Des étoiles… pourquoi faire ? - Association Romande des Hôteliers
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Des étoiles… pourquoi faire ? - Association Romande des Hôteliers
mars 2011 – No 65 INFOTELLERIE Des étoiles… pourquoi faire ? Depuis quelques années, une autre association patronale, dont l’hôtellerie n’est pas la spécialité première, se bat pour avoir le droit de décerner des étoiles à ses membres hôteliers. Elle vient de l’obtenir dans un procès relatif à la propriété intellectuelle. Sans entrer dans cette polémique qui relève d’une politique d’entreprise et d’une guerre économique, c’est pour moi l’occasion de faire le point sur la classification des hôtels en Suisse. La classification des hôtels par hotelleriesuisse a plus de 30 ans d’existence. Révisée et améliorée tous les cinq ans, elle est un savant dosage d’équipements de confort et de services offerts au client. Elle a servi de base à une classification adoptée par 10 pays européens à la fin de l’année dernière. Les normes de classement des hôtels sont donc harmonisées sur un marché de près de 200 millions de consommateurs. A ce socle commun, la classification de hotelleriesuisse rajoute quelques spécificités helvétiques telles que des exigences plus élevées sur la sécurité, la catégorie « swisslodge » pour des établissements particuliers (petits hôtels, cabanes de montagne, back packers, etc.), les spécialisations et le développement durable. Trois organismes, indépendants de la direction de hotelleriesuisse, gèrent ce système auquel Suisse Tourisme et les associations de consommateurs participent : une commission se charge d’élaborer les normes, une autre, composée d’une quarantaine d’hôteliers formés spécialement, effectue les visites des hôtels pour les classer et la troisième traite les éventuels recours contre les décisions de la précédente. Tout système est perfectible, mais plus de trente ans d’expérience et le fait qu’elle ait largement inspiré l’harmonisation européenne assurent une certaine crédibilité à la classification de hotelleriesuisse. Le but de la classification est d’informer le client sur ce qu’il est en droit d’attendre dans un hôtel. C’est lui, le client, l’hôte, qui doit être au centre des préoccupations des hôteliers, de leurs associations patronales et de toute la branche touristique. Les étoiles ne sont pas là pour flatter l’ego de l’hôtelier. Il vaut mieux être le meilleur des 3 étoiles de sa ville, avec, peut-être, la mention « superior » en plus, que d’être au bas de l’échelle des 4 étoiles. Pour l’hôtelier, les étoiles sont un élément de positionnement sur le marché et il a tout intérêt, à long terme, à ce que son éta- blissement tienne toutes les promesses de sa catégorie. Alors que l’harmonisation est en route au niveau européen, il est consternant qu’un deuxième système de classification soit créé dans un aussi petit pays que la Suisse. Si le bien de l’ensemble de la branche touristique, de l’hôtellerie et surtout du client était au centre de ses préoccupations, l’autre association aurait accepté de collaborer avec hotelleriesuisse à une classification commune, comme cela lui avait été offert en 2005. Au lieu de cela, nous aurons une salade d’étoiles recouvrant des réalités différentes dans les établissements. Le client sera parfois déçu, l’hôtellerie suisse perdra en crédibilité et l’ensemble du tourisme suisse souffrira de ces normes différentes sous le même symbole. Hotelleriesuisse est certainement prête à œuvrer pour le bien de l’ensemble de la branche, du tourisme et en faveur du client. Peut-on espérer que l’autre association abandonne sa politique de « défense de la boutique » pour se rallier à une vision d’avenir plus large et à une collaboration bénéfique à toute l’hôtellerie ? Philippe Thuner, Président d’Hôtellerie romande Gilles Perrin Stefano Brunetti Imfeld Pages 14-15 Marc Caira Pages 4-5 Pages 8-9 L’invité Pierre-Frédéric Guex, président de Vaud-Cliniques « Il y a 50 ans, les cliniques vaudoises étaient soumises à la patente d’hôtel » L’Association vaudoise des cliniques privées est une fringante quinquagénaire. Fondée le 20 octobre 1961, l’association rebaptisée Vaud-Cliniques réunissait au départ 13 établissements. Un demi-siècle plus tard, elle en compte à peu près le même nombre (11) à Lausanne, Montreux et la région de Nyon. Les onze établissements privés vaudois emploient plus de 2100 collaborateurs et recourent à environ 1000 médecins travaillant la plupart en indépendants. Lausanne regroupe quatre cliniques de soins aigus (Bois-Cerf, Cecil, Montchoisi et La Source), la région de Montreux en recense quatre (La Prairie, Biotonus Bon Port, Valmont et CIC Riviera) et celle de Nyon trois (Genolier, La Lignière et la Métairie). A elles seules, elles réalisent un chiffre de 370 millions de francs (2009) pour une masse salariale de 220 millions. A l’origine des cliniques vaudoises, on trouve l’initiative privée d’un médecin ou d’un organisme privé, sans intervention de l’Etat : Placide Nicod à Bois-Cerf, le Dr Piguet à Yverdon ou le professeur Niehans à Montreux. Quand le premier président Philippe Heimann a voulu réunir les cliniques du canton pour créer une organisation autonome, elles étaient membres d’une section de la Société des hôteliers et soumises comme telles à une patente d’hôtelier ! Venant de Leysin pour prendre la direction de la Clinique des Charmettes à Lausanne dont il était le propriétaire, Philippe Heimann a mis fin à cette anomalie. Une clinique est un établissement hospitalier, avec quelques étoiles certes, mais pas un hôtel. Les temps changent. En 1961, une tâche prépondérante de l’association était l’organisation de joutes sportives. En 50 ans, la donne qui a le plus changé concerne les charges administratives. Elles se sont nettement alourdies notamment pour les assurances et l’Etat, les accréditations ISO, les statistiques et la codification. Et ce n’est pas fini : en 2012, les cliniques non-listées ne seront pas reconnues par l’assurance de base, tant qu’elles n’auront pas signé d’accords avec les caisses-maladie. Pour les cliniques qui ont vécu jusqu’à présent sans aide de l’Etat, la loi va changer. L’Etat devra verser sa part de financement pour tous les hôpitaux et cliniques qui figureront sur la liste LAMal. Il pourrait lui en coûter jusqu’à 60 millions, si toutes les cliniques étaient retenues. Ce transfert de charges, voulu par le législateur, pénalise les finances cantonales mais n’apporte pas un sou de plus aux cliniques. Les cliniques ne sont pas plus chères que les établissements publics. Les tarifs « privés » sont pratiquement identiques entre cliniques et hôpitaux, mais eux bénéficient de subventions et de garanties de la dette. Les salaires y sont aussi 8% plus élevés, ce qui fausse la concurrence. Jusqu’à ce jour, ces inégalités condamnent les cliniques à avoir des coûts de fonctionnement plus bas si elles veulent assurer leur pérennité. Pour que les patients qui pourront se faire soigner en cliniques privées avec l’assurance de base continuent à payer l’assurance complémentaire, il leur appartiendra de faire la différence, comme la classe « affaires » des compagnies aériennes. Les soins seront les mêmes, comme pour un avion qui offre la même sécurité et le même horaire à tous, mais la prise en charge et le confort seront meilleurs. Cela a un prix. Les établissements privés seront payés pour une opération déterminée selon un forfait uniforme en Suisse (les DRG) : par exemple, 15 000 francs pour une prothèse de la hanche. La qualité, elle, pourra être contrôlée. La concurrence sera ouverte entre les établissements. S’il y a des suppléments dus à une prise en charge privée, elle sera Impressum Infôtellerie Suisse romande : Magazine trimestriel d’informations touristiques et économiques de l’Association Romande des Hôteliers. Editeur : Association Romande des Hôteliers, chemin de Boston 25, 1004 Lausanne, tél. : +41 21 617 72 56, fax : +41 21 617 72 27, e-mail : [email protected]. Site internet: www.hotellerieromande.ch Impression: PCL Presses Centrales SA, Renens Rédacteur responsable : Olivier Grivat. Ont collaboré à ce numéro : Philippe Thuner et Olivier Grivat. Adresse de la rédaction : Olivier Grivat, journaliste RP, chemin de Leisis 5a, 1009 Pully, tél. +41 79 412 22 72, e-mail : [email protected]. 