Production et perception du langage chez les - OHLL

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Production et perception du langage chez les - OHLL
Production et perception du langage chez les Néandertaliens
HUBLIN Jean-Jacques
Action “ Origine de l’Homme,
du Langage et des Langues ”
A. FICHE ADMINISTRATIVE
Titre du projet :
Production et perception du langage chez les Néandertaliens
Mots-clés :
Néandertal, Homo sapiens, crâne, larynx, croissance, oreille moyenne, modélisation
Résumé du projet (10 lignes maximum) :
Le projet se propose de réaliser une étude comparative de l’évolution et du développement
ontogénique de la base du crâne et des parties molles qui lui sont liées dans la lignée
prénéandertaliens/Néandertaliens et chez les hommes modernes. Il sera fait largement appel à
l’utilisation d’imagerie médicale. La reconstitution par imagerie virtuelle des organes de
production de la parole permettra une simulation des possibilités acoustiques du système et une
révision critique des travaux antérieurs. Cette recherche sera menée avec le souci d’intégrer les
différentes fonctions des régions anatomiques concernées et leur rôle adaptatif. Une étude
parallèle sera menée chez l’enfant en s’attachant à comprendre la mise en place de ces structures
et à apprécier leur variation individuelle. Par ailleurs, l’analyse par scanographie à rayon X de
l’oreille moyenne et externe des fossiles néandertaliens et prénéandertaliens permettra d’évaluer
d’éventuelles différences entre leurs caractéristiques acoustiques et celles des hommes modernes.
1. Responsable scientifique du projet
Nom ...HUBLIN........................................ Prénom........Jean-Jacques....................................…….
Grade.....DR2.............................................................................................................................
Discipline du responsable scientifique:.....Paléoanthropologue.................................................……
Établissement de rattachement ..........CNRS....................................................................................…….
Adresse professionnelle :
UPR 2147, Dynamique de l’Evolution Humaine
44, rue de l’Amiral Mouchez
Code postal 75014 Commune .Paris.................................................................................…….
Tél 01 43 13 56 26
Fax 01 43 13 56 30
E-Mail : [email protected]
2. Laboratoire ou organisme de rattachement de l’équipe de recherche
Intitulé ....... Dynamique de l’Evolution Humaine : Individus, Populations, Espèces
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Type de formation (cocher la case utile)
- Unités CNRS : X unité propre du CNRS
unité associée ou mixte du CNRS
Préciser le code unité .UPR 2147.......................
Préciser la délégation régionale : ...Paris A.......................................................
- Unités hors CNRS :
unité universitaire (Préciser l’université)
..........................................................................................…
Autre (Préciser : EPST, Association, équipe étrangère...)
Nom du directeur de l’organisme : .Jean-Jacques Hublin
Adresse : 30, Douzième Avenue.......................................................................................................…
Code postal : 60260 Commune : Lamorlaye..................................................................................
