influence des modifications des systemes d`elevage sur la sante des

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influence des modifications des systemes d`elevage sur la sante des
INFLUENCE DES MODIFICATIONS DES SYSTEMES D’ELEVAGE SUR LA SANTE DES
ELEVEURS
Abadia Geneviève 1, Mirabito Luc 2
1
CCMSA, Les Mercuriales, 40 rue Jean Jaurès, 93547 Bagnolet Cedex
2
ITAVI, 12 rue du Rocher, 75008 Paris
Résumé
Les risques professionnels en aviculture sont de nature très diverse : liés à des expositions à des agents
infectieux, à des substances chimiques, à des gaz, à des poussières, ou secondaires à des postures de travail
contraignantes ou à une charge mentale élevée…
La mise en place des directives et recommandations relatives au bien-être animal imposent ou vont imposer dans
les années qui viennent des modifications des systèmes d’élevage pour satisfaire autant que possible les besoins
physiologiques de l’animal, tels qu’il les exprime dans la nature.
Cependant il serait souhaitable que l’impact de ces modifications soit également examiné dans l’optique de la
santé de l’éleveur : il faudrait éviter que ces mesures n’alourdissent les conditions de travail ou n’augmentent la
charge mentale liée à la conduite de l’élevage par des contraintes incompatibles avec la survie économique de
l’exploitation. Il est encore trop tôt pour effectuer un tel bilan, même si l’expérience de certains pays étrangers
peut aider à dresser quelques perspectives, qu’il ne faudra pas manquer d’évaluer d’ici quelques années.
Introduction
Un élevage de volailles met en jeu de très nombreux
facteurs sanitaires, techniques et économiques qui
peuvent interférer à la fois sur la santé de l’animal, sur
la santé du consommateur, et sur la santé de l’éleveur.
Malheureusement ce dernier aspect est rarement pris
en compte. Les pathologies d’origine professionnelle
dans ce secteur relèvent de ces différents facteurs qui
se modifient en fonction de la conduite de l’élevage.
Or, les conduites et les modes d’élevage vont évoluer
ou changer profondément au cours des prochaines
années en raison d’une prise en compte accrue du
bien-être animal. Dans l’éventail des choix possibles,
indépendamment des conséquences économiques,
deux éléments majeurs permettront de raisonner les
stratégies : les conséquences sur la qualité sanitaire
des produits et sur les conditions de travail des
éleveurs. Aussi, après avoir réalisé une rapide
synthèse des troubles actuellement rencontrés en
élevage de volailles, nous envisagerons les
conséquences potentielles sur la santé des éleveurs de
l’évolution des modes d’élevage.
1. Les pathologies actuelles d’origine
professionnelle en élevage avicole
Les données d’enregistrement des pathologies
professionnelles restent basées sur les statistiques des
accidents du travail et de maladies professionnelles
indemnisables (MPI). Mais les données notamment de
MPI restent parcellaires et la sous-déclaration ne
permet pas d’avoir un reflet de la réalité des
pathologies rencontrées. De ce point de vue, l’élevage
avicole ne fait pas exception.
Sans aborder l’aspect quantitatif, les pathologies
d’origine professionnelle dans ce secteur sont de
plusieurs ordres (1):
- pathologies d’origine physique dues à des
hypersollicitations
des articulations et de leur
environnement (troubles musculosquelettiques) ou à
la manutention (lombalgies notamment)
- pathologies infectieuses et zoonoses, notamment
dans l’élevage du canard par infection par
Chlamydophila
psittaci,
ou
par
injections
accidentelles au cours des opérations de vaccinations.
- pathologies cutanées ou respiratoires surtout liées à
des produits chimiques (nettoyage et désinfection
surtout) ou des dégagements gazeux (monoxyde de
carbone, ammoniac…)
- pathologies respiratoires allergiques ou non liées à
l’empoussièrement, aux endotoxines, aux plumes et
duvets…
- stress, charge mentale…
1.1. Les pathologies d’hypersollicitation
Dans tous les régimes de protection sociale, il s’agit,
et de loin de la première cause de MPI (plus de 80 %
des pathologies reconnues) et dans les départements
où la filière avicole est très présente, ces troubles
Cinquièmes Journées de la Recherche Avicole, Tours, 26 et 27 mars 2003
représentent environ un tiers de ces pathologies. C’est
essentiellement le membre supérieur qui est touché
avec une prédominance au poignet et au coude. Les
lésions sont soit musculo-tendineuses avec des
tendinites soit neurologiques avec compression d’un
nerf au niveau du poignet : c’est le syndrome du canal
carpien.
Pourquoi ces affections ? Des facteurs peuvent être
prédisposants :
- soit professionnels : gestes répétés et/ou
demandant une force musculaire importante,
et/ou exigeant une position articulaire extrême,
cadence soutenue,
- soit environnementaux : influence du froid
notamment,
- soit personnels : la femme est plus souvent
touchée,
activités
extra-professionnelles
augmentant la sollicitation des articulations
(sports, bricolage, jardinage…), stress…
Dans la filière avicole, les activités professionnelles
exposantes peuvent être l’insémination, le sexage, le
dégriffage, le débecquage, les vaccinations, le
ramassage des volailles d’autant plus pénible que le
poids de la volaille est important et que la durée de
l’activité est limitée dans le temps. Le
conditionnement des œufs est également à risque.
Pour le canard, le gavage est également une activité
exposante et, à l’abattoir, l’accrochage. Enfin, la
découpe de la viande et le désossage en bout de
chaîne sont également particulièrement pourvoyeurs
de ce type de pathologie.
La principale affection enregistrée est le syndrome du
canal carpien qui correspond à la compression du nerf
médian au niveau du poignet. Les symptômes sont des
fourmillements, des engourdissements nocturnes de
certaines zones de la main. Ils peuvent s’accompagner
d’une perte de la sensibilité dans la zone concernée,
d’une diminution de la force musculaire et de troubles
vasculaires locaux.
La prévention se base sur une organisation du travail
la plus adaptée possible à la physiologie humaine en
terme de cadence, de variation des tâches et de
formation, sur l’utilisation d’outils adaptés (couteau
affûté et affilé en abattoir, …), sur l’adaptation du
poste de travail à la morphologie de celui qui
l’occupe.
Parallèlement à ces affections, les sciatiques par
hernie discale, nouveau tableau de MPI apparu en
1999, sont enregistrées de plus en plus souvent. La
manutention manuelle, les postures dégradées mettant
le bas du dos en extension en sont surtout
responsables.
Là encore la prévention repose notamment sur une
réflexion sur le poste de travail : sièges adaptés lors
des séances de vaccination ou de débecquage,
dimensions adaptées des cages évitant de se pencher
en avant les jambes tendues, formation des
travailleurs aux gestes et postures, ramassage
mécanisé des volailles, utilisation de pince pour le
ramassage des œufs au sol…
1.2. Les maladies infectieuses
Les dispositions d’hygiène dans les élevages sont le
plus souvent instaurées pour la protection sanitaire
des consommateurs (ex : Salmonella enteritidis) ou
pour réduire les micro-organismes pathogènes
animaux et améliorer la rentabilité économique (2).
Leur objectif n’est pas de protéger le personnel
travaillant dans l’élevage, même si certaines de ces
mesures y participent par ricochet.
Sur le plan des infections, il ne faut pas négliger les
maladies non spécifiques aux oiseaux : tétanos
notamment pour lequel il existe une vaccination
efficace et sans danger, les pathologies dues aux
nuisibles et notamment aux rongeurs (leptospirose)…
Elles sont maintenant plus rares du fait de leur
connaissance et de la mise en œuvre d’une prévention
efficace.
Plusieurs types d’affections susceptibles d’être
transmises par les oiseaux peuvent être notées mais
elles restent heureusement exceptionnelles et peu
transmissibles à l’homme (maladie de Newcastle,
tuberculose à Mycobacterium avium…)
Il semble utile par contre de signaler les chlamydioses
aviaires dues à Chlamydophila psittaci (3, 4). Cette
bactérie intracellulaire stricte peut être portée chez
130 espèces d’oiseaux. Ce sont les souches de la
dinde aux USA et du canard en France qui sont
rapportées comme les plus virulentes et responsables
d’infections avérées chez l’homme. Le plus souvent
l’infection chez l’oiseau reste inapparente ou l’oiseau
est porteur sain. Cette bactérie ne pose aucun
problème pour le consommateur, puisqu’elle est
détruite par la chaleur. Par contre, elle se transmet le
plus souvent par inhalation de poussières infectantes,
plus rarement par ingestion ou contact lors de la
manipulation d’un animal infecté (plumes ou tissus).
L’excrétion de. psittaci est favorisée par une baisse de
résistance lors de stress divers (carences, entassement,
transport…).
Sur le plan humain, les cas surviennent de façon
sporadique ou par foyers épidémiques. L’infection
peut rester bénigne (pseudo-grippe) ou rester
inapparente. Par contre, elle peut engendrer des
pneumopathies sévères voire mortelles par détresse
respiratoire aiguë.
En France, les épidémies ont surtout été décrites dans
les abattoirs de canards et de dindes en Bretagne et
Pays de la Loire, notamment aux postes d’accrochage
et d’éviscération et au transport. Des cas ont
également été rapportés en élevages et lors de
ramassages de canards. Ainsi à l’hôpital de Cholet,
plus de 80 sujets ont été hospitalisés en réanimation
entre 1993 et 2002 et l’exposition au canard a été
retrouvée dans la quasi-totalité des cas.
Traitée à temps par les antibiotiques adéquats
(cyclines ou macrolides), cette affection reste le plus
souvent bénigne mais engendre une asthénie de
plusieurs semaines.
En marge des maladies infectieuses, les injections
accidentelles lors de séances de vaccinations ne
posent pas tant le problème zoonotique ou de
surinfection de plaies que celui de la survenue de
nécrose cutanée due à la présence dans le vaccin d’un
excipient huileux.
1.3 Affections respiratoires ou cutanées liées à une
substance chimique ou à un gaz
Il serait trop long de détailler la pathologie par type de
produit. De façon globale, l’emploi de produits de
nettoyage à base d’acides ou de bases est corrosif
pour la peau et peut entraîner des effets irritants sur le
plan respiratoire (toux, essoufflement, voire détresse
respiratoire à concentration importante) de même que
la chloration de l’eau (5).
L’utilisation des désinfectants (glutaraldéhyde,
ammoniums quaternaires ou mélanges) sont de grands
pourvoyeurs d’allergies cutanées à type d’eczéma
notamment, le principal problème étant qu’une fois la
sensibilisation survenue, l’allergie ne peut disparaître
qu’en cas d’éviction totale de l’exposition
antigénique.
L’emploi
du
formaldéhyde
est
également
particulièrement délicat. Irritant oculaire et des voies
respiratoires à l’odeur très reconnaissable, ce
désinfectant très actif est également un puissant
allergisant tant sur le plan cutané que sur le plan
respiratoire. Il est classé comme cancérogène possible
(catégorie 3) par la communauté européenne et
comme cancérogène probable (groupe 2A) par le
centre international de recherche sur le cancer,
l’organe cible étant le rhino-pharynx (6).
L’emploi des fongicides doit également répondre aux
bonnes pratiques d’utilisation pour ne pas entraîner
de conséquences sur la santé (troubles digestifs,
irritation cutanée et des voies aériennes supérieures
surtout).
Certains gaz peuvent être également sources
d’intoxication. On citera principalement le monoxyde
de carbone (CO) et l’ammoniac.
Le monoxyde de carbone résulte d’une mauvaise
combustion au niveau de radiants vétustes ou
encrassés, dans un bâtiment insuffisamment ventilé et
chauffé trop rapidement. C’est parfois le cas en début
de lot en période hivernale (7, 8, 9). La valeur
moyenne d’exposition (VME) réglementaire en
France est de 50 ppm, valeur souvent dépassée dans
les conditions à risque précitées.
Le monoxyde de carbone est un gaz inodore, incolore
non irritant qui a pour propriété de se fixer sur
l’hémoglobine à la place de l’oxygène. Il en résulte un
manque d’oxygénation des tissus qui au départ se
traduit par des maux de tête et des nausées mais peut
également conduire à une perte de connaissance et à
la mort par asphyxie à des concentrations élevées (7,
8).
Un autre gaz toxique est l’ammoniac dégagé par la
fermentation anaérobie au niveau de la litière. La
quantité de gaz est d’autant plus importante que les
déjections s’accumulent, que la litière est plus humide
autour d’une température de 20 à 30°C. D’autres
facteurs interviennent : la densité animale, la fin de
l’élevage, la nature du sol, l’insuffisance de
ventilation (10, 11,12).
L’ammoniac est un gaz très irritant pour les
muqueuses respiratoires et oculaires. Une exposition à
des concentrations élevées peut conduire à un
bronchospasme voire à un œdème pulmonaire. Lors
d’exposition chronique, l’ammoniac entraîne un
phénomène de tolérance : l’odeur est perçue pour des
concentrations plus élevées. L’effet sur la fonction
respiratoire est possiblement évoqué sans preuve par
manque d’études (13).
1.4 Autres affections respiratoires
Elles sont le plus souvent dues à des particules
organiques qui regroupent les poussières végétales et
les microorganismes de nature fongique ou
bactérienne avec leurs toxines, sans oublier le tabac,
facteur favorisant non spécifique d’irritation des voies
respiratoires (14, 15).
•
L’asthme (16, 17)
Sa prévalence n’est pas quantifiée de façon précise,
notamment en aviculture ; il semble cependant que les
professions les plus touchées soient les ouvriers
céréaliers des grands silos à grains, les éleveurs de
porcs et les éleveurs de volailles. Une étude retrouve
qu’un éleveur de pigeon sur 4 signale présenter des
sifflements respiratoires. Il s’agit en effet le plus
souvent de la description de sibilances accompagnées
de dyspnée pendant le travail, et rarement de crises
sévères.
Cet asthme est souvent dû à des phénomènes
inflammatoires plurifactoriels et non uniquement
allergiques ; c’est en fait le mélange de particules non
vivantes (alimentation, déjections, plumes, squames,
secrétions animales, particules minérales) et de
particules vivantes (bactéries, acariens, moisissures et
leurs métabolites…) qui constitue la poussière
avicole.
Dans les élevages de volailles en batterie, au delà des
aérocontaminants non spécifiques, les allergènes
potentiels sont multiples : plumes, acariens,
déjections, protéines aviaires, litières riches en
moisissures et en actinomycètes thermophiles,
aliments et leurs additifs…
•
La bronchite chronique et l’obstruction
bronchique chronique (16)
Leur définition clinique est bien cadrée : pour la
bronchite chronique, il s’agit d’une toux et d’une
expectoration qui dure plus de 3 mois pendant 2 ans
(OMS). L’obstruction des voies aériennes débute
souvent par une atteinte asymptomatique des petites
bronches distales qui peut se diagnostiquer lors
d’explorations fonctionnelles respiratoires. Elles
peuvent évoluer vers une insuffisance respiratoire
chronique avec emphysème.
Elles sont plus fréquemment rencontrées dans les
milieux agricoles riches en gaz et en toxines
bactériennes et fongiques.
•
Les alvéolites allergiques extrinsèques (16,
18)
Les
alvéolites
allergiques
extrinsèques
ou
pneumopathies
d’hypersensibilité
sont
des
pneumopathies aiguës ou subaiguës liées à
l’inhalation chronique de particules le plus souvent
organiques qui entraînent des réactions allergiques
complexes et une pathologie interstitielle pulmonaire.
Elles sont très fréquentes dans le secteur avicole, le
réservoir antigénique habituel étant les déjections
d’oiseaux et l’antigène reconnu les protéines aviaires
(IgA). La phase de nettoyage des poulaillers a été
reconnue comme particulièrement immunogène.
La forme clinique habituelle est un syndrome pseudogrippal associant toux, essoufflement sans sibilance,
fièvre, myalgies, maux de tête apparaissant plusieurs
heures après une exposition antigénique. C’est
souvent sur ce caractère retardé que s’oriente le
diagnostic.
Chez les éleveurs d’oiseaux la participation
bronchique est importante avec expectoration,
encombrement bronchique…Le plus souvent les
symptômes disparaissent en quelques heures ou
quelques jours et l’éleveur peut ne pas consulter.
Parfois le tableau est plus progressif avec une toux ou
une dyspnée traînante sans fièvre et un
amaigrissement souvent constaté notamment chez les
éleveurs d’oiseaux. La répétition de ces accès si
l’exposition se poursuit peut conduire à l’installation
d’une insuffisance respiratoire chronique par
bronchopathie chronique obstructive ou par fibrose
interstitielle diffuse.
Différents examens aident au diagnostic : radio
graphie, explorations fonctionnelles respiratoires,
sérologie (précipitines), lavage broncho-alvéolaire
(hyperlymphocytose).
•
Le syndrome toxique des poussières
organiques ou ODTS (organic dust toxic
syndrom) (16, 19, 20)
Il s’agit d’un syndrome respiratoire aigu fébrile de
mécanisme non allergique déclenché par une
exposition massive à des particules organiques et
notamment des endotoxines. Ces endotoxines sont des
éléments constitutifs de la membrane des bactéries
Gram négatif. Des mesures atmosphériques réalisées
dans des bâtiments d’élevage avicole ou lors de
ramassages ont retrouvé des taux élevés
d’endotoxines. D’autres facteurs tels que les
mycotoxines et les poussières de céréales viennent
certainement également jouer un rôle inflammatoire
important. Des prévalences très élevées, jusqu’à 30 %,
ont été rapportées dans des élevages de volailles ou de
porcs.
Les symptômes ressemblent beaucoup à ceux de
l’alvéolite allergique : toux, dyspnée, fièvre, malaise 4
à 10 h après une exposition massive et souvent
inhabituelle. Ils peuvent survenir dès la première
exposition contrairement aux autres pathologies
allergiques précédemment décrites. Les examens
restent normaux (pas de précipitines) et les
symptômes disparaissent en 12 h, sauf en cas de
pathologie respiratoire antérieure. Seul le lavage
broncho-alvéolaire montre une polynucléose. Ce
syndrome n’évolue jamais vers la fibrose, il peut
conduire secondairement à une bronchite chronique.
Pour toutes ces pathologies respiratoires, la
prévention repose sur la conduite de l’élevage luimême : de nombreux facteurs interviennent : par
exemple, l’influence de la litière avec poussières
céréalières et la production d’ammoniac (21), les
pratiques de paillage, de broyage, l’utilisation de
fongicides…
Les mesures à préconiser seront fonction du type
d’élevage et à examiner au cas par cas : protection
collective d’abord avec ventilation des bâtiments
empoussiérés, broyage toujours à l’extérieur…
protection individuelle ensuite (masque antipoussières) lors des opérations les plus exposantes.
Certains travailleurs atteints de pathologies
respiratoires réussissent à garder leur activité grâce à
ces protections individuelles (masque à ventilation
assistée) et à une réflexion sur l’organisation des
tâches les plus à risque. Le tabac sera
systématiquement déconseillé.
1.5 Charge mentale
La conduite d’un élevage devient sans cesse plus
technique nécessitant des connaissances de plus en
plus fines dans des domaines divers. Dans certains
cas, l’élevage impose des contraintes horaires à
l’éleveur et la peur de l’accident sanitaire, toujours
vécu comme un échec, entraîne un stress encore
développé par le souci de la pérennité de
l’exploitation dans un contexte économique difficile.
Cette charge mentale ne doit pas être oubliée face aux
autres risques plus tangibles qui viennent d’être
énumérés. Ici aussi les réflexions en termes
d’organisation du travail doivent inclure cet aspect
souvent considéré comme inévitable, le bien-être de
l’éleveur devant également y être intégré.
2. Modifications des modes d’élevage liées à la
réglementation sur le bien-être animal et
perspectives d’évolution des pathologies
Les recommandations du Conseil de l’Europe ou les
directives de l’Union Européenne ont pour but de
fixer des limites à l’instrumentalisation de l’animal
d’élevage en favorisant le développement de systèmes
d’élevage permettant une plus grande expression des
comportements de l’animal (se percher, gratter, se
baigner …) ou visant à limiter les principaux troubles
comportementaux ou pathologiques.
On se situe encore très en amont de la mise en
application à grande échelle des prescriptions et il est
prématuré à l’heure actuelle d’avoir des données
objectives validées d’évaluation.
bâtonnets. Ces évolutions ne constitueront donc pas
un facteur majeur d’amélioration du confort de travail.
Autre paramètre implicitement évoqué par les
recommandations, la densité. Si on excepte le cas de
la poule pondeuse, aucune norme n’est cependant
proposée par les différents textes. Chez la volaille de
chair, réduire la densité a bien évidemment un impact
majeur sur la performance économique. En revanche,
du point de vue technique, cela peut constituer un
élément de confort pour l’éleveur en réduisant les
risques d’échec. En fait, cela rejoint une
problématique plus générale qui est celle de la gestion
des conditions d’ambiance et de la litière.
La litière, par exemple, peut jouer un rôle sur la santé
de l’animal au travers notamment de son degré
d’humidité. Une litière sèche et meuble est
recommandée pour des raisons sanitaires animales et
de limitation de dégagements gazeux (ammoniac
surtout). Cependant, plus la litière est sèche, plus
l’animal est actif, plus le risque de blessure pourrait
être important pour lui-même et pour l’homme
(notamment le ramasseur) mais également plus la
mise en suspension de poussières susceptibles d’être
infectantes ou pouvant altérer la fonction respiratoire
pourrait être intense.
Par conséquent, c’est la recherche de l’équilibre
optimal qui devra être mise en œuvre. Des stratégies
comme celles mises en œuvre en Suède pour l’élevage
de poulets visant à favoriser la recherche de cet
optimum pour garantir le niveau de bien-être des
animaux peuvent donc avoir des conséquences
positives sur le confort de travail. En revanche, il ne
faut pas négliger le fait que la mesure de critères de
performance additionnels et les pénalités éventuelles
associées constituera une contrainte supplémentaire
pour l’éleveur.
Au delà de ces considérations générales, nous allons
maintenant envisager certains cas particuliers et les
conséquences potentielles des évolutions prévisibles.
De plus, si certaines dispositions sont d’ordre général,
l’éclairement ou la densité par exemple, d’autres
seront spécifiques à l’espèce de volaille élevée.
2.1. Considérations générales
2.2. Les dindes
Les intensités lumineuses généralement pratiquées en
élevage sont très faibles pour limiter l’activité des
animaux ou les phénomènes de picage. La plupart des
recommandations prévoient une augmentation de
celle-ci. Par exemple, 10 lux sont recommandés au
minimum pour les dindes. Cela reste malgré tout un
niveau d’éclairement où l’œil humain n’est pas très
efficace, que ce soit du point de vue des cônes ou des
Une des principales évolutions induites par la
recommandation concerne le développement de
systèmes d’enrichissement visant à limiter les
phénomènes de picage. Or, cet enrichissement passera
vraisemblablement par un aménagement du bâtiment.
Sur un plan expérimental, différentes solutions ont été
envisagées jusqu’à présent. Par exemple, des platesformes, des bottes de paille et des plaques métalliques
suspendues peuvent être mises en place pour répondre
aux besoins de zones de repos, de perchage et de
picage des dindes. D’autres solutions, comme
l’utilisation de barrières verticales et de ficelles sont
en cours d’évaluation. Si l’efficacité et la pertinence
technique de ces systèmes reste à vérifier à grande
échelle, il convient cependant dès aujourd’hui de les
raisonner en fonction notamment de leur facilité de
manipulation et de nettoyage. Par exemple,
l’utilisation de plates-formes avec système de
récupération des déjections nécessite la mise en œuvre
de systèmes lourds et demandant un nettoyage
particulier. Les notions de pénibilité du travail
(manutention) ou d’exposition des éleveurs à des
aérosols lors des opérations de nettoyage/désinfection
ne semblent pas avoir été prises en compte lors de la
conception de ces systèmes et d’autres solutions
devraient être envisagées
2.3. Le canard à rôtir (22)
Les conséquences prévisibles pour ce type d’élevage
sont assez proches de celles envisagées dans le cas de
la dinde. Certes, une modification majeure comme
l’abandon du caillebotis lié à la nécessité de mettre à
disposition des animaux une surface de repos couverte
de litière engendrerait de profondes modifications du
mode d’élevage mais les conséquences (autres
qu’économiques) seraient les mêmes que pour les
autres volailles de chair.
La référence à la possibilité pour le canard de se
baigner et de projeter de l’eau peut poser problème
quant au risque infectieux d’origine hydrique. Mais,
de façon plus générale, même si ce n’est pas explicite
dans le texte de recommandation, c’est la recherche
d’alternative aux pratiques de débecquage et de
dégriffage, donc a priori, l’exploration de voies
d’enrichissement du milieu, qui influeront, comme
pour la dinde, sur les conditions de travail..