2 payée par l’assurance complémentaire. Que certaines cliniques soient d’accord de figurer sur la liste LAMal n’est pas la vraie question. Nous sommes face à une situation où l’on ne connaît pas la route à emprunter : il est difficile de savoir si on aura besoin d’un 4x4 ou d’une Fiat 500. Les cliniques ne demandent pas de traitement de faveur. Elles veulent que l’on tienne compte de leurs caractéristiques et de leur offre en participant à la planification. Les dispositions cantonales doivent être les moins contraignantes possibles pour l’ensemble des établissements sanitaires. Il faut à tout prix éviter un nivellement par le bas. Pierre-Frédéric Guex Président de Vaud-Cliniques Sommaire 3Actualité 4-5 Le Bocuse d’Or à Lyon 6-7 L’Hôtel de l’Aigle à Couvet (NE) 8-9 Le train du Cervin 10 Le futur casino de Neuchâtel 11-12 Nouveaux membres 13 Les sites de notations d’hôtels 14-15 L’Hôtel de la Paix a cent ans 16 En bref – Agenda Infôtellerie – Mars 2011 – No 65 Actuel L’hôtellerie sous la pression de l’euro Le tiers des étrangers qui visite la Suisse paie ses factures en euros. Les conséquences se font sentir, surtout en station. Pour calmer la fièvre, Berne décide d’allouer 24 millions à la promotion du tourisme pour 2011 et 2012. Les chiffres sont là : le secteur touristique est le plus touché par la cherté de la monnaie suisse, beaucoup plus que le secteur des machines ou celui des pharmas. Au point que le directeur de Suisse Tourisme, Jürg Schmid, tire la sonnette d’alarme. La situation paraît surtout préoccupante au Tessin, très sensible au climat économique de l’Italie. Hausse des prix : + 23% en deux ans La Suisse est victime d’un double phénomène : d’une part, le tiers des étrangers qui séjournent en Suisse paient leur séjour en euro, d’autre part la force du franc incite toujours plus de Suisses à passer leurs vacances hors du pays. Selon le patron de SuisseTourisme, les prix en Suisse ont augmenté de 23% ces deux dernières années et la situation est devenue critique. Le tourisme de loisirs – plus frappé que le tourisme d’affaires, comme le confirme Stefano Brunetti Imfeld, de l’Hôtel de la Paix à Lausanne (voir pages 14-15), représente 70% du chiffre d’affaires global. En 2011, la baisse de ce secteur devrait osciller entre 3 et 5%. Pour l’emploi de la branche, le baromètre n’est pas au beau fixe : avec 175 000 emplois (245 000 si l’on tient compte des effets indirects), il représente 5% du PIB helvétique. Quant au tourisme d’affaires, le franc fort n’arrange pas les affaires des hôteliers genevois ou zurichois : selon l’étude réalisée chaque année par le spécialiste britannique HRG, Genève s’est hissée en 2010 au 3e rang des villes les plus chères du monde derrière Moscou et New York (Genève était 7e en 2009). Zurich se hisse à la 5e place (12e en 2009). Le prix moyen d’une chambre à Genève est monté à CHF 317.– contre CHF 403.– à Moscou, où les nuitées en monnaie nationale ont pourtant baissé de 12%. Les baisses les plus fortes ont été enregistrées à Abu Dhabi (–25%), Dublin (–11%) et Athènes (–9%). Pour Berne : une aide provisoire ? Pour compenser le franc fort, le Conseil fédéral a décidé de mettre 24 millions (+14%) supplémentaires à disposition de la promo- Infôtellerie – Mars 2011 – No 65 tion du secteur touristique. Mais ce ne pourrait être qu’une victoire d’étape : dans le cadre de son programme d’économies, le gouvernement a précédemment annoncé vouloir amputer le budget de Suisse Tourisme de 5 millions par an pour 2012 à 2015. Si la Fédération suisse du tourisme (FST) a salué la décision, son directeur Mario Lütolf juge néanmoins « incohérent » d’augmenter les budgets de promotion touristique pour les réduire un an après : « Cela rendra difficile la poursuite des investissements dans les marchés Malgré la hausse du franc, vous reprendrez bien un verre de émergents. A cause de (Cer)vin ? l’inflation dans ces pays à nier, la hausse a été de 50%, alors que les haut potentiel, la Suisse doit y augmenter ses nuitées des Allemands ont diminué de 3%. efforts de promotion et non les diminuer. » Mais ce qui distingue la Chine est l’exploDe son côté, Suisse Tourisme pense utiliser sion de la classe moyenne : elle devrait tripler ces liquidités sur deux fronts : en Suisse où d’ici 2025 pour atteindre les 500 millions. les hôtes indigènes représentent 43% des Suisse Tourisme pourrait également utiliser nuitées et dans les pays où le potentiel de cet argent pour promouvoir la Suisse en Inde croissance est élevé, comme en Chine. Bien (+22% l’an dernier), dans le Golfe (+11,9%), que les Chinois ne représentent que 2,4% en Russie (+2,3%) et en Espagne (+1,1%). des nuitées des touristes étrangers, leur O.G. nombre augmente rapidement. L’an der- Des étoiles... … et des casseroles à Charles-André Ramseier au TTW Natif d’Yverdon ayant installé son nid familial à Château-d’Œx, cet authentique Vaudois a pris une retraite anticipée bien méritée, à 62 ans, après 40 ans passés dans la branche touristique, dont 15 à la tête de l’Office du tourisme vaudois (OTV), à Lausanne (voir son successeur en page 16). Toujours élégant et distingué, toujours courtois et disponible, ce grand sportif a bien mérité du Pays de Vaud, dont il a vanté les mérites et les beautés dans le monde entier. Château-d’Œx lui doit aussi une fière chandelle, de même que l’aérostier Bertrand Piccard : c’est en grande partie à son dynamisme que la station des Alpes vaudoises doit son titre mondial de « capitale du ballon. » (OG). Le Salon des professionnels du voyage (Travel Trade Workshop) va quitter Montreux et son Centre de Congrès, où il réunissait les représentants des agences de voyage, des offices du tourisme et des compagnies aériennes depuis 35 ans. Cela faisait longtemps que Zurich convoitait la « foire du voyage ». Elle a fini par l’emporter partiellement : le TTW va être scindé en deux rendez-vous : à Genève en septembre et à Zurich en octobre : « Montreux n’est pas en cause, relativise Harry John, le directeur du tourisme de la Riviera. Dans un secteur subissant de plein fouet les effets de la concurrence d’internet, les tour-opérateurs alémaniques et genevois dominent. » Reste que le TTW aurait pu annoncer son départ en novembre, à l’issue de la dernière manifestation. (OG) 3 Salon de la gastronomie Le Sirha n’est pas un vin… … mais c’est le sigle (à une lettre inversée près) du grand rendez-vous mondial de la restauration et de l’hôtellerie qui a lieu tous les deux ans à Lyon. C’est là que se déroule aussi la finale du Bocuse d’Or, remportée par un Danois devant deux autres Scandinaves. Près de 2200 exposants, 22 pavillons internationaux et 10 000 chefs venus de 136 pays en 2009, le Sirha est la référence en la matière. Plus de 140 000 visiteurs s’y bousculent dans les allées de ce « laboratoire des tendances où s’invente la restauration de demain », comme le promet sa directrice Marie-Odile Fondeur. Le salon pratique une politique de prix d’entrée propre à décourager les badauds : 75 euros par personne. Place aux « pros » ! Démonstrations, animations, concours, tables rondes, espaces de recherche, d’échanges d’idées et de savoir-vivre, les organisateurs du Salon international de la restauration, de l’hôtellerie et de l’alimentation ne sont pas à court d’idées pour conserver le leadership dans leur domaine : « Présenter une offre de qualité ne suffit plus, le consommateur veut manger séduisant, équilibré ou surprenant, plaident les organisateurs du Sirha. Selon l’humeur ou le moment de la journée, il veut pouvoir emporter, “snacker”, préparer lui-même, ou prendre son temps pour déguster ». De ce fait, les professionnels de la