L`approche de la dyspepsie

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L`approche de la dyspepsie
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L’approche de la dyspepsie
par Marc Bradette
Marie, 45 ans, ressent depuis deux mois des douleurs épigastriques. Ces dernières s’accompagnent d’une
digestion lente et laborieuse. Elle se plaint aussi d’une plénitude postprandiale et de nausées, mais elle
ne vomit pas. Elle se sent toujours mieux l’estomac vide. Elle ne fume pas et ne prend aucun médicament.
L’examen clinique ne révèle rien d’anormal, sauf une légère sensibilité à la palpation de l’épigastre. Il
n’y a pas de masse palpable dans l’abdomen. Elle aimerait bien trouver le traitement qui ferait disparaître
ses maux une fois pour toutes.
Définition de la dyspepsie
La dyspepsie peut se définir par un ensemble de symptômes
comprenant une douleur ou une gêne qui naît dans le tube
digestif supérieur. Cette douleur ou cette gêne peut s’accompagner de un ou de plusieurs des symptômes suivants : pyrosis, régurgitations acides, éructations, nausées, sensation de
digestion lente et de ballonnement postprandial1-3.
Épidémiologie
La dyspepsie est un trouble extrêmement fréquent dans
la population adulte. Une étude menée au Canada montrait
que 29 % des adultes canadiens souffrent de symptômes de
dyspepsie au moins une fois par semaine1. Si l’on inclut les
symptômes de pyrosis et de régurgitation, la prévalence
peut atteindre jusqu’à 40 %. Des études longitudinales ont
montré que les symptômes de la dyspepsie peuvent fluctuer
avec le temps. Moins de 25 % des adultes souffrant de dyspepsie consultent un médecin pour ce problème. L’intensité des symptômes, l’anxiété, le stress psychologique et le
manque de soutien psychosocial sont tous des facteurs qui
peuvent amener le patient à consulter. Deux études récentes
Le Dr Marc Bradette, gastro-entérologue, exerce au Centre
hospitalier universitaire de Québec, Hôtel-Dieu.
effectuées au Canada et en Angleterre ont montré par une
évaluation objective et standardisée que la qualité de vie des
patients souffrant de dyspepsie pouvait en être fortement
affectée, et qu’elle entraîne aussi un important absentéisme
au travail1,3.
Quelles sont les causes de la dyspepsie ?
Les principales causes organiques de la dyspepsie comprennent l’ulcère gastroduodénal (de 15 à 25 % des patients), l’œsophagite de reflux (de 15 à 20 % des patients)
et, plus rarement, la néoplasie gastrique ou œsophagienne
(moins de 1 % des patients). On reconnaît maintenant que
chez plus de 60 % des patients atteints de dyspepsie, on ne
retrouve aucune explication organique ou biochimique
après une exploration initiale par endoscopie ou repas baryté. On considère alors que ces patients souffrent d’une
dyspepsie fonctionnelle4-7.
Maladie ulcéreuse
La maladie ulcéreuse causée par l’infection à Helicobacter
pylori et par les anti-inflammatoires non stéroïdiens demeure une cause importante de dyspepsie. Elle est cependant de moins en moins fréquente, surtout depuis l’avènement du traitement d’éradication d’Helicobacter pylori et
On reconnaît maintenant que chez plus de 60 % des patients atteints de dyspepsie, on ne retrouve
aucune explication organique ou biochimique après une exploration initiale par endoscopie ou
repas baryté. On considère alors que ces patients souffrent d’une dyspepsie fonctionnelle.
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Formation continue
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Physiopathologie de la dyspepsie fonctionnelle
Anomalies de la perception viscérale
Les patients présentant des troubles digestifs fonctionnels tels que la douleur rétrosternale non coronarienne, la dyspepsie fonctionnelle et le syndrome du côlon irritable peuvent avoir une sensibilité viscérale accrue, comme le montre la distension intraluminale par
ballonnet 8. Plus de 50 % des patients ont dit avoir un seuil de douleur abaissé lors de la distension par ballonnet de l’œsophage, de
l’estomac et du rectum, ce qui semble indiquer une hypersensibilité viscérale dans cette population. Une anomalie de la perception viscérale, soit au niveau du système nerveux périphérique, soit au niveau du système nerveux central, peut donc être en cause. Des études
sont actuellement en cours pour tenter de découvrir le siège précis de cette hypersensibilité.
