1717 miles à bord de Pen Duick III

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1717 miles à bord de Pen Duick III
1717 milles à bord de Pen Duick III
Les prémices
A Saint Tropez, Arnaud L… me propose de convoyer Pen Duick III, jusqu’en Bretagne sud.
Alors que je participe à cette extraordinaire fête de la voile sur un autre voilier la proposition
qui m’est faite sur le quai, pendant les « Voiles de St Tropez » semble très sérieuse. Ce que je
pensais être une « mondanité de ponton » est devenu une réalité.
Après avoir revu mon emploi du temps, je donne mon ok lors de la soirée de « fête des
équipages » à la « Ponche » sur un fond de musique Rock en Roll assourdissante et pendant
un feu d’artifice digne de Saint Tropez au-dessus d’une baie encombrée de Yachts.
Pour moi après les « Voiles de St Tropez » le mois de d’octobre s’annonce donc bien.
Tous les Pen Duick ont fait un grand tour en Méditerranée pour Banque Populaire le
mécène de l’Association Eric Tabarly.
Ils ont participé avec succès et brio aux différents rassemblements : la Juris’Cup à Marseille,
les Régates Royales à Cannes, les Voiles de St Tropez.
Les 2 voiliers Pen Duick VI et Pen Duick III regagnent leur port d’attache, Lorient à la Cité
de la Voile Eric Tabarly, « cathédrale » de la voile dédiée au célèbre navigateur. Ils
navigueront de conserve.
Les autres Pen Duick regagneront Lorient par la route. Les membres d’équipages de Pen
Duick viendront renforcer l’équipage de Pen Duick VI.
Arnaud le skipper que je connais m’a fait cette proposition pour compléter l’équipage. Il
semble qu’aucun adhérent de l’Association ne soit tenté. Tant mieux, pour moi régatier côtier,
je navigue en Méditerranée et notre terrain de jeux habituel va de la rade de Marseille à Saint
Tropez soit environ 100 milles.
Cette proposition est pour moi, une opportunité et une chance de naviguer sur un bateau de
légende, au palmarès prestigieux.
En fonction de la météo nous quitterions Marseille vers le 11 octobre, destination finale
Lorient.
Je me demande si sur une aussi longue navigation je serais à la hauteur ? Oh ! Oui j’aime ça
certes, mais sur un voilier de 18 mètres, les masses en mouvement, les tensions ne sont plus
du tout les mêmes. Un retour de bôme ou une bastaque, le poids des voiles; on ne doit pas se
placer n’importe ou sur le pont, laisser traîner ses mains. Le gréement, les manœuvres, les
habitudes d’Arnaud et de Carole le second à bord, tout sera un peu nouveau pour moi, mais
qu’importe ! J’apprendrai, je m’adapterai !
S’asseoir à la table à carte où était assis Eric Tabarly, Olivier de Kersauson, Gérard Petipas et
autres célébrités de la voile, peut-on refuser une telle proposition? Non, bien sûr.
Je quitte St Tropez et les « Voiles » à l’issue de la dernière régate le samedi non sans prévenir
Arnaud que je serais en « stand by » à Cassis en attendant leur arrivée au vieux port de
Marseille.
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Pendant le voyage de retour je me gratte la tête en cherchant une idée pour expliquer à ma
compagne que je vais partir en voilier une vingtaine de jours. Au bout d’un moment j’ai une
idée, eh oui ! Qu’elle est bonne ! Elle ne connaît pas la Bretagne sud, ce serait sympa qu’elle
me rejoigne et que nous fassions du tourisme, pas mal, non ?
En fait, tout bien réfléchi après une discussion avec mes compagnons de voyage, pour des
provençaux, faire du tourisme en Bretagne à la Toussaint, ce n’est peut être pas la meilleure
période pour découvrir les charmes de la Bretagne…
Les préparatifs et l’équipage
7 personnes seraient idéales et nous ne sommes que 5. Arnaud L. le Skipper, Carole le second,
Patrick F. maître nageur sauveteur et membre de la SNSM, David S. Médecin qui restera
uniquement sur l’étape Marseille Palma, un cadeau d’anniversaire de ses proches, et moimême.
Plusieurs fois, Arnaud m’a demandé si je connaissais une personne disponible pour compléter
l’équipage.
Or il se trouve que je connais Charlène G. officier de marine, bretonne, actuellement sur un
trois mâts. Je la contacte, elle n’est pas disponible pour nous accompagner mais fait
fonctionner son réseau.
Un jour avant le départ une voix sur mon téléphone, « bonjour, Charlène m’a dit que … »
Nous prenons un pot et en quelques minutes, je suis presque persuadé qu’Arnaud validera la
candidature de Julia B. « Capitaine 200 » fraîchement promue et un peu « garçon manqué »
ou plutôt « fille réussie » au caractère bien trempé. Je l’invite à se présenter au Vieux Port dès
l’arrivée des 2 voiliers.
Seulement voilà, les ports : la Pointe rouge, le Vieux Port, l’Estaque, sont complets. Seul le
port de Corbières à l’ouest de Marseille pourra recevoir les deux voiliers. C’est au bout du
trou du c… du monde mais qu’importe… Pour Julia, nous verrons cela demain matin,
quelques heures avant le départ. Le lendemain en fin de matinée l’équipage est constitué :
Au départ de Marseille 6 membres d’équipage
Arnaud L. le skipper d’un calme absolu mais qui sait prendre un ton plus ferme sans élever la
voix (il déteste les cris) lorsque la sécurité ou la rapidité de la manœuvre l’exige, et qui se
« venge » sur son paquet de cigarettes ! Il sait choisir les fenêtres météo !