restauration, qu’elle soit collective, gastronomique, rapide ou hôtelière doivent anticiper pour répondre aux attentes en constant mouvement du consommateur. Deux Prix Innovation 2011 à Nestlé Professional Présence « suisse » très active au Sirha de Lyon, Nestlé et sa filiale Nestlé Professional ont tenu table ouverte pour faire la démonstration des nouveaux produits CHEF en collaboration avec un maître-queue de St-JustSt-Rambert, près de St-Etienne : Christophe Roure (40 ans et 2 macarons au Michelin) est le propriétaire du restaurant « Le Neuvième Art ». Au Sirha, il a fait une démonstration de son savoir-faire en utilisant des jus, fonds, fumets et bouillons produits sous forme de flocons par Nestlé. Au choix : agneau, bœuf, canard, porc ou poulet Christophe Roure tire son inspiration des produits typiques de sa région, comme la bière ambrée de Saint Rambert et la pomme du pilat, mais cela ne l’empêche pas de recourir au fumet de poisson CHEF pour réaliser un saumon d’Ecosse 4 mariné enveloppé d’une écume à la bergamote : « Il faut savoir extrapoler à partir de ces ingrédients et jouer avec les saveurs », commente le chef à chaud. Née en 2009 d’une réorganisation stratégique de la multinationale veveysane, la division Nestlé Professional a généré 6,2 milliards de francs de revenu cette annéelà, deux fois plus que le très médiatique Nespresso (2,8 milliards) : « Nous étions déjà le principal fournisseur mondial des professionnels de l’alimentation en commercialisant des produits comme Maggi ou Nescafé, dont les emballages ont été adaptés aux besoins des grossistes, de la restauration collective ou des restaurants indépendants », explique son directeur général, l’Italo-Canadien Marc Caira, présent au Syrha pour recevoir le Prix Innovation 2011. Sa division a reçu un deuxième Prix Innovation pour son programme de boissons haut de gamme, Viaggi, qui permettent à un restaurateur de proposer une quinzaine de cafés ou de boissons chocolatées avec les ingrédients Nestlé : café, lait condensé ou chocolat Cailler livrés en bac. Louées au restaurateur par Nestlé Professional à un prix qui comprend aussi la maintenance et les réglages, ces machines fabriquées en Italie par la marque Cimbali ont été testées avec succès sur le marché français en 2010, avant d’être introduites ce printemps sur les marchés suisse, italien et britannique. Le secteur des aliments et boissons hors foyer est l’objet d’un énorme potentiel de croissance à long terme, estime Marc Caira qui table sur une progression de 3 à 5% sur les marchés développés et de 10% sur les marchés émergeants pour occuper la moitié du marché mondial en 2019, selon les projections de la maison mère à Vevey. A elle seule, Nestlé Professional emploie plus de 10 000 personnes dans 92 pays avec 14 fabriques. Un peu partout dans le monde, les comportements des consommateurs sont en changements constants : ils prennent leurs repas et, de manière générale, consomment des produits alimentaires de plus en plus souvent à l’extérieur de leur domicile. De manière générale, les marchés chinois, indiens et indonésiens sont en pleine expansion, tout comme le Mexique et le Brésil : « Le potentiel et la marge de progression des activités dédiées aux professionnels sont encore très importants, même dans les marchés matures d’Europe et d’Amérique du Nord », a déclaré Marc Caira à L’Agefi. Les cinq principaux acteurs de cette industrie (Nestlé, Kraft, Heinz, Sara Lee et Unilever) n’occupent que 5% – dont 1,7% pour Nestlé – d’un marché encore largement couvert par de petits fournisseurs régionaux, plus rapides et plus flexibles. Le Bocuse d’Or 2011 aux Scandinaves Un podium entièrement nordique avec le Danemark, la Suède et la Norvège, c’est le résultat plutôt surprenant pour les non-initiés du concours final du Bocuse d’Or 2011 qui s’est déroulé au Sirha, les 25 et 26 janvier dernier. Le chef danois Ramus Kofoed a écopé de la toque suprême et d’un chèque de 20 000 euros. Le Bocuse d’argent 2011 revient au Suédois Tommy Myllymäki, tandis que le Bocuse de bronze récompense le Norvégien Gunnar Hvarnes. Chef-propriétaire du « Geranium », à Copenhague (1 étoile Michelin), le Bocuse d’or 2011 en est à sa troisième participation. Agé de 36 ans, il avait déjà remporté le Bocuse de bronze en 2005 et l’argent en 2007. Au fond de son box, aidé de son commis, il a préparé sa lotte aux légumes croustillants dans la plus grande concentration. A la différence des autres concurrents, il travaille à l’écart de l’agitation ambiante « pour mieux se concentrer et mettre toutes les chances de son côté », explique son coach et associé du « Geranium ». Pourquoi trois Scandinaves sur le podium ? Il semble que les « chefs venus du froid » se préparent plus méthodiquement que leurs concurrents, estiment les spécialistes. Sorte de « jeux olympiques de la cuisine », le Bocuse d’Or contraignait cette année les participants à un exercice imposé autour de deux selles d’agneau d’Ecosse et une épaule d’agneau de même origine, d’une lotte entière avec sa tête, de quatre tourteaux vivants et de vingt langoustines. Les recettes réalisées à partir de ces ingrédients ont été tenues secrètes jusqu’à la dernière minute par crainte d’être copiées : « J’utilise beaucoup de produits issus de la nature comme les herbes, les fleurs, les champignons, les baies. J’ai passé près d’un millier d’heures à préparer ce concours en cuisine, je n’ai pas de coach mais j’ai travaillé avec un groupe de grands chefs qui goûtaient mes préparations et me donnaient leur avis ». Le lauréat 2011 a concocté un rôti d’agneau avec du thym et des airelles séchées, une épaule d’agneau aux petits oignons et une gelée de jus de champignons garnie de pommes de terre et de ris d’agneau, de citron, de poireau et de raifort. Côté poisson, il a imaginé sa lotte avec du foin brûlé, du thym, des légumes croustillants et des langoustines en gelée. Les 24 concurrents de 24 pays passent 5 h 35 exactement autour des fourneaux. Frank Giovannini (Rochat) à l’honneur Le prix spécial Poisson a couronné le Suisse Franck Giovannini. Originaire de Tramelan (BE), il arbore le même monogramme FG Infôtellerie – Mars 2011 – No 65 Salon de la gastronomie que Frédy Girardet. Après son apprentissage à l’Auberge de la Couronne à Apples, il s’est perfectionné à Vancouver, Boston et New York avant de rejoindre l’Hôtel de Ville à Crissier où il officie depuis 12 ans. En 2006, il s’était inscrit au « Cuisinier d’Or de KADI » et avait été désigné candidat suisse au Bocuse d’Or. Pour la finale de Lyon il a créé ses plats selon les principes appris avec Philippe Rochat (qui était aussi le président de comité de sélection) : respect des produits et des techniques culinaires. C’est ce qui l’avait mené à remporter en janvier 2007 le Bocuse de Bronze et à devenir le premier Suisse sur le podium à Lyon. Le prix spécial Viande est revenu au Français Jérôme Jaegle, le chef alsacien du restaurant Têtedoie à Lyon. La remise des prix s’est déroulée en présence de Paul Bocuse, son président-fondateur, dans le nouveau Hall Paul Bocuse, tout juste inauguré en présence de très nombreux chefs étoilés venus rendre hommage à « Monsieur Paul ». Encadré de Le concours du Bocuse d'Or est devenu un show qui attire des milliers de spectateurs. Le chef français Christophe Roure (2 étoiles au Michelin) est le chef du Neuvième Art à St-Just-St-Rambert. Une mise en bouche très printanière de Christophe Roure. Une palette de saveurs concoctée par le chef Christophe Roure, qui fait la promotion des produits CHEF de Nestlé Professional. Saumon d'Ecosse mariné enveloppé d'une écume à la bergamote avec un coulis de crustacés cacaoté : une autre recette du chef Christophe Roure son fils Jérôme – à la tête de ses restaurants américains – et de son petit-fils, « petit Paul », 3 ans, le maître de Collonges (85 ans) a conservé sans discontinuer ses trois étoiles depuis 1965. Au soir du concours, 90 grands chefs totalisant 200 étoiles lui ont donné