Malheureusement, les travaux sont pratiquement
inexistants alors qu’il s’agit sans doute d’un enjeu
économique majeur pour la production française de
canards de barbarie.
2.4. Le canard hybride
Plus spécifique est le cas des hybrides utilisés pour la
production de foie gras. En effet, la phase de gavage
a, dans l’immense majorité des cas, aujourd’hui lieu
en cage individuelle qui limite les mouvements de
l’animal mais qui est à hauteur du gaveur et n’exige
pas de contrainte posturale particulière. La principale
pathologie est alors la survenue de troubles musculosquelettiques (TMS) liés aux gestes répétés des
poignets (800 à 1000 canards en moyenne par
gaveur). Or, ces conditions d’élevage ne répondent
pas aux nouvelles exigences liées au bien-être animal
qui vont conduire, si elles sont appliquées, au
développement de cages collectives pour le logement
des animaux durant cette phase.
Or, l’utilisation de ces mini-parcs, laissant plus
d’espace aux animaux, demande par contre à
l’opérateur de se baisser et de se pencher en avant
sans pouvoir plier les genoux, ce qui impose au bas du
dos une mise en tension importante et peut être source
de lumbagos ou de lombalgies chroniques. De plus,
l’animal peut fuir au fond du parc, augmentant cette
contrainte lombaire. Enfin, la force que le gaveur
devra exercer sur l’animal en raison de l’absence de
systèmes de contention sera aussi en nette
augmentation.
Sur le plan de l’hygiène, les amas de déjections et
plumes sur les planchers qui apparaissent avec
mode d’élevage posent la question des modes
nettoyage et de l’aérosolisation par l’utilisation
nettoyeurs à haute pression.
de
ce
de
de
En revanche, l’augmentation d’environ 30 % du
temps de gavage devrait conduire à une diminution
des effectifs et de la répétitivité des actes. Mais une
telle évolution reste subordonnée à la capacité de la
filière à financer les surcoûts induits. L’hypothèse
reste par conséquent relativement improbable et, seul
le développement de systèmes efficaces de contention
temporaire de l’animal apparaît être une solution
acceptable. Mais c’est alors l’ensemble du système,
c’est à dire le couple gaveuse-logement, qui doit être
appréhendé.
En conclusion, ces systèmes de logements collectifs
restent à inventer pour permettre aux différents
intérêts du bien-être animal et du bien-être de
l’éleveur de s’harmoniser.
2.5. Poules pondeuses
Seule espèce parmi les volailles à jouir du privilège
d’être touchée par une Directive, le cas des poules
pondeuses est particulier, d’une part, en raison de
l’antériorité des travaux effectués, et, d’autre part, car
la réglementation définit très précisément les modes
d’élevage.
A l’échéance finale, les éleveurs disposeront de deux
alternatives : la cage aménagée et l’ élevage au sol
avec une déclinaison sous une forme particulière de
celui-ci dans le cas des volières, systèmes permettant
d’augmenter la densité animale par la mise en place
de plusieurs niveaux de caillebotis accessibles aux
animaux. L’intérêt économique d’un tel concept
comme alternative à la cage a conduit à la réalisation
de nombreux travaux expérimentaux depuis une
quinzaine d’années aux Pays-Bas notamment et à son
développement sur le terrain en Suisse. Il a été ainsi
montré une augmentation significative des poussières
totales et des endotoxines par rapport à un élevage
classique en cages.
Les plaintes de type respiratoire (gêne respiratoire,
toux) ont également été comparées par questionnaire
chez des personnels volontaires selon les deux types
d’élevage. Les 2 groupes présentaient un taux plus
élevé de plaintes 1 heure après la prise de poste, effet
qui disparaissait ensuite 6 h après. Mais, à ce moment,
le pourcentage de personnes en volière qui
continuaient à se plaindre restait plus élevé, quoique
non significatif. De même, une légère augmentation
de la température corporelle était notée en volière. Sur
le plan de la fonction respiratoire (capacité vitale
forcée et volume expiratoire maximum par seconde),
les différences n’étaient pas significatives. (23).
L’élevage en volière impose d’autre part à l’éleveur
de circuler au milieu des animaux dans cette
atmosphère empoussiérée et avec parfois des
conditions d’éclairement basses pour limiter les
problèmes de picage.
De même, les risques liés à la manutention ont été
comparés sans qu’une différence significative ait été
mise en évidence selon les types d’élevage.
Les risques de TMS semblent par contre plus
importants dans les élevages avec des cages qu’en
volière. Cependant, il faudrait évaluer l’influence de
la pratique du débecquage généralisé dans les
systèmes alternatifs, imposant sur une courte durée, la
manutention de nombreuses volailles et la répétitivité
du même geste.
Un autre facteur à prendre en compte est la possibilité
de nettoyage et de désinfection. Les structures en
volière sont complexes, non mobiles, remplies de
recoins, véritables « niches » écologiques à microorganismes.
Les procédures de nettoyage seront également à
examiner : l’utilisation de l’air comprimé ou de lavage
à haute pression est hautement générateur d’aérosols,
toujours à déconseiller en termes de protection
respiratoire de l’opérateur.
Le ramassage des œufs au sol pose également de
nombreuses questions qui se rapprochent de l’élevage
au sol : date de ponte, hygiène (pour le consommateur
surtout) mais induit aussi des problèmes de posture.
La solution pourrait être l’utilisation de pinces qui
peut ne pas être très aisée dans des zones où
l’éclairement est bas.
Enfin, cette complexification de la conduite d’élevage
avec des procédures à définir, le manque de recul sur
la survenue d’accidents sanitaires provoquent sans
aucun doute une augmentation de l’inquiétude sur la
pérennité économique de l’exploitation et participent
à une augmentation du niveau de stress de l’éleveur.
En ce qui concerne les cages aménagées, les normes
émises correspondent à un modèle expérimental sans
qu’il y ait eu d’évaluation approfondie préalable. La
pertinence sur le plan technique et du bien-être des
normes adoptées restent donc à démontrer. Par contre,
dès à présent, il apparaît que le bac à poussière
envisagé initialement dans certains modèles de cages
génère une augmentation de la présence de poussière
dans l’ambiance du bâtiment avec certains types de
substrat.
Parallèlement,
à
l’évaluation
des
conséquences de ce type d’aménagement sur la
qualité sanitaire de l’œuf et la satisfaction des besoins
éthologiques de la poule, la santé de l’éleveur devra
aussi être prise en compte.
Conclusion
Les différents textes concernant le « bien-être
animal » induisent des modifications qui demandent
souvent l’invention de nouvelles procédures
techniques. Celles-ci doivent maintenant faire l’objet
d’une évaluation tant sur le plan de la faisabilité
économique, que sur les plan des conséquences sur la
santé animale et humaine. La santé et le bien-être de
l’éleveur sont malheureusement peu abordés par
rapport à ceux de l’animal ou du consommateur.
Les mesures de protection collective (ventilation,
organisation du travail…) et de protection individuelle
(port de masque) devront être également revues faces
à ces nouvelles conditions de travail.
Ces textes certes novateurs et utiles devraient pouvoir
être révisables pour incorporer les résultats des
évaluations successives qui sont en cours ou seront
pratiquées au cours des prochaines années
d’application, prendre en compte tous les aspects et
notamment de santé humaine et ne pas conduire à des
obstacles insurmontables en termes d’hygiène ou une
aggravation de l’état de santé des éleveurs.
Mais, au-delà de l’exemple particulier choisi dans
notre approche, c’est une réflexion générale qui doit
être engagée sur les conditions de travail car une
analyse du même type pourrait porter sur l’existant…
S’il est classique de penser qu’il faut « souffrir pour
être beau », la compétitivité future du métier
d’aviculteur passera autant par sa capacité à fournir un
revenu à celui qui l’aura choisi que par sa capacité à
offrir des conditions de travail décentes. Tout comme
en matière de bien-être animal, nous allons vers un
marketing du système d’élevage, la concurrence entre
viandes s’exprimera peut-être aussi à l’avenir en
fonction des conditions de travail proposées dans les
différentes filières. Un enjeu stratégique pour les
prochaines années ?
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AFFECTIONS RESPIRATOIRES DES AVICULTEURS ET DES PORCHERS
Pascale Gérault1, Dewitte J.D2., Jourdren L. 3
1
Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments (AFSSA), Zoopôle les Croix, BP53, 22440 Ploufragan
2
Service de Santé au Travail et de Pathologies Professionnelles, CHU Morvan, 29609 Brest Cedex
3
Observatoire de la Santé au Travail en Agriculture (OSTA), 12 rue de Paimpont, 22025 St Brieuc Cedex 01
Résumé
La nécessité d'une meilleure rentabilité économique a conduit au fort développement de l'élevage intensif ces 20
dernières années. En Bretagne, l'Observatoire de la Santé au Travail en Agriculture (OSTA) a décidé, à la
demande de certains éleveurs, de se pencher sur les conséquences en terme de santé des salariés et exploitants
intervenant dans ce type d'élevage. Au travers de questionnaires et d'explorations fonctionnelles respiratoires,
l'objectif de cette étude descriptive est d'appréhender l'éventuelle altération de la fonction respiratoire des
aviculteurs et porchers en se basant sur les valeurs "références" de population non exposée (ne travaillant pas en
élevage intensif). L'étude des pratiques professionnelles en élevage donnent des informations sur les expositions
auxquelles peuvent être confrontés aviculteurs et porchers. Les résultats concordent avec la littérature, à savoir
que cette fonction respiratoire est effectivement dégradée pour les personnes travaillant en élevage intensif. Des
actions d'information et de prévention vers cette population exposée sont donc à envisager.
-
Introduction
Le développement de l'élevage intensif ces 20
dernières années a amené bon nombre de pays à
s'interroger sur les conséquences en terme de santé
des exploitants et salariés travaillant dans cet
environnement. Des études menées depuis une dizaine
d'années aux USA, Québec, Allemagne, Yougoslavie,
Pays Bas… tendent en effet à prouver que les impacts
sur la fonction respiratoire des aviculteurs et porchers
ne sont pas négligeables : sensibilité bronchitique
accrue (Vogelzang et al, 1996 et 1997),
développement de symptômes respiratoires aigus et
chroniques (asthme), dégradation de la fonction
pulmonaire (Zuskin et al, 1992) sont quelques uns des
constats pour ces catégories de travailleurs. Les
causes potentielles sont multiples : exposition aux
poussières, désinfectants, endotoxines (Von Essen et
Donham, 1999), copeaux de bois de certains litières,
alimentation en sec, ventilation automatique… causes
aggravées par des facteurs tels que le nombre d'années
de travail (Reynolds et al, 1993), le nombre d'heures
quotidiennes passées dans les bâtiments, la
consommation de tabac…
En 1999, l'Observatoire de la Santé au Travail en
Agriculture (OSTA) a décidé, à la demande de
certains éleveurs, de réaliser un état des lieux à la fois
sur les conditions de travail et sur les affections
respiratoires des aviculteurs et porchers travaillant en
élevage intensif, comparativement à une population
non exposée à ce risque. Trois volets composent cet
état des lieux :
- une étude métrologique dans les bâtiments
portant sur le facteur ammoniac,
-
une étude sur le nombre d'affections longue durée
pour troubles respiratoires chroniques (ALD14)
en population exposée (élevages intensifs) et non
exposée (hors élevages intensifs),
une étude descriptive auprès d'aviculteurs, de
porchers et de non exposés, assortie
d'explorations
fonctionnelles
respiratoires,
présentée dans cette communication.
1. Méthodologie
Cette étude descriptive nécessitait la participation
volontaire de trois catégories de personnes : des
aviculteurs et des porchers travaillant en élevage
intensif dits "exposés", des salariés issus du secteur de
l'agriculture mais ne travaillant pas dans cet
environnement dits "non exposés".
L'enquête a été réalisée en trois temps :
- un premier questionnaire a été envoyé à tous, et
rempli individuellement par chaque personne,
une relecture des réponses ayant été faite avec un
médecin pour éviter tout oubli,
- un deuxième questionnaire, destiné uniquement
aux aviculteurs et aux porchers et concernant
leurs pratiques professionnelles, a été rempli en
présence d'un médecin,
- des explorations fonctionnelles respiratoires
(EFR) ont été mises en œuvre pour tous.
Le fichier de données comporte cinq groupes de
variables : les variables d'identification, les facteurs
dits de confusion, les symptômes respiratoires, les
pratiques professionnelles et les résultats des
Cinquièmes Journées de la Recherche Avicole, Tours, 26 et 27 mars 2003
explorations fonctionnelles respiratoires. Dans un
premier temps, les croisements des variables deux à
deux ont été réalisés (test du χ², analyse de variance).
Des analyses de données ont ensuite été faites
spécifiquement sur les pratiques professionnelles, les
symptômes respiratoires et les résultats des
explorations fonctionnelles respiratoires.
La présence ou l'absence de symptômes respiratoires
selon la catégorie (aviculteurs, porchers, non
exposés), ajustée sur les facteurs de confusion (tabac,
âge, sexe), a été étudiée par régression logistique.
Les résultats des explorations fonctionnelles
respiratoires ont été traités par régression linéaire
multiple, par catégorie, avec prise en compte des
mêmes facteurs de confusion. Cette analyse n'est faite
que pour les dossiers ayant des résultats médicaux
interprétables. En effet, dans ce type d'examen, la
mobilisation de capacité respiratoire par le patient doit
être parfaite pour que les résultats soient considérés
comme valides. Dans le cas contraire, les valeurs
associées à la Capacité Vitale Forcée (CVF) sont
mises à 0. Afin de vérifier que ces résultats invalidés
ne sont pas liés à des profils particuliers de personnes,
des tests statistiques sont mis en œuvre pour vérifier si
des différences existent entre ce groupe et les autres
en terme de sexe, âge, consommation de tabac et
symptômes respiratoires.
L'étude des pratiques professionnelles des aviculteurs
et des porchers a été effectuée par Analyse des
Correspondances Multiples, complétée par une
Classification Ascendante Hiérarchique. Seules les
variables comparables sont introduites en variables
actives. L'objectif est de noter des similitudes ou
différences au regard de leur comportement en
élevage, pour disposer de pistes de réflexion sur les
facteurs liés à d'éventuels troubles respiratoires.
Enfin, une synthèse de l'ensemble des résultats est
réalisée et analysée avec des médecins et des
pneumologues experts.
2. Résultats
825 personnes volontaires ont pris part à cette étude,
dont 261 aviculteurs, 260 porchers et 304 "non
exposés" (ne travaillant pas en élevage intensif). 82%
des porchers, 51% des aviculteurs et 69% des "non
exposés" sont des hommes. Aucune différence n'est
notée sur l'âge ni sur la consommation de tabac entre
ces trois catégories.
d'irritations respiratoires s'avère significative chez les
porchers comparativement aux autres catégories
(OR=1.59 [1.007 ; 2.520]), effet là encore accentué
par la consommation de tabac (effet "fumeur actuel,
OR=2.32 [1.284 ; 4.178]).
Les aviculteurs présentent des irritations significatives
des yeux (OR=1.46 [1.090 ; 1.955]) et du nez
(OR=1.61 [1.139 ; 2.285]).
Aucun effet exposition n'est mis en évidence pour la
toux et les sifflements dans la poitrine, qui sont
seulement liés à un effet "fumeur actuel"
(respectivement OR=2.03 [1.265 ; 3.250] et OR=1.95
[1.098 ; 3.469]).
2.2. Explorations fonctionnelles respiratoires
Parmi les 825 dossiers étudiés, 173 résultats
d'explorations fonctionnelles respiratoires (EFR) ont
été déclarés inexploitables : 59 dossiers d'aviculteurs,
48 dossiers de porchers et 66 de non exposés.
L'analyse de ces dossiers n'a mis en évidence aucune
différence statistique en terme d'âge, de sexe, de
consommation de tabac. De plus, les tests faits sur les
déclarations de symptômes se sont également révélés
non significatifs. La mise à l'écart de ces dossiers n'est
donc pas lié à un excès de symptômes respiratoires, et
ce résultat associé à celui concernant les variables de
confusion nous permet de dire que la non prise en
compte de ces dossiers pour les résultats Explorations
Fonctionnelles Respiratoires n'introduit pas de biais.
Cinq variables sont étudiées : Capacité Vitale Forcée
(CVF), Volume Expiratoire Maximum Seconde
(VEMS), Débit Expiratoire Maximum (DEM75,
DEM50, DEM25 selon qu'il reste 75%, 50% ou 25%
de la Capacité Vitale Forcée à expirer). Une valeur
faible pour les variables de débit traduit une altération
de la fonction respiratoire. Notons que les valeurs
moyennes globales ne varient pas significativement
par rapport aux valeurs de références de la
Communauté Européenne du Charbon et de l'Acier
(CECA). Mais si l'on se penche sur les valeurs par
catégorie, des différences statistiques (illustrées sur la
Figure 1, par * ou **, p<0.05) peuvent être notées.
FIGURE 1 : valeurs moyennes et écart-type des EFR
selon la catégorie (aviculteurs, porchers, non exposés)
140 Valeurs moyennes des EFR
Aviculteurs
Porchers
Non Exposés
120
100
*
*
**
**
* *
*
*
*
*
*
*
80
2.1. Symptômes respiratoires
Les
porchers
présentent
une
fréquence
d'expectorations plus élevée que les deux autres
catégories (OR=1.77 [1.215 ; 2.594]), effet accentué
par la consommation de tabac (effet "fumeur actuel,
OR=1.87 [1.139 ; 3.063]). De même, la présence
60
40
20
Explorations
Fonctionnelles
Respiratoires
0
CVF
VEMS
DEM75
DEM50
DEM25
Après ajustement sur les facteurs de confusion, un
effet "catégorie" demeure pour les variables CVF,
VEMS, DEM75 et DEM50.
Les valeurs de CVF, VEMS sont plus faibles chez les
porchers, légèrement plus élevées chez les aviculteurs
et supérieures chez les non exposés.
Les valeurs de DEM75 et DEM50 sont plus faibles
chez les aviculteurs, légèrement plus élevées chez les
porchers et supérieures chez les non exposés.
FIGURE 2 : AFCM (individus exposés), Axes 1 et 2
Notons que les différences entre les trois catégories,
même si elles sont significatives, restent dans des
proportions non dramatiques. Une étude de la pratique
professionnelle des aviculteurs et porchers peut nous
fournir des éléments de réflexion sur les différences
constatées.
2.3. Pratiques professionnelles
L'étude n'a été faite que pour les porchers et
aviculteurs. L'activité de ces deux catégories de
professionnels est différente, seules des variables
comparables
(exposition
aux
poussières,
désinfectants, port du masque, temps passé dans les
bâtiments…) alimenteront cette analyse.
Suite à la mise en œuvre de l'AFCM et à la CAH, trois
groupes de professionnels se distinguent nettement
(Figures 2 et 3) : deux groupes "aviculteurs" et un
groupe "porchers".
Les aviculteurs de "type 1" sont plutôt des femmes,
peu exposées aux poussières et aux désinfectants (non
connus), passant peu de temps (moins d'une heure par
jour) dans les bâtiments dans lesquels la volaille est
élevée en batterie. L'alimentation des animaux est en
sec, la ventilation naturelle. Ces éléments se
rapprochent de l'activité en élevages de pondeuses.
Les aviculteurs de "type 2" sont exposés aux
désinfectants (à base de formol), passent 1 à 3 heures
par jour dans les bâtiments dans lesquels la volaille
est élevée sur litière ou en batterie. L'alimentation des
animaux est en sec, la ventilation naturelle et
mécanique. Notons que le port du masque n'est pas
systématique. L'activité se rapproche ici de celle des
bâtiments de volailles de chair.
La distinction entre ces deux catégories d'aviculteurs
n'a pas été prise en compte dans notre questionnaire.
Il est intéressant de la signaler ici, afin d'en tenir
compte dans des études ultérieures, les expositions
auxquelles sont soumis les personnes de chaque
"type" étant probablement différentes.
Les porchers sont majoritairement des hommes,
salariés, fortement exposés aux poussières et aux
désinfectants (à base d'ammonium et/ou autre).
L'alimentation des animaux est soit en humide, soit en
sec + humide, la ventilation est mécanique. Notons
que comparativement aux aviculteurs, les porchers ont
tendance à porter beaucoup plus rarement le masque.
Légende : EXPO : 1 aviculteurs, 2 porchers
MASQUE (port du masque) : 1 jamais, 2 parfois, 3 toujours
ALIM (alimentation) : 1 humide, 2 sec, 3 les deux
VENTIL (ventilation) : 1 naturelle, 2 mécanique, 3 les deux
EXP3H (+3 h expo aux poussières/semaine ?): 1 non, 2 oui
TPSBAT (temps passé/jour dans les bâtiments) : 1 <1h, 2 de 1 à 3h, 3 >3h
APPDESIN (application personnelle de désinfectants ?) : 1 non, 2 oui
CONTDESINF (contact avec des désinfectants ?) : 1 non, 2 oui
NATDESINF (nature des désinfectants) : 1 nsp, 2 formol, 3 ammonium,
4 autres, 5 formol+ammonium, 6 formol+autres, 7 ammonium+autres,
8 formol+ammonium+autres
TYPESOL (type de sol) : 1 caillebotis, 2 litière, 3 les deux,
4 batterie (volailles), 5 plein air (volailles)
FIGURE 3 : CAH (individus exposés), Axes 1 et 2
Aviculteurs (type 1)
Porchers
Aviculteurs (type 2)
Ces analyses nous ont permis de mettre en valeur que
les pratiques professionnelles et par conséquent les
expositions des porchers et des aviculteurs sont
sensiblement différentes. Ces éléments sont à discuter
en parallèle avec les symptômes respiratoires et les
résultats EFR présentés précédemment.
2.4. Synthèse des résultats
Les personnes "non exposées" étudiées ne présentent
pas de symptômes respiratoires significatifs et ont
logiquement les valeurs associées aux Explorations
Fonctionnelles Respiratoires les plus élevées. Ces
résultats apportent une validation au questionnaire
général établi (symptômes) et attestent de la qualité
des EFR réalisées.
Aux deux catégories dites "exposées" sont associées
des conclusions différentes.
Les aviculteurs présentent des valeurs de DEM75 et
DEM50 faibles et des irritations des yeux et du nez.
Ces aviculteurs passent moins de 3 heures par jour
dans les bâtiments d'élevage, dans lesquels la
ventilation est naturelle, la distribution d'alimentation
est en sec. Il sont exposés à des désinfectants
essentiellement à base de formol.
Les porchers présentent des valeurs de CVF et VEMS
faibles, des irritations respiratoires et expectorations
(crachats). Ces porchers passent plus de 3 heures par
jour dans les bâtiments d'élevage dans lesquels la
ventilation
est
mécanique,
la
distribution
d'alimentation est plutôt en humide. Ils sont exposés à
des poussières et à des désinfectants essentiellement à
base d'ammonium.
à longue échéance de l'altération de la fonction
respiratoire (Cormier et al, 1998). L'effet des
poussières et principalement des endotoxines sur les
atteintes broncho-pulmonaires est d'ailleurs mis en
évidence dans de nombreuses études (Nowak, 1998).
Cette étude a permis à des éleveurs de prendre
conscience des problèmes respiratoires pouvant
survenir suite aux expositions diverses auxquelles ils
sont confrontées. Ces professionnels doivent être
régulièrement informés sur les risques à long terme
auxquels ils sont exposés et sur les moyens de
prévention adaptés.
Conclusion / discussion
Références bibliographiques
Cette étude a mis en évidence l'excès de symptômes
chez les aviculteurs et porchers, ainsi qu'une altération
de leur fonction respiratoire. L'atteinte des voies
aériennes périphériques est prédominante chez les
aviculteurs, tandis que l'on retrouve une fréquence
significativement
accrue
des
symptômes
"expectorations" et "irritations respiratoires" chez les
éleveurs de porcs.
Pour ces derniers, le nombre d'heures passées dans les
bâtiments (plus de 3 heures par jour), le contact avec
des désinfectants à base d'ammonium sont des
facteurs pouvant expliquer une partie de cette
altération.
L'atteinte des petites bronches périphériques chez les
aviculteurs ainsi que l'irritation des yeux et du nez
sont dues entre autres aux désinfectants utilisés (à
base de formol), aux plumes des animaux, aux
poussières (alimentation en sec…).
De plus, la majoration de la symptomatologie chez les
sujets fumeurs témoigne d'un renforcement positif de
l'exposition aux irritants professionnels par le tabac.
