Téléchargement - Club Alpin Nice Mercantour / CAF de Nice

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Téléchargement - Club Alpin Nice Mercantour / CAF de Nice
L’Inca de la brêche Borgonio ( Haute-Tinée), juillet 1984
Photographie : Jean-Louis MEYTRAL
Le mot
du Président
► Eric Dellacasa
Mes premiers mots iront aux bénévoles
de notre club.
Le bénévolat n’est plus trop à la mode
aujourd’hui. Et pourtant, sans bénévoles, que ferions nous ?
Un grand merci donc à tous les bénévoles du club : les nombreux encadrants de
nos activités bien évidemment et aussi ceux du siège. Et on pense tous très fort à
notre ami Alain FLAMANT qui a tant donné pour le club et qui a besoin de notre
soutien aujourd’hui.
Leur dire que c’est grâce à eux, et ceux qui se sont relayés depuis 1879 - et oui déjà -,
que nous sommes aujourd’hui, avec plus de 1.600 adhérents, l’un des plus importants clubs de sports et loisirs du département et l’un des plus gros clubs de montagne de France. C’est dans leur engagement, leur énergie, que toute l’équipe du
comité directeur puise sa motivation.
C’est donc un grand bonheur que d’être à la présidence de ce club historique de notre magnifique pays niçois, de ce club de passionnés, de ce club militant. Militant
de la Montagne, fabuleux espace de liberté et de partage, qu’il nous incombe de
préserver.
Je remercie une nouvelle fois, et du fond du cœur, Jean Pierre MARTIN, pour son
dévouement durant les 12 années passées à la présidence de notre club et pour
l’aide qu’il continue à m’apporter au quotidien.
Concilier vie active bien remplie et engagement associatif, tout en vivant pleinement sa passion, n’est pas tous les jours chose facile. Le travail « administratif »
d’un gros club prend beaucoup (trop) de temps, au détriment des projets. Mais
c’est ainsi. Toute l’équipe du comité directeur est au travail, à votre service et au
service de notre passion commune. Nous aurons l’occasion de revenir dans les
mois qui viennent sur tous les projets en cours.
J’ai commencé par les bénévoles et je ne pouvais pas finir sans saluer également
le travail quotidien, et la patience.., de notre collaboratrice, Michelle, sans qui rien
ne serait possible.
2010 - N°239
Club Alpin Français
SOMMAIRE
Le mot du Président. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
p3
Infos club. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
p7
Inventaire ATBI de la biodiversité
du Mercantour. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p11
Deux belles randonnées
hautes alpines en Vanoise. . . . . . . . . . . . . . p12
Pas de Prefouns,
près du Lac nègre. Photographie
de Jean-Louis MEYTRAL
DIRECTEUR DE PUBLICATION :
Eric DELLACASA
Comité de lecture :
Alyne RAISON
Bernard ALLIETTA
Christine CHAPOUTOT
Danièle CHIERICO
Jean-Louis MEYTRAL
Jean-louis RIBOT
Martial BOS
Michèle FLORI
RÉALISATION :
Image MP ( 04 93 54 09 52 )
IMPRESSION :
Imprimix ( 04 92 15 53 30 )
Poésie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p19
Portfolio, Bernard ALLIETTA . . . . . . . . . . . . p20
Aéronefs, parapentes
et Parcs Nationaux. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p31
Formation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p34
Etoiles des neiges . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p36
Les mots de nos montagnes . . . . . . . . . . . . p39
Le Vercors septentrional :
terre des hommes. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p43
Le bulletin est l’un des outils
de communication de notre
club et les articles signés
n’engagent que leurs auteurs.
printemps - ete 2010
N° 239
ISSN 1167-8 / 429
Abonnement annuel :
(3 numéros)
France : 7 €
Etranger : 11€
Club Alpin Français Nice-Mercantour
14, avenue Mirabeau - 06000 NICE
Tél : 04 93 62 59 99 - Fax : 04 93 92 09 55
E-mail : [email protected]
Site web : www.cafnice.org
Permanence les lundis, mardis, jeudis et vendredi de 16h à 20h.
»»»»»»INFOS CLUB
REFUGE
» Des évolutions pour la
imprimable pour être présenté au gardien
à l’arrivée au refuge.
Et enfin, le refuge de Gialorgues, bâtiment
non gardé, peut désormais être également
réservé en ligne.
centrale de réservation.
www.cafresa.org
Nous espérons vivement que ces évolutions
faciliteront la réservation de nos refuges du
Mercantour.
Le Club Alpin Nice-Mercantour a réalisé
un système informatique de réservation
par Internet de ses refuges. Ce système
est ouvert au public depuis le mois de
septembre 2007.
Adresse du site : www.cafresa.org
L’équipe de la centrale de réservation
Dans le souci d’améliorer nos services et
d’être en adéquation avec les attentes des
réservants, nous avons apporté quelques
évolutions à notre site.
ACTIVITES
» N° de téléphone
Désormais, le réservant a la possibilité de
modifier sa réservation en ligne dans les
conditions suivantes :
changement du nombre de personnes
changement du nombre de nuits au
refuge
changement de date d’arrivée au refuge
par activités
Notre nouvelle installation téléphonique
permet d’accéder directement à l’accueil
des différentes activités.
Secrétariat
D’autre part, il s’est avéré que le processus
de réservation des refuges sur internet
était parfois difficile à appréhender pour
les non-initiés aux pratiques des sites de
vente en ligne. Nous avons donc mis en
place un certain nombre d’explications sur
les différentes pages afin de mieux guider
l’internaute.
Accueil
Ski-Alpinisme
Escalade
Mille-Pattes
Stagiaire
Président
Bibliothèque
De plus, une fois le paiement des arrhes
effectué et validé, un bon de réservation
est accessible, rappelant les principales
informations liées à la réservation et
2010 - N°239
04 93 62 59 99
ou
04 93 62 72 20
04 93 62 72 21
04 93 62 72 22
de 18 à 20 h
04 93 62 72 23
04 93 62 72 24
04 93 62 72 25
04 93 62 72 26
04 93 62 72 27
Club Alpin Français
»»»»»»INFOS CLUB
LIVRES
REFUGES
»Dates de gardiennage
Les cafistes publient.
Les plus belles
courses des Alpes
de la Méditerranée.
»
des refuges :
Cougourde, Madone de Fenestres,
Nice,Valmasque, Merveilles :
du 12.06.2010 au 26.09.2010
Il s’agit d’un livre sur les massifs du
Mercantour et de l’Argentera.
Vens :
du 12.06.2010 au 19.09.2010
Cet ouvrage propose une sélection de 67
courses d’alpinisme, de ski et d’escalade.
« Les plus belles courses des Alpes de
la Méditerranée » détaille des courses
classiques ou insolites. Toutes présentent
un grand intérêt technique dans des
cotations s’échelonnant du PD à l’ED. Les
descriptions sont largement
illustrées de photographies
inédites.
Rabuons :
Du 19.06.2010 au 19.09.2010
Je remercie vivement la
contribution de Martial
Bos et Bernard Giraudon,
membres du club.
Les plus belles courses des Alpes
de la Méditerranée.
Nicolas Féraud et Jean-Claude
Raibaud.
Alticoop Editions.
22.5cm x 26cm. 224 pages. 33.50€
www.alticoop.com 04 93 98 58 53
Club Alpin Français
N°239 - 2010
»»»»»»INFOS CLUB
50 ans de Club
»Laurette ARROM
NOUVEAU SERVICE
Lors de l’Assemblée Générale de notre club
de décembre 2009, nous avons eu le plaisir
de remettre à Laurette ARROM la médaille
des 50 ans d’adhésion au CAF de Nice.
» VOS PETITES
ANNONCES DANS
LE BULLETIN DU CLUB
A l’attention de tous les CAFISTES de la
section Nice-Mercantour
Dès la parution du numéro d’octobre
2010 nous allons réserver une page
du bulletin pour une rubrique « Petites
Annonces ».
Les modalités en seront les suivantes :
Qui le croirait en voyant et écoutant la
sémillante Laurette, intarissable sur les
récits et albums photos de ses nombreux
voyages à travers notre planète..... « en attendant la planète mars »...et
toujours assidue à nos activités. Toutes nos
félicitations, Laurette..
»
Comité de Direction
»
Le coût d’une annonce sera de 5
Euros à régler au CAF en espèces ou
chèque au secrétariat.
»
Toute annonce devra présenter une
relation avec les activités du Club. (achat
ou vente de matériel, de biens, demande
de contact pour activités « Montagne »....
etc).
Pour le bulletin d’octobre 2010
la date limite de réception des textes
d’annonces sera fixée au 31 juillet 2010.
»CANDIDATURE
»
Le Club se réserve le droit
d’accepter ou refuser toute annonce ne
correspondant pas aux critères précisés.
Les candidatures pour siéger au comité
de direction de notre club seront reçues
jusqu’au 4 septembre 2010 dernier délai.
N’hésitez pas …..et venez nous rejoindre
pour assurer un renouvellement toujours
positif des dirigeants bénévoles du club.
Merci.
Club Alpin Français
A bientôt sur la page
« Petites Annonces ».