un grand dîner, piloté en son honneur par une « charmante connaissance » des Lausannois, la cheffe Anne-Sophie Pic, du Beau-Rivage Palace. Olivier Grivat/Lyon Le directeur de Nestlé Professional, l'Italo-Canadien Marc Caira, a reçu le Prix Innovation 2011 des mains de la directrice du Sirha, Marie-Odile Fondeur (à gauche). Infôtellerie – Mars 2011 – No 65 5 Hôtellerie neuchâteloise L’Hôtel de l’Aigle, à Couvet, mise Copropriétaire de l’établissement du Val-de-Travers plus que centenaire, Matthias von Wyss mise sur le développement durable et les produits du terroir. des études en économie avec une spécialisation en tourisme. Le tourisme doux, c’est précisément sous cet angle que Matthias von Wyss veut axer ses efforts. Il est aussi actionnaire des mines d’asphaltes, un ancien site industriel ouvert aux visiteurs (voir ci-contre), ainsi que de la boutique Goût & Région située dans la gare historique de Noiraigue, le pittoresque village situé à l’entrée du Valde-Travers. Dégustation de chocolats artisanaux et aventure cycliste (à vélo électrique) sont au programme, y compris l’incontournable spécialité régionale : la truffe aromatisée à l’absinthe. A vélo, la montée au Creux-du-Van prend 1 h 30 grâce au moteur électrique. C’est alors un spectacle exceptionnel qui s’ouvre sur le « Grand Canyon suisse ». Une majorité d’Alémaniques Avec ses 18 chambres, l’Hôtel de l’Aigle compte une majorité de clients alémaniques (70%) : « Le Jura est un produit de niche, qui se vend sous cette forme, explique le directeur. C’est la raison pour laquelle nous misons sur des partenaires alémaniques. C’est un produit pointu avec un petit volume d’affaires. Pour trouver un hôtel de la même capacité, il faut se rendre aux Rasses, à Neuchâtel ou à La Chaux-de-Fonds. Cela ne permet pas d’accueillir de grands groupes. » Situé à 25 km de Pontarlier et de la frontière française, l’Hôtel de l’Aigle doit compter avec la force du franc : « Nous sommes cependant De Paris à Neuchâtel, l’itinéraire du « Guide bleu » de 1920 mentionne « le passage par le Col des Verrières, à 940 m, la descente vers le riche et industriel Val-de-Travers, arrosé par l’Areuse aux pentes douces revêtues de prés et de bois. On atteint ensuite Boveresse, relié par diligence (en 15 minutes) de Fleurier ». Edité à Paris par la Librairie Hachette, l’un des premiers guides suisses de l’époque mentionne déjà à Couvet – « un bourg peuplé de 3380 habitants », la pension de l’Aigle. Près d’un siècle plus tard, l’Hôtel de l’Aigle est toujours vaillant. Son copropriétaire, en même temps que 80 autres personnes physiques et morales, a sauvé l’établissement qui devait faire place à des appartements en 1983 : « Le projet immobilier ne s’est finalement pas fait. Tous les étages de l’hôtel qui avait appartenu à l’entreprise de machine à tricoter Dubied ont été refaits », commente Matthias von Wyss, qui dirige l’établissement, après avoir suivi 6 Infôtellerie – Mars 2011 – No 65 Hôtellerie neuchâteloise sur le terroir davantage pénalisés par rapport à l’Autriche pour le Zurichois qui a le choix d’aller dans la région du Bregenzerwald, à une distance équivalente. Nous avions auparavant 10% de différence de prix par rapport à cette région, cela fait désormais 25%. Nous avons passablement souffert l’année passée, alors que nous avions beaucoup profité des actions de Suisse Tourisme en 2009. » La région de Couvet bénéfice heureusement de l’excellente santé de l’horlogerie de luxe, que ce soit Piaget à La Côte-aux-Fées, Parmigiani et Chopard à Fleurier, sans parler de quelques petites marques de très haute gamme : « Mais ce n’est pas exactement ce genre de clientèle que vous visons. Nous nous positionnons dans le 3 étoiles, les produits du terroir et le développement durable, même si nous profitons des sous-traitants installés dans la région. » Le restaurant niché dans une superbe brasserie traditionnelle est davantage fréquenté à midi, surtout par les employés de l’industrie locale, qui peuvent miser sur un établissement ouvert 7 jours sur 7 toute l’année. Le personnel est constitué de Neuchâtelois, presque tous domiciliés dans la commune. Adepte du développement durable, l’Hôtel de l’Aigle a réussi à poser des panneaux solaires sur le toit pour être totalement neutre dans son bilan écologique au niveau de l’eau chaude et du chauffage qui fonctionne par ailleurs avec des pellets de bois : « Sur une période d’amortissement de 15 ans, c’est moins cher que le pétrole dès que celui-ci est à plus 85 francs les 100 kg. (aujourd’hui il atteint les 107 francs). Nous économisons 20 francs sur chaque 100 kg de pétrole. » Matthias von Wyss est aussi responsable du Louverain, un hôtel pour séminaires situé aux Geneveys-sur-Coffrane, dont l’Eglise protestante neuchâteloise est l’actionnaire principal. S’y organisent des séminaires religieux de toutes tendances, chrétienne, bouddhiste ou musulmane : « Nous vivons dans un canton à l’économie sinistrée et nous pouvons nous déclarer satisfaits d’avoir misé sur le tourisme. Cela nous donne une certaine stabilité. Pour la cuisine, nous misons sur les produits du terroir, notamment le buffle dont le village abrite un grand élevage. Nous travaillons aussi l’absinthe avec une crème brûlée et un parfait glacé arrosé de la même eau de vie. Cette boisson longtemps interdite a pris un essor important avec une vingtaine de distillateurs. » O.G. www.gout-region.ch L’asphalte, une mine touristique Dans le Val-de-Travers, un filon d’asphalte a été découvert en 1712 et il a été exploité industriellement par une société anglaise (la NACO, Neuchâtel Asphalte Company Ltd) dès 1873. Plus de 100 km de galeries ont été percées. La plupart d’entre elles sont aujourd’hui complètement inondées à l’exception d’un secteur limité, qui s’est transformé en un petit musée souterrain de l’asphalte : « Conduite par des guides, la visite permet d’imaginer la dure existence des mineurs, qui y ont travaillé jusqu’en 1986. Un certain nombre de stations permet de comprendre comment cela fonctionnait », explique Matthias von Wyss qui se trouve aussi derrière l’ancien site industriel. A noter une spécialité culinaire qui trouve ses origines vers 1935 : le jambon cuit dans l’asphalte. Au total, neuf couches de papier sulfurisé permettent d’isoler le jambon de l’asphalte liquide, où il sera complètement immergé. La durée de cuisson varie de 3 h 30 à 4 h 15. L’opération est assez délicate : il faut veiller ce que le « bouillon » reste suffisamment chaud pour ne pas durcir et emprisonner définitivement le jambon. La visite guidée dure une heure et demie et il convient de s’équiper de bonnes chaussures et d’habits chauds, la température à l’intérieur des mines étant de 8 degrés. Du 1er avril au 20 octobre, tous les jours à 10 h 30 et 14 h 30. Tarifs : adulte CHF 14.