équipes de spécialistes travaillant en collaboration. Le renforcement des capacités et la formation
La revue des Échanges
NUMÉRO 3, 2006
doivent être un élément clé de tous les programmes des manuels scolaires.
Une décision centrale des programmes d’enseignement concerne la
langue de l’enseignement. Plusieurs pays se sont engagés à introduire
les langues africaines comme moyen d’instruction au moins durant les
premières années d’études. Il existe peu de doute sur l’efficacité éducative de cette politique (UIE/ADEA, 2006) ; les contraintes sont en grande
partie pratiques, y compris des questions sur la publication de manuels
scolaires en langues africaines.
Plusieursétudes(récapituléesdansUIE/ADEA, chapitre 8) suggèrent
que le coût de production des manuels scolaires en langues africaines
est légèrement plus élevé pour l’impression d’au moins 10 000 livres. Le
problème de cout principal concerne l’édition de manuels scolaires en
languesafricainesqui ne sontpaslargementparlées. La Namibie a traité
cette question par inter financement du coût des manuels scolaires pour
les langues à petits tirages des bénéfices issus des manuels scolaires à
grands tirages. Il existe d’autres contraintes comme un document récent
d’un éditeur namibien l’a signalé : orthographe inconstante ou incertaine, absence de logiciels pour la composition, vérification de l’orthographe et césure dans les langues africaines, incertitude politique et disponibilité du personnel formé pour l’édition et la correction d’épreuves
(Reiner, n.d). La conclusion estque s’ilexiste une politique de soutien qui
fournit une situation équitable, l’édition de langues africaines peut être
considérée comme une activité viable, rentable et durable et les manuels
scolaires en langues africaines seront au centre du développement de ce
marché.
tation, passant de 24% à 33%. Son travail propose une analyse de la
composition des dépenses récurrentes enregistrées au titre des salaires
du personnelnon-enseignantsur un échantillon de paysafricains, etévalue si le partage de 33% suggéré est suffisant pour couvrir tous les
besoins nécessaires pour garantir qu’une grande majorité d’élèves
acquièrent les connaissances et les compétences prévues dans le programme d’enseignement. Ses principales conclusions sont résumées
par Verspoor (2006) comme suit :
• Dépenses récurrentes non-salariales (estimées à 24% du montant
total des dépenses récurrentes, soit 9$US par élève ) 2 sont réparties
en quatre catégories : salaires de l’administration, autres coûts récurrents de l’administration, salaires du personnel non-enseignant au
niveau de l’école, et autres coûts récurrents au niveau de l’école
(Tableau 1). Les autres coûts récurrents au niveau de l’école ne représentent que 6 pour cent (environ 1,80$US) du montant total des coûts
récurrentspour les8 paysayantfaitl’objetde l’analyse (Bénin, Burkina
Faso, Madagascar, Mauritanie, Mozambique, Niger, Togo, Rwanda).
• Une liste des« contributionsde base » au niveau de l’école (Tableau 2)
nécessaires pour assurer un enseignement d’une qualité acceptable3
propose une estimation d’un « niveau minimum de contribution » et,
dans un second temps, d’un « niveau souhaitable de contribution ».
Un coût unitaire de 16 à 19 $ est retenu pour le « niveau minimum de
contribution » et de 33 à 37 $ pour le « niveau souhaitable de contribution ». En incluant les coûts nécessaires à la gestion du système4
(c’est-à-dire les coûts récurrents qui vont au-delà du niveau de l’école)
le total du « niveau minimum de contribution » atteindrait 26à 29 $ et
celui du « niveau souhaitable de contribution » 43 à 47$.
Le financement des manuels scolaires et du matériel éducatif
• Les 33% retenus par Bruns et al (2003) représentent une dépense
dans le cadre de l’IFT (Initiative Fast-Track)
moyenne par enfant de 23 $ en 2015. Ce chiffre peut paraître proche du
Les améliorations qualitatives des perspectives d’apprentissage
« niveau minimum de contribution » mais se situe sans aucun doute
s’avèrent représenter de plus en plus un élément essentiel dans la proloin du « niveau souhaitable de contribution » (ce dernier représenterait
gression vers l’accomplissement des objectifs de l’EPT (Éducation pour
48% du montant total des dépenses récurrentes au lieu de 33%). De
Tous). Cela demande un effort considérable pour assurer l’amélioration
plus, les 33% sont supposés inclure également les ressources nécesde la fourniture du matériel éducatif. Le travail récent réalisé par Rasera
saires au financement des actions spécifiques destinées à garantir des
(2003) a reconsidéré l’hypothèse de Bruns et al (2003) qui prévoyait l’utiopportunités d’enseignement pour environ 10% de la totalité des
lisation d’un objectif de référence d’ici à 2015 pour que le partage des
enfants considérés comme particulièrement en danger5.
dépenses publiques récurrentes relatives à l’enseignement primaire
• La situation serait encore plus difficile si les 5% du taux de croispour les salaires du personnel non-enseignant enregistre une augmen- sance annuelle avancés par Bruns et al (2003) s’avéraient représenter en
réalité seulement 3%. La valeur
absolue des 33% ne représenteLe financement des manuels scolaires et du matériel éducatif dans le cadre de l’IFT (Initiative Fast-Track)
rait alors que 17$ d’ici 2015,
Tableau 1 : Allocation des dépenses non salariales
c’est-à-dire un montant bien en
dessous du « niveau minimum
Écoles
Administration
Total
de contribution ».
En somme, il est fort proHors
Coût
Total
Hors
Coût
Total
Hors
Coût
Total
bable que les allocations
salaire d’expl.
salaire d’expl.
salaire d’expl.
réservées au matériel éducatif
Bénin
0,0
20,5
20,5
28,8
50,7
79,5
28,8
71,2
100
ainsi que les autres coûts d’exBurundi
39,0
16,0
55,0
30,0
15,0
45,0
69,0
31,0
100
ploitation au niveau de l’école
Burkina Faso
15,0
18,0
33,0
32,0
35,0
67,0
47,0
53,0
100
augmentent considérablement
Gabon
29,0
29,0
58,0
30,0
12,0
42,0
59,0
41,0
100
si l’on procure aux élèves un
Madagascar
11,2
27,1
38,3
32,1
29,6
61,7
43,3
56,7
100
nombre approprié de manuels
Mauritanie
27,1
17,0
44,1
42,0
13,9
55,9
69,1
30,9
100
scolaires et d’autres supports
Mozambique
7,3
13,4
20,7
23,3
56,1
79,3
,30,5
69,5
100
éducatifs. De plus, la sélection
Niger
29,1
9,7
38,8
40,0
21,2
61,2
69,1
30,9
100
de ces supports et la définition
Rwanda
6,8
53,8
60,6
4,5
34,9
39,4
11,3
88,7
100
des caractéristiques de producTogo
0,0
6,1
6,1
68,1
25,7
93,9
68,1
31,9
100
tion devront être envisagées en
Moyenne
16,5
21,1
37,1
33,1
29,4
62,5
49,5
49,5
100
considérant attentivement leur
La revue des Échanges
NUMÉRO 3, 2006
31
Tableau 2: Intrants scolaires pour un enseignement d’une qualité acceptable
Liste des contributions
« de niveau minimum »
Coût par élève
($/an)
Liste des contributions
« de niveau souhaitable »
Coût par élève
($/an)
Livres scolaires
Un livre pour deux enfants dans les quatre
matières principales (utilisables
pendant trois ans)
1,70
Un livre par enfant
dans six matières (3 ans)
5,00
Matériel de classe
Kit Unicef utilisé à cet effet en RD Congo
(y compris les crayons, stylos, etc.)
3,50
Kit Unicef plus livre de travail,
rapporteur de 180 degrés,
équerre et compas.
8,00
Dictionnaire
Un par classe de 40 élèves (5 ans)
0,03
Deux par classe de 40 élèves (5 ans)
0,05
Bibliothèque de classe
40 livres par classe (1 par élève) (10 ans)
0,20
120 livres par classe (10 ans)
0,60
Bibliothèque scolaire
Aucune
0
100 livres (taille de l’école :
300 élèves) (10 ans)
0,70
Petit matériel
Aucun
0
100 feuilles de papier par élève et par an
1,5
Guides pour enseignants
Un guide par enseignant
pour 6 matières (7 ans)
0,10
Un guide par enseignant
pour 6 matières (7 ans)
0,10
Matériel scolaire collectif
Kit Unicef utilisé à cet effet en
RD du Congo : 5$ par kit et par classe ;
153$ par kit supplémentaire
pour l’école (3 ans)
0,90
Kit Unicef utilisé à cet effet en RD du
Congo, mais à un prix plus élevé: 11 $
par kit et par classe ; 348 $ par kit
supplémentaire pour l’école (3 ans)
2,10
Téléphone
100$ par école et par an
0,3
100$ par école et par an
0,3
Maintenance
1 pour cent par an du coût
de construction de 8000 $
2,00
idem
2,00
Autres (utilitaires, matériel
de bureau, etc.)
20 pour cent des dépenses totales
moins salaire et coût d’administration (12 $) 3,20
idem
5,30
Directeur d’école
Libre de toute obligation d’enseignement
pour les écoles de 10 classes ou plus,
salaire égal à 1,3 fois le salaire
d’un enseignant
1,90
Libre de toute obligation d’enseignement
pour les écoles de 6 classes ou plus,
salaire égal à 1,3 fois le salaire
d’un enseignant
4,50
Remplaçants6
5% de tous les enseignants (pour des
raisons de santé, congés de maternité, etc.)
(2,80)
idem
(2,80)
Gardien
Un par école (salaire égal à
30% de celui d’un enseignant)
2,20
Un par école (salaire égal à
30% de celui d’un enseignant)
2,20
Secrétaire
0
Un par école pour des établissements
de plus de 12 classes (même salaire
que celui d’un enseignant)
0,90
Total
16,03
rentabilité. Le Tableau 3 présente l’augmentation desallocationsen $US
que l’objectif des 33% du budget de l’enseignement pour les dépenses
scolaires non-salariales implique. Il est à noter que les augmentations
sont importantes, notamment pour des pays qui dépensent actuellement une large proportion du budget dans les salaires des enseignants.
