Le baroque, élève

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Le baroque, élève
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Le baroque
Questions : justifiez vos réponses avec des références précise aux documents
Vous aurez besoin de chercher dans des dictionnaires certaines notions (Contre-Réforme…) et certains
personnages (Protée, Circé) absolument essentiels pour comprendre ce dossier.
Lire les guides p 50 et 77 dans votre manuel de littérature
1) Quelle est l’étymologie du mot baroque ?
2) De quand date la notion de « mouvement baroque » ?
3) A quelles circonstances historiques particulières est lié le mouvement baroque ?
4) A quel mouvement oppose-t-on traditionnellement le baroque en France ? Pourquoi ?
5) Pourquoi peut-on parler à propos du baroque d’un mouvement culturel européen ?
6) Quelles sont, d’après les différents documents, les caractéristiques de l’art baroque ?
7) A partir des documents précédents, dites en quoi les documents 5,6,7,8 et 9 sont des témoignages de l’art baroque ?
8) En quoi les textes p47-48, 51 et 52 de votre manuel de littérature sont-ils caractéristiques du mouvement baroque ?
Document 1 :
Classicisme et Baroque
Classicisme et Baroque : des mots anciens aux connotations fluctuantes, récupérés après coup par la critique d’art pour
rendre compte de mouvements culturels.
Le mot classique, adjectif et nom […] désigne d’abord les auteurs latins dont l’autorité est telle qu’ils sont considérés
comme des modèles à imiter.
Ce n’est qu’au XVIIIè siècle, sous l’influence de Voltaire entre autres, que les auteurs du siècle de Louis XIV se réclamant
des Anciens, représentants d’un art de mesure et de raison, furent englobés sous la même appellation (Molière, Racine,
Boileau, Bossuet, La Fontaine…). Le nom « classicisme » n’est employé qu’en 1817, par Stendhal, pour désigner un
mouvement culturel qui, par opposition au « romantisme », désigne les œuvres antiques et celles du XVIIè siècle respectant
les normes établies (l’art au service de la morale, la vraisemblance pour plaire, la bienséance pour ne pas choquer). […]
Le classicisme se caractérise aux yeux des critiques du XIXè siècle par le respect des règles et des bienséances, par le
goût des symétries, de l’ordre, de la mesure et de la clarté, par un style épuré.
Le mot baroque, apparu pour la première fois dans la langue française en 1531 […] traduit le terme portugais barroco qui
désigne une perle de forme irrégulière. Adjectif, il se charge au XVIIIè siècle de sens figurés qui convergent tous vers l’idée
de mauvais goût (désigne en architecture l’abus, le ridicule poussé à l’excès). […] Il faut attendre Baudelaire […] pour que le
mot baroque se voie conférer pour la première fois, une connotation positive.
C’est au XXè siècle seulement que le concept de « baroque » s’impose pour décrire un mouvement culturel […] qu’on
s’accorde de nos jours à limiter historiquement à la période qui va de la fin du XVIè siècle au milieu du XVIIè siècle. Il s’agit
d’une période de guerres, de famines, d’épidémies, de conflits religieux et d’inquiétude spirituelle. Vision du monde
européenne (on parle du « croissant baroque » dont les points forts sont l’Italie, l’Espagne, les Flandres et l’Empire
germanique — auquel il faudrait aussi ajouter l’Amérique centrale et l’Amérique du Sud, pays de conquêtes espagnoles et
portugaises), le baroque manifeste l’angoisse de l’homme privé des valeurs humanistes et son espoir de perfection placé en
un ailleurs divin ou profane. Ainsi l’art baroque est avant tout un art sacré dont les églises jésuites sont représentatives.
Comme on parle d’architecture, de sculptures baroques (Le Bernin, Borromini), de peinture baroque (Arcimboldo, Tiepolo,
Rubens, pour ne citer que quelques noms), on parle aussi de musique (Monteverdi, Pergolèse) et de littérature baroques
(Calderon pour le théâtre, Cervantès pour le roman et Lope de Vega ou John Donne pour la poésie, pour nous en tenir, dans
un premier temps, au baroque étranger.)