– ; enfants jusqu’à 16 ans CHF 8.50. Infôtellerie – Mars 2011 – No 65 7 Histoire Un train fantôme dans le Cervin Il y a cent ans, les premiers « écologistes » l’emportaient sur un audacieux promoteur vaudois. Ils mettaient fin à un projet fou, celui d’un chemin de fer accédant au sommet du mythe suisse. « Le Cervin dans un fauteuil », c’était le rêve fou de deux promoteurs au début des années 1900. Deux ingénieurs suisses avaient concocté le projet insensé pour l’époque, d’accéder au sommet de la pyramide de pierre dominant Zermatt à 4480 m, confortablement assis dans un wagon de chemin de fer. C’est le 4 décembre 1906, que le Vaudois Henri Golliez, de Lutry, et l’Obwaldien Xavier Imfeld, de Sarnen, déposaient une demande de concession pour un train sur le Cervin au Département fédéral des postes et des chemins de fer. Comme le relate l’intéressant travail de mémoire d’une jeune licenciée ès lettres 8 de l’Uni de Lausanne, Alice Denoréaz*, le tracé projeté était divisé en deux sections : la première devait être exploitée par un train électrique à crémaillère reliant la gare de Zermatt au Schwarzsee, à une altitude de 2580 m. De là, la ligne devait progresser par galerie souterraine creusée à travers la face sud de l’arrête du Hörnli, pour atteindre, à 3052 m, la cabane aujourd’hui prisée par les alpinistes qui marchent sur les traces d’Edward Whymper. La deuxième section devait être franchie par un funiculaire souterrain cheminant à travers la roche jusqu’à la gare terminus projetée sur la face nord, à 20 m à peine du sommet. La pente maximale devait être de 95%, presqu’un ascenseur grimpant à la verticale. La durée du parcours était estimée à 1 heure et 20 minutes. Les promoteurs avaient évalué la durée des travaux à quatre ans. Quant aux coûts d’exploitation, ils se seraient élevés à 10 millions. Une somme considérable. Ce projet à vocation purement touristique ne s’adressait qu’à une élite fortunée. Elle devait être exploitée de juillet à fin sep- tembre. Le billet aller-et-retour était évalué à 50 francs, une somme à comparer au tarif des guides de la vallée de Viège qui fixe à 100 francs l’ascension du Cervin. Henri Gollier et Xavier Imfeld y voient l’occasion rêvée de faire progresser le chemin de fer touristique en bénéficiant de la réputation croissante de Zermatt, et réciproquement. Grâce à l’ouverture toute récente du tunnel du Simplon, en 1906, et à la construction du futur tunnel du Lötschberg sur la ligne reliant Berne à Brigue, ils pensaient pouvoir drainer des milliers de voyageurs. Le village de Zermatt qui n’est pas encore une station de villégiature a vu le nombre de ses touristes plus que doubler après la mise en service de la ligne Viège-Zermatt en 1891. Avec des galeries panoramiques creusées dans la montagne pour admirer le paysage, comme à la Jungfrau, et un restaurant d’altitude à plus de 4000 m, l’attraction serait garantie. Les deux ingénieurs projetaient même l’aménagement d’une salle pressurisée pour soulager les voyageurs souffrant du mal d’altitude ! Infôtellerie – Mars 2011 – No 65 Histoire Un collaborateur de Gustave Eiffel Malgré l’audace du projet ferroviaire, la paire Golliez-Imfeld était loin d’être des farfelus. Ingénieur diplômé de l’Ecole polytechnique de Zurich, le Vaudois Henri Golliez avait enseigné les sciences naturelles au collège de Sainte-Croix (VD) avant d’entamer une carrière de professeur de minéralogie à l’Uni de Lausanne. Membre de la direction de la compagnie du Lötschberg et administrateur de la ligne Furka-Oberalp, il fit partie de la commission pour la construction du train de la Jungfrau. De 8 ans son aîné, Xavier Imfeld avait suivi des études d’ingénieur topographe à l’Ecole polytechnique de Zurich. Il avait travaillé au Bureau topographique fédéral où il révisa les cartes du canton du Valais, avant d’être engagé de 1890 à 1891 par Gustave Eiffel pour créer un projet d’observatoire au Mont-Blanc, l’éternel rival du Mont-Cervin. Son attirance pour la montagne valaisanne n’était pas un hasard, Xavier Imfeld avait épousé en 1880 Marie Seiler, fille d’Alexandre Seiler, le célèbre hôtelier de Zermatt. Qu’est-ce qui fit alors capoter le projet ferroviaire du Cervin ? En 1898, toujours à Zermatt, le chemin de fer du Gornergrat (3100 m d’altitude) avait été inauguré en grande pompe. C’était la première ligne à crémaillère électrifiée de Suisse et elle avait été construite avec les moyens du bord de l’époque : de solides mulets valaisans… Huit ans après, les mentalités semblent avoir changé et une campagne de presse s’organise contre le projet de construction à travers la montagne mythique. Il avait l’audace de s’attaquer aussi au lobby des guides zermattois qui craignaient pour leur gagne-pain. La campagne débute en 1907, un mois après la demande de concession à Berne : « Même invisibles, l’ascenseur et les installations du sommet seront dans le Cervin, comme une tare cachée dans un beau corps », écrit alors le Fribourgeois Raymond de Girard dans La Liberté. Ce professeur de géologie, décédé en 1944, était membre du Club alpin et président de la Commission fribourgeoise pour la conservation des monuments historiques. Le professeur Ernest Bovet, professeur de littérature à l’Uni de Zurich et président de la Commission spéciale du Cervin créée par le Heimatschutz, s’attaque à l’industrie touristique et aux futurs clients du chemin de fer : « Et qui donc peuplera ce bar alpestre ? La bande vulgaire des touristes prétentieux et pressés, dépourvus de culture, de respect, d’éducation même et de simplicité, les touristes bruyants du luxe à bon marché. » « Le Cervin se défend ! » Le Heimatschutz et le Club alpin suisse vont lancer deux pétitions qui récoltent plus de 70 000 signatures. Une pièce de théâtre, intitulée « Le Cervin se défend ! », est écrite par le Fribourgeois Auguste Schorderet. Elle met en scène un entrepreneur américain Infôtellerie – Mars 2011 – No 65 et un ingénieur français qui désirent construire un chemin de fer au Cervin. En essayant d’escalader le sommet, l’ingénieur fait une chute mortelle en raison de son inexpérience du milieu alpin. Morale de la pièce : ne touchez pas aux symboles suisses ! « Les montagnes sont le bien de plus de trois millions de Suisses, et non pas celui des seuls touristes, écrit l’homme de lettres Charles-Marius Gos, également membre du Club alpin. Le Cervin appartient à tous les Suisses. » Dans cette entreprise, il refuse d’y voir un caractère d’utilité publique : elle ne s’adresse qu’à une clientèle de riches oisifs. Au lieu de participer à l’essor du tourisme, le train du Cervin va tuer la poule aux œufs d’or. Ceux qui entreprendront l’ascension de la Le projet de train au sommet du Cervin aurait longé l’arête Hornli par une galerie souterraine avant de grimper presque à la verticale jusqu’à 20 m du sommet. montagne se sentiront ridiculisés par un chemin de fer rempli de touristes. Les promoteurs ont beau tenter de présenter leur projet comme une « œuvre philanthropique permettant aux personnes qui n’ont pas les qualités physiques requises pour l’alpinisme d’accéder au sommet du Cervin et d’y admirer le paysage », la colère gronde dans les milieux des alpinistes et des écologistes avant l’heure. Il est même question, en cas de refus suisse, de demander une concession aux Italiens. Rien n’y fait. La bataille médiatique fait rage par courrier des lecteurs interposés jusqu’en 1910 : « Un chemin de fer est-il honorable sur une montagne ? Ignominieux sur une autre ? Est-il honorable à 3000 m et infâme à 4000 ? », se défend le promoteur Henri Golliez dans La Gazette de Lausanne. Le Conseil fédéral ne publiera pas de messages dans la Feuille fédérale pour donner son avis sur la question et les deux concessionnaires décéderont sans voir aboutir leur rêve : Xavier Imfeld en 1909 et Henri Golliez en 1913. La disparition des deux ingénieurs sonnera définitivement le glas de ce trainfantôme. C’était il y a un siècle. Olivier Grivat * « Les oppositions au projet d’un chemin de fer touristique entre Zermatt et le sommet du Cervin », Faculté des Lettres de l’Uni de Lausanne, Alice Denoréaz 9 Neuchâtel Le groupe Barrière convoîte le futur casino de Neuchâtel Déjà présent à Montreux, Fribourg et Courrendlin (JU), le géant français des maisons de jeux, dévoile ses cartes pour une ouverture à avril 2012. Neuchâtel en Gilles Meillet, directeur général Ville et canton réunis, Neuchâtel s’apprête à traverser une situation de crise économique et fiscale inquiétante. Cela n’empêche pas les projets prometteurs. Si le Conseil fédéral tranche en sa faveur en juin prochain, le groupe Lucien Barrière pourra ouvrir son Casino de la Rotonde au bord du lac de Neuchâtel, le 1er avril 2012. Gilles Meillet, le directeur général des opérations à l’international a dévoilé les plans du futur « Casino Barrière de Neuchâtel ». Dans un bâtiment loué à la Ville, le groupe créé il y a 99 ans par Lucien Barrière rêve d’installer 110 machines à sous, 6 tables de jeux, une brasserie de 110 couverts ouverte sept jours sur sept et deux bars pour y accueillir quelque 150 700 visiteurs par an : « Ce sont 70 emplois qui seraient ainsi créés dès