Dans de nombreux cas, cela impliquera une restructuration des priorités
budgétaires actuelles.
32
33,25
Plusieurs pays d’Afrique de l’Est et d’Afrique Australe (le Kenya,
l’Ouganda, la Tanzanie et le Mozambique) mettent en oeuvre des politiques qui favorisent l’approvisionnement en manuels scolaires sur
demande de l’école à travers la mise en place de donations globales aux
écoles. Lesmontantsvarientde même que lesdépensesallouéespour le
financement de ces donations globales. En général, les montants en jeu
se situent entre 10 et 15$ US pour un jeu complet d’intrants essentiels
La revue des Échanges
NUMÉRO 3, 2006
Tableau 3 : Estimation de l’allocation pour les dépenses récurrentes des salaires du personnel non enseignant
% des
$ par élève
$ par
dépenses
1998-2000
élève
récurrentes
2015
Angola
19,0
11
42
Bénin
26,4
11
24
Burkina Faso
30,7
15
16
Burundi
22,1
2
7
Cameroun
32,5
14
38
Centrafrique
28,5
7
21
Côte d'ivoire
22,5
27
63
Erythrée
29,6
10
12
Ethiopie
20,5
3
9
Congo (Rép.)
20,3
16
67
Congo (R.D)
10,3
0,2
5
Gambie
24,9
11
22
Ghana
17,7
5
15
Guinée
34,7
13
29
Guinée- Biss.
34,3
4
12
Kenya
4,2
3
34
Lesotho
29,9
29
54
Madagascar
42,4
10
14
Malawi
14,0
2
10
Mali
31,1
10
16
Mozambique
26,1
6
21
Niger
25,9
17
13
Nigeria
9,1
4
26
Ouganda
26,2
7
18
Rwanda
8,6
2
15
Sénégal
36,6
32
25
Sierra Leone
33,1
7
9
Soudan
22,5
9
26
Tanzanie
11,2
3
17
Tchad
34,2
6
11
Togo
25,2
9
19
Zambie
21,7
3
16
Moyenne (non pondérée) 24,1
9
23
Rasera (2003) basé sur Bruns et al (2003)
(Encadré 4). Dans les pays francophones (par exemple en Guinée et au
Sénégal), l’approche adoptée a été d’appuyer les projets d’amélioration
de développement de l’école, de les évaluer et de financer ceux qui remplissentlescritèresde sélection. Plusieursde ces« projetsd’école » comprennent des investissements en matériel didactique et en livres de lecture complémentaires. La gestion et les besoins de renforcement des
capacités de cette approche sont considérables et entravent le développement du programme.
ALLER DE L’AVANT
Il ne fait aucun doute que la mise en place d’un approvisionnement
régulier des écoles africaines en manuels scolaires entraînera d’importantschangementsdansle financementetla gestion de la distribution de
tels supports. Plusieurs pays anglophones ont déjà mis en oeuvre de
telles réformes qui donnent souvent des résultats prometteurs. La mise
en oeuvre de ces réformes prendra du temps et supposera des investis-
Encadré 4: Données de base pour le Kenya,
classes primaires 1 à 5
Bloc de papier
scolaire de base
1 par élève et par an
150
Livre de préparation
des enseignants
1 par enseignant
2.5
Craie
5 boîtes par classe et par an
15
Registre des inscrits/ présents 1 par classe et par an
1
6 manuels de
formation de base
1 pour 3 élèves par matière
400
6 guides de base
pour enseignants
Livres de lecture en anglais
Livres de lecture en Kiswahili
Kit scientifique
Petites réparations,
utilitaires, administration
1 par enseignant
8
1 par élève
1 par élève inscrit
1 par école
80
140
3
Total ( 70 Ksh = 1$)
370
1169
sements préalables. Elle ira de pair avec la détermination de continuer et
d’apprendre des expériences passées. Enfin, elle impliquera pour les
partenaires du développement extérieur une volonté de réviser leurs
politiques et leurs procédures.
Approvisionnement public et privé. L’édition qui estcontrôlée par l’État, s’est généralement avérée inefficace. De manière générale, l’approvisionnement effectué par le secteur privé s’est montré plus performant.
Les éditeurs locaux peuvent jouer un rôle considérable, en particulier là
où le marché des manuels scolaires est assez important pour permettre
la concurrence ; dans d’autres pays, les éditeurs internationaux (y compris les maisons d’édition africaines) peuvent être des partenaires efficaces. Dans de nombreux pays africains, tant le secteur public que le
secteur privé devront jouer leur rôle et travailler en partenariat. En dernier lieu, le rôle du gouvernement sera de :
• fournir des directives claires quant aux programmes pour le développement des manuels scolaires ;
• créer les conditions favorables au développement d’une politique éditoriale ;
• établir un processus objectif d’évaluation et d’attribution des
contrats ;
• fixer un nombre minimum de normes physiques de production ;
• protéger les droits de propriété intellectuelle ;
• établir un cadre pour un financement fiable de l’édition et de la distribution ;
• former lesenseignantsà l’utilisation età l’entretien desmanuelsscolaires.
La taille du marché estun élémentdéterminantpour la nature du partenariat. Lesfraisde développementsontlesmêmes, tantpour lespetits
pays que pour les plus importants. Cependant, le nombre limité de
tirages ne peut attirer les économies d’échelle. Les éditeurs privés, s’il y
en a, ont vraisemblablement une capacité limitée. Pour ces pays, des
La revue des Échanges
NUMÉRO 3, 2006
33
solutions régionales et des entreprises conjointes internationales peuvent représenter une part essentielle de leur stratégie d’approvisionnement en manuels scolaires.
Une industrie de l’édition africaine. Renforcer la capacité locale de
publication est un impératif que l’on ne peut ignorer s’il doit y avoir un
approvisionnement régulier en manuels scolaires. La libéralisation, le
choix et le financement assumé par l’école offrent de nouvelles opportunités aux éditeurs africains. S’ils réussissent à s’emparer de ces éléments, ils seront capables d’assurer la continuité du commerce des
manuels scolaires et ensuite passer au rang des publications générales.
Les pays adopteront des méthodes différentes pour atteindre ce but.
Cela exige un renforcement des capacités et de la formation du personnel ainsi que la mise en place de politiques destinées à faciliter l’accès
des éditeurs au capital, dans ce qui est considéré comme une industrie
hautement capitalistique. Un environnement politique est également à
prévoir (y compris les charges fiscales et les droits de douane). Cela permettra d’assurer une situation équitable pour les éditeurs locaux.
Certains petits pays seront peut-être amenés à reconnaître qu’ils ne peuvent pas réellement compter sur la production locale de manuels scolaires, et par conséquent, ils adopteront des stratégies pour obtenir leurs
manuels auprès d’éditeurs situés dans les pays voisins ou chez des maisons d’édition internationales.
Ce qui est le plus important dans le développement d’une industrie
africaine de la publication est la nécessité de disposer de programmes
stables et de politiques d’achat de manuels scolaires ne reposant plus
sur une campagne isolée de grande envergure mais plutôt sur des
contrats fiables, de plus longue durée, destinés à pourvoir à une distribution annuelle sur une période raisonnablement longue (par ex. sur 5
ans). Les politiques d’achat des partenaires du développement extérieur
doivent être adaptées de façon à appuyer les progrès faits en ce sens.
Le financement des manuels scolaires et autres supports d’apprentissage. Les niveaux actuels de financement interne et la confiance
accordée à l’utilisation de supports extérieurs temporaires rendent
impossible la mise en place d’un système stable d’approvisionnement
de manuels scolaires. Un système stable est un système qui assure un
financement prévisible et fiable, des procédures transparentes et formellement établies pour passation de marchés y compris l’évaluation des
offres et l’approbation des contrats, et qui établit de façon claire les rôles
et les responsabilités des différents partenaires impliqués dans le processus. Ilyauraitbeaucoup à dire en faveur de l’incorporation d’un financement pour l’approvisionnement de manuels scolaires dans l’actuel
budget du Ministère de l’Éducation. Les partenaires extérieurs qui
s’oriententversun soutien budgétaire généralou ciblé peuventcontinuer
à prendre en charge l’approvisionnement des manuels scolaires ; ils doivent cependant le faire selon une méthode qui fait partie intégrante de la
budgétisation nationale et des systèmes de gestion sectoriels.
Capacité sur l’ensemble de la chaîne du livre. On enregistre un
nombre considérable de demandes de création de capacité dans des
processus visant à instaurer des systèmes d’approvisionnement en
livres, libéralisés et fondés sur le choix du consommateur. Ils impliquent
non seulement le développement de la capacité des éditeurs locaux à
produire desmanuelsscolairesde haute qualité età s’assurer qu’ilssont
bien distribués aux écoles, mais également la capacité du Ministère de
l’Éducation à développer des politiques efficaces ainsi qu’un cahier des
charges pour l’instauration de politiques destinées à développer des
manuels scolaires fondés sur les programmes, à évaluer les appels
d’offres et à suivre le produit et le processus. Ils requièrent également la
34
création de la capacité au niveau de l’école pour la gestion des ressources, pour l’identification des besoins prioritaires, pour la sélection
des titres qui conviennent le mieux aux conditions locales, la vérification
des distributions et la mise en place d’une action de régularisation si
nécessaire. Dans de nombreux cas, cela impliquera l’engagement des
membres du comité de gestion de l’école. Mais ce qui est sans doute le
plusimportant, c’estque cela supposera desinvestissementsdansla formation des enseignants de façon à s’assurer que les dépenses réalisées
pour les manuels scolaires entraînent une réelle amélioration de l’apprentissage de l’élève.