N°239 - 2010
Nature
Inventaire a t b i
de la biodiversité du Mercantour
► par Jean - Louis MEYTRAL◄
Depuis l’été 2007, le Parc National du Mercantour a mis en place un projet d’inventaire de
la biodiversité : A T B I <all taxa biodiversity inventories< dont l’objectif est de rechercher
toutes les espèces présentes dans le Parc National du Mercantour afin d’améliorer la
connaissance et la gestion des milieux naturels existants et essayer d’éviter la disparition
d’espèces patrimoniales, richesse biologique de notre département.
Aussi verrez-vous parfois des tentes malaises
postées comme ici sur notre photo au col
de Salèse durant l’été 2009, dont le but est
de capturer des insectes volants comme des
diptères (mouches, moustiques) ou comme
des hyménoptères (groupe de classification
des abeilles et autres guêpes). Si vous en
observez cet été 2010 dans le Mercantour,
n’y touchez pas et ne restez pas à proximité:
préservez ainsi le bon fonctionnement du
système. Le Parc vous en remercie d’avance.
PS : le projet ATBI est réalisé en collaboration avec divers
muséums d’histoire naturelle d’Europe, le PNM et le
Parc italien Alpi Marittime. C’est dans ce cadre-là que
le conservatoire botanique méditerranéen a réalisé un
inventaire exhaustif de la flore des plantes vasculaires sur
la commune de St Martin-Vésubie l’été 2009 et a découvert
sur cette commune une plante nouvellement décrite par la
science en 2008 et trouvée près du pas du Porco en Italie,
dans le massif de l’Argentera et jamais encore observée sur
le territoire national. Cette découverte permet d’agrandir
l’aire de répartition de cette espèce nommée Moehringia
argenteria que l’on croyait endémique de l’Argentera et
elle ajoute une nouvelle espèce à la flore de France et bien
sûr à la flore locale déjà riche de plus de 2000 espèces de
plantes.
TEXTE DE J-L MEYTRAL d’après un panneau d’affichage du PNM
2010 - N°239
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Club Alpin Français
Randonnée
DEUX BELLES RANDONNEES
HAUTES ALPINES EN VANOISE
( Juillet 2008 )
► par Jo Fredy ◄
Premier objectif : la traversée du refuge du CARRO (2761m) à celui des EVETTES (2590m)
par les sources de l’Arc. Cette randonnée haute alpine concoctée par notre ami Jean-Luc
n’était qu’une mise en jambes pour la suivante : l’ALBARON (3637m). Mais commençons
déjà par rejoindre BONNEVAL sur Arc et l’ÉCOT, dernier hameau de cette vallée de l’Arc,
joyau du Parc National de la Vanoise.
Depuis NICE, puis MARSEILLE, SISTERON , MONTGENEVRE, une petite erreur de notre ordinateur (ne vous y fiez pas, vous pouvez avoir des surprises !) car il nous a mal aiguillés
et nous nous sommes retrouvés devant le tunnel du FREJUS sans l’avoir voulu, au milieu
d’une cohorte de camions ( vivement le ferroutage, car pour les voitures c’est invivable !).
Enfin nous arrivons à l’Ecot (2027m). Départ sac au dos pour le refuge du CARRO. Après
8h de voiture, faut y aller et monter 700m. Là, c’est la Vanoise dans toute sa splendeur ;
durant toute la montée une végétation dense et variée nous accompagne pour notre plus
grande joie : anémones en fruits, campanules barbues d’un bleu clair éclatant, lys martagon, œillets, minuartis, gentianes de koch, raiponce de Haller, violettes, trolles jaunes,
rhodolia rosea et en arrivant au Carro la joie de trouver la primevère du Piémont dont l’aire
de répartition est surtout italienne, cette primevère ne déborde que très localement sur la
Savoie et la France d’où l’importance biogéographique de cette zone Carro – Evettes.
Nous sommes très bien accueillis par la gardienne (je n’y étais plus revenu depuis 1970 et
une course à la Levanna occidentale). Le refuge est devenu un 3 étoiles et les mauvaises
odeurs à l’extérieur ont disparu.
(Ce refuge du CARRO a été construit en 1925 par le CAF de Lyon et agrandi en 1976, il a fait
l’objet de travaux en 2005 avec adjonction d’une terrasse accessible depuis la salle commune, douches, lavabos, rénovation des dortoirs et mise en place de toilettes particulières
et adaptées à la haute montagne : nommées SANIVERTES, elles fonctionnent sans eau
ni produits chimiques, les odeurs sont aspirées par la cuvette elle-même et les matières
triées par un tapis roulant actionné par une pédale, les matières fécales et papiers sont
séparés des urines et séchées dans des sacs ; ces toilettes fonctionnent de manière naturelle et protègent l’environnement, elles devraient être généralisées à tous les refuges de
haute altitude).
Le soir nous n’avons jeté qu’un un œil furtif sur les lacs Noir et Blanc, car le lendemain
matin c’est réveil à 4h pour cette course en traversée donnée en 8h sur le papier par les
Club Alpin Français
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N°239 - 2010
Col du Triéve
spécialistes. Nous en mettrons 11, car un certain passage, compte tenu de la régression
des glaciers juste au-dessus des sources de l’Arc, se fera en rocher après une traversée en
neige qui, vue d’en bas, traumatisera notre ami André qui préférera suivre l’Arc et descendre directement à l’Ecot avant de remonter nous rejoindre aux Evettes. Les 7 personnes
qui nous précèdent, montagnards aguerris nous montraient la voie mais nous étions perplexes cependant, malgré leur bonne humeur, à ce passage-là, sans problème bien sûr.
Nous avions au préalable passé le col des Pariotes (3057m) facilement ; c’est de là que l’on
attaque la Levanna occidentale, mais 38 ans après je n’ai rien reconnu. Après la longue
traversée du glacier des sources de l’Arc et le passage en escalade nous sommes arrivés
au col de Trieves. De là nous avons continué vers le col du grand Mean (3225m), sous la
pointe du même nom, longue marche fastidieuse dans la neige qui recouvre le glacier du
Mulinet qui fait suite au col du Trieves.
Nous n’arrêtons pas de nous émerveiller de la beauté de tous ces sommets nous entourant : les Levanna, la pointe Girard, la pointe du Grand Mean, la petite et la grande Ciamarella. Au col du grand Mean, arrêt casse-croûte avec les 7 de l’autre groupe.On se couvre
car une bise fraîche souffle. Puis c’est la traversée du glacier du grand Mean dominé vers
le bas par le mont Seti et en dessus par la cime Monfret (3371m). Par une longue traversée
encore, à flanc et dans une neige qui, heureusement, n’est pas trop fondante, on arrive au
2010 - N°239
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Club Alpin Français
Randonnée
col de la Disgrazia ( le malheur en italien) d’où une descente
en écharpe nous fait rejoindre la combe des Evettes ( diminutif de Eve=eau ).
Tout le long du parcours menant au refuge par la cascade
de la Recula nous étudions les plantes des moraines ( nous
avons bien sûr remisé nos crampons et la corde dans nos
sacs bien lourds pour une telle randonnée). Dans la terre
qui s’est accumulée derrière de gros blocs de roches vertes
nommées serpentinites (restes d’un fond océanique alpin),
nous observons des primevères à grandes feuilles, des pinguicula alpina à fleurs blanches, des linaires des moraines,
des violettes, des benoîtes rampantes jaunes, des bartsies
des alpes, des rhodiola rosa, sortes de sedum de haute montagne. Au fond, sur notre gauche, l’ALBARON nous domine
de ses 3627m. Le glacier des Evettes a, lui aussi, bien reculé
ces dernières années. Nous apercevons le refuge des Evettes bien avant d’y parvenir. Après le pont romain typique,
aperçu au dernier moment, il restait encore une belle pente
assez dure à remonter après 10h de glacier. Enfin, après 11h
et quart de marche, le but est enfin atteint et la joie est sur
nos visages. André ne nous rejoindra qu’une heure après, ce
qui commençait a nous inquiéter.
Deuxième objectif : l’ALBARON
Le deuxième jour nous devions donc atteindre l’ALBARON
depuis ce refuge des Evettes.
L’histoire de ce refuge mérite d’être contée : le premier refuge des Evettes, en pierre, a été inauguré en 1907. Il fut
incendié par l’armée française en 1940 et remplacé après
l’armistice de 1945 par un refuge en bois. Le refuge actuel
date de 1965. Conçu dans des bureaux d’études modernistes, il fut préconisé par Paris comme la solution du futur pour
l’hébergement des montagnards. Dans les années 70 il fut
pilote pour l’utilisation de l’énergie photovoltaïque qui a fait
depuis florès. Le refuge actuel est celui de 65, réhabilité il y
a peu par le CAF de Lyon qui en est propriétaire. Après cet
intermède, revenons à l’ALBARON : vu, revu cent fois le tracé
de la balade et ressassée la longue marche à 5h du matin sur
une moraine qui n’en finirait plus. Vu la fatigue, nous avons
modifié notre itinéraire en nous accordant un jour de repos
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N°239 - 2010
Deux belles randonnées hautes alpines en Vanoise
et en descendant à l’Ecot, visitant le hameau
aux toits d’ardoise ainsi que Bonneval, et on
décida de monter au refuge d’Averole par la
route des Vincendières (une première réfection fut réalisée en 1920. D’une capacité de
40 places, il était en bois recouvert extérieurement d’ardoises d’éternit rouge, d’où l’appellation par les italiens de casa rota. Ce bâtiment fut démoli en 1985, déjà remplacé par
la construction actuelle inaugurée en 1976).