Tél 03 44 21 91 34
Fax I__I__ I__ I__ I__ I__ I__ I__ I__ I__I
3. Autre(s) laboratoires ou organisme(s) partenaires
Listes des participants :
Paléaoanthropologues :
Juan Luis ARSUAGA FERRERAS, Dpto. Paleontologia, Fac. CC. Geologicas, Universidad
Complutense de Madrid, Ciudad Universitaria, 28040 Madrid, Spain
Tel : 34-91-3944846, Fax : 34-91-3944849, e-mail : [email protected]
José BRAGA, Laboratoire d'Anthropologie, Université de Bordeaux I, Avenue des Facultés, 33405
Talence, Tel : (05) 57.96.25.46, e-mail : [email protected]
Steven CHURCHILL, Biological Anthropology and Anatomy, Box 90383, Duke University, Durham
NC 27708 USA, e-mail : [email protected]
Silvana CONDEMI, Centre de Recherche Français de Jérusalem, 5, Shimshon St., BP 547, 91004
Jerusalem, Israel, Tel : (972) 2 671 6441, Fax : (972) 2 673 5325, e-mail : [email protected]
Robert G. FRANCISCUS, Department of Anthropology, 114 Macbride Hall, University of Iowa, Iowa
City, IA 52242-1322 USA, Tel : (319) 335-1421, Fax : (319) 335-0653,
e-mail : [email protected]
Anatomistes et Radiologistes :
Marc BRAUN, Service de Neuroradiologie Hôpital St Julien, 1 rue Foller, F- 54000 Nancy
Tel : 33.(0)3.83.85.16.18, Fax : 33.(0)3.83.85.22.36, e-mail : [email protected]
Jacques TREIL, Clinique Pasteur, 45 avenue Lombez, 31000 Toulouse
Tel : 05.62.21.16.61, Fax : 05.62.21.16.50, e-mail : [email protected]
Informaticien :
Pierre BOUCHET, UMR 7503-CNRS-LORIA-Univ Henri Poincaré- Nancy II, INPL,
23 Bld Albert 1er, 54000-Nancy, Tel : 03.83.59.30.38, e-mail : [email protected]
Linguiste :
Jean-Marie HOMBERT, Institut des Sciences de l’Homme, 14 Avenue Berthelot,
69363 Lyon CEDEX 07, Tel : 04.72.72.64.94, e-mail : [email protected]
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Acousticiens :
René CARRE, Département TSI, ENST, 46 rue Barrault, 75634 Paris cedex 13
Tel : (33) 01.45.81.71.90, Fax : (33) 01.45.88.79.35, e-mail : [email protected]
Shinji MAEDA (consultant), Département TSI, ENST, 46 rue Barrault, 75634 Paris cedex 13
Tel: (33) 01.45.81.71.90, Fax: (33) 01.45.88.79.35, e-mail : [email protected]
Doctorants :
Rolf M. QUAM, Dept. of Anthropology, SUNY Binghamton, Binghamton, NY 13902-6000, USA
Tel : h. (607)722-1691, e-mail : [email protected]
Marilyne SAPALLY, Laboratoire d’Anthropologie, Université de Bordeaux 1, Avenue des facultés, 33405
Talence Cedex
M. TOLL, Biological Anthropology and Anatomy, Box 90383, Duke University, Durham NC 27708
USA
B. PROJET SCIENTIFIQUE
Introduction :
Dès les débuts de la paléoanthropologie, la capacité des différents Hominidés fossiles à
produire un langage articulé complexe comparable à celui de l’homme moderne a été débattue. Cette
capacité dépend avant tout de capacités neurologiques mais aussi des possibilités anatomiques de
l’appareil phonatoire. L’approche de cette question s’est initialement fondée uniquement sur la
paléoneurologie. Ce n’est que plus récemment que des tentatives de reconstruction des parties molles
impliquées dans la production du langage ont été menées notamment par J.Laitman, E. Crelin et Ph.
Lieberman dans les années 1970. Ces recherches se fondaient sur l’anatomie comparée et sur l’étude
du développement ontogénique de la base du crâne et des régions anatomiques qui lui sont connectées.
Elles proposaient une évaluation des capacités phonatoires de divers groupes fossiles et en particulier
des Néandertaliens. La base du crâne est affectée, au cours de l’évolution du genre humain, comme au
cours de son développement ontogénique d’un phénomène de flexion, en relation avec
l’accroissement de la taille de l’encéphale. Chez l’enfant ce phénomène s’accompagne d’un
remaniement anatomique qui aboutit à la mise en place d’un larynx en position basse propice à la
production du langage articulé. La relation proposée par ces auteurs entre flexion basicrânienne et
descente du larynx les a mené à une reconstitution des voies respiratoires supérieures chez certaines
espèces fossiles. Dans ces reconstitutions, les néandertaliens présentent une morphologie
sensiblement différente de la morphologie moderne et leur capacité à produire certains sons a pu être
mise en doute. Ce modèle a été largement discuté et souvent critiqué, mais il reste une hypothèse de
référence, base de toute étude de cette zone anatomique. Pour sa part l’appréciation des capacités
acoustiques de l’oreille moyenne des Hominidés fossiles a été peu étudiée.