Carole le second un petit bout de femme qui paraît même fragile, à qui l’on donne entre 18 et
22 ans, qui déborde d’une énergie peu commune. Elle n’a pas vraiment le physique de son
mental.
Patrick F. au caractère paisible et posé tout en force et en muscles, et doté d’un solide appétit
et ténor à ses heures, pêcheur quelque fois…
David S. très discret et impatient de vivre son cadeau d’anniversaire, lui est passionné de
voile, mais pas son estomac qui n’aime pas vraiment le bateau.
Julia B. Déjà connue de vous doté d’un caractère solide, pas vraiment « faible femme » non
plus. Eh ben ! Cela en fait deux à bord, nous allons être gâtés.
Moi-même un amateur éclairé, sans plus, habitué des régates côtières, mais très motivé.
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L’équipage est toujours un assemblage complexe de personnalités qui doivent s’entendre car
au-delà de quelques jours, des différends peuvent agacer; et comme dans toute « cuisine » il
faut un peu de piment. Carole et Julia vont jouer parfaitement ce rôle.
Le 10 octobre, le départ est proche.
Le départ a été avancé au mercredi 10 octobre, prochaine étape Palma de Majorque.
Nous avons rejoint les Pen Duick parqués sous la grue de levage du port de Corbières (ce
n’est pas vraiment Las Vegas), mais c’est calme, c’est bien pour récupérer.
Il est 17h00, l’avitaillement a été fait par Carole dans l’immense grande surface luxueuse des
quartiers Nord de Marseille « Le Grand Littoral ». Nous trions et arrangeons les provisions
pour Pen Duick VI et Pen Duick III pour plusieurs jours de navigation. Les coffres sont pleins
à craquer de victuailles en tout genre.
Cap sur Mallorca au 212° pour 280 miles
Notre équipement a été sélectionné par Carole, des vêtements Musto Mpx en goretex de
première qualité, des gilets de sécurité et les longes que nous devrons mettre en cas de
mauvais temps et obligatoirement de nuit. Il est d’ailleurs TOTALEMENT interdit de
« pisser » par-dessus bord, la nuit.
Je suis maintenant impatient de quitter le quai avec un petit peu de trac, mais heureusement le
sentiment qui domine c’est une confiance dans le bateau pour sa conception, sa solidité, son
palmarès, bien sûr, et aussi son commandement.
La fenêtre météo est devenue favorable, nous quittons le quai vers 19h30, il fait nuit, le temps
est calme. Nous hissons les voiles, la rade de Marseille est illuminée nous laissons Planier à
bâbord, cap sur Mallorca au 212° pour 280 miles.
J’avais envie depuis longtemps de cette navigation au large, un vrai dépaysement, une vraie
coupure, se détacher du quotidien, des actualités, de la politique, de la crise. Naviguer au large
et naviguer dans la sérénité. Les grands espaces vierges, que ce soit mer ou montagne, il n’y a
rien de tel pour se régénérer.
Une première organisation des quarts
Arnaud a organisé les quarts. Il y aura 3 quarts de 3 heures par équipe de 2.
Patrick et Julia, Arnaud et David, Carole et moi. Nous aurons donc 6 heures pour nous
reposer ou vaquer à des travaux divers ou à nos occupations. Carole va cuisiner dès le premier
soir des pâtes en sauce. Je fais part de mon admiration à la cantonade. Arnaud me répond « Ne
t’inquiète pas, tu auras l’occasion de briller » Oups ?
La cuisine est un art…
Là me concernant, il y a un blême ou « comme un bruit de vaisselle cassée ». En effet pour les
tâches ménagères je suis d’une nullité crasse et surtout dans le domaine de la cuisine car je
reconnais que dans une maison je ne sais rien faire. J’ai toujours et sûrement été trop gâté par
mon entourage féminin. Il va falloir que je compense mais comment ? … J’ai peut être une
idée ! Je n’ai jamais eu le mal de mer et pour faire la plonge je ne suis pas trop mauvais.
La Nav’ vers Mallorca
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Bon revenons à la navigation, la NAV comme ils disent, je viens d’apprendre un mot nouveau
réservé aux seuls initiés.
Nous garderons le moteur pour traverser le plus rapidement possible. Arnaud ne veut pas
lambiner dans le Golfe du Lion.
Les marins ou plaisanciers qui naviguent en méditerranée, mer sans marée font rire les marins
bretons… mais pas toujours, comme nous le verrons lors de notre première nav’ de Marseille
à Palma. A cet endroit les sourires seront un peu crispés, sans gravité heureusement!
Les marins bretons dont je suis entouré trouvent que l’atlantique est plus prévisible et que la
Méditerranée peut réserver bien des surprises…
Les quarts vont succéder aux quarts, 2 équipiers par 2 pendant 3 heures ; Pour faire
connaissance c’est un moment privilégié ; échanger, nous découvrir, échanger des opinions.
L’un barre pendant que l’autre veille avec l’aide du logiciel de navigation, de l’AIS et des
jumelles.
Le Cap au compas et aux instruments.
Barrer au large par nuit noire, exige une assez grande concentration car on fixe le compas
surtout si la mer est formée et la nuit noire. Nous faisons des séquences de barre de 1 heure ou
½ heure. Carole, mon chef de quart, reste très exigeante sur le respect du cap.
Mais je vais tout faire pour m’améliorer et apprendre à utiliser l’électronique : angle,
orientation et force du vent, je vais découvrir l’AIS et parfaire ma formation sur les logiciels
de navigation.
De Marseille en vue de Mallorca où nous allons être un peu secoués.
La navigation va s’effectuer vers Palma pour l’essentiel avec l’aide du moteur qui trône au
centre du bateau comme un « meuble », entre les bannettes.
