maïs ou sorgho - Agritrop
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Afrique de l'Ouest et du centre : maïs ou sorgho ? M il et sorgho, cultures vivrières dominantes des zones de savane d'A frique de l'Ouest et du Centre, seraient-elles peu à peu remplacées par le maïs ? L'implantation d'une céréale productive comme le maïs, souvent développée avec succès, dépend néanmoins des politiques agricoles et en particulier de l'avenir de la production cotonnière. J.-L. FUSILLER CIRAD-CA, BP 5 0 3 5 , Montpellier Cedex 1, France Clichés C. Poisson et J. Chantereau 20 A griculture et développement ■ es productions céréalières (mil, sorgho, maïs, riz), base des régimes alimentaires des zones de savane en Afrique de l'Ouest et du Centre, connaissent depuis vingt ans des évolutions bien différentes. L Depuis longtemps, la production de riz a retenu l'attention des gouverne ments et des bailleurs de fonds. Les investissements destinés à cette cul ture, centrés sur les périmètres irri gués, ont m o b ilis é l'essentiel de l'appui aux productions céréalières, sans pour autant satisfaire l'essor de la consommation. A u jo u r d 'h u i, le m il et le sorgho, c u ltivé s en c o n d itio n s p luv ia le s , d o m in e n t to u jo u rs la p ro d u c tio n céréalière (figures 1 , 2 ) : environ 80 % dans les pays sahéliens et 60 % dans les pays côtiers, selon la FAO. Mais la production de mil et sorgho connaît une croissance modérée, + 3,3 % par an de 1 9 7 4 - 1 9 7 7 à 1989-1991 dans les pays sahéliens et + 2,1 % dans les pays côtiers, avec des variations interannuelles très fortes. Dans le même temps, la pro duction de maïs s'est distinguée par un rythm e de croissance rapide : + 8,6 % par an dans les pays sahé- n° 2 - M a i 1 994 lie n s , ce q u i c o rre s p o n d à un « décollage » de la pro d u c tio n et + 4,7 % dans les pays côtiers où le maïs est traditionnellement cultivé. Cette dynamique forte pour le maïs pourrait traduire une substitution partielle au sorgho. On tentera ici d'éclairer les conditions de cette pro gression en examinant l'aire géogra phique concernée et les facteurs en jeu. On s'interrogera également sur les perspectives de ces cultures dans le contexte économique actuel. La place des céréales dans les systèmes de culture A l'échelle de l'Afrique de l'Ouest et du Centre, la répartition des cultures de mil, de sorgho et de maïs répond' globalement au zonage climatique, en liaison avec leur sensibilité à la sécheresse particulière (figure 3). La zone du mil correspond aux régions recevant moins de 800 millimètres de p lu ie par an, c e lle du sorgho domine pour les pluviométries com- Années Figure 1. Production de maïs, m il et sorgho dans les pays sahéliens (FAO). prises entre 800 et 1 000 millimètres, enfin le maïs devient important audessus de 1 000 millimètres. Il est cependant délicat d'étudier les évolutions à l'échelle d'un pays ou d'une région parce que l'approche Années Figure 2. Production de maïs, m il et sorgho dans les pays côtiers (Côte-d'Ivoire, Ghana, Togo, Bénin, Nigéria) (FAO). statistique des productions et de ses composantes (surfaces, rendements) se heurte au manque de fiabilité des données. Le fait q u 'il s'agisse de productions prin cip a le m e n t auto consommées dans les exploitations, accroît la difficulté des estimations. Il est en revanche plus pertinent de com parer les situations locales, à l'échelle du terroir villageois. Ainsi, les assolements de onze sites ont pu être analysés, à la suite d'enquêtes sur le terrain : Syonfan et Karakpo au nord de la Côte-d'Ivoire, Kourouma et Daboura au Burkina Faso, Manga, Waragni au centre et Poissongui au nord du Togo, F onsé boug ou et N ia radougou au sud du M a li, les Terres neuves de Koum pento um Maka au Sénégal, la zone cotonnière du sud du Tchad. Ces sites ne cou vrent pas