Cette étude avait une optique descriptive. Les pistes
de réflexion proposées ci-dessus sont loin d'être
exhaustives. Des études prospectives sur des
catégories exposées / non exposées d'aviculteurs et de
porchers permettraient de donner des pistes d'action
précises et de déterminer l'ordre de priorité des
mesures de prévention à mettre en œuvre.
Il ressort néanmoins de cette état des lieux que les
expositions diverses auxquelles sont confrontés les
travailleurs en élevage intensif ne sont probablement
pas neutres en terme de santé publique. Des
précautions sont à prendre pour limiter l'altération de
la fonction respiratoire, la première étant d'inviter les
aviculteurs et porchers à porter le plus souvent
possible le masque lors de leur présence dans les
bâtiments, afin de limiter l'inhalation de particules
respirables ou de certains gaz toxiques, responsables
de l'inflammation des voies respiratoires aériennes et
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EFFET DE LA DENSITE EN ELEVAGE SUR LE BIEN-ETRE, LES PERFORMANCES DE
CROISSANCE ET LA QUALITE DES CARCASSES DU CANARD DE BARBARIE
Baéza Elisabeth, Chartrin Pascal, Arnould Cécile
Station de Recherches Avicoles, INRA de Tours, 37380 Nouzilly
Résumé
Cette étude avait pour objectif d’évaluer l’incidence de l’augmentation de la densité en élevage du canard de
Barbarie sur le comportement (activité, interactions sociales), le bien-être (picage, problèmes locomoteurs,
mortalité), les performances de croissance (IC, GMQ) et la qualité des carcasses (présentation, composition).
Nous avons donc élevé sur caillebotis intégral et en claustration, 435 canards mâles de type lourd, répartis en 3
lots différents par la densité d’élevage : 7, 9 et 11 animaux/ m2. La densité de 9 canards/m2 a permis d’optimiser
l’ensemble des paramètres mesurés dans cette étude. Toutefois, ce résultat mériterait d’être validé en conditions
de terrain avec des effectifs plus importants.
Introduction
Les éleveurs augmentent sensiblement les densités en
élevage depuis quelques années afin d’améliorer la
rentabilité de leurs élevages. Ceci peut avoir des
conséquences sur le comportement, les performances
et la santé des animaux. Chez le poulet,
l’augmentation de la densité de 10,8 à 27,7
animaux/m2 (Proudfoot et al., 1979) ou de 25 à 30
kg/m2 (Elwinger, 1995) se traduit par une diminution
du poids vif. Martrenchar et al. (1997) ont confirmé
ce résultat en testant des densités de 12, 16 et 20
poulets/m2. De plus, ils ont observé une augmentation
de la fréquence des dermites, du nombre de poulets
dérangés par leurs congénères et du temps passé
couchés. Par contre, Berthelot et al. (2001) ont montré
que la réduction de la densité de 8,5 à 7 dindes/m2
était pénalisante sur le plan économique et
n’améliorait pas les critères de bien-être mesurés :
budget temps des animaux en élevage, fréquence des
ampoules, griffures, pododermatites et plaies
mesurées sur les carcasses à l’abattoir. Dans l’étude
de Martrenchar et al. (1999) des dindons placés à des
densités de 5,4 ou 6,7 animaux/m2 présentaient plus
de problèmes locomoteurs et plus de lésions aux
pattes que ceux soumis à la densité de 4,2
Cependant, la densité avait peu
animaux/m2.
d’influence sur le comportement des animaux. En
pintade, lorsque la densité est accrue de 13 à 19
animaux/m2, le poids vif à 56 et 69 jours est diminué
de 5,6 et 5,4 % respectivement, l’indice de
consommation augmente de 4,0 et 5,3 % aux mêmes
âges et la mortalité de 1 à 69 jours passe de 1,82 à
4,29 % (Garet et Thoby, 1998). Pour le canard de
Barbarie, la densité est passée de 10 animaux/m2 sur
la période 1991-1993 à 12-13 animaux/m2 depuis
1997 avec 30 % de femelles et 70 % de mâles et un
départ des femelles à l’âge de 10 semaines et des
mâles à l’âge de 12 semaines. Le kilotage (densité X
poids individuel en kg/m2) s’est accru (49
kg/m2/bande en 2001) mais les répercussions sur le
bien-être animal (picage, problèmes locomoteurs,
mortalité), les performances de croissance (IC, GMQ)
et la qualité des carcasses n’ont pas encore été
analysées. Cet essai devait permettre de répondre à
ces questions.
1.
Matériels et méthodes
Nous avons élevé, en claustration totale, sur
caillebotis intégral, 435 canards mâles R71 (S.A.
Grimaud, Roussay, France), répartis en 3 lots
différents par la densité d’élevage : 7, 9 et 11
animaux/m2. Chaque lot faisait l’objet de 5
répétitions. Le nombre de canards par parquet était
identique pour tous les lots (n = 29) afin de
s’affranchir de la taille du groupe et la densité était
fixée par réduction de l’espace disponible. Les
programmes
de
lumière,
de
température,
d’alimentation et de prophylaxie étaient ceux utilisés
en conditions de terrain. A la fin de la première
semaine d’élevage, l’intensité lumineuse a été réduite
de 50 à 3 lux afin de limiter les problèmes de picage
puis à 1 lux à partir de la 3ème semaine. Les canards
ont été débecqués à l’âge de 3 semaines mais pas
dégriffés. A 10 semaines, afin de mimer l’enlèvement
des femelles, le nombre de canards par parquet a été
réduit à 24 en tenant compte de la mortalité préalable.
La vitesse de croissance et l’indice de consommation
ont été mesurés par la pesée individuelle des animaux
et de l’aliment consommé par parquet aux âges de 4,
Cinquièmes Journées de la Recherche Avicole, Tours, 26 et 27 mars 2003
8 et 12 semaines. La fréquence du picage et des
problèmes locomoteurs par parquet a fait l’objet
d’une observation hebdomadaire. A 4, 8 et 12
semaines nous avons noté de façon précise
l’emplacement des marques de picage et leur gravité
évaluée par la surface piquée (0 à 5 cm2 noté 1, 5 à 10
cm2 noté 2 et > 10 cm2 noté 3). Nous avons multiplié
pour chaque parquet le nombre d’individus piqués par
la note de gravité de leur picage. La mortalité a été
enregistrée. Aux âges de 37, 58, et 79 jours nous
avons analysé le budget temps des animaux (5
comportements exclusifs : couché, debout, assis,
mange, boit) lors de 3 séries (espacées de 1 h) de 3
scans (faits à 1 min d’intervalle) le matin et l’aprèsmidi, soit 6 X 3 scans par jour pour chaque parquet.
Nous avons observé également les interactions
sociales (coup de bec court, coup de bec long, tire une
plume)
et
la
présence/absence
des
comportements suivant : boit, combat, se toilette,
mange, pique l’environnement, marche, dérange un
congénère sur 2 X 5 min par jour et par parquet.
Après abattage de 45 canards par lot représentatifs de
la moyenne et de l’écart-type du lot et un ressuage de
24 h à +4°C, nous avons noté l’importance des
griffures, sicots et blessures sur les carcasses ainsi que
l’état des coussinets plantaires et des coudes. Pour les
sicots, les griffures et les blessures, la notation était
codée comme suit : 0 = absence puis 1, 2, ou 3 en
gravité croissante. Pour l’état des coussinets
plantaires et de l’articulation tarsienne, la notation
était : 0 = aspect normal puis 1 ou 2 en gravité
croissante. Les rendements en découpe (ailes, filets
avec peau, gras abdominal et cuisses-pilons) ont été
mesurés sur 40 canards par lot (Marché, 1995). Les
variables continues et présentant une distribution
normale ont été comparées par analyse de variance en
étudiant l’effet du facteur « densité ». Les résultats
des notations et des observations comportementales
ont été analysés avec les tests non paramétriques de
Kruskall-Wallis et Mann-Whitney.
2. Résultats
2.1. Performances de croissance
La densité a peu d’effet sur la consommation
journalière d’aliment, le GMQ et l’IC (Tableau 1).
Nous notons uniquement une diminution croissante
significative de la consommation alimentaire sur la
période de finition avec l’augmentation de la densité
et pour la période globale d’élevage, un GMQ
significativement inférieur pour les canards du lot
D11 par comparaison avec les autres lots. A 8 et 12
semaines, les canards du lot D11 présentent un poids
vif significativement inférieur à ceux des autres lots
(Tableau 2). Chez le poulet et la pintade,
l’augmentation de la densité se traduisait également
par une diminution de la consommation et une baisse
du poids vif que Garet et Thoby (1998) expliquaient
par des difficultés accrues de déplacement et un accès
réduit aux mangeoires.
2.2. Notation du picage et des problèmes
locomoteurs
Le picage a débuté à l’âge de 3 semaines au niveau
des plumes de la queue. Le picage est très important
entre 4 et 8 semaines puis sa fréquence diminue. A 4
semaines, seules les plumes de la queue sont
concernées (Q), à 8 et 12 semaines, l’ensemble du dos
et de la queue (D et Q) est piqué ainsi que le bout et le
dessous des ailes (A) avec un arrachage des plumes
(Tableau 3). A 4 semaines, nous avons dénombré 43
animaux présentant des marques de picage. A 8
semaines, ce nombre s’est élevé à 198 dont 168
nouveaux cas. A 12 semaines, ce nombre a été
considérablement réduit à 28 dont 2 nouveaux cas, 6
et 20 animaux piqués depuis l’âge de 4 et 8 semaines
respectivement. A 4 semaines, c’est le lot D7 qui
présente significativement le plus de picage, à 8 et 12
semaines, c’est le lot D11.
La fréquence des problèmes locomoteurs s’accroît dès
l’âge de 8 semaines, en particulier pour le lot D7
(Tableau 4). A 12 semaines c’est le lot D11 qui
présente significativement plus de canards atteints.
La mortalité sur la période globale d’élevage est de
4.1, 2.1 et 3.4 % respectivement pour les lots D7, D9
et D11 et elle est essentiellement due à des problèmes
locomoteurs. La densité n’a pas d’effet significatif sur
ce paramètre.
2.3. Observations comportementales
Pendant les observations, les canards passent environ
75 % de leur temps, couchés. La densité n’a pas
d’effet sur ce pourcentage ni sur la fréquence des
comportements « coup de bec court », « coup de bec
long » et « tire une plume ». Par contre, plus la
densité est faible et plus la fréquence de l’ensemble
de ces comportements uniquement sur le corps (à
l’exception de la tête et du cou, zones cibles lors des
comportements agressifs mais pas lors du picage) est
élevée. Enfin, les canards soumis à la densité
moyenne se déplacent significativement plus et ont
tendance à marcher plus souvent sur leurs congénères
(dérangements) que ceux des autres lots. Martrenchar
et al. (1999) avaient montré que la densité avait peu
d’influence sur le comportement des dindes à
l’exception de la fréquence des dérangements des
animaux au repos qui était plus importante lorsque la
densité était élevée. Chez le poulet, la fréquence des
dérangements s’accroît aussi avec la densité des
animaux en élevage (Martrenchar et al. 1997).
2.4. Présentation des carcasses et rendements en
découpe
Les griffures ont surtout été occasionnées lors de la
dernière pesée, suivie du tri des animaux puis de la
mise en caisse pour l’abattage. Globalement les
coussinets plantaires sont en mauvais état pour tous
les lots (note 2 largement majoritaire). L’état de
l’articulation tarsienne est noté de façon
intermédiaire. Les blessures sont peu fréquentes. Ce
sont les canards du lot D7 qui présentent
significativement le plus de sicots, lié à la repousse
des plumes ayant été arrachées lors du picage
(Tableau 5). La densité n’a pas d’effet sur
l’importance des griffures et des blessures, ni sur
l’état des coussinets plantaires et des coudes. Les
animaux du lot D11 sont significativement moins
lourds et moins gras que ceux des autres lots. Par
contre la densité n’a pas d’effet significatif sur le
poids des morceaux découpés et sur le rendement en
viande (Tableau 6).
un produit répulsif (PBH spray, intervet, Angers,
France) et un produit cicatrisant (Oxytétrin spray, à
base
d’oxytétracycline,
Hoechst
Roussel,
Romainville, France). Par ailleurs, les parquets étaient
de petite taille. Tous ces éléments ont pu avoir une
incidence sur le comportement des animaux. Avant de
transposer ces résultats aux conditions de terrain il
serait souhaitable de reproduire cette expérimentation
avec des groupes plus importants. Enfin, les canards
ont fait l’objet de nombreuses manipulations au cours
de l’expérimentation. Il serait intéressant de confirmer
ces résultats en effectuant des observations
uniquement à l’âge d’abattage afin de limiter au
maximum la perturbation des animaux.
Conclusion
Références bibliographiques
L’augmentation de la densité à 11 animaux/m2 se
traduit par une diminution du poids vif significatif dès
l’âge de 8 semaines et de l’engraissement des
carcasses à l’abattage. Par contre, les carcasses
présentent moins de sicots. En cours d’élevage, la
fréquence d’animaux présentant des problèmes
locomoteurs et des marques de picage est accrue. A 4
et 8 semaines, le picage est plus important lorsque la
densité est réduite à 7 animaux/ m2 par comparaison
avec la densité moyenne. Ceci se traduit par une forte
augmentation de la fréquence des sicots sur les
carcasses.
Il faut noter que les animaux dès l’âge de 1 semaine
ont été soumis à une intensité lumineuse de 3 lux puis
de 1 lux à partir de 3 semaines. Cette intensité était
soudainement accrue à 90-100 lux lors des soins, des
pesées et des observations. De plus, afin de limiter le
picage, nous avons vaporisé les zones atteintes avec
Berthelot A., Baron F., Bouvarel I., Mirabito L.,
Aubert C., Dalibard F., Bocquier C., Loizeau J.M.,
Santé V., Le Pottier G., 2001. Sci. Tech. Avicoles, 37,
19-28.
Elwinger K., 1995. Arch. Geflügelk., 59 (4), 209-215.
Garet J., Thoby J.M., 1998. Journée Nationale du
Canard de Barbarie, ITAVI, 18/6/98, Angers
(France), 11 pp.
Marché G., 1995. La découpe anatomique et la
dissection des volailles, INRA-SYSAAF Eds, pp.71.
Martrenchar A., Morisse J.P., Huonnic D., Cotte J.P.,
1997. Vet. Res., 28, 473-480.
Martrenchar A., Huonnic D., Cotte J.P., Boilletot E.,
Morisse J.P., 1999. Brit. Poult. Sci., 40, 323-331.
Proudfoot F.G., Hulan H.W., Ramey D.R., 1979.
Poult. Sci., 58, 791-793.
TABLEAU 1 : Effet de la densité (7, 9 ou 11 animaux/m2 = D7, D9 ou D11) sur les performances de
croissance du canard de Barbarie (consommation journalière moyenne = cons. moy., gain moyen quotidien
= GMQ, indice de consommation = IC) à différentes périodes
Lots (n = 5)
Démarrage (S0-S4)
Cons. moy. (g/j/canard)
GMQ (g/j/canard)
IC
Croissance (S4-S8)
Cons. moy. (g/j/canard)
GMQ (g/j/canard)
IC
Finition (S8-S12)
Cons. moy. (g/j/canard)
GMQ (g/j/canard)
IC
Elevage (S0-S12)
Cons. moy. (g/j/canard)
GMQ (g/j/canard)
IC
D7
D9
D11
76.1 + 2.4
46.6 + 2.0
1.64 + 0.03
75.6 + 2.4
46.4 + 1.5
1.63 + 0.01
75.6 + 1.2
45.8 + 0.7
1.65 + 0.01
222.4 + 6.4
86.3 + 2.3
2.58 + 0.09
224.2 + 2.7
88.4 + 3.4
2.54 + 0.09
215.1 + 6.9
84.5 + 1.7
2.55 + 0.08
224.2 + 6.2 a
43.4 + 2.9
5.18 + 0.33
215.6 + 7.7 ab
40.7 + 2.3
5.31 + 0.20
210.8 + 8.7 b
38.5 + 3.8
5.51 + 0.46
172.0 + 4.0
60.3 + 1.3 a
2.85 + 0.06
170.0 + 3.9
59.4 + 1.3 a
2.86 + 0.03
165.2 + 4.3
57.23 + 1.4 b
2.89 + 0.06
a, b : effet significatif de la densité pour un paramètre donné à p < 0.05
TABLEAU 2 : Effet de la densité (7, 9 ou 11 animaux/m2 = D7, D9 ou D11) sur l’évolution du poids vif
(PV) du canard de Barbarie
Lots
PV à J1 (n = 145)
PV à S4 (n = 145)
PV à S8 (n = 145)
D7
56 + 4 a
1361 + 128 a
3800 + 340 a
D9
56 + 4 a
1356 + 121 a
3850 + 300 a
D11
56 + 4 a
1339 + 118 a
3730 + 280 b
a, b : effet significatif de la densité pour un paramètre donné à p < 0.05
PV à S12 (n = 120)
5060 + 360 a
4980 + 360 a
4800 + 350 b
TABLEAU 3 : Effet de la densité (7, 9 ou 11 animaux/m2 = D7, D9 ou D11) sur la note de picage (nombre
de canards piqués X note de gravité) des canards de Barbarie au niveau de la queue (Q), du dos (D) et des
ailes (A) à différents âges
Lots (n = 5)
Note de picage en S4
Note de picage en S8
(Q)
(D, Q, A)
D7
27 a
125 b
D9
19 b
84 c
D11
1c
181 a
a, b, c : effet significatif de la densité pour un paramètre donné à p < 0.05
Note de picage en S12
(D, Q, A)
5b
10 c
24 a
TABLEAU 4 : Effet de la densité (7, 9 ou 11 animaux/m2 = D7, D9 ou D11) sur le nombre de canards de
Barbarie présentant des problèmes locomoteurs (PL) à différents âges. Le chiffre indiqué entre parenthèses
correspond au pourcentage de canards atteints
Lots (n = 5)
PL en S4
PL en S8
PL en S10
D7
2 (1.4) a
10 (6.9) a
15 (10.8) a
D9
0 (0.0) b
7 (4.9) b
15 (10.6) a
D11
0 (0.0) b
6 (4.2) b
14 (9.9) a
a, b : effet significatif de la densité pour un paramètre donné à p < 0.05
PL en S12
15 (12.5) b
16 (13.3) b
24 (20.2) a
TABLEAU 5 : Effet de la densité (7, 9 ou 11 animaux/m2 = D7, D9 ou D11) sur la présence de sicots sur les
carcasses de canard de Barbarie
Lots (n = 45)
D7
D9
Note 0
2
2
1
12
23
2
10
14
3
21
6
Note moyenne
2.11 a
1.53 b
a, b, c : effet significatif de la densité pour un paramètre donné à p < 0.05
D11
7
19
14
5
1.38 c
TABLEAU 6 : Effet de la densité (7, 9 ou 11 animaux/m2 = D7, D9 ou D11) sur les rendements en découpe
du canard de Barbarie
Lots (n = 40)
D7
D9
Poids vif (g)
5101 + 315 a
5064 + 374 a
128 + 40 a
Gras abdominal (g)
141 + 29 a
(%)
2.75 + 0.52 a
2.50 + 0.69 ab
946 + 83
Filets (g)
941 + 76
(%)
18.46 + 0.97
18.68 + 0.76
872 + 84
Cuisses-pilons (g)
874 + 80
(%)
17.07 + 0.83
17.21 + 0.93
539 + 41
Ailes (g)
544 + 32
(%)
10.67 + 0.51
10.65 + 0.55
a, b : effet significatif de la densité pour un paramètre donné à p < 0.05
D11
4881 + 320 b
111 + 38 b
2.25 + 0.64 b
908 + 76
18.60 + 0.95
843 + 68
17.28 + 0.88
529 + 34
10.85 + 0.53
LES CRITERES PRIS EN COMPTE DANS LES ETUDES SUR LE BIEN-ETRE
CHEZ LES VOLAILLES
Leterrier Christine*, Constantin Paul, Richard Sabine, Guesdon Vanessa
I.N.R.A. Station de Recherches Avicoles. Centre de Tours. 37380 Nouzilly, France
Résumé
L'objectif de la présentation est d'éclairer les professionnels sur les critères actuellement utilisés dans les études
sur le bien-être et d'en montrer l'intérêt et les limites. Les mesures de mortalité, de morbidité et de croissance
sont complétées par la mesure des comportements extrêmes (cannibalisme, picage) et de comportements dits
"naturels". Plusieurs mesures physiologiques ont été également mises au point : utilisation de paramètres
endocriniens, analyse de la fréquence cardiaque qui sont utilisées pour étudier des situations d'élevage
contraignantes pour l'animal. L'étude de la douleur a reçu un intérêt particulier, spécialement dans le cas du
débecquage et des douleurs articulaires, mais l'évaluation de la douleur chez l'oiseau pose encore de nombreuses
questions. Néanmoins, le développement de nouveaux critères ne permet pas de classer les systèmes d'élevages
vis à vis du bien-être de manière univoque. Il faut pour cela établir une pondération des différents paramètres
qui, elle, relève en partie du domaine éthique.
Criteria assessing welfare in domestic fowl
The aim of the talk is to present the criteria that are used in research to assess welfare in poultry and to show
their usefulness and limits. For a long time animal welfare has been assessed through pathological indexes and
growth performances. In the past decades, behavioural measurements have been largely developed, taking
especially into account extreme behaviours such as cannibalism and feather pecking and "natural" behaviours.
Physiological parameters (e.g. plasma corticosterone level, heart rate) are now widely used. Significant variation
un these parameters occurs in breeding situations where welfare appears to be impaired. The study of pain
perception has been developed in birds, especially in the case of beak trimming and joint pain, but further
investigation is needed to understand pain mechanisms in those species. As a conclusion, numerous new
parameters have been developed to get a better analysis of birds' quality of life. However this multi-criteria
analysis does not allow us to classify the various breeding systems in an univoque way. This requires to weigh
the criteria, which depends on ethical components.
Introduction
Pendant de nombreuses années, la prise en compte du
bien-être animal s'est résumée à des mesures de
mortalité, de morbidité et de croissance, ainsi qu'aux
conséquences
prophylactiques
qui
les
accompagnaient. L'introduction de nouveaux critères
a longtemps été suggérée par certains scientifiques
sans avoir d'écho, jusqu'à ce que la pression croissante
des consommateurs et des sociétés de protection
animale favorise le développement de ces études.
Dans cet exposé seront développés essentiellement les
critères nouvellement introduits dans l'évaluation du
bien-être des volailles.
1. Pathologie et indicateurs lésionnels
La mortalité au sein du groupe reste un critère
objectif d'évaluation du mode d'élevage. Cependant,
dans les conditions d'élevage actuelles celle-ci a été
réduite à des taux très faibles qui font parfois oublier
que la question de la survie est un préalable à toute
considération sur le bien-être animal. Dans de
nombreuses études sur l'effet du rationnement (par
exemple chez les reproducteurs), les animaux
restreints sont comparés à des animaux nourris ad
libitum, c'est-à-dire dans des conditions suggérées
comme plus "naturelles", qui cependant entraînent
une mortalité accrue, assez rarement évoquée.
L'incidence de la maladie a en général disparu dans
le discours sur le bien-être animal car on considère
que la résolution des problèmes sanitaires est un
préalable indispensable. Cependant les maladies
susceptibles d'entraîner de la douleur sont prises en
compte : c'est le cas des troubles locomoteurs des
volailles de chair et des reproducteurs qui ont servi
d'indice de bien-être dans de nombreuses études et qui
font partie des priorités du Farm Animal Welfare
Council.
D'autres lésions sont également régulièrement prises
en compte comme les blessures et les anomalies
d'emplumement dues au picage ou encore d'autres
Cinquièmes Journées de la Recherche Avicole, Tours, 26 et 27 mars 2001
déformations ou fractures osseuses comme celles du
bréchet chez les pondeuses.
L'incidence des maladies infectieuses est rarement
évoquée. Ainsi, dans les études sur l'enrichissement
du milieu, on introduit du mobilier ou des objets dans
le local d'élevage afin de permettre l'expression de
divers comportements (perchage, bains de poussière,
exploration). Les conséquences de l'élevage au sol ou
de l'introduction d'objets nouveaux tels que des bottes
de paille (Kells et al, 2001) sur l'apparition de germes
pathogènes ont rarement été étudiées jusqu'ici.
2. Modifications anatomiques
Des stress répétés peuvent avoir des conséquences sur
la croissance. Reprenant une théorie d'écologie
comportementale appelée théorie de l'asymétrie
fluctuante, Møller et al (1995) ont ainsi évalué l'effet
d'un stress chronique sur la croissance de poulets de
chair. Dans l'hypothèse de l'asymétrie fluctuante,
l'animal soumis à des pressions venant de son
environnement, va réagir en se développant de
manière asymétrique (Møller, 1997). Ces pressions
peuvent consister en une confrontation à un agent
infectieux ou à un mode d'élevage contraignant. La
mesure d'asymétrie est obtenue en comparant les
dimensions anatomiques droites et gauches d'un
caractère bilatéral (longueur des plumes, des os, etc).