Anomalies de la motricité gastroduodénale
Un dérèglement de la fonction motrice de l’estomac est relevé chez 25 à 60 % des patients ayant une dyspepsie fonctionnelle, mais la relation de cause à effet entre ces observations et les symptômes des patients reste à démontrer 4. En effet, on peut mettre en évidence un
ralentissement de la vidange gastrique des solides et des liquides, mais il ne semble pas y avoir de corrélation entre l’importance du ralentissement de la vidange gastrique et les symptômes chez ces patients. L’utilité clinique de la mesure de la vidange gastrique (évaluée en
médecine nucléaire) reste donc à démontrer. De plus, il ne semble pas y avoir de bonnes corrélations entre le soulagement des symptômes
après la prise de procinétiques et une normalisation de la vidange gastrique.
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Troubles psychologiques
L’importance des troubles psychologiques dans la dyspepsie demeure controversée. Les patients ayant une dyspepsie fonctionnelle présentent les mêmes troubles psychologiques que les patients ayant un syndrome du côlon irritable et que ceux qui souffrent de douleurs
abdominales chroniques, soit l’anxiété, la somatisation et la dépression. Plutôt qu’une cause des symptômes en soi, il se peut que les
troubles psychologiques soient plutôt le facteur déterminant qui conduira éventuellement le patient à consulter son médecin 4.
En résumé, les mécanismes physiopathologiques sont probablement multifactoriels, soit les dérèglements moteurs et les anomalies
du seuil de la perception viscérale lors de la distension gastrique par les aliments. Les troubles psychologiques jouent un rôle surtout
modulateur et déterminent si le patient consulte ou non un médecin.
d’anti-inflammatoires non stéroïdiens plus sélectifs de la
COX-2, qui causent moins de dyspepsie et moins d’ulcères
gastroduodénaux.
Reflux gastro-œsophagien
Lorsque le pyrosis et les régurgitations sont des symptômes
dominants, ils ont une valeur prédictive élevée (89 et 95 %
respectivement) de reflux gastro-œsophagien4. La présence de
pyrosis et de régurgitations est maintenant reconnue comme
un indicateur fiable de reflux gastro-œsophagien. Un diagnostic présomptif de reflux gastro-œsophagien justifie donc
le recours d’emblée à un traitement empirique. Il faut retenir que l’endoscopie ne montre pas d’œsophagite macroscopique chez plus de 60 % des patients ayant un reflux
gastro-œsophagien. Elle n’est donc plus considérée comme
un examen de référence. En outre, des études récentes ont
montré que la pH-métrie des 24 heures avait une faible valeur prédictive, sauf pour l’évaluation de la douleur rétrosternale non coronarienne, pour laquelle, associée à l’index
des symptômes, elle semble nettement plus fiable4.
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Dyspepsie fonctionnelle
La dyspepsie fonctionnelle se définit comme une dyspepsie persistante ou récurrente, d’une durée d’au moins
12 semaines dans la dernière année, sans cause organique
objectivée à l’investigation initiale, soit par gastroscopie,
soit par transit baryté du tube digestif supérieur5,6. La physiopathologie de la dyspepsie fonctionnelle demeure encore inconnue, mais elle fait probablement partie d’un
continuum comprenant d’autres troubles digestifs fonctionnels tels que le syndrome du côlon irritable et la douleur rétrosternale non coronarienne (voir l’encadré). Plus
de 80 % des patients ayant un syndrome du côlon irritable
présentent aussi des symptômes évocateurs de dyspepsie
fonctionnelle, alors que plus du tiers des patients ayant une
dyspepsie fonctionnelle ont des symptômes évocateurs du
syndrome du côlon irritable.