toute la diversité de la zone de savane où le maïs, adapté au cli mat, entre en concurrence avec le sorgho. Mais leur dispersion géogra p h iq u e perm et de nu a n c e r cette o p in io n de l'e x p a n s io n du maïs, souvent considérée comme généra lisée à l'ensem ble de ces régions. T rois d y n a m iq u e s se de s sin e n t actuellement. A griculture et développement ■ n° 2 - M a i 1994 21 C éréales en Afrique Mil > sorgho M A U R IT A N IE M ALI Sorgho > maïs Maïs > sorgho NIGER GUINEE SIERRA LEONE C O TE-D'IVO IRE LIBERIA GHANA 20“ Figure 3. Les zones de cultures céréalières en A friqu e de l'Ouest. Progression du maïs, marginalisation du mil et du sorgho Dans les deux terroirs du nord de la Côte-d'Ivoire, représentatifs de situa tions contrastées de mécanisation et Kourouma de production de coton, le maïs en culture pure est de plus en plus déve loppé (figure 4). Le mil et le sorgho, déjà marginaux en 1975, ont totale ment disparu en 1989. Kourouma, au Burkina Faso, est situé dans la zone de culture traditionnel le du sorgho, où la substitution par le maïs est en cours. Ce terroir présente une particularité : la mécanisation des exploitations est bien avancée et la motorisation intermédiaire (trac teurs de faible puissance) a été intro duite au début des années 80. Les exploitations équipées en matériel de culture attelée ou motorisée privi légient le maïs dans leur assolement depuis 1984. Faible progression 1975 du maïs, prépondérance 1989 I Maïs Karakpo M il et sorgho I m M aïs-m il et sorgho Autre association avec maïs Coton I ] Autres cultures 1975 En % de la surface cultivée du terroir 1989 Figure 4. Progression du maïs et m arginalisation du m il et du sorgho. Evolution des systèmes de culture en zone de savane d 'A friq u e de l'O uest (% de la surface cultivée du terroir affecté à la culture considérée). A griculture et développement ■ n° 2 - M a i 1994 du mil et du sorgho Les te r r o ir s du sud du M a li, du c e n tre -o u e s t du B u rk in a Faso ( D a b o u ra ) et du c e n tre du Togo appartiennent à l'aire de culture tra ditionnelle du sorgho (figure 5). Le maïs est connu depuis longtemps, mais il était encore marginal très récemment. Il o c c u p a it générale ment les champs de case cultivés de C éréales en Afrique Daboura d é v e lo p p e m e n t du c o to n n ie r, la d iff u s io n du maïs appa ra is sa n t seulement comme une dynamique connexe. Absence de progression du maïs I Niaradougou I Les terroirs des Terres neuves du Sénégal oriental, du nord du Togo (Poissongui) et du sud du Tchad re c o u v re n t des s itu a tio n s très d is tin c te s (figure 6). Au Sénégal oriental, il s'agit d'une zone d'im m i gration où les d is p o n ib ilité s fo n cières restent abondantes. En 1974, les agriculteurs-migrants, lors de leur installation sous l'égide d'un projet, n 'o n t pas accepté le co to n n ie r et le maïs proposés par l'encadrement. Le rejet de cette recom m andation technique coton-maïs semble tenir, en première analyse, à l'existence d'une alternative plus rémunératrice : la culture de l'arachide. Maïs M il et sorgho m Maïs-m il et sorgho I Autre association avec maïs Coton Autres cultures 1977 1987 En % de la surface cultivée du terroir Figure 5. Progression lim itée du maïs et m aintien d 'u n e prépondérance du m il et du sorgho. Evolution des systèmes de cultu re en zone de savane d 'A friq u e de l'O uest (% de la surface cultivée du terroir affecté à la cultu re considérée). façon c ontinue, au voisinage im médiat des habitations, bénéficiant ainsi de pratiques culturales soignées (entretien, matière organique). La progression actuelle du maïs corres pond à un déplacement de la culture au sein des terroirs, vers les champs plus éloignés qui sont h a b itu e lle ment dévolus au mil et au sorgho. L'exemple du terroir de