En savoir + - Musées en Franche
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Mise à jour : 2005 MUSEE DU JOUET DE MOIRANS EN MONTAGNE GUIDE DE VISITE A L’USAGE DES VISITEURS DE LANGUE FRANÇAISE Le Musée du Jouet de Moirans se présente en quatre parties : • Au rez-de-chaussée : Une exposition sur les techniques de fabrication des jouets dans le Jura. Un espace d’exposition temporaire. Il y en a environ deux par an. L’exposition permanente : les jouets sont classés suivant une typologie d’usage et de fonction : jouets de filles et de garçons, jouets premier âge, jeux de société et d’adresse. Chaque vitrine comporte une liste des objets qui sont repérables à leur numéro. • A l’étage : Celui-ci accessible par un escalier au fond du bâtiment, vous permet de découvrir d’autres univers. Chaque vitrine comporte des explications dans un rouleau lumineux. Le texte de tous les rouleaux vous est traduit dans les pages qui suivent. L’ÉQUIPE DU MUSEE DU JOUET VOUS SOUHAITE UNE AGREABLE VISITE Ayez l’amabilité de rendre ce document à la sortie, SVP, merci. AU REZ-DE-CHAUSSÉE Le jouet est l’objet du rêve, du désir, du plaisir, du rire. Il permet d’apprendre le monde et les rôles sociaux. Il est l’objet du négoce, de l’investissement, des échanges internationaux. Mais le jouet est d’abord fabriqué, c’est le travail des gens du jouet du Jura qui est présenté ici. Où l’on découvre comment, dans cette montagne, les hommes et les techniques ont formé une culture propre, toujours nourrie des contacts et emprunts. 2 « LE PAYS » Ici l’hiver c’est dur. Les fermes souvent isolées, la neige, pendant 4 ou 5 mois, qui garde les hommes et les bêtes à l’intérieur. A l’automne on a tué le cochon, on l’a mis au saloir ou à fumer. Dans le temps la vigne était cultivée plus haut que maintenant, et les céréales aussi. Mais avec des saisons aussi courtes le rendement n’était pas bon, alors on était preneur d’un travail d’appoint. Tout ce qu’il fallait était sur place : sous terre, du minerai de fer pour alimenter les clouteries, tréfileries, taillanderies ; tout autour du bois, sapins, épicéas, hêtres, buis, et surtout l’eau, pour sa force, toute l’année. La même eau parfois pour des dizaines d’ateliers en cascade. Au dix-huitième, l’horlogerie arrive en Suisse et se répand dans tout le massif. Après 1850 les villages se spécialisent : à Lamoura les lapidaires, tailleurs de pierres fines ; à Moirans les tourneurs : ils fabriquent les premiers jouets ; les pipiers, les diamantaires à Saint-Claude ; les boisseliers à Bois-d’Amont ; à Morez, les lunetiers. Partout on travaille à la ferme en famille ou chez des fabricants. D’une génération à l’autre, on a souvent changé de métier selon l’offre. Aujourd’hui les ateliers sont devenus des usines, le plastique et les ordinateurs ont rejoint le bois et le métal. Au milieu des montagnes les hommes continuent. 3 TOURNER Où l’on comprend comment ils ont tourné tout ce qui pouvait se tourner La tournerie jurassienne prend son essor à partir de 1850. Ils ont tourné le buis...mais aussi l'os, la corne, l'ivoire, la galalithe. "En 1936 le tour "rotatif "est mis au point à Moirans." Un tourneur témoigne : - « L’évolution de la tournerie se situe surtout entre les deux guerres à l’apparition des rotatives. A l’origine mon père travaillait à la main avec les gouges. Alors qu’avec les rotatives de l’instant où c’est bien réglé une simple manœuvre peut travailler dessus. La difficulté réside surtout dans les réglages et l’affûtage des formes. On considère qu’un bon tourneur est un bon affûteur ». Tour électronique 4 CHANTOURNER Où l’on voit de bons mécaniciens, bons connaisseurs du bois, adopter d’autres machines pour faire d’autres formes. chantourner c'est découper le bois avec une scie à ruban Un industriel : « La scie à ruban permettait de faire pas mal de chose mais l'entretien du matériel et des lames de scie revenait souvent plus cher que le travail lui-même. Les scies étant très fines, elles se cassaient très souvent. Voilà un article qui a été fait à la scie à ruban avant qu'on ait des défonceuses. Vous remarquerez que le pourtour n'est pas net et qu'on voit tous les coups de scie. Ce qui donne un très gros travail pour lui donner un aspect de finition meilleure ». Défoncer c'est travailler le bois avec des fraises, toupies... Sur les nouvelles défonceuses, l'homme n'a plus qu'un rôle de réglage 5 POLIR, COLORER Où l’on apprend comment des familles entières ont poli, assemblé, peint, trempé et rubané des sifflets et des quilles par milliers. Polissage au tonneau Maintenant marginale la "filette" a longtemps servi à domicile Laquage par trempage Un designer : Laquer un jouet ça parait facile mais en fait c'est très difficile parce qu'il y a plusieurs choses importantes à bien respecter : l'inclinaison des pièces lorsqu’on les pique sur les planches car au niveau des coulures c'est très important ; le bois qui doit être bien sec ; enfin la remontée c’est à dire le savoir faire du laqueur. La personne la plus importante dans un atelier de laquage c'est le laqueur. Il voit selon les conditions atmosphériques comment il faut travailler. Il maîtrise tout le processus. Le travail du bois est complètement différent de celui du plastique. Une pièce comme celle-ci en plastique sort avec ses couleurs, ses positionnements de personnages revient à 1 F, alors que nous il y a encore tout à faire et elle revient entre 8 et 10 F. Tampographie sur jouets en plastique 6 MOULER Où l’on pénètre dans l’époque du cadeau Bonux et de la diffusion de masse : ayant appris à se couler dans le marché, ils apprennent à couler du plastique. Les premiers jouets plastique étaient thermoformés Le soufflage est utilisé pour les pièces creuses et plutôt molles. L'injection permet de mouler des pièces précises et d'un bel aspect. Un technicien : « Dans le plastique, tous les coûts sont calculés. On a mis des robots sur les presses surtout pour améliorer la qualité. Les pièces ne tombent plus les unes sur les autres. La grande différence entre le plastique et le bois c'est que les moules sont faits pour travailler en grande série. Par exemple, chez nous, les presses travaillent 24 heures sur 24. Même si un moule coûte 450 000 F, si il produit 2 millions de pièces je pense qu’il est vite amorti ». Enfin, le rotomoulage est le moulage de pièces creuses de grande taille. 