Approche systémique. Par conséquent, l’importance d’une
approche systémique des manuels scolaires reposant sur un cadre politique à long terme représente un élément clé. Cela implique :
• la substitution de campagnes d’approvisionnement de grande envergure par des contrats de plus longue durée ;
• des mesures de financements prévisibles et fiables à long terme ;
• l’incorporation d’un niveau approprié de financement dans le cadre
des dépenses à moyen terme ;
• une série de procédures efficaces et transparentes pour l’approvisionnement ;
• des investissements durables dans la création de la capacité pour la
publication, la distribution et l’utilisation des manuels scolaires ;
• des programmes stables et des politiques du livre scolaire étroitement
liées ;
• un cadre politique national relatif au livre.
NOTES
1
2
3
4
5
6
Ce document se base essentiellement sur un rapport de la Banque
mondiale retraçant son expérience de terrain entre 1985 et 2000 fait
par Ian Montagnes et Sakhevar Diop (Banque mondiale 2002) et sur
une publication du groupe de travail de l’ADEA sur les livres et les
matériels didactiques « Upgrading book distribution in Africa » (Read
et al, 2001).
Le chiffre de 9 dollars US représente une moyenne non pondérée
fondée sur les dépenses de 33 pays africains que Burns prend pour
référence ; la moyenne pondérée (c’est-à-dire ajustée en fonction des
différences de taille de population) est seulement de 6 dollars US.
Pour une attribution des coûts détaillée et une explication de ces
« contributions de base », voir Tableau 2 de Rasera (2003)
Actuellement 6 dollars US par enfant sont dépensés en moyenne pour
l’administration, dont 3 dollars US sont alloués aux coûts en personnel et 3 autres en charge de fonctionnement courants. Si les coûts en
personnel admin. augmentaient selon le taux de croissance des
salaires des enseignants retenu par Bruns et al (2003), ce chiffre passerait à environ 4 dollars US d’ici 2015. En ce qui concerne les autres
coûts admin. récurrents, Rasera considère qu’ils devraient au moins
être doublés pour assurer l’efficacité de l’administration, par conséquent le montant serait de 6 dollars US (2*3). Ainsi, le total des coûts
admin. par enfant s’élève à 4+6=10 dollars US.
Ce chiffre comprend par exemple les jeunes filles dans les zones
rurales, les enfants issus des foyers les plus pauvres, les enfants de
minorité ethnique, les enfants de nomades, les enfants handicapés,
etc. Il n’inclut pas les orphelins puisqu’ils font partie des calculs de
Bruns et al (2003) séparément.
Élément non inclus dans le total. Si les remplaçants étaient inclus
dans les chiffres donnés par Bruns et al (2003), alors, cela élèverait le
ratio théorique de 40 élèves/enseignant à environ 42
Suite à la page 40
La revue des Échanges
NUMÉRO 3, 2006
POLITIQUE ET GESTION
DES MANUELS SCOLAIRES
AU BÉNIN
INTRODUCTION
L’amélioration continue de la qualité de l’enseignement est au coeur
despréoccupationsde touslesGouvernementsdespaysen voie de développement. Cette amélioration ne peut être possible sans la mise à disposition des élèves desmanuelsscolairesdontl’importance dansle processus d’apprentissage des élèves n’est plus à démontrer.
Bien que cette importance soit incontestable, les mesures prises
pour que les élèves disposent de manuels de qualité et en quantité suffisante n’ont pas été stables dans le temps.
Structure de l’Éducation formelle
L’éducation formelle regroupe l’Enseignement Maternel, l’Enseignement Primaire, l’Enseignement Secondaire Général, l’Enseignement
Technique et la Formation Professionnelle et l’Enseignement Supérieur.
DESCRIPTION SOMMAIRE DU SYSTÈME ÉDUCATIF DU BÉNIN
• L’enseignement primaire
Cet ordre d’enseignement est organisé en six années d’étude (CI, CP,
CE1, CE2, CM1, CM2). La fin des études de l’enseignement primaire est
sanctionnée par l’examen du Certificat d’Études Primaires (CEP).
La Loi d’orientation d’octobre 2003, par souci de cohérence entre
l’enseignementmaterneletl’enseignementprimaire, ramène de sixansà
quatre ans et demi l’âge d’entrée à l’école primaire.
La finalité de l’enseignementprimaire estl’éveilde l’espritde l’enfant,
sa formation physique, intellectuelle, civique et morale ; l’éveil de son
esprit d’initiative et de son sens critique.
L’enseignement primaire permet l’acquisition des connaissances,
compétences et mécanismes de base pour les apprentissages futurs. Il
valorise le travail productif comme facteur de développement de l’intelligence et d’insertion dans le milieu économique.
La réforme des programmes d’enseignement, après une phase
d’expérimentation, a progressivement connu une généralisation année
par année. Depuis la rentrée d’octobre 2003-2004, toutes les classes de
l’enseignement primaire fonctionnent sur la base des nouveaux programmes et les élèves ont affronté le « CEP- Nouveaux Programmes » en
Juin 2004.
Cadre institutionnel et structuration du système
Cadre institutionnel
Depuis 1975, l’administration du système éducatif béninois précédemmentassurée par le Ministère de l'Éducation Nationale, de la Culture,
de la Jeunesse et des Sports, a connu plusieurs mutations dans sa dénomination, ses structures et ses attributions. De nouveaux changements
politiquesintervenusen 2001 placentl'Éducation sousla tutelle de quatre
ministères :
• le Ministère des Enseignements Primaire et Secondaire (MEPS), s’occupe aussi de l’enseignement maternel qui n’est pas explicitement
mentionné dans la dénomination du ministère ;
• le Ministère de l’Enseignement Technique et de la Formation
Professionnelle (METFP) a en charge l’éducation formelle (lesétablissements d’enseignement technique et de formation professionnelle) et
l’éducation non formelle (les apprentissages) ;
• le Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche
Scientifique (MESRS) dont relèvent les universités et tous les établissements d’enseignement supérieur (les Instituts Universitaires de
Technologie et les établissements de formation au BTS et autres formations professionnelles) ;
• le Ministère de la Culture, de l’Artisanatetdu Tourisme (MCAT) définitet
gère la politique culturelle du Bénin. Il s’occupe également de l’alphabétisation des adultes.
L’éducation non formelle est organisée en dehors du système formel
et regroupe l’alphabétisation, l’éducation des adultes et l’apprentissage.
L’alphabétisation et les centres d’apprentissage sont du ressort du
MCAT tandis que les centres de métiers et les centres de formation professionnelle relèvent du METFP.
• L’enseignement Maternel (EM)
Cet ordre d’enseignement vise essentiellement l’éveil et la stimulation des fonctions physiques, psychologiques et mentales de l’enfant. Il
est ouvert aux enfants de deux ans et demi à trois ans et dure deux ans.
• L'enseignement Secondaire Général (ESG)
Prolongement logique de l'enseignement primaire, il vise à approfondir chez l'élève, les apprentissages du cycle précédent, tout en développant le sens de l'observation, le raisonnement logique et l'esprit de
recherche. L'enseignement secondaire général est assuré dans les lycées
et collèges. La durée totale des études est de sept ans répartis en deux
cycles d'étude. Le premier cycle couvre les quatre premières années
(classes de 6e, 5e, 4e et 3e) et le second cycle s'étend sur les trois dernières années (classes de 2nde, 1ère et Terminale).
L'enseignement secondaire général accueille les élèves âgés de 11 à
18 ans ayant achevé le cycle primaire. L'entrée en classe de 6e est subor-
La revue des Échanges
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35
donnée à un concours dont les résultats tiennent compte des notes obtenuespar lescandidatsdanstroismatièresfondamentalesde l'examen du
Certificat d'Études Primaire (CEP).
La fin des études du premier cycle est sanctionnée par le Brevet
d'Etudes du Premier cycle (BEPC) qui ne conditionne pas l'entrée en classe de 2nde. La fin des études du second cycle est sanctionnée par le
Baccalauréat, diplôme permettant d'accéder à l'enseignement supérieur.
C'est au second cycle que se distinguent les filières ou options d'enseignement : les options qui préparent à un baccalauréat littéraire, celles
qui débouchent sur un baccalauréat scientifique et technique et enfin
cellesqui permettentdesétudesd'économie etde gestion. À l'intérieur de
cestroisgrandstypesd'optionssubsistentdesdifférenciationsobjectives
bien marquées.
Cependant, pour l'essentiel, l'orientation desélèvesdanstelle ou telle
autre filière ne s'effectue point selon une réglementation établie. Elle se
fait de façon hasardeuse soit à partir de quelques résultats scolaires, soit
pour satisfaire la demande d'un parent ou même pour donner acte aux
rêves d'un élève. Cette ouverture, transposée dans l'enseignement supérieur, révèle de fâcheuses conséquences.
Depuis la rentrée d'octobre 2001, la réforme des programmes du
secondaire général est amorcée pour assurer le prolongement de la réforme desépreuvesd'examen confectionnéessur la base desnouveauxprogrammes d'enseignement.
• L'Enseignement Technique et la Formation Professionnelle (ETFP)
Déclaré seconde priorité du Gouvernement du Bénin après l'enseignement primaire, cet ordre d'enseignement a acquis ses lettres de
noblesse depuislesÉtatsGénérauxde l'Education (EGE) en 1990. En 2001,
le Gouvernement détache cet ordre d'enseignement du secondaire général et crée le Ministère de l'Enseignement Technique et de la Formation
Professionnelle.
L'Enseignement Technique et la Formation Professionnelle prépare à
l'emploi et permet la poursuite des études supérieures techniques et professionnelles. Il offre six domaines de formation :
- les Sciences et Techniques Administratives et de Gestion (STAG)
- les Sciences et Techniques Industrielles (STI)
- les Sciences et Techniques Agricoles (STA)
- les Sciences de la Santé (SS)
- l'Économie Familiale et Sociale (EFS)
- l'Hôtellerie et la Restauration (HR)
L'option Sciences et Techniques Industrielles exige six ans d'études
égalementrépartisentre le premier cycle (3 ans) etle second cycle (3 ans).