Daboura au Burkina Faso m ontre que le maïs atteint des zones très septentrionales. Au nord du Togo, l'introduction du cotonnier n'a pas été un succès, pour d'a utres raisons. Sur le te rro ir de Poissongui, la forte pression démo graphique entraîne la dégradation des sols. Pour subvenir aux besoins alimentaires vivriers, les agriculteurs accordent une part croissante à la sole céréalière, mais pas au maïs : la baisse de la fe rtilité des sols et le fa ib le n iv e a u d 'é q u ip e m e n t des exploitations ne permettent pas une va lo ris a tio n de cette c u ltu re exigeante. Le bassin cotonnier du sud du Tchad se caractérise par des pratiques agri coles très extensives. L'absence de percée du maïs serait une consé quence la faible intensification des céréales. Il peut même être cultivé en associa tion avec le sorgho, et non en cultu re pure, c o m m e c 'e s t le cas à Fonsébougou au sud du M a li et à Waragni au centre du Togo. Les qualités respectives du maïs et du sorgho Le trait le plus marquant de l'évolu tion de ces systèmes de culture est le Le choix des producteurs dépend de certains éléments clés : productivité, A griculture et développement ■ n° 2 - M a i 1994 Céréales en Afrique Terres Neuves Koumpentoum-Maka la durée du cycle de la variété. En zone soudanienne, il est admis que 600 à 900 millimètres de pluies bien réparties sont nécessaires. D'ailleurs, à partir du milieu des années 80, la p luviosité plus favorable en zone soudanienne aurait joué, selon toute vraisem blance, un rôle im portant dans la progression du maïs vers le nord de la zone de savane. Poissongui Zone cotonnière O N D R I Maïs I M il et sorgho I M aïs-m il et sorgho Le maïs demande un sol fertile ; la différence de rendement, par rapport au sorgho, s'accroît avec l'augmen tation de la fertilisation minérale. Il est ainsi remarquable d'observer des utilisations spécifiques de l'espace a g ric o le : les m e ille u rs sols sont affectés au maïs et les plus pauvres au sorgho. Une certaine c o m p lé mentarité interviendrait donc entre maïs et sorgho. L'emploi de variétés améliorées de maïs contribue encore à renforcer la supériorité de cette culture. J j Autre association avec maïs 1989 ¡H Coton ^ Autres cultures En % de la surface cultivée du terroir Figure 6. Absence de progression du maïs. Evolution des systèmes de cultu re en zone de savane d 'A friq u e de l'O uest (% de la surface cultivée du terroir affecté à la culture associée). a d a p ta tio n au c lim a t et au sol, souplesse de c a le n d rie r c u ltu ra l, a d a p ta tio n aux e x ig e n c e s des consommateurs, facilité de transfor mation post-récolte. Les avantages du maïs : productivité et précocité Avec son rendement potentiel nette ment supérieur au sorgho, le maïs permet une productivité du travail plus élevée, même si sa culture exige une charge de travail sensiblement plus lo u rd e (le sorgho p o u v a n t s'accommoder d'un moindre entre tien). Le caractère productif du maïs ne se manifeste toutefois pleinement qu'en conditions d'apports d'eau et de fertiIis a tio n adaptées, plus c o n tr a i gnantes que p o u r le sorgho. Les besoins en eau du maïs varient selon A griculture et développem ent ■ n° 2 - M a i 1 9 94 Ainsi, les écarts de rendement entre sorgho et maïs sont révélateurs des différents systèmes d 'e x p lo ita tio n (figure 7). Au sud du Mali, une large majorité des exploitations est enca drée par la C M D T (C o m p a g n ie malienne de développement des tex tiles). Le rendement de l'ensemble mil et sorgho plafonne entre 1 et 1,2 tonne par hectare (systèmes irrigués exceptés), alors que celui du maïs se situe le plus fréquemment entre 1,5 et 2,5 tonnes par hectare. La culture du mil et du sorgho ne reçoit prati q u e m e n t ja m a is de fu m u re . En revanche, la proportion de la surface de