7 DESIGN Où l’on apprend qu’un bon concept de jouet doit se traduire en objet industrialisable. Conception d'un jouet de plage. Un designer : - « Le design c’est une façon d’interpréter une forme sur un objet bien précis. On m'a demandé il y a quinze jours de créer un nouveau jeu de quilles. Alors j'ai cherché des nouvelles formes et j'ai trouvé un avion avec une embase simple qui peut recevoir six quilles de nouvelle forme ». Réunion de conception La directrice marketing : - « On va discuter de cette nouveauté qui est un jeu d'adresse pour l'été. André nous présente une nouvelle maquette ». Le designer : - « Je pensais pour la quille, utiliser une tête de chien ». Le psychologue : - « Il ne faut surtout pas que ce soit un jouet qui engendre l’échec. Il faut que l’anneau passe bien ». La directrice marketing : -« Vous avez eu le temps de calculer les outillages ? » Le chef de fabrication : - « Certaines formes en relief sont difficiles à réaliser sur les moules en creux . Ca présente des risques ». Le designer : -« Si on supprime les stries, cela déséquilibre l’avion. Il faut des choses en relief ». Le chef de fabrication : -« On va te proposer un compromis » Usinage des moules : 6 semaines. 7 TESTS ET NORMES Où l’on confirme que le jouet doit s’adapter à l’enfant, aux parents et aux normes de sécurité. La fabrication d’un jouet s'accompagne de tests réguliers auprès d'adultes et d'enfants. 1) Ludothèque de la Maison du jouet : test d'ergonomie d'un tracteur - Même à cinq ans l'enfant soulève le tracteur pour changer de direction (comportement acquis avant le pédalage). - Système d'accrochage complexe: L'enfant confond encore vissage et dévissage. - Pédalage difficile avec un autre enfant dans la remorque, mais ensemble tracteur-remorque très stable. - Enfant trop grand, les distances pédale-roue-capot deviennent insuffisantes. 2) Ludothèque de la Maison du jouet : test de segment d'âge Le jeu est proposé à des enfants de 4 et 5 ans. - Ni l'un ni l'autre ne réussit à construire la ferme. - La photo de l'emballage n'est pas une aide, car elle n'est pas interprétée en trois dimensions. - Après 2 min 20 d'essais infructueux, le garçon renonce... Jeu à réserver aux enfants de 6 ans et plus. Selon la saison le jouet sera sur le marché 6 à 12 mois après sa conception. Coûts : - Conception-études : 915 € Investissement moules : 60 980 € Prix du plastique pour un jeu : 2,30 € Prix public probable : 15,24 € 8 COMMERCIALISATION Où l’on apprend comment on fait connaître un produit présenté de façon attractive à ses acheteurs potentiels. Extraits de catalogues (1960-1989) 9 THÉÂTRE DE MARIONNETTES OU FILM 10 "L'HOMME N'EST COMPLET QUE QUAND IL JOUE". F. SCHILLER. Il est parfois difficile de discerner ce qui est jeu de ce qui ne l'est pas. Le jouet, en tant qu'objet, peut être considéré comme le support du jeu. Il peut être un objet prévu pour le jeu ou, grâce à l'imagination de l'enfant, n'être qu'un simple bâton servant à de multiples fonctions... Dès lors l'enfant crée ses propres règles et les fait varier à sa fantaisie. Il suffit parfois d'une ficelle entrelacée entre les doigts pour se distraire des heures durant... Bon nombre de jeux actuels ont une origine sacrée. La marelle (symbolique de l'enfer et du paradis) ne nécessite qu'un caillou et un peu de craie... D'autres jeux plus anciens comme le "pet en gueule", pratiqué au XVIème siècle, peuvent nous surprendre aujourd'hui. 10 PET-EN-GUEULE Ce jeu, qui fut très en honneur vers la fin du XVIème siècle, consistait simplement à faire une sorte de roue animée formée par l’enlacement de deux joueurs. « Il est plus badin que violent lorsqu’on a les reins souples, et s’il y a quelque chose à craindre pour les joueurs, c’est quelque mauvais vent, dont il est difficile de se garantir », écrit Le Duchat, commentateur de Rabelais, qui ajoute que, dans certaines provinces, le jeu consiste uniquement à savoir qui fera le plus de bruit lorsqu’en enflant ses joues on s’en frappe l’une avec les cinq doigts en pointe. 11 DES ENFANTS DÉJA ADULTES... Dans les pays les plus riches, les enfants miment et jouent leur futur métier. Dans le reste du monde, le temps de l'enfance n'est pas toujours celui du jeu, de l'amusement ou de l'insouciance... Depuis vingt ans et sur tous les continents, malgré les réglementations internationales, le travail des enfants n’a cessé d’augmenter. Le Bureau International du Travail (BIT) estime à 250 millions le nombre d’enfants de 5 à 14 ans (un enfant sur quatre) au travail. Ces enfants économiquement actifs se situent en grande majorité dans le tiers-monde, où une pauvreté massive entretient le phénomène. La moitié bénéficie d’une forme d’éducation, mais l’autre moitié travaille à temps plein. Les pays industrialisés ont en grande partie éliminé le travail des enfants au XXe siècle (même s’il subsiste en Italie, au Portugal, aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne…), grâce à des lois sociales et à une scolarisation massive. Les plus nombreux sont ouvriers agricoles ou aident leurs parents dans le foyer familial. « Petits travailleurs indépendants », ils exercent aussi les métiers de la rue : vendeurs de rues, cireurs de chaussures... Dans les villes, ils sont employés dans des ateliers de tissage, des entreprises de bâtiment, des mines... La liste des produits fabriqués par les enfants est longue : T-shirts, chaussures, jouets, tapis, ballons, poteries… L’exploitation sexuelle, les trafics d’enfants, l’esclavage pour dette et leur enrôlement de force dans les rangs armés prospèrent aussi sur le terrain de la pauvreté absolue. 12 RICHES ET PAUVRES PARTAGENT-ILS LES MEMES JOUETS ? Les jouets n'ont pas toujours été fabriqués en grandes séries pour des milliers d'enfants... Au début du XXème siècle en Europe, les jouets des enfants des familles modestes étaient très différents des jouets sophistiqués conçus pour satisfaire les exigences des enfants des classes sociales aisées. Les enfants et parents des familles les moins argentées fabriquaient souvent eux-mêmes les jouets. Ils utilisaient des matériaux naturels comme le bois, les feuilles, la terre... Les jouets développaient alors l'imagination et la dextérité de leurs créateurs. Les dînettes ou les poupées en porcelaine et les Polichinelles richement brodés restaient le privilège de la bourgeoisie. 