Refuge Carro
De ce hameau, actuellement accessible uniquement par une navette, nous gagnons le refuge en une heure (2227m), parmi de belles
fleurs et en admirant la belle cascade de la lombarde captée un peu plus bas.
Vendredi réveil à 4h et nous attaquons le sentier à 4h 45, par nuit noire; en 2h il nous mène
sur la moraine du glacier du COLERIN, non sans avoir dérangé des moutons à l’estive. Le
Charbonnel est déjà chaperonné de nuages, mais l’ALBARON, que nous voyons sous un
autre angle que depuis les Evettes, nous semble plus accessible. Il faut quand même
gravir les 1400m de dénivelée alors qu’il n’y en avait que 1100m depuis les Evettes. Arrivés
à l’attaque du glacier nous apercevons sur la crête 7 personnes venant du refuge déjà
nommé. Nous avons encore 2h avant d’atteindre l’ultime col, duquel un grand plateau
Primula Pedemontana
Randonnée
Descente sur combe Evettes
s’étend jusque 20m sous la cime. Jean–Louis qui herborise à la fin de la moraine très longue
mais très facile à gravir et André nous lâchent à la fin de la rampe. Ils suivent toutefois notre
ascension jusqu’à la dernière combe. De là, en 1h (à 10h du matin) nous atteignons, Jean
- Luc et moi les rochers de l’ALBARON duquel nos 7 escaladeurs descendent en rappel.
Nous pensions arriver en neige au sommet, mais un coup de vent et ces 20m de falaise
nous obligent à redescendre, après avoir vu les 2 autres cordées traverser le grand plateau.
La redescente s’effectue sans problème, toujours face au Charbonnel dans les nuages.
Après 5h de montée et 4h de descente , nous rejoignons Vincendières et le village de
Bonneval où un gîte CAF nous permet de passer une bonne nuit de récupération.
Le lendemain, grosses pluies sur toute la vallée de l’Arc. Nous étions contents d’avoir
pu réaliser ces 2 courses en 5 jours. Deux réussites dans ces beaux paysages du parc national de la Vanoise, si bien fleuri et riche
d’une biodiversité exceptionnelle comme
celle encore plus exceptionnelle du massif du Mercantour qui nous est si cher !
Texte de Jo Fredy avec la participation de J-L Meytral pour l’histoire des refuges (informations données par des sites internet)
et la botanique. Photos J-L Meytral.
Club Alpin Français
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N°239 - 2010
Poésie
Printemps en Cerdagne
Si j’avais un pinceau
Je peindrais un décor de vertes montagnes,
Un immense tableau
Celui dont on rêve, le pays de cocagne.
Si j’avais un pinceau
Je mélangerais gris des roches et bleu du ciel,
Au merveilleux tableau
J’ajouterais tous les fondus de l’arc-en-ciel
Si j’avais un pinceau
Je répandrais les couleurs sur ma palette,
Le plus beau des tableaux
Ici, un ange nu avec son arbalète,
Si j’avais un pinceau
Rose et rouge de ses joues pour les murs, les toits,
Magnifique tableau
D’un chalet aux jaunes pensées sous l’avant toit.
Si j’avais un pinceau
Il y aurait un parterre multicolore
D’un ravissant tableau
D’anémones, d’œillets, roses qui odorent
Si j’avais un pinceau
Mettrais un berger, son chien qui l’accompagne
Cet harmonieux tableau
Avec sur la maison le drapeau de Cerdagne.
Si j’avais un pinceau
Je poserais deux compagnons qui regardent
Assis dans ce tableau
Vers les prés l’imposant troupeau qui s’attarde
Si j’avais un pinceau
Peindrais en toile de fond un étang indigo,
De l’élégant tableau
On entendrait de loin un air de fandango
Si j’avais un pinceau
Tu verrais s’accomplir un paysage qu’à deux
D’un magique tableau
On partage, avec les yeux du cœur, jour radieux !
Si j’avais un pinceau
Tu tiendrais ma main afin qu’elle ne tremble
Pour te faire un tableau
Incomparable, et puis, qu’il te ressemble
Si j’avais un pinceau
Je peindrais des oiseaux, des bouquets d’hirondelles
Qui sortent du tableau
Pour t’annoncer, Printemps ! volant à tire d’ailes
2010 - N°239
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Djiell
Club Alpin Français
›PORTFOLIO
Bernard
A L L I E T TA
1937
1970 : année de départ de
l’aventure au CAF.
Pour adhérer au CAF de Nice et
succéder à mon père, deux de ses
amis m’ont gentiment offert leur
parrainage encore en vigueur à ce
moment là.
1990
Club Alpin Français
20
N°239 - 2010
| Bernard ALLIETTA |
Membre du Club jusqu’en 1995 puis
depuis 2005, j’ai commencé mes activités
« Montagne » par de faciles balades puis,
sans transition, directement à « l’escalade ».
Caires de la Madone de Fenestres,
Cougourde, Préfouns, Giegn ont été des
sommets qui m’ont fait découvrir les joies
de la « grimpe » et les courses que j’y ai
pratiquées sont gravées à jamais dans ma
mémoire. Ensuite j’ai découvert les joies du
« ski de randonnée » qui m’ont fait apprécier
les merveilleux paysages de la montagne
immaculée de blanc, dans le Mercantour, le
Jura, la Vanoise, la Suisse, en Italie. Plus tard
vinrent les sorties « famille », le camping...et
maintenant les sorties « raquettes » en hiver
et les sorties « botanique » au printemps et
« voyage » en été.
Au sein du comité de Direction j’ai assumé
les activités « bibliothèque » et « bulletin »
et participé aux activités « refuges » et
« protection de la montagne ».
Au début de mes activités « montagne ».la
photo représentait, pour moi, un support
de « souvenirs de sorties » à visionner dans
de mémorables réunions « soirées diapos ».
Après les photos papier couleur (et l’album
de famille) l’apparition du « numérique » me
permet alors de « capter » la merveilleuse
flore et la faune de notre massif. Voici
quelques photos (difficiles à choisir) qui
m’ont « flashé » et qui, je l’espère, égaieront
et enchanteront votre printemps.
2009
2010 - N°239
21
Club Alpin Français
›PORTFOLIO
Chamonix-Zermatt 1975
Mer de nuage sur le lac léman
Club Alpin Français
22
N°239 - 2010
| Bernard ALLIETTA |
Chamonix-Zermatt 1975
2010 - N°239
23
Club Alpin Français
›PORTFOLIO
Vue de l’Authion.....soleil et nuage
Soleil...et neige
Club Alpin Français
24
N°239 - 2010
| Bernard ALLIETTA |
Le repas du Zygène
2010 - N°239
25
Club Alpin Français
›PORTFOLIO
Lys orangé
Gentiane de Ligurie
Club Alpin Français
26
N°239 - 2010
| Bernard ALLIETTA |
Ancolie
Fritillaire de Caussols
2010 - N°239
27
Club Alpin Français
›PORTFOLIO
Julienne inodore (Espéris inodora)
Club Alpin Français
28
N°239 - 2010
| Bernard ALLIETTA |
Edelweiss (léontopodium alpinum)
2010 - N°239
29
Club Alpin Français
›PORTFOLIO
Marmottons
PARTICIPEZ AU PORTFOLIO
Vous êtes nombreux à partir en montagne avec un appareil photo. Faites connaître votre talent,
votre vision de la montagne, ou de votre activité préférée en y participant. Portfolio, c’est un espace
dédié au partage de votre passion montagne par l’image, et de votre travail de photographe.
Comment faire ?
1/ Triez vos images : Soyez sévère, sélectionnez vos plus belles images.
2/ Préparez vos images : Vous avez entre 10 et 20 images. Faites vous tirer des exemplaires
papiers en 13x18cm. Prenez le temps de les légender. Lieu, sujet, date, auteur, etc …( au dos des
tirages papier).
3/ Envoyez vos images au club
Argentique : Diapos ou tirages papier en 13x18 cm
Numérique : pas d’envois par mails, mais vos images sur CD avec un tirage papier en 13x18cm.
Club Alpin Français / Commission bulletin / 14 avenue Mirabeau / 06 000 Nice
4/ Et après ? La commission bulletin vous informera de la suite donnée à votre envoi. Tous les
originaux vous seront rendus (cd et tirages papier).
Des questions ?
Contactez B. Allietta : 06 14 56 39 32 – [email protected]
Club Alpin Français
30
N°239 - 2010
Protection du Milieu Montagnard
Aéronefs, parapentes et
Parcs Nationaux… !?
