COMMUNIQUÉ : Petite histoire de l`entre

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COMMUNIQUÉ : Petite histoire de l`entre
COMMUNIQUÉ : Petite histoire de l’entre-soi local
27 juin 2016
Le 22 mai 2016, nous, les Nuit debout Drôme-Ardèche, avons mené une action dans
le cadre de la lutte contre la loi travail et son monde à l’Intermarché de Crest
(Aouste-sur-Sye
précisément),
afin
de
dénoncer
le
travail
dominical,
la
surconsommation, l’invasion des grandes enseignes par rapport aux commerces de
proximité.
S’appuyant sur l’article 1587 du Code civil, et reprenant d’autres actions identiques
menées dans d’autres hyper ou supermarchés, nous avons organisé un pique-nique
citoyen, avons pris quelques produits dans les rayons de l’Intermarché, les avons
disposés sur une table dans le magasin pour ensuite les proposer aux client.e.s, tout
en distribuant des tracts pour alerter sur les différents sujets évoqués ci-dessus, sur
le retrait nécessaire de la loi travail, sur son passage en force via l’art. 49 al. 3.
M. Loyal, propriétaire de l’Intermarché, malgré une discussion sereine sur place
avec l’équipe de médiation, déclara à la presse le lendemain qu’il considérait cette
action comme un vol et estima le montant de son préjudice à 151,27 €.
Il précisa, dans un geste dont on peine encore à comprendre la corrélation, qu’il
enlèverait 200 € (et donc plus 151,27 € ??) de ses dons aux associations de Crest – qui
n’avaient rien à voir avec cette action, allez comprendre. Nous lui avons alors
répondu que s’il en était ainsi, nous donnerions nous-mêmes ces 200 € auxdites
associations, car pour nous, la solidarité et l’entraide ne sont pas des gestes de
bonne conscience servant à nous acheter un costume politique honorable, mais elles
sont nos mots d’ordre au quotidien.
Nous étions alors loin de nous imaginer la réaction qu’aurait M. Loyal suite à notre
action.
Dans les jours qui suivirent, un membre de Nuit debout, travaillant alors en période
d’essai à l’Intersport d’Aouste-sur-Sye, fut convoqué au bureau et on lui expliqua
qu’il ne convenait pas pour le poste, sans autre détail. Il demanda, avec insistance,
auprès de M. Morales, gérant de l’Intersport, s’il avait commis une faute ou mal
travaillé... M. Morales lui répondit qu’il n’avait aucune explication à fournir. Un
rapport avec le fait que M. Loyal soit propriétaire de l’Intersport ?
Le 7 juin, un club sportif de Crest publiait sur son compte Facebook ce
communiqué, dans lequel le président demandait élégamment à ses membres d’être
« bienveillants » à l’égard de M. Loyal, ce dernier leur donnant de l’argent chaque
année. Il va sans dire que parmi les membres appelés à être bienveillants, se trouvait
une personne du collectif Nuit debout.
Mi-juin, un mail de l’association Entente Crest Aouste, club sportif de football, nous
était adressé : « Suite à votre manifestation dans l’Hypermarché du Val de Drôme
du 22 mai et à vos consommations effectuées ; le directeur Damien Loyal pénalise le
club sur une action en faveur des jeunes par le non prêt d’un camion frigo. 200 €
pour la location. Dans l’attente de cette régularisation... ».
Quelle ne fut pas notre surprise de constater que le directeur de ce club sportif, que
nous avions cru honteusement pris pour cible par M. Loyal, n’était autre que... M.
Morales, gérant de l’Intersport, cité plus haut dans ce récit... qui cumule les emplois
puisqu’il travaille également... au service comptabilité d’Intermarché !
Que le monde est petit à Crest, n’est-ce pas ? ...
Aujourd’hui, lundi 27 juin 2016, trois de nos camarades étaient appelées à se
présenter à la gendarmerie de Crest suite à la plainte de M. Loyal et dans le cadre de
l’enquête préliminaire.
Elles ont toutes les trois été entendues et sont susceptibles, le cas échéant, d’être
poursuivies pour « vol en réunion ».
Elles sont par ailleurs susceptibles d’être poursuivies pour refus de donner leurs
empreintes et ADN.
Les Nuit debout Drôme-Ardèche apportent leur soutien aux camarades ciblées par
la répression. Une action collective n’appelle pas une répression individuelle, visant
uniquement à déstabiliser et impressionner.
Aucun vol n’a été commis dans l’Intermarché le 22 mai 2016. Les gendarmes ont
interrogé nos camarades sur la légitimité de faire usage d’un article de loi vieux de
deux siècles pour mettre en place une action citoyenne. Les articles vieux de deux
siècles ne nous dérangent pas, nous en voulons pour exemple la Déclaration des
Droits de l’Homme et du Citoyen, et notamment l’article 1er : « Les hommes naissent
libres et égaux en droits », qu’il conviendrait de rappeler auxdits gendarmes de
Crest puisqu’ils ont, ce matin même, alors que nous étions plus de trente personnes
rassemblées devant la gendarmerie, contrôlé un seul individu dans le groupe : le
seul jeune homme racisé.
Lorsque nous avons voulu dénoncer ce contrôle au faciès éhonté et relever les
matricules des gendarmes l’ayant commis, les officiers responsables sont partis dans
leur véhicule tandis que d’autres nous ont repoussés, arguant que nous
« empêchions la circulation sur la voie publique ».
Menaces, pression sur l’emploi, achat du silence, intimidation, collusions, contrôle
au faciès, quel joli petit monde de l’entre-soi local à Crest.
La question nous a été posée de savoir si cette action citoyenne était pertinente. Au
vu du déchaînement de tentatives mesquines pour nous faire taire qu’elle
déclenche, il semblerait qu’elle l’était, effectivement.
Nous, Nuit debout Drôme-Ardèche, persistons dans la dénonciation de la loi travail
et son monde, dont nous avons au travers de cette affaire une illustration flagrante.

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