l’ouverture, la majorité provenant de la région afin de favoriser le tissu économique local », explique Gilles Meillet. Quatre concurrents en lice L’enjeu n’est pas mince en cette période de vaches maigres : un casino B, comme celui que la Commission fédérale des maisons de jeux a décidé d’octroyer à Neuchâtel, pourrait rapporter près de 10 millions de francs par an en impôts et 52 millions en prélèvements directs pour un investissement de départ de l’ordre de 18,5 millions. La part de 60% attribuée à l’AVS, comme le veut la répartition des retombées des casinos B entre Berne et les cantons, serait proche de 78 millions. En outre, il est prévu de verser à une fondation culturelle créée par la ville une somme de 250 000 à 800 000 francs par an en fonction des résultats réalisés. Outre le groupe barrière, trois autres concurrents sont en lice pour l’obtention du futur Casino de Neuchâtel, deux dans le bâtiment de la Rotonde et deux autres dans deux autres établissements hôteliers. A la même date du printemps 2012, il est prévu d’ouvrir un nouveau casino – du type A – en ville de Zurich, où cinq concurrents sont sur les rangs. Cela portera à 21 le nombre des maisons de jeux autorisées jusqu’en 2023 depuis la votation fédérale qui a libéralisé les jeux d’argent en 1993. Deux casinos ont fermé leurs portes depuis lors, faute de rentabilité, à Zermatt (VS) et à Arosa (GR). Exploité également par le groupe Barrière, le Casino de Montreux est le No 2 en Suisse derrière Baden (AG) avec un chiffre d’affaires de 108 millions (en 2010) contre 24,8 millions escomptés à Neuchâtel, la première année d’exploitation. O. G. Un hôtel « révolutionnaire » au Locle La « Fleur-de-Lys », d’où était parti le cortège révolutionnaire du 1er mars 1848, devrait renaître. Une coopérative doit se constituer pour lui rendre son âme d’autrefois. La « Fleur-de-Lys » est un grand bâtiment historique de 35 m situé à la Grand-Rue de la localité neuchâteloise. Elle contient une cave voûtée qui doit dater du XVIIe siècle, 10 assure « L’Impartial » qui annonce une réouverture probable en 2012. Racheté en 2010 par François Knellwolf et William Darbellay, le vénérable bâtiment vide devrait rouvrir ses portes. Une coopérative regroupant des entreprises, des privés et des institutions publiques est en voie de constitution. Un premier effort financier a permis de racheter le bâtiment en le sauvant in extremis de la pioche des démolisseurs : « Le permis avait déjà été demandé », explique l’un des copropriétaires. Reste à monter un concept hôtelier original. Pour ce faire, un questionnaire a été envoyé à 350 destinataires pour cibler les désirs de la clientèle. Un premier projet prévoit d’y installer 18 chambres spacieuses (d’une surface de 30 à 40 m2) sur les trois étages du bâtiment, avec des salles de conférence sous les toits. Au rez-de-chaussée, un bar, des ateliers et des surfaces commerciales pourraient être aménagées. Le premier coup de pioche devrait être donné cette année encore. Devis estimé de l’opération : près de 6,9 millions de francs. Infôtellerie – Mars 2011 – No 65 Association Les nouveaux membres de l'ARH Pour le 3e trimestre 2010 et le début de l'année 2011, l'Association romande des hôteliers (ARH) a enregistré une dizaine de nouveaux membres vaudois, fribourgeois, neuchâtelois et jurassiens. Parmi lesquels... Le Château de Salavaux, dans le Vully vaudois, est un ancien domaine agricole datant de 1391 et que le couple Martin Zbinden et Doris Loretan ont fait renaître. Le complexe romantique et unique en son genre comporte un immeuble d’origine bâti en pierre et une tour de château. Adresse : route de Villars 12, 1585 Salavaux, tél. 026 677 89 20, [email protected] – www.schloss-salavaux.com L’Hôtel de Ville de L’Abbaye se situe au bord du lac de Joux, tout près des téléskis. Il propose des chambres confortables avec vue sur le lac, pour une partie d’entre elles. Le restaurant offre en été une belle terrasse avec vue. Route de l’Hôtel-de-Ville 14, 1344 L’Abbaye (VD), tél. 021 841 1393 [email protected] www.hotelabbaye.ch L’Hôtel de La Lande, au Brassus (3 étoiles), est un bâtiment du XXe siècle entièrement rénové, qui propose 26 chambres et suites, deux salles de séminaire, un restaurant italien ainsi qu’un bar ouvert tous les jours de la semaine. Place de La Lande, 1348 Le Brassus, tél. 021 845 44 41 [email protected] [email protected] L'Auberge du Lion-d'Or, à Tannay (VD) en Terre Sainte, accueille ses clients dans une ambiance intime et chaleureuse. Le restaurant offre tout le confort d'un établissement du terroir avec une carte qui s'accorde aux exigences saisonnières. Route du Village 2, 1295 Tannay – Tél. 022 776 04 23 www.aubergeduliondor.ch – [email protected] Nouveau directeur au Mirador Kempinski Depuis le début de l’année, le Mirador de la chaîne Kempinski, au Mont-Pèlerin (VD) a un tout nouveau directeur général. Originaire de la Broye fribourgeoise, JeanMarc Michel (48 ans) a suivi les cours de l’Ecole hôtelière de Lausanne, avant de se perfectionner à l’Université Cornell, dans l’Etat de New York. Précédemment, il a œuvré aux Seychelles comme directeur général du Constance Ephelia Resort, et auparavant comme directeur au SaintGéran, à l’île Maurice. Ce Franco-Suisse possède par ailleurs une expérience de direction de 6 ans pour le groupe OrientExpress au Reid’s Palace, à Madère. Le nouveau directeur, qui succède à Paolo Sanavia, connaît bien l’établissement des hauts de Vevey : il y a travaillé comme directeur adjoint de 1995 à 1998. Un retour aux sources… Infôtellerie – Mars 2011 – No 65 11 Association Le Starling Hotel at EPFL (4 étoiles), fraîchement construit – comme son nom l’indique – sur le campus de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne, comporte 154 chambres, un restaurant avec terrasse et des salles de séminaires et banquets. Route Cantonale 31, 1025 Saint-Sulpice (VD), tél. 021 694 85 85 www.starlinghotels-lausanne.com L’hôtel-restaurant Ringmauer, à Morat, est un petit établissement de charme situé dans une ancienne maison au cœur de la cité historique fribourgeoise. Toutes les chambres sont décorées de peintures d’artistes suisses. Elles lui confèrent une atmosphère originale. Deutsche Kirchgasse 2, 3280 Morat, 026 670 11 01 – [email protected] Situé au cœur de Delémont, le National (3 étoiles) dispose de 27 chambres modernes, avec brasserie, terrasse, restaurants, bar, salle de banquets et sauna. Il est situé à 5 minutes à pied de la gare et à quelques pas du centre historique. Route de Bâle 25, 2800 Delémont, tél. 032 422 96 22, www.lenational-hotel.ch L’Hôtel Hine Adon est situé au cœur du Vieux-Fribourg dans le quartier du Bourg, à proximité de la Cathédrale, des musées et de la zone piétonne de la rue de Lausanne. Rénové de fond en comble, il est idéal pour de petits séminaires ou réunions. Le bâtiment a plus de 400 ans et il est composé de deux maisons qui ont été réunies entre elles, offrant une architecture intéressante. Rue Pierre-Aeby 1, 1700 Fribourg, tél. 026 322 37 77 – [email protected] Le Golf Resort La Gruyère est un hôtel de luxe de 10 chambres qui jouit d’un cadre idyllique sur le golf, le lac de Gruyère et les montagnes. A l’intérieur, luxe, calme et authenticité avec un service hôtelier de très haute qualité. Route du Château 1, 1649 Pont-la-Ville (FR), tél. 026 414 94 00 [email protected] – www.golfresort-lagruyère.ch 12 L’Hôtel Cristal fait partie du Centre de loisirs des Franches Montagnes, à Saignelégier (JU). Ouvert à fin décembre dernier, le centre comporte un hôtel 3 étoiles avec 41 chambres, 45 lits en dortoir et 5 salles de conférences. Il propose une palette d’activités pour toute la famille : piscines avec un toboggan géant de 73 m de long, jacuzzis, bains à vapeur ou saunas, patinoire couverte et fitness. Directeur : André Willemin, adresse : chemin des Sports 10, 2350 Saignelégier, tél. +41 (0)32 951 24 74 – www.centredeloisirs.ch Infôtellerie – Mars 2011 – No 65 Nouveau « Le restaurateur ne