13 JEU DE 58 TROUS en forme d’hippopotame Egypte, 1er Millénaire. Reproduction en résine d’une pièce unique en faïence bleue, exposée au Musée du Louvre. Né en Egypte, ce jeu de parcours a connu un important succès au Moyen Empire. Puis, il passe d’Egypte en Nubie et on le retrouve en Palestine au Nouvel Empire. Les formes du plateau peuvent varier : hippopotame, bouclier… Principe du jeu : les deux joueurs déplacent respectivement leurs fiches (ornées d’une tête de chacal et de chien) dans les trous. L’avance des pions est gérée par le jet de 4 bâtons-dés de couleur ivoire. Le gagnant de chaque parcours (2 hémisphères) met sa fiche dans le trou central et prend la pièce de l’autre joueur. Dès qu’un des 2 joueurs a placé 3 de ses pièces dans le trou d’arrivée, il a gagné la partie. 14 QUAND ICARE JOUE Icare, Léonard de Vinci, les frères Montgolfier, Blériot, le Baron noir... autant de noms qui éveillent l'imagination des enfants et les font s'élever... en rêve d'abord. Les débuts de l'aviation fascinent les foules. Les fabricants de jouets ne laissent pas l'occasion s'envoler. Dès les années 1920, de nombreux avions en fer blanc lithographié sont produits. Les hydravions, à mi-chemin entre le ciel et l'eau, remportent un franc succès. L'univers étant à présent un champ trop restreint pour l'esprit de l'homme, l'enfant va devoir s'envoler pour des galaxies plus lointaines. 14 MARINS D'EAU DOUCE Quel enfant n’a pas tenté de faire flotter une embarcation dans une flaque, un petit ruisseau ou un lac ? Pénétrant l’univers de la navigation, les « petits marins d'eau douce » jouent des rames, des voiles, des gouvernails et des moteurs à ressorts ou radios commandées. Symboles de liberté et d'aventure : canots, pirogues, voiliers majestueux et paquebots étincelants se croisent dans les ports imaginaires des enfants. 15 PETITES MAMANS "La poupée est un des plus impérieux besoins et en même temps un des plus charmants instincts de l'enfance féminine. Soigner, parer, habiller, déshabiller, enseigner, un peu gronder, bercer, dorloter, endormir, se figurer que quelque chose est quelqu'un, tout l'avenir de la femme est là... Cosette s'était donc fait une poupée avec un sabre." Victor Hugo. Les misérables. 1862 Tout en rêvant et en jouant, tout en faisant de petits trousseaux et de petites layettes, tout en cousant de petites robes, de petits corsages et de petites brassières : l'enfant devient jeune fille puis la jeune fille devient femme. Les petites filles en coiffant, lavant leurs poupées médecins ou hôtesse de l'air... se forgent inconsciemment un modèle social. 15 AU FOUR ET AU MOULIN A quoi rêvent les petites filles quand leurs poupées dorment ? Machines à coudre au travail précis, fers à repasser, aspirateurs, tricotins sont autant d'ustensiles qui leur permettent d'imiter leurs mamans, à moins qu'elles ne fassent de la broderie, de la tapisserie ou la lessive. Le fourneau en fonte miniature nous rappelle la saveur des préparations culinaires d'autrefois où l'on prenait le temps de moudre le café. Depuis, les petites filles se sont adaptées aux évolutions techniques, les cuisinières électriques sont venues compléter le jeu de la dînette tant prisé. Lorsqu'une amie vient à passer, elle joue bien évidemment le rôle de la cliente dans le jeu éternel de la marchande où les étalages sont garnis de victuailles les plus réalistes. 16 L'OURS, BETE DE SOMME... Fatigué de trop d'amour ou de trop de bagarres, l'ours, roi des peluches, fête son centenaire en 2003. Son origine mythique veut qu’en 1902, lors d’une chasse à l’ours, Theodore Roosevelt, alors Président des Etats-Unis, ait refusé de tuer un petit ours brun. A la suite de cette aventure, un confiseur avisé de New York demanda à sa femme de confectionner un ours en peluche. Il fut appelé Teddy, diminutif du prénom du Président. Le Teddy’s Bear (l’ours de Teddy) venait de naître. Pendant ce temps-là, à Stuttgart, la couturière Margarete Steiff, atteinte de poliomyélite, créa à domicile son premier ours en peluche articulé. Suite à la présentation de ce modèle à la foire de Leipzig, la célèbre firme Steiff prit alors son envol... - 1903 : fabrication de 12 000 oursons. - 1908 : fabrication de 975 000 oursons ! En 1919, les premiers ours français en mohair virent le jour, conçus par les firmes Pintel et Fadap. Auparavant, la France importait ses ours d’Allemagne mais avec la Première Guerre mondiale, les autorités françaises décidèrent d’interdire l’importation des jouets allemands. On accorde à l'ours des sentiments humains. Il est populaire, aimé, sympathique et inspire confiance et tendresse. La tranquillité et l'innocence de l'ours en peluche nous font oublier la férocité de l'animal. 17 LA PISTE AUX ETOILES Le cirque est un spectacle d’evasion et de decouverte qui emerveille l’enfant. Clowns, écuyers, acrobates, trapézistes, dresseurs d’animaux savants, dompteurs, jongleurs et musiciens occupent la piste du chapiteau et permettent à l’enfant de se projeter dans l’existence d’un autre être, de vivre dans un autre monde. L’enfant est envahi par une gamme d’émotions diverses : découverte, fascination, peur. Sans oublier le rire, déclenché par les pitreries et les facéties du clown, figure emblématique du cirque. Le jouet participe de cet émerveillement en offrant à l’enfant la possibilité de prolonger ce spectacle à la maison et de recréer sans cesse les scènes du cirque afin de mieux en appréhender les mystères. 