La fin des études est sanctionnée au premier cycle par le Certificat
d'Aptitude Professionnelle (CAP) et au second cycle par le Diplôme de
Technicien Industriel (DTI).
Après également six ans d'étude, l'option Sciences et Techniques
Administratives et de Gestion délivre respectivement le CAP et le
Baccalauréat.
Quant aux Sciences et Techniques Agricoles, elles imposent quatre
ans (4 ans) d'étude par cycle et permettent d'obtenir respectivement le
Brevet d'Etudes Agricoles Tropicales (BEAT) et le Diplôme d'Études
Agricoles Tropicales (DEAT).
Enfin, les Sciences de la Santé exigent six années d'études dont trois
au premier cycle et trois au second cycle au terme desquelles on obtient
respectivement le Diplôme d'Infirmier breveté (1er cycle) et celui
d'Infirmier d'État, de Sage-femme, d'Aide social ou de Technicien de laboratoire (2nd cycle).
36
• L'Enseignement Supérieur (E. Sup.)
Il assure l'élaboration, la transmission et la diffusion du savoir, du
savoir-faire et du savoir-être nécessaires à la maîtrise de l'environnement
humain età l'élaboration desconditionsd'existence. Ildoitveiller au développement harmonieux de l'ensemble du système éducatif et former des
cadres supérieurs compétents et compétitifs, capable d'assurer leur
propre épanouissement et le développement de la Nation.
Il accueille dans les facultés, les écoles et les instituts supérieurs, les
élèvestitulairesdu baccalauréatpour lespréparer auxdifférentsdiplômes
nationaux de l'enseignement supérieur, dans des cursus de deux à huit
ans (2 à 8 ans). La variation des durées de formation est fonction des
domaines d'études et des filières.
DE LA SITUATION DES MANUELS SCOLAIRES AVANT LA MISE EN OEUVRE
DE LA POLITIQUE ACTUELLE
La situation au Bénin au début des années 1990 se caractérisait par
une juxtaposition d’initiativesrelevantde choixpolitiquesdifférents, voire
contradictoires.
En effet, on trouvait sur le marché des ouvrages importés (« le calcul
quotidien » dansla collection Nathan d’Afrique), desouvragescoéditéspar
accord direct entre le MEN et une firme étrangère, (la collection
« Finagnon »), des ouvrages coédités au niveau de la sous-région
(« sciences physiques 2ème année niveau 1 » , A. . Colin/ INFRE), des
ouvrages produits dans le cadre d’une politique nationale (« les joies de la
lecture » 5ème année INFRE-CNPMS), avec parfois l’assistance des organismes de coopération (« texte et documents pour le français » produit
dans le cadre du projet maths–français financé par la coopération française).
Cette diversité se retrouvait dans les manuels effectivement disponibles et utilisés dans les établissements scolaires.
N’ayantpasété conçusà partir desprogrammes, lesouvragesmissur
le marché, soit dans le cadre d’une production nationale, soit dans le
cadre d’une politique d’importation n’étaient pas évidemment adaptés
aux objectifs d’apprentissage ; mais surtout ils ne paraissaient pas
adaptés aux capacités des élèves.
Plus généralement, il n’existait pas au niveau de la refonte des programmes, de l’agrément des ouvrages, et de l’établissement des listes
officielles, une procédure d’ensemble ou une instance représentative qui
coordonnait l’action des différentsorganismeschargésde la conception,
de la rédaction, de l’adoption et de la production des manuels scolaires.
En particulier, au niveau de la conception et de la rédaction des
ouvrages, le choix d’une pédagogie par objectifs adopté pour l’enseignement secondaire et préconisé par le MEN pour l’enseignement primaire
n’avaitpasde retombéesdirectes en matière de conception desmanuels.
Du point de vue de la conception et de la rédaction des ouvrages, la
production de textes relevait d’initiatives individuelles, plus rarement des
commandes, que les conditions matérielles faites aux auteurs ne favorisaient pas. Ces auteurs n’étaient pas véritablement suivis par des secrétaires d’édition, à l’exception de ceux qui travaillaient pour les maisons
d’éditionsétrangères, dontle texte étaitlargementréécrit, etqui laissaitla
mise en page etl’illustration à la responsabilité de cesmaisons. Ce savoirfaire éditorial se retrouvait au hasard des prix, les ouvrages produits à l’étranger étant, touteschoseségalespar ailleurs, venduspluschers que les
produits locaux.
Dans ce cadre, il n’était pas étonnant que la planification des commandes d’ouvrages scolaires et l’exécution des programmes d’enseignement ne s’inscrivent dans aucune perspective cohérente.
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Toutefois, ilconviendraitde noter danscetensemble, la démarche originelle du projet maths-français, soutenu par la coopération française,
qui privilégiait l’édition d’un recueil léger de documents, produit localement et visé par les CTIS, et qui s’accompagnait d’une formation systématique des utilisateurs.
Au niveau de l’impression desouvrages, en l’absence de maisonsd’éditions locales solidement implantées, la seule structure fonctionnelle
était le CNPMS, financé par la coopération allemande. Celui-ci disposait
d’un matériel performant et de capacités d’imprimerie conséquentes ;
mais sa production réelle était loin de sa capacité potentielle ; ce qui
posait déjà un problème sur sa rentabilité et son devenir.
Bref, la fragilité de chacun des maillons de la chaîne éditoriale et l’absence de liaisons organiques entre eux généraient une série de dysfonctionnements qui se répercutaient sur l’ensemble du système éducatif. Une telle situation ne saurait se poursuivre avec la réforme des programmes démarrée au milieu des années 1990.
RÉFORME DES PROGRAMMES ET POLITIQUE DES MANUELS SCOLAIRES
Des nouveaux programmes aux manuels scolaires
Après les États généraux de l’Éducation tenus en 1990, une réforme
du système éducatifa démarré, se poursuitets’approfonditactuellement.
Elle est sous-tendue par de Nouveaux Programmes d’Études (NPE),
conçus pour répondre aux défis d’ordre politique, environnemental, éducatif et pédagogique.
Le profilsouhaité chezl’élève, à travers cesnouveaux programmes,
est qu’il soit :
· autonome, capable de se prendre en charge ;
· respectueux de la personne humaine ;
· animé d’un espritde méthode, de tolérance etdu sensde la responsabilité ;
· un gestionnaire de lui-même et de son environnement, capable d’apprendre tout au long de sa vie…
Pour parvenir à former un tel élève, des curricula adaptés à un
apprentissage centré sur l’apprenantainsi qu’ auxstratégiesde résolution
de problèmes et développement de projets ont été élaborés et progressivement mis en oeuvre.
La méthodologie retenue est basée sur la construction de compétences, lesconnaissancestechniquesetlesacquisdesaptitudesde la vie.
Concomitamment à l’élaboration des curricula, le Ministère avait mis
en place un plan d’action qui avait pour missions :
. d’élaborer une politique nationale du livre ;
. d’approvisionner les écoles primaires en manuels de mathématique et
de français conformément aux normes EQF ;
. de promouvoir la mise en place d’une chaîne éditoriale nationale
capable de produire les manuels conformes aux NPE.
Dans le cadre des activités de ce plan d’action des personnes ressources ont été sélectionnées pour assurer la rédaction des manuels scolaires adaptés aux nouveaux programmes et ceci, avec l’appui technique
et financier de l’US AID. Le processus, entièrement conduit par des nationaux à ce jour, est composé des étapes ci-après :
· Conception
· Concertation concepteurs-rédacteurs
· Rédaction
· Lecture /Relecture
· Impression
Les manuels rédigés étaient expérimentés dans les écoles (expérimentales) au même titre que les programmes, et étaient par la suite finalisés.
Au démarrage de la généralisation de la mise en ouvre desNouveaux
Programmesd’Études(NPE), en 1999, lesmanuelsn’étaientpasen vente,
ceux-ci étant interdits dans la mesure où l’approvisionnement initial des
écoles était assuré grâce à l’appui financier de l’USAID, à raison d’un
manuelpour deuxélèvesen mathseten françaisetd’un cahier d’activités
par élève dans ces deux disciplines au CI et au CP. Le réassort des écoles
en manuels relevait de la compétence du Gouvernement.
Cette situation a donné lieu à une spéculation de la part de certains
commerçants peu scrupuleux qui photocopiaient et vendaient ces livres
à desprixtrèsprohibitifs. Ce problème a amené lesparentsd’élèvesetdes
syndicats d’enseignants à exiger que les manuels accompagnant les NPE
soient mis en vente.
Le Ministère desEnseignementsPrimaire etSecondaire, conscientdu
faitque l’amélioration de la qualité ne peutêtre atteinte sansla mise à disposition desélèvesetdesenseignantsde manuelsappropriéseten quantité suffisante, avait en 2001 arrêté quelquesorientationsqui peuventêtre
considérées comme une préfiguration de la politique des manuels scolaires au Bénin. La cession des copyrights qui a été approuvée par le
Gouvernement découle de ces orientations. En 2004, un projet de politique des livres a été élaboré.
Quelques axes prioritaires de la politique des manuels et place de la
cession des copyrights
Les grandes orientations de la politique nationale du livre scolaire
découlent de trois points clés de la déclaration de politique éducationnelle du Gouvernement du Bénin adoptée en 1991, à savoir :
l’égalité des chances pour tous ;
le renforcement de la qualité d’éducation ;
la maîtrise des coûts à l’éducation.
Ainsi, de façon spécifique, la politique nationale du manuel scolaire
est de :
- rationaliser les fonctions de conception, d’élaboration, d’impression,
de distribution, d’utilisation et de conservation des livres scolaires ;
- rationaliser le système de dotation des écoles en manuels scolaires ;
- faciliter aux élèves et aux enseignants l’accès aux manuels et autres
documents pédagogiques nécessaires ;
- susciter, entretenir le goût de la lecture, l’amour et le respect des livres
auprès des élèves, des enseignants et des parents d’élèves ;
- favoriser l’émergence etle développementdu secteur éditorialscolaire ;
- former les enseignants à l’utilisation des manuels scolaires ;
- mettre en place une procédure d’approbation du livre scolaire ;
- rendre disponibles, sur toutle territoire national, leslivresde bonne qualité ;
- mettre en place au niveau centraletdécentralisé desmécanismesd’entretien et de renouvellement des manuels scolaires ;
- favoriser l’accès des professionnels du livre scolaire au crédit.