► par Martial BOS ◄
Dans le cadre du nouveau décret des parcs qui prévoit une distinction entre les aéronefs
motorisés et non motorisés, la limitation de survol à 1000 mètres du sol ne s’applique
plus aux aéronefs non motorisés. En fait le survol à 1000 mètres du sol ne pouvant être
réalisé que par quelques rares pratiquants très expérimentés, actuellement, tant qu’une
convention ou la nouvelle charte ne sera pas finalisée, le Parc du Mercantour a pris la
décision provisoire d’autoriser sans conditions le survol du cœur du Parc. Aucun décollage
ni atterrissage n’y est autorisé, excepté des atterrissages pour raison de sécurité (front
orageux par exemple).
A priori, nous pourrions penser que cette activité occasionne peu de dérangements
puisqu’elle se pratique en l’air et sans bruit, et que si pour les envols les accès aux sommets
se font à pied, les parapentistes dérangeraient moins que des randonneurs…Or nous
avons trouvé des informations et des études qui nous ont amenés à reconsidérer cette
analyse sommaire.
En fait, les parapentes sont plus perturbants qu’on ne le pensait. Par leur effet de surprise
lorsqu’ils surgissent d’une crête, leurs évolutions lentes et imprévisibles plus ou moins
prolongées sur les sites, leurs passages répétés au ras des pentes et leur apparence de
grand rapace, ils sont plus stressants pour les animaux que les avions ou hélicoptères.
Ceux-là sont repérés de loin et passent généralement sans s’attarder et moins près des
pentes.
Il a été observé que les survols à moins de 1000 mètres du sol de parapentes, ULM, planeurs,
hélicoptères, deltaplanes produisent chez les animaux sauvages des comportements
d’alerte, d’arrêt de rumination chez les ongulés, d’abandon des zones de gagnage, de
fuite induisant des risques d’accidents, de prédation, d’agressivité, d’hostilité chez les
rapaces, qui pratiquent le même type de vol. Il a été également observé des abandons de
couvées chez plusieurs espèces d’oiseaux .
Ces incidences diminuent à terme les taux de survie hivernale et les réussites de
reproduction de la faune dérangée.
Nous avons à comprendre que la pérennité des espèces est le résultat de l’équilibre des
interactions de toutes les composantes du milieu naturel. Les conditions de sauvagerie
et de tranquillité des territoires montagneux ont participé pendant des millénaires à
l’établissement de cet équilibre. Or elles ont été considérablement altérées depuis l’époque
des pionniers de l’alpinisme. Nous avons assisté à une poussée de la fréquentation
2010 - N°239
31
Club Alpin Français
Protection du Milieu Montagnard
touristique, nous avons vu le développement du ski et les équipements des stations, puis
les randonnées et l’arrivée des raquettes. Il y a eu les créations de routes, de pistes, la
pression de la chasse jusque sur les limites des parcs, les coupes forestières, les engins
motorisés, les vols d’hélicoptères, etc… Parallèlement nous avons vu les espèces les plus
sensibles, les gallinacés de montagne, décliner dans tous nos massifs, et disparaître par
endroit…
Aussi, il est important de ralentir cette évolution et ses conséquences,
Dans les parcs nationaux, les agents s’efforcent de contenir les pressions, de limiter l’usage
des engins gênants aux nécessités des services de secours ou de services publics.
Les vols de loisirs peuvent aussi bien se pratiquer hors cœurs de parcs. Il s’y trouve bien
d’autres sommets sensiblement comparables en altitude dans notre région et les massifs
voisins.
Les parcs nationaux ne représentent que 0,7% de notre territoire national. C’est peu, pour
des espaces si précieux. Cela justifie bien un effort pour y maintenir des conditions de vie
optimales pour la nature… N’y ajoutons plus du dérangement aux dérangements.
Pour ces raisons, cette réflexion du Club
Alpin Français de Nice, partagée avec les
Clubs Alpins Français de Cannes et de St.
Laurent du Var, conclut que les décollages
et les atterrissages des parapentes ou
autres aéronefs de loisir ne devraient pas
être autorisés en cœur de parc, par la charte
du Parc du Mercantour (et pareillement
pour les autres Parcs Nationaux…)
Club Alpin Français
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N°239 - 2010
Apprendre
FORMATION
La Formation est depuis longtemps, une activité importante, sérieuse, quoique « discrète
» de la FFCAM et de notre Club. Année après année, des adhérents sont formés à l’autonomie et à la sécurité en montagne, à l’encadrement pour les plus motivés (car il nous
faut aussi des encadrants !). Par la suite, les encadrants se recyclent à l’occasion de stages
( obligation tous les 5 ans).
Il s’agit donc d’une Formation qu’on pourrait dire « permanente » , de co-formation à l’intérieur du Club, les cadres diplômés faisant profiter les « stagiaires « de leurs connaissances et de leur expérience du terrain . Les coûts de la Formation sont en général modiques
puisque le bénévolat des Formateurs est de rigueur au CAF.
Donc, cette année encore, divers niveaux de Formation :
- La formation de base de décembre 2009 à mai 2010 qui a concerné en tout
34 personnes: cours théoriques UFCA+ UV1 cartographie / orientation, suivis
de séances de « perfectionnement » qui sont une initiation à la montagne aussi
bien en » terrain sec » qu’en » terrain enneigé » Ils sont un gage de plus grande
autonomie pour les randonneurs et pour les pratiquants des raquettes et une première
étape vers un brevet initiateur randonnée montagne (programme publié sur le site et
dans le bulletin d’octobre 2009 )
- les formations plus spécialisées pour l’encadrement des activités diverses
(Rando Alpine, Alpinisme, ski de Randonnée etc. ) qui se déroulent chez nous
ou au sein d’autres Clubs, avec nos Formateurs et/ou ceux d’autres Clubs.
-23/ 24 janvier 2010 : UV2 cartographie /orientation terrain neige animé par JC Liprandi
( WE neige à Estenc)
-19/20 juin 2010 : UV2 cartographie/orientation terrain sec, suite logique de la formation
de base et de l’UV1, animée par JeanCart-Lamy et Vincent Bienfait. (voir site)
-UV2 Sécurité glacier à Chamonix : Nicolas Féraud et Andréas Kresse,
les 27/28 mars 2010
- UF Via ferrata aux alentours de Nice : Nicolas Féraud et Patrick Valdenaire,
les 5 et 6 juin 2010
2010 - N°239
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Club Alpin Français
Formation
- Initiateur Terrain Montagne (Alpinisme) dans le Mercantour ou les Ecrins : Nicolas Féraud et Georges Torrelli du 28 juin au 4 juillet 2010.
- Stage initiateur Rando/Montagne organisé par Daniel Tauzin du 2 au 5 juillet à la Madone de Fenestre.
Et il y a les autres stages à venir , des stages de recyclage dont les dates ne sont pas encore
communiquées.
Si vous êtes partants pour la Formation,
consultez notre site :
http://www.cafnice.org/cafbase/activites/formation.php.
Une adresse : [email protected]
2010 - N°239
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Club Alpin Français
Ski Alpin Adulte
Etoiles des Neiges
► par Christine ◄
Et les étoiles ont étonnamment brillé sur ce séjour de Janvier 2010. Rappelez-vous : peu de
jours avant, les routes, autoroutes coupées, les trains bloqués, les pentes avalancheuses.
Mais pour nous , le rêve :
le soleil, un seul après-midi de neige et 15 cm de poudreuse légère ont recouvert les
pistes,
la douceur, cette douceur qu’évoque déjà le nom de la station de Valmorel qui chante à
nos oreilles, Valmorel sans tour ni béton, Valmorel et ses chalets, ses petites rues piétonnes, sa jolie fontaine, Valmorel humaine, Valmorel carte postale.
Nous étions superbement installés à quelques pas de là, quelques longueurs de planches,
à Doucy-Combelouvière, la combe aux loups, au pied des remontées et des pistes. Sitôt
extraits de l’hôtel-club douillet de l’Eau Rousse, sitôt skis aux pieds. 27, avides de glisse,
encadrés par 3 moniteurs particulièrement attentifs : Alain, Bernard, Philippe, guidés par
Patrick, fin connaisseur des lieux, 27 piaffant d’impatience comme des enfants.
« Avec vous, quand on est à l’heure, on est déjà en retard » s’alarme Roger. C’est peut-être
pour ne pas oublier que nous sommes… cafistes.
A nous les pistes !
Bien sûr, ici, les avis divergent. Certains trouvent les noires trop claires, les rouges trop
roses, tandis que d’autres friment avec délice sur les boulevards bleus ou sondent avec
minutie les mystères des virages coupés.
Club Alpin Français
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N°239 - 2010
On retrouve l’unanimité dans le décor, la grandeur des paysages dominés par les massifs
de la Haute Tarentaise, de la Vanoise, des Grandes Rousses, couronnés par le Mont-Blanc,
toujours présent, suffisamment lointain pour rester amical.
Au célèbre Col de la Madeleine, c’est la pause déjeuner, au soleil. Lunettes, écran total, le
rêve se poursuit. Ceux qui croient y voir les coureurs du Tour de France se trompent de
saison.