maïs suivie par les structures de développement et bénéficiant d'une fertilisation varie fortement selon le pays et l'année : quasi-inexistante dans le centre-sud du Togo, de 20 à 50 % au Sénégal et de 50 à 70 % au Mali. Ceci explique le large éventail des rendements obtenus en maïs, qui s'étend de moins d'une tonne à près de 4 tonnes par hectare. La précocité de certaines variétés de maïs (cycle de 90 jours) constitue un autre avantage im po rta n t dans la zone soudanienne à la « période de soudure » : consommé en épi vert, en attendant les récoltes des autres cultures vivrières à cycle plus long, Céréales en Afrique V climatiques, faible fertilité des sols... Sa rusticité en fait une culture sécuri sante pour les producteurs, contrai rement au maïs. Ce dernier, par sa plus grande sensibilité à la sécheres se, fait encourir un risque alimentai re (l'autosuffisance en céréales est souvent un o b je ctif prioritaire des producteurs à cause de l'instabilité des marchés céréaliers) et un risque financier, en particulier dans le cas du maïs récolté en grains (rembour sement des intrants nécessaires pour atteindre une bonne productivité). Au sud du M a li, en 1 992-1 993 (avant la dévaluation du franc CFA), le coût des engrais à l'hectare repré sentait l'é q u iv a le n t de 500 à 700 kilogrammes de maïs. r5 (0 Q. O) E QJ T3 C 0) ------------ 1 ------------r “ i------------ 1 1,5 2 2,5 3 3,5 4 Rendement en m il et sorgho en tonnes par hectare Figure 7. Rendements en maïs, m il et sorgho des exploitations cotonnières, pendant la période 1984-1992. Chaque p o in t représente les rendements moyens en maïs, m il et sorgho d 'u n e région encadrée par une société cotonnière, po ur une année donnée (sources : CIRAD -C A Togo et sociétés cotonnières C M D T , SODEFITEX, SOFITEX). le maïs constitue souvent la meilleu re production com plémentaire. La commercialisation de ce maïs dès le mois de septembre peut réduire le manque de trésorerie dans l'attente de la recette du coton. Certes, il exis te des variétés sélectionnées de sor gho précoces et productives, mais leur em ploi reste lim ité pour deux raisons ; elles sont souvent sujettes à des problèmes de moisissures des grains, les panicules étant compactes ; les c o n s o m m a te u rs p ré fè re n t consom m er les variétés tra d itio n nelles, aux qualités c u lin a ire s et gustatives plus appropriées. Tableau 1. transform ation m anuelle du m a ïs e t d u s o r g h o , e x p r im é e s en k ilo g ra m m e s de g ra in s pa r h e u re de travail (AGEL et Y U N G , 1985). D écorticage M ou tu re Maïs M il et sorgho 8 à 12 9 à 15 2 à 3 4 Les avantages du sorgho : rusticité, mouture aisée, qualités gustatives Le sorgho est une p la n te peu exigeante, bien adaptée au milieu n aturel de la région : forts aléas La facilité de mouture est un critère important car cette opération est en général réalisée manuellement par les fem m es. Le d é c o rtic a g e et la m o u tu re sont m o in s p é n ib le s et moins longs pour le mil et le sorgho que pour le maïs, ce dernier ayant un grain plus dur (tableau 1). Le décorticage du maïs n'est pas tou jours pratiqué. Mais la mouture est si pénible qu'elle devient un obstacle à la vulgarisation de cette plante. Au nord du Cameroun, l'installation de moulins a été une condition néces saire à l'a d o p tio n du maïs par les paysans. T o u te fo is , la m o u tu re mécanisée du maïs est plus onéreuse que celle du mil ou du sorgho : 25 à 50 % plus chè re au nord du Cameroun. Enfin, de nombreux travaux sur l'ali mentation dans les pays sahéliens m ontrent que les consommateurs urbains et ruraux restent très attachés au mil et au sorgho. Ces produits sont appréciés pour leur qualité gustative et leur image traditionnelle, fo rte m e n t associée à des valeurs sociales positives. Signe de cette