Le secteur de l’édition ne peut prospérer que dans un environnement
de libre entreprise et de libre concurrence. C’est pourquoi l’État veille au
contenu du manuel scolaire et au prix de cession qui doit être accessible
à tous. Il a en charge l’élaboration des programmes d’études et la détermination des orientations que les manuels scolaires devront suivre. En
somme, l’État veille à la qualité, au prix des manuels scolaires et à leur
La revue des Échanges
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37
conformité aux programmes d’études. En d’autres termes, l’État élabore
les cahiers de charge destinés aux rédacteurs et producteurs d’ouvrages
scolaires.
Quant au secteur privé, il lui est confié :
- la production des ouvrages scolaires à des prix accessibles ;
- la commercialisation ;
- la distribution danslesécolesou collègesdescommandesfaitespar l’État.
Toutes ces dispositions, pour être mises en oeuvre avec efficacité,
appellent des mesures institutionnelles qui passent par :
- la création d’un comité d’approbation des manuels scolaires ;
- la création d’un fond de renouvellement des manuels scolaires.
Pour dynamiser le secteur et assurer l’approvisionnement de tout le
système éducatifbéninoisen manuelsscolaires, desdispositionsdevront
être prises pour :
- ratifier l’accord de Florence et le protocole de Naïrobi ;
- privilégier les éditeurs nationaux dans le cadre des appels d’offres
locaux ;
- faire racheter par l’État les copyrights des ouvrages d’intérêt pour le
système et détenus par les maisons d’édition étrangères ;
- obtenir un désarmement douanier complet et une détaxe sur les produits entrant dans la fabrication du livre scolaire ;
- appuyer la formation des compétences techniques nécessaires au
développement de ce secteur.
Les objectifs visés à travers ces grandes orientations retenues peuvent être résumés comme suit :
•
mettre à la disposition des élèves et des enseignants des
manuelsscolairesde qualité, en quantité suffisante etconformesauxcurricula en vigueur ;
•
faciliter à tous les élèves et à tous les enseignants l’acquisition
des manuels dans les délais convenables et à de bons prix ;
•
développer une compétence nationale en matière de conception, d’édition, d’impression et de distribution des manuels scolaires en
association avec les professionnels privés du livre scolaire ;
•
créer un environnement favorable au développement d’une
industrie privée du livre capable de répondre aux besoins des écoles.
• lancer un appeld’offresnationalpour l’exploitation du copyrightpar les
éditeurs nationaux aux fins de rendre ces matériels disponibles dans
les librairies et les autres points de vente du territoire national ;
• signer un contrat d’exploitation du copyright avec les éditeurs nationaux en vue de la vente de ces manuels et cahiers d’activités … ».
En exécution de cette décision, desappelsd’offresontété lancéspour
l’exploitation descopyrightspar leséditeursnationaux. Lesdossiersd’appel d’offres ont mis, entre autres, un accent particulier sur :
•
le prix (unique sur le territoire national) ;
•
le réseau de distribution (couverture du territoire national) ;
•
la qualité des documents à réimprimer.
Processus de distribution et de gestion des manuels dans les écoles
La distribution proprement dite est précédée du colisage qui,
conformément au cahier de charge, relève de l’éditeur. Celui-ci, après
impression, réalise le colisage par circonscription scolaire et par département selon les informations statistiques à lui fournies par le Ministère. Il
met les ouvrages sous emballage et sous cellophane à raison de 10
ouvrages par emballage. Ces emballages sont ensuite mis dans des cartons à raison de 50 ouvrages par carton.
Les cartons de chaque circonscription scolaire sont identifiés par une
étiquette dûment remplie, collée sur le colis.
Tous les colis destinés à un département sont identifiés par un macaron de couleur unie, collé sur au moins deux faces latérales de chaque
colis et permet de le reconnaître à distance. Une documentation appropriée est fournie par le ministère sur les couleurs affectées à chaque
département.
Ildécoule de cesgrandesorientationsque l’Étatélabore lescahiersde
charge, veille à la qualité, au prix des manuels et leur conformité aux programmes d’études, et son rôle s’arrête désormais à ce niveau. Le secteur
privé est, quant à lui, chargé de la production, de la commercialisation et
de la distribution des manuels scolaires.
Cette stratégie permettrait l’accès aux manuels scolaires par trois
voies d’accès : l’achat et la distribution gratuite dans les poches de pauvreté tous les trois ans dans la limite des ressources disponibles, la location des manuels et l’incitation à l’achat des parents qui en ont les
moyens.
Expérience de la distribution par l’État
La distribution par l’Etat est organisée de la manière suivante :
- les colis de manuels sont déposés dans les départements et les directeurs départementauxles réceptionnentpour la répartition par circonscription scolaire ;
- les chefs des circonscriptions scolaires doivent aller récupérer les
manuels et inviter les directeurs d’écoles à aller les chercher au bureau
de la circonscription scolaire pour leurs écoles respectives, les écoles
privées y comprises.
La distribution par le ministère et l’interdiction de la vente des
manuels et des guides par les librairies privées, a mis en évidence un certain nombre de dysfonctionnements dont les principaux observés sont :
- les manuels ne parviennent pas toujours à temps dans les écoles ;
- la répartition, tributaire de la fiabilité des statistiques, est souvent inéquitable ;
- beaucoup de fraudes et de soustraction de manuels se produisent et
donnent lieu à des opérations de ventes illicites qui sont une pure
escroquerie des parents d’élèves et des utilisateurs en général.
En raison de la faiblesse de la chaîne de distribution jusqu’au niveau
des écoles et des détournements induits par le mode de distribution, le
ministère a opté en 2004 au recours systématique au secteur privé pour
assurer la distribution des manuels jusqu’au niveau des écoles.
La cession descopyrightsestl’une desmesuresentrantdansle cadre
de l’application de ces orientations. Elle a été approuvée en 2001 par le
Gouvernement qui a demandé au Ministre des Enseignements Primaire
et secondaire de :
• « négocier et d’obtenir la main levée sur le copyright des manuels et
cahiers d’activités accompagnant les NPE auprès de l’USAID ;
Expérience de la distribution par les privés
Le Ministère a lancé une consultation pour la sélection de prestataires
privés pour le transport jusqu’auxécolesprimairespubliquesetprivéesde
toute l’étendue du territoire nationaldesmanuelsscolairesacquisen 2004.
Lesprestationsfourniesdansle cadre de l'exécution du contratpar les
fournisseurs sont les opérations de chargement, de transport, de stocka-
38
La revue des Échanges
NUMÉRO 3, 2006
ge et de livraison, au départ de Cotonou, vers toutes les écoles primaires
publiques etprivéesdu Bénin desouvragesacquis. Lesfournisseurssont
chargés d’assurer l’emballage et l’étiquetage par école, le nombre de
manuels destinés à chaque école étant fourni par l’administration.
À la livraison, les fournisseurs se font délivrer, conformément au
cahier des charges, un bordereau de livraison dûment signé du chef d’établissement, du président de l’Association des parents d’élèves de l’école, du chef de village/quartier, bien entendu, du fournisseur ou de son
représentant.
Les bordereaux de livraison par école sont récapitulés sur une fiche
par circonscription scolaire et par département. Les fiches récapitulatives
auxquellessontjointeslesbordereauxpar école serventà l’établissement
du bordereau global de livraison qui est délivré par les structures compétentes de l’administration.
Le modèle de bordereau de livraison et de la fiche récapitulative est
fourni par l’administration.
Malheureusement, cette expérience qui a été déjà menée avecsuccès
en 1999 dansle cadre d’un projetfinancé par la Banque Mondiale, n’a pas
donné de bons résultats en 2004 parce que les prestataires ont été sélectionnés dans la précipitation et n’avaient pas l’expérience requise.
La gestion des manuels dans les écoles
Au niveau de chaque établissement, il est prévu un comité local de
gestion du livre etmatérieldidactique etune brigade de gestion deslivres.
Le comité local de gestion du livre et matériel didactique est chargé :
- de procéder à la réception desmanuelsscolairesetmatérieldidactique
dans les établissements scolaires , de les distribuer dans les classes et
de s’assurer des normes en vigueur en la matière ;
- de faire l’inventaire des ouvrages pendant les vacances ;
- d’assurer la maintenance et l’entretien des ouvrages périodiquement ;
- de décider de la politique de gestion à adopter (location et prêt) selon
les cas ;
- de renouveler les stocks et de prévoir les réassorts en mobilisant au
niveau de l’établissement les fonds nécessaires.
La brigade de gestion est l’organe de gestion du livre au niveau de
chaque classe. Elle est chargée :
- d’assurer la réception et la distribution des manuels et matériel didactique dans chaque classe ;
- de tenir, à la rentrée et pendant les vacances, l’inventaire des manuels
scolaires et matériel didactique ;
- de collecter éventuellement les fonds issus de la location ou des prêts
des manuels et de les transmettre au comité local de gestion de l’établissement.
Il convient de préciser que ces comités viennent d’être installés et ne
sont pas encore opérationnels.
PRINCIPALES FAIBLESSES OBSERVÉES DANS LA MISE EN OEUVRE DE LA
CESSION DES COPYRIGHTS
Au niveau de la sélection des éditeurs
La rigidité des critères de qualification (marchés similaires, chiffres
d’affaires, surface financière …) inclus dans les dossiers d’appel d’offres
qui n’étaient pas de nature à favoriser au départ du processus la participation de plusieurs professionnels locaux. C’est, entre autres, ce qui
explique que les copyrights soient détenus par deux éditeurs. Pour les
appelsd’offresdesclassesde CM1 etCM2, cesdispositionsontété assouplies pour permettre à d’autreséditeursde prendre partà la concurrence.