Les deux dernières décennies ont vu une augmentation très spectaculaire du matériel
paléontologique disponible pour l’étude de ces problèmes. C’est ainsi par exemple que le gisement
d’Atapuerca (Espagne) a livré, au sein d’une exceptionnelle série de restes prénéandertaliens, des
vestiges basicraniens, des vertèbres cervicales, des os hyoïdes très bien conservés et plusieurs séries
d’ossicules de l’oreille moyenne. Une grande partie de ce matériel est encore inédite. Par ailleurs les
progrès de l’imagerie médicale et de l’imagerie virtuelle a permis de développer les techniques de
simulations anatomiques en 3D et plusieurs participants à ce projet ont joué un rôle pionnier dans la
mise au point de ces techniques informatiques pour la reconstitution et l’analyse des structures
internes chez les Hominidés fossiles.
Il est donc possible aujourd’hui de réexaminer les hypothèses développées par Ph. Lieberman,
J. Laitman et E. Crelin en mettant en œuvre des techniques de reconstruction anatomique nouvelle et
en intégrant un matériel plus abondant et mieux conservé. L’étude du système de réception acoustique
sur des fossiles est, elle aussi, devenue accessible. Les éventuelles différences mises en évidence entre
néandertaliens et hommes anatomiquement modernes ne présagent en rien de la capacité des premiers
à élaborer un langage complexe. La mise en évidence de différences significatives, qui demanderaient
à être mises en perspective à l’échelle de l’évolution du genre Homo, n’en demeurerait pas moins
d’une grande importance pour apprécier la nature des interactions possibles entre les deux groupes.
Trois axes de recherches complémentaires seront envisagés par ce projet :
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AXE 1 : RECONSTITUTION DE LA BASE DU CRANE CHEZ LES NEANDERTALIENS. C APACITES
PHONATOIRES.
La reconstruction de l'appareil vocal à partir de pièces fossiles demeure une des approches les
plus importantes pour aborder la question de la capacité de parole des néandertaliens. Le premier axe
de recherche sera consacré à la reconstruction en trois dimensions par ordinateur de la morphologie
des voies respiratoires supérieures (du larynx aux cavités nasales et buccales) à partir d'images en 2D
et 3D de crânes, de mandibules, de vertèbres cervicales et d'os hyoïdes de néandertaliens et en utilisant
les principes de la reconstruction anatomique. En parallèle, l’analyse quantitative d’un certain
nombre de paramètres sera menée, notamment ceux qui sont liés à la vascularisation et à
l’innervation de la région basicrânienne.
La réalisation de telles reconstitutions suppose que l'on intègre les informations sur le système
dans son ensemble : cavité nasale, cavité buccale, région supérieure de la gorge, et les os corrélés à ces
tissus. Ces reconstructions 3D doivent nécessairement être basées sur un ou deux des crânes les plus
complets de Néandertaliens. Toutefois, pour aborder le problème dans une perspective
populationnelle et évolutive, il est important d'intégrer à l’étude de nombreux spécimens moins
complets. Un des spécimens les plus complets (La Chapelle-aux-Saints) sur lequel on a déjà effectué
des reconstructions de l'appareil vocal (Lieberman et Crelin, 1971) représente en fait une version
extrême de variation cranio-faciale chez les Néandertaliens (Kidder et al., 1992 ; Yarock, 1996).
Notre étude s’appuiera sur l’analyse d’un échantillon suffisant de pièces fossiles.