18 LE CHOMAGEOPOLY Le Chomageopoly est né d’un conflit au sein de la société LIP, une entreprise horlogère de Besançon. L’affaire LIP débute en 1973. Durement éprouvée par la crise économique, l’entreprise menace de licencier son personnel. En marge de leurs nombreux mouvements de grève, les ouvriers souhaitent mobiliser le grand public à leur cause par l’intermédiaire d’un jeu. Ils créent alors le Chomageopoly en détournant les règles du célèbre Monopoly. Le but du jeu n’est plus comme à l’origine de faire fortune, mais de sauvegarder des emplois. Chaque joueur représente une entreprise luttant contre le licenciement de son personnel. Au cours de la partie, les joueurs sont amenés à créer des comités de soutien, à participer à des manifestations sur les routes ou à organiser des fêtes ouvrières destinés à leur procurer des « rapports de force », sorte de monnaie leur permettant de rallier à leur cause la population et les décideurs institutionnels. Parvenu en fin de parcours, chaque joueur négocie pour l’entreprise qu’il représente la solution qu’il juge être la meilleure en fonction du nombre de rapports de force obtenu. Le Monopoly a également ouvert la voie à d’autres jeux, comme le Tiers-Mondopoly ou le jeu Anti-Monopoly II, qui détournent de la même façon son principe de base. Créateur : ouvriers de l’entreprise LIP. Date de création du jouet : milieu des années 70. Lieu de fabrication : Besançon. Date d’acquisition : 22 juillet 1992. A L’ÉTAGE 19 JEUX DE MAINS On retrouve dès la plus haute antiquité l'origine des jeux d'adresse. Homère évoque le jeu d'osselets et l'archéologie nous livre des totons (toupies à 6 faces), de l'époque romaine. Réservés aux adultes, ces jeux sont des jeux d'initiation, de formation du corps et de l'esprit, destinés à maintenir un certain tour de main mais aussi à connaître l'avenir. Le bilboquet dont parle Rabelais connaît son heure de gloire à la cour d'Henri III. Le yoyo, sous le nom d'émigrette était le jeu favori des émigrés (opposants au nouveau régime réfugiés hors des frontières) pendant la Révolution française. Un grand nombre de ces jeux d'adultes ont été transformé en jeux d'enfants. Ainsi le jeu de croquet, jeu de plein air, très en vogue au début du siècle est devenu parfois croquet de salon pouvant se jouer sur une table. La toupie ou sabot (parce qu'autrefois taillée dans un sabot usé), est composée d'un cône de bois et d'une pointe de fer pour éviter l'usure. Mise en mouvement à la main, elle est ensuite fouettée par une lanière. Elle peut également être lancée par une corde enroulée. La toupie a été un des fleurons de la tournerie Moirantine tout au long du XIXe siècle et jusqu'après la seconde guerre mondiale. 20 ROULEZ JEUNESSE Le cheval, élément encore indispensable en 1900 à la vie et l'économie quotidienne, a toujours été exploité dans les jouets comme en témoigne le cheval-tricycle (jouet très populaire de 1880 à 1910). Le spectacle des automobiles évoluant dans les rues et sur les routes ne peut manquer de faire naître chez l'enfant le désir de posséder des jouets roulants qui en soient la reproduction. C'est ainsi que le fidèle cheval est remplacé au début du siècle. Après le succès des cycles (vélos, tricycles,...), apparaissent les voitures à pédales tout d'abord dotées de propulsion par pédaliers. Celles-ci ramenées à la taille de l'enfant sont à l'origine produites en séries par les fabricants de poussette et de jouet. Dès 1912, on observe une véritable concurrence entre les autos à pédales qui connaissent leur âge d'or de 1930 à 1950 en célébrant avec succès l'automobile de luxe, de course, et les propulseurs (encore appelés rameurs) qui tombent en désuétude également en 1950, après un beau succès. Les voitures à pédales suivent l'évolution des styles de carrosserie sans être la copie servile de la réalité, mais une interprétation de l'esthétique automobile de l'époque. Avec l'arrivée du plastique, de nouvelles formes de véhicules apparaissent et on voit se développer de nouveaux concepts tels que "porteur" ou "pousseur". Patinettes et trottinettes du début du siècle évoluent également pour être remplacées de nos jours par les "skate-boards et rollers". 21 FAIRE UN ARTISTE Les parents font désormais un dur métier. Sous couvert de jouets et de jeux, ils doivent éduquer leurs enfants, veiller à leur épanouissement, à éveiller leurs sens, leurs dons enfouis qui ne demandent qu’à éclore… Et si le jeu était le contraire du sérieux, de l’apprentissage ; si le jeu n’était pas cette accumulation sage de connaissances et d’attitudes, mais au contraire rêverie, dépense inutile et temps perdu. 21 LES PROS DE L’ÉCOLE A la fin du XIXe siècle, l'école obligatoire de Jules Ferry a donné naissance à de nouveaux jouets. Les écoles miniatures, jeu d'imitation qui permet d'intervertir les rôles : On joue à l'école, on joue à la maîtresse, on joue aussi à apprendre, à compter avec les bouliers oiseaux, les bûchettes plastique ou les dominos, à lire et à écrire avec les ardoises magiques et les tableaux. Les leçons de géographie se font par l'intermédiaire des lotos et des puzzles. Avant la scolarisation, les petits bureaux jouets enseignent aux enfants les attitudes du parfait petit écolier. A l'inverse, dans les années 1950 le développement de la production d'articles d'écoliers permet au jouet de faire une entrée discrète dans les classes : taille-crayons en forme d'animaux ou de voiture. 21 TAMBOURS ET TROMPETTES Traditionnellement, pour s’assurer que l’enfant accédera correctement au langage, qu’il saura babiller puis parler, on a coutume de l’entourer d’objets qui tintent ou sonnent clair : gobelets, clochettes, hochets, grelots. Ainsi, croit-on, l’enfant parlera aisément. Aujourd’hui, la permanence des objets musicaux autour du berceau s’explique sans doute pour d’autres raisons : les parents considèrent en effet que l’environnement de l’enfant doit être riche et que son éveil sonore et musical doit commencer dès le plus jeune âge. 22 LES HEROS DE LA SCIENCE Parmi les thèmes proposés à l'édification de l'enfant, la science et le progrès constituent une inépuisable mine. Depuis Jules Verne, la science est cette aventure heureuse conduite par des hommes intrépides qui concourent ainsi au bonheur de l'humanité. Ainsi l'enfant peut domestiquer la vapeur et l'électricité pour transformer le monde. Il peut se donner l'illusion de participer à l'aventure de l'informatique ou de l'électronique. Et ainsi, qui sait, rêver son avenir. 