Intolérance alimentaire
L’intolérance alimentaire, même si elle est très difficile
à évaluer de façon scientifique et rigoureuse, est certaine-
Intolérance médicamenteuse
L’intolérance médicamenteuse peut aussi provoquer des
symptômes digestifs par plusieurs mécanismes semblables
à ceux qui interviennent dans l’intolérance alimentaire. Les
médicaments le plus souvent en cause sont énumérés au
tableau I.
Néoplasie gastrique
La néoplasie gastrique demeure un élément important à
considérer, même si elle est une cause rare de dyspepsie
(moins de 1 % des cas de dyspepsie sont associés à une néoplasie gastrique ou œsophagienne)4. Des études ont montré que la grande majorité des patients ayant une néoplasie gastrique présentent au moins un symptôme d’alarme
(perte de poids inexpliquée, vomissements répétés, dysphagie, méléna, hématémèse, masse palpable à l’examen de
l’abdomen)4 lorsqu’ils consultent leur médecin de famille.
De plus, l’âge d’apparition de la dyspepsie est aussi un facteur important car, selon les dernières statistiques de
l’Institut national du cancer du Canada de 1998, la probabilité de cancer de l’estomac chez les hommes et les femmes
augmente après l’âge de 50 ans (tableau II)4.
Trouble pancréatobiliaire
La douleur biliaire est caractérisée par des accès de douleurs abdominales supérieures intenses pouvant irradier
vers le dos ou vers l’arrière des épaules ; ses manifestations
aiguës la distinguent assez facilement de la dyspepsie. La
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ment une cause non négligeable de dyspepsie. Les mécanismes d’action sont probablement variés ; ils peuvent inclure une irritation directe de la muqueuse, une distension
gastrique, une production excessive de gaz ou une stimulation directe des récepteurs viscéraux de la douleur. Les aliments le plus souvent signalés comme cause possible de
dyspepsie sont le café, l’alcool et les mets épicés. La majorité des patients notent une relation temporelle entre l’apparition des symptômes et certains aliments, et peuvent
eux-mêmes éviter les aliments incriminés.
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Médicaments le plus souvent
responsables de la dyspepsie
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Aspirine et anti-inflammatoires non stéroïdiens
i
Antibiotiques (macrolides/métronidazole)
i
Théophylline
i
Digitale
i
Stéroïdes
i
Suppléments de potassium
i
Suppléments de fer
i
Colchicine
i
Niacine
i
Quinidine
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II
Probabilité de cancer de l’estomac
chez les hommes et les femmes
au Canada selon l’âge*
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Âge (années) ; probabilité (%)
Sexe
30
40
50
60
70
80
90
Homme
-
-
0,1
0,2
0,6
1,1
1,4
Femme
-
-
0,1
0,1
0,3
0,6
0,8
* Institut national du cancer du Canada. Statistiques canadiennes du
cancer. INCC, 1998.
douleur d’une pancréatite aiguë est habituellement aussi
plus intense et s’accompagne d’une irradiation fréquente
dans le dos, et souvent de nausées et de vomissements. Finalement, la douleur d’une pancréatite chronique ou d’une
néoplasie du pancréas s’accompagne le plus souvent d’une
atteinte importante de l’état général avec perte de poids
appréciable.
Les patients ayant une dyspepsie d’apparition récente après l’âge de 50 ans et les patients de
tout âge qui présentent une dyspepsie accompagnée de symptômes ou de signes d’alarme (perte
de poids inexpliquée, dysphagie, vomissements répétés, hématémèse, méléna et découverte d’une
masse à l’examen physique) devraient toujours subir des examens d’investigation.
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III
Symptômes et signes d’alarme
de la dyspepsie
i
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i
i
i
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Perte de poids inexpliquée
Dysphagie
Vomissements répétés
Hématémèse
Méléna
Découverte d’une masse à l’examen physique
Quelle est l’approche préconisée
face à un patient souffrant de dyspepsie ?
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Lorsqu’il évalue un patient souffrant de douleur épigastrique, le médecin doit toujours envisager la possibilité
que les symptômes puissent naître ailleurs que dans le tube
digestif supérieur. Une anamnèse attentive permettra d’exclure une origine cardiaque ou hépatobiliaire, une intolérance alimentaire ou un effet secondaire d’un médicament.