Nous procéderons aux travaux suivants:
1 - Scanographie des pièces néandertaliennes et prénéandertaliennes disponibles en Europe
et au Proche-Orient (crânes complets, base du crâne isolément, os hyoïde et de certaines pièces
vertèbres cervicales) (Arsuaga, Braun, Condemi, Hublin). Une partie des données a déjà été recueillie
dans le cadre de travaux déjà en cours, mais elle demande à être complétée. Cette partie du travail
représente un fort investissement en temps et en ressources financières (missions et frais en milieu
hospitalier) et devra être étalée au moins sur les deux premières années de la réalisation du projet. Les
données numériques recueillies seront converties et stockées à des fins d’analyse morphométrique. En
outre, la transformation des voxels par l’algorithme “ marching cube ” en triangulation de surface
permettra l’utilisation du logiciel de déformation 3D Gocad dont nous avons la maîtrise .
2 - Analyse morphométrique de la relation entre l'ectobasicranion et les vertèbres
cervicales (Franciscus, Toll). L'angle ectobasicranien (staphylion-hormion-basion) est un des aspects
le plus dérivé de l'anatomie craniofaciale des Néandertaliens (Franciscus, 1995, 1999b) même si les
raisons n’en sont pas encore comprises. Etant donnée la relation anatomique, fonctionnelle et
ontogénique de l'ectobasicranion en général (et la surface du foramen magnum en particulier) par
rapport aux vertèbres cervicales (surtout la C1 et la C2), nous pouvons nous attendre à des différences
concomitantes dans la région du cou des Néandertaliens. Certains auteurs (Trinkaus, 1983) suggèrent
des longueurs de cou relativement plus courtes chez les Néandertaliens, mais il n'y a pas eu d'analyse
complète de la morphométrie d'ensemble des vertèbres cervicales. Une modélisation satisfaisante de
l'anatomie des voies respiratoires supérieures nécessite des données de comparaisons sur : l'angle
ectobasicrânien, la forme du foramen magnum, la forme et la taille de chaque vertèbre cervicale, la
courbure des éléments cervicaux.
3 - Evaluation des variations de la morphologie de la fosse nasale interne et de
l'ectobasicranion chez les Néandertaliens, pre-Néandertaliens (Arsuaga, Churchill,
Franciscus). Une base de données des mesures de la fosse nasale interne et de l'ectobasicranion existe
déjà pour le genre Homo (y compris les néandertaliens) et les hommes modernes de l'Ancien Monde
occidental (Franciscus, 1995). Ces données ont déjà fourni des informations critiques relatives au
degré de spécialisation de l'ectobasicranion en relation avec la fosse nasale interne chez les
Néandertaliens (Franciscus, 1999a, 1999b). Ces données consistent en mesures linéaires standards qui
aideront à délimiter les reconstructions en 3-D des voies respiratoires supérieures du petit nombre des
spécimens fossiles les plus complets disponibles. Toutefois, cet ensemble de données n'inclut pas le
grand échantillon d'Atapuerca (Sima de Los Huesos) dont l’importance est critique pour n'importe
quelle étude de la capacité de parole chez les Néandertaliens. En plus des mesures standards linéaires,
on rassemblera des données 3-D grâce à un digitaliseur (Miscroscribe 3 D-X : Immersion Corp.) en
vue d'une comparaison à venir avec d'autres éléments fragmentaires d'autres sites.
4 - Reconstitution virtuelle des voies respiratoires supérieures des Néandertaliens
(Bouchet, Braun, Churchill, Franciscus, Hublin,).