Au niveau des contrats passés avec les éditeurs
Dans les premiers contrats passés avec les éditeurs nationaux, des
acquisitions en gros n’étaient pas envisagées. Or, les contrats passés ne
prévoient aucun mécanisme d’amendement et de résiliation. Ce sont là
des insuffisances réelles qui peuvent être corrigées à court terme, notamment pour les amendements.
Il est important de noter que ces insuffisances ont été déjà corrigées
dans les contrats de cession des copyrights pour les cours de CM1 et CM2
pour lesquelsl’administration a pu bénéficier d’une réduction de 10%. De
ce fait, le livre de mathématique revient pour l’Etat à 855 et 990 F CFA respectivementpour le CM1 etle CM2 etcelui de français, 1148 et1013 FCFA ;
ce qui, du reste, est nettement meilleur aux prix des livres du CE1 et CE2
qui sont respectivement de 1600 F et 1650 F CFA pour chacun des deux
manuels.
Du point de vue de la résiliation, elle ne peut intervenir qu’à la fin des
contrats en cours pour éviter à l’État de payer des dommages et intérêts
trop coûteux.
Au niveau de la publication des prix
Les prix de vente uniques convenus avec les éditeurs sur toute l’étendue du territoire national ne sont pasdiffusés ; ce qui ne garantitpasson
application effective. La tendance est à la spéculation dès les premières
semaines de la rentrée.
Au niveau des droits d’auteurs
Du pointde vue desdroitsd’auteurspratiquéspar leséditeurslocaux,
en les comparant à la pratique courante sur le plan international, le taux
de 12% est très élevé. Les droits d’auteurs oscillent généralement entre 3
et 6 % en Europe. Dans la perspective de la réduction des prixde vente, la
diminution de ce taux devra être envisagée.
Autres faiblesses relevées
D’autres insuffisances liées à cette stratégie sont relatives à :
- des ruptures de stock périodiques ;
- la prolifération des documents pédagogiques localement produits ;
- la non-maîtrise des coûts des documents entièrement produits par les
éditeurs locaux ;
- la qualité éditoriale de certains documents localement produits ;
- la faible couverture des réseaux de distribution existants qui ne desservent que les grandes villes.
MESURES CORRECTIVES ENVISAGÉES À COURT ET À MOYEN TERME
• Engager des discussions avec les éditeurs détenteurs des contrats en
cours pour :
- y inclure des clauses relatives aux amendements et aux conditions de
résiliation ;
- amender lescontrats descoursde CI au CE2 dansle sensd’obtenir une
réduction, tout au moins sur les achats en gros ;
• Poursuivre lesrencontresavecleséditeursdétenteursdescopyrightset
lesauteursdesmanuelsscolaires en vue de négocier la diminution des
droits d’auteurs et en conséquence des prix de vente1 ;
• Faire engager des actions pour l’inscription des auteurs au Bureau
Béninois des Droits d’Auteurs (BUBEDRA) ;
• Instruire les éditeurs pour que les droits d’auteurs soient versés à une
institution compétente qui se chargera de payer à son tour les auteurs,
pour des raisons de transparence.
• Informer et sensibiliser par lesradiosnationalesetde proximité ettous
La revue des Échanges
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39
•
•
•
•
-
autres canaux jugés utiles, avant la prochaine rentrée scolaire, tous les
acteurs sur les prix pratiqués ;
Responsabiliser lesdirecteursdépartementauxdesenseignementsprimaire et secondaire et les chefs de circonscriptions scolaires pour
suivre au niveau des différentes localités les prix pratiqués par les éditeurs ;
Faire évaluer par une personne indépendante l’expérience de la cession
descopyrightsnotammentà la fin despremierscontratsportantsur les
livres du CI, CP et CE1 ;
Associer tous les partenaires à la validation des résultats de l’évaluation ;
Tenir compte des recommandations pour améliorer la politique des
manuels scolaires ;
mettre en oeuvre les recommandations de l’évaluation ;
Suite de la page 34
RÉFÉRENCES
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Lockheed, Marlaine et Adriaan M. Verspoor. Improving the
Quality of Primary Education in Developing Countries.
Washington, D.C.: Banque mondiale, Oxford University
Press.
40
- examiner la possibilité d’alléger les critères de qualification (marchés
similaires, chiffres d’affaires réalisés) dans les documents d’appel
d’offres à venir ainsi que les clauses relatives à la caution de soumission, à la garantie bancaire et à la surface financière pour ouvrir la
concurrence à un plus grand nombre de professionnels locaux.
NOTE
1
•
•
La réduction substantielle des prix unitaires dans les deux derniers contrats
est due à deux facteurs :
l’allégement des critères de qualification (marchés similaires, chiffres d’affaires réalisés) dans les documents d’appel d’offres ainsi que certaines autres
clauses ; ce qui a permis d’avoir un troisième concurrent ;
l’insertion d’une clause relative à une réduction des achats en gros par l’État.
La réduction s’applique aux prix en détail pratiqués pour le public.
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La revue des Échanges
NUMÉRO 3, 2006
GESTION DES MANUELS SCOLAIRES
ÉTUDE DE CAS DU LAOS
POLITIQUE DU MINISTÈRE DE L’ÉDUCATION
POUR LES MANUELS SCOLAIRES
CONTEXTE
Depuis 1990, la République Démocratique Populaire du Laos a
effectué une réforme d'éducation qui met en application cinq programmes :
1 Développement de l'éducation générale ;
2 Renforcement des capacités des professeurs ;
3 Développement de l'éducation non formelle ;
4 Développement de l'enseignement supérieur et technique ;
5 Renforcement des capacités d'administration et de gestion de l'éducation.
Durant l'année 2000, le MOE a revu et mis à jour les programmes
cités ci-dessus, les a adaptés à la situation actuelle et remplacés par :
1 L'extension de l'accès à l'école ;
2 Le renforcement de la qualité de l'éducation ;
3 Le renforcement de l'administration, de la gestion et du pilotage de
l'éducation.
Le développement de l'éducation générale a continué par la révision des programmes (curricula) et du matériel didactique. Le renouvellement des programmes du primaire et secondaire premier cycle s'est
focalisé, en particulier sur l'intégration des matières. Les manuels et les
guides du professeur ont été compilés, des prototypes d'aides pédagogiques ont été conçus et produits. De nouvelles stratégies d'enseignement et d'étude, centrées sur l'élève, ont été présentées ; elles avaient
pour objectif de stimuler les initiatives des apprenants, de développer
la pensée logique, de trouver des solutions à des situations de problèmes et de développer les capacités d'améliorer la qualité de la vie.
Les manuels de l'éducation secondaire deuxième cycle ont été également mis à jour, édités et distribués aux écoles pour fournir aux apprenants les connaissances de base sur le monde du travail et les préparer
à une éducation permanente sur diverses qualifications scolaires et
professionnelles.
Le développement des manuels scolaires et des guides du professeur durant les 12 ans de réforme éducative a apporté une contribution
importante à l'amélioration de la qualité de l'enseignement et à sa pertinence, en particulier à travers les standards internationaux d'enseignementetl'innovation méthodologique. On a incorporé auxprocessus
d'enseignement et d'apprentissage les quatre piliers de l'enseignement : l'étude pour savoir, l'étude pour savoir faire, l'étude pour savoir
être et l'étude pour savoir vivre ensemble dans une culture tournée vers
la paix.
Dans un proche avenir, on doit aborder beaucoup de problèmes
concernant la politique du livre, et en particulier comment réaliser de
façon durable l'approvisionnement en manuels scolaires. Qui devrait
partager la responsabilité de la planification, de la gestion et du suivi du
processus d'approvisionnement en manuels ? Comment le secteur
privé peut-il participer au développement des manuels et des livres
complémentaires que sont les ouvrages disponibles en bibliothèques ?
On doit aussi examiner avec attention les aspects techniques de la production et de la distribution des livres aussi bien que le développement
des capacités des concepteurs de livres, des auteurs, des illustrateurs,
des rédacteurs, des éditeurs et des distributeurs.
L'éducation permanente et le développement des habitudes de lecture parmi la population présupposent l'existence d'une industrie d'édition active et un réseau des librairies, aussi bien que l'existence de
copyright et d'autres lois et règlements concernant l'édition.
DÉVELOPPEMENT DES PROGRAMMES (CURRICULA)
Le programme (curriculum) est le document officiel qui énonce les
objectifs de l'enseignement, son contenu, les méthodes pour l'enseigner et l'étudier, ainsi que les activités pour contrôler et évaluer, le tout
représentant le processus complet du cycle de l'enseignement.
Le décret ministériel du 22 mars 2005 sur la mise en place du
Comité pour l'Approbation des Curriculum et les Instructions sur le
Matériel didactique (CACIM), déclare qu'il est du devoir du CACIM aussi
bien d'examiner etde mettre à jour lesprogrammesetle matérieldidactique que de les approuver.
La durée idéale d'un programme est d'environ 10 ans. Au delà de
cette limite, tout programme devrait être passé en revue et mis à jour
afin de l'adapter aux changements socio-économiques et aux tendances générales du monde. Cependant, vu les contraintes financières
du pays et la pénurie de ses ressources humaines, il n'a pas été possible d'effectuer cette revue et cette révision dans cette limite de temps.
Pendant la période de réforme, le ministère a aussi permis aux
autorités locales d'éducation de participer au développement de contenus de programmes pertinents en leur confiant 10% du temps alloué.
Ceci pour permettre d'adapter l'enseignement à la culture, à l'environnement et aux activités économiques locales. Mais l'attribution des
rôles et la définition des responsabilités respectives n'ont pas été déterminées, et la participation locale a été de ce fait limitée. Dans la pratique, la plupart des écoles de tout le pays mettent ainsi en application
jusqu'à maintenant l'essentiel du programme d'études national.