Petite pensée émue dans le secteur de la Lauzière où Dédé, à l’âge de neuf ans, accompagnait déjà son troupeau à l’alpage. Dédé usé par la vie rude qui, à 65 ans en paraît…
beaucoup plus et raconte à la veillée que la nostalgie d’autrefois est bien souvent naïve.
Autres temps, mêmes lieux…mais la scène a changé. On ne joue plus la même pièce.
L’hôtel de l’Eau Rousse nous couve, nous remet en forme : sauna, hammam, cours de relaxation, nous dynamise : ateliers danses, salsa, rock… nous divertit : soirées animées de
spectacles de premier choix, et nous régale : repas copieux et délicieux, soirée raclette,
soirée fondue, soirée de gala, personnel aux petits soins mais en grande tenue.
Un séjour 5 étoiles des neiges. Vraiment.
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Club Alpin Français
G
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06
Encadrement et formation
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depuis 2001
EscaladE
alPiNisME
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De l’initiation aux grandes courses
des plus jeunes aux adultes
de la demi - journée aux longs séjours
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Le savez-vous ?
LES MOTS DE NOS MONTAGNES
► par Robert LUFT ◄
Les toponymes de la montagne arborée (suite)
Les Érables Acer, communs dans nos paysages, sont une famille formée essentielle-
ment de 3 espèces :
l’Érable Plane Acer platanoïdes, jusqu’à 30 m de haut, pousse en-dessous de 1600 m
l’Érable champêtre Acer campestris, plus petit que le Plane, occupe les mêmes espaces
que ce dernier
l’Érable sycomore Acer pseudoplatanus est implanté jusqu’à 2000 m d’altitude.
Les variantes donnant lieu à des toponymes sont essentiellement isérable et plane pour
l’arbre, planet et planay pour la forêt.
En nous limitant aux régions de montagne, on trouve les toponymes :
les hameaux : Isérable (Nangy 74), le Planay (Le Grand-Bornand 74, Monthion 73, Sixt-Ferà-Cheval 74, Hauteluce 73), Le Planet (Sainte-Foy-Tarentaise 73, Pierrefeu 06, Valdeblore
06, Villard-Bonnot 38, Saint-François-Longchamp 73, Prunières 05) – lieu-dit Les Planes
(Savournon 05)
sommets, escarpements, coteaux : L’Isérable (Sonthonnax-la-Montagne 01), Barre de la
Plane (Prads-Haute-Bléone 04), Au Plane (Bonneval-sur-Arc 73), Crête de la Plane (Chanousse 05, Saint-Étienne-en-Dévoluy / Rabou 05), Le Grand Planay (Modane 73), Le Planet
(Vesseaux 07, Saint-Pierre-d’Alvey 73, Uvernet-Fours 04, Toudon 06, Saint-Georges-deCommiers 38)
cols : de Joux Plane (Verchaix 74), de la Plane (Andabre 34), du Plane (Le Châtelard 73)
autres : Combe de la Plane (Pinsot 38), Vallon du Planet (Villeneuve d(Entraunes 06), Béal
de la Plane (Savournon 05), ruisseau du Planay (Villaroger 73).
Le Frêne élevé Fraxinus excelsior peut atteindre jusqu’à 40 m de hauteur et vivre aux
altitudes proches de 1600 m.
Les variantes sont : fraisse, fraysse pour l’arbre, freney, freissinet, freissinières, freissinouse
pour la forêt de frênes.
Toponymes de communes : Freissinières (05), La Freissinouse (05), Freney (73), Le Freneyd’Oisans (38)
hameaux : Freissinet (Chalinargues 15), Le Fraissé (Fayence 83) Le Fraisseix (Saint-PriestLigoure 87)
sommets, escarpements, coteaux : Clocher du Frêne (Allevard 38), Puy du Fraisse (Orcines 63), La Fraysse (Dieupentale 82), La Fraïsse (La Tour-sur-Orb 34), Pech de Fraissinet (La
Vilasse 66), Côte de Fraissinet (Auriac-L’Église 15)
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Club Alpin Français
Le savez-vous ?
cols : Baisse du Frêne ( Le Brusquet 04), col du Frêne (Saint-Pierre-d’Albigny 73), Col du
Fraisse (Trefffort 38), col du Fraysse (La Charce 26), collet du Frayssé (Saint-Auban 06), col
de Freissinières (Freissinières / Orcières 05)
combes : Combe du Frêne (Champoléon 05, Bourg-d’Oisans 38), Ravin des Fraisses (Blieux
04), ravin du Fraissinet (Touët-sur Var 06) Combe de Feissinière (Saint-Saturnin-lès-Apt
84)
ruisseaux : bief des Fraisses (Hauteville-Lompnes 01), Font du Fraisse (Catus 46), Nant freney (Les Houches 74), ruisseau du Fraissinet (Saint-flour 15),Valat du Fraissinet (Sénéchas
30).
Le Hêtre Fagus sylvatica est un bel arbre qui peut atteindre 40 m ; il se rencontre jusqu’à
1900 m d’altitude. Les variantes et synonymes du terme sont : fage, fau, faux.
Pour les toponymes on trouve :
communes ; de Faux (08, 24) et Fau-de-Peyre (48), hameau de Fau Laurent (Séchilienne
38)
lieu-dit : Hêtraie du Défens des Dourbes (Digne-les-Bains 04)
sommets : Fage Torte (Prévenchères 48), La Fage (Montselgues 07, Saint-Haon 43), Tête
des Faux (Le Bonhomme 68), Fau Cuchet (Saint-Jean-de-Vaulx 38)
cols : de la Fage (Ségura 09, Fourtou 11), du Faux (Cornillac 26, Lafarre 07), du Fau (Monestier-de-Clermont 38, Establet 26, Seyne-les-Alpes 04).
Le Noyer Juglans regia est un arbre dont la silhouette est typique. Il peut atteindre jusqu’à 30 m de haut et remonte assez haut en montagne (~ 1500 m), sa durée de vie est
élevée et peut atteindre 300 à 400 ans. Son nom dérive du latin nucarius = noyer.
Variantes et synonymes : noce, noguès pour l’arbre ; nogaret, nogarède, nojaret, nougarède, nogaro, nougaro, nougarou pour les plantations de noyers.
Exemples de toponymes :
communes : Le Noyer (05, 18, 73), Nogaret (31, 48) Nogaro (32), Saint-Pierre-de Nogaret
(48), Nougaroulet (32)
hameaux : Nojaret (Badaroux 48, Vialas 48, Bonnevaux 30, Grand Brassac 24), Le Nougaret
(L’Isle-Jourdain 32), Nougaret (Alban 81, Peyssies 31) Nougaro (Aspet 31), Nougarou (Maubourguet 65), Le Noyer (Cassaniouze 15, Le Brugeron 63)
sommets et coteaux : Pech de la Nougarède (Mirepoix 09) Pique de Noguès (Lescure 09),
Côte de la Nougarède (Casseneuil 47)
col du Noyer (Saint-Étienne -en-Dévoluy / Le Noyer 05)
Ravin de Nogarède (Le Collet-de-Dèze 48), vallon de Noce (La Brigue 06)
Valat de Nogaret (Saint-André-de-Valborgne 30) Valat de Nogarède (Gravières 07), ruisseau de Noguès (Lectoure 32)
Club Alpin Français
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N°239 - 2010
Les mots de nos montagnes
Le Tremble Populus tremula tient son nom du verbe latin tremere = trembler (participe
passé = tremulus), car au moindre souffle d’air ses feuilles s’agitent. Je n’ai trouvé aucun
toponyme dérivant de ce vocable. Par contre, la forêt de trembles est appelée «albère»
dans notre région et dans les Pyrénées Orientales. Ce terme dérive du latin arbor = arbre,
qui a donné albero en italien. À travers les toponymes dérivant d’albère, l’assimilation par
nos ancêtres du tremble à «l’Arbre par excellence», montre combien sa beauté a dû les
frapper. Il est triste de le voir disparaître de nos régions, à la suite d’une maladie venue du
continent américain.
Comme dérivés toponymiques on connaît les communes de l’Albère, de Laroque-desAlbères et de Montesquieu-des-Albères, ainsi que le Rec (ruisseau) des Albères dans les
Pyrénées Orientales (66) ; dans les Alpes Maritimes on trouve le Pont des Albéras (Venanson), la Tête d’Albéras (Roquebillière / Lantosque 06)
À côté de ces espèces dont les feuilles se perdent chaque automne, pour être renouvelées au printemps, on trouve dans nos régions méditerranéennes une série
d’arbres à feuillage persistant :
Les chênes Quercus à feuillage persistant sont tous de taille plutôt petite. Trois espè-
ces sont particulièrement répandues dans l’aire méditerranéenne.
Le Chêne vert ou Yeuse (Quercus Ilex) se rencontre partout dans la zone collinaire des
Alpes du Sud. Cet arbuste est désigné sous une série de synonymes : alzine, else, euse,
éouvé, garric ; les bois de chênes verts sont appelés auzière, elzière, eusière, eouvière.