peut plus attendre le client sur le pas de la porte » Les sites de notation de restaurants sont à internet ce que sont les guides gas- tronomiques au domaine du livre, mais en plus interactifs. Fondateur du site « I taste », basé à Plan-les-Ouates (GE), Paul de La Rochefoucauld (45 ans) dévoile les dessous d’un phénomène. – Que faisiez-vous avant de lancer « I taste » (en français : je goûte) ? – Je suis une sorte de « serial dotcomer ». Après mes études d’ingénieur en mécanique à l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich, le Parisien que je suis avait fondé une société de notations du monde industriel, un lieu d’échange pour des pièces mécaniques ou électriques. C’était avec la même équipe d’amis qui a fondé par la suite Le Shop, notamment Christian Wanner et Alain Nicod, qui sont aussi administrateurs d’« I taste ». – Combien d’établissements avez-vous répertoriés depuis les débuts ? – Sur une base de quelque 70 000 établissements en France, en Suisse et en Belgique, ainsi qu’en Allemagne et en Italie, nous avons à peu près 40 000 utilisateurs. Le système fonctionne un peu sur le modèle de Wikipedia avec les utilisateurs qui interagissent et peuvent corriger des détails précis, dire si l’établissement est ouvert ou fermé ou si le chef a changé. Nous avons par ailleurs 130 000 consommateurs inscrits sur le site, à peu près la moitié en France et la moitié en Suisse romande. Nous nous apprêtons à attaquer le marché alémanique dès le mois d’avril prochain. – D’où vous est venue l’idée de fonder un site de notation de restaurants ? – Au départ, j’étais frustré de voir la plupart des services sur internet pervertis par des avis visiblement téléguidés et qui faussaient le contenu des messages. C’était en 2009. Avec l’arrivée en force des réseaux sociaux comme Facebook ou Twitter, où ce sont des copains qui s’échangent les bonnes adresses sans idées ou intérêts préconçus, j’ai eu envie de créer un site de notation où l’on retrouve l’avis des amis ou des connaissances de source clairement identifiable. Nous ne donnons pas la parole à des gens qui s’expriment sous pseudonymes, mais uniquement à ceux qui parlent sous leur vrai nom. Cela exclut une bonne partie des risques d’abus ou de manipulation de la part du restaurateur concerné, voire d’un concurrent malintentionné. Infôtellerie – Mars 2011 – No 65 – Quel est concrètement l’intérêt du restaurateur et qu’est-ce que cela lui coûte d’adhérer à « I taste » ? – Le professionnel de la restauration peut connaître la liste de ses habitués qui s’expriment sur le site, il peut aussi répondre aux commentaires parus ou leur faire parvenir directement des offres promotionnelles. C’est un peu le « bras armé du marketing ». – Qu’est-ce qu’il lui en coûte ? – Il y a deux sortes d’abonnement : l’un à CHF 1000.– par année ou un autre à CHF 2000.– qui prend davantage en charge le restaurateur concerné. Nous sommes en quelque sorte dans la tour de contrôle et pouvons donner tous les renseignements qui le concernent. Signaler les critiques ou les compliments qui paraissent sur le site, voire répondre à sa place, mais en donnant l’identité réelle et en évitant l’anonymat. Le phénomène est suffisamment nouveau pour que des restaurateurs de l’ancienne génération soient parfois pris au dépourvu avec les réseaux sociaux, même s’ils ont généralement des enfants qui peuvent les conseiller ! Nous sommes arrivés à une époque où le restaurateur ne peut se contenter de gérer le présent de son établissement : il doit aussi prendre en compte le service « avant » et « aprèsvente ». Il ne peut se contenter d’attendre le client sur le pas de la porte. Par exemple, il arrive de plus en plus de voir afficher sur le mur de Facebook une page de promotion pour tel ou tel établissement ; il peut ainsi recueillir les avis des amis et de leurs amis. Apparaissent aussi sur les réseaux sociaux des commentaires de personnes avisées, et reconnues comme telles, qui donnent des avis considérés comme pertinents par le milieu des gastronomes. – Quelles relations entretenez-vous avec le monde des guides gastronomiques ? – Nous avons un rôle complémentaire aux Michelin, GaultMillau ou autres Coup de fourchette. Mais ils sont de plus en plus en perte de vitesse, notamment le Michelin qui perd de ses lecteurs chaque année. Grâce à internet et aux réseaux sociaux, on peut se passer les bonnes adresses entre copains, on n’a plus besoin de guides. C’est un domaine en plein essor. « I taste » emploie actuellement une douzaine de personnes, toutes basées à Plan-les-Ouates (GE), et nous devrions arriver cette année au point d’équilibre financier. Propos recueillis par O.G. 13 Histoire lausannoise L’Hôtel de la Paix a 100 ans : retour sur image Hôtel d’affaires du centre-ville lausannois, l’établissement de la famille Imfeld a célébré un siècle d’existence. A 41 ans, le directeur général Stefano Brunetti Imfeld tient les rênes de ce « 4 étoiles supérieur » aux côtés de sa mère Jacqueline Imfeld. C’était avant la Première Guerre mondiale et le nom de La Paix paraissait un symbole prometteur avec sa colombe tenant un rameau d’olivier. En 1910, il y a juste un siècle, l’architecte Alphonse Laverrière, à qui Lausanne doit sa gare principale, le pont Chauderon, « La construction avait duré deux ans et le devis était de 1,6 million de francs, une somme considérable pour l’époque », raconte Stefano Brunetti, le directeur général. Lausanne comptait à l’époque 65 000 habitants et l’emplacement était encore vierge de toute construction avec une vue à couper le souffle sur le Léman. Outre ses fameuses salles de bains, l’hôtel comptait une salle de billard et un bowling, jeu encore peu connu alors. La Première Guerre mondiale portera un sérieux coup au taux d’occupation des hôtels, les vidant au passage d’une grande partie de leur clientèle étrangère. Le krach des années 30 ne va pas arranger les choses. C’est alors que « Tante Rose » pousse la porte de l’hôtel le 15 mars 1939 et va racheter l’établissement avec son mari en 1940 : Propriétaires de l’hôtel, Stefano Brunetti et sa mère, Jacqueline Imfeld le Tribunal fédéral et la tour Bel-Air, mettait la dernière main au Grand Hôtel de la Paix. Certaines des 89 chambres proposaient même une salle de bains privative avec eau chaude, un luxe pour l’époque ! 14 « Ma grand-tante Rose Baumgartner était originaire de Lungern (UR) en Suisse centrale. Cette tante de ma grand-mère avait travaillé à la réception du Lausanne Palace. Avec son mari, elle reprendra l’hôtel, emme- nant dans son sillage, ses neveux Jacques et Hélène Imfeld, les parents de ma mère Jacqueline ». Des hôtes célèbres et un cabaret historique « Il faut rendre hommage au dynamisme de ma grand-tante Rose, confie l’héritier de ces pionniers de l’hôtellerie lausannoise. Avec son mari, elle a entrepris de grandes rénovations, inaugurant une brasserie et construisant de nouvelles chambres en 1952 pour passer de 89 à 130 chambres avec une extension à l’est du bâtiment. » On y installe même la radio dans toutes les chambres, une première pour l’époque. Des architectes et des décorateurs, actifs dans la restauration d’hôtels historiques, seront mandatés. La Paix sera en mesure d’accueillir 200 hôtes dans un cadre prestigieux. Des hôtes de marque y prendront chambre ou pension, tels l’écrivain irlandais James Joyce, l’éditeur Edmond Gilliard, l’écrivain Denis de Rougemont, plus tard le roi d’Espagne, Sophia Loren ou Sophie Marceau, sans oublier des chanteurs comme Léonard Cohen et Johnny Clegg, le Zoulou blanc. Durant la Seconde Guerre, un cabaret aménagé en sous-sol, le « Coup de Soleil » de Jean Villard-Gilles et Edith Burger, était un haut-lieu des nuits lausannoises jusqu’en 1947. Il a accueilli un public toujours plus nombreux. On y croisa même Edith Piaf et Marcel Pagnol. En 1952, Rose Baumgartner décède, laissant ses neveux Jacques et Hélène Imfeld à la barre. L’hôtel va continuer à se développer pour devenir, avec l’élégante terrasse du Café de la Paix, un lieu de rendez-vous très en vogue : « Le soir venu, les couples viennent siroter les cocktails du Jacky’s Bar, créé en l’honneur de mon grand-père Jacques Imfeld ». Depuis que la BCV s’est désengagée de l’établissement, Stefano Brunetti et sa mère possèdent 98% de l’hôtel qui fait face au siège de Saint-François. L’hôtel compte entre 75 et Infôtellerie – Mars 2011 – No 65 Histoire lausannoise 1909 : La 1re pierre. Stefano Brunetti Imfeld en compagnie de sa mère Jacqueline Imfeld. Les cabarettistes Edith Burger et Jean VillardGilles feront le succès du « Coup de Soleil ». 