Le plan stratégique du développement d'éducation pour 20012002 a augmenté la part du programme d'études local qui peut maintenant couvrir 20% du contenu et du temps. Dans ce contexte, le
ministère et les organismes administratifs locaux d'éducation doivent
La revue des Échanges
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41
coopérer pour favoriser le développement de la part locale des programmes.
POLITIQUE POUR LES MANUELS
Objectifs généraux
• Faire en sorte, par le développement, la production et la distribution
de matériel didactique de haute qualité, que l'éducation favorise un
enseignement complet couvrant l'idéologie, les valeurs morales, la
politique, les capacités intellectuelles, les travaux sur les connaissances et l'éducation esthétique et physique.
• Contribuer à l'éradication de l'analphabétisme dans les groupes ethniques.
• Fournir les livres pour l'enseignement obligatoire primaire et secondaire premier cycle.
• Fournir des livres qui respectent les directives nationales, pour des
apprenants de tous niveaux, de l'éducation formelle et non formelle.
• Favoriser l'édition, par le secteur privé, de livres qui inviteront tout le
monde, dans la société, à un comportement de lecteur, et, en même
temps, soutenir le développementd'une plusgrande capacité de production de livres pour les établissements éducatifs et la société tout
entière.
Principes pour le développement des manuels
Les manuels, les guides pour enseignants et tous les autres matériels didactiques utilisés en enseignement général doivent respecter les
programmes prescrits par la loi sur l'éducation, qui stipule : « les programmespour chaque niveau, chaque sous-secteur d'éducation, ycompris formel et non formel, doivent refléter les directives politiques du
parti, les objectifs d'éducation et de formation du gouvernement, les
tendances du développement socio-économique du pays, les progrès
scientifiques et technologiques et la situation internationale. »
Par conséquent, la teneur des manuels doit présenter des caractéristiques définies nationalement, scientifiques, progressistes, pour le
plus grand nombre et modernes ; elle doit assurer le processus d'enseignement et d'étude, d'assimilation et d'apprentissage de tous, pour
acquérir des compétences et des comportements adaptés dans les
domaines politique, idéologique, moral, esthétique, physique et professionnel pour permettre à tous d'accéder à la formation tout au long
de la vie en intégrant les divers aspects de la formation : pour savoir,
pour savoir faire, pour savoir être et pour savoir vivre ensemble
La langue pour l'enseignement
La Loi constitutionnelle de la RPD Lao et la Loi sur l'éducation affirment : « La langue lao et l'alphabet lao sont les médias officiels de l'enseignement dans tous les établissements éducatifs et toutes les écoles.
Le gouvernementfavorise l'organisation de l'enseignementdeslangues
étrangères ou en langue étrangère si cela s'avère approprié et utile. »
Pour l'enseignement de la langue et de l'alphabet lao dans les secteurs où vivent la plupart des enfants d'origines ethniques, on utilisera
la nouvelle technique de l'enseignement du lao aux enfants ethniques,
intitulée « Atelier de langage fondamental » (Concentrated language
encounter : CLE), qui combine diverses techniques d'enseignement des
quatre capacités linguistiques de base et qui ayant prouvé son efficacité
doit être mise en application.
Les manuels doivent respecter l'identité nationale, l'indépendance,
les caractéristiques du plus grand nombre ; la langue doit être adaptée
à la capacité d'étude des élèves de diverses catégories d'âge. Il est
recommandé d'éviter l'utilisation inutile des mots étrangers quand les
42
mots et expressions adaptés au concept concerné existent dans la
langue lao. La grammaire moderne du lao pour l'usage scolaire, en trois
parties, élaborée et éditée par MOE/L'INRSE, devrait servir de guide à
l'utilisation du lao dans l'écriture des manuels.
Le contenu des manuels
La teneur des manuels devrait, tout d'abord, refléter les principes
d'éducation prescrits par la loi d'éducation et les programmes, et poursuivre les objectifs de développement des ressources humaines
adoptés par le gouvernement.
D'un point de vue pédagogique, le contenu doit être précis, lisible,
étudiable, enseignable et approprié au niveau de formation des utilisateurs. Il doit être systémiquement organisé en unités, leçons, matières,
et sous matières, assurer de façon progressive l'introduction des nouveaux concepts et de la connaissance, et doit couvrir les domaines de
l'enseignement tout au long de la vie.
Afin de faciliter la compréhension des apprenants, les manuels doivent contenir les illustrations, diagrammes, tables et symboles requis
pour clarifier l'exposé des contenus.
D'un point de vue politique, le contenu des manuels doit répondre
aux directives nationales qui favorisent la démocratie populaire, le respect de la constitution et des lois, les coutumes les meilleures, les habitudes, traditions et cultures des multiples groupes ethniques ; il doit
enseigner l'idéologie et la culture de la paix, la solidarité entre les
groupes ethniques, la compréhension entre nations sans discrimination et se faire particulièrement l'écho de l'égalité entre les sexes.
Depuis la réforme de l'enseignement en 1990 il y a eu un passage
d'une pédagogie centrée sur l'enseignant à une pédagogie centrée sur
l'apprenant ; elle encourage une participation plus active des élèves
grâce au travail en groupe ; elle passe par des questions posées au sein
de conversation ; elle utilise les outils pédagogiques et l'apprentissage
à partir de situations de la vie réelle. Les professeurs sont également
encouragés à employer diverses autres techniques d'enseignement et
d'étude telles que les séances de remue-méninges, les discussions, les
jeux de rôle, les jeux, etc. Ces évolutions doivent être également prises
en compte dans les manuels.
Les outils pédagogiques
Employer des outils pédagogiques dans la classe peutmener à intéresser plus et à apprendre de façon plus active avec une créativité
accrue. Les écoles d'État et les établissements éducatifs doivent donc
disposer des outils et matériels pédagogiques et autres dispositifs pour
l'étude, comme les bibliothèques, les laboratoires, etc., qu'il revient au
gouvernement de fournir. Le gouvernement encourage tous les secteurs
économiques (privé y compris) à investir dans la production du matériel
didactique et des outils pédagogiques. Le secteur privé est également
encouragé à produire ou importer divers outils pédagogiques à
employer dans les écoles et les établissements éducatifs conformément
aux lois et règlements publiés par le ministère de l'Éducation.
Afin de réduire la dépense, l'INRSE a conçu et produit des prototypes d'outils pédagogiques en employant des matériaux locaux issus
de récupérations. Les prototypes peuvent être reproduits par les professeurs qui participent aux ateliers organisés et facilités par le personnel de l'INRSE. Le gouvernement peut également s'engager dans une
telle production en dotant le ministère de l'Éducation d'une usine de
matériel didactique pour la production en série et en demandant au personnel de l'INRSE d'organiser, pour les professeurs, des ateliers de formation à l'utilisation des outils pédagogiques.
La revue des Échanges
NUMÉRO 3, 2006
La formation des enseignants
Les enseignants stagiaires dans les universités et écoles normales
apprennent les nouvelles méthodes pédagogiques prescrites par les
programmes ; ils devraient également être formés en ayant recours aux
nouveaux manuels pour la classe.
Dans le passé, la formation des professeurs n'a pas correspondu
auxbesoinsdu système d'éducation. En conséquence, prèsde 22% des
enseignants du primaire ne sont pas encore formés. Les guides du professeur, qui accompagnent les manuels, sont particulièrement importants en tant que matériel de formation à la méthodologie pour ces professeurs. Mais quand de nouveaux manuels sont élaborés, il est nécessaire que tous les enseignants (y compris ceux des écoles privées)
soient formés dans des ateliers d'orientation et soient mis au courant
des nouveaux outils, des méthodes d'enseignement et d'étude qui correspondent au nouveau programme.
Le processus de l'élaboration, de la production et de la distribution
des manuels
L'INRSE, en tant qu'agence académique du ministère, est responsable du développement des manuels pour tous les sujets, y compris
les livres guides pour les enseignants, les livres d'exercices, les livres
complémentaires, et tous les matériels pédagogiques, imprimés ou pas
employés dans les écoles d'enseignement général, du jardin d'enfants
aux six niveaux de l'école secondaire. Le processus inclut les étapes suivantes :
1. Projet et approbation de la structure d'un livre
Selon le décret du ministre de l'éducation, le Comité pour
l'Approbation des Curriculum et pour les Instructions sur le Matériel
didactique (CACIM) rassemble au cours d'une réunion les auteurs du
livre pour en déterminer la structure et ceci pour chaque sujet ou catégorie. Cela comprend les nombres d'unités, les leçons, les objectifs de
l'étude, les concepts principaux, leur répartition dans le temps, les
nombres de de pages, d'illustrations, de tables, les outils pédagogiques, les activités pédagogiques, les méthodes de contrôle et d'évaluation, le tout conformément aux programmes (curriculum) et au programme soumis (syllabus).
Fournir les manuels représente une lourde dépense pour le budget
d'AIOE. Détailler le budget et les coûts de fabrication et de distribution
de chaque livre individuelestdoncnécessaire pour s'assurer que le coût
complet de mise à disposition du manuel n'excédera pas le cadre
budgétaire du ministère de l'éducation. Les devis des imprimeurs doivent être bien connus avant le début de la planification d'un nouveau
titre et le budget doit être fait pour chaque titre. Une fois la structure du
livre arrêtée, l'INRSEdoitinformer lesauteurssur leschoixéconomiques
qui affecte le coût de production en matière de nombre de pages,
d'images, du recours à l'utilisation de couleur, etc.. CACIM approuve la
structure de livre.
2. Écriture du manuscrit
L'INRSE nomme, pour chaque titre d'ouvrage, 1 ou 2 spécialistes de
la matière comme auteurs principaux qui devront travailler avec 3 à 5
auteurs associés à l'élaboration de chaque titre de livre. Il est cependant
important que l'équipe ne comporte pas seulement des spécialistes de
la matière. L'équipe devrait inclure des professeurs qui ont l'expérience
des catégories d'élèves concernées afin de garantir l'adaptation du
contenu au niveau des élèves et une bonne coordination avec les autres
sujets.