Toponymes :
hameaux : Mas de l’Alzine (Glorianes 66), Léouvé (La Croix-sur-Roudoule 06), L’Éouvière
(Seillans 83), L’Euse (Contes 06), Grange d’Euse (Saint-Thomé 07)
lieux-dits : Bois de l’Éouvière (Montauroux 83), L’Éouvière (Escragnolles 06), L’Auzina (Termes 11, Campoussy 66, Rouffiac-les-Corbières 11), L’Auzière (Pignans 83), Camp de Garric
(Roquefixade 09)
sommets, crêtes et coteaux : Moure d’Yeuse (Saint-Laurent-de-Carnols 30), L’Éouvière
(Esparron 83, Briançonnet 06, Escragnolles 06, Estoublon 04), L’Éouvière de Caille (Seillans
83), L’Elzière (Bessèges 30, Vallaraugue 30), Puech Garric (Le Vibal 12), Coll de les Alzines
(Tautavel 66), L’Eusièro (Le Broc 06), L’Eusièra (Tournefort 06, La Trinité 06), La Grande
Auzière (Les Ferres 06), L’Auzière (Villars-sur-Var 06), Lelzière (Vals-les-Bains 07, Saint-André-de-Capcèze 48), Pas de l’Yeuse (Saint-Montan 07)
Le chêne-liège (Quercus suber) et Le chêne kermès (Quercus coccifera) n’ont apparemment pas donné lieu à des toponymes. Le nom du chêne kermès, souvent appelé garric,
vient d’un parasite, la cochenille (Kermes vermilio) ou «kermès des teinturiers», la seule à
fournir le vrai rouge vermillon ou «écarlate». D’autres cochenilles peuplent les yeuses et
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Club Alpin Français
Le savez-vous ?
les chênes-liège, mais ne contiennent pas de colorant rouge.
L’Olivier Olea europaea , l’arbre symbole de la paix, est typique des régions à climat
doux en hiver et sec en été. On le retrouve dans l’ensemble de l’aire méditerranéenne
jusqu’à une altitude de 700 m (selon ensoleillement) ; il peut vivre plusieurs centaines
d’années, certains oliviers semblent avoir dépassé les mille ans.
Toponymes :
communes et hameaux : La Fare-les-Oliviers (13), Olivetta-San-Michele (IM), Fort de l’Olive (Névache 05), L’Olivière (Rians 83), L’Oliviérède (La Garde-Freinet 83), L’Olivette (Cornillon 30, Paulhan 34, Le Castellet 83, La Colle-sur-Loup 06), L’Olivet (Saint-Jean-de-Muzols
07, Bourg-Saint-Andéol 07, Le Cannet 06)
sommets et escarpements : Mont Olivet (Bagnères-de-Bigorre 65), Puech d’Olivet (Anglès 81, Poilhes 34), Sommet d’Olive (Ristolas 05), Colle de l’Olivier (Saint-Blaise 06), L’Olivière (Curbans 04), Serre des Oliviers (Sigonce 04), Rocher de l’Olive (Névache 05), Serre
Olivier (L’Épine 05),
Cols : de l’Olivier (La Palud-sur-Verdon 04) Col de l’Olive (Sainte-Agnès 06)
vallons : Combe des Oliviers (Châteauroux-les-Alpes 05), Combe d’Olive (Bargemon 83),
Combe Olive (Montjoux 26), Ravin de l’Olive (Puget-Rostang 06), vallon de Font d’Olivier
(Montauroux 83)
cours d’eau : Correc de l’Oliveda (Caixas 66), Fontaine de l’Olivette (L’escoutet 34), torrent
de l’Olivier (La Salle-les-Alpes 05) Torrent des Oliviers (Ceillac 05), Étang de l’Olivier (Istres
13)
Pour aujourd’hui j’arrête cette rubrique, au prochain numéro je compte vous entretenir
des arbres à aiguilles.
N.B. - Vous pouvez retrouver les citations hors région concernant les arbres évoqués dans cet article sur le site du club dans la
rubrique Bibliothèque – coin des lecteurs – vocabulaire et toponymie. (attention, c’est long à télécharger et il faut le logiciel gratuit
Adobe PDF pour lire le texte)
Club Alpin Français
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N°239 - 2010
Découverte
Le Vercors septentrional :
terre des hommes
(De Saint-Nizier-du-Moucherotte à Châtillon-en-Diois)
► par Alex et Dany VAROQUI◄
En ce jeudi de Toussaint, tout dort à Saint-Nizier. A sept heures quarante-cinq la boulangère fait la grasse matinée. Photo souvenir devant ce lieu de mémoire où deux cent
cinquante maquisards ont tenu deux jours devant les Allemands. Nous n’aurons pas le
temps, hélas, de visiter le Musée de Vassieux et les dix lieux de mémoire consacrés à la
Résistance. Aucune commune ou montagne qui n’ait été le théâtre de combats ou d’actes
de résistance. Le maquis a vu le jour très tôt, alors que le Vercors était encore en zone libre
dès mars 1941. Pierre Dalloz et Jean Prévost imaginaient transformer le Vercors en « Cheval de Troie pour commandos aéroportés ». Ce n’est, cependant, qu’en janvier 1943 que le
maquis, pourtant déjà très actif, s’organise quand le projet, qui devient « le plan Montagnard », est entériné par Delestraint et Moulin et approuvé par de Gaulle et les Alliés. Notre parcours nous arrêtera également à la plaine d’Arbounouze où auront lieu les premiers
parachutages, et au Pas de l’Aiguille où vingt-trois maquisards trouveront la mort. C’est du
ciel qu’ils attendaient leur salut (les parachutages alliés), c’est du ciel qu’a surgi la mort (les
bombardements allemands). Saint-Nizier sera le théâtre de violents combats en 1944. Le
« plan Montagnard » n’a pas fonctionné.
C’est derrière le cimetière que le GR91 donne le départ. Le brouillard, le vent et le froid
ajoutent à la tristesse du lieu. La montée au sommet de Moucherotte est bien rude pour
une mise en jambes. Il faut hisser d’environ huit cents mètres nos gros sacs à travers une
belle forêt d’épicéas sur un sentier qui se cherche entre piste de ski chahutée par les engins, travaillée au bulldozer, et sentier au balisage hésitant.
Nous sommes rassurés de savoir que ces travaux pharaoniques sont l’œuvre du Conseil
Général de l’Isère qui réaménage le sommet du Moucherotte pour le plaisir des …générations futures. Ainsi le sommet est débarrassé de ses « ruines ». Les bâtiments de l’ancien
hôtel Ermitage, l’ancienne gare du téléphérique, le réservoir, le poste optique…ont été
détruits et les décombres évacués. Nul ne regrettera ces constructions inesthétiques. La
reconstitution du sol et sa revégétalisation grâce à des semis et des plantations de la flore
locale sont également prévus.
Le froid est si vif, que nous faisons une pause thé dans le petit refuge sous le sommet.
Par une trouée bienvenue au sommet du Moucherotte nous apercevons l’immense MontBlanc et les sommets enneigés. Les épicéas sont couverts de givre et offrent un spectacle
2010 - N°239
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Club Alpin Français
Découverte
hivernal féerique. Le GR nous conduit gentiment par des pistes de ski herbacées à travers
un camaïeu d’or, de roux et de vert des hêtres et des épicéas jusqu’aux Allières. L’auberge
est une des quinze fermes du Vallon de Furon, devenue communale pour accueillir les
troupeaux transhumants venus d’Arles par train ou de Grenoble par la route. Huit cents
bêtes tondaient ces alpages jusqu’en 1953, fin de la transhumance. L’auberge-refuge accueille aujourd’hui les randonneurs et skieurs et l’alpage cent soixante génisses en été.
Aujourd’hui c’est relâche. Les génisses sont à l’étable et les randonneurs que nous sommes, qui avaient fantasmé sur un copieux casse-croûte, devront se contenter des provisions tirées du sac.
Le parcours, ensuite, qui emprunte souvent d’anciens chemins muletiers aujourd’hui goudronnés, va nous conduire, presque horizontalement, aux Bergeries de Roybon (1450m
d’altitude). En balcon au-dessus de Villard-de-Lans, il est de toute beauté : symphonie
de couleurs, ciel bleu cyan, calcaire aux gris rompus, dégradés des couleurs chaudes de
l’automne. Nous décidons sagement, pour cette première journée, de nous arrêter aux
Bergeries. Cela fait six heures quarante que nous marchons. Nous trouverons de l’eau à
une source proche, bien aménagée. Certes il faudra faire le ménage car la Bergerie sert de
refuge et les derniers visiteurs n’étaient pas des obsédés de la propreté. Cela nous occupe
et nous réchauffe, tout à la fois. La nuit tombe vite et le froid avec. En ratissant les rares
bouts de bois autour du refuge nous réussissons à faire deux heures d’un feu vite essoufflé et, à la bougie, nous nous installons confortablement pour la nuit. Quelques visiteurs
retardataires, curieux, font une halte éclair avant de basculer, sous la lune, vers Villard-deLans, à trente minutes dans la vallée. Enfin seuls !
Je fais l’inventaire des douleurs qui, curieusement, dans la marche, d’une randonnée à
l’autre, ne sont jamais les mêmes ! Il y a une sorte de « turn-over » des zones douloureuses.