Les patients ayant une dyspepsie d’apparition récente après
l’âge de 50 ans et les patients de tout âge qui présentent
une dyspepsie accompagnée de symptômes ou de signes
d’alarme devraient toujours subir des examens d’investigation3. La priorité du médecin de famille consiste avant
tout à déceler les patients les plus exposés à une néoplasie
de l’estomac. Une anamnèse détaillée devrait permettre
d’exclure les symptômes et les signes d’alarme cités au tableau III. On recommande de faire des analyses sanguines
(hémogramme, bilan hépatique) aux patients de plus de
50 ans. Le transit baryté du tube digestif supérieur est l’examen le plus souvent utilisé par le médecin de famille. Cependant, des études prospectives ont maintes fois démontré que l’endoscopie est supérieure au transit pour exclure
une cause organique. La valeur prédictive du transit est
d’environ 70 %, alors que celle de l’endoscopie est supé-
rieure à 95 %. Le choix de l’examen dépend cependant de
sa disponibilité. On recommandera des évaluations complémentaires en fonction des symptômes sous-jacents. On
ne demandera une échographie de l’abdomen que si l’on
soupçonne une maladie pancréatobiliaire. De même, la
tomodensitométrie axiale de l’abdomen sera réservée aux
patients souffrant de dyspepsie compliquée de symptômes
ou de signes évocateurs d’une maladie pancréatique.
La division de la dyspepsie en différents sous-groupes selon le symptôme dominant a été proposée pour la première
fois en 19889. Les sous-groupes étaient les suivants :
i dyspepsie d’allure ulcéreuse ;
i dyspepsie d’allure reflux gastro-œsophagien ;
i dyspepsie d’allure dysmotilité.
Ces sous-groupes semblaient intéressants, car on croyait
alors qu’ils nous aideraient à déceler la cause présumée de
dyspepsie : trouble lié à l’acide pour la dyspepsie d’allure
ulcéreuse et d’allure reflux, alors que les anomalies de la
motricité gastrique auraient pu expliquer la dyspepsie d’allure dysmotilité. Cependant, des études ont montré que la
valeur prédictive de cette classification était moins bonne
que celle des observations endoscopiques. Bref, cette sousclassification a peu d’utilité pour déterminer la conduite
à tenir face à la dyspepsie, sauf pour la dyspepsie d’allure
reflux gastro-œsophagien, où la présence des symptômes
de pyrosis et de régurgitations semble un indice nettement
plus précis pour poser un diagnostic de reflux gastroœsophagien.
La découverte d’Helicobacter pylori a révolutionné la prise
en charge de la dyspepsie. On sait maintenant que de 90 à
95 % des ulcères duodénaux et de 60 à 80 % des ulcères gastriques sont associés à Helicobacter pylori 10,11. Le rôle
qu’Helicobacter pylori joue dans la dyspepsie fonctionnelle
(dyspepsie objectivée, sans cause organique ou biochimique
pouvant expliquer les symptômes) demeure cependant très
controversé. Une méta-analyse récente de 10 études évaluant l’efficacité de l’éradication d’Helicobacter pylori dans
La découverte d’Helicobacter pylori a révolutionné la prise en charge de la dyspepsie. On sait maintenant que de 90 à 95 % des ulcères duodénaux et de 60 à 80 % des ulcères gastriques sont associés à Helicobacter pylori.
De 15 à 20 % des patients présentant une dyspepsie non objectivée par des explorations paracliniques et infectés par Helicobacter pylori auront un ulcère gastroduodénal; ils bénéficieront donc
d’un traitement d’éradication d’Helicobacter pylori.
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le traitement de la dyspepsie fonction- T A B L E A U
IV
nelle n’a pu montrer qu’elle avait des
Sensibilité, spécificité et valeurs prédictives
effets bénéfiques12,13.
De 15 à 20 % des patients présentant des différentes méthodes utilisées pour la recherche
une dyspepsie non objectivée par des d’Helicobacter pylori
explorations paracliniques et infectés
Valeur
Valeur
par Helicobacter pylori auront un ulprédictive
prédictive
Sensibilité
Spécificité
positive
négative
cère gastroduodénal ; ils bénéficieront
donc d’un traitement d’éradication
Test respiratoire
95 %
95 %
95 %
95 %
d’Helicobacter pylori.