valorisation, le mil et le sorgho appa raissent très souvent dans les plats de fête, en particulier certaines variétés c o m m e le sorgho m o u s k w a ri au nord du Cameroun. En revanche, le maïs entre simplement dans les pré parations quotidiennes (couscous, b o u illie s ) c o m m e une céré a le « banale ». A griculture et développem ent ■ n° 2 - M ai 1 99 4 C éréales en Afrique La « valorisation culturelle » du mil et du sorgho facilite probablement la valorisation économique. Le prix de ces céréales traditionnelles est supé rieur à celui du maïs. Par exemple, au Mali, l'écart du prix à la produc tion en faveur du mil et du sorgho est de l'ordre de 15 à 25 %. Le maïs, miroir du contexte économique Le soutien institutionnel, de la fin des années 70 au milieu des années 80, a largement contribué à la diffusion du maïs. Cette culture est apparue co m m e le moyen p riv ilé g ié pour a c c r o îtr e la p r o d u c t iv it é des céréales. Elle r é p o n d a it ainsi à l 'o b j e c t i f des p o u v o ir s p u b lic s d 'a m é lio re r l'a p p ro v is io n n e m e n t vivrier national tout en permettant de dégager des ressources en terre et en travail au profit de cultures d'expor tation, essentiellement le coton. Culture indissociable du développement cotonnier Cet appui est intervenu notamment par le biais des sociétés cotonnières, investies d'une mission de dévelop C ulture m anuelle Culture attelée Culture motorisée Figure 8. Effet de la mécanisation sur la surface cultivée par exp lo itation dans l'O uest du Burkina Faso (FAURE, 1991, 1992). A griculture et développement ■ n° 2 - M a i 19 9 4 pement agricole général dans leurs zones d 'in te rv e n tio n , au M a li, au Sénégal, en C ô te - d 'I v o ir e et au Cameroun. Le maïs a été recomman dé, voire parfois imposé, com m e p la n te de ro ta tio n p r in c ip a le en c o m p lé m e n t du c o t o n n ie r . Les actions d 'in te n s ific a tio n pour les cultures vivrières ont été dirigées de façon privilégiée vers le maïs : semences améliorées, engrais, herbi cides (souvent à crédit). Les résultats o b te n u s sont iné g a u x selon les thèmes techniques et les pays. Les semences améliorées de maïs ont été l'o b je t d'une vulgarisation massive, jusqu'à 800 tonnes par an dans la zone cotonnière de Côted'Ivoire jusqu'en 1988, ce qui repré sente environ 40 000 hectares culti vés. Dans les autres pays, les livraisons de semences p o rta ie n t g é n é ra le m e n t sur m o in s de 100 tonnes par an. L'apport d'engrais sur la culture de maïs ne s'est largement développé que dans la zone c o to n n iè r e du M a li. La surface en maïs fe rtilisé serait passée de 10 000 hectares en 1981 à 70 000 hectares en 1992, mais avec une réduction des doses épandues. La pratique de la fertilisa tion minérale a été d'abord soutenue par des mesures incitatives. Le Mali est en effet le seul pays à avoir enga gé une action publique de collecte du maïs d'une envergure significati ve (jusqu'à 8 000 tonnes collectées) à un prix rentabilisant l'emploi des engrais. La libéralisation du marché c é r é a lie r en 198 6 a c o n d u it la CMDT à abandonner cette collecte : l'in flé c h is s e m e n t des surfaces de maïs est depuis lors perceptible et les producteurs se tournent vers la cultu re associée maïs-sorgho. Les herbicides ont connu un déve loppement élevé au Mali et en Côted'Ivoire, contrairement au Sénégal et au Cameroun. La motivation de leur u t ilis a t io n relève p l u tô t d 'u n e logique d'extension des surfaces que d'intensification des cultures. L 'a p p u i à la m é c a n is a tio n des exploitations cotonnières (crédit aux équipements et formation des agri culteurs) a apporté une contribution Céréales en Afrique plus décisive à la diffusion du maïs que les actions d'intensification. En tant que plante de rotation