Nous n’avons pas le choix le vent reste faible et/ou nous souffle dans le nez. Faire du près
n’est pas confortable et cela rallonge la route.
On fini par intégrer le vrombissement comme en avion et s’y habituer. Certains utilisent des
boules quiès, pas moi.
Les quarts se succèdent jusqu’au vendredi matin ou la journée s’annonce, radieuse, le temps
est dégagé, le soleil nous réchauffe, nous avons enfin un vent suffisant et favorable.
En vue de Palma de Mallorca
Ce vendredi 12 octobre, Carole et moi prenons le quart de 0h00 à 3H00, puis de 9H00 à
12H00. La navigation s’effectue alors au bon plein, je barre avec une terre comme repère,
c’est plus facile qu’aux instruments nous filons à plus 8 nœuds, tout va bien, il fait beau, le
soleil voilé nous chauffe. Nous serons à Palma en milieu d’après midi. Pour ajouter à cette
matinée de navigation idéale, Carole m’annonce que Pen Duick VI est derrière nous à
quelques 6 ou 7 miles mais … Mais selon l’AIS, il file à 12 nœuds sur nos talons.
Entre Pen Duick III et Pen Duick VI on régate, pour rire …
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C’est toujours pareil. Dès que 2 voiliers naviguent à proximité, ils sont en « compète », ils se
tirent la bourre, et c’est à celui qui arrivera le premier à destination. Entre « voileux » c’est
une question de fierté, c’est à celui qui tirera le meilleur parti de son voilier, des éléments, des
sautes du vent et qui exploitera au mieux la situation.
Sur Pen Duick III nous avons sorti tout le « linge », yankee, trinquette, voile de misaine,
grand voile ; zut ! Le vent est trop pointu pour mettre le spi asymétrique, la cote ouest de
Mallorca se rapproche et nous essayons de garder notre avance sur Pen Duick VI pour, arriver
à Palma les premier et … bien sûr, « gagner » l’étape, mais pour rire bien sûr.
Mais a n’en pas douter, sur Pen Duick VI, ils ne l’entendent ainsi et ne vont pas se laisser
faire et eux aussi ont envoyé toute la toile le yankee une belle voile toute récente faite sur
mesure qui a coûté « un bras » et qui pèse plus de 50 kg, la grand voile lattée, l’artimon. Les
hommes de quart sont suspendus à la barre à roue, à un puis à deux, tellement le voilier de 23
mètres file sur les vagues.
C’est vrai, le vent a forci, et … sur notre droite le ciel s’est obscurci silencieusement. Un front
de nuages bas et noirs au raz des vagues gagne sur nous en venant de l’ouest. Je dis à Patrick
« tu vois ça, en désignant les nuages noirs, cela ne me plaît pas du tout ».
David S. qui est toujours en désaccord avec son estomac est calé dans l’arrière étroit derrière
les winches du yankee pour prendre l’air. A ce moment nous sommes en mer depuis 2 jours et
je suis pressé de contourner le Cap au sud ouest de l’île de la Dragonera qui nous sert d’amer
et d’arriver au port de Palma.
Une tornade croise notre route.
A ce moment, le ciel est devenu très noir et le plafond très bas. Là, les éléments se déchaînent,
une pluie drue crépite autour de nous, le grain est sur nous. Arnaud et Patrick à grands
renforts de muscles affalent, le yankee, la misaine, prennent 2 ris dans la grand voile, la
puissance du vent augmente à la vitesse grand V, Arnaud pieds nus qui n’a pas eu le temps de
s’équiper prend la barre, David S toujours capelé à l’arrière ne peut plus bouger, le voilier gîte
à 45°, tout le reste de l’équipage reste à l’intérieur prêt à intervenir.
J’ai le nez sur l’anémomètre et je vois l’aiguille atteindre les 52, 55 nœuds. Arnaud est arquebouté sur la barre de toutes ses forces pour empêcher le voilier de partir au lof. Le vent est si
fort, que tout le gréement est « secoué comme un prunier ». Les mâts tremblent, le bruit est
tel que l’on a l’impression d’être dans le tambour d’une machine pendant un essorage. Je
risque ma tête dans le cockpit. L’aspect de la mer est celui du passage d’un ouragan. Cela va
durer 15 minutes, creuser la mer, et le vent va ensuite retomber à 35/40 nœuds, beaucoup
plus négociable pour un bateau comme Pen Duick III. L’épicentre du grain est passé.
Jean Philippe s’inquiète pour nous.
Soudain une voix retentit à la VHF, c’est la voix calme et posée de Jean Phi. (le skipper de
Pen Duick VI) qui s’inquiète pour nous, car notre voilier est plus petit et plus bas sur l’eau.
«Arnaud, ici Pen Duick VI, nous avons été pris sous une tornade, l’anémomètre a été bloqué
à 80 nœuds, Nous avons perdu le Yankee que nous avons du couper au couteau, les boîtiers
de lattes ont explosés et une partie des coulisseaux de la grand voile arrachés les uns après
les autres, en partant de la têtière. La grand voile est tombée à l’eau. Nous avons tout affalé,
récupéré ce que nous avons pu et faisons route directe au moteur sur Palma. Nous espérons
que pour vous tout va bien. Nous restons à l’écoute. Terminé. ».
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Nous saurons plus tard ce qui s’est passé à bord de Pen Duick VI par les récits de Jean Phi,
Simon, Greg, Rudy, Leo et les autres. Pen Duick VI filait à 12 nœuds avec des surfs à 16
nœuds, ils étaient 2 ou 3 à se pendre à la barre à roue ? En fait quand le vent a forci, le Yankee
a été amené et ferlé rapidement et arrimé avec un raban à une cadène. Quand le vent s’est mis
à souffler à plus de 150km à l’heure, il a pivoté de 180°, entraînant un virement en « cata ».
