Synthe`se - John Libbey Eurotext

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Synthe`se - John Libbey Eurotext
Synthèse
Les ototoxiques exacerbent les
surdités induites par le bruit
PIERRE CAMPO
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Institut national de
recherche et de sécurité
Laboratoire d'ototoxicité et
de neurotoxicité
Rue du Morvan
CS 60027
54519 Vandœuvre Cedex
France
<[email protected]>
Tirés à part :
P. Campo
Résumé. Depuis plus de vingt ans, des recherches ont montré que certaines substances
chimiques, appelées ototoxiques, peuvent provoquer une surdité, ou potentialiser les
effets traumatisants du bruit. Or, il n'est pas rare qu'un travailleur soit exposé à plusieurs
agents chimiques (médicaments, solvants, etc.) et à du bruit. Si les aminosides et les
anticancéreux sont des substances ototoxiques connues, d'autres, comme les solvants
aromatiques, les métaux lourds, ou certains gaz asphyxiants peuvent se révéler tout aussi
cochléotoxiques. Aujourd'hui, la Directive européenne 2003/10/EC concernant les
prescriptions minimales de sécurité et de santé relatives à l'exposition des travailleurs
aux risques dus au bruit considère que seules les expositions au bruit sont traumatisantes.
Qui plus est, elle s'appuie sur des considérations relatives à des sujets ne présentant, a
priori, aucune fragilité de l'oreille interne. Pourtant, une oreille contaminée par un agent
ototoxique est plus vulnérable à une agression sonore qu'une oreille exposée uniquement
au bruit. Se pose donc la question de la pertinence des valeurs limites d'exposition au bruit
(LEX,8h)1, ou des valeurs d'exposition à des agents ototoxiques (VLEP), lorsque des
personnes sont exposées à deux ou plusieurs nuisances d'origine variée. Par ailleurs, le
diagnostic de la surdité repose essentiellement sur l'audiométrie tonale liminaire,
technique permettant de tester la perception du message sonore. Cependant, cette
technique pourrait ne pas déceler un traumatisme périphérique en raison d'une
compensation apportée par la plasticité du système nerveux central auditif ; ce dernier
peut masquer des traumatismes périphériques quand ils ne sont pas trop sévères. Dans cet
article, une nouvelle approche pour mesurer objectivement la fatigue auditive
périphérique et mettre en évidence des souffrances cochléaires précoces sera présentée
pour améliorer la prévention contre les risques de déficits auditifs.
Mots clés : bruit ; exposition professionnelle ; fatigue auditive ; prévention ; substances
chimiques.
Abstract
Ototoxics exacerbate noise-induced hearing loss
doi: 10.1684/ers.2015.0773
For more than 20 years, research has shown that certain substances, called ototoxics, can
provoke a chemical-induced hearing loss or exacerbate noise-induced hearing loss. Workers
are commonly exposed to several chemical agents (such as drugs and solvents) and to noise.
These ototoxic substances include aminoglycosides and antineoplastic drugs. Aromatic
solvents, heavy metals, and asphyxiants can be also cochleotoxic. Today, European Directive
2003/10/EC, dated 6 February 2003, on the minimum health and safety requirements regarding
the exposure of workers to the risks arising from noise considers only noise exposure to be
traumatic. Moreover, the legislation is based on data from subjects with normal inner ears, who
are less vulnerable to noise than subjects whose ears are contaminated by an ototoxic
substance. These factors raise questions about the pertinence of the threshold limit values
determined for noise (8 h-TWA) and for ototoxic agents (TLV) for people exposed to two or
more nuisances of different origins. Furthermore, hearing loss is diagnosed mainly on the
Article reçu le 1er décembre
2014,
accepté le 2 janvier 2015
1
Le niveau d'exposition quotidien LEX,8h représente le niveau de bruit équivalent perçu durant une
journée. LEX,8h s'exprime en décibel A (dB(A)).
s induites par le bruit. Environ
Pour citer cet article : Campo P. Les ototoxiques exacerbent les surdite
Risque Sante 2015 ; 14 : 125-134. doi : 10.1684/ers.2015.0773
Environ Risque Sante – Vol. 14, n8 2, mars-avril 2015
125
P. Campo
basis of pure-tone auditory thresholds. This technique tests perception of auditory inputs but
may be unable to identify peripheral trauma, due to the plasticity of the central nervous system,
which can mask such trauma when it is not too severe. This article presents a new approach that
can objectively measure peripheral auditory fatigue and assess early cochlear distress. Its use
could improve the prevention of the risks of hearing loss.