22 LA LANTERNE MAGIQUE Jadis concurrent redoutable des marionnettes, cet instrument d'optique aujourd'hui disparu a été pendant des siècles un divertissement populaire entre tous. On pense qu'il était déjà connu dans l'Antiquité mais on ignore l'auteur de cette découverte. Les encyclopédies l'attribuent sans preuve textuelle, à Roger Bacon (1214 - 1294), moine franciscain anglais. L'étrangeté de cette invention frappe les esprits, on ne tarde pas à accuser l'inventeur de maléfices et de sortilèges. Le pape Innocent IV, averti de l'affaire, l'expérimente lui-même et la considère comme un jeu fort divertissant, allant même jusqu'à faire des démonstrations à ses proches. Au XVIIe siècle, la peur à l'encontre de la lanterne magique perdure. Le "Nouveau dictionnaire" de Richelet en donne la définition suivante : "C’est une petite machine d’optique qui fait voir dans l’obscurité, sur une muraille blanche, plusieurs spectres ou monstres affreux, de sorte que celui qui n’en sait pas le secret croit que cela se fait par art magique". Jusqu'au XIXe siècle, le métier de montreur de lanterne associé à celui de joueur d'orgue de Barbarie est une spécialité des Savoyards qui parcourent la France et se font payer pour ce spectacle. C'est parce qu'il ne pouvait pas offrir à ses enfants ces représentations que le ferblantier Auguste Lapierre leur fabrique une lanterne magique. Ainsi naît en 1843 la petite industrie Lapierre. La France devient alors le seul pays producteur de lanternes familiales. La boîte en fer blanc est accessible à de nombreuses familles. Lapierre perfectionne le procédé en jouant avec deux plaques superposées, l'une pour le décor, l'autre pour les personnages ou les animaux. Des tirettes permettent d'animer les personnages. Les progrès industriels de la chromophotographie, de la décalcomanie et de la photographie en permettent une très grande diffusion. En 1877 avec l'apparition du phonographe, Lapierre adjoint le son à l'image et nomme son invention "Luciphone". La véritable animation des images n'interviendra qu'avec le phénakistiscope du belge Plateau, prémice du cinématographe des frères Lumière, inventé en 1895. 22 L’ÉLECTRICITÉ AU SERVICE DES JOUETS Les machines à vapeur, lourdes et bruyantes sont remplacées par les moteurs électriques ; l’énergie se fait invisible, subtile et disponible partout. Pourtant les débuts de la « Fée Electricité » sont laborieux. Elle n’a donné encore aucune application pratique (excepté le télégraphe) à l’apparition des premiers jouets utilisant ses propriétés « mystérieuses ». Les « boîtes d’expériences électriques » (avec piles, bobines de Rhumkorff, sonneries, tubes luminescents de toutes les couleurs…) présentent des articles trop fragiles (piles s’usant vite, contacts s’oxydant, fils se rompant…). Parvenus trop tôt sur le marché, ces jouets n’ont qu’un succès dû à la curiosité. L’électricité encore mal disciplinée fait peur : courts-circuits, incendies et accidents mortels hantent les esprits. Entre 1885 et 1900, l’évolution technologique se fait plus rapide et l’électricité s’impose véritablement. Une seconde génération de jouets apparaît alors mieux accueillie par les enfants. Piles, accumulateurs, petits moteurs, machines électrostatiques, aimants, dynamos, leur permettent, grâce à un fonctionnement satisfaisant, de jouer aux apprentis physiciens. Chose inconcevable aujourd’hui, on offre même aux enfants des coffrets d’accessoires permettant de produire des rayons X et d’effectuer des expériences de radioscopie et de radiographie qui provoquent de nombreux accidents. A l’époque, on craint que ce type de jouets ne crée « une génération d’esprits positifs, pratiques » au détriment de la fonction imaginative. Aujourd’hui, l’électricité sous forme de piles est présente dans un très grand nombre de jouets, non plus pour l’apprentissage d’un phénomène physique, mais comme source d’énergie. 22 « AVEC LES MACHINES A VAPEUR, L’ENFANT ENTRE DANS L’UNIVERS DE LA SCIENCE DES HOMMES » De nouvelles inventions illuminent les trente dernières années du XIXe siècle et enfièvrent l’imagination du grand public. Les enfants sont au premier rang de cette explosion de nouveautés qui bien vite les fascine. Des machines à vapeur en réduction avec lesquelles les enfants vont pouvoir imiter les adultes font leur entrée dans les magasins de jouets. L’apparition de ces machines dans l’univers des jouets marque une véritable rupture avec la tradition des jouets statiques. Pour actionner ces machines sous l’œil attentif du grand frère ou du père (avec le risque de pincement, d’écrasement des doigts ou pire, d’explosion), l’enfant devra huiler aux points de frottement, doser la quantité d’eau, régler la hauteur de la flamme après avoir allumé les morceaux de charbons de bois, vérifier la pression et enfin ouvrir le robinet d’une main décidée pour que la bielle se mette en mouvement. Il faut ensuite surveiller le niveau de l’eau pour ne pas détériorer la chaudière. Les modèles de machines à vapeur sont nombreux. Les chaudières peuvent contenir d’un demi-litre à plus d’un litre d’eau, être horizontales ou verticales, en tôle étamée ou en cuivre. Certains modèles luxueux comportent un régulateur à force centrifuge, un manomètre, un sifflet, une pompe d’alimentation. On peut greffer de multiples accessoires à ces machines : pompes, ascenseurs, machines outils, machines agricoles, voire un personnage animé. Il va sans dire que ce type de jouet, très cher, est réservé alors aux enfants des classes privilégiées, ceux dont l’usine ne sera pas le destin. 22 LE JOUET ET LE PROGRES TECHNIQUE ENTRETIENNENT DES LIENS COMPLEXES Le jouet se nourrit du progrès. Il adopte et adapte à son usage l’électricité et l’électronique : des jeux anciens retrouvent ainsi une seconde jeunesse, comme les jeux de questionsréponses. Le jouet véhicule aussi l’image du progrès technique et scientifique. Il s’inspire des formes nouvelles (TGV, écrans de télévision, prototypes de voitures, fusées) où la science et la fiction sont voisines. Enfin, l’histoire nous enseigne que les jeux, la recherche du plaisir et du divertissement sont souvent à l’origine des progrès techniques importants : les automates, les machines hydrauliques pour les fontaines, les poudres et feux d’artifices en Chine. Le téléphone luimême, à ses débuts, est perçu comme un jeu. Paradoxalement, comme la guerre, le jeu est un moteur des techniques. 22 MACHINE ÉLECTROSTATIQUE À INFLUENCE DITE MACHINE DE WIMSHURST Inventée en 1883 par l’anglais J. Wimshurst, elle comporte deux plateaux d’ébonite tournant en sens inverse et sert dans les expériences de laboratoire. Elle permet de produire des décharges électriques. Le débit de la machine dépend de la vitesse de rotation que l’on imprime à la roue. Mais cette machine est également mise à la disposition des enfants car elle est considérée comme un jouet scientifique. L’enfant peut ainsi réaliser toutes sortes d’expériences amusantes et spectaculaires. Il fait jaillir avec plaisir de longues étincelles en rapprochant les deux boules de l’excitateur. 