p r iv i légiée avec le cotonnier, le maïs a pleinement bénéficié de l'extension des surfaces, rendue possible avec la m é c a n is a tio n (fig u re 8). Par e x e m p le , à D a b o u ra au B u rk in a Faso, l'équipement en culture attelée puis m o to ris é e a c c o m p a g n e la réduction de la place du sorgho dans l'assolement. La crise cotonnière change la donne A partir de 1986, la crise des filières cotonnières, caractérisée par la chu te du prix du coton sur le marché in te rn a tio n a l, v ie n t p e rtu rb e r les dynamiques céréalières. Les sociétés cotonnières, confrontées à des défi cits financiers, réduisent leur appui aux producteurs. Leur désengage ment concerne en premier lieu les cultures vivrières. Le crédit et la distribution relatifs aux intrants pour les cultures vivrières sont remis en cause. Actuellement, le secteur privé, trop peu développé, ne peut pas encore se substituer à cette organisation. Son intervention risque d 'ê tr e lim ité e aux seules zones les plus accessibles et les plus rentables, délaissant donc une gran de partie du milieu rural. Un secteur associatif de type groupements de producteurs s'organise progressive ment, mais il serait nécessaire de for mer les représentants, en particulier à la gestion. Chez les agriculteurs, la crise se tra duit par une baisse sensible de la marge cotonnière. Les intrants sont plus chers alors que le prix du coton stagne ou dim in u e selon les pays. Cette situation compromet l'intensi fication du maïs qui était jusqu'alors financée en grande partie par les recettes du coton. La valorisation marchande du maïs est bien souvent trop limitée pour couvrir les charges de la culture. Au Mali par exemple, dans l'une des régions les plus avan cées (Koutiala), la part de la produc tion de maïs destinée à la vente est trop faible, de l'ordre 20 % en 1992, c'est-à-dire grosso modo 500 k ilo grammes de grains par hectare. Cela permettait de couvrir, en 1993 avant la dévaluation du franc CFA, 50 kilo grammes d'engrais com plet et 100 kilogrammes d'urée par hectare. Dans les zones cotonnières du Mali, du Burkina Faso et du Togo, les pro ducteurs réagissent en restreignant les intrants pour le cotonnier et le maïs. Ainsi au M a li, alors que la C M D T recom m ande pour le maïs l'e m p lo i de 100 kilogram m es par hecta re d 'e n g ra is c o m p le t NPK (engrais céréales classique 15-15-15) et de 150 kilogrammes par hectare d'urée, les pratiques paysannes ont été les suivantes en 1993 : 53 % des parcelles de maïs suivies par l'enca drement de la CM D T reçoivent en moyenne 40 kilogrammes par hecta re d'engrais complet NPK et 62 %, 72 kilogrammes par hectare d'urée. Dévaluation du franc CFA : avenir incertain pour le maïs La dévaluation du franc CFA est la mesure d'ajustement économique la plus récente. Elle risque de pénaliser les cultures nécessitant des intrants importés, comme le maïs, à l'inverse du sorgho ou du mil. Com m ent le gain potentiel à l'exportation sur le c o to n s e ra -t-il ré p e rc u té sur les exploitations agricoles ? Une amélio ra tio n s ig n ific a tiv e de la marge cotonnière des producteurs pourrait redonner au coton un rôle clé dans le financement de l'intensification du maïs. Bibliographie AGEL C., Y U N G J.-M., 1985. La filiè re maïs au Sénégal. Paris, France, ministère des Relations extérieures, 109 p. + annexes. B E N H A M O U J., R A Y M O N D H ., ZASLAVSKI J., 1983. Evaluation des filières coton et maïs au Mali. Paris, France, ministè re des Relations extérieures, 250 p. BENOIT CATTIN M., DELGADO C., 1986. Les politiques alimentaires face aux change ments dans les modes de consommations des céréales en A friq u e de l'O u e s t : approche bibliographique. Montpellier, France, CIRADSAR, Documents Systèmes Agraires, n° 5. 