85 employés suivant les saisons et il projette d’ouvrir un spa sur le toit : « Il faut satisfaire la demande de l’homme d’affaires, mais surtout de sa compagne. A l’avenir, on compte sur un taux d’occupation « loisirs » de l’ordre de 5%. On réfléchit aussi à faire venir une marque de spa encore peu connue sur Lausanne. Il y a aussi une clientèle locale qui songe à se faire du bien durant la journée avec par exemple des soins BCV s’est désengagée de l’établissement. L’hôtel compte aujourd’hui 109 chambres et réalise 30 000 nuitées avec une majorité d’employés d’origine italienne. Le chiffre d’affaires se situe entre 10 et 12 millions de francs. Cela n’est pas toujours facile dans les familles, mais je dois dire qu’entre ma mère et moi, l’entente est excellente. Nous avons chacun notre champ d’activité : ma mère est la directrice opérationnelle et moi le directeur général. La gestion familiale est aussi appréciée de nos collaborateurs. Elle permet une gestion plus rapide avec un niveau de décision très court. Malgré la différence de génération, nous tombons d’accord sur les grands axes. Pour ma part, je tiens à ce que La Paix reste une affaire qui marche. Sinon nous aurions pu partir sous les tropiques plutôt que de travailler 18 heures par jour. Il faut se battre pour maintenir le niveau de qualité dans une ville où les autorités semblent très favorables à la construction de nouveaux établissements. Il faut voir cependant que le gâteau n’est pas extensible à l’infini. Tout le monde doit pouvoir survivre dans cet environnement qui ne cesse de croître, avec un nouveau palace au “RoyalSavoy”, financé par des Qatari, et un futur hôteltour à Beaulieu. Notre but est vraiment de pérenniser ce que nos ancêtres nous ont légué. » O.G. Hélène Imfeld, la nièce de Tante Rose Baumgartner, et la grand-mère du directeur actuel, Stefano Brunetti Imfeld. pour hommes. C’est un projet pour dans quatre ou cinq années et de l’ordre de 3 à 4 millions de francs, mais il est relativement compliqué d’obtenir les autorisations dans un bâtiment classé. » Une passion familiale Pas question de vendre les « bijoux de famille » à la concurrence qui convoite l’emplacement : « C’est une passion familiale, une passion que l’on cherche à transmettre à la clientèle », résume ce binational italo-suisse qui dirige l’hôtel depuis 16 ans. Après avoir suivi l’Ecole hôtelière de Lausanne entre 1988 et 1992, il a pris la fonction de directeur général de La Paix en 1994, après un diplôme de HEC à Lausanne et un séjour linguistique à Londres : « La Banque cantonale vaudoise possédait alors 38% des parts et ma mère 58%. Depuis lors, la Infôtellerie – Mars 2011 – No 65 Le Grand Hôtel de la Paix durant sa construction en 1910... ... et avant la construction de son aile est. L’entrée... .... et la salle à manger Belle-Epoque. Tante Rose Baumgartner 15 En bref – Agenda Le livre de recettes culinaires « Bernard et Guy Ravet », publié à la fin de l’année passée aux éditions Favre à Lausanne, a obtenu le prix du « Best Chef Book 2010 », décerné par le Gourmand World Cookbook Awards – Suisse. Avec son 19/20 au GaultMillau, le chef vaudois œuvre en cuisine à l’Hôtel-Restaurant de l’Ermitage, à Vufflens-le-Château (VD) avec sa femme Ruth, leur fils Guy et leurs deux filles Nathalie et Isabelle : « Le livre est un ouvrage de recettes avec les vins qui accompagnent chaque plat. Ce sont mes enfants qui ont poussé à la roue. C’est une œuvre commune, explique Bernard Ravet. C’est une grande chance de pouvoir travailler avec ses enfants. Sur douze personnes employées ici, cinq sont de la famille Ravet. Tout se passe au mieux, il n’y a aucun problème entre nous. Au contraire, cela crée une saine émulation. Il est vrai que nous partageons les mêmes idées. Nous avons le même style de vie, que ce soit sur le plan privé ou professionnel. On partage les mêmes goûts, sinon cela ne pourrait pas marcher. Pour le livre, tout le monde a donné sa contribution : Nathalie pour les vins, Ruth pour la décoration, Isabelle pour les desserts, etc. Tout le monde a mis sa patte ! En définitive, le livre flatte l’ego de tous ». EPFL : un nouveau centre de congrès de 3000 places D’ici à l’automne 2013, un centre de congrès, des surfaces de vente et un immeuble résidentiel pour étudiants verront le jour sur le campus de l’Ecole polytechnique fédérale. Ces constructions marqueront une importante étape de l’achèvement du campus urbain de l’EPFL. Le centre de congrès disposera d’une infrastructure ultramoderne, unique au niveau européen, avec 3000 places au total. L’amphithéâtre de 2200 places assises pourra être converti en une salle au sol plat. Sur le même terrain d’environ 30 000 m2 que la Confédération cède sous forme de droit de superficie pendant 99 ans, un immeuble résidentiel avec 172 studios et 344 chambres pour étudiants sera érigé. Au rez-de-chaussée, celui-ci comptera 2800 m2 de surfaces de vente, qui seront louées à des commerces adaptés à l’environnement du campus. En outre, des restaurants et autres services (médecin, coiffeur ou physiothérapeute) sont aussi prévus. Le centre de congrès, l’immeuble résidentiel et leur esplanade ont été projetés par le bureau lausannois Richter Dahl Rocha & Associés. Grâce aux voies piétonnes et cyclistes souterraines existantes, les nouveaux bâtiments seront reliés au reste du campus. Une voie piétonne supplémentaire est projetée. Le centre de congrès sera situé au nord de l’arrêt du M1 et disposera de 300 places de parc. Le prix d’achat de 225 millions est réparti entre deux fonds immobiliers du Credit Suisse. Sur le campus, la banque créera d’ici à fin 2011 un centre de développement informatique offrant 250 emplois. 16 P.P. Suite au départ en préretraite, ce printemps, de CharlesAndré Ramseier après 40 ans passés dans la branche touristique, l’OTV a choisi son successeur en la personne d’Andreas Banholzer (photo). Agé de 34 ans, ce polyglotte uranais est diplômé de l’Ecole suisse de tourisme et de la Haute Ecole de Gestion de Fribourg. Il connaît bien l’Office du tourisme vaudois pour avoir travaillé, en tant que chef de projet, à la mise en place du nouveau système PartnerWebsites – le réseau des sites web des destinations touristiques vaudoises : « Je concentrerai mon attention sur le développement de la promotion touristique au moyen de nouveaux outils de communication et de distribution, sur le renforcement des synergies avec les organisations touristiques et les prestataires régionaux et sur une meilleure fidélisation de nos visiteurs par des moyens informatiques », annonce le nouveau directeur dans la « Newsletter » de Région du Léman. Dépôt en nombre Un prix pour le livre de Bernard Ravet 1000 Lausanne 1 Un nouveau directeur à l’OTV Agenda Quelques rendez-vous importants pour le secteur touristique 4 avril Fête de la Rose et des Plantes parfumées à Romainmôtier (VD) 7 au 13 avril Festival Vision du Réel à Nyon (VD) 10 avril Slow-up du lac de Morat à Morat (FR) Mi-avril à mi-mai Fête de la Tulipe à Morges (VD) 13 au 18 avril Arvinis, le Salon des Vins du Monde à Morges (VD) 23 au 25 avril Biennale du Musée du fer et du chemin de fer à Vallorbe (VD) 26 au 30 avril Montreux Choral Festival 29 au 30 avril Rallye Jurassien à Delémont (JU) 6 au 8 mai Jardins en Fête au Château de Coppet (VD) 26 mai Assemblée générale de l’ARH au Château de Coppet (VD) Infôtellerie – Mars 2011 – No 65