Key words: auditory fatigue; chemicals; co-exposure; noise; prevention.
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L
a perte auditive due au bruit est la maladie
professionnelle la plus fréquemment signalée
dans l'Union européenne. Le rapport de la 4e enqu^
ete
européenne sur les conditions de travail, publié en 2007
[1], a rapporté que 30 % des travailleurs de l'Europe des 27
étaient exposés au bruit [> 85 dB(A)2], au moins un quart
de leur temps de travail [2]. Des millions de travailleurs en
Europe sont donc exposés, sur leur lieu de travail, au bruit
et à l'ensemble des risques que celui-ci peut engendrer.
Le bruit n'est pas uniquement présent sur les lieux de
travail, il est également présent dans les écoles, les fosses
d'orchestre, les bars, etc. Bien qu'omniprésent, est-il le
seul facteur responsable de la surdité ?
Depuis maintenant plus d'une dizaine d'années, des
travaux scientifiques ont mis l'accent sur les risques
auditifs encourus par des personnes exposées à des
agents chimiques, appelés ototoxiques3, ou à une combinaison « bruit et agent ototoxique » [3]. Selon la 4e
enqu^
ete européenne, 11,2 % des salariés européens
respireraient des vapeurs de solvants ou des vernis,
19 % respireraient des fumées ou des poussières, et
14,5 % manipuleraient des substances chimiques [1]. Les
risques d'une exposition conjointe au bruit et à un agent
chimique professionnel existent donc pour de nombreux
salariés en Europe. En plus des agents chimiques
professionnels (solvants aromatiques, gaz asphyxiants,
etc.), des agents extraprofessionnels (antibiotiques de
type aminoglycoside, anticancéreux, etc.) peuvent séjourner dans les liquides de l'oreille interne, favorisant parfois
des co-expositions insoupçonnées, telles qu'agent chimique-agent chimique ou agent chimique et bruit.
Ces co-expositions, identifiées ou insoupçonnées,
augmentent bien souvent les risques de surdité professionnelle. D'ailleurs, elles ne concernent pas uniquement les multi-expositions chimiques, elles peuvent
également avoir rapport à une exposition à un agent
chimique associée à du bruit. Ainsi, il arrive que les effets
délétères d'une exposition à une substance ototoxique
soient potentialisés par une exposition au bruit. M^
eme
dans ce cas, seul le bruit sera incriminé comme
responsable du déficit auditif. Dans un récent rapport
publié par l'EU-OSHA4, en 2009, les effets d'une coexposition à des agents chimiques et à du bruit sont
2
dB(A) : décibel A.
Une substance est dite ototoxique lorsqu'elle engendre, à
certaines doses, des lésions des structures de l'oreille interne ou
du nerf auditif.
4
European Agency for Safety and Health at Work.
3
126
apparus comme des risques émergents [4]. C'est un net
progrès par rapport à la Directive européenne n8 2003-10
du 6 février 2003 du Parlement et du Conseil européens
qui ne souligne que très timidement5 le risque représenté
par une exposition à des substances d'origine professionnelle, sans les citer et sans donner de recommandations pour s'en préserver.
La présente publication a pour vocation de faire un
état de l'art des problèmes liés aux co-expositions au bruit
et aux agents ototoxiques. Elle veut donner une image des
connaissances relatives aux risques encourus par toutes
les personnes exposées au bruit, conjointement, à des
substances ototoxiques. Elle fera également le point sur la
pertinence des outils de diagnostic de la surdité et posera
les problèmes inhérents à la prévention.
Les effets traumatisants du bruit
La notion de bruit renvoie généralement à une
sensation sonore g^
enante, voire douloureuse, qui porte
néanmoins une information qui peut prendre la forme
sonore d'une alarme, d'une sirène ou d'un cri. Du point
de vue physique, le bruit est un ensemble de vibrations
^tre caracdes couches d'air, chaque vibration pouvant e
térisée par sa fréquence (Hz : hertz) et son intensité (dB
SPL : décibel de niveau de pression acoustique) :
dBSPL ¼ 20log10pp0;
p est le niveau de pression du son et po la pression de
référence que l'on considère comme le niveau à partir
duquel l'oreille humaine commence à percevoir un son
pur de 1 kHz.