Dans leur travail, les auteurs emploieront les documents nationaux
et étrangers comme documentation de référence ; ils les adapteront
pour être conforme à la situation politique, économique, culturelle et
sociale de la RDP Lao. Ilestimportantque la bibliothèque de l'INRSEdispose d'un fond documentaire suffisant pour qu'elle puisse fournir des
ouvrages de référence modernes et des manuels provenant de pays
étrangers.
L'écriture du manuscrit est réalisée sous contrat signé entre les
auteurs et le directeur de l'INRSE, avec approbation du chef du comité
de coordination du projet ou du directeur du cabinet du ministère de l'Éducation. La teneur du manuscrit doit être en conformité avec la structure du manuel approuvée par le CACIM.
3. Illustration du livre
Les auteurs définissent la teneur de chaque illustration et doivent
fournir si nécessaire des croquis ou des modèles pour les illustrations.
L'INRSE signe un contrat avec les illustrateurs extérieurs pour dessiner
les images pour les textes correspondants.
4. Conception des outils pédagogiques
L'INRSE organise la conception des prototypes des outils pédagogiques à employer en classe. Les prototypes sont conçus et produits
aussi bien en accord avec les objectifs, les contenus et les activités
recommandés dans le manuel, qu'avec les besoins des professeurs.
5. Révision et test du manuscrit
Quand les délais le permettent, l'INRSE détermine des écoles pour
tester les manuscrits du manuel lui-même et celui du guide du professeur, en désignant des professeurs qui les emploieront en classe, pendant 1 ou 2 semestres dans l'idéal. Les spécialistes de l'INRSE conduisent le suivi du test et rassemblent les données issues d'observations
directes, d'entrevues et de questionnaires. Le manuscrit est alors mis à
jour en conséquence.
Si le temps manque pour vraiment tester, les manuscrits devraient
au moins être lus par des critiques indépendants - professeurs et spécialistes de la matière. Les prototypes des outils pédagogiques
devraient également être sujets de tests.
6. Correction et validation
Le CACIM au ministère doit passer en revue, mettre à jour et valider
le contenu du livre après correction, selon les résultats des tests et
compte tenu de sa conformité avec les directives gouvernementales,
avec la culture nationale, le respect de la grammaire et de la langue de
lao, l'exactitude scientifique, la stratégie pédagogique de centration sur
l'élève, la qualité des illustrations et l'intérêt suscité pour les apprenants, les tendances internationales modernes du progrès social (respect des droits des enfants, promotion de l'égalité des sexes, formation
tout au long de la vie, culture pour le développement de la paix).
7. Processus éditorial
Les manuscrits révisés et validés seront expédiés à l'éditeur, qui
éditera le texte et travaillera étroitement avec les auteurs, le responsable de la mise en page et l'illustrateur, tout au long du processus éditorial, jusqu'à l'étape finale qui est la préparation des épreuves bonnes
à filmer (BAT), en utilisant les programmes informatiques spécialisés
dans l'édition et des imprimantes laser. L'INRSE a constaté que la qualité est bien meilleure et que beaucoup d'erreurs peuvent être évitées si
le responsable de la mise en page, l'éditeur ou les auteurs, travaillent
La revue des Échanges
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43
étroitement ensemble de sorte que chaque opération puisse être vérifiée immédiatement sur l'écran de l'ordinateur ou sur des listes
imprimées. Aujourd'hui beaucoup d'imprimeurs préfèrent disposer des
fichiers numériques au lieu des épreuves finales bonnes à tirer (BAT).
L'INRSE doit rester en contact avec les imprimeurs pour s'assurer que le
matériau soumis est compatible avec l'équipement technique des
imprimeurs et pourra être produit de façon économique.
liers du primaire, ceux des régions urbaines, rurales et éloignées. Pour
le niveau secondaire, la politique de gouvernementestde distribuer des
livres gratuitement aux enfants des familles pauvres et aux enfants des
minorités ethniques. Toutefois, pour les enfants issus de famille économiquement aisées de la capitale ou des préfectures de provinces,
(excepté la région spéciale) les parents doivent aider à couvrir la dépense d'achat des livres.
8. Correction des épreuves
Avant l'envoi aux imprimeurs, l'éditeur et les auteurs doivent corriger soigneusement et ainsi éliminer les erreurs d'épellation, de présentation des illustrations, d'utilisation des polices, dans les symboles, etc
Le directeur de l'INRSE signe alors le bon à tirer. Toutes les étapes citées
ci-dessus qui décrivent le processus d'élaboration d'un livre sont effectuées par le personnel de l'INRSE en collaboration avec des instituteurs,
des professeurs et des spécialistes des établissements éducatifs.
12. Objectif quantitatif pour les livres : le ratio élève
La politique de base du gouvernement est de mettre à disposition
un livre par étudiant, ou encore un ratio de 1 pour 1 pour chaque matière du niveau 1 au niveau 11. Le gouvernement exerce directement la responsabilité de la mise à disposition des manuels pour toutes les écoles
primaires de tout le pays.
En outre, le gouvernementencourage le secteur privé à imprimer des
livres pour les vendre et ainsi contribuer à ce que tous les enfants disposent de livres pour toutes les matières étudiées. L'expérience en matière
d'impression de livres a prouvé dans le passé que les imprimeurs commerciaux étaient seulement disposés à imprimer les livres de deux
niveaux du primaire, les seuls considérés comme rentables à la vente.
9. Production du livre
En général, les imprimeurs signent un contrat à l'issue d'un appel
d'offres local (AOL) auprès des imprimeurs publics et privés. Dans certains cas un appel d'offres international (AOI) est exigé. La durée d'une
version de livre estidentique normalementà celle desprogrammesbien
que des corrections ou des améliorations nécessaires puissent parfois
être présentées au moment des réimpressions. Le papier doit présenté
une résistance élevée à la traction ainsi qu'une bonne opacité (= non
transparence) ; il ne devrait pas être trop glacé. L'expérience du Laos
prouve que le papier 70g convient. Il est recommandé que la couverture
soit glacée ou stratifiée (couvert par une feuille de plastique mince) pour
résister à l'usage et à l'humidité. Le livre devrait être relié, bien que l'utilisation d'agrafes (employer des agrafes d'acier inoxydable) soit admise
pour les livres minces (nombre maximum de pages : 80)
10. Distribution des livres
Au Laos, on demande aux imprimeurs qui ont gagné l'appel d'offres
d'empaqueter etde distribuer lesmanuelsauxutilisateursselon lesprévisions de distribution faite par MOE. Les livres sont empaquetés selon
les prévisions faites pour chaque école.
En ce qui concerne les écoles qui sont inaccessibles par la route en
toutes saisons, les gagnants des appels d'offres doivent allouer des
fonds pour rétribuer les personnes qui se chargeront du transport, y
compris les professeurs et les étudiants qui offrent leur service pour
apporter les livres dans les lieux choisis. La distribution des livres doit
être effectuée tous les ans pendant la saison sèche et commencer en
janvier pour finir vers la fin mai avant le début de la saison des pluies.
Les imprimeurs doivent maintenir une réserve de livres pour permettre le remplacement de ceux qui seront endommagés et perdus. Le
ministère de l'Éducation permet également au secteur privé de vendre
les livres produits et ainsi d'alléger la charge financière du gouvernement ; mais le prix du livre doit être sous le contrôle de l'État de sorte
que les enfants des milieux économiquement défavorisés puissent également les acheter.
11. Financement des manuels
Le gouvernement est directement responsable de l'investissement
nécessaire à la production et la distribution des livres. En même temps
il crée des fonds alimentés par différentes sources, y compris le secteur
privé local et étranger pour augmenter la contribution à cette cause.
Le gouvernement distribuera les livres gratuitement à tous les éco-
44
13. Problèmes de copyright
Le texte et les illustrations de chaque livre élaboré localement sont
protégés par la loi de la RDP lao sur le copyright. Toute personne individuelle ou morale a le droit en RDP Lao de développer des livres scolaires, à condition qu'ils soient évalués, contrôlés, mis à jour et
approuvés par le CACIM avant l'impression et la distribution. Dans ce
cas, ces personnes posséderont aussi le copyright de leur travail.
Cependant, si le développement et l'écriture d'un tel livre sont financés
par le budget de gouvernement ou par des donateurs en coopération
avec le gouvernement ce copyright appartiendra au ministère de l'éducation, et pas à l'auteur ou à l'éditeur du livre.
Chaque livre devra avoir une notification de copyright (habituellement sur le dos de la page titre) composé du symbole de copyright ©,
du nom de la personne ou de la compagnie qui possèdent le copyright
et la date de la parution. Cette page peut également contenir « l'ISBN »
du livre, nombre matricule unique obtenu grâce au système international de numérotation standard du livre, où des groupes de chiffres identifient la langue, l'éditeur et le titre individuel.
14. Évaluation des manuels
Chaque manuel, avant l'impression, doit être sujet à une évaluation
organisée par le CACIM au ministère de l'éducation. Les critères principaux de validation sont les suivants :
• Le contenu est en conformité avec les caractéristiques du programme.
• Le contenu est approprié aux intérêts, à l'expérience et au degré
d'instruction des apprenants.
• La méthodologie pédagogique présentée dans le manuel et dans le
guide du professeur est appropriée, faisable et efficace.
• Le niveau de langue convient au groupe cible d'apprenants.
• La conception, la disposition, les illustrations et l'organisation du
contenu sont efficaces, appropriées, intéressantes et faciles à comprendre ; elles facilitent l'emploi du livre.
• Le livre fait référence de façon appropriée à la culture nationale, à la
diversité ethnique et à l'égalité des sexes.
• Le guide du professeur soutient une utilisation efficace du manuel ;
sa compréhension est accessible pour tous les enseignants.
La revue des Échanges
NUMÉRO 3, 2006

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