Les options pour la prise en charge Sérodiagnostic
85 %
80 %
50 à 75 %
90 %
du patient ayant une dyspepsie non objectivée et ne présentant aucun symptôme ni signe d’alarme de 50 à 75 %, ce qui signifie que de 25 à 50 % des patients
ayant un sérodiagnostic positif ne sont même pas infectés
sont les suivantes :
par Helicobacter pylori (faux positifs) (tableau IV). Le test
i Un traitement empirique avec des antisécrétoires ou un
procinétique et des examens d’investigation réservés aux respiratoire est donc un outil diagnostique plus précis,
patients qui demeurent symptomatiques ;
mais son manque d’accessibilité demeure un handicap majeur pour le moment. Le traitement d’éradication d’Helii Une évaluation diagnostique d’emblée chez tous les
patients ;
cobacter pylori proposé par le Consensus canadien sur
i Une recherche d’Helicobacter pylori par une méthode non
Helicobacter pylori est présenté au tableau V.
effractive et un traitement d’éradication si l’infection est
Prise en charge du patient ayant une dyspepsie,
confirmée ;
mais sans infection par Helicobacter pylori 15-26
i Une recherche d’Helicobacter pylori par une méthode non
effractive et une évaluation diagnostique si l’infection est
Si la recherche d’Helicobacter pylori donne un résultat
confirmée.
négatif, les risques de lésion organique (ulcère ou néoplaDes études pharmacoéconomiques récentes réalisées sie) sont très faibles. La majorité de ces patients présentent
aux États-Unis ont comparé ces différentes stratégies et ont donc une dyspepsie fonctionnelle. On pourra par conséainsi démontré que la recherche d’Helicobacter pylori par quent les rassurer et tenter un traitement empirique. Les opune méthode non effractive avec un traitement d’éradica- tions thérapeutiques pour les patients atteints de dyspeption si l’infection est confirmée était l’approche qui soula- sie sans signes d’infection à Helicobacter pylori sont les
geait le plus les symptômes de dyspepsie tout en diminuant antiacides, les antagonistes du récepteur H2 de l’histamine
le nombre d’endoscopies digestives ainsi que les coûts as- (anti-H2), les inhibiteurs de la pompe à protons et les prosociés à la prise en charge de la dyspepsie14.
cinétiques. Les antiacides ne se sont pas avérés plus efficaces
qu’un placebo dans les études prospectives. Les anti-H2 ou
Comment rechercher Helicobacter pylori
les inhibiteurs de la pompe à protons sont efficaces pour
et comment le traiter ?
les patients présentant surtout des douleurs épigastriques,
La présence d’Helicobacter pylori peut être confirmée soit
par une méthode effractive (endoscopie avec biopsies gasLa recherche d’Helicobacter pylori par une métriques), soit par une méthode non effractive (sérodiagthode
non effractive avec un traitement d’éranostic ou test respiratoire)27-33. Le test respiratoire, avec une
dication si l’infection est confirmée est l’apsensibilité de plus de 95 % et une spécificité de plus de 95 %,
proche qui soulage le plus les symptômes de
est nettement meilleur que le sérodiagnostic, qui a une sendyspepsie tout en diminuant le nombre d’ensibilité de 85 % et une spécificité de 80 %. La valeur prédictive positive et la valeur prédictive négative du test respidoscopies digestives ainsi que les coûts asratoire sont évaluées à plus de 95 %. En contrepartie, la
sociés à la prise en charge de la dyspepsie.