Du point de vue physiologique, ou psychoacoustique6, la sensation sonore perçue par l'homme est
exprimée en sonie dont l'unité est le décibel (dB) pondéré
« A », dB pour lequel les basses fréquences sont filtrées
5
Le responsable devra s'assurer, si cela est techniquement
possible, qu'aucun effet sur la sécurité et la santé des travailleurs
ne peut résulter d'une interaction entre le bruit et des substances
ototoxiques utilisées sur son lieu de travail (section II, article 4,
paragraphe 6(d)).
6
La psychoacoustique se définit comme la psychologie auditive.
C'est une science qui met en relation l'acoustique, l'anatomie et
la conscience auditive. Elle prend en compte d'une part, la
physiologie et les mécanismes du fonctionnement de l'oreille, et
d'autre part, la perception subjective et la mémoire auditive.
Environ Risque Sante – Vol. 14, n8 2, mars-avril 2015
Les ototoxiques exacerbent les surdités induites par le bruit
s
let
sse
3o
Étrier
Énclume
Marteau
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Tympan
Cochlée
Oreille externe
Oreille
moyenne
Oreille interne
Figure 1. Les trois oreilles : oreille externe, oreille moyenne et
oreille interne.
Figure 1. The three parts of the ear: outer ear, middle ear, and inner ear.
en raison des fonctions de transfert des oreilles externe et
moyenne [5] (figure 1).
Après une exposition au bruit, les déficits auditifs
^tre
encourus par les personnes exposées peuvent e
temporaires ou permanents. La fatigue auditive est un
déficit auditif temporaire, qui est généralement le résultat
A
0 µm 10
d'une fatigue métabolique engendrée par des expositions
sonores à des intensités modérée (< 85 dB), mais de
longue durée (> 4 heures). Elle se traduit par plusieurs
phénomènes : une vacuolisation des éléments postsynaptiques sous les cellules ciliées internes
(figure 2A et B) [6, 7], un raccourcissement des racines
des stéréocils plantées dans le plateau cuticulaire [8] et la
génération de radicaux libres [9].
Comme toute fatigue, le déficit auditif temporaire est
réversible à condition d'accorder un repos métabolique
aux sujets qui en souffrent.
Lorsque le déficit auditif persiste au-delà de deux
semaines, les risques pour qu'au moins une partie du
déficit se transforme en lésions irréversibles de l'organe
de Corti ne sont pas négligeables [10, 11]. On parle alors
de déficit auditif permanent ou perte auditive.
^tre la conséquence
La perte auditive peut également e
malheureuse d'une exposition sonore brève mais de forte
intensité. Les bruits impulsionnels, nombreux dans notre
environnement (marteau-piqueur, bruits de presse, de
forge, bruits d'explosion), engendrent souvent des
dommages mécaniques au niveau des stéréocils : éléments ultra-structuraux qui coiffent les cellules ciliées et
assurent la transduction mécano-sensorielle de l'organe
de Corti.
Les stéréocils sont plantés sur les cellules ciliées
externes. Ils sont liés les uns aux autres par des cross-links
qui les regroupent en pinceaux en forme de « W »
(figures 3A, 4A et B), ou de palissade lorsqu'il s'agit de
pinceaux plantés sur les cellules ciliées internes
(figure 3B).
B
20
30
Fatigue
auditive
40
Figure 2. (A) Organe de Corti de rat. Vacuolisations sous les cellules ciliées internes après une exposition sonore de longue durée et
d'intensité modérée. (B) Raccourcissement de l'ancrage des stéréocils dans le plateau cuticulaire pour augmenter la souplesse des
stéréocils.
Figure 2. (A) The spiral (Corti) organ of rats. Vacuolizations under inner hair cells after noise exposure of long duration and moderate intensity.
(B) Shortening of the embedding of the stereocilia in the cuticular plate to increase their flexibility.
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P. Campo
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A
B
Figure 3. (A) Les stéréocils sont liés les uns aux autres par des cross-links. Les stéréocils sont agencés en forme de « W » sur les
cellules ciliées externes (B) et en forme de palissade sur les cellules ciliées internes.
Figure 3. (A) The stereocilia are attached to one another by cross-links. The stereocilia of the outer hair cells (B) are arranged in a "W'' shape
and those of the inner hair cells in a more linear form.