Notre
reconstitution
se
fondera
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essentiellement sur un morphing de structure anatomique moderne. Il est important de considérer
l’ensemble des structures de manière unique (dans un même volume) en construisant ainsi des liens
paramétriques et spatiaux entre la position de la base du crâne et celle des différentes pièces laryngées
et des parties molles du pharynx. La scanographie de la base du crâne, de l’appareil pharyngo-laryngé
et de la colonne cervicale complète chez un échantillon d’hommes modernes permettra la
constitution d’un fichier crânio-cervical type, après acquisition et choix du ou des seuils optimums
pour permettre l’utilisation du logiciel Gocad. Compte tenu des résultats obtenus dans l’analyse
morphométrique des spécimens néandertaliens, une adaptation morphologique virtuelle sera réalisée
pour les spécimens les plus complets grâce aux grilles de déformation 3D dont certains membres de
l’équipe ont une assez grande maîtrise. Ces grilles sont intéressantes parce qu’elles permettent à tout
moment une maîtrise complète de la déformation et du déplacement des structures. Elles nécessitent
la détermination de facteurs spatiaux de localisation entre le pharyngo-larynx et la colonne cervicale
d’une part, la base du crâne et l’appareil pharyngo-laryngé d’autre part. Ces liens spatiaux étant
déterminés, les déformations homothétiques seront alors appliquées à la base du crâne moderne avec
pour perspective finale la réalisation d’une reconstitution la plus exacte possible des parties molles
correspondant à la morphologie néandertalienne, cette modification de la base. Les résultats obtenus
pourront être validés grâce à la réalisation de modèles solides par stéréo-lithographie.
5 - Modélisation des voies respiratoires supérieures et de leurs propriétés acoustiques)
(Carre, Churchill, Franciscus, Hombert, Maeda). Une compréhension exhaustive des capacités à
produire de la parole nécessite une connaissance de la taille des divers espaces de résonance des voies
respiratoires supérieures (cavité nasale, sinus paranasaux, nasopharynx, cavité orale), de la résistance
du flux d'air à travers ces structures, et des chemins et des régimes des flux d'air circulant à travers ces
espaces. La reconstruction de l'anatomie fournit une première étape dans l'acquisition de cette
information, et nous permettra d'estimer les effets de la taille des orifices nasaux (voir Franciscus et
Trinkaus, 1988 vs. Schwartz et al., 1999) ainsi que la taille de la langue et sa position en phonation
(e.g. Laitman et al., 1990 vs. Arensburg et al., 1990). Les reconstitutions 3D seront transformées en
fonction d’aires, lesquelles correspondent à la variation de la section du conduit vocal de la glotte aux
lèvres. Le passage de 3D à 2D qui est effectué ici ne pose naturellement pas de problème : en effet,
d’une part, les données 3D sont des hypothèses donc relativement imprécises et d’autre part, on sait
que le passage 3D vers 2D n’apporte que de légères modifications en ce qui concerne les valeurs des
fréquences de formants (Motoki, et al., 2000) A partir de ces fonctions d’aire, on calculera les
fréquences de résonance du conduit au moyen de l’algorithme de Badin et Fant en tenant compte des
pertes classiquement admises chez l’homme (Badin and Fant, 1984). On pourra aussi retrouver la
structure générale du conduit vocal et en particulier le rapport entre la longueur de la cavité buccale
par rapport à celle de la cavité du pharynx. Les résultats obtenus pourront être comparés à ceux
obtenus récemment par Boë et al. (1999) à partir de données géométriques cranio-faciales (Honda
and Tiede, 1998). A partir de ces données, on évaluera les possibilités de production de voyelles en
déterminant la dimension du triangle vocalique. Pour ceci, nous nous inspirerons des travaux de Fant
(1966) et de nos propres travaux (Carré, et al., 1994; Carré, et al., 1995; Maeda and Carré, 1996).
Nous avons, en particulier, mis en évidence les caractéristiques d’un conduit vocal permettant un
triangle vocalique de dimension maximale. Dans ce cas, les déformations du conduit doivent être
antisymétriques. Mais les déformations dissymétriques que l’on observe chez la femme (et chez
l’enfant) ne conduisent pas à des réductions notables de la dimension du triangle vocalique. La
communication parlée chez la femme et chez l’enfant ne paraît d’ailleurs pas être d’efficacité
inférieure à celle de l’homme. La théorie de Lieberman et Crelin (1971) conduisant à la nécessité
d’une cavité de pharynx de dimension égale à celle de la bouche nous paraît pour le moins discutable.