Le Yankee est remonté le long de l’étai en arrachant la cadène soudée au pont, et en
emportant au passage un chandelier. Les équipiers, dont certains taillés comme des rugbymen
suspendus à cette voile n’ont pas réussi à la redescendre. C’est plutôt la voile qui les tracte
vers le haut. Certains équipiers ont dû ramper sur le pont pour se mettre à l’abri.
Jean Phi qui était à la barre a hurlé « çà vire » et ordonne à Simon le second, de prendre le
couteau et de couper la voile pour libérer le bateau du yankee qui risquait de faire démâter le
voilier. Sans discuter, Simon s’est précipité à l’avant avec le couteau et a tranché la voile
d’avant qui s’est évaporée dans l’air en lambeaux sous les yeux ébahis de ceux qui étaient
restés sur le pont. Tout le reste de l’équipage et des adhérents est à l’intérieur. Heureusement
la grand voile défaite du mât et qui était passée à l’eau a pu être récupéré à grand peine.
La Tornade est passée, mais je pense qu’elle sera au cœur des discussions à Palma.
Ouf, Jean Phi, et Arnaud peuvent respirer. Pas de blessé, pas d’homme à la mer, ce qui aurait
pu - dans ces conditions de vent- être dramatique, certes il y a des dommages matériels sur
Pen Duick VI …
On peut se rouler une cigarette, et ce soir, faire couler la bière… à Palma. Ah ! La magie des
escales … Heureusement qu’elles sont là pour se requinquer.
Dans ces situations on se félicite d’être sur un voilier aussi solide que Pen Duick III qui de
plus a été remis à neuf en 2011.
Le ciel s’est éclairci et le vent un peu retombé. Nous faisons route vers Palma dans une mer
formée, dès que nous contournons l’île de la Dragonera au sud de Mallorca la mer va un peu
se calmer.
Dans la baie de Palma nous croiserons un magnifique voiler toutes voiles dehors « Highland
Breeze » un Swan 112 qui revient des Voiles de St Tropez, un habitué de ce rassemblement.
Nous arriverons la nuit tombée au port de Palma vers 19h30. Pen Duick VI est déjà amarré au
quai d’honneur nous allons pouvoir échanger sur nos « aventures » de l’après midi.
L’escale de Palma.
Les 3 jours à venir me permettront de découvrir les marinas de Palma, ses voiliers de
milliardaires, on reste les yeux écarquillés et la mâchoire pendante devant des bateaux dont le
plus surprenant « A » de Abramovitch dont l’esthétique ne laisse pas indifférent. Il nous
bouchera la vue sur mer pendant toute notre escale et le comble, ses ouvriers montent des
échafaudages le long de sa coque et font un bruit infernal à 8h00 du matin, impossible de
dormir. Tant pis nous allons faire du tourisme.
Pendant ce temps les équipiers de Pen Duick VI répareront les dégâts les plus urgents : le
chandelier, les coulisseaux de la grand voile, pour les feux de mât cela attendra. Ils sont
bloqués pour plusieurs jours. Il faudra faire le tour des shipchandlers pour trouver les pièces
pendant le WE mais vu le nombre important de marinas et de bateaux hyper luxueux, cela ne
devraient pas être un problème. Il faudra aussi inspecter soigneusement les gréements des 2
Pen Duick qui ont été violemment secoués.
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Revenons à l’équipage !
Dés que David S a posé le pied sur le quai, il se réconcilie avec son estomac, c’est magique. Il
prendra l’avion le lendemain pour rentrer sur Marseille avec regrets. Il nous dit : « vous
penserez à moi en passant le détroit de Gibraltar ». Ce sera fait.
Pour ma part je me dis que si nous nous avons été secoués en méditerranée qu’est ce que cela
va être dans le Golfe de Gascogne ? Vais-je continuer ? Mais très vite mon esprit cartésien et
fataliste reprend le dessus. Depuis le temps que je navigue, 55 ou 80 nœuds cela ne m’est
jamais arrivé, bon ça je ne pourrais plus le dire. La probabilité pour que cela se reproduise à
l’endroit ou je suis, est carrément infime voire nulle.
Ai-je eu peur, non pas vraiment, juste un peu impressionné de vivre une situation seulement
lue dans les récits des « fortunes de mer ».
Donc, c’est sûr, je continue. Je trouve l’expérience vivifiante et même intéressante surtout
qu’elle a été brève et sur Pen Duick III, sans conséquence ni humaine ni matérielle.
Le reste de l’escale de Palma, sera consacré à faire du tourisme, des courses et à rechercher
des connexions wifi pour renouer avec Internet (ah! Toile quand tu nous tiens !). Et pour
d’autres à passer des soirées ou des nuits enfumées et arrosées. Pour les marins, il est
important « faire la chouille » mot nouveau dont j’ignorais l’existence jusqu’à ce jour.
NAV de Palma de Mallorca à Cascais (banlieue de Lisbonne).
David parti, un nouvel équipier vient à bord.
Léo B. Jeune marin professionnel, féru de voiliers classiques, et qui rentre après avoir fait le
même circuit en Méditerranée que les Pen Duick sur un « classique ». Il embarque pour
compléter l’équipage a la place d’Antoine qui a dû rentrer chez lui précipitamment à cause
d’un problème familial.
C’est dommage pour nous car Antoine C… avait envie de faire cette navigation et que c’est
un marin émérite, ancien équipier d’Eric Tabarly et d’après ce que j’ai entendu, vainqueur de
la Transquadra 2011 en double sur un A35. Nous regrettons beaucoup, car sa présence aurait
permis d’échanger en informations et expériences de toutes sortes.