22 LE MONDE M’APPARTIENT Connaître et maîtriser la nature, pénétrer dans les profondeurs de la terre, au cœur de la matière et de la vie : avec ces jeux l’enfant expérimente le rêve d’un monde entièrement soumis à la connaissance et à la toute puissance de la technique. Blouses blanches, éprouvettes, électricité et fusées sont les accessoires de cette glorification et de cette pédagogie. Ici la science et la technique sont bonnes et positives, à la portée des jeunes héros, pour domestiquer la nature. 23 HISTOIRE D'UNE ENTREPRISE : MECCANO C'est parce qu'il ne trouve pas les pièces nécessaires à la réalisation d'une grue pour ses enfants que Frank Hornby décide de les fabriquer lui-même. Il met ainsi au point un principe de standardisation qui permet d'assembler les pièces d'un système de combinaisons multiples. Le 9 janvier 1901, il dépose son brevet sous le nom de "Mechanics Made Easy" : la mécanique rendue facile. A partir de pièces de métal perforées de rangées de petits trous de même diamètres et équidistants, le Meccano permet aux enfants de construire et d'inventer eux-mêmes leurs jouets. Dès son invention le Meccano est considéré comme jouet éducatif. Devant l'ampleur du succès, le brevet est étendu à la France, la Belgique, l'Allemagne, les Etats-Unis, le Canada et la Nouvelle-Zélande. En 1907 la première usine Meccano s'ouvre à Liverpool. En 1912 une filiale est ouverte à Paris pour la distribution puis en 1920 pour la fabrication. Bientôt trop petite cette première usine de fabrication laisse la place en 1930 à une usine plus grande construite à Bobigny. En 1959, construction d’une usine à Calais où sera transférée toute la production Meccano en 1980. Les dimensions, la taille des perforations et la distance entre deux trous définies dès cette époque n'ont pas changé à ce jour. Dans la première boîte le système contient neuf pièces différentes. Très rapidement des roues, poulies, pignons sont incorporés aux boîtes. En 1926 la couleur est introduite : rouge et vert pour les bandes et cornières. En 1934 les couleurs deviennent bleues et or. Aujourd'hui le bleu, le jaune et le rouge règnent. Le Meccano suit de près l'évolution technique. Le premier moteur à ressort est introduit en 1912, le moteur électrique en 1913, une machine à vapeur en 1914. En 1920, deux boîtes "Meccano électrique" sont créées. En 1980, la boîte "Contrôle électronique" voit le jour. Pour coordonner l'activité des nombreux clubs Meccano qui se constituent, Frank Hornby crée la guilde Meccano. Les objectifs de la guilde sont les suivants : - Développer l'intelligence et le bonheur des enfants. - Encourager la droiture, l'honnêteté, l'ambition et l'esprit d'initiative des enfants. - Encourager les enfants à poursuivre leurs études et leur hobby, en approfondissant leur connaissance des principes mécaniques et technologiques. Chaque club agrée reçoit un certificat signé Frank Hornby et chaque membre une médaille. Aujourd'hui il existe une vingtaine de clubs à travers le monde. De 1916 à 1979, la société Meccano édite un journal, "Meccano Magazine", bimensuel traduit en français et en espagnol. 23 LA MAISON La maison de Poupée a connu une grande vogue en Grande Bretagne et dans les pays du nord de l'Europe. Les plus réussies furent les splendides maisons victoriennes tout en bois sculpté, et les maisons coloniales américaines avec leur colonnade et leur porche. Souvent elles représentaient la demeure familiale et étaient davantage destinées à figurer dans un salon qu'à servir aux jeux des enfants. De façon générale, on s'aperçoit que plus l'enfant grandit, plus il accorde une importance à la précision et à la complexité de réalisation. Au-delà de cette vision réaliste, on découvre des jouets où l'on évoque la maison de façon symbolique. Ainsi, le toit à double pente, les fenêtres, la porte ou la cheminée sont autant d'éléments qui correspondent aux valeurs de confort, d'intimité et de sécurité recherchées par l'enfant. Outre cette fonction d'imitation, le jouet représentant une maison peut jouer un rôle dans l'apprentissage des techniques de construction (assemblage, emboîtage, empilage) et des matériaux (bois pour "la Maison Forestière", plastique ABS pour les Lego, découpage pour les maisons à construire en carton). Dès lors, l'activité de construction devient un jeu et existe pour elle-même. Aujourd'hui, les créateurs de jouets ont conçu de nouvelles gammes faisant appel aux univers imaginaires issus de la télévision ou de la science fiction : les maisons se sont transformées en bases spatiales. 23 LES JEUX DE CONSTRUCTION Les psychologues considèrent aujourd’hui que les jeux de construction invitent l’enfant à entrer en contact avec les formes, les couleurs, les dimensions. Ils favorisent l’acquisition de la manipulation et de la préhension fine. Ils développent ses capacités intellectuelles en permettant des combinaisons variées. 24 LE PETIT CONSOMMATEUR Grâce à ce type de jeux, l'enfant acquiert les comportements d'achat et d'échange comme des choses naturelles. Il considère comme une évidence ce monde regorgeant d'objets à acheter. Il apprend qu'être, dans nos sociétés, c'est avoir et, comme papa et maman, il s'identifie à ce qu'il possède, il a sa tirelire et gère son or. Par delà l'apprentissage des réalités commerciales, les jeux de société comme le Monopoly font de l'argent l'objet principal du jeu... On apprend à s'enrichir et à épargner. Par ailleurs, la roulette, comme au casino, laisse entrevoir loin de la vie quotidienne un monde où l'argent est fruit du hasard. Aujourd'hui, dès l'âge de 10 ans, l'enfant délaisse les jouets au profit d'objets de consommation comme les vêtements ou le matériel hi-fi. 24 MONOPOLY Avant d'être le symbole même du capitalisme, ce jeu relève tout d'abord d'une volonté de réforme et de justice sociale. Son inventeur, Elisabeth J.Nagie, membre de la secte Quaker (secte évangélique) considère qu'une taxe unique imposée sur la plus-value permettrait de lutter contre la spéculation immobilière. C'est pour en démontrer le bien fondé et populariser cette idée qu'elle conçoit ce jeu en 1904, connu sous le nom de "jeu du propriétaire". On achète, on vend, on loue, on manipule de l'argent, on va en prison, on construit, on paie des taxes : on bâtit une fortune. Il se répand ainsi aux Etats-Unis dans des versions différentes, au cours des années 1910 et 1920. Mais ce jeu, quasiment une machine de guerre