En plus du bénéfice direct d'une meilleure compréhension des capacités à parler des
Néandertaliens, la recherche proposée dans l'Axe 1 nous aidera à poser deux importantes questions
concernant la recherche actuelle sur la physiologie respiratoire des Néandertaliens. La première
concerne la nature précise des similitudes ou des différences de l'anatomie des voies respiratoires
supérieures chez les néandertaliens et les hommes modernes. Différents points de vue existent d'ores
et déjà (Schwartz et Tattersall, 1996; Schwartz et al., 1999 vs. Franciscus, 1999, Yokley, 1999) et
sont en partie liés à des problèmes de définition des différences, différences dans les mesures utilisées,
différences dans l'échantillonnage, et souvent dépendantes de spécimens moins complets. La seconde
concerne les explications fonctionnelles et adaptatives qui sont sous-jacentes au schéma
morphologique des voies supérieures respiratoires des Néandertaliens. L’interprétation des différences
entre Néandertaliens et Hommes modernes dans l'anatomie orale et nasale a été difficile en raison de
la compréhension insuffisante de ce que sont exactement ces différences et de la nature
multifonctionnelle de la région des voies respiratoires supérieures. Elles sont impliquées dans la
production de parole, la respiration, la thermorégulation la mastication et la déglutition et les
interactions entre leur développement et celle du cerveau et de la zone basicrânienne. Essayer de
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comprendre la production de la parole sans connaître ces autres exigences fonctionnelles est
nécessairement incomplet. Nous nous attacherons à une meilleure compréhension des fonctions et du
rôle que joue la production de la parole dans l'évolution des voies respiratoires supérieures chez les
Néandertaliens.
AXE 2 : DEVELOPPEMENT ONTOGENIQUE DE LA BASE DU CRANE (Braga, Hublin, Sapally, Treil) :
La phonation implique plusieurs structures anatomiques : le larynx et son armature
cartilagineuse, un ensemble de muscles reliant les cartilages du larynx à l'os hyoïde et à la base du
crâne, à la mandibule et à la ceinture scapulaire, la langue, le palais osseux, ainsi que des nerfs et
vaisseaux. La majeure partie est en fait constituée de structures molles, non conservables après la
mort, ce qui représente un handicap pour l'étude du langage chez les fossiles. Or, les
paléoanthropologues ne peuvent accéder qu'aux structures osseuses. Celles impliquées dans le langage
sont : la mandibule, le palais, la base du crâne et l'os hyoïde.
Des travaux (Laitman et al., 1976 ; Laitman et al., 1978) se fondent sur l'existence d'un lien
entre la position du larynx et du pharynx et le degré de flexion de la base du crâne chez les Primates
actuels. Ces études, établies sur des mesures de distances dans le plan sagittal, au niveau de la base du
crâne, décrivent, en effet, que parallèlement au phénomène de flexion de la base du crâne au cours de
la croissance de l'enfant, le larynx passe d'une position haute à une position basse. Les chimpanzés
conservent, par contre, un larynx en position haute.
Il faut cependant noter que la plupart des travaux mettant en relation une morphologie
particulière à la capacité, ou incapacité, au langage concernent les adultes et que les critères retenus ne
sont souvent que très indirectement liés à la phonation elle-même. Laitman et al. (1978) ne
considèrent que des distances au niveau de la base du crâne. La taille de la section du canal hypoglosse,
considérée par Kay et al. (1998) s'est avérée ne pas être corrélée à une capacité au langage (De Gusta
et al., 1999). Il faut prendre en compte des critères morphologiques qui sont reliés, d'une part, au
développement du cerveau (qui est l'élément majeur intervenant dans la capacité cognitive au
langage), et d'autre part à des structures en rapport direct avec le langage, telles que l'os hyoïde, le
palais et la base du crâne (par sa forme et par la présence de foramens par où transitent nerfs et
vaisseaux et de zones d'insertion de muscles du larynx).