Ainsi, des poulets de chair élevés avec une densité
élevée (28/m2) sont plus asymétriques (plumes, os des
pattes) que les animaux élevés avec une densité plus
faible (20/m2) (Møller et al, 1995). Des modifications
temporaires du mode d'élevage peuvent avoir des
conséquences à long terme sur le développement.
Ainsi, une réduction des apports en lysine entre 3 et
12 jours augmente l'asymétrie des rayons osseux à
l'âge d'abattage chez le poulet de chair (Bizeray et al,
2002). Cependant chez les poules pondeuses, il
n'existe pas de différence dans l'asymétrie des
humérus en fonction du type de cages (0,025 ± 0,003
chez les poules en cages équipées de perchoirs et de
bains de poussière versus 0,028 ± 0,004 chez les
poules en cages standards). Il est possible que
l'utilisation de l'asymétrie comme paramètre soit plus
délicat chez l'animal adulte puisque les possibilités de
déviations de la morphogénèse, en particulier osseuse,
sont réduites. Il est également possible que
l'enrichissement des cages ne permette pas de lever la
pression exercée sur l'animal par son environnement
car on observe que dans tous les types de cages le
développement osseux est asymétrique. Néanmoins,
chez la poule adulte, Yngvesson et Keeling (2001) ont
noté que dans le cas de cannibalisme, les individus
agresseurs et victimes étaient plus asymétriques que
les témoins.
3. Critères comportementaux
De longue date, les mesures comportementales ont été
une base importante pour essayer d'estimer l'état de
bien-être des oiseaux domestiques (Faure et Mills,
1995). Outre les comportements extrêmes
(cannibalisme, picage), l'étude a été élargie à d'autres
comportements puisque la règle des 5 libertés
fréquemment utilisée pour définir le bien-être postule
la liberté d'exprimer des comportements dits
"naturels" : perchage, toilettage, exploration, etc…..
Chez les volailles de chair, les comportements
entraînant une activité physique ont été introduits car
ceux-ci sont susceptibles d'améliorer la qualité du
tissu osseux.. Cependant plusieurs études montrent
que l'activité générale des animaux ne doit pas être
trop élevée car elle est signe de nombreux
dérangements et peut donner lieu à de nombreuses
griffures (Mirabito et Zancan, 1999). L'observation
des animaux dans leur milieu de vie et le calcul du
temps passé dans différentes activités (Figure 1) ou de
l'espace occupé pour ces activités (Arnould et Faure,
2001) permet de comparer différents systèmes et
d'évaluer l'utilisation de différents mobiliers ou
parcours.
Les animaux sont également observés en situation de
test (Faure et Mills 1995) de manière à évaluer par
exemple leur réponse de peur selon le mode d'élevage
ou leur motivation alimentaire selon le mode de
rationnement par exemple.
4. Mesures physiologiques
L'évaluation du bien-être prend aussi en compte la
réponse générale d'adaptation de l'animal aux
contraintes de son environnement, ou syndrome
biologique de stress, qui résulte de la mise en jeu du
système nerveux autonome et de l'axe produisant les
hormones corticoïdes (corticostérone par exemple
chez l'oiseau). Le stress est ainsi signé par une
élévation du taux de corticostérone plasmatique et de
l'hormone favorisant la libération de corticostérone,
l'ACTH (chez l'oiseau, revue de Harvey et Hall 1990).
Si le stresseur est modéré, les variations d'ACTH sont
faibles et les hormones corticoïdes sont alors l'indice
le plus sensible de l'activation de l'axe. Par contre, si
la puissance du stresseur augmente, le niveau d'ACTH
continue d'augmenter alors que les hormones
corticoïdes atteignent un plafond (Mormède, 1995).
En essayant de freiner pharmacologiquement l'activité
de l'axe corticotrope, on peut mettre en évidence un
état de stress chronique car l'axe reste hyperactif et les
taux de corticoïdes et d'ACTH ne peuvent être
abaissés.
L'examen de l'axe corticotrope est très utilisé dans les
espèces aviaires pour évaluer l'état des animaux vis à
vis des contraintes d'élevage (Servière et al, 2002).
Son utilisation est cependant limitée car il faut faire
un prélèvement sanguin qui impose la contention (et
donc un stress) à l'animal, contrairement à ce qui se
passe chez le porc où cette mesure peut être effectuée
sur la salive. De plus, le taux de corticostérone est
augmenté dans plusieurs situations physiologique
(exercice, etc) sans que le bien-être de l'animal soit
affecté.
La fréquence cardiaque a souvent été utilisée pour
évaluer
la
peur
de
l'animal.
Elle
est
physiologiquement diminuée par le repas, ce qui rend
son interprétation parfois délicate dans le cas de
rationnements alimentaires. Elle permet cependant de
mettre en évidence des modifications considérables
chez les futurs reproducteurs rationnés (De Jong et al,
2002, Figure 2). Certains auteurs ont mené une étude
plus fine de la fréquence cardiaque en analysant sa
variabilité ce qui permet d'en savoir plus sur
l'équilibre contrôlant le rythme cardiaque. En effet,
celui-ci est accéléré par le système orthosympathique
et ralenti par le système parasympathique. L'analyse
de la variabilité des intervalles entre deux battements
cardiaques permet de déterminer si le contrôle est
sous prédominance ortho- ou parasympathique et d'en
inférer certaines conclusions sur l'état de l'animal. Les
états de stress sont en effet accompagnés d'une
augmentation du tonus orthosympathique alors que
des activités alimentaires ou de repos s'accompagnent
d'une prépondérance parasympathique. Selon Korte et
al (1999), le tonus parasympathique serait associé à
un mode d'adaptation où l'animal réagit passivement
vis à vis de son environnement. Ainsi, chez des poules
issues d'une lignée présentant peu de picage, la
fréquence cardiaque est faible lors d'un test de
contention et l'activité parasympathique est élevée
comparée à une lignée présentant beaucoup de picage.
Des travaux sont en cours pour essayer de mettre au
point des marqueurs neurobiologiques de stress chez
les oiseaux. En effet, chez les mammifères, il a été
mis
en
évidence
que
des
contraintes
environnementales pouvaient influencer l'activité de
certaines régions cérébrales, notamment des régions
contrôlant les réactions émotionnelles. Une meilleure
compréhension des mécanismes centraux contrôlant
ce type de réactions chez les oiseaux permettra de
proposer de nouveaux indicateurs de stress.
Cas particulier de la douleur
En aviculture le problème de la douleur se pose
essentiellement lors des mutilations (débecquage,
castration), du picage, du gavage des palmipèdes gras,
des troubles locomoteurs ou encore de l'abattage
(Gentle, 1997 ; Martrenchar et al, 2001 ; Servière et
al, 2002). De façon théorique on distingue la douleur
de la nociception. La nociception correspond au
système qui permet de transmettre l'information
"douloureuse" de l'endroit où elle se produit au
cerveau. Chez les oiseaux, les voies nociceptives sont
étudiées et ne semblent pas différer grandement de
celles des mammifères (Gentle, 1997). La douleur est
définie comme une expérience sensorielle et
émotionnelle désagréable associée à un dommage
tissulaire présent ou potentiel. Cette définition ne
réduit pas la notion de douleur aux causes lésionnelles
et rend donc cette étude très délicate chez l'animal où
la composante émotionnelle est difficile à évaluer. En
pratique, les études sur la "douleur" chez l'animal
concernent souvent la nociception.
Des études neuroanatomiques et comportementales
ont mis en évidence des processus douloureux chez le
poussin lors du débecquage (Gentle, 1997). Chez le
poulet, une douleur a pu être associée aux troubles
locomoteurs car l'emploi d'analgésiques améliore la
marche d'animaux boiteux (Geowin et al, 1999). De
plus, les poulets boiteux mangent 50% de plus d'un
aliment comportant un anti-inflammatoire nonstéroïdien que les animaux sains (Danbury et al,
2000). De nombreuses études montrent qu'il existe
une analgésie endogène, c'est-à-dire que certaines
stimulations peuvent supprimer l'expression des
comportements associés à la douleur. Ainsi, des
animaux ne prennent plus appui sur l'une de leur patte
quand on a induit une arthrite avec des cristaux d'urate
dans l'articulation tarsienne, mais cette suppression
d'appui est abolie lorsqu'on présente aux sujets un
nouveau compagnon ou une nouvelle cage, de
l'aliment (précédé d'un jeune) ou encore lorsque le
comportement de ponte est concomitant. A l'avenir,
des études neuro-anatomiques devraient permettre
d'analyser les relations entre motivation et douleur
chez l'oiseau.
Conclusion
De nouveaux critères ont été développés pour
apprécier la qualité de vie des volailles de manière
plus complète et certains d'entre eux doivent
maintenant être validés. La multiplicité des critères
impose désormais une analyse complexe des
situations d'élevages. Certains travaux s'orientent
donc vers la construction d'index afin de pouvoir
comparer les systèmes de manière précise et
néanmoins synthétique (Scott, 2002). Il faut pour cela
établir une hiérarchie
et une pondération des
différents critères. Mais se pose alors le problème du
choix des pondérations : quels critères privilégier ? le
taux de mortalité ? l'expression de tel ou tel
comportement ? On voit ici qu'un classement
univoque des systèmes d'élevages vis à vis du bienêtre est illusoire car la hiérarchie des critères relève,
elle, au moins partiellement, du domaine de l'éthique.
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FIGURE 1 : Comparaison du temps passé dans différentes activités matinales chez des reproducteurs nourris ad
libitum et chez des reproducteurs sévèrement restreints. D'après Savory 1989
Pourcentage de
temps passé
Ad libitum
Restreints
50
40
30
20
10
0
Manger
Picage
(murs)
Boire
Toilettage
Repos
FIGURE 2 : Modifications de la fréquence cardiaque pendant différentes phases de la journées chez des futurs
reproducteurs nourris ad libitum (tirets) et sévèrement restreints (trait continu). D'après De Jong et al 2002.
(*: p < 0,05)
Fréquence cardiaque
270
260
*
*
*
250
240
230
Période nocturne
220
210
200
0
6
12
18
24
heures
INFLUENCE DE LA FREQUENCE DE DISTRIBUTION DE SCIURE SUR LE COMPORTEMENT DE
BAIN DE POUSSIERE CHEZ LES POULES PONDEUSES
Guesdon Vanessa, Faure Jean Michel
I.N.R.A Centre de Tours, Station de Recherches Avicoles - 37380 Nouzilly, France
Résumé
La directive poule pondeuse adoptée en 1999 impose le remplacement des cages d’élevages standard. Ces cages
font l’objet de vives critiques et sont mises sur la sellette car il semblerait qu’elles altèrent le bien-être des
poules. Ces cages devront disparaître et laisser la place à un système alternatif tel que la cage aménagée dans
laquelle la poule pondeuse a la possibilité d’exprimer des comportements naturels de ponte, de perchage et de
bain de poussière qui devraient contribuer à améliorer le bien-être des animaux. Au cours de notre étude, nous
nous sommes attachés à étudier la motivation pour le comportement de bain de poussière. Nos objectifs étaient
d’étudier d’une part si l’absence de bain de poussière entraîne une frustration pour les poules élevées en cages
standard (S) et d’autre part si une distribution hebdomadaire de sciure en cage aménagée (A) est suffisante pour
satisfaire leur besoin de bain de poussière ou si une distribution quotidienne est nécessaire. Quelles que soient les
conditions d’élevage, les animaux ont été exposés de manière répétée à partir de 33 semaines d’âge à un
environnement propice au bain de poussière (grand espace, épaisse litière de sciure). Dans ces conditions de test,
si les poules de S avaient été frustrées, elles auraient du montrer une latence de bain de poussière plus courte et
un nombre de bain de poussière plus élevé que les poules élevées en A en raison de l’effet rebond. Cependant,
nos résultats sont inverses de ceux attendus : les poules de S se caractérisent par une latence plus longue et un
nombre de bain de poussière moins grand que ceux des poules élevées en A. Il est probable que chez les poules S
la néophobie due à la trop grande nouveauté de l’enceinte de test a inhibé le besoin de bain de poussière. En
outre, les performances des poules élevées en A avec une distribution hebdomadaire de sciure sont similaires à
celles mesurées sur les poules ayant reçu une distribution quotidienne. L’absence de différences entre ces 2
traitements montre que la distribution quotidienne de sciure en cage aménagée n’entraîne pas de diminution de la
motivation et donc d’amélioration du bien-être par rapport à une distribution hebdomadaire.
Introduction
La poule pondeuse en environnement naturel pratique
tout une gamme de comportements comme ceux de
ponte, d’exploration, de bain de poussière. Certains
semblent primordiaux au bien-être de l’animal
puisqu’ils répondraient à des besoins biologiques
et/ou physiologiques. Les poules pondeuses sont pour
90% en France élevées en cages dites standard. Cet
environnement est très différent du milieu naturel,
puisque les poules disposent uniquement d’une
mangeoire, de pipettes de boissons et d’un espace
limité de 450 cm2/poule.
Le manque d’espace couplé à la pauvreté de
l’environnement (Baxter 1994 ; Swanson 1995)
pourrait entraîner une frustration due à l’impossibilité
de réaliser certains comportements (Dawkins 1988)
comme le bain de poussière (Vestergaard 1997). Deux
interprétations sont possibles :
Pour certains auteurs les poules élevées en cages
standard n’ont pas la possibilité de pratiquer
correctement le bain de poussière (espace limité,
absence d’un substrat friable comme la sciure, la
tourbe ..etc) ce qui entraînerait un état de frustration
(Vestergaard 1997).
Pour d’autres auteurs (Petherick 1990) les poules
élevées en cages standard se seraient adaptées à leur
environnement puisque malgré les contraintes elles
pratiquent le comportement de bain de poussière
appelé bain de poussière à vide réalisé dans ce cas en
l’absence d’un substrat friable.
Différents systèmes d’élevage ont été envisagés pour
remplacer les cages standard. La cage dite aménagée
(bac à poussière + substrat friable + autres
aménagements) est l’un de ces systèmes alternatifs
(Appleby 1993 ; Tauson 1999). Ce système d’élevage
doit entre autres permettre aux animaux une pratique
convenable du bain de poussière. Cependant, il est
important de déterminer s’il est nécessaire, pour le
bien-être des poules, de distribuer du substrat friable
et si oui quelle fréquence de distribution permet de
répondre au mieux aux besoins des animaux.
L’objectif de notre étude est d’une part de détecter si
les poules en l’absence de sciure, comme c’est le cas
en cages standard, sont frustrées ou non et d’autre part
de trouver une fréquence de distribution en cages
aménagées répondant aux besoins des animaux.
Pour cela, à l’issue de la période d’élevage, les
animaux ont été placés dans des conditions favorables
à la pratique du bain de poussière : un grand espace et
une litière de substrat friable telle que la sciure. Dans
ces conditions de test, les poules susceptibles d’avoir
été frustrées par l’absence de bain de poussière dans
leur cage d’élevage devraient exprimer plus ce
comportement que des poules non frustrées. On
parlera d’effet rebond ( Nicol 1987).
1. Matériels et méthodes
1.1. Animaux et conditions d’élevage
Des poules pondeuses de souche Isa-Brown®
épointées à l’âge de 10 jours ont été soumises à un
régime lumineux de 15h00 de lumière par jour
(allumage à 2h00 du matin et extinction à 17h00) et
avaient accès ad-libitum à l’eau et à la nourriture.
Elles ont été élevées de 18 semaines à 72 semaines
d’âge dans 4 types de cages. qui correspondent à deux
grandes catégories : 1) des cages dites standard dans
lesquelles les poules disposaient uniquement d’un
accès aux pipettes et à la mangeoire, et 2) des cages
dites aménagées dans lesquelles les poules disposaient
d’un système raccourcisseur de griffes, de perchoirs,
d’un nid et d’un bac à poussière.
Chacune des deux catégories regroupaient deux
modèles de cages. Les deux modèles de cages
standard (normes européennes 2005-directive
1999/74/CE) possédaient une surface par poule de
550 cm2 mais différaient par la taille, l’un permettant
de loger 5 poules (S5) et l’autre 6 (S6). Les deux
modèles de cages aménagées (normes européennes
2012-directive 1999/74/CE) possédaient une surface
par poule d’au moins 750 cm2 mais différent par la
taille, l’un permettant de loger 7 poules (A7) et l’autre
15 (A15). Les deux modèles différaient aussi au
niveau de l’aménagement du bac à poussière. En A15
un tapis Astroturf (Monsanto ®) faisait office de bac à
poussière alors qu’en A7 celui-ci était constitué d’une
boite en fer munie d’une porte. Les poules logées en
A15 avaient un accès ad-libitum au bac à poussière
alors que les poules logées en A7 avaient un accès
limité au bac à poussière puisque la porte de ce bac
était ouverte uniquement de 11h00 à 16h30. La sciure
était distribuée à une fréquence hebdomadaire dans
les bacs à poussière des deux types de cages
aménagées (A15 et A7).
Les cages standard et aménagées étaient installées
dans un même bâtiment mais dans des cellules
différentes en étant toutefois soumises aux mêmes
conditions d’élevage.
Une semaine avant le premier jour de test les
fréquences de distribution de sciure ont été les
suivantes :
• Pour la moitié des cages A7 et A15, la
fréquence de distribution de sciure était
hebdomadaire. Ces deux traitements ont été désignés
comme A7h et A15h.
• Pour l’autre moitié des cages A7 et A15, la
fréquence de distribution de sciure était quotidienne.
Ces deux traitements ont été désignés comme A7q et
A15 q.
1.2. Conditions et procédure du test
Les tests ont débuté lorsque les poules étaient âgées
de 33 semaines.
Les tests se sont étalés sur 6 semaines à raison d’une
cage (choisie de façon aléatoire) testée par semaine
pour chacun des 6 traitements. Au sein de chacune des
cages retenues pour le test, 4 poules ont été choisies
au hasard puis identifiées par des bagues de couleur.
Lors du test, chaque groupe de 4 poules a été placé
dans une cage test. L’enceinte de test (longueur = 1m,
largeur = 1m, hauteur = 0 ,7 m) était constituée de
deux faces latérales pleines. Les faces avant, arrière et
du dessus étaient grillagées. Le sol de la cage était
garni d’une épaisse litière de sciure (environ 10 cm).
Chaque test dure 50 minutes au terme desquelles les
animaux sont replacés dans leur cage d’élevage. Ce
test était répété 5 jours de suite pour chaque groupe
avec comme règle : un passage de test au moins une
fois à chacune des trois plages horaires au cours des 5
jours de test (plage horaire 1 : 13h30-14h30, plage
horaire 2 : 14h30-15h30, plage horaire 3 : 15h3016h30), l’ordre de passage étant aléatoire. Deux
groupes de 4 poules étaient testés simultanément dans
des cages de test voisines. Une caméra située au
dessus des deux cages de test enregistrait le
comportement des poules pendant les 50 minutes de
test.
1.3. Mesures et analyses statistiques
Les enregistrements vidéo ont été analysés par la
méthode du scan-sampling toutes les deux minutes.
Deux paramètres étaient relevés : 1) le bain de
poussière observé pour chacun des scans. La somme
sur les 25 mesures et pour les 4 poules a été appelée
nombre de bains de poussière ; 2) la latence du
premier bain de poussière correspondant au temps
écoulé entre le début du test (le moment auquel la
dernière des 4 poules touche le fond de la cage de
test) et l’instant auquel on observe le début du
premier bain de poussière effectué par l’une des
quatre poules.
Les analyses statistiques ont toutes été réalisées avec
le logiciel statview. Les données concernant chacune
des deux variables ont été transformées par la fonction
logarithmique en base 10. Avant d’être transformées,
les données concernant la variable nombre de bains de
poussière ont été incrémentées de la valeur 1 (le
nombre de valeurs nulles pour certains jours de test
était trop important). Dans un premier temps une
ANOVA pour mesures répétées a été appliquée
(analyse globale) puis dans un second temps
l’ANOVA et le test de Student-Newman-Keuls ont
été utilisés.
2. Résultats
2.1. Latence du bain de poussière
La latence du bain de poussière ne diffère pas
significativement entre les poules élevées en cage
standard S6 et celles en cage standard S5 (ANOVA
pour mesures répétées). C’est pourquoi les données
pour ces deux traitements ont été regroupées en un
seul qu’on nommera S.
Les poules élevées en cages aménagées A7, A15
ayant une distribution de sciure quotidienne (A7q,
A15q) ne présentent pas différences significatives
(ANOVA pour mesures répétées) avec celles ayant
seulement eu une distribution hebdomadaire (A7h,
A15h). On peut donc regrouper les traitements
quotidien et hebdomadaire. De plus si on compare
maintenant les latences des poules élevées en A15 à
celles élevées en A7 après regroupement, on constate
que les résultats ne diffèrent pas. C’est pourquoi les
données concernant les poules élevées en cages
aménagées ont toutes été regroupées en un seul
traitement qu’on nommera A.
Ceci nous permet
de comparer les poules
appartenant au traitement S et les poules appartenant
au traitement A (Figure 1). Les différences entre S et
A sont significatives (p= 0,0004) et il y a également
un effet du temps (p<0,0001) ainsi qu’une interaction
entre ces deux facteurs (P=0,0281). En raison de cette
interaction une ANOVA factorielle pour chaque jour
de test a été effectuée. Les poules appartenant au
traitement S montrent des latences au premier bain de
poussière systématiquement plus élevées que les
poules appartenant au traitement A et cela pour 4 des
5 jours de test. Quel que soit le traitement, les latences
sont de plus en plus courtes au fur et à mesure de la
répétition du test. Pour le traitement S les latences
sont significativement plus longues les deux premiers
jours de test comparées à celles relevées durant les
trois derniers jours. Pour le traitement A la latence à
J1 est significativement plus élevée que celles de J3,
J4, J5 mais la latence de J2 apparaît comme
significativement plus longue que celles de J4 et J5
(test de Student-Newman-Keuls).
2.2. Nombre de bain de poussière
Le nombre de bains de poussière des poules élevées
en cages aménagées ayant une distribution de sciure
quotidienne (A7q, A15q) ne diffère pas (ANOVA
pour mesures répétées) de celui relevé sur celles ayant
eu une distribution hebdomadaire (A7h, A15h). On
peut donc regrouper les traitements quotidien et
hebdomadaire. De plus si on compare maintenant les
latences des poules élevées en A15 à celles élevées en
A7 après regroupement, on constate
que les
différences ne sont pas significativement différentes.
C’est pourquoi les données concernant les poules
élevées en cages aménagées ont toutes été regroupées
en un seul traitement qu’on nommera A.
Les différences sont par contre significatives entre les
poules provenant de S5 et celles provenant de S6. Ce
qui nous conduit finalement à tester les poules de S6,
les poules de S5 et les poules de A (Figure 2).
Les différences entre les traitements sont hautement
significatives (ANOVA en mesures répétées,
p<0.001).Les poules élevées sans sciure en S6 et S5
pratiquent significativement moins de bains de
poussière que les poules élevées avec sciure en A (test
de Student-Newman-Keuls). Les poules élevées en
cage standard S5 réalisent significativement plus de
bains de poussière que les poules élevées en cages
standard S6 (test Student-Newman-Keuls) mais les
décours des deux traitements sont identiques, au fur et
à mesure de la répétition du test le nombre de bain de
poussière augmente. En effet entre le premier et le
dernier jour de test le nombre de bain de poussière a
triplé pour les poules en S5. Par contre, les poules
élevées en S6 qui ne pratiquent pas le bain de
poussière au début du test présentent en fin de test un
nombre de bain de poussière significativement non
différent de celui des poules de S5.
Conclusion
Les poules montrent des résultats très différents selon
le type d’élevage. Au début du test, les poules élevées
en cage standard se caractérisent par de longues
latences et fréquences faibles voire nulle de bains de
poussière alors que les poules élevées en cages
aménagées pratiquent le bain de poussière dès le
début. Les conditions de test semblent avoir constitué
un environnement trop nouveau et très diffèrent de la
cage d’élevage standard pour les poules qui y sont
élevées. Aussi lors des premiers contacts avec
l’enceinte de test ces poules pourraient avoir
développé un comportement de néophobie ou de peur
(Liere 1992). Ce comportement semble si fort qu’il
empêche probablement l’expression de tout autre
comportement, ce qui pourrait expliquer l’absence
d’un effet rebond attendu pour ces animaux.