Léo, lui, vient du Pen Duick VI qui a sa préférence et qu’il compte regagner à Cascais, mais
… curieusement pour un raison que j’ignore…il restera avec nous jusqu’à Lorient.
Prochaine étape le détroit de Gibraltar à environ 467 miles au sud ouest.
C’est parti nous sommes le lundi 15 octobre, il est 19h30.
En fonction de notre réserve de carburant notre prochaine étape pourrait être Malaga ou
Cadix.
Je suis dans ma bannette en train de dormir, Arnaud me réveille; je croyais prendre mon quart
à minuit. En fait nous sommes encore loin du détroit et j’apprends qu’un courant contraire
nous ralentit et il est préférable de se poser à Almeria, pour faire du carburant car nous avons
dû utiliser beaucoup le moteur.
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Nous allons atterrir, tout le monde est sur le pont. De toute façon, j’ai demandé à être réveillé
pour tous les atterrissages. Arriver dans un port que je ne connais pas est un moment que
j’apprécie, de plus Almeria est un petit port où les bateaux comme Pen Duick III qui ont un
tirant d’eau de 2,75 mètres peuvent « talonner ». De nuit il faut bien observer et manœuvrer
avec précision.
Nous accostons vers minuit, au quai d’accueil dans un port calme et devant une ville
endormie. Un garde veille, nous demande nos pièces d’identités, nous sommes dans le détroit,
aux frontières entre l’Europe et l’Afrique, la surveillance est renforcée.
Un seul bar est ouvert. Il est important pour Arnaud et Léo de siroter une bière fraîche, je les
accompagne. Nous rencontrerons un hippie qui vient vers nous pieds nus, engage la
conversation et gentiment taxe des cigarettes.
Le lendemain matin comme à chaque escale, ruée vers les douches et les toilettes.
Après une balade, autour du port, sous un chaud soleil. Almeria est une ville calme, style
station balnéaire en fin de saison. D’ailleurs la piscine du Club Nautique a été vidée.
Dommage.
Nous repartons le lendemain vers 11H00. Nous longerons la côte sud de l’Espagne toute la
journée. C’est absolument incroyable, tout le sud du détroit de Gibraltar est « tapissé »
d’hectares de serres à perte de vue où sont produits les fruits et légumes qui alimentent tous
les supermarchés d’Europe. Et aussi une vision inhabituelle pour un français, toutes les
collines environnantes sont couvertes d’éoliennes.
En fait la végétation est très rase ? Est-ce une cause où une conséquence de cette forme
d’industrialisation de la terre et du vent, je l’ignore.
Traversée du détroit de Gibraltar.
Nous passons le détroit de Gibraltar dans la soirée, en hésitant, on s’arrête ? oui, non, après un
examen de la côte aux jumelles, du petit port, Arnaud décide de continuer sur Lisbonne, à la
marina de Cascais. Après tout ce n’est qu’à 300 miles, ben, on y va de ce pas.
Dès que nous sommes à proximité des « couloirs » de navigation marchands, notre hantise se
sont les risques de collision avec les navires de commerce. Ferries, porte-container, navires de
croisiéristes, pétroliers, chimiquiers, vraquiers auxquels s’ajoutent les nombreux pêcheurs et
leurs casiers. Ces derniers ne sont pas toujours équipés d’AIS. Donc vigilance, vigilance.
Dans tous les cas, quelle que soit la situation il vaut mieux leur laisser la priorité.
Là nous sommes servis. Le détroit de Gibraltar est très encombré. De nombreux bateaux sont
à l’ancre en attendant d’accéder au port industriel pour décharger leur cargaison.
Heureusement l’AIS (automatic information system) grand écran plaqué au dessus de la table
à carte, affiche la distance qui nous sépare de ces bateaux. Le cap et la vitesse et une
hypothèse de danger de collision. C’est une aide précieuse.
L’escale de Cascais, quelques fous rire en perspectives.
Nous atterrissons à Cascais à 2H00 du matin. L’arrivée de nuit dans un port avec les lumières
de la ville qui brillent davantage que les balises demande de l’attention et une bonne vision.
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Nous accostons sans difficulté au ponton d’accueil devant la pompe à carburant. Dès que le
bateau est amarré, je me promène sur le port pour voir un grand voilier à 2 mâts de l’autre
côté du ponton. La marrée est basse et le ponton très incliné. Je me dégourdis les jambes.
Le service de sécurité du port me fonce dessus dans une… Smart… équipée de gyrophares et
de projecteurs comme une VRAIE voiture de police, je maîtrise un grand éclat de rire à la vue
de cette « Goldorak » portugaise.
Le gardien du port très souriant me demande en anglais si je fais partie de l’équipage du
bateau qui est au ponton ? yes, c’est fou ce que je comprends bien l’anglais quand ce n’est pas
un anglais.
Il continue avec des explications, sur les formalités et le fonctionnement du port. OK, OK on
verra cela tout à l’heure à l’ouverture du bureau de la Marina.
Je lui demande si Pen Duick VI est déjà là, il me conduit au bureau, consulte son registre et
me dit « no, no ».
En mer depuis 3 jours notre priorité du moment, ce sont les toilettes… isolées, ah OUI !, Et
les douches chaudes ah OUI, OUI !!
Une nuit de fous rires sauf pour ceux qui dorment !
Mais ce ne sera pas le seul fou rire de la soirée. Je regagne le ponton du Pen Duick III. Et là à
ma grande surprise, je trouve Arnaud, Hugo, Léo et Patrick devant les bouteilles d’apéritifs et
les amuses gueules ??? Il est environ 3 heures du matin.