Avec le temps tout y passe : pieds, chevilles, lombaires, épaules, un peu comme si le corps
Rebord du plateau au-dessus de Châtillon-en-Diois
Club Alpin Français
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N°239 - 2010
Le Vercors septentrional : terre des hommes
voulait établir une juste répartition des nuisances ! Les premiers jours le corps renâcle
toujours avant de trouver son rythme de croisière. Les muscles ne sont pas encore prêts
à assumer les agressions du sac et les efforts de la marche. Les bonheurs de la randonnée
sont de dures conquêtes et ne viennent… qu’après. Ce n’est que peu à peu que s’installera
l’harmonie. Hélas, je crains que quatre jours de marche ne suffisent pas à huiler assez vite
la mécanique !
C’est dans une brume légère et sol givré que nous nous réveillons. Il fait bien froid en ce
matin du vendredi. Du Pont de l’Amour, si joliment nommé, le hameau des Clots nous
permet de voir de près de belles maisons restaurées d’architecture montagnarde. Le toit à
deux pentes descend très bas, bordé par des pignons lauzés. Le chaume est depuis longtemps remplacé par des tuiles rondes ou par de la tôle ondulée, les murs enduits ont laissé
place à la pierre apparente, plus « tendance ». Il faut profiter des ces maisons typiques
car nous basculons très vite dans l’univers de barres de béton de la station des Glovettes.
C’est géant, c’est laid, c’est vide et jusqu’à Corrençon, le parcours est à l’image d’un paysage aménagé par l’homme avec plus ou moins de bonheur. Le GR emprunte des bouts
de sentiers entrecoupés de routes goudronnées ponctuées de villas bien gardées par des
cerbères vociférants, de tout poil et de toute race. Cave canem ! Les chiens qui, aux dires
de leurs maîtres, ne sont généralement pas mordeurs, restent bien la plaie du randonneur
égaré dans les villages-dortoirs.
A Corrençon (1100m) comme ailleurs, la saison d’été est close, la saison de ski n’est pas
ouverte. Nous nous y approvisionnerons tout de même en excellents produits de pays
(bleu du Vercors, Saint Félicien) et pain dur offert par la boulangère qui a vendu tout le
pain frais disponible. Nous savons que, jusqu’à dimanche soir, nous n’aurons aucun approvisionnement et que nous devrons compter sur l’eau des sources. Le clocher de Corrençon
sonne midi. Nous espérons une auberge mais, bien sûr, tout est fermé ! Et que trouve-t-on
au-delà de Corrençon ? Nous n’en avons qu’une vague idée : des plateaux et au loin des
montagnes qui nous attendent.
Le Vercors central : terre sauvage
C’est après une halte un peu trop longue, nous aurons à en pâtir plus tard, que nous nous
dirigeons vers le « Champ de bataille ». Les troupes à cheval du Comte de Sassenage se
sont confrontées aux troupes de l’évêque de Die. Au Moyen-âge le combat entre clergé
et Etat, spirituel et temporel, qui opposait l’empereur et le pape remontait donc jusqu’à
ces vallées reculées.
C’est à travers une belle forêt qu’on entre enfin dans la Réserve naturelle des Hauts Plateaux du Vercors. Dans le même temps nous passons le quarante-cinquième parallèle.
Nous voilà à mi-chemin du pôle et de l’équateur et à même latitude que le delta du Da2010 - N°239
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Découverte
nube ou le parc de Yellowstone créé cent ans plus tôt. Nous sommes à mille cent mètres
environ. Cela correspond à l’étage montagnard. De neuf cents à mille six cents mètres
sapins et hêtres se partagent l’espace. Au-delà nous trouverons à l’étage sub-alpin les épicéas, sapins, pins à crochets et pelouses.
Mais c’est aussi un monument-souvenir au Puits de Ravières où en 1942 s’installa le Camp
2 des maquis du Vercors. Curieux plateau où rien n’est plat ! Croupes mollement arrondies, couvertes de sombres forêts d’épicéas, entrecoupées de vastes prairies vallonnées.
On imagine bien là les maquis : forêts propices où se cacher, vastes étendues dégagées où
pouvaient se faire les parachutages comme à Darbounouze. Nous sommes prévenus aussi
que le balisage est difficile. Nous suivrons le rouge et blanc du GR91 et les très nombreux
cairns qui jalonnent le trajet. Nous apprendrons également à distinguer les pins taillés qui
offrent de loin une silhouette caractéristique car les branches basses ont été élaguées,
parfois très haut. Le tronc est quelquefois entaillé : antiques procédés de repérage bien
antérieurs à l’usage de la peinture mais autrement visibles de loin !
Comme la halte eût été bienvenue à la jolie cabane de Carrette ! Mais nous devons poursuivre jusqu’au prochain hébergement au Jasse du Play, car il reste peu de jour et la nuit
tombe rapidement en cette période de l’année. Suit un long, très long cheminement au
crépuscule, puis au coucher de soleil et enfin dans la nuit noire jusqu’au lever de lune,
pour terminer sous l’éclairage de la pleine lune, aidés par la frontale. En éclaireur, Alex
cherche le balisage : rouge, blanc, cairn. On évite les « pots », grands trous profonds creusés par l’érosion des eaux de pluie dans le calcaire. Le Vercors nous rappelle sa géologie
particulière : de belles assises de calcaire urgonien où des bancs de marnes plus tendres
à la structure ondulée en anticlinaux et synclinaux sont parfois rompus par des failles importantes. L’érosion glaciaire d’abord, puis périglaciaire et enfin karstique ont donné au
plateau sa singularité. Nous aurions préféré admirer en plein jour le chaotique canyon des
Erges qu’il nous faut remonter à la lueur de la frontale. Les pieds meurtris traversent de gigantesques lapiez, évitent les entrelacs, les gouffres, crevasses, scialets sculptés par l’eau.
Nous passons, sans les voir, les ruines de Tiolache d’en haut, chercherons, en vain, l’abri de
Tiolache du milieu. La nuit est glaciale et nous envisageons, chacun de notre côté, le possible bivouac, quand une miraculeuse petite lumière annonce ce que nous supposons être,
et qui sera, la cabane du Jasse du Play (1610m). Il est dix-neuf heures trente. Nous avons
marché presque neuf heures aujourd’hui. Les six randonneurs installés sont surpris de
nous voir arriver en pleine nuit et nous regardent médusés. Nous sommes ravis de trouver
le poële ronflant de plus belle et la perspective d’une nuit chaude et à l’abri. Optimistes,
nous pensons régler demain, très vite, le problème de l’eau à la Fontaine de la Chau.
Le problème de l’eau est préoccupant. Nous quittons l’abri à sept heures quarante-cinq
avec un quart de litre d’eau…pour deux. Nous allons vraiment percevoir que ce plateau
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Entre Moucherotte et Roybon
est un désert sans eau. Sur ce donjon de calcaire, si l’eau de pluie s’engouffre pour circuler
souterrainement ou ressortir en cascades et sources au pied de la montagne, à la fin de
l’été les sources sont taries. Nous allons perdre beaucoup de temps à découvrir le croisement entre le GR et le sentier central, ce qui nous donnera la direction de la source de la
Nouvelle Jasse de la Chau. Sens en éveil, nous captons les moindres indices permettant
de situer ladite source. Restes de cabanes de bergers, traces à peine marquées de sentes
délaissées, abris, enclos, des pierres plates sous un arbre où le berger devait faire la pause.
L’eau est là, nous le devinons. Je rassemble mes vieux souvenirs d’école : la source est
nécessairement au contact de la couche calcaire et des marnes imperméables. La topographie nous aide et à quelques trente minutes du GR vers le nord-est, alertés par des
pierres lavées, rougeâtres, tranchant sur le blanc du calcaire, nous trouvons la source. Mais
elle est à sec !
Nous allons devoir renoncer au projet de gravir le Grand Veymont (2341m), faute d’eau.
C’est dommage car le temps est superbe, la luminosité exceptionnelle et la crête bien
tentante nous narguera tout le matin. La source intermittente annoncée aux Serrons, quarante-cinq minutes plus tard, est sans doute à sec (car intermittente !). Nous ne trouverons
même pas le site. A Grande Cabane (1563m) où les bergers récupèrent l’eau dans de vastes citernes souterraines, nous supputons sur la quantité d’eau de pluie recueillie dans les
grands bidons plastique soigneusement cadenassés à l’arrière de la cabane. Je pense à
ce film très futuriste : Mad Max, qui développait, entre autres, le thème de la bataille pour
l’eau, sauf qu’Alex n’est pas Mel Gibson ! Chaque bergerie porte une plaque rappelant le
nom et la date du passage des bergers successifs.
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Découverte
Bientôt c’est une bonne piste à travers forêts et pelouses qui nous conduit au croisement des GR93 et GR91. La cabane, non
gardée, de Pré Peyret apparaît comme une
terre promise. Nous y trouverons, outre une
source maigrelette mais suffisante, une halte
Ferme typique du Vercors
bienvenue. C’est un beau site, propice au farniente.
La journée de demain promet d’être longue mais cet après-midi le temps et le cadre bucolique incitent à la détente. Sans hâte donc nous pouvons couper du bois, converser avec
les rares randonneurs présents venus en famille du Col du Rousset.