Cette interprétation est d’autant plus probable que la
sélection de cailles pour une faible fréquence de bains
de poussière entraîne une augmentation des réactions
de peur (Gerken, Petersen, 1987) ce qui montre bien
l’effet inhibiteur de la peur sur le comportement de
bain de poussière.
La seule alternative à cette interprétation serait que la
cage standard satisfait mieux que la cage aménagée la
motivation des poules pour le bain de poussière. Cette
interprétation est bien sur hautement improbable et
n’expliquerait pas la réduction au cours du temps des
différences entre A et S.
Cette réduction est au contraire parfaitement
expliquée par l’hypothèse de la néophobie des
animaux élevés en A. La forte pente d’évolution de la
latence et du nombre de bains de poussière traduit
alors l’habituation de ces animaux et donc la
diminution de la peur chez les A. Ce phénomène peut
aussi bien traduire une habituation partielle (à la
présence de sciure) des animaux des cages S à la
situation de test qu’une réduction générale des
niveaux de peur chez ces animaux élevés dans un
milieu plus riche (Jones, 1992).
L’existence d’une frustration chez les poules élevées
en cages S ne pourra être exclue que si l’effet rebond
est encore absent après que les animaux aient étés
adaptés à la situation de test. L’absence de différences
entre distribution hebdomadaire et quotidienne de
sciure montre que l’augmentation de la fréquence de
distribution ne suffit pas à faire baisser la motivation.
Ceci pourrait montrer que, même avec une
distribution quotidienne, la litière n’est disponible que
pendant un temps insuffisant et/ou en quantité
insuffisante pour satisfaire les besoins en bain de
poussière des poules. Dans ce cas la cage aménagée
n’apporterait aucune amélioration de la situation des
animaux pour cet aspect de leur comportement.
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FIGURE 1- Latences moyennes ( + écart types ) au
premier bain de poussière réalisé pour les poules
élevées en cages standard sans sciure (S) et poules
élevées en cages aménagées avec sciure(A).
FIGURE 2- Nombre moyen de bain de poussière ( +
écart types ) réalisé au cours des 25 scans pour les
poules élevées en cages standard sans sciure (S6 et S5)
et poules élevées en cages aménagées avec sciure(A).
Log temps (s)
3,6
3,4
3,2
3
*
*
2,8
S
2,6
*
2,4
2,2
J1
J2
J3
Jours de test
J4
A
*
J5
Log (x+1)
1,6
1,4
1,2
1
0,8
*
0,6
0,4
0,2
*
0
J1
*
*
A
S5
S6
*
*
J2
J3
Jours de test
J4
J5
ROLE DE L’ODORAT SUR LE GAIN DE POIDS INITIAL CHEZ DES POUSSINS DE DEUX
GENOTYPES
Tallet Céline1, Arnould Cécile2, Picard Michel2, Porter Richard H.1
1
2
UMR 6073 INRA-CNRS-Université de Tours, PRC, 37380 Nouzilly, France
Station de Recherches Avicoles, INRA-Centre de Tours, 37380 Nouzilly, France
Résumé
La qualité de l’aliment est importante pour la croissance des poulets de chair. Très peu d’études portant sur les
propriétés olfactives des aliments, nous avons cherché à déterminer le rôle de l’odorat dans la croissance initiale
des poulets domestiques. Les deux narines de poussins de types standard (croissance rapide) et label (croissance
plus lente) ont été obturées après l’éclosion par de la résine acrylique dans le but de les rendre anosmiques
(privés d’odorat). Le poids des poussins a été mesuré pendant 5 jours et l’anosmie à l’odeur de menthe vérifiée.
L’anosmie réduit significativement le gain de poids des poussins pendant deux jours ; la perturbation étant moins
forte chez les poussins standards que chez les labels. Une analyse comportementale des séquences de coups de
becs à la mangeoire chez les poussins labels suggère que l’obturation des narines ne gênerait pas ou très peu
l’ingestion. L’anosmie perturberait donc l’identification de l’aliment chez les poussins nouvellement éclos de
types label et standard. Ces résultats montrent que l’olfaction jouerait un rôle dans la reconnaissance de l’aliment
par les poussins. La composante olfactive de la nourriture serait donc à ne pas négliger en élevage au démarrage.
Abstract
Food quality is important for growth rate of broilers chicks. Since there has been little investigation of olfactory
quality of food, we assessed the role of olfaction on initial growth of "Standard" broiler (fast growth) and "label"
(slower growth) domestic fowl chicks. After hatching, chick's nares were covered with acrylic cement to make
them anosmic (smell deprived). Chicks of both breeds were then weighed during a four day period and anosmia
was checked. Anosmia significantly decreased weight gain by the two types chicks (relative to control) for two
days. “Standard” chicks were less strongly disturbed than “label” chicks. A behavioural analysis of food pecking
sessions by "label" chicks suggests that blocking the nares had little effect on food handling. Anosmia might
disturb food identification in newly hatched "label" and "standard" chicks. These results suggest that olfaction
may play a role in food recognition by chicks. Odour of the food should not be neglected during the post-hatch
period.
1. Introduction
Chez les oiseaux, de nombreux travaux se sont
attachés à l’étude des caractéristiques nutritives et
physiques des aliments (Picard et al., 2000). Pourtant,
rares sont les études relatives à la composante
olfactive de la nourriture. Ceci tient au fait que la
fonctionnalité du système olfactif a longtemps été
discutée. Il semble aujourd’hui admis que les oiseaux,
et en particulier les poulets domestiques, perçoivent
les odeurs de l’environnement. La présentation de
différentes odeurs induit une activation du nerf
olfactif, une augmentation des battements cardiaques,
et des secouements de têtes (revue de Roper, 1999). Si
l’on ajoute une odeur à l’aliment, le premier contact
avec celui-ci est retardé (Jones, 1987). L’odorat
semble donc influencer l’alimentation. L’alimentation
précoce des poulets de chair conditionnant en grande
partie leur croissance ultérieure (Bigot et al., 2001), il
paraît important d’étudier la prise alimentaire initiale
des poussins. Récemment, Porter et al. (2002) ont
développé une nouvelle approche de l’étude du rôle
de l’odorat dans l’alimentation. Elle consiste à
perturber la perception olfactive des poussins après
l’éclosion en obturant leurs narines et à suivre leur
croissance initiale. L’obturation des narines réduit
significativement le gain de poids des poussins
pendant 3 jours. L’olfaction serait donc utilisée pour
identifier l’aliment.
Cette étude repose sur deux expérimentations. Nous
avons d’une part testé si la perturbation du gain de
poids consécutive à l’obturation des narines pouvait
être étendue à plusieurs types génétiques de poussins.
L’obturation des narines empêchant les poussins de
respirer normalement, elle pourrait induire des
difficultés pour la prise d’aliment. Pour tester cela,
nous avons d’autre part analysé le comportement des
poussins à la mangeoire.
2. Odorat et croissance
2.1. Matériels et méthodes
Traitements : Deux types de poussins ont été testés :
standard (croissance rapide) et label (croissance plus
lente). Le lendemain de l’éclosion (jour 2), deux
catégories de paires ont été formées au hasard pour
chaque souche:
- des paires d’individus aux narines obturées (N = 12
par souche). Les deux narines de chaque poussin ont
été obturées par de la résine acrylique appliquée avec
une spatule.
- des paires d’individus témoins (N = 12 par souche).
De la résine acrylique a également été appliquée mais
sur le bec, en évitant les narines.
4 traitements sont étudiés : paires de poussins labels
aux narines obturées, de labels témoins ainsi que de
standards aux narines obturées et standards témoins.
Les paires ont ensuite été placées dans des cages
d’élevage grillagées (47 × 45 × h=24 cm). L’eau était
distribuée à volonté par un système automatisé et de
l’aliment (aliment standard sous forme de miettes
provenant de la Station de Recherches Avicoles,
INRA de Tours-Nouzilly, 37) était disposé dans deux
mangeoires adjacentes de 9 × 10 cm. La lumière était
continue et la température maintenue à 30-32°C.
Poids : Le poids quotidien de chaque individu a été
mesuré (± 1g) du jour du traitement (jour 2) au jour 5.
Réactivité olfactive : Le jour 5, la perception olfactive
de chaque poussin a été testée (test décrit dans Porter
et al, 1999) afin de vérifier que l’obturation des
narines altérait la réactivité aux odeurs. Deux stimuli
liquides ont été présentés : huile essentielle de menthe
poivrée (Monot, Lyon) et eau. L’individu était placé
sur le dos sous une lampe chauffante de 100 W
(Figure 1) afin qu’il s’immobilise et ferme les yeux.
Nous lui avons alors présenté, consécutivement et
dans un ordre quelconque, les deux stimuli. Chacun
était placé dans un récipient en plastique au bout
percé sur lequel nous pressions doucement en
direction du bec (environ 15 coups en dix secondes)
(Figure 1). Un score a été attribué à la réaction du
poussin : 0 = aucune réaction, 1 = mouvement lent de
la tête avec ou sans claquement de bec, 2 =
mouvement brusque de la tête avec ou sans cris et
ouverture des yeux.
Analyse des données : Les scores du test de réactivité
olfactive ont été analysés individuellement. Pour
chaque odeur, l’effet du traitement a été mesuré par
un test de Kruskal-Wallis suivi de comparaisons deux
à deux par des tests U de Mann-Whitney. L’unité
d’analyse statistique pour les données pondérales était
le poids moyen par cage. Une ANOVA à deux
facteurs (capacité olfactive et souche) a été réalisée.
Le seuil de signification a été fixé à 0,05 pour tous les
tests statistiques.
FIGURE 1 : Poussin aux yeux fermés lors du test de
réactivité olfactive (extrait de Porter et al., 1999)
2.2. Résultats
Les paires dans lesquelles au moins un individu avait
perdu la résine ou était mort pendant l’expérience ont
été exclues des analyses. Les données concernant 9
paires de labels aux narines obturées, 11 de labels
témoins, 12 de standards aux narines obstruées et 11
de standards témoins ont été analysées.
Réactivité olfactive : Les réponses à l’eau sont très
faibles (moyenne = 0,1) et il n’existe pas de
différence significative entre les traitements (p>0,70).
Pour la menthe, il existe un effet significatif du
traitement (p<0,001). Les poussins aux narines
obturées ont un score plus faible (moyenne = 0,5) que
les témoins (moyenne = 1,6) pour les deux souches.
Ils ont tendance à répondre plus à la menthe que les
témoins ne répondent à l'eau (0,05<p<0,08).
Poids Le poids moyen initial (jour 2) des paires des
quatre traitements ne diffère pas significativement
(moyenne = 39,7 ± 0,4 g). Pour les gains de poids,
l’effet du traitement est significatif entre les jours 2 et
3 et 3 et 4 (Tableau 1). L’effet de la souche est
significatif pour tous les intervalles (Tableau 1). Les
labels sont plus perturbés que les standards entre les
jours 2 et 3 (interaction significative, Tableau 1).
TABLEAU 1 : Effet du traitement et de la souche sur le gain de poids des paires de poussins (moyenne ± SEM
en g) pendant quatre jours. *p = probabilité (test ANOVA, ns = non significatif)
Label
Standard
p*
Intervalles
Narines
Narines
Traitement
Témoins
Témoins
Traitement
Souche
obturées
obturées
× Souche
Jours 2 et 3 5,2 ± 0,6
11,9 ± 0,4
8,7 ± 0,5
12,4 ± 0,6
< 0,001
< 0,001
< 0,01
Jours 3 et 4 7,8 ± 0,8
10,3 ± 0,5
9,1 ± 0,5
12,2 ± 0,5
< 0,001
< 0,01
ns
Jours 4 et 5
8 ± 0,8
9,1 ± 0,8
13,6 ± 0,9
13,5 ± 1,5
ns
< 0,001
ns
3. Odorat et comportement alimentaire
3.1. Matériel et méthode
Traitements : 40 poussins de un jour de type label ont
été testés en 5 répétitions de 4 paires. La cage de test
(80 × 80 × h =30 cm), au fond grillagé et aux parois
en verre (Figure 2), était divisée en quatre
compartiments identiques (40×40 cm) par des
séparations opaques. L’eau était accessible à volonté
et chaque compartiment possédait une mangeoire vide
(diamètre 8 cm). Une lampe chauffante (100W) était
placée dans chaque coin, au-dessus des mangeoires,
pour maintenir une lumière continue et une
température de 30°C. Les individus ont été répartis en
deux traitements, 10 paires aux narines obturées et 10
paires témoins (cf paragraphe 2.1.) trente minutes
avant le début des enregistrements. Les individus ont
été pesés. Un seul poussin par paire, choisi au hasard,
a été observé : il a été marqué sur la tête et le dos au
feutre noir. De l’aliment (identique à celui du test de
croissance) a ensuite été ajouté dans la mangeoire, ce
qui marquait le début du test pour la paire. Les
individus ont été filmés en gros plan à la mangeoire
(Figure 2) à partir de l’apport d’aliment : 3 heures par
jour ont été enregistrées pour chaque paire pendant 2
jours consécutifs. A la fin des enregistrements, les
individus ont à nouveau été pesés et nous avons
procédé au test destiné à vérifier l’anosmie (Porter et
position
de la
caméra
40 cm
mangeoire, "fixe"= position fixe, la tête orientée vers
la mangeoire, "rotation" = rotation de la tête
(horizontale ou verticale), "picorage" = picorage,
"mandibulation" = mouvements des mandibules,
"secouement" = suite de mouvements horizontaux
rapides de la tête. Afin de différencier les picorages
consommateurs (conso) qui conduisent à l’ingestion
de granulé des picorages explorateurs (explo)
n’induisant pas d’ingestion, la bande était passée une
seconde fois au ralenti.
Analyse des données : Les réponses des poussins des
deux traitements au test de réactivité olfactive ont été
comparées par un test U de Mann-Whitney. Les
données pondérales ont été comparées par un test t de
Student. Une analyse spécifique des activités suivant
un picorage consommateur a été réalisée en partant de
l’hypothèse que, si la résine gène les poussins, c’est
au niveau de la déglutition que des différences
pouvaient apparaître (les picorages explorateurs
peuvent s’effectuer le bec ouvert ; Rogers, 1995).
Après un picorage consommateur, la latence au
prochain picorage, la latence à mandibuler, le nombre
de rotations et de secouements de tête ainsi que la
latence à picorer après la fin de la mandibulation ont
été mesurés. Des tests U de Mann-Whitney ont été
réalisés pour comparer les données comportementales
des poussins des deux traitements.
3.2. Résultats
abreuvoir
mangeoire
al., 1999 ; description paragraphe 2.1).
FIGURE 2 : Schéma de la cage d’élevage et de la
position de la caméra
Mesures comportementales : Le relevé des
comportements à partir des bandes vidéos a été
effectué avec le logiciel The ObserverTM 3.0 (Noldus,
Wageningen, NL). Deux séquences alimentaires
d’environ trente coups de bec consécutifs choisies au
hasard (sur les 6 heures de bande) ont été analysées
par focal sampling pour chaque individu marqué.
Lors d’une première lecture au ralenti, sept états
comportementaux ont été relevés (d’après Yo et al.,
1997 ; Martaresche et al., 2000) : "redressé" =
position redressée fixe, tête non orientée vers la
Les effectifs sont de 8 paires de poussins aux narines
obturées et 9 paires de témoins car les paires dans
lesquelles aucun individu n’a mangé pendant le test
ont été éliminées. Comme dans le test précédent, les
témoins réagissent significativement plus fort à la
menthe que les poussins aux narines obturées
(p<0,001) et ont un gain de poids supérieur à celui des
poussins aux narines obturées (p<0,001).
La durée moyenne des séquences alimentaires
analysées est de 48 ± 4 s chez les poussins aux narines
obturées et 41 ± 5 s chez les T. Les poussins sont dans
la position "fixe" la majorité du temps de la séquence
(Tableau 2). L’immobilité totale ("redressé"+"fixe")
des
poussins
aux
narines
obturées
est
significativement supérieure à celle des T (Figure 3).
La fréquence des picorages et des secouements de
tête, la durée moyenne d’un picorage et celle d’une
mandibulation ne diffèrent pas significativement entre
les groupes (Tableau 2).
L’analyse des comportements après un picorage
consommateur ne révèle aucune différence
significative entre les deux traitements pour le nombre
de rotations et de secouements de tête ni pour les
mesures de latence.
Immobilité par séquence (%)
FIGURE 3 : Pourcentage de temps immobile dans les
séquences alimentaires pour les poussins aux narines
obturées et les témoins (*=p<0,05)
*
80
70
60
50
Narines
obturées
Témoins
Médianes (inter-quartiles)
Narines obturées
Budget temps par séquence (%)
redressé
8,9 (2,4-12,0)
Témoins
3,4 (2,1-5,0)
fixe
60,4 (53,1-65,0)
53,3 (50,9-61,3)
rotation
14,5 (14,1-16,2)
14,7 (13,5-15,5)
mandibulation
8,8 (4,3-10,7)
11,2 (9,5-16,6)
picorage
7,1 (6,6-10,8)
9,7 (9,0-11,0)
secouement
1,7 (0,4-2,9)
0,6 (0,3-1,9)
Fréquence (occurrences par secondes)
picorage conso
0,2 (0,1-0,3)
0,2 (0,2-0,4)
picorage explo
0,9 (0,7-1,1)
0,7 (0,6-1,1)
secouement
0,2 (0,1-0,5)
0,1 (0,0-0,3)
Durée d’un comportement (s)
picorage conso
0,14 (0,10-0,15)
0,14 (0,13-0,17
picorage explo
0,13 (0,12-0,14)
0,13 (0,13-0,16)
mandibulation
0,32 (0,20-0,40)
0,34 (0,29-0,37)
TABLEAU 2 : Effets de l'obturation des narines sur
les séquences alimentaires : budget-temps, fréquence
et durée des comportements relevés (aucune
différence significative entre traitements)
4. Discussion
L’obturation des narines a efficacement perturbé la
perception olfactive des poussins puisque les
individus aux narines obturées répondent moins à la
menthe que les témoins. Elle entraîne aussi une
diminution de la croissance pendant deux jours, à la
fois pour les poussins labels (comme cela a été montré
par Porter et al., 2002) et les standards. Cependant, le
gain de poids des standards est moins fortement
perturbé que celui des labels. Les standards pourraient
identifier plus rapidement l’aliment que les labels du
fait d’une divergence sélective d’où leur moindre
perturbation. Les séquences de coups de bec semblent
peu modifiées par l’obturation des narines car seule la
durée d’immobilité totale est augmentée. Yo et al.
(1997) ont interprété cette immobilité comme une
observation de l’aliment entre deux picorages.
L’obturation des narines induit donc une diminution
du gain de poids qui ne serait pas la conséquence de
difficultés lors de l’ingestion des particules
alimentaires, puisque les picorages consommateurs ne
sont pas altérés, mais plutôt la conséquence d’une
importante réduction de la perception des odeurs. Des
travaux ont montré un effet négatif des odeurs
nouvelles ajoutées dans l’aliment (Marples et Roper,
1996). Au contraire , si l’odeur ajoutée est présente
pendant l’élevage, les poussins ne présentent ni
aversion, ni préférence pour celle-ci (Jones, 1987). La
familiarité olfactive serait donc un élément important
de l’alimentation des poussins. L’odorat jouerait un
rôle dans l’alimentation des poulets domestiques. Les
caractéristiques olfactives de l’aliment, comme ses
propriétés visuelles, tactiles…, participeraient à
l'identification puis à la reconnaissance de l’aliment.
Ainsi, les poussins privés d’odorat identifieraient
l’aliment moins rapidement que les poussins intacts,
la familiarisation étant retardée.
Cette étude pourrait être complétée par une mesure
des quantités d'aliment ingérées par les poussins voire
une analyse plus fine du comportement (séquences).
L’adaptation des qualités olfactives de l’aliment aux
préférences des poussins en démarrage pourrait
permettre d’assurer une bonne vitesse de croissance
initiale. Sachant que la première semaine de vie des
poulets à croissance rapide (standard) représente
presque 20% de leur durée de vie, l’odeur des
aliments de démarrage est à ne pas négliger.
Remerciements
Nous remercions S. Ligout, A. Poirier pour leur aide
lors des tests, K. Gérard, C. Moisy pour les soins aux
animaux et C. Bouchot pour les installations vidéos.
Références bibliographiques
Bigot K., Tesseraud S., Taouis M., Picard M, 2001.
INRA Prod. Anim., 14, 219-230.
Jones R.B., 1987. Bird Behav., 7, 78-81.
Marples N.M., Roper T.J., 1996. Anim. Behav., 51,
1417-1424.
Martaresche M., Le Fur C., Magnusson M., Faure
J.M., Picard M., 2000. Physiol Behav, 70, 443-451.
Picard M., Le Fur C., Melcion J.P., Bouchot C., 2000.
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Porter R.H., Hepper P.G., Bouchot C., Picard M.,
1999. Physiol. Behav., 67, 459-462.
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Anim. Research, 51, 337-345.
Rogers L.J., 1985. Wallingford, UK : CAB
International. p. 95-110.
Roper T.J., 1999. Adv. Stud. Behav., 28, 247-332.
Yo T., Vilarino M., Faure J.M., Picard M, 1997.
Physiol Behav, 61, 803-810.
COMPORTEMENT ALIMENTAIRE DES POULES REPRODUCTRICES CHAIR
Puterflam Julie1*, Heck Ariane1, Jego Yves2, Trévidy Jean-Jacques2, Williams John1 et Picard Michel1
1
INRA, Station de Recherches Avicoles, 37380 Nouzilly, 2Hubbard-ISA, Le Foeil, BP 159, 22800 Quintin,
*adresse actuelle : ITAVI, Beaucemaine BP 37 22440 Ploufragan
Résumé
Dans le cadre du programme de recherche européen « Broiler Breeder Paradox », le comportement de poules
reproductrices lourdes rationnées (SR) ou non (SA) est comparé à celui de poules reproductrices de type Label
nourries ad libitum (L). Trente six parquets de 14 poulettes (soit 12 parquets par traitement) sont filmés toutes
les 6 semaines de 3 à 36 semaines d’âge. Chaque parquet comporte deux poules-cibles marquées par des
couleurs différentes. Le comportement des poules-cibles pendant l’heure précédant et suivant la distribution
d’aliment (10h du matin) et une heure enregistrée cinq heures après celle-ci (15-16h), est codé par scan sampling
(12 scans par heure et par poule). Le budget temps des poules SR se caractérise par une durée d’immobilité plus
longue avant la distribution de l’aliment, une activité alimentaire plus intense immédiatement après et surtout
une activité de picorage de la mangeoire et de l’environnement quatre fois plus longue (46,8% du temps) que les
L (11,5%) et les SA (11,9%) l’après midi pendant la phase de croissance. Ces différences s’estompent lorsque le
rationnement est relâché à l’entrée en ponte. Dans nos conditions, aucune corrélation (Spearman) stable n’a été
détectée d’un âge à l’autre qui permette de caractériser un individu par une mesure ponctuelle du comportement
par scan sampling. Les limites de cette méthode pratique ainsi que l’interprétation des variations
comportementales observées sont discutées.
Introduction
La sélection génétique pour une vitesse de croissance
et un développement musculaire rapides des poulets
des chair s’est accompagnée d’une réduction de leurs
aptitudes à la reproduction. La ponte des
reproductrices chair lourdes n’est exploitable que si
les poules sont rationnées dès leur plus jeune âge. La
courbe de croissance de « référence » que les poules
de génotype chair lourd doivent suivre pour se
reproduire n’est guère différente de celle d’une poule
pondeuse ou d’une reproductrice label naine. Pour
l’atteindre, les poules subissent une restriction
alimentaire plus sévère chaque année en fonction de la
sélection.
Comment évaluer le plus objectivement possible les
conséquences de ces pratiques de restriction
alimentaire sur le comportement de l’animal ? Les
indices comportementaux et physiologiques mesurés
par Hocking et al. (1996) suggèrent qu’une
alimentation ad libitum des reproductrices n’est pas
optimale. Selon ces travaux une restriction alimentaire
intermédiaire entre les pratiques courantes et
l’alimentation ad libitum représenterait un compromis
optimal pour l’animal. Toutefois, l’étude systématique
de rationnements intermédiaires et de régimes hypoprotéiques ne semblent pas conduire à une
amélioration des paramètres étudiés par rapport aux
plans de rationnement pratiques (Hocking et al.,
2001a et b).
Une alternative serait d’introduire dans la sélection
des critères permettant de distinguer les poules qui
« tolèrent » mieux que les autres les effets de la
restriction
alimentaire.