A
B
Figure 4. (A) Forme en W maintenue par des cross-links entre les stéréocils. (B) Cette forme spécifique permet le balayage de
l'endolymphe et la mise en forme du signal intra-cochléaire avant la transduction mécano-sensorielle.
Figure 4. (A) W shape maintained by cross-links between the stereocilia. (B) This specific shape allows scanning of the endolymph and the
formatting of the intracochlear signal before mechanosensory transduction.
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Environ Risque Sante – Vol. 14, n8 2, mars-avril 2015
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Les ototoxiques exacerbent les surdités induites par le bruit
Figure 5. Désorganisation des stéréocils après une exposition sonore d'intensité élevée (100 dB SPL). Les pinceaux de stéréocils sont
cassés et désorganisés. Vue au microscope électronique à balayage d'un organe de Corti de rat.
Figure 5. Disorganization of the stereocilia after high-intensity noise exposure (100 dB SPL). The stereocilia "brushes'' are broken and
disorganized. Scanning electron microscope view of a rat Corti organ.
Cette organisation des stéréocils est indispensable à la
mise en forme du signal intra-cochléaire et à la transduction mécano-sensorielle qui donne naissance au message
auditif. Les stéréocils sont particulièrement sensibles
aux mouvements de cisaillement de l'organe de Corti
dont l'amplitude est proportionnelle à l'intensité du bruit.
Lorsque le stress mécanique provoqué par le
déplacement asservi à la stimulation sonore d'une
intensité « critique » dépasse les limites d'élasticité des
stéréocils, il engendre des dommages mécaniques
irréversibles, m^
eme lors de très courtes expositions [12]
(figure 5).
En résumé, les bruits d'intensité élevée cassent et
désorganisent les stéréocils (figure 5) [13]. Les dommages
peuvent également se traduire par des microlésions de
la membrane plasmatique des cellules ciliées et des
déchirements de la membrane réticulaire ou de Reissner [14].
Substances chimiques
ototoxiques
Si la législation reconnaît le bruit comme un facteur
physique responsable de traumatismes cochléaires, les
Environ Risque Sante – Vol. 14, n8 2, mars-avril 2015
substances chimiques ne font toujours pas l'objet de
recommandations, liées à leurs potentielles propriétés
ototoxiques, envers les personnes qui y sont exposées. En
fait, l'ototoxicité n'est toujours pas reconnue par la
réglementation européenne, ni française d'ailleurs. De
m^
eme, les risques de potentialisation des effets du bruit
par une co-exposition à des substances chimiques ne font
l'objet d'aucune mesure particulière. Une question
s'impose donc : comment pouvons-nous les caractériser
et quelles pistes pourrions-nous proposer pour améliorer
la prévention?
Les aminosides sont des antibiotiques
ototoxiques
Les antibiotiques de type aminoglycosides, encore
appelés aminosides, sont des médicaments essentiellement
prescrits en milieu hospitalier et connus pour leur ototoxicité. La gentamicine, la streptomycine, l'amikacine, la
néomycine, la trobamycine et la kanamycine (figure 6) font
partie de ces aminosides qui peuvent engendrer des surdités
localisées dans les fréquences élevées (aiguës) [15, 16].
Les aminosides, molécules hydrophiles, pénètrent
dans l'oreille interne en traversant la barrière hémato-
129
P. Campo
NH2
NH2
Antibiotique
OH
Utilisation thérapeutique
O
H2N
O
O
OH
infection nosocomiale
Gentamicine
pneumonie, méningite
Tobramycine
associé avec gentamicine
Kanamycine
tuberculose si résistance
OH
O
OH
R
NHCH3
HOCH2
O
R
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Amikacine
CH3
NH2
HO
CH2
O
HO
O
OH
O
HO
OH
R’
NH2
Néomycine
infection de peau et muqueuse
NH2
Streptomycine
endocardite, tuberculose
Figure 6. Antibiotiques aminoglycosidiques susceptibles d'engendrer des surdités et de potentialiser les effets du bruit.