Arnaud a contacté Pen Duick VI et ils sont bien derrière nous à quelques heures, oui, oui
quelques heures. C’est vrai qu’ils sont partis de Palma, bien après nous, mais quand même
nous allons les attendre pour les accueillir…
L’alcool aidant les esprits s’échauffent et les langues se délient, le volume des voix augmente.
Et nous avons l’intention d’accueillir Pen Duick VI avec la corne de brume. Ça c’est une
riche idée, en plus il faut l’essayer avant. Mais cet essai n’est pas du tout du goût de la partie
féminine de l’équipage qui dort profondément. Au coup d’essai de la corne de brume, Carole
surgit dans le Cockpit, nous confisque l’instrument, râle en quelques mots et repart se
coucher.
Qu’importe nous avons une corne de secours. Soudain nous voyons une lumière au-dessus de
la digue, c’est eux, c’est eux, on prépare la corne de brume. Zut c’est la lumière d’un avion à
l’atterrissage, Oh là Oh là, la nuit va être difficile ; l’attente continue.
Tout à coup c’est sûr, c’est eux, 2 mâts, un ketch se prépare à doubler la digue, à cette heure
un ketch, c’est forcément lui c’est sûr. Arnaud donne un généreux coup de corne de brume
BOuJZJZJZJZJZ à réveiller tout le port, pour accueillir Pen Duick VI.
M… la coque est beige, c’est un Amel, Super Maramu 2000. Décidément, il y a beaucoup de
circulation dans ce port cette fin de nuit.
A l’intérieur de Pen Duick III, Carole et Julia ont prit leur parti de ne plus rien dire et
d’essayer de dormir. Elles règleront leurs comptes demain ou plutôt tout à l’heure.
Pen Duick VI arrivera à 5 heures et dès qu’il sera amarré cela se terminera par un gigantesque
apéritif : bières, rhum, punch, whisky, cacahouètes et amuses gueules etc… avec les 2
équipages sur Pen Duick III, soit au moins une quinzaine de personnes. Il est 5h30 du matin.
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Carole et Julia seront très agacées.
A Cascais la journée commence bien et elle sera longue!
Sur les pontons l’engouement pour les Pen Duick.
Tout au long de cette navigation je voudrais signaler l’incroyable engouement que les Pen
Duick suscitent sur les pontons, auprès des équipages des voiliers.
Dés que nous approchons des quais, les plaisanciers se précipitent, pour nous aider à amarrer
ces bateaux de légende. Pour les quinquagénaires de s’exclamer que c’est une partie de leur
jeunesse, pour les jeunes passionnés, en général, ils connaissent l’histoire de la voile de leurs
aînés.
Le lendemain ou plutôt le jour même.
Sans se coucher, après les formalités au bureau de la capitainerie, nous gagnons
l’emplacement désigné par la capitainerie de la Marina.
C’est là que nous rencontrerons un couple franco-anglais qui convoie leur voilier, un
magnifique RM 13,50 très bien équipé, pour Madère. Ils ont l’intention de traverser vers
Trinidad dans quelques mois. L’homme est fou de joie de voir les Pen Duick. Il exulte, fait
des bons sur le ponton. C’est sa jeunesse, en même temps qu’il passait le bac il suivait la
victoire d’Eric Tabarly dans la transat.
Eh même les marins anglais que nous croisons sont très respectueux de la mémoire de
Tabarly qui a été le premier à contester leur suprématie sur les mers et a en même temps
intéressé toute la France à la voile dans les années 60.
Toutes ces rencontres sont très très sympas ! Mais si vous êtes pressé, ce qui peut arriver,
alors que vous sortez sur le pont pour récupérer du linge qui sèche sur les filières, vous vous
retrouvez face à des personnes souriantes, prêtes à discuter sur l’histoire d’Eric Tabarly et du
Pen Duick III.
Dans le meilleur des cas la discussion se fait en français ou pire dans un anglais approximatif
et ce pendant une durée indéterminée. Car à ce premier groupe se joignent peu à peu tous les
équipages du ponton.
Avant de sortir sur le pont, il est donc conseillé de jeter un œil par les Goïot (NDLR : hublots)
pour s’assurer que le quai est désert.
C’est même étonnant après 40 ans. C’est l’incroyable travail de mémoire de l’Association
Eric Tabarly qui anime et entretien les voiliers.
Cascais, est une très jolie bourgade et une marina très très sécurisée de la bourgeoisie de
Lisbonne. C’est un spot de voile reconnu, spot de feu l’Audi Med Cup, où les Dragons et 4.70
font partie du paysage.
De nombreux voiliers sont en « stand by » depuis 10 jours dans le port. Ils attendent une
séquence de vent favorable pour descendre vers le sud : Madère, les Canaries, le Cap vert au
gré des itinéraires.
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Sur ce ponton nous ferons également la rencontre d’une petite famille de citadins, un jeune
couple souriant et calme en train de réaliser leur rêve. Ils ont 3 enfants. 7 ans, 4 ans et … 7
mois, le petit dernier ne marche pas encore. Ils ont transformé un équipet du carré en berceau.
Ils ont l’intention avec un couple d’amis de traverser vers les Caraïbes, le bateau ne fait pas
plus de 12 mètres. C’est pour moi un motif d’interrogation. Quel courage ! Cela
m’impressionne !
NAV’ de Cascais au puerto de A Coruña (port de la Corogne) 335 miles plein nord.
Il n’y aura pas que la cuisine à retravailler mais aussi les probabilités.