valeur prédictive négative du sérodiagnostic est évaluée à
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plus de 90 %, mais sa valeur prédictive positive n’est que
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V
Le traitement d’éradication d’Helicobacter
pylori proposé par le Consensus canadien
sur Helicobacter pylori
i
Un inhibiteur de la pompe à protons deux fois par jour
500 mg de clarithromycine deux fois par jour ............... 7 jours
1 g d’amoxicilline deux fois par jour .............................. 7 jours
ou
i
Un inhibiteur de la pompe à protons deux fois par jour
250 à 500 mg de clarithromycine deux fois par jour ..... 7 jours
500 mg de métronidazole deux fois par jour .................. 7 jours
ou
i
Un inhibiteur de la pompe à protons deux fois par jour
Deux comprimés de Pepto-Bismol quatre fois par jour .. 14 jours
250 mg de métronidazole quatre fois par jour ............. 14 jours
500 mg de tétracycline quatre fois par jour ................. 14 jours
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alors qu’un procinétique comme le dompéridone pourra
soulager les patients présentant des symptômes avec une
composante de dysmotilité, soit une plénitude postprandiale associée à une digestion lente, et ce, même s’il existe
très peu de données scientifiques montrant une corrélation
entre le soulagement des symptômes et la normalisation de
la motricité digestive. Chez les patients présentant des symptômes réfractaires au traitement usuel, on pourra essayer un
antidépresseur tricyclique à faible dose (par exemple 25 mg
d’amitriptyline au coucher) ou un inhibiteur du recaptage
de la sérotonine, car ils ont des effets potentiels sur le centre
de la douleur. Cependant, peu d’études contrôlées avec randomisation ont démontré leur efficacité.
Finalement, l’endoscopie sera réservée aux patients qui
demeurent symptomatiques malgré le traitement empirique. Il faut cependant reconnaître le rôle que peut jouer
l’endoscopie pour rassurer les patients souffrant de dyspepsie, car plusieurs d’entre eux ont la crainte souvent inavouée d’être atteints d’une maladie sous-jacente grave. Un
résultat normal d’endoscopie pourrait ainsi dissiper leurs
inquiétudes et, par le fait même, réduire le recours aux
soins médicaux et aux médicaments. c
Date de réception : 5 octobre 2001.
Date d’acceptation : 29 novembre 2001.
Mots clés : dyspepsie, dyspepsie fonctionnelle, causes de la dyspepsie, approche pratique de la dyspepsie, Helicobacter pylori.
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S
U M M A R Y
Clinical approach to dyspepsia. Dyspepsia can be defined as a
complex symptom of epigastric pain or discomfort thought to
originate in the upper gastro-intestinal tract and may include any
of the following symptoms: heartburn, acid regurgitation, excessive burping/belching, increased abdominal bloating, nausea, feeling of abnormal or slow digestion or early satiety. Dyspepsia is a
very frequent condition and almost one third of adult canadians
complain of dyspepsia at least once a week. A structured approach
will facilitate the management of this frequent condition. In patients over 50 years of age presenting with new-onset dyspepsia
or in any patient presenting with dyspepsia accompanied by alarm
symptoms or signs (vomiting, bleeding, unexplained weight loss,
dysphagia or discovery of an abdominal mass during physical examination), prompt investigation should be undertaken. In patients with dyspepsia but with dominant symptoms of heartburn
and/or acid regurgitation, empirical anti-reflux therapy should
be undertaken. In patients with dyspepsia but without predominant acid regurgitation or heartburn, co-infection by H. pylori
should be confirmed and eradication therapy offered if present.
In patients not infected with H. pylori, empirical therapy with an
acid-suppressive agent or a prokinetic should be undertaken and
investigation offered to patients not responding to this empirical
treatment.
Key words: dyspepsia, functional dyspepsia, causes of dyspepsia, practical approach to dyspepsia, Helicobacter pylori.
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R
E C T I F I C A T I F
L’amorce de l’insulinothérapie
comment l’annoncer au patient ?
par Michel Racine et Guylaine Forget
Volume 36, numéro 12, décembre 2001 : page 45.
Dans le premier paragraphe de l’article, le chiffre « 6,6 » mentionné à deux endroits aurait dû être « 7,2 ». Le texte aurait dû se
lire comme suit :
[…] Le résultat de cette analyse (exemple : 7,2) est divisé par la
valeur de la limite supérieure de la normale […] Ainsi, un résultat
de 7,2 divisé par 6,5, soit la limite supérieure de la normale […]