Figure 6. Aminoglycoside antibiotics likely to cause hearing loss and potentiate the effects of noise.
labyrinthique au niveau de la strie vasculaire (figure 7),
lésant essentiellement les cellules ciliées externes. À ce
^tre considérés comme des
titre, les aminosides peuvent e
substances chimiques cochléotoxiques. Ils persistent de
longues semaines dans les liquides de l'oreille interne
[17, 18], ce qui peut favoriser des co-expositions avec le
bruit insoupçonnées. Étant donné que la présence
d'antibiotiques dans l'oreille interne peut exacerber les
effets nocifs d'une exposition au bruit [19, 20], il est
important que le patient soit informé des risques qu'il
encourt dès sa sortie d'hospitalisation, surtout lorsque la
convalescence est de courte période. Pendant toute la
période de clairance des antibiotiques dans les liquides
de l'oreille (jusqu'à trois mois après la fin du traitement),
^tre renforcée
la protection du sujet convalescent devrait e
par le port de protections individuelles contre le bruit, ou
l'aménagement du poste de travail bruyant.
cochléotoxiques et vestibulotoxiques [23]. À l'instar des
aminosides, les atteintes auditives sont localisées dans les
hautes fréquences avant de s'étendre vers les fréquences
médiums.
Quant aux effets combinés du bruit et des antinéoplasiques, l'exacerbation des effets du bruit, qui n'a
pas été étudiée chez l'homme, a été en revanche mise en
évidence chez l'animal.
Le caractère hydrophile des antinéoplasiques
explique une clairance qui peut durer de longs mois.
Pour cette raison, il est donc important que les patients
soient avertis des risques qu'ils encourent en cas de coexposition avec du bruit. Le retour au poste de travail d'un
malade devrait toujours faire l'objet d'une visite médicale
de la part du médecin du travail ; il pourrait ainsi avertir et
protéger le convalescent des risques qu'il encourt en cas
de co-exposition avec du bruit, m^
eme si ce dernier est de
faible intensité.
Les anticancéreux
Les antinéoplasiques les plus efficaces sont souvent
dérivés du platine [21]. Le cis-platine, le carbo-platine ou
l'oxaliplatine provoquent une dégénérescence de la strie
vasculaire et modifient donc la composition électrochimique des liquides de l'oreille interne [22]. Ils
détruisent également les corps cellulaires dans les
ganglions spiraux et les cellules ciliées : ils sont à la fois
1
dB SPL : décibel de niveau de pression acoustique.
130
Diurétiques de l'anse
Les diurétiques de l'anse de Henlé, qui entraînent une
diurèse très importante, sont surtout prescrits dans le
traitement de l'insuffisance cardiaque, et en cas d'œdème
aigu du poumon. Ils agissent au niveau de la partie large
de la branche ascendante de l'anse de Henlé où ils
inhibent le cotransport de Na +/K +-2Cl- ; ils modifient
également le fonctionnement des pompes ioniques
situées dans les cellules marginales de la strie vasculaire,
Environ Risque Sante – Vol. 14, n8 2, mars-avril 2015
Les ototoxiques exacerbent les surdités induites par le bruit
Strie vasculaire
Membrane de Reissner
Organe de Corti
ux
ére
Périlymphe
c
an
tic
An
es
sid
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co
gly
ino
Am
Endolymphe
Solvant
Périlymphe
100 µm
Figure 7. Coupe transversale du canal cochléaire de rat. La strie vasculaire est le siège de la barrière hémato-labyrinthique. Les
aminosides traversent la strie vasculaire et contaminent l'endolymphe.
Figure 7. Transverse section of the rat cochlear canal. The stria vascularis serves as the blood-labyrinth barrier. Aminoglycosides cross the
stria vascularis and contaminate the endolymph.
perturbant l'équilibre ionique et la composition de
l'endolymphe. Ils provoquent une surdité soudaine
essentiellement au niveau des hautes fréquences
[24, 25]. Le furosémide, l'acide éthacrynique, le pirétanide, et le bumétanide provoquent des surdités temporaires quelques minutes seulement après l'administration
ou l'ingestion du diurétique. Bien que la surdité induite
par les diurétiques soit temporaire, il conviendrait
d'avertir les travailleurs sous traitement des risques qu'ils
encourent en ne percevant pas correctement les informations sonores, dont les signaux d'alarme. On pense par
exemple aux cheminots travaillant sur le bord des voies.
La surdité disparaît en m^
eme temps que la clairance
du médicament dans le sang, soit quelques heures
seulement après l'arr^
et du traitement.