D’un art à l’autre, le baroque est caractérisé par l’angoisse d’une existence précaire et le sentiment d’illusion, la vie y est
souvent perçue comme un songe. Là, tout est mouvement (flamme, eau, bulle), lumière (soleil, pierreries), métamorphose
(images privilégiées de Protée et Circé), déguisements, débordements, ostentation (image du paon), effets d’imagerie
(métaphores, hyperboles).
Le XVIIè siècle français : baroque ou classique ? ou plutôt baroque et classique…
1665 : Louis XIV, après avoir accepté les plans du Bernin pour l’achèvement du quadrangle du Louvre, se résigne à ne
pas faire exécuter son projet : la manière baroque du Bernin semble incompatible avec le goût classique français.
Pendant longtemps, le XVIIè siècle sera perçu comme le siècle du classicisme.
Puis, pour reprendre les termes de Rousset dans l’Intérieur et l’Extérieur, « un regard neuf […] débarrassé de toutes les
œillères classicisantes se posa sur des ouvrages que les générations précédentes ne regardaient plus » […]
Le XVIè siècle et le XVIIè siècle, qui voient se succéder des époques politiques différentes, sont dominés tour à tour par
l’une ou l’autre tendance : un pré-baroque tragique (1585-1630), un baroque plus ludique, déjà éclipsé par un classicisme
naissant (1630-1670) puis le classicisme. Mais il serait erroné de considérer ces dates comme les cloisons étanches entre les
différentes époques. […]
Une même œuvre peut être à la fois classique et baroque… Versailles, le symbole du classicisme donne les Plaisirs de l’Île
enchantée1 et cache dans ses bosquets des chefs-d’œuvre de sculpture baroque (Marsy, les Chevaux du Soleil)…
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Fête donnée en 1664 dans les jardins de Versailles, autour des jets d’eau.
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Document 2
Le contexte historique du baroque
Comme tout mouvement culturel, le baroque est lié à des circonstances historiques particulières. En Italie, c’est avant
tout le style de la Contre-Réforme. En donnant aux manifestations et aux rites du culte catholique une place éminente, le
concile de Trente (1545-1543) favorise les arts, notamment l’architecture religieuse. La victoire sur les Turcs à Lépante
(1571), l’abjuration du protestantisme par Henri IV (1593, les progrès du catholicisme en Allemagne confirment le
redressement de l’Église catholique qui manifeste sa puissance par des œuvres monumentales et luxueuses. Ce goût de la
magnificence inspire également les gouvernements civils qui y voient l’occasion d’asseoir leur pouvoir et leur prestige. En
Europe centrale, il faut attendre 1650 et la fin d’une longue période de guerre pour voir l’épanouissement du baroque. En
Angleterre, la révolution politique et l’austérité qui l’accompagne ralentissent à la même époque son expansion. De l’Espagne
et du Portugal, où il s’épanouit, le baroque gagne les colonies d’Amérique du Sud. Quant à la France, sa volonté de
s’émanciper de l’influence italienne et sa tendance au rationalisme la conduise à imaginer une voie original où le baroque,
sans jamais disparaître complètement, se marie avec l’exigence d’ordre et de mesure qui caractérise le classicisme.
Français, Première, Bordas, 2001.
Document 3
Circé et le Paon, la métamorphose et l’ostentation : voilà le commencement et la fin du parcours accompli à travers le
siècle baroque. Ces termes extrêmes sont conjoints ; de l’un à l’autre, la relation est intime et nécessaire : l’homme en
mutation, l’homme multiforme est fatalement amené à se concevoir comme l’homme du paraître. Circé, appuyée sur Protée,
indique la voie au bout de laquelle s’érige la figure mouvante, illusoire et décorative du Paon.