Un nouvel équipier Hugo B. arrive à Cascais juste avant le départ. Charpentier de marine et
lassé de travailler sur les bateaux à terre où à quai. Il a décidé que naviguer, était ce qui lui
convenait le mieux. Il cherche des embarquements pour parfaire sa formation. Il a une
préférence pour les voiliers classiques et des modes de navigation traditionnels.
Nous quittons Cascais à 22H30 après avoir dîné, par une forte houle. La nuit est noire, nous
faisons attention aux casiers des pêcheurs.
Nous naviguerons pendant 48h00, notre prochaine escale prévue est la Corogne.
Au cours de cette navigation, rien à signaler, excepté, que ma réflexion sur la probabilité va se
révéler fausse…
Il fait nuit, je suis de quart avec Hugo qui a embarqué à Cascais. Nous sommes à l’heure du
changement de quart (il doit être 3h45 du matin). Je suis à la barre, Hugo vaque entre la
cuisine et la table à carte. Carole et Patrick s’équipent pour nous remplacer. Hugo en profite
pour préparer un thé pour ceux qui ne dorment pas.
Arnaud le skipper ne dort que d’un œil comme d’hab’. Dans la couchette du premier carré
près du cockpit.
Un nouveau grain de courte durée mais assez violent.
La pluie se met à tomber brutalement et de plus en plus drue. J’ai eu tort de relâcher mon
attention. Je n’ai pas été assez vigilant avec le nuage qui était en partie dissimulé par la voile.
Soudain le vent se déchaîne, et s’ajoute à la pluie. Les voiles et leurs écoutes battent de tous
côté, secoue mâts, haubans dans un bruit infernal, le voilier est secoué, ébranlé, et tente de
partir au lof, je suis arc bouté sur la barre pour l’en empêcher. J’ai même l’impression à
certains moments que la barre ne répond plus, elle est toute molle, je pense qu’à cet instant
nous dérivons en travers du lit du vent.
J’ai peur que la contre écoute ne se coince dans le wishbone de la grande misaine et ne borde
la trinquette à contre et nous entraîne dans une direction ou une autre soit vers le lof au
virement ou pire vers l’empannage. Je m’accroche toujours à la barre pour contrôler le voilier,
pour le garder à distance respectable du vent debout ou du vent arrière.
Cela va durer moins de 10 minutes. Tout l’équipage est réveillé et se trouve dans la première
partie du carré pour intervenir le cas échéant.
Je suis trempé et ruisselant, je n’y vois plus rien derrière mes lunettes couvertes d’eau et de
buée.
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Le grain est entrain de passer Arnaud me demande si cela va, je lui réponds que oui et que
c’était une « expérience intéressante ». Il va me remplacer à la barre qu’il a eu raison de
renforcer avec du gray tape et un pied de table, car j’ai beaucoup tiré dessus sans
ménagement.
Après m’être séché je vais dans ma bannette pour récupérer et dormir un peu. En
m’endormant je me dis qu’il n’y aura pas que la cuisine à retravailler, mais aussi les
probabilités… de rencontrer un grain.
Tout le reste de cette navigation se passera sans incident. Une navigation tranquille.
Nous verrons au loin 2 tornades formées, et une en formation plus près de nous mais qui va
avorter.
Nous serons pris en chasse par une vedette de la police des frontières portugaise qui va
contrôler nos identités depuis leur vedette par VHF. Il est vrai que notre drapeau n’était pas
déployé.
Nous interviendrons aussi sur le moteur qui avait tendance à changer de régime pour nettoyer
le vase de décantation. Le gasoil d’Almeria était peut être sale.
Approche du Cap Finistere sous spi asymétrique.
La navigation se poursuit :
Nous approcherons du cap Finistere sous spi asymétrique une magnifique voile orange et
noire. Et dans ces moments précieux je peux vous dire que tous les équipiers se disputent la
barre. Et être de quart à ce moment là, est un atout majeur, qu’il est difficile de contester.
Escale à puerto de A Coruña.
C’est une ville connue du monde de la voile car c’est une étape de la course du Figaro.
La ville de la Corogne port de pêche et industriel important et la ville est bourgeoise très
vivante.
Cela fait penser à une ville de province qui a conservé ses traditions, des gens soignés qui
aiment vivre et sortir et faire la fête. D’autant que le port de plaisance et au cœur de la ville. Si
vous aimez les produits de la mer et le poulpe servis dans les bars à tapas, c’est là qu’il faut
aller.
Nous y trouverons un shipchandler à l’ancienne, un artisan capable - chose rare - de vous ré
usiner une platine de palan de grand voile en 2 heures à partir d’une pièce presque similaire.
Décidément la ville est d’une grande convivialité.
A ne pas rater la visite du bord de mer avec tous ces clubs de voile jusqu’à la tour Hercules le
phare le plus puissant du coin. Le vent du nord a soufflé fort toute la journée et le balcon en
haut de la tour est fermé.
Qu’importe, belles balades, restaurants de poissons, soirées arrosées et enfumées seront au
« menu » de cette escale pour les 2 équipages des Pen Duick.
La dernière soirée à la Corogne, nous sommes invités à dîner à bord de Pen Duick VI et c’est
Jean Phi, et Simon qui font la cuisine. Les 2 équipages se retrouvent à bord du grand voilier
de 23 mètres dans une ambiance de fête et de partage.
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Jean Phi a invité également les 2 jeunes navigateurs Florian et Alexandre qui partent pour un
tour du monde sur un petit bateau de 6,50 sans trop de confort. Je crois qu’ils ont apprécié
cette convivialité et le repas chaud. Cela leur a permis d’échanger avec des marins plus
expérimentés qu’eux.
Pour certains la soirée sera encore longue.