Le Vercors méridional : terre de couleurs
Nous quittons Pré Peyret très tôt, la chaleur de la bergerie, les enfants déjà tôt réveillés
sur les bas-flancs. La brebis égarée et boiteuse erre en bêlant autour de la cabane et il
y a tout à parier qu’elle ne passera pas l’hiver. C’est bien le seul animal d’une faune annoncée riche…mais si discrète qu’il ne nous sera donné de voir que des oiseaux. Nous
savons que l’étape sera longue, le jour magnifique. On longe manifestement la bordure
occidentale du plateau au plus près. Au passage, on distingue, en avant du plateau, la
très aérienne dent de Die. Les pins à crochets, aux aiguilles sombres, uniques dans les
Préalpes, sont plus clairsemés. Le chemin chaotique contourne d’innombrables « pots »
tandis qu’on aperçoit, quelques mille cinq cents mètres plus bas, la vallée de la Drôme et la
petite localité de Die. Nous longeons ensuite le versant occidental, sans perdre de vue, en
nous retournant, l’impressionnant panorama sur les espaces déjà parcourus de ce large
synclinal dominé par la crête ondulante du Grand Veymont, tandis que, au fur et à mesure
de notre progression, émerge, comme une sentinelle majestueuse, à l’avant du plateau, le
fascinant Mont Aiguille.
On comprend mieux, sous cet angle, l’attraction que cette forteresse de calcaire a pu exercer. On l’appelait la montagne inaccessible. L’érosion a isolé peu à peu cet îlot rocheux du
grand plateau calcaire. Sentinelle de pierre à l’est, dominant le Trièves, plus qu’aiguille. Ce
n’est qu’en 1490 que Charles VIII, familier du Dauphiné acheté pour lui par Louis XI, invite
un de ses plus valeureux officiers, Antoine de Ville, « à faire essayer si l’on pourrait monter
sur cette montagne que l’on dit inaccessible ». L’année 1491 verra se préparer l’expédition
qui devra vaincre non seulement l’obstacle naturel mais aussi un obstacle psychologique
et spirituel. Des légendes courraient, évoquant « des dragons…dont certains ont des ailes,
d’autres des pieds ». L’approche est techniquement bien préparée et c’est l’année de la
découverte de l’Amérique, le 26 juin 1492 plus exactement, que le dit Antoine de Ville
signe, avec l’ascension réussie de l’aiguille, l’acte de naissance de l’alpinisme. Avec lyrisme
il décrit « le plus orrible et expovantable passage » mais aussi « le plus beau lieu que vi-
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Le Vercors septentrional :
terre des hommes
tes jamays par dessus ». Il le baptise du nom
d’ « Aiguille Fort » que la postérité n’adoptera
pas.
Butte-témoin d’un autre âge, elle offre un
merveilleux spectacle ce matin, tant l’air est
pur. Notre objectif reste les Cabanes de ChâCirque d’Archiane
tillon. Nous nous offrons deux haltes-spectacles à la cote 1906m et au
Grand Cairn de Malcollet à 1950m. Nous avons, à nos pieds, par-delà le cirque d’Archiane,
au moins huit plans successifs de crêtes où nous devinons, l’Oisans et loin, très loin sur la
ligne d’horizon …l’Argentera.
Les cabanes de Châtillon sont nichées au flanc d’une vaste combe harmonieuse, tapissée
d’herbe dorée rase et parsemée de pierres dressées et alignées par les bergers. Les eaux
de pluie sont captées par une retenue artificiellement constituée d’une immense poche
plastique qui va alimenter un alignement d’abreuvoirs. Des bergers profitent des derniers
rayons du soleil, teint rubicond et allure rustique. Ils sont venus là fermer les cabanes pour
l’hiver et manifestement ce n’est pas l’eau qui a servi à célébrer cette tâche ultime. Les
deux mille quatre cents « tardons » montés au 24 juin, jour de la Saint-Jean, ont estivé trois
mois et sont déjà redescendus. L’espace vercusien reste un espace de transhumance. Mille
drailles sillonnent le plateau qui accueille brebis de la Crau, du Valentinois ou du Diois.
Quelle que soit leur sauvage beauté, les hauts plateaux restent un territoire façonné par
l’homme. Les carriers, dès l’Antiquité, exploitaient les roches du sud du Grand Veymont, à
mille huit cents mètres d’altitude, pour construire les monuments de Dea Augusta (l’ancienne ville de Die). On retrouve les vestiges de ces carrières sur les hauts-plateaux et, en
particulier, une imposante colonne inachevée. Les hauts-plateaux du Vercors ont également été fréquentés par des forestiers, des pasteurs (refuge protestant), ou des bergers
dont les pâturages, bien qu’inscrits dans le Parc ou la Réserve, sont patrimoine communal
et dernier bastion de la transhumance alpine, semblant échapper au temps.
Est-ce pour cela qu’on y parle du loup, comme dans le Mercantour, inépuisable sujet de
discussion et de controverse. A les entendre je ne donnerai pas cher de sa peau ! Est-ce
vraiment le loup qui attaque les troupeaux ? Nous n’avons trouvé aucune grande faune, ni
le mouflon de Corse, réintroduit, ni chamois. Les grands vautours nichent dans la falaise,
au-dessus du col du Rousset, et tournoient avec bonheur au-dessus du plateau. « Trop tôt
» pensais-je, en les voyant, quand nous marchions sans eau ! La longue descente (mille
deux cents mètres) qui nous attend est un ravissement pour l’œil, un calvaire pour les
pieds.
Nous basculons, en lacets serrés sur les mille deux cents mètres de dénivelé qui nous séparent de Châtillon, à travers un couvert forestier dense de hêtres, puis de pins noirs, fruits
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Découverte
des reboisements. Le Parc précise aussi que les reboisements vont permettre de reconstituer la forêt originelle de feuillus, hêtres en particulier, au détriment des pins. Un dernier
coup d’œil au plateau déchiqueté en aiguilles impressionnantes. Deux heures trente plus
tard, les mêmes, les pieds contraints et douloureux, à la nuit tombée, atteignent enfin le
village de Châtillon en Diois. Il est dix-sept heures.
Les vieilles maisons coquettement restaurées sont à échelle humaine. Le temple jouxte
presque l’église à l’élégant clocher. Que fait l’instituteur un dimanche soir dans la désuète
école, veille de rentrée ? Des cahiers à corriger ? A l’étal de l’épicerie, pommes et noix
rappellent que c’est l’automne. La clairette de Die, champagne du pauvre, nous rappelle
le temps où on servait avec religiosité le liquide ambré et pétillant qui accompagnait la «
galette des rois ». Le vin de pays reste de tradition puisqu’il était vendu, loin vers le Trièves
et au-delà vers Grenoble par le col de Menée.
Si nous avions poursuivi le GR91 en direction du sud, nous aurions pu, à travers le Rosanais, les Baronnies, atteindre le Ventoux et même au-delà le Lubéron, tous ces pays qui
sentent bon le terroir et le Midi déjà. Pour l’heure c’est par Sisteron et la route des Alpes
que nous regagnerons Nice. Au total trente heures de marche sur quatre jours, des couleurs plein les yeux, le corps meurtri cependant (le poids de nos sacs n’y est sans doute
pas étranger).
Entre Isère et Drôme, ce petit massif recèle bien d’autres merveilles à découvrir, mi- Alpes
du Nord, mi-Alpes du Sud, carrefour écologique, ensemble à échelle humaine. Tout est
nature sauvage mais tout aussi y parle de l’homme. Si l’humain est rare, sa présence est
décelable partout. Résistants, bergers, forestiers, aujourd’hui fonctionnaires du Parc… Les
accès, certes, n’en sont pas faciles mais, pour qui accepte l’inconfort, la récompense est
une nature partout vivante, fragile, diverse et magnifique.
Au cœur du massif, c’est dans la solitude des grands espaces que le marcheur peut poursuivre sa rêverie ou ses interrogations. Il peut chercher (souvent en vain) des explications
à sa quête « d’ailleurs ». Quelles obscures forces le poussent ainsi à souffrir, écrasé par le
poids de la charge, marqué dans sa chair par le froid trop vif ou la chaleur excessive qui
se succèdent brutalement pour mieux l’éprouver ? Quand le corps est enfin dompté, rien
ne peut gâcher la longue rêverie qui va se dérouler au cours de la marche. Exercice que
l’on croit physique et qui, libéré de la contrainte du corps, permet parfois de découvrir la
part de soi-même, cachée jusque là, celle qui nous révèle ce qui pour nous est essentiel et
le dégage du superflu. La marche apparaît alors comme une démarche intellectuelle qui
a vite fait d’anesthésier les douleurs multiples. On ne pense plus alors qu’au moment où
l’on reprendra, au plus vite, son bâton de pèlerin ! D’autres plateaux désertiques battus
par le vent, d’autres crêtes effilées, des ergs lointains, des forêts mystérieuses, des mers
parcourues par les icebergs, un Himalaya fascinant… nous attendent….
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photo Marie Hennechart
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