Circé incarne le monde des formes en mouvement, des identités instables, dans un univers en métamorphose conçu à
l’image de l’homme lui aussi en voie de changement ou de rupture, pris de vertige entre des moi multiples, oscillant entre ce
qu’il est et ce qu’il paraît être, entre son masque et son visage. Circé et ses semblables, les magiciennes et les enchanteurs,
répandus à foison dans les jeux et les rêves de l’Europe, au début du XVIIè siècle, proclament à travers les bouffonneries des
ballets de cour et les enchantements de la pastorale que tout est mobilité, inconstance et illusion dans un monde qui n’est
que théâtre et décor […].
Dans ce monde comparable à une vaste scène tournante, tout devient spectacle, y compris la mort, qui obsède les
imaginations au point que l’homme s’en joue à lui-même le scénario, se regardant mort, ou plutôt mourant ; car c’est le
mouvement et le passage qui le séduit en premier lieu, et la mort elle-même se présente à lui en mouvement. Ce sont
également des images de mouvement qui commandent toute une part de la poésie, pour qui la vie est écoulement et
inconstance ; s’il y a des esprits qui tentent de s’arracher à cet écoulement qu’ils éprouvent jusqu’à l’horreur, les poètes de la
vie fugitive, au contraire, s’immergent dans le monde de la métamorphose et varient avec une joie émerveillée le thème du
« tout change » à travers un lyrisme de la flamme, du nuage, de l’arc-en-ciel et de la bulle, accompagnés en sourdine par le
chœur de ceux qui répètent, de Montaigne à Pascal et au Bernin, que « l’homme n’est jamais plus semblable à lui-même que
lorsqu’il est en mouvement » ; c’est la devise d’un temps dans lequel la rupture et le changement semblent être à l’origine du
sentiment qu’on a d’aimer, de jouir, de vivre.
Jean Rousset, La littérature de l’âge baroque en France, Circé et le Paon, 1954.
Document 4
A .Milon le supplicié
L’œuvre baroque ne se laisse pas facilement regarder. Elle est, en effet, mouvement, fuite, perpétuelle négation de soi,
quand le regard est d’abord affirmation d’une permanence, d’un ordre, d’une immobilité. À s’approcher de ce Milon de
Crotone, qui trône, au Louvre, au milieu de statues infiniment sages, écartée à distance respectueuse, on comprend mieux
l’accueil fort tiède réservé par ses contemporains aux œuvres tourmentées du Marseillais Puget.
Rien ici à quoi l’œil puisse mordre. Point de repère pour le regard ou pour la main. Tout glisse et se dérobe. Une spirale
invisible enveloppe le groupe étrange formé de l’homme et du lion qui le supplicie. L’animal vainqueur n’est que courbe —
féminine, enjôleuse, griffante. L’homme, dressé sur ses jambes raides essaie d’opposer à cette morsure enroulée — qui est
d’un serpent plus que d’un fauve — la force verticale de son refus. […]
De quelque côté qu’on l’aborde, la sculpture de Puget se fait et se défait à la fois. Elle ne tient dans aucune de ses lignes :
elle est la vague qui court de l’une à l’autre, qui soulève la lourde étoffe du marbre et l’entraîne dans une ronde sans fin. Ce
tourbillon apparemment destructeur, qui ne se perpétue que par la violence même du déséquilibre, qui n’admet d’harmonie
que contrariée, de symétrie que brisée, rend l’homme à son vrai destin. Car l’homme n’est rien d’autre que la succession de
ses métamorphoses, « jamais aussi semblable à lui-même que lorsqu’il est en mouvement » (Le Bernin).
Bernard Pingaud, in « Le baroque », numéro de l’Arc, 1990.
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B. Pierre Puget, Milon de Crotone attaqué par un lion (1671-1682) (musée du Louvre)
Document 5 : Le Bernin Apollon et Daphné
(1622-25) Rome : manuel p 50
Document 6 : Le Rêve du chevalier de Pereda y Sagaldo
(1655) : p 47 manuel
Document 7 : Chaire de la cathédrale Saint-Bavon à Gand
Document 8 : Bassin d’Apollon , jardin du château de Versailles :
Sculpture de Jean-Baptiste Tuby (1635-1700)
p 52 manuel
Document 9 : Flambeau représentant la mort,
1713 (abbatiale d(Heilingenkreuz)