contre le système capitaliste, trouve son marchand en la personne d'un chômeur touché par la grave crise mondiale de 1929 : Charles Darrow. En 1934, il s'empare de l'idée et la propose à la firme Parker Brothers. La réponse est tout d'abord négative : selon eux le jeu comporterait des erreurs fondamentales de fonctionnement. Darrow persiste et lance une fabrication artisanale de 5 000 jeux. Le succès est très rapide. En 1935, la Parker Brothers revient sur sa décision et signe avec Charles Darrow un contrat en or : le Monopoly poursuit alors sur un plan commercial, sa déjà longue carrière. Aujourd'hui le Monopoly existe dans 30 pays et en 23 langues. On estime que 250 millions de gens dans le monde y jouent. En France, 1 foyer sur 2 possède ce jeu. Depuis son apparition sur le marché en 1935, 100 millions d'exemplaires ont été vendus dans le monde entier. Pour lui, on imprime chaque année une quarantaine de milliards de "dollars" en papier, soit plus que la Banque Fédérale. 25 EN MILLIARDS D'EXEMPLAIRES Les personnages avec lesquels jouent désormais les enfants ne sont plus issus des contes et légendes locales, ni de l'imagination ou des souvenirs du grand-père. C'est la télévision, devant laquelle les enfants des pays riches passent 15 heures hebdomadaires, qui fournit les héros, les rêves, les peurs et les désirs d'achat (*). Désormais, tous les enfants du monde jouent avec les mêmes personnages dont ils voient les mêmes histoires à la télévision, dont ils portent la même trace sur leurs blousons, leurs trousses ou leurs ballons...des univers en milliards d'exemplaires. (*) En France, selon un sondage réalisé par Médiamétrie en 1990 auprès des 6-10 ans. Dates de naissance des héros Astérix : France - 1959 Babar : Belgique - 1931 Bécassine : France - 1905 Bisounours : Etats-Unis - 1983 Blanche Neige : Allemagne - 1812 (conte des Frères Grimm) Etats-Unis - 1937 (dessin animé de Walt Disney) Casimir : France - 1978 Donald Duck : Etats-Unis - 1934 Goldorak : Japon – 1978 Harry Potter : Grande-Bretagne – 1997 Lucky Luke : Belgique - 1946 Marsupilami : Belgique - 1955 Mickey : Etats-Unis - 1928 Nicolas, Pimprenelle et Nounours : France - 1962 La Panthère Rose : Etats-Unis - 1963 Pollux : France - 1965 Les Schtroumpfs : Belgique - 1958 Snoopy : Etats-Unis - 1950 Tintin : Belgique - 1929 Tortues Ninja : Japon - 1990 Zorro : Etats-Unis - 1920 La plupart de ces personnages ont fait l'objet d'une exploitation commerciale intensive sur toutes formes de supports, dépassant largement l'histoire initiale. Rare exception, le jouet Bisounours a précédé son exploitation sous forme de dessin animé. 25 BABAR "Dans la grande forêt, un petit éléphant est né. Il s'appelle Babar". Ainsi débute "l'histoire de Babar" premier album des aventures du célèbre éléphant. C'est en 1930 que Cécile de Brunhoff invente pour ses 2 fils, Mathieu et Laurent, l'histoire d'un éléphant placide. Crée pour n'être que le héros d'un récit pour endormir les enfants, Babar, devient le personnage d'un livre grâce à leur père, le peintre Jean de Brunhoff. Le concours d'un oncle éditeur permet à l'histoire de Babar de dépasser le cadre de la famille de Brunhoff. En 1931, l'ouvrage est édité en France, en 1933 aux USA. De 1931 à 1938, année de la mort de Jean de Brunhoff, 4 histoires de Babar seront publiées : l'histoire de Babar, le voyage de Babar, le Roi Babar, le singe Zéphir. En 1946, Laurent de Brunhoff peintre comme son père, poursuit son oeuvre avec le même regard et publie "Babar et ce coquin d'Arthur". Aujourd'hui, les aventures de Babar remplissent 37 albums traduits en 17 langues. L'histoire de Babar ressemble à celle des contes de fées. Le récit débute par la mort de sa mère tuée par un chasseur. Resté seul, Babar quitte la jungle pour une ville qui ressemble fort au Paris des années 30. Sa rencontre avec la vieille dame qui lui offrant les moyens de se vêtir, fera de lui un vrai citadin. Rejoint par Arthur et Céleste, Babar s'ennuie de la forêt et des animaux. Tous trois décident leur retour dans la jungle. L'arrivée de Babar est un triomphe, son séjour parmi les humains fait de lui un roi idéal. Comme dans tous les contes de fées, l'histoire de Babar fait alterner les climats émotionnels : mort de la mère, rencontre puis séparation d'avec la veille dame, élection du "Roi Babar". Les albums édités dans les années 30 reflètent l'idéologie et les préjugés ambiants. Les rééditions tiennent compte de l'évolution des mentalités. Ainsi, les cannibales du voyage de Babar ont disparu en 1981. 26 LE GRENIER Quels que soient les études et les projets des fabricants, les bonnes intentions des parents éducateurs, c'est finalement l'enfant, le joueur qui a le dernier mot. Le dernier mot, c'est l'invention, qui détourne le jouet de son usage prévu : un emballage qui devient garage, une poupée qui se fait opérer ou les livres qui servent d'escalier. Le dernier mot c'est aussi l'affection, l'attachement au jouet usé d'être tant caressé, aimé et suçoté... tout ce qu'un musée ne sait pas présenter...tout ce qu'on trouve dans son grenier. 26 LES JOUETS AFFECTIFS Les peluches et les poupées-chiffons sont les plus représentatifs des jouets affectifs. La psychologie considère qu’ils permettent à l’enfant de mieux établir la relation avec l’adulte, de créer un état de sécurité, de libérer et de surmonter les tensions et les angoisses. L’enfant peut aussi adopter pour ce faire une partie de vêtement ou une couverture. Il ne sait pas très bien si cet objet fait partie de lui-même ou du monde extérieur, mais il l’emmène partout. 