Quels
paramètres
comportementaux évaluent le mieux ce dernier ? Et
surtout les poules exprimant plus ou moins ces
comportements le font-elles de manière constante ou
non ? Il serait en effet vain de sélectionner des poules
sur une attitude transitoire qui ne reflèterait pas leur
capacité intrinsèque durable à tolérer le régime qui
leur est imposé.
Pour tenter de répondre à ces deux questions des
poules reproductrices lourdes rationnées ou nourries
ad libitum ont été filmées six fois (toutes les 6
semaines) entre 3 et 36 semaines d’âge et leur
comportement a été codé par « scan sampling »
(Picard et Faure, 1997). Comme dans la plupart des
travaux de ce type se posait le problème du témoin. Il
est souvent vrai de dire que les poules rationnées sont
différentes de leurs congénères nourries ad libitum
mais qui est « normal » ?? Pour éviter ce piège un
groupe témoin est constitué de poules reproductrices
chair mais à croissance lente (de type label), qui sont
nourries ad libitum sans conséquence négative sur la
reproduction.
1. Matériels et méthodes
Les poules observées dans cette expérience sont les
mêmes que celles décrites par Heck et al. (2003) dans
les mêmes journées. Le lecteur y trouvera des détails
complémentaires du protocole.
1.1. Animaux
Trente six parquets de 14 poulettes (soit 12 parquets
par traitement) ont été filmés toutes les 6 semaines de
Cinquièmes Journées de la Recherche Avicole, Tours, 26 et 27 mars 2003
3 à 36 semaines d’âge. Chaque parquet comportait
deux poules-cibles choisies au hasard (numéro de
bague) et marquées par deux couleurs différentes. Il y
avait trois traitements : SA, SR et L. Le génotype
lourd « standard » S a été nourri ad libitum (SA) ou
restreint (SR) selon les recommandations du
sélectionneur et comparé aux poules reproductrices
Label nourries ad libitum (L).
1.2. Mesures comportementales
Chaque parquet était filmé toutes les 6 semaines avec
enregistrement sur support numérique disque dur
Alcatraz (Macrosystems, Belgique). Trois périodes
d’une heure étaient enregistrées : de l’allumage de la
lumière (9h) à la distribution de l’aliment (10h), après
cette dernière (10 à 11h) et 5h plus tard (15-16h)
lorsque les mangeoires des SR étaient vides depuis
longtemps.
Pour chaque période, le comportement de chaque
poule-cible était enregistré toutes les 5 minutes (12
scans par heure). Le « budget temps » d’une poule a
été calculé comme le nombre de fois qu’une attitude
est observée divisé par le nombre total de scan dans
une
période.
Les
8
attitudes
exclusives
systématiquement codées ont été : mange, boit,
immobile, marche, se repose (couchée dans la litière),
se toilette, pique l’environnement (litière, grillage…)
et pique la mangeoire vide.
1.3. Analyses statistiques
Le fichier de base contenait 1296 lignes (72 poules x
6 âges x 3 périodes d’observation). Sur chaque ligne
figurait donc le budget temps (en %) pour les 8
attitudes comportementales observées. Dans un
premier temps ce tableau de fréquence a été soumis à
une analyse des correspondances qui a permis de
déterminer qu’il y avait deux groupes d’âges distincts
(croissance : démarrant à 3, 9 et 15 semaines et
reproduction : démarrant à 21, 27 et 33 semaines) et
que les 3 périodes devaient être analysées séparément.
Les données ont donc été regroupées de cette manière
en 6 fichiers de 216 lignes et analysées par ANOVA
en mesures répétées (trois âges successifs) après
transformation des pourcentages (arcsinus (racine
carrée)). Les moyennes ont été distinguées par le test
de comparaison multiple de Newman et Keuls.
D’autre part, pour évaluer la corrélation entre les
mesures faites d’un âge à l’autre, les coefficients de
corrélation de Spearman (sur les rangs) ont été
calculés pour chaque comportement et chaque
traitement.
2. Résultats
2.1. Croissance (3 à 18 semaines)
9-10h : Les SR se distinguent des L par un temps
d’immobilité plus long et plus de picage de la
mangeoire qui est vide. Toutefois, le temps passé à
cette activité n’est pas plus long que celui que les L
passent à manger (Tableau 1). Les autres effets et
interactions concernent les SA.
10-11h : Les SR mangent au détriment des autres
activités mais les SA également ! Les L qui ont le
temps de manger, sont plus longtemps immobiles
entre 3 et 12 semaines et plus « exploratrices » entre
15 et 18 semaines (interactions) que les S. Les SR
boivent plus longtemps que les autres mais seulement
entre 3 et 6 semaines.
15-16h : Les SR passent près de la moitié du temps à
piquer l’environnement (surtout leur litière) et la
mangeoire vide. Les activités de marche et de
toilettage augmentent avec l’âge chez les L. Les SA
passent deux fois plus de temps à manger que les L.
2.2. Reproduction (21 à 36 semaines)
9-10h : Les différences sont moins nettes qu’en
croissance. Les SR qui n’ont en général plus
d’aliment ne mangent plus et boivent moins que les L
(Tableau 2).
10-11h : Les SR (et les SA) mangent plus longtemps
que les L au détriment de l’immobilité et de la marche
(mais seulement avant 27 semaines pour la marche,
interaction).
15-16h : Les SR piquent plus leur mangeoire et
l’environnement au détriment du repos que les L mais
cela est net avant l’entré en ponte et disparaît lorsque
le rationnement est adapté aux besoins de ponte donc
proportionnellement moins sévère qu’en croissance
(interaction). Les autres effets sont surtout liés au
comportement alimentaire accru des SA et à leur
présence variable au nid d’un âge à l’autre.
2.3. Analyse de corrélation (Spearman)
Aucune des variables comportementales analysées ne
s’exprime de manière stable d’un âge à l’autre même
pour les critères qui distinguent le mieux les poules
restreintes des autres comme l’immobilité avant la
distribution alimentaire et les picorages de la
mangeoire vide ou de l’environnement l’après midi
(Tableau 3).
Plusieurs tentatives ont été faites pour traiter les
fréquences nulles (comportement non observé pour
une poule qui crée de nombreux ex aequo dans les
calculs de rang). Par exemple : les comportements ont
été regroupés (i.e., picorages de l’environnement et de
la mangeoire), ou bien les nombres de poules ayant ou
non exprimées un comportement ont été testées par
Chi².
Tous les résultats confirment l’absence de corrélation
stable et significative dans l’expression du
comportement des poules-cibles en utilisant la
méthode de scan sampling décrite.
TABLEAU 1 : Budget-temps moyen des poules pendant la phase de croissance (3-18 semaines)
% temps d’observation
9-10 h Marche
Immobile
Se Repose
Mange
Boit
Se Toilette
Pique la mangeoire
Pique l’environnement
10-11 h Marche
Immobile
Se Repose
Mange
Boit
Se Toilette
Pique la mangeoire
Pique l’environnement
15-16 h Marche
Immobile
Se Repose
Mange
Boit
Se Toilette
Pique la mangeoire
Pique l’environnement
SA
2,66 ± 0,65a
34,69 ± 2,73a
15,26 ± 1,78b
12,63 ± 2,34
4,85 ± 1,36
13,13 ± 1,70b
7,50 ± 1,29b
9,28 ± 1,35
0,45 ± 0,26a
12,06 ± 2,17b
10,12 ± 2,62b
67,01 ± 3,94b
5,46 ± 1,62
1,51 ± 0,54
0,57 ± 0,28
2,80 ± 0,70a
2,83 ± 0,66a
16,06 ± 1,96
26,81 ± 2,20b
31,87 ± 2,74b
5,50 ± 1,21
4,66 ± 0,85
4,29 ± 1,70a
7,65 ± 1,13a
SR
10,12 ± 1,32b
45,26 ± 2,70b
10,85 ± 1,12a
4,26 ± 0,68
4,90 ± 1,00a
12,15 ± 1,11b
12,75 ± 1,46
2,89 ± 0,67b
5,23 ± 0,86a
2,52 ± 0,91a
74,87 ± 3,36b
9,44 ± 2,90
0,95 ± 0,39
1,02 ± 0,53
3,07 ± 0,73a
5,48 ± 0,89a
21,64 ± 1,95
17,76 ± 1,54a
4,52 ± 0,80
3,80 ± 0,68
25,72 ± 2,16b
21,07 ± 2,13b
L
Traitement Age Interaction
10,37 ± 1,52b
**
**
*
36,61 ± 2,44a
**
10,20 ± 1,64a
*
**
17,47 ± 2,11
3,50 ± 0,78
*
7,18 ± 0,11a
**
**
*
2,77 ± 0,77a
**
*
11,89 ± 1,25
*
3,49 ± 0,82b
*
**
21,49 ± 2,17c
**
**
*
13,00 ± 2,26b
**
47,96 ± 2,84a
**
3,32 ± 0,76
*
2,45 ± 0,55
**
0,37 ± 0,27
*
6,98 ± 1,15b
*
**
*
7,50 ± 1,07b
**
*
*
18,91 ± 1,71
**
*
37,12 ± 2,41c
**
13,85 ± 1,43a
**
*
2,42 ± 0,57
**
6,67 ± 1,34
**
*
1,83 ± 0,72a
**
9,67 ± 1,26a
**
**
*P<0,05, **P<0,01 Les moyennes suivies de lettres différentes sont significativement différentes (P<0,05)
TABLEAU 2 : Budget-temps moyen des poules pendant la phase de ponte (21-36 semaines)
% temps d’observation
9-10 h Marche
Immobile
Se Repose
Mange
Boit
Se Toilette
Pique la mangeoire
Pique l’environnement
Dans le nid
10-11 h Marche
Immobile
Se Repose
Mange
Boit
Se Toilette
Pique la mangeoire
Pique l’environnement
Dans le nid
15-16 h Marche
Immobile
Se Repose
Mange
Boit
Se Toilette
Pique la mangeoire
Pique l’environnement
Dans le nid
SA
3,32 ± 0,65
34,43 ± 2,25a
24,07 ± 3,14b
13,58 ± 1,78b
4,38 ± 0,90b
8,21 ± 1,11
1,25 ± 0,55
6,72 ± 0,99
4,03 ± 8,15
2,65 ± 0,61
21,06 ± 1,99a
13,38 ± 1,97b
42,48 ± 3,09b
4,70 ± 1,09
2,53 ± 0,54
1,46 ± 0,15
4,69 ± 0,95
3,15 ± 1,04
3,18 ± 0,75
18,65 ± 1,78
17,73 ± 1,82ab
26,07 ± 2,44b
4,74 ± 0,83
4,97 ± 0,75
1,01 ± 0,38a
6,90 ± 1,14a
12,81 ± 3,21b
SR
3,19 ± 0,72
45,78 ± 2,88b
18,31±2,48ab
3,42 ± 1,27a
2,06 ± 0,74a
11,40 ± 1,33
0,46 ± 0,22
7,26 ± 1,11
8,15 ± 2,38
2,48 ± 0,70
19,52 ± 2,16a
5,00 ± 1,10a
51,36 ± 3,77c
5,23 ± 0,72
1,22 ± 0,41
0,38 ± 0,20
5,21 ± 1,39
4,98 ± 2,19
3,02 ± 0,64
21,59 ± 1,97
15,86 ± 1,73a
15,13 ± 2,48a
7,00 ± 1,15
7,55 ± 1,00
6,41 ± 1,52b
13,02 ± 1,83b
6,15 ± 1,61a
L
Treatment Age Interaction
5,38 ± 1,12
**
40,98 ± 2,68ab
**
12,65 ± 2,51a
**
*
15,64 ± 1,84b
**
*
4,45 ± 0,85b
**
6,05 ± 0,94
**
1,35 ± 0,52
9,90 ± 1,47
**
3,59 ± 1,04
**
3,98 ± 0,98
**
*
28,83 ± 2,57b
*
8,10 ± 1,48ab
*
32,80 ± 3,00a
**
**
7,11 ± 1,37
**
3,17 ± 0,74
1,06 ± 0,45
5,10 ± 0,99
**
4,25 ± 1,46
4,09 ± 1,14
**
22,87 ± 2,41
*
24,55 ± 2,53b
*
**
17,87 ± 1,58ab
**
3,57 ± 0,82
5,42 ± 0,89
1,83 ± 0,65a
**
**
10,14±1,35ab
**
**
*
4,16 ± 1,35a
*
*
*P<0,05, **P<0,01 Les moyennes suivies de lettres différentes sont significativement différentes (P<0,05)
TABLEAU 3 : Corrélations de Spearman interâges pour trois comportements représentatifs de la
motivation à manger chez les poules rationnées SR
9-10 h Immobile
Age (semaines)
33
27
21
15
9
3
0,07
0,22
-0,31
0,27
-0,39
9
15
21
27
-0,05 -0,11 0,28 0,03
-0,15 0,13 -0,05
-0,11 -0,09
-0,02
15-16 h Pique la mangeoire
Age (semaines) 3
9
15 21
27
-0,09 0,03 0,12 0,21 -0,12
33
0,23 0,14 0,13 0,04
27
-0,05 0,06 0,24
21
0,12 0,03
15
-0,40
9
15-16 h Pique l’environnement
Age (semaines) 3
9
15
21 27
0,11 -0,22 -0,06 0,62 0,00
33
-0,21 -0,16 -0,20 0,04
27
-0,30 -0,11 -0,13
21
-0,03 0,65
15
-0,37
9
3. Discussion
L’absence de corrélation entre l’expression des
comportements d’un âge à l’autre exclut
l’utilisation de la méthode présentée pour la
sélection génétique. On peut alors s’interroger sur
la cause de cette absence de corrélation : ou bien la
méthode de scan sampling choisie n’est pas
appropriée, ou bien les critères comportementaux
analysés ne sont pas stables et utilisables pour
caractériser la tolérance au rationnement
alimentaire.
La méthode de scan sampling a été choisie comme
étant la méthode d’observation la plus simple à
pratiquer donc celle qui pourrait éventuellement
être compatible avec une application à des grands
nombres de poules. Toutefois, elle présente des
limites connues (Picard et Faure, 1997). Elle évalue
un « budget temps » qui est d’autant plus fiable que
les comportements observés durent longtemps.
C’est le cas d’attitudes comme le repos,
l’immobilité, la consommation d’aliment…. Le
codage de comportements brefs comme la marche,
le toilettage, les picorages divers risquent d’être mal
évalués car difficiles à distinguer sur une « photo
instantanée ». Le risque d’erreur a été limité par
l’utilisation d’un film numérisé dont on pouvait
regarder les images figées par sauts de 5 minutes
tout en pouvant observer si nécessaire les images
suivant ou précédant l’instantané.
Une autre faiblesse de la méthode que nous avons
utilisé tient à l’analyse individuelle des animaux
cibles observés (24 par traitement). Ce nombre est
suffisant pour donner une représentation
convenable du budget temps global d’un traitement.
Les comparaisons présentées sont cohérentes avec
des travaux antérieurs (Hocking et al., 1996, 1997,
2001). Toutefois, l’utilisation du budget temps d’un
individu (analyses de corrélation) est discutable. Le
travail est poursuivi par l’utilisation du focal
sampling (Picard et Faure, 1997) pour mieux
caractériser
individuellement
certains
comportements sensibles comme le picorage de
litière ou de mangeoire.
Le sens donné au comportement observé est
également discutable. Ainsi, le comportement de
picorage de l’environnement et/ou de la mangeoire
vide est-il un signe de frustration ou de recherche
d’aliment ? Ne serait-il pas plus simplement
l’expression une activité du bec qui est
génétiquement développée chez les S (cf. les
résultats des SA dans les Tableaux 1 et 2) et qui est
renforcé par la nécessité de manger vite lorsque
l’aliment est offert ?
Conclusions
Les SR sont différentes des L mais les SA le sont
au moins autant sinon plus. La restriction
alimentaire est-elle une technique critiquable parce
qu’elle place les poules dans une attitude de
recherche alimentaire ou la correction nécessaire
d’une motivation alimentaire accentuée par la
sélection génétique sur la croissance ? Il ne semble
pas que la recherche de nourriture observable par
les comportements de picorage de l’environnement
soit corrélée avec des mesures objectives de la peur
(Hocking, 1997, 2001a). Nous ne disposons donc
pas d’élément objectif pour conclure que la
restriction alimentaire est critiquable sur le plan
éthique. D’autre part, pour les « naturalistes »,
rappelons que l’alimentation ad libitum est plutôt
rare dans la nature !
Remerciements
Merci à Florence Favreau, Claude Bouchot et tous
ceux qui nous ont aidé pour la réalisation des
expériences. Ce programme est financé par la
Communauté Européenne (QLRT 2000 1732). A.
Heck bénéficie d’une bourse de la région Centre.
Références bibliographiques
Heck et al., 2003, Journées de la Rech. Avicole, 5.
Hocking P. et al., 1996. Br. Poult. Sci. 38 :263-278.
Hocking P. et al., 1997. Br. Poult. Sci. 38 :237-240.
Hocking P. et al., 2001a. Br. Poult. Sci. 42 : 424432.
Hocking P. et al., 2001b. Br. Poult. Sci. 42 :569579.
Picard M. et Faure J.M., 1997. Journées de la Rech.
Avicole 2, 213-216.
COMPARAISON DU BIEN-ETRE, DE L’ETAT SANITAIRE ET DES PERFORMANCES
ZOOTECHNIQUES DE POULES PONDEUSES, ELEVEES DANS UN SYSTEME CLASSIQUE DE CAGES
OU DANS UN SYSTEME ALTERNATIF DE TYPE « VOLIERE » : RESULTATS PRELIMINAIRES
Michel Virginie, Huonnic Didier, Protais Jocelyne, Cotte Jean-Pierre, Boilletot Eric, Maurice Robert,
Postollec Gilbert
Unités de Protection Animale et d’Hygiène et Qualité des Produits Avicoles et Porcins - AFSSA –Beaucemaine BP 53 - 22440 Ploufragan
Résumé
L’élevage des poules pondeuses en volière fait partie des systèmes alternatifs préconisés par la directive
1999/74/CE à partir de 2012 en remplacemment des cages traditionnelles. Cette expérimentation a pour but
d’appréhender de façon plurifactorielle le bien-être des poules pondeuses ainsi que leurs performances
zootechniques en système volière versus le système cages. Le bien-être des animaux est évalué via l’étude du
comportement et de leur état de santé. Il apparaît que les poules élevées en volières ont des activités plus variées,
avec des comportements de toilettage et de locomotion plus importants qu’en cages. La qualité de
l’emplumement est moins bonne en cages qu’en volières, en fin de bande. Toutefois les conditions d’ambiance
(liée à l’empoussièrement et à la contamination microbiologique de l’air) sont peu satisfaisantes en volière et
conduisent à l’apparition de lésions pulmonaires chez les animaux. Les performances zootechniques sont
légèrement moins bonne en volières qu’en cages.
Introduction
La Directive 1999/74/CE du 19 juillet 1999 interdit
l’usage des cages actuelles pour loger les poules
pondeuses à dater du 1er janvier 2012, date à laquelle
ne seront plus autorisés que les systèmes alternatifs et
les cages aménagées. Très peu de données
scientifiques sont disponibles concernant l’élevage de
poules pondeuses en grands groupes, en volières. Les
premières études sur les volières mettent en évidence
une bonne utilisation de l’espace par les poules, avec
des déplacements plus fréquents que dans les
systèmes cages et, en corollaire, une solidité osseuse
augmentée (Newman and Leeson, 1998). Certaines
études soulignent également l’apparition de
problèmes de cannibalisme et de ponte au sol chez les
poules en volières (Abrahamsson and Tauson, 1998).
Le comportement des poulettes a été peu étudié et les
études existantes ont été conduites sur des systèmes
d’élevage au sol (Savory and Mann, 1999). Le mode
d’élevage des poulettes semble essentiel : l’accès à
des perchoirs (Gunnarsson et al., 1999) ou a du sable
et de la paille (Johnsen et al., 1998) diminue les
activités de picage.
Une première expérimentation a été menée à
l’AFSSA dans le but d’étudier, sur des lots de tailles
comparables ceux mis en place en élevage, le bienêtre, les performances zootechniques et l’état
sanitaires
des
animaux
et
des
produits.
L’expérimentation portait sur 10 000 poules
pondeuses (dont la moitié épointée), la moitié des
animaux était élevée en cages et l’autre en volières. Il
est apparu que les animaux élevés en volières
occupaient très bien l’espace disponible et que leurs
activités étaient plus variées qu’en cages. En
revanche, comme dans tout nouveau système
d’élevage, quelques améliorations restaient à
apporter : l’activité plus importante des animaux en
volière, ainsi que le gaspillage d’aliment ont conduit à
des performances (taux de ponte, indice de
consommation) légèrement moins bonnes en volières
qu’en cages. La ponte au sol ainsi que le taux de
poussière important en volière ont été responsables
d’une contamination microbiologique des coquilles
d’œuf supérieure en système volières par rapport aux
cages. De plus des phénomènes de picages sont
apparus en fin de bande, en volière surtout lorsque les
animaux n’étaient pas épointés. Le non-épointage du
bec des animaux semblait peu compatible avec
l’élevage en volière dans ces conditions.
Une deuxième expérimentation était donc nécessaire
pour essayer d’améliorer le système d’élevage des
poules en volières (et par là même les performances et
les conditions sanitaires) ainsi que pour approfondir
l’étude du comportement des animaux et de leur bienêtre en général. Les premiers résultats de cette
expérimentation sont présentés ici.
1. Matériels et méthodes
1.1. L’élevage des animaux
Les poules utilisées pour cet essai sont de souche Isa
Brown. De 1 jour à leur 17ème semaine (S= semaine
d’âge) d’âge elles sont élevées dans des bâtiments de
la station expérimentale de l’AFSSA de Ploufragan.
Elles sont toutes épointées à 9 jours. Les poulettes
font l’objet d’un programme de prophylaxie classique
en élevage de production en Bretagne. En S17, elles
Cinquièmes Journées de la Recherche Avicole, Tours, 26 et 27 mars 2003
sont transférés dans un bâtiment de ponte, contenant
une partie cages, une partie volières. Les cages 5
places utilisées ainsi que les volières (Natura, Big
Dutchman). respectent les normes de la directive
1999/74/CE. Le programme alimentaire, de régulation
de
température
(20°C<température<21C°)
et
d’éclairage sont identiques en cages et en volières.
Il existe trois traitements qui se caractérisent par le
mode d’élevage des poulettes et le mode de logement
des pondeuses : les poulettes élevées au sol (5360
animaux) puis transférées en batteries de cages non
aménagées (T1), les poulettes élevées en volières
(2700 animaux) puis transférées en volière de ponte
(T2), les poulettes élevées au sol avec des perchoirs et
une plate forme en caillebotis (2700 animaux) puis
transférées en volière (T3). L’élevage en volières des
poulettes est la solution préconisés mais qui n’est pas
disponible en France actuellement, l’élevage au sol
avec des structures de perchage constituerait un
compromis permettant la réutilisation des bâtiments
actuels pour l’élevage de poulettes. Cet essai vise
également à évaluer l’impact du système d’élevage
des poulettes sur la période de ponte.
1.2. Suivi comportemental
L’occupation de l’espace par les animaux élevés avec
des structures de perchage (T2, T3) est étudié toutes
les deux semaines (entre S8 et S67) par l’observation
de la localisation (horizontale et verticale) d’animaux
bagués, par la technique du scan sampling.
Afin d’évaluer le répertoire comportemental des
aniamux, en S9 et S10, ainsi qu’en S13 et S14, 24
poulettes par traitement sont suivis par la méthode du
focal sampling (20 min par animal). En S21 et S22,
S42 et S43, S62 et S63, 24 poules issues de cages et
12 poules issues de chaque volière sont observées par
la même technique. Durant l’observation d’un animal,
tous les comportements suivants sont notés :
Nutrition : boire, manger ;
Confort : toilettage, bain de poussière ;
Déplacement : marche, course, vol ;
Observation (immobile regarde l’environnement) ;
Inactivité ;
Picage agressif et non agressif entre congénères ;
Exploration : picage de l’environnement, picorage du
sol, grattage de litière.
1.3. Suivi zootechnique
Un relevé hebdomadaire du nombre d’œufs pondus et
de leurs poids moyen est effectué en volière et en
batterie à partir de S18. Dans la partie volière, le
nombre d’œufs trouvés sur la litière et les caillebotis
est noté. Ces œufs sont automatiquement déclassés.
La consommation en aliment est relevée de façon
hebdomadaire.
1.4. Suivi de l’état corporel des animaux
Solidité osseuse :Avant le départ à l’abattoir en S68,
la solidité osseuse du tibia et de l’humérus droits de
32 animaux par volière et de 60 animaux issus de
cages est mesurée par un test de résistance à la rupture
(appareil Ericksen MST, série M).