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En la p a r t e s e p te n tr io n a l, á r e a de OÉ ture traditionnelle du sorgho et du mil, la substitution du ^ 3 zone de sovane d'A frique de l'Ouest et du Centre depuis s a b a n a de A fric a del O es te y del C e n tro d e sd e la traditionally grown, substitution of m aize for either of 0) cultivo tradicional de sorgo y mijo, la sustitución del m aïs au sorgho ou au mil ap p a ra ît cependant lim itée. these crops appears to be limited. These three species so rg o o d e l m ijo p o r el m a iz r e s u lta no o b s ta n te A yan t des exigences et potentialités bien distinctes, ces could be c o m p lem en ta ry com panion crops since their lim itad a. Por ten er exigencias y potencialidades m u y trois plantes p e u v e n t p ré se n ter une ce rta in e co m plé requirem ents and capabilities are quite differen t, i.e. distintas, estas tres plantas pu ed en pre se ntar ciertos m entarité dans les systèmes de culture : le sorgho et le so rghum an d m illet are stable food crops in climatic corácteres complem entarios en los sistemas de cultivo: mil sécurisent la production v iv riè re de l'e x p lo ita tio n and economic risk situations, whereas m aize is a high el so rgo y m ijo co ns tituy en un a s e g u rid a d p a r a la face au x risques climatiques ou économiques, tandis que y i e l d c r o p . T h e c o t to n crisis a n d d i v e s t i t u r e o f producción de plantas com estibles de la explotación le m aïs rép on d à un objectif de p ro du ctivité . La crise d e v e l o p m e n t a g e n c ie s a t t h e e n d o f t h e 1 9 8 0 s fren te a los riesgos climáticos o económicos, mientras cotonnière et le désengagem ent des structures de d éve challenges the intensification of cereal cropping. This q u e el m a i z c o r r e s p o n d e a un o b j e t iv o de loppem ent, intervenus à la fin des années 80 , rem ettent will probably lead to renew ed interest in sorghum and p ro d u c tiv id a d . el en cause l'intensification des céréales. On pourrait donc m ille t to t h e d e t r im e n t o f m a iz e , w h ic h re q u ir e s d e s in te re s a m ie n to po r las estructuras de desarro llo , s'attendre à un regain d'in térêt pour le sorgho et le mil, additional inputs such as fertilizers. The future of m aize que se produjeron a finales de la década del 80 , ponen ou détrim ent du maïs, qui nécessite des intrants com m e is now uncertain, due to devaluation of the CFA franc, e n e n t r e d i c h o d e n u e v o la in t e n s if ic a c ió n de los les engrais en particulier. La d évalu ation du franc CFA and depends on w heth er cotton export earnings will be cereales, por lo que habria que esperar que el sorgo y laisse un e in c e rtitu d e q u a n t à l 'a v e n ir du m a ïs , qui passed on to the farm ers. m ijo puedan ad q u irir nuevo au ge , en de trim e nto del dé pend de la répercussion du gain à l'e x p o rta tio n du La crisis a lg o d o n e ra y K e y w o rd s : m a iz e , s o r g h u m , m ille t, c o tto n p la n t, m a iz , el cual necesita insum os com o los ab on os en coton sur les exploitations agricoles. cropping system, fa rm in g system, econom y, B urkin a particular. La devalu ació n del franco CFA deja cierta M ots-clés : m aïs, so rgh o, m il, c o to n n ier, sy stèm e de Faso, C ôte-d'Ivoire, M ali, Senegal, Chad, Togo. in c e rtid u m b re en cu an to al p o rv e n ir del m a íz , que culture, système de production, économie, B urkina Faso, d e p e n d e de la rep ercu sió n de la g a n a n c ia p a ra la C ôte-d'Ivoire, M ali, Sénégal, Tchad, Togo. exportación del algodón en las explotaciones agrarias. Palabras clave : m aiz, sorgo, mijo, algodonero, sistema de cultivo, sistema de producción, econom ía, Burkina Faso, Costa de M arfil, M ali, Senegal, Chad, Togo. A griculture et développement ■ n° 2 - M a i 19 9 4