27 LES JEUX ET JOUETS DU 20ème SIECLE A l’aube de l’an 2001, La Revue du Jouet a invité les professionnels de la distribution (directeurs de magasins spécialisés, chefs de rayon jeux et jouets, vendeurs, acheteurs de centrales, responsables de collections, directeurs d’enseignes…) à voter pour élire les 10 jeux et jouets ayant le plus marqué le 20ème siècle. Barbie, de Mattel. Créée le 9 mars 1959, Barbie est un véritable phénomène de société et le jouet le plus vendu au monde. En 1997, on fêta la milliardième poupée vendue. Aujourd’hui, Barbie est un objet de collection qui se vend, avec ses accessoires, à des sommes délirantes : 35000 francs pour la Barbie n°1 vendue en 1994. Œuvre d’art, elle est également l’occasion de nombreuses expositions. Lego, de Lego. Le Danois Ole Kirk Christiansen débute la saga Lego (« joue bien ») en 1932, dans sa petite entreprise de menuiserie. En 1947, cette société de jouets est la première au Danemark à acheter une machine à injecter la matière plastique. A l’aube du 3e millénaire, 189 milliards d’éléments Lego ont été moulés. Plus de 300 millions d’enfants et d’adultes à travers le monde se sont émerveillés devant ces créations qui représentent 5 milliards d’heures de jeu par an. Les gammes et les univers sans cesse renouvelés depuis trois générations suscitent expositions et Coupe du Monde Lego. Monopoly, de Parker. Créé dans un contexte de crise économique par un chômeur qui rêvait de spéculation, de fortune…, le Monopoly a été acheté à 160 millions de boîtes dans 143 pays. Interdit en Union Soviétique jusqu’en 1989 car considéré comme trop capitaliste, il occupe un foyer français sur deux, et suscite les anecdotes les plus folles. Le marathon le plus impressionnant s’est déroulé sous l’eau en 1976 pendant plus de 1008 heures durant lesquelles 140 personnes d’une école de plongée de Californie se sont relayées toutes les deux heures pendant 42 jours de jeu ininterrompu ! Scrabble, de Mattel. Malgré un début difficile de 1930 à 1948, le Scrabble est devenu le jeu de lettres le plus célèbre au monde. La totalité des lettres des 100 millions de boîtes vendues depuis sa création mises bout à bout permettrait de faire deux fois le tour de la Terre. Les Français, qui ont découvert ce jeu en 1955, en serait les plus fervents amateurs, 1 sur 2 y jouant au moins une fois par mois. Le Scrabble est un véritable phénomène de société, inspirant les artistes (Renaud, Pierre Palmade…). Playmobil, de Playmobil. Tout d’abord de tôle, les jouets de l’entreprise familiale Brandstätter deviennent jouets de plastique en 1954. Le premier d’entre eux est une voiture de course fermée. L’entreprise est mise en difficulté par la concurrence et la crise pétrolière de 1970. Pour y faire face, le directeur du bureau d’études travaille sur de petites figurines mobiles avec des accessoires adaptés : les Playmobil, présentés à la Foire Internationale du jouet en 1974. Le succès est immédiat et inlassable auprès des 4-10 ans. Playstation, de Sony. Lancée par Sony en 1993, la Playstation représente une alliance des compétences technologiques du groupe au niveau graphique comme sonore : gestion de 500 millions d’instructions par seconde, et véritable platine CD audio 24 canaux. Avec 65% du marché mondial, elle est devenue en janvier 1999 leader incontesté en matière de console de jeu. La 2e génération fait déjà fureur. Game Boy, de Nintendo. Le groupe Nintendo décide de débuter les années 1990 avec l’introduction d’un produit extrêmement novateur pour la société : le Game Boy, une console vidéo véritablement portable avec des écouteurs stéréo, des cassettes de jeu interchangeables et un câble permettant à deux joueurs de relier leur Game Boy, chacun gardant le contrôle de son écran et du jeu. Par un renouvellement de la gamme (Game Boy, Game Boy Pocket, Game Boy Color), Nintendo domine 99% du marché des portables en Europe et s’impose comme leader mondial de l’industrie du jeu vidéo. Meccano, de Meccano. En 1898, en Angleterre, Franck Hornby fabrique pour ses enfants les pièces d’un système d’assemblage déposé et commercialisé trois ans plus tard sous le nom de « Mechanics Made easy » (« la mécanique rendue facile »). Le système à vis et écrous s’enrichit de pièces permettant l’introduction d’entraînement dans les modèles. Le succès est international. Pourtant, de 1950 à 1999, Meccano SA est successivement achetée et vendue. Depuis avril 1999, elle appartient à Renaissance Investissement qui diversifie le groupe avec le lancement de la marque The Nomad Company. Tamagotchi, de Bandaï. La Japonaise Aki Maita, chargée de la promotion et de la publicité des jouets Bandaï au Japon, décide de créer de minuscules animaux domestiques sous forme de jouets. Fin 1996, des créatures multiples au graphisme caractéristique et à la personnalité propre deviennent jeux électroniques, pouvant même servir de porte-clés ou de montres. Le « tuteur » doit s’occuper de son Tamagotchi (« adorable petit œuf ») comme s’il s’agissait d’un véritable animal : le nourrir, le laver… Face à ce succès, un nouveau marché s’ouvre : celui des personnages électroniques virtuels. Action Man, de Hasbro. Action Man, figurine lancée par Hasbro, représente un personnage d’aventurier, de baroudeur et de sportif de l’extrême, qui a pour mission de défendre le monde de tous les dangers. Dès sa sortie, il devient modèle fort de projection et d’identification pour les enfants. Avec de nombreux accessoires complémentaires relatifs aux lieux dans lesquels Action Man évolue, un niveau d’articulation offrant une maniabilité et surtout une fonction produit très réaliste et innovante, ce jouet a su s’imposer en moins de cinq ans comme la référence des enfants de 4 à 12 ans. Source : Le guide de l’acheteur du salon « Univers d’enfants ». La Revue du Jouet, janvier 2000. 27 LA MONDIALISATION DU MARCHE DU JOUET Le marché des jeux et jouets a pris aujourd’hui le chemin de l’internationalisation. En France, comme dans le reste de l’Europe, les importations de produits finis ou semi-finis sont supérieures aux exportations. Le principal fournisseur de ces pays est le sud-est asiatique, et plus particulièrement la Chine. Face à cette situation, les industriels français ont mis en place leur stratégie de défense : la délocalisation des entreprises dans ces pays, qui renforce l’internationalisation du secteur jouet. Il est de coutume que chaque grand groupe ait une filiale en Asie. L’industrie du jouet est alors traversée de courants d’échanges internationaux, mettant en œuvre d’un côté des machines puissantes, et de l’autre un assemblage manuel de jouets (y compris en France où perdure le travail à domicile). Toutefois, il est de bon ton, pour ces industriels, de se protéger des copies intelligentes réalisées par des pays à moindre coût de main d’œuvre. La France choisit une industrie de marque dont le mot d’ordre est sécurité des enfants et qualité. Cette politique semble efficace puisque le chiffre d’affaires de grands groupes français (Berchet ; Smoby) a triplé en 7 ans. Source : « Une industrie mondialisée pour une consommation saisonnière », La Croix, 15 décembre 1998.