Poids corporel, emplumement et lésions :
En S15, S27, S40, S66, 300 poules de T2 et T3 et 600
poules de T1 sont pesées individuellement.
L’emplumement est noté de 0 à 4 (très médiocre à état
excellent). Lors de ces contrôles, l’intégrité cutanées
est également notés.
A l’abattoir (semaine 68), un dénombrement des ailes
cassées et des lésions du poitrail, bréchet et abdomen
est réalisé.
1.5. Suivi sanitaire
Des animaux : Le programme sanitaire d’élevage
inclu a minima l’ensemble des dispositions
réglementaires concernant l’élevage des volailles et en
particulier celles fixées dans l’arrêté du 26 octobre
1998. Un suivi sérologique (mycoplasmes, maladie de
Newcasttle) et parasitologique (coccidies, helminthes)
ainsi qu’un relevé des mortalités et morbidités des
animaux en période d’élevage et de ponte est réalisé.
Des prélèvements de trachée et de poumon sont
réalisé pour des analyses histologiques en S21 (20
poules de T1, 12 de T2 et 10 de T3) et S64 sur 60
poules de T1 et 32 de T2 et T3.
Des œufs : En S37, S43 et S57 le dénombrement de la
flore aérobie mésophile (FAM) et des entérocoques
est réalisé à partir de 75 œufs par traitement.
De l’ambiance : Un suivi de l’empoussièrement via
un dosage des particules alvéolaires (0-12µm) et
totales (particules inhalables, 0-100µm) en suspension
dans l’air est réalisé tous les mois, en cages et en
volières. Un dénombrement de la flore aérobie
mésophile et des entérocoques est effectué à partir de
2 prélèvements d’air (un dans la partie volière, un
dans la partie cages), en S37, S43 et S57
1.6. Analyse statistique
p sera fixé par défaut à 0.05.
Les durées des différentes activités, les données
normales concernant la solidité osseuse et les poids
des animaux sont comparées entre les traitements par
ANOVA.
Quand les données ne sont pas normales, l’analyses
statistique est faite par un test de Kruskall-Wallis,
suivi d’un test de Mann-Witney comparant les
traitements deux à deux.
Les effectifs d’animaux obtenant un score de 0, 1 ou 2
et de 3 ou 4 (emplumement, lésions) seront comparés
entre les traitements par un test du chi deux.
Les résultats bactériologiques font l’objet une
transformation logarithmique base 10, afin d'obtenir
des lois normales. Les résultats de la FAM sont traités
en tant que variables continues, tandis que ceux
relatifs aux entérocoques sont traités en pourcentages
(présence/absence).
2. Résultats et discussion
2.1. Comportement
Les observations par scan sampling, réalisées sur les
poulettes baguées, indiquent que 57% des animaux
observés ont été vus sur 3 ou 4 niveaux verticaux en
volières (4 niveaux au total) et 94% ont été vus sur 2
ou 3 tiers de la volière (la surface de la volière est
séparée en 3 tiers dans le sens de la longueur). Les
résultats obtenus pour les poulettes élevées au sol
avec perchoirs (3 niveaux au total) indiquent
également un bonne fréquentation des différents
niveaux (89% des animaux vus sur 2 ou 3 niveaux).
Toutefois, 21/46 animaux n’ont jamais été vus sur la
plate-forme en caillebotis (équivalent du premier
niveau en volière). La distribution de l’aliment au sol
semble responsable de cette sous-fréquentation de la
plate-forme destinée au perchage.
En système de ponte, dans les deux volières, plus de
93% des poules ont été observées sur 3 ou 4 niveaux
et 70 et 62% (T2 et T3 respectivement) des animaux
ont été observés sur tous les niveaux. Cette
classification ne fait pas apparaître de différence
significative entre T2 et T3. En revanche, le nombre
d’animaux qui n’ont jamais été vus sur le caillebotis
le plus haut est significativement plus important en T3
qu’en T2 (15/80 vs 3/61, p=0.015). Ce caillebotis
étant le seul dépourvu de chaîne d’alimentation, il est
probable que les poules provenant du sol avec
perchoirs ne cherchent pas à y aller puisqu’elles ne
fréquentaient déjà pas toutes la plate-forme en
caillebotis dans le système poulettes.
Les observations par focal sampling permettent de
décrire la répartition moyenne des activités des
animaux sur 20 min, en fonction du traitement.
Que ce soit chez les poulettes ou les poules, l’activité
principale des animaux dans les trois traitements est
l’observation, puis viennent les comportements de
nutrition et de confort et enfin de locomotion. Chez
les poulettes, aucune différence significative sur ces
différents comportements n’a pu être mise en
évidence entre les traitements. Chez les poules, la
répartition des activités des animaux en cages est
différentes de celle des animaux en volières. En
S21/22 (Figure 1), les poules en cages consacrent
davantage de temps aux comportements de nutrition
(6.5/20 min) qu’en volières (T2= 4.6/20 min, T3=
3/20 min).
FIGURE 1 : répartition moyenne des activités en
fonction du traitement à 21/22 semaines (sur 20 min).
20
15
10
5
10
11
1
1
7
*
11
1
2
Déplacement
Confort
4
Nutrition
3
5
0
T1
Autres
Ferme les yeux
Observation
T2
3
T3
* : temps en
minutes
En revanche, le temps passé aux activités de confort
est significativement plus élevé (p=0.04) en volières
(T2= 3.1/20 min, T3= 3.9/20 min) qu’en cages (1.3/20
min). Ce résultat est principalement dû à une
augmentation des comportements de toilettage,
souvent réalisés par des animaux perchés. Les
activités locomotrices, restreintes en cages (0.5/20
min), occupent davantage de temps en volières (T2 =
1.4/20 min, T3 = 1.6/20 min, différence significative :
p<10-3). La répartition de ces activités varie peu au
cours de la période de ponte.
D’une façon générale l’élevage en volière permet aux
poules de développer un panel d’activités plus varié,
(résultats concernant le picage et les interaction avec
l’environnement non disponibles actuellement).
2.2. Zootechnie
Le Tableau 1 synthétise les résultats zootechniques
sur toute la période de ponte.
TABLEAU 1 : synthèse des résultats zootechniques
établie sur toute la période de ponte (de 121 à 477
jours d’âge).
T1
T2
T3
Pourcentage de ponte
85,78 83,76 79,86
Pourcentage d'œufs non
3,88
7,54
15,37
commercialisés
Mortalité (%)
2,76
3,90
5,22
Consommation par poule 112
117
114
et par jour (g)
Consommation par kg
2,12
2,24
2,31
d'œuf (kg)
Le taux de ponte est meilleur en cages (T1) qu’en
volières (T2, T3). En volière, le taux de ponte au sol
et sur les caillebotis est supérieur en T3 (8%
minimum) par rapport à T2. Les œufs pondus hors nid
n’étant pas commercialisés dans le circuit classique
(mais sous forme déclassée), le taux d’œufs non
commercialisés est important pour T3.
Les animaux logés en volières passent moins de temps
à s’alimenter que les animaux élevés en cages (cf
comportement). En revanche, les poules consomment
plus d’aliments en volières probablement en raison
d’une plus grande compétition alimentaire, d’une
dépense énergétique supérieure, particulièrement en
T2 où la productivité est supérieure à T3, (d’vantage
d’appétit à l’heure des repas) et d’une plus grande
diversité des activités alternatives. La vitesse
d’alimentation est donc supérieure en volière par
rapport aux cages.
L’indice de consommation (IC) est supérieur en
volière par rapport aux cages. Les différences de taux
de ponte et d’IC à la faveur des cages s’expliquent par
une dépense énergétique supérieure des animaux en
système volière.
Le taux de ponte hors nid est dû à une moins bonne
adaptation des poules provenant de l’élevage au sol
avec perchoir .Ces dernières ont mis plus de temps à
commencer à pondre (certains animaux ne trouvaient
pas les chaînes d’abreuvement et d’alimentation) et
ont moins bien utilisé les nids (œufs pondus au sol et
mangés) que les poules provenant de volières. Ce
constat va de pair avec la moins bonne utilisation du
caillebotis supérieur par les poules du T3.
2.3. Etat corporel des animaux
Résistance osseuse :La force nécessaire à la rupture
du tibia est significativement différente entre les
traitements. La différence entre T1 et T2 est très
significative (203.2 N vs 266.7 N, p<10-3). La
différence entre T1 et T3 est également significative
au seuil de 5% (203.2 N vs 230.5 N, p= 0.015). Il
existe également une différence significative entre T2
et T3 (p=0.004). Le tibia des poules est donc plus
résistant lorsque celle-ci sont logées en système de
ponte « volières » par rapport aux batteries et plus
encore lorsqu’elles ont été préalablement élevées en
volières. Le constat est plus flagrant encore pour
l’humérus. Le système volière, en sollicitant
davantage les déplacements verticaux des poulettes
(vols, bonds), procure aux animaux une meilleure
résistance osseuse (stimulation du métabolisme
osseux) que s’ils étaient élevés au sol, même avec des
perchoirs. Ces résultats confirment les résultats des
études déjà réalisées (Newman and Leeson, 1998).
Poids corporel, emplumement et lésions: En S27, soit
10 semaines après le passage en système de ponte, les
poids des poules sont similaires entre les 3
traitements. Puis, au cours de la période de ponte, le
poids des poules en cages continue à augmenter alors
que celui des poules en volières se stabilise. En S66,
les poules en cages sont plus lourdes (+ 100g) que les
poules en volières.
En S66, les résultats d’emplumement sont
significativement différents entre chacune des volières
et les cages (perte de plumes : 30.9%, 25.9% et 27.3%
des animaux pour T1, T2 et T3 respectivement, p<103
). Les pertes de plumes (localisées principalement au
cou et au poitrail) sont plus importantes chez les
poules en cages à cause de l’accumulation des
frottements entre le plumage et la porte de la cage
(entre autres), lors de la prise alimentaire.
Le pourcentage de blessures corporelles (rarement
dues au picage) est de 5.6% pour T2, 3.9% pour T3 et
3.1% pour T1. Le pourcentage plus élevé de blessures
en volières s’explique par la taille du groupe. En effet,
une taille de groupe supérieure à 100 animaux ne
permet pas l’installation d’une hiérarchie stable. Les
conflits entre animaux éclatent donc plus
fréquemment, par exemple lors de compétition pour
l’alimentation.
A l’abattoir, le taux d’ailes cassées est
significativement différent en volière et en cages
(p<10-3). Ce taux est faible en volière (entre 0.4 et
0.6%, n=1080) et élevé en cages (18.7% dont 3.7%
ont 2 ailes cassées, n=1080). Les causes de fractures
des ailes sont multiples : lors de l’enlèvement, ou à
l’abattoir où il arrive que des ailes cassent lors de
l’électronarcose, sous l’effet des contactions
musculaires fortes. Il convient de rappeler ici que la
faible résistance osseuse chez les poules en cages peut
également expliquer la recrudescence des fractures
lors de la manipulation de ces animaux.
2.4. Suivi sanitaire
Des animaux et de l’ambiance : aucune affection
particulière ne s’est déclarée au cours de l’essai. La
mortalité (Tableau 1) est plus importante en volière
(3.9% pour T2 et 5.22% pour T3) qu’en cages
(2.76%), toutefois les autopsies réalisées n’ont pas
révélé de lésions particulières. La mortalité plus
importante en début de ponte reflète davantage un
problème d’adaptation des animaux au système
d’élevage avec, par exemple, des animaux ne trouvant
pas les chaînes d’alimentation en hauteur (T3).
L’histologie révèle des lésions pulmonaires nettement
plus marquées chez les poules logées en volières. Ces
dernières sont davantage exposées aux poussières
contenues dans l’air (jusqu’à 31.6 mg de
poussières/m3, dont 6.7 mg alvéolaires) par rapport à
celles élevés en cages (jusqu’à 2.3 mg de
poussières/m3, dont 0.5 mg alvéolaires). Nos résultats
confirment ceux obtenus par Groot Koerkamp and
Bleijenberg, 1998.
La flore aérobie mésophile moyenne de l'air s’élève à
1.35 log c.f.u. /l d’air en cages et à 3.84 log c.f.u. /l
d’air en volières (pas de différence entre les deux
volières).
Des œufs : Les résultats observés montrent une
différence significative entre les œufs pondus par des
poules élevées en volières et ceux pondus par des
poules élevées en cages. En effet, la moyenne de la
contamination de la coquille observée pour les œufs
pondus en cages est de 4.79 log c.f.u./oeuf alors que
cette moyenne s'élève à 5.54 log c.f.u./œuf pour les
œufs pondus en volières. Cette contamination de la
coquille est, par ailleurs, plus élevée en fin de ponte,
quel que soit le système d’élevage). L'air très
empoussiéré des volières sert de support aux bactéries
fécales contaminant potentiel des œufs, des animaux,
voire de l’éleveur.
Les résultats disponibles nous permettent de constater
que l’élevage de poulettes destinées aux volières, au
sol, même avec des perchoirs, pose des problèmes qui
se répercutent sur le bien-être (comportement, critères
sanitaires) et les performances des animaux. La mise à
disposition de l’alimentation des poulettes en hauteur,
lors de la période d’élevage, semble impératif à une
bonne adaptation des animaux au système volière. En
revanche, en ce qui concerne les poulettes élevées en
volières, les résultats zootechniques ont été améliorés
par rapport à l’essai précédent.
Références bibliographiques
Abrahamsson, P., and Tauson, R., 1998. J. Appl.
Poult. Res. 7: 225-232.
Groot Koerkamp, P. W. G., and Bleijenberg, R., 1998.
Br. Poult. Sci. 39: 379-392.
Gunnarsson, S., Keeling, L. J., and Svedberg, J.,
1999. Br. Poult. Sci. 40: 12-18.
Johnsen, P. F., Vestergaard, K. S., and NorgaardNielsen, G., 1998. Appl. Anim. Behav. Sci.60: 25-41.
Newman, S., and Leeson, S., 1998. Poult. Sci.77:
1492-1496.
Savory, C. J., and Mann, J. S., 1999. Br. Poult. Sci.
40, 565-572.
Etude financée par la région Bretagne et le FEOGA
INFLUENCE DE LA PRESENCE DE TAILLIS DE SAULE A TRÈS COURTE ROTATION SUR LA
FREQUENTATION DES PARCOURS PAR LES POULETS LABEL
Lubac S.1, Senecaille M.1, Spérandio D.1, Desquennes A.², Arnould C.3, Faure J.M.3, Mirabito L².
1
ITAVI, 5 rue Hermann Frenkel, 69364 Lyon cedex 07,
2
ITAVI, 12 rue du Rocher, 75008 Paris
3
Station de Recherches Avicoles, INRA, Centre de Tours, 37380 Nouzilly
Résumé
En vue d'optimiser la gestion des parcours en production de poulet label, il a été choisi de tester l'impact
d'aménagements sur le taux de poulets présents sur le parcours, leur répartition sur la surface exploitée et, par
conséquent, sur la pression animale exercée sur la zone 0-10 mètres du bâtiment. Dans ce cadre, 3 élevages ont
été suivis au cours du printemps 2001, été 2001 et été 2002, scindés en 2 parties, l'une restant telle quelle servant
de témoin, l'autre implantée en taillis à très courte rotation de type saules. Ce couvert végétal a permis à
11 semaines d'âge, de multiplier le pourcentage de poulets présents par 1,95 , la surface visitée par 1,9 et de
diviser la densité en zone frontale par 1,5 par rapport à un parcours avec couvert végétal réduit. Des
aménagements de la zone frontale de type couloir de canisses ou tunnel ont aussi permis d'encourager les poulets
à explorer plus rapidement le centre du parcours.
Introduction
Le poulet Label Rouge a construit sa réputation sur
des qualités organoleptiques différentes et un système
d’élevage valorisant avec, notamment, l’accès à un
parcours extérieur. Cependant, l’évolution des
mentalités conduit aujourd’hui le citoyen à exiger de
l’agriculture la prise en compte, du bien être animal,
de la conséquence de ses activités sur
l’environnement, ainsi que l’atteinte d’une qualité
sanitaire toujours plus élevée. Dans ce but, la gestion
et l’aménagement des parcours doivent faire l’objet
d’une attention particulière, non seulement car la
présence d’un parcours constitue un critère essentiel
aux yeux du consommateur sur le plan du bien être
animal, mais aussi car des efforts doivent encore être
accomplis sur cette zone en matière de gestion des
déjections et de maîtrise des risques de
contaminations. Une des premières voies possibles
apparaît alors être celle de l’aménagement des
parcours qui peut permettre d’offrir aux animaux un
environnement mieux adapté à leurs besoins et
favoriser leur diffusion dans l’espace, limitant ainsi
les pressions environnementales et sanitaires
localisées.
En effet, au cours de travaux antérieurs, nous avions
émis l’hypothèse que favoriser la diffusion des
animaux dans l’espace permettait de réduire la densité
dans la zone située près des trappes (Mirabito et
Lubac, 2000). Une première étude visant à évaluer
l’effet d’un couvert de type vergers a été réalisée en
2001 (Mirabito et al., 2001) dans la Vallée du Rhône
et a permis de confirmer cette hypothèse. Toutefois, il
nous semblait nécessaire de confirmer ces travaux en
envisageant un autre type de couvert végétal du
parcours adapté à d’autres contextes pédoclimatiques. De ce point de vue, les taillis à très courte
rotation de saules nous sont apparus comme de bons
candidats en raison aussi de leur capacité à fixer
l’azote du sol. L’objectif du présent essai a donc été
de tester l’effet de ce type de couvert végétal sur la
fréquentation des parcours par les poulets label.
1. Matériel et méthodes
1.1. Dispositif
L’essai s’est déroulé sur les bâtiments d’élevage de
poulets Label Rouge des lycées agricoles de Cibeins
(01), des Sardières (01) et de Rambouillet (78).
Chaque bâtiment a été scindé en 2 lots de de 2200
poulets. Chaque parcours rattaché a été découpé de
même en 2 parties, comptant 2 m² par poulet au
minimum, l’une restant telle quelle servant de témoin
(parcours nu à Cibeins et Rambouillet, présence d’un
bosquet d’arbres en partie à Sardières), l’autre ayant
été aménagée : implantation de taillis à très courte
rotation de type saules (famille des Salicaceae genre
Salix). Ces derniers présentent le double intérêt de
pouvoir épurer le sol grâce à leur forte capacité
d’utilisation de l’azote, tout en produisant une
quantité importante de bois utilisable comme
combustible. Toutefois, leurs besoins hydriques sont
importants et par conséquent, ils ne peuvent être
implantés que dans des régions humides.
Cinquièmes Journées de la Recherche Avicole, Tours, 26 et 27 mars 2003
L’implantation a été réalisée sur chaque parcours en
mars 2000. Dans le cadre de cet essai, la densité était
de 5000 à 7000 boutures/ha. Les scions ont été
disposés en ligne, espacés de 50 cm les uns des autres.
2 lignes espacées de 75 cm formaient un double rang
distant du suivant de 3,25m à 3,75 m selon le
parcours. Le passage entre rangs à l’aide d’un tracteur
restait ainsi possible. En 2002, chaque scion avait
donné un arbre de 5 tiges d’environ 8 m de haut à
Cibeins, 6 m à Sardières et 3 m à Rambouillet. Aucun
recepage n’a été effectué.
concentration d’animaux dans cette zone est
importante.
La densité moyenne : nombre de poulets présents
sur cette zone ramenée à sa surface.
Les effets du facteur « type de parcours » ont été
analysés au moyen du test U de Mann Whitney.
L’ensemble des tests a été réalisés à l’aide de la
procédure non paramétrique de StatView 5.
2. Résultats
Suite aux mesures réalisées en 2001, il a été choisi de
compléter le dispositif en 2002 par un aménagement
de la zone frontale (0-10 m du bâtiment) en vue
d’accélérer la découverte du parcours par les poulets
(Figure 1). Deux structures ont été retenues :
une double rangée de canisses formant un couloir
(dimensions : 10m*1m*1m).
un « tunnel » confectionné à l’aide d’un filet
militaire (dimensions : 12m*1m*1m), rappelant
l’ombre de plantes arbustives.
Les deux aménagements étaient situés dans le
prolongement d’une trappe à environ 3 m du
bâtiment.
1.2. Suivi et analyses
Chaque parcours a été découpé en zones de 100 m²
par piquetage tous les 10 mètres. Le dénombrement
des animaux dans chaque zone a été effectué 3 fois
par jour (9h, 14h, 18h) à 7, 8, 9 et 11 semaines d’âge
des poulets, une fois par semaine. Les suivis ont été
effectués au cours d’une bande au printemps 2001
(très pluvieux) et en été 2001 pour les élevages des
lycées Cibeins et Sardières puis au cours d’une bande
l’été 2002 pour les 3 élevages. Ainsi, 7 lots sous
parcours saules ont été suivis, 4 avec un parcours
témoin nu et 3 avec un parcours témoin sous bosquet.
Les variables suivantes ont été calculées :
le pourcentage de poulets présents (%PP) :
nombre de poulets dans le parcours rapporté au
nombre total de poulets dans l’élevage,
la distance moyenne au bâtiment (DM) : distance
pondérée linéaire au centre des trappes en
considérant que tous les poulets présents dans une
zone sont situés au centre de celle ci.
La surface visitée (SV) : somme des surfaces des
zones où a été observé au moins un poulet,
Il a aussi été estimé en fonction des zones :
L’écart relatif (ER) à la valeur attendue sous
l’hypothèse d’une répartition aléatoire des poulets
dans les parcours. Il a été calculé après
regroupement des zones en quatre parties : de 0 à
10 m du bâtiment (zone dite frontale) ; de 10 à 20
m ; de 20 à 40 m, de 40 m jusqu’au fond du
parcours. Plus l’ER d’une zone est élevée, plus la
2.1. Pourcentage de poulets présents sur le
parcours
Globalement, le %PP est passé de 16 % à 18,6 % dans
les parcours nus et de 11,1 % à 36,8 % sur les
parcours avec saules entre 7 et 11 semaines d’âge
(Figure 2). L’écart augmentait avec l’âge pour
atteindre un pourcentage de poulets sur parcours avec
saules deux fois plus important que sur parcours nus
à 11 semaines (p<0,10). L’évolution de la présence
des poulets sur parcours avec bosquet est comparable
aux parcours avec saules.
Cette situation masque toutefois une variabilité au
cours de la journée. En effet, aucune différence n’est
apparue entre les différents types de parcours le
matin, période qui correspondait par ailleurs au
maximum de poulets sortis, en revanche, quelque soit
la semaine, le % PP tendait à être supérieur à 14h et à
18h dans les parcours avec saules (p<0,10) et avec
bosquets .
2.2. Distance moyenne au bâtiment et surface
visitée
En moyenne, les poulets du lot « nu » ont stationné
entre 14 m à 7 semaines et 21 m du centre du bâtiment
à 11 semaines d'âge (Figure 3). Une situation
différente a été observée pour ceux disposants de
couverts de saules qui sont passés de 15 m à 32 m
entre 7 et 11 semaines. A 11 semaines, la différence
de distance moyenne entre les deux types de parcours
était significative (p=0,04). L’évolution de ce résultat
au cours de la journée a été variable d’un élevage à
l’autre, contrairement au pourcentage de poulets
sortis.
Les animaux ont visité, au cours des différents âges,
660 m² à 1350 m² des parcours nu contre 795 m² à
2585 m² des parcours avec saules (Figure 4). L’écart
entre les surfaces visitées a été significatif dès l’âge
de 8 semaines. La surface visitée enregistrée a été
maximale à 9h puis a diminué à 14h et augmenté à
nouveau à 18h quelque soit le type de parcours.
2.3. Répartition des animaux sur le parcours
En zone frontale (0-10 m devant le bâtiment), le
nombre de poulets observés était environ 9 fois
supérieur à celui attendu en parcours nus et parcours
saules à 7 semaines (Figures 5 et 6). Le rapport n’était
plus que de 7 dans les parcours nus et 2 dans les
parcours avec saules à 11 semaines.
La différence à 7 semaines entre les zones les plus
chargées (0-10 m) et les moins chargées (40 m-fond)
étaient en moyenne de 1065 % en parcours nus et de
998 % en parcours saules. Elle a été réduite à 11
semaines à 744 % en moyenne en parcours nus, contre
322 % en parcours de type saules. Les saules
permettraient donc d’augmenter l’ homogénéité de la
répartition des poulets sur le parcours.
et +11% pour la DM). Au contraire, ces mêmes
variables connaissent une augmentation nette de 2001
à 2002 sur les parcours avec saules suite à la mise en
place des aménagements (et aussi à la croissance des
saules). Les rapports 2001/2002 sont en effets de + 44
% pour le %PP, + 29 % pour la SV et + 43 % pour la
DM.