Les perturbations de l'oreille interne induites par les
diurétiques sont souvent limitées aux troubles auditifs. En
effet, les troubles de l'équilibre, liés aux perturbations du
liquide vestibulaire, sont quant à eux compensés par des
perceptions visuelles et proprioceptives. La prise de diurétique perturbe donc davantage l'audition que l'équilibre.
Des études expérimentales et des cas cliniques ont
montré qu'il existe une véritable synergie entre les effets
ototoxiques des antibiotiques et ceux des diurétiques.
Environ Risque Sante – Vol. 14, n8 2, mars-avril 2015
Une récente étude a par ailleurs révélé une potentialisation des effets ototoxiques de certains métaux lourds,
comme le cadmium par le furosémide [26].
Comme pour les antibiotiques et les antinéoplasiques,
la prescription de diurétiques devrait toujours s'accompagner d'une information non seulement sur les risques
d'hypoacousie qu'elle entraîne, mais également sur les
risques encourus par une prise combinée de diurétiques
avec d'autres médicaments ototoxiques.
Solvants
Certains solvants aromatiques, comme le toluène, les
xylènes, l'éthylbenzène et le styrène par exemple, sont
utilisés dans l'industrie en grande quantité. Le toluène
entre dans la composition de peintures, vernis, encres et
agents dégraissants, tandis que le styrène est surtout
utilisé dans le processus de fabrication des matériaux
composites (résine renforcée à la fibre de verre utilisée
dans l'aéronautique, le nautisme, le bâtiment et l'automobile). Très volatils, lipophiles, les solvants aromatiques
^tre toxiques pour ceux qui les inhalent, les
peuvent e
touchent ou les ingèrent. Véhiculés par le sang, ils
atteignent l'organe de Corti et provoquent des pertes
131
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P. Campo
cellulaires au niveau de la cochlée, les cellules ciliées
externes étant considérées comme une cible privilégiée
[27]. La plupart des solvants aromatiques sont donc
cochléotoxiques et de nombreuses études, réalisées chez
l'animal, ont déjà souligné le caractère cochléotoxiques
de ces solvants [28-30]. Quant aux études épidémiologiques, qui se heurtent à de nombreux facteurs confondants, leurs conclusions sont moins tranchées que celles
réalisées chez l'animal [31, 32]. La plus grande difficulté
de ces études réalisées chez l'homme est de distinguer la
surdité induite par les solvants, de celle induite par le
bruit. En effet, l'audiométrie tonale liminaire ne permet
pas de dissocier l'agression chimique du traumatisme
acoustique, car tous deux se manifestent par une
diminution des performances auditives au voisinage
des 4-6 kHz, ce que l'on appelle classiquement le
scotome auditif.
À la différence des solvants aromatiques, les solvants
chlorés, comme le trichloréthylène par exemple, sont
capables d'empoisonner les cellules sensorielles
cochléaires et les fibres ganglionnaires dans les voies
auditives intra-cochléaires [33, 34]. Parce qu'ils impactent
d'abord les fibres et ensuite les cellules ciliées, les pertes
induites par les chlorés se situent dans la zone cochléaire
qui discrimine les fréquences basses et médiums ; les
fréquences élevées semblent préservées [35]. Quant au
disulfure de carbone (CS2) et au n-hexane (C6H14), ils
affectent les voies auditives au-delà de la cochlée [36-38].
Ils sont davantage neurotoxiques que cochléotoxiques
(figure 7).
Le défi des nouvelles politiques de prévention sera
donc de concevoir des outils capables d'identifier des
souffrances cochléaires précoces et capables d'éviter
l'installation d'une pathologie cochléaire induite par le
bruit, par des agents ototoxiques ou par leur association.
Les gaz asphyxiants
Le monoxyde de carbone et le cyanure d'hydrogène
Si le monoxyde de carbone (CO) augmente la libération
de glutamate au niveau de la fente synaptique sous les
cellules ciliées internes, le cyanure d'hydrogène (HCN)
perturbe davantage le fonctionnement de la strie vasculaire [39, 40]. La plupart du temps, les effets auditifs
délétères de ces gaz sont réversibles. En revanche, ils
potentialisent les traumatismes sonores en réduisant la
capacité des cellules ciliées à réparer les dommages induits
par le bruit. Ainsi, le CO peut transformer un bruit
préalablement inoffensif, en bruit nocif [41]. En 2005,
Lacerda et al. (2005) ont constaté que des employés
travaillant dans un environnement bruyant, et pollué par
du CO, avaient des seuils auditifs plus élevés à 3, 4 et 6 kHz
que ceux des employés uniquement exposés au bruit. Les
auteurs ont conclu à une potentialisation des effets du bruit
par une exposition au CO chez l'homme [42].