NAV : puerto de A Coruña (port de la Corogne) à Lorient : 335 milles au cap 40°.
Nous quittons la Corogne à 11H00 ce dimanche 28 octobre. La traversée du Golfe se fera sans
encombre souvent escortés par les dauphins. Aidé par le moteur, nous doublerons Pen Duick
VI à l’aube, parti un petit peu avant nous. Mais, dès que le vent se renforce, il nous « dépose »
très rapidement. Il arrivera quelques heures avant nous à Lorient.
Mais !... mais le Soleil brille aussi en Bretagne ! au moins une journée, la preuve.
Nous traverserons le Golfe de Gascogne en 48 heures chrono et nous arriverons à notre
destination finale, Lorient, la Cité de la Voile Eric Tabarly, avec un lever de soleil féerique
en vue de l’île de Groix que Patrick se chargera d’immortaliser. Mais qui a dit qu’il pleuvait
souvent en Bretagne ?
La journée promet d’être radieuse et ensoleillée à la Cité de la Voile Eric Tabarly. Nous
partageons la fin de ce voyage avec les équipages des 2 voiliers et Mariannick, à grands
renforts de pots jusqu’à la nuit tombée et de partages des repas, de souvenirs frais, d’échanges
de mails et de téléphones… Les 2 voiliers sont à quai, nous participons à désarmer Pen Duick
III. C’est un petit moment de blues. C’est à ce moment où je rencontre Denis L. que nous
parlons avec enthousiasme de cette navigation et que je récolte mon devoir de vacances que
vous lirez peut-être si vous avez quelques minutes à perdre.
Pour ceux des équipages qui ne se sont pas dispersés, comme moi, nous terminerons la soirée
royalement car nous sommes invités à un dîner par l’Association Eric Tabarly en présence de
MM. Gérard Petipas et de son épouse, Jean-Yves Le Huédé, Denis Löchen, et Mariannick
Buffard dans une bonne table de Lorient.
Voilà c’est fini. Demain c’est le départ, il y aurait plein d’autres anecdotes à raconter sur les
uns et les autres :
Comme cet ENAURME thon que Patrick a failli sortir, mais au moment de le sortir, le fil a
cassé, contrarié, il est parti se coucher … sans même diner ! C’est qu’il était vraiment très
contrarié !
Et aussi ces 2 jeunes navigateurs Florian et Alexandre de 1,80m, 1,90m croisés à La Corogne
qui arrivaient de Brest par vent fort et qui partaient pour un Tour du Monde sur un 6,50
mètres sans trop de confort ni d’équipement avec un projet humanitaire autour de l’économie
solidaire. Un peu fou, non ?
Mais ce serait sans fin,donc en conclusion,
Une dernière confidence mais ne la répétez pas afin de « nous » conserver cet espace de
liberté,
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A mesure que la terre s’urbanise et se comble de présence humaine aux règles de plus en plus
contraignantes, la mer semble toujours offrir une certaine liberté, des rencontres
enrichissantes, la magie du voyage avec un angle de vue différent.
Mais si mon récit vous paraît plat sachez que «aucun mot, aucune phrase ne peut décrire ce
qu’on éprouve», il faut vivre ces moments.
Quand on aime la nature et les grands espaces avec l’illusion qu’ils sont encore vierges,
aucun mot, aucune phrase, ne peut décrire le sentiment de plénitude que l’on éprouve
lorsque on prend le quart de nuit, au large, par un ciel clair, une pleine lune qui éclaire comme
en plein jour et se reflète dans les mouvements des vagues et de l’écume ; que le vent régulier,
gonfle les voiles, pousse le voilier qui trace sa route, et que les dauphins viennent parader et
jouer à côté de vous pendants des miles et des miles. Avec le seul bruit du vent et des vagues,
et la présence des dauphins on a vraiment l’impression de communier avec la nature. Il faut le
vivre. Si vous en avez l’occasion, faites-le.
Mais ils ne dorment, donc jamais, ces dauphins. Ils sont infatigables ces bestiaux, et en plus
ils crient…on les entend même à travers la coqu.
Mon seul regret, vraiment le seul.
Un seul regret, j’avais pris des maillots de bains, mais ils sont restés au fond du sac. Pour que
le voyage frise la perfection il a manqué un mouillage forain dans une crique de rêve, déserte,
avec de l’eau claire comme du cristal ou l’on plonge depuis le roof et l’on fait quelques
brasses sous l’eau après une journée de navigation, au soleil couchant… Pendant que Patrick
cuisine les tranches de l’ENAURME thon à la Martiniquaise, non Patrick, c’est pour rire !
Quoi que, j’ai réalisé après, qu’il n’y avait pas de guindeau sur PEN DUICK III je me
demande comment est-ce, de relever un mouillage à la main, sur un bateau de 13,5 tonnes
quand le vent se lève ?
A tous les équipages des Pen Duick III et VI, pour ces moments de vie !
A plus
André Chiche
Post Scriptum :
Concernant la cuisine à bord.
Ah oui ! j’ai oublié, j’ai pris conscience que la cuisine est un élément important de la bonne
humeur de l’équipage, il faudra que je m’y mette. C’est promis. Dès que rentre, je fonce à la
FNAC pour acheter « La cuisine à Bord » sur le conseil de Carole et je m’entraîne…
Et je vous suis reconnaissant de m’avoir fait découvrir les nouilles chinoises, c’est pour moi
un plat qui manquait à ma culture gastronomique… Mais je reconnais qu’aux allures de près
et par forte houle, c’est pratique.
Et par mimétisme avec mes amis marins, j’ai même bu de la bière, beukler sans alcool,
berKkkk. Alors… Vous voyez, on peut toujours s’améliorer.
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