Un élément-clé des discussions qui ont entouré les travaux sur le développement du langage
chez les néandertaliens est la question de la mise en place de la flexion basi-crânienne et de son
influence sur un certain nombre de parties molles. Le phénomène de flexion intervient très tôt au
cours de l'ontogenèse, pendant la période prénatale. La base du crâne constitue une zone charnière
dont la morphologie est dépendante de celle du palais, et de la taille de l'encéphale. Deshayes (1986)
montre qu'il existe une relation entre la base du crâne et le massif facial, les mouvements des os de la
base, au cours du développement induiraient ceux des os de la face et du palais : "Il existe un équilibre
entre la base du crâne et son degré de flexion, la charnière crânio-cervicale et le palais osseux"
(Deshayes M.J., 1986, p. 18).
L'analyse du développement de la région sphéno-occipitale est donc d'un intérêt capital pour
nous éclairer sur les liens existant entre l'aptitude physique au langage et, la morphologie et
l'organisation spatiale du squelette basicrânien. De plus, pour mieux comprendre l'évolution
morphologique de la base, reliée à celle de la face et à la position de l'os hyoïde et du larynx, il est
nécessaire de s'intéresser aux premières étapes du développement, dès le stade foetal.
Nous utiliserons pour cela les moyens de l'imagerie médicale (tomodensitométrie). Nous
proposons une analyse tridimensionnelle de l'évolution architecturale de la base du crâne
et de la face, au cours de l'ontogenèse, en relation avec la position de l'os hyoïde. Nous
nous proposons de d’analyser les changements morphologiques intervenant au niveau de la base et de
la face au cours de la croissance relativement à l'os hyoïde, chez des foetus et chez l'enfant, et de
comparer les résultats à ceux que nous obtiendrons chez les chimpanzés immatures (Pan paniscus).
En ce qui concerne les enfants, il s'agit d'examens in vivo sur des échantillons pour lesquels
nous connaissons l'âge, le sexe et l'origine ethnique des sujets. Nous disposons déjà d’une trentaine
d'examens d'enfants. D’autres acquisitions nous permettrait d'augmenter la taille de cet échantillon.
En ce qui concerne le stade fœtal, nous disposons d'ores et déjà d'une quarantaine d'examens de foetus,
d'autant de chimpanzés nains immatures (Pan paniscus provenant du Musée Royal de l'Afrique
Centrale, Bruxelles)
Les données seront recueillies et analysées grâce au module céphalométrique du logiciel C2000
(CIRAD, Montpellier). Cet outil informatique permet d'appliquer une méthode de biométrie
tridimensionnelle (Treil et al., 1997 et 1999) qui utilise les axes d'inertie d'objets sélectionnés (ex : os
ou dents). Les axes d'inertie permettent de définir la forme (par leur orientation) et la taille (par leur
intensité) de ces objets. Il sera ainsi possible de mesurer des distances, surfaces et volumes ainsi que des
angles, et surtout de calculer l'orientation dans l'espace des os les uns par rapport aux autres. La
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reconstruction céphalométrique est effectuée à partir de la sélection de points de repère anatomiques
significatifs. Cela signifie qu'ils ne sont pas choisis arbitrairement. Ils sont au contraire liés aux
afférences et efférences vasculo-nerveuses, nous suivons ainsi le modèle des matrices fonctionnelles
de Moss (1969). Soulignons ici qu'un lien entre la position de l'os hyoïde et le complexe maxillomandibulaire a été mis en évidence chez l'Homme, par le Docteur Treil, grâce à l'outil
decéphalométrie 3D.
Une telle approche quantitative de la croissance représente un atout car l'évolution
architecturale du crâne au cours de l'ontogenèse chez l'Homme et les Grands Singes n'a, jusqu'ici, pas
fait l'objet d'une étude tridimensionnelle. Ce travail pourra déboucher sur une analyse et une
interprétation plus pertinentes des restes de Néandertaliens juvéniles dont nous disposons. De la
même façon que chez l’adulte une ou plusieurs reconstitutions pourront être établies et leurs
possibilités phonatoires établies par les acousticiens. Dans cette étude, comme précédemment,
l’obtention d’un triangle vocalique de dimension maximale ne sera pas la condition essentielle pour
évaluer les capacités de production de parole.