132
La fumée de tabac
De nombreuses études épidémiologiques suggèrent
une relation entre l'addiction à la cigarette et les pertes
auditives. Il est vrai que la fumée de tabac contient du
cyanure d'hydrogène qui potentialise les effets du bruit
[43-45]. Plusieurs études ont montré que l'exposition
combinée au bruit et à la fumée de cigarette avait des
effets délétères additifs sur l'audition [46, 47].
Métaux lourds
Le plomb (saturnisme), le mercure (hydrargyrisme) et
le cadmium (Itai Itai) sont des métaux lourds dont la
neurotoxicité est bien connue. Ils sont également
ototoxiques [48-51]. On trouve le plomb et ses composants dans les batteries, les peintures, dans les environnements miniers et de raffinage. La plomberie et la
soudure sont également génératrices de sels de plomb.
Les études épidémiologiques chez des travailleurs
exposés au plomb ont montré que l'effet ototoxique du
métal lourd était une conséquence de son caractère
neurotoxique [52-55].
Par le m^
eme mécanisme, les composés au mercure
(chlorure de méthylmercure, sulfure de mercure) peuvent induire des déficits auditifs chez l'homme [49].
L'étain et ses composés organiques tels que le tri-nalkyl étain, le triméthyl étain et le triéthyl étain sont de
puissants bactéricides et fongicides qui peuvent provoquer des déficits auditifs chez le rat comme chez le
cobaye [56-58]. Des déficits auditifs et des troubles
cérébelleux (nystagmus) ont été constatés chez des
travailleurs ayant inhalé du trimethyltin [59].
D'autres métaux lourds tels que le germanium ou le
manganèse pourraient également avoir des effets ototoxiques. Le germanium, comme le manganèse, est un
métal que l'on peut trouver aussi bien dans les fonderies,
les batteries sèches, les allumettes, l'industrie du verre, de
la teinture et des fertilisants. Il a été montré que le
germanium administré à de fortes doses (100 mg/kg/jour
pendant 4 semaines) pouvait engendrer des pertes
auditives chez le rat et le cobaye. La dégénérescence
de la strie vasculaire et des cellules de soutien a été
observée [60].
Dès 1974, Nikolov [61] avait rapporté le potentiel
ototoxique du manganèse et sa capacité à potentialiser les
effets du bruit chez les travailleurs exposés.
Nouvelles perspectives
Aujourd'hui, l'audiométrie tonale liminaire est la
technique requise pour diagnostiquer une surdité professionnelle. Cette technique fait appel à la participation
du sujet et mesure la perception des sensations sonores
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Les ototoxiques exacerbent les surdités induites par le bruit
sans pouvoir faire de discrimination entre souffrances
cochléaires et perturbations centrales. Elle permet difficilement la distinction entre trauma acoustique et déficits
induits par des agents ototoxiques. Ceci explique sans
doute pourquoi seul le bruit est pris en compte comme
facteur cochléotoxique et fait l'objet de prévention.
Pourtant, l'expérimentation animale et l'épidémiologie ont fourni des informations précieuses sur les agents
ototoxiques dont il est fait référence dans cet article. Elle a
m^
eme permis l'identification des tissus cochléaires les
plus vulnérables, en l'occurrence les cellules ciliées
externes. Si l'audiométrie tonale reste un outil performant
et indispensable au diagnostic d'une surdité globale et
centrale, elle n'est certes pas la plus adaptée pour déceler
un léger trauma ou un empoisonnement du récepteur
auditif périphérique. Les cellules ciliées externes sont le
générateur d'oto-émissions. En provoquant et en mesu-
rant les oto-émissions chez des sujets exposés à des
agents ototoxiques, il serait possible de mesurer la
souffrance des cellules ciliées externes. Les oto-émissions
provoquées, appelées produits de distorsion acoustique7
^tre un test
(2f1-f2), déjà utilisés en clinique, pourraient e
complémentaire à la surveillance de l'audition des
personnes exposées à des environnements de travail
multifactoriels.
Remerciements et autres
mentions
^ ts : aucun.
Financement : aucun ; liens d'intére
&
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