3. Conclusion
La variabilité des résultats obtenus entre les parcours
peut s’expliquer par les conditions météorologiques,
sur lesquelles aucune action ne peut être menée, et sur
l’aspect du parcours, sur lequel nous avons agi en
implantant des saules et en aménageant la zone
frontale.
2.4. Densité en zone frontale
Comme nous venons de le voir, la zone 0 –10 m du
bâtiment est la zone la plus surchargée en
comparaison au reste du parcours. L’étude de la
densité d’animaux présents sur cette zone indique que
globalement pour les 3 âges confondus, la densité
était de 0,55 poulet/m² dans les parcours nus contre
0,37 poulet/m² dans les parcours avec saules et 0,32
poulet/m² dans le parcours avec bosquet (figure 7). La
concentration de poulets était donc supérieure de 55%
en parcours nu par rapport aux parcours saules. Mais,
aucun écart significatif n’a pu être mis en évidence du
fait de la faible taille de l’échantillon et de la forte
variabilité des résultats liée aux conditions
météorologiques et aux saisons suivies.
2.5. Intérêt des aménagements de la zone frontale
Pour estimer l’effet des aménagements, nous avons
comparé le nombre de poulets présents dans les zones
correspondantes à celui enregistré au niveau de la
zone sans aménagement équivalente (zone libre située
entre les aménagements de chaque parcours
expérimental). La densité des animaux était ainsi en
moyenne sur les 3 élevages 3,3 fois supérieures sur la
zone où était implantée les canisses et 2,3 fois
supérieures sur la zone où était implantée le tunnel par
rapport à la zone nue. Ces données masquent
cependant une certaine variabilité d’un élevage à
l’autre (Figure 8) qui s'explique par l'environnement
du parcours et les modalités d'implantation des
aménagements (orientation par rapport aux trappes).
Toutefois, en comparant les résultats entre les
2 élevages suivis, en 2001 sans aménagements de la
zone frontale et, en 2002 avec aménagements, nous
pouvons noter que le pourcentage de poulets présents,
la surface visitée et la distance moyenne au bâtiment
varient peu d’une année sur l’autre sur les parcours
témoin nus et bosquets (respectivement, les rapports
2002/2001 sont : -3% pour le %PP; +6% pour la SV
Ainsi, cette étude sur l’impact de l’implantation des
saules, nous a permis de répondre aux objectifs qui
étaient de :
favoriser la sortie des poulets le plus tôt possible
dès 6 semaines,
maximiser la surface d’exploitation du parcours en
augmentant l’homogénéité de la répartition des
animaux,
réduire la pression animale en zone frontale, zone
de forte concentration, en diminuant la densité à
ce niveau.
De plus, il ressort de cette étude un intérêt marqué des
aménagements de la zone frontale en vue d'attirer les
oiseaux au-delà de cette zone.
En conclusion, dans le but de favoriser l’occupation
de l’espace parcours par les poulets, il nous semble
nécessaire d’implanter, sur le parcours, un couvert
végétal composé d’arbres de haut jet, procurant une
ombre assez dense (assez bien feuillus), associé à des
plantes d’1 mètre de hauteur. En zone frontale,
l’utilisation des aménagements étudiés n’est pas
envisageable à grande échelle. Toutefois, leur
structure peut être reprise par l’implantation
d’arbustes ras en ligne, du bord du trottoir à 10 m du
bâtiment favorisant une conquête rapide de la zone
arborée.
Références bibliographiques
Mirabito L., Lubac S., 2000, Sc. et Tech. Avi., 34
Mirabito L., Lubac S., Quenum S., Gilbert M., 2001,
In : Journée Technique de la Sasso.
Nous remercions les lycées pour leur collaboration et
particulièrement R. Boulon, G. Collin et T. Lobé.
Cette étude a reçu le soutien financier de l’ANDA, de
l’ACTA/MRT et du PEP Volailles Rhône Alpes.
FIGURE 1 : Représentation schématique des parcours (sauf
Rambouillet : parcours expérimental latéral et derrière bâtiment)
FIGURE 2 : Pourcentage de poulets présents en fonction de l’âge
et du parcours (± Erreur Standard de la moyenne - ES)
,55
,5
T
,45
%PP
,4
T
,35
bosquet
nu
,3
saules
,25
,2
,15
,1
,05
7
SAULES
TUNNEL
8
9
FIGURE 3 : Distance moyenne (en m ± ES) par âge et par
parcours
45
FIGURE 4 : Surface visitée (en m² ± ES) par âge et par parcours
3500
*
40
*
3000
*
35
*
bosquet
30
nu
SV
2500
DM
11
CANISSES
saules
25
bosquet
nu
2000
saules
1500
20
1000
15
10
7
8
9
500
11
FIGURE 5 : Ecart relatif (en %) à la valeur attendue par zone et
par parcours à 7 semaines (ER= (observé- attendu)/observé)
7
8
9
11
FIGURE 6 : Ecart relatif (en %) à la valeur attendue par zone et
par parcours à 11 semaines
nu
40m -fon d
.
nu
bosquet
saules
20-40m
.
10-20m
.
0-10m
.
-100%
100%
300%
500%
700%
900%
.
20-40m
.
bosquet
saules
10-20m
.
0-10m
.
1100%
FIGURE 7 : Densité en zone frontale (en poulet/m² ± ES) par âge
et par parcours
-100% 100%
300%
500%
700%
900% 1100%
FIGURE 8 : Ecart de densité (poulets/m² ± ES) sur les zones avec
aménagements par rapport à la zone nue (en %)
,9
700
,8
600
,7
500
bosquet
,6
nu
,5
saules
en %
Densité en zone frontale
40m -fon d
400
canisses
tunnel
300
,4
200
,3
100
0
,2
7
8
9
11
cibeins saules
sardières saules
rambouillet saules
Pour l'ensemble des figures, test nu/saules :
* : p < 0,05 ; T : p < 0,10
EFFET D’UNE DISTRIBUTION DE BLE ENTIER EN ALIMENTATION SEQUENTIELLE
SUR LES COMPORTEMENTS ET LES LESIONS DE PICAGE CHEZ LA DINDE
Mirabito Luc, André Laurent, Bouvarel Isabelle
ITAVI 28, rue du Rocher, 75 008 Paris
Résumé
L’impact d’une distribution de 10 % de la ration des dindes sous forme de blé entier a été testé dans deux
élevages disposant chacun de deux bâtiments similaires. Dans le bâtiment expérimental, la distribution de blé
avait lieu en libre choix de 3 à 7 semaines d’âge puis en alimentation séquentielle avec un alimentaire
complémentaire. Globalement, cette technique a eu peu d’effet sur les comportements de picage et les lésions
observées à l’abattoir, les quelques différences notées dans un élevage pouvant être mises en relation avec
d’autres facteurs. De même, elle s’est avérée délicate à mettre en œuvre en raison notamment d’une faible vitesse
de consommation du blé par les mâles. En conclusion, même si les résultats obtenus mériteraient d’être
confirmés, ce type de stratégie ne nous a pas semblé pertinent dans l’objectif d’enrichir le milieu chez la dinde
pour limiter les phénomènes de picage en raison notamment du coût et des difficultés techniques liés à sa mise
en œuvre.
Introduction
Le phénomène du picage peut constituer un problème
pour l’élevage des volailles. Dans le cas de la dinde,
certains auteurs n’hésitent pas à considérer qu’il s’agit
du principal problème de bien-être. Or, actuellement,
le débéquage et la réduction de l’intensité lumineuse
sont les solutions les plus utilisées pour lutter contre
les conséquences du picage. Mais ces pratiques font,
de plus en plus, souvent l’objet de critiques sur le plan
du bien-être animal. Par conséquent, au cours de ces
dernières années, c’est une troisième voie qui a
surtout été explorée, celle de l’enrichissement du
milieu.
L’objectif général de ces approches est de substituer,
aux activités de picage des congénères, des
comportements de picage d’objets inanimés. Cela
peut se faire au travers de la fourniture d’éléments
attractifs (brin de paille, plaque métallique, etc.) ou
par le biais d’une modification de la présentation de
l’aliment visant à augmenter le temps de
consommation. Cette dernière voie ayant été peu
explorée chez la dinde, l’objectif de cette étude a donc
été de tester l’impact d’une distribution de blé entier,
en alternance avec un aliment complémentaire, sur le
comportement des dindes et la fréquence des lésions
cutanées.
1. Matériels et méthodes
Cette étude a été mise en place au sein de deux
élevages implantés dans le Maine et Loire. Chaque
élevage comprenait deux bâtiments (témoin et
expérimental) de type obscur avec une ventilation
statique d’une surface de 800 m² pour l’élevage A et
600 m² pour l’élevage B. Les densités initiales étaient
proches de 9,7 animaux/m² (élevage A) et 7,6
animaux/m² (élevage B). Un desserrage a été effectué
à 6 semaines pour les ramener à 6,4 pour les mâles et
9,7 pour les femelles dans l’élevage A et à 6,4 et 9,1
dans l’élevage B. Dans les quatre bâtiments, la litière
était constituée d’un mélange paille/copeaux. Le
programme lumineux était fractionné de type 1h00
Lumière/1h00 Obscurité. Les oiseaux étaient de
souche BUT 9, débéqués à 8-10 jours et la mise en
place a eu lieu au mois de mai.
Le mode d’alimentation des animaux du lot
expérimental a comporté trois périodes distinctes. De
0 à 18 jours, les animaux ont reçu un aliment complet.
De 18 à 49 jours, du blé a été mis à disposition dans
des mangeoires séparées. Les animaux disposaient
donc de celui-ci, simultanément (en « libre choix »),
avec un aliment granulé complémentaire (surdosé par
rapport au témoin par retrait de 10 % de blé de la
formule) distribué dans les chaînes d’alimentation. A
partir de 7 semaines et jusqu’à l’abattage, l’apport de
blé a ensuite été effectué selon le principe de
l’alimentation séquentielle. Entre 7h30 et 8h00,
l’éleveur basculait la vis d’approvisionnement sur le
silo blé. Les animaux disposaient alors de celui-ci
dans la chaîne d’alimentation durant 3 phases
lumineuses d’une heure (total d’environ 7 heures),
cette valeur diminuant dans le temps jusqu’à une
phase de deux heures (total d’environ 4 heures) vers
12 semaines. Au cours du reste de la journée, les
animaux
recevaient
l’aliment
granulé
complémentaire. Quel que soit l’âge des animaux,
l’apport de blé entier visait à représenter 10 % de la
consommation spontanée.
Cinquièmes Journées de la Recherche Avicole, Tours, 26 et 27 mars 2003
Le comportement des animaux a été enregistré au
travers de la réalisation de suivis individuels (« focal
sampling »). Après découpage de l’aire de vie des
animaux en 8 zones virtuelles, un oiseau par zone, par
sexe et par bâtiment a été observé durant 5 minutes
(enregistrement sur ordinateur grâce au logiciel
Etholog 2.0). L’individu suivi dans une des zones
(ordre choisi par tirage au sort avant mesure)
correspondait au premier individu repéré qui entrait
dans cette zone ou dans le cas d’une absence de
déplacement, le premier individu qui se levait au sein
de cette zone. Les observations ont été effectuées en
semaine 6, 8, 10, 12 et 14. Chaque lot était observé,
au cours d’une journée, deux heures le matin (entre
9h00 et 13h00) et deux heures le soir (entre 17h30 et
22h00) soit 32 animaux par bâtiment et sexe. Le
répertoire comportemental considéré était le suivant :
« mange granulé », « mange blé », « pique aile »,
« pique tête », « pique dos et queue ».
Une pesée collective d’un échantillon de 50 animaux
par sexe et par bâtiment était réalisée chaque semaine
et cette donnée a été utilisée à titre informatif. La
mortalité était suivie quotidiennement. La qualité des
carcasses a été mesurée lors de l'abattage des femelles
à 12 semaines, et des mâles à 16 semaines. Le relevé
des lésions avait lieu après le poste de plumaison sur
la partie dorsale de 200 individus. Les lésions relevées
étaient les suivantes : griffure, plaies avec escarre,
picage.
Pour chaque individu observé, nous avons calculé
deux variables :
- la fréquence des comportements (nombre
d’occurrences / durée)
- la durée moyenne d’une activité (pour les
comportements alimentaires uniquement)
Ces deux variables ont été traitées au moyen du test U
de Mann-Whitney (Statview 5). Nous avons testé
l’effet du type d’alimentation à âge fixé et,
globalement, sur les périodes de distribution des deux
aliments (blé le matin et granulé le soir). Pour cette
deuxième approche, nous avons considéré l’ensemble
des individus observés entre 8 et 14 semaines. Pour
ces analyses, nous avons traité les résultats comme si
les individus observés étaient indépendants. Cette
approximation limite le résultat des tests mais permet
de dégager d’éventuelles tendances qui devraient être
ultérieurement validées par un autre dispositif
expérimental. Les effets du type d’alimentation sur la
mortalité et la fréquence des lésions ont été testés au
moyen du test du chi-deux.
2. Résultats
Si les animaux se sont intéressés au blé dès le premier
jour de distribution, l’objectif des 10 % de
consommation n’a été atteint qu’après 2 semaines
avec difficulté toutefois chez les mâles notamment
dans l’élevage A. Cette quantité a ensuite été
consommée quotidiennement dès qu’elle a été
distribuée dans les chaînes d’alimentation. La durée
de distribution variait cependant du tiers (à 7
semaines) au sixième (à l’abattage) de la journée.
A 6 semaines, âge auquel les animaux des lots
expérimentaux avaient un « libre choix » entre blé et
aliment complémentaire, 123 oiseaux (mâles et
femelles des deux bâtiments expérimentaux) ont été
observés. Seuls 5 ont alors consommé du blé contre
45 qui ont consommé du granulé. Aucun animal n’a
consommé au cours d’une même séquence les deux
aliments. Dans les deux sexes, la fréquence des accès
au granulé était supérieure dans le lot expérimental
mais non significativement différente de celle du lot
témoin. Par contre, chez les mâles, la durée des
phases
de
consommation
du
granulé
(complémentaire) était supérieure dans le lot
expérimental (37 s pour le lot Témoin vs 50 s pour le
lot expérimental - p=0,04). A partir de 7 semaines
(tableau 1), le mode d’alimentation n’a pas eu d’effet
sur le comportement alimentaire, le matin. En
revanche, pendant la période d’accès à l’aliment
complémentaire (soir), la fréquence des accès à la
mangeoire était significativement supérieure chez les
mâles du lot expérimental (p=0,04) et une tendance
apparaissait chez les femelles (p=0,10). Toutefois, il
convient de noter que ces tendances résultent surtout
de la situation observée dans l’élevage B. En
revanche, la durée des phases de présence à la
mangeoire n’était pas influencée par la nature de
l’aliment consommé.
En ce qui concerne la mortalité, dans l’élevage A,
nous avons obtenu une différence significative chez
les mâles durant la période de libre choix (0,50 %
pour le lot Témoin vs 0,15 % pour le lot Expérimental
–p=0,003) et, dans les deux sexes, durant la première
phase de distribution séquentielle, c’est à dire
jusqu’au départ des femelles (0,49 % vs 0,16 % –
p=0,03 chez les femelles et 0,75 % vs 0,26 % –
p=0,01 chez les mâles). Ces résultats traduisaient
vraisemblablement un meilleur état sanitaire du
bâtiment expérimental dans ce site mais n’ont pu en
aucun cas être mis en relation avec d’éventuels
phénomènes de picage. Dans l’élevage B, aucune
différence n’a été enregistrée.
En matière de croissance, nous avons observé une
diminution globale de 6 % du poids des femelles à 77
jours dans le lot expérimental (4986 g vs 5318 g pour
le lot Témoin), celle-ci étant surtout marquée dans
l’élevage A (4900 g vs 5480 g soit environ
– 10
%). Ce phénomène s’explique sans doute par la faible
vitesse de consommation du blé par les mâles dans cet
élevage. Or, comme ce sont eux qui déclenchaient la
mise en route des chaînes d’alimentation, cela a sans
doute entraîné un rationnement des femelles.
A 6 semaines, les femelles du lot témoin tendaient à
piquer plus fréquemment les ailes et la queue de leurs
congénères que celles du lot expérimental (p=0,06 et
p=0,08). Au-delà de 7 semaines, nous avons observé
ponctuellement certaines différences significatives
avec une réduction de la fréquence des picages dans le
lot expérimental. Cela était le cas à 8 semaines pour le
picage de la queue (p=0,04) et à 14 semaines pour le
picage des ailes (p=0,01) chez les mâles. De même, à
12 semaines chez les femelles, nous n’avons pas
observé de picage de la tête dans le lot expérimental.
Sur l’ensemble de la période d’alimentation
séquentielle (tableau 2), l’analyse fait apparaître une
réduction significative de la fréquence du picage des
ailes dans les deux sexes (p=0,02) durant la phase de
distribution d’aliment complémentaire. Cependant, un
résultat inverse mais non significatif était observé
pendant la distribution de blé.
Chez les mâles, le type d’alimentation n’a pas eu
d’effet très marqué sur la fréquence des lésions
(tableau 3). Par contre, chez les femelles, la fréquence
des plaies avec escarre était nettement supérieure dans
le lot témoin (chi-deux=8,533 – p<0,01). Ce résultat
était lié au seul élevage A (chi-deux=28,249 –
p<0,0001). Chez les mâles, les lésions de type picage
étaient pratiquement absentes. Par contre, si cela
restait une atteinte mineure chez les femelles, il faut
noter que cette fréquence était significativement plus
élevée dans le lot témoin (chi-deux=7,446 – p<0,01)
mais, de nouveau, ce résultat ne se vérifiait que dans
l’élevage A (chi-deux=6,51 – p=0,01).
Discussion et conclusion
A la différence des poulets (Noirot et al., 1999), les
dindes ont montré peu d’intérêt pour le blé entier.
Cette réticence s'est, de plus, maintenue tout au long
de la période d'élevage dans le cas des mâles, ce qui a
posé des problèmes pratiques au niveau du
fonctionnement des chaînes et sans doute entraîné un
rationnement des femelles du lot expérimental.
Malgré cela, et contrairement à ce que nous avons pu
observer dans d’autres essais (données non publiées),
cette technique n’a pas entraîné de réactions
comportementales marquées des animaux comme, par
exemple, un arrêt de la fréquentation des mangeoires.
C’est
vraisemblablement
la
« vitesse
de
consommation » qui a été modifiée mais celle-ci
n’était cependant pas spécifiquement mesurée. Sur le
plan zootechnique, l’apport de blé a peut-être eu un
effet bénéfique sur la mortalité, déjà constaté chez les
poulets par Noirot et al. (1998) mais ce résultat doit
être confirmé en raison du dispositif expérimental mis
en œuvre.
La modification de la présentation de l’aliment a eu
peu d’influence sur les comportements de picage. En
ce qui concerne le picage des ailes, la fréquence était
certes significativement plus élevée le soir dans le lot
témoin mais cela ne constituait qu’une inversion des
tendances observées le matin. Sur l’ensemble de la
journée, les bilans étaient souvent nuls au cours des
différentes semaines. Nous ne pouvons donc sans
doute pas exclure d’effet du type d’alimentation mais
l’objectif d’une réduction globale de la fréquence des
comportements de picage ne peut vraisemblablement
pas être atteint par cette technique.
Il faut cependant noter que le type d’alimentation a
aussi permis une réduction de la fréquence des lésions
de picage des carcasses et des plaies avec escarre.
Mais ce résultat est essentiellement lié au cas d’un
site. Or, sur ce site, durant les dix premières semaines
d’élevage, l’intensité lumineuse était légèrement
supérieure dans le lot témoin (7 à 10 lux contre 3 à 5
lux dans le bâtiment expérimental) ce qui pourrait
expliquer la moindre fréquence des lésions.
En conclusion, l’apport de blé entier au travers d’une
distribution séquentielle de l’aliment, telle que mise
en ouvre dans cet essai s’est avérée délicate sur le
plan technique et peu efficace dans l’objectif de
réduire la fréquence du picage des congénères. Ce
résultat semble confirmer les observations de Crowe
et Forbes (1999) qui en réalisant une distribution de
grain dans la litière n’ont pas enregistré d’effets
positifs. Du strict point de vue expérimental, ce
résultat mériterait confirmation en raison des limites
de notre dispositif. En effet, de nombreux biais sont
intrinsèques à la réalisation de ce type
d’expérimentation en élevage. En revanche, l’intérêt
d’une telle approche est de tester « l’acceptabilité »
d’une technique. Or, de ce point de vue, les résultats
se sont avérés très négatifs. Aussi, sachant qu’en
station expérimentale les solutions recourrant à un
enrichissement matériel (Sherwin et al., 1999 ;
Martranchar et al., 2001) ont semblé prometteuses, il
nous apparaît, par conséquent, préférable aujourd’hui
d’envisager une validation et une adaptation à
l’élevage de ce type de stratégie.
Références bibliographiques
Crowe R., Forbes JM 1999 BPS 40 S11
Sherwin CM, Lewis PD, Perry GC 1999 BPS 40(5),
585-591
Martrenchar A., Huonnic D., Cotte JP 2001 BPS
42(2), 161-170
Noirot V., Bouvarel I., Barrier-Guillot B., Castaing J.,
Zwick J.L., Picard M. 1999 3èmes JRA, ITAVI Ed.,
117-120
Remerciements
Nous remercions les éleveurs et les sociétés INZO° et
CAVAL pour leur aide au cours de la réalisation de
cette étude.
Cette étude a reçu le soutien financier de l’ANDA, de
la DGAL, de l’OFIVAL et du CIDEF.
TABLEAU 1 : Fréquence (nombre occurrences/ 5 minutes) et durée (en italique et en secondes) du
comportement « mange » entre 8 et 14 semaines chez les mâles et 8 et 12 semaines chez les femelles en fonction
de la période et du type d’alimentation (N : Nombre d’animaux observés pour la fréquence et Nombre d’animaux
ayant mangé pour la durée) - a,b : p<0,05 test de Mann-Whitney
Matin (blé)
Mâle
Soir
Matin (blé)
Femelle
Soir
T
moy
0,16
58
0,12
62
0,27
59
0,19
57
N
110
23
117
22
76
23
92
18
±
±
±
±
±
±
±
±
±
ETM
0,04
6
0,03
9
0,06
10
0,05
10
a
N
109
23
115
36
78
23
95
29
E
moy
0,17
56
0,21
67
0,30
65
0,25
54
±
±
±
±
±
±
±
±
±
ETM
0,04
10
0,04
7
0,08
11
0,05
7
b
TABLEAU 2 : Fréquence (nombre occurrences/ 5 minutes) des comportements de picage entre 8 et 14 semaines
chez les mâles et 8 et 12 semaines chez les femelles en fonction de la période et du type d’alimentation (N :
Nombre d’observation) - a,b : p<0,05 test de Mann-Whitney
Mâle
Femelle
T
E
T
E
moy ± ETM
N
moy ± ETM
N
Moy ± ETM
N
moy ± ETM
0,32 ± 0,09
109
0,52 ± 0,16
76
0,46 ± 0,21
78
0,97 ± 0,32
117
0,99 ± 0,28
a 115
0,30 ± 0,09
b 92
1,22 ± 0,30
a 95
0,56 ± 0,18
Tête Matin (blé) 110
0,32 ± 0,10
109
0,12 ± 0,05
76
0,29 ± 0,11
78
1,01 ± 0,42
117
0,20 ± 0,11
115
0,12 ± 0,05
92
0,37 ± 0,25
95
0,58 ± 0,39
Queue Matin (blé) 110
0,07 ± 0,04
109
0,07 ± 0,05
76
0,04 ± 0,04
78
0,14 ± 0,07
0,05 ± 0,03
115
0,02 ± 0,02
92
0,08 ± 0,04
95
0,08 ± 0,05
N
Aile Matin (blé) 110
Soir
Soir
Soir
117
TABLEAU 3 : Pourcentages de carcasses ayant au moins une lésion sur la partie dorsale en fonction du type
d’alimentation (n=200 par élevage, sexe, alimentation) – a,b : p<0,05 test du chi-deux
mâle
Griffures
Plaies
Picage
T
8.8
17.5
1.5
Ensemble
Femelle
E
T
E
9.3
23
16.8
23
49a
38.8b
1.3
6.3a
2.5b
A
mâle
T
12
16
2
E
11
22.5
2
femelle
T
E
35
19.5
67a 40.5b
6.5a 1.5b
B
mâle
T
5.5
19
1
E
7.5
23.5
0.5
femelle
T
E
11
14
31
37
6
3.5
b