AXE 3 : L’AUDITION CHEZ LES NEANDERTALIENS (Arsuaga, Carre, Hublin, Quam)
Le rôle de l’oreille moyenne est d’effectuer une adaptation d’impédance entre le milieu
extérieur et le milieu liquide de l’oreille interne ceci par l’intermédiaire des osselets. C’est aussi un
organe de protection de l’oreille interne grâce aux muscles tympaniques qui peuvent atténuer
l’amplitude de vibration de la membrane tympanique. Les études précédentes sur les osselets de
l'oreille des hommes fossiles ont été peu nombreuses et espacées à cause de leur rareté (Angel, 1972,
Arensburg et Nathan, 1972 ; Arensburg et al, 1981 ; Arensburg et al. 1996, Rak et Clarke, 1979;
Heim, 1982 ; Tillier, 1999). La nature fragile de ces os fait qu'ils ne sont presque jamais conservés et
l'échantillon total des osselets de l'oreille du pléistocène est d'environ 20 spécimens. Il y a eu
davantage d'études consacrées aux populations récentes (Heron, 1923; Arensburg et al, 1981; Blumer
et al., 1982; Lisonek et al., 1986; Siori et al., 1995). Toutefois ces dernières ont donné lieu à des
résultats contradictoires : certains auteurs déclarant que des affiliations de populations pouvaient
s'établir grâce aux dimensions des os de l'oreille (Blumer et al., 1982; Siori et al., 1995) et d'autres ne
trouvant aucune différence importante entre les populations. De même, les quelques études effectuées
sur des osselets de l’oreille des Homo du Pléistocène n'ont suggéré que peu de différences avec les
populations actuelles (Angel, 1972; Arensburg et Nathan, 1972; Arensburg et al., 1996; Heim, 1982;
Tillier, 1999). La seule étude publiée sur un os d'oreille d'Australopithèque (Rak et Clarke, 1979),
montre que cet os est très différent de ceux des hommes modernes. En fait, plus différent que ne le
sont des os modernes de ceux des chimpanzés et des gorilles. Les études d'osselets chez les différents
groupes de primates suggèrent que l'osselet le plus externe, le malleus, est le plus variable, tandis que le
plus interne, stapes, est le plus stable (Hershkovitz, 1977; Masali et Chiarelli, 1967; Masali, 1971).
L'insertion du stapes dans la fenêtre ovale limite la variation aux dimensions de cet os, alors que
l'insertion de la membrane typanique du malleus permet une plus grande variabilité.
Les études portant sur les hommes actuels ont établi que les osselets sont complètement
formés et atteignent leur taille adulte durant le développement intra-utérin (Arione, 1923; Bouchet et
Giraud, 1968). A la naissance, ils montrent déjà une morphologie adulte. On n'a pas montré de
dimorphisme sexuel à partir de la taille des osselets. La morphologie de ces os semble être
essentiellement déterminée génétiquement.
L’étude que nous proposons repose à la fois sur des observations morphologiques et des prises
de mesures sur les osselets de l’oreille moyenne des Hominidés Pleistocènes afin de déterminer les
différences d'anatomie et de capacités auditives entre groupes fossiles et hommes actuels. Une série de
26 mesures prises sur les trois osselets de spécimens pléistocènes sera comparée à des données
recueillies sur un grand échantillon d'osselets d'hommes modernes (conservés en Israël) afin de tenter
d'identifier des différences taxonomiques. Les osselets proviennent de spécimens de
prénéandertaliens, néandertaliens et d'hommes modernes. Trois des mesures (longueurs du manubrium
du malleus, longueur du long crus de l'incus, et la surface du plateau du stapes) seront utilisées pour
élaborer un modèle morphométrique qui permettra d'étudier les capacités auditives de l'oreille externe
et moyenne. De plus, les observations morphologiques sur le malleus, l'incus et le stapes permettront
d'éclaircir la nature des changements survenus à travers le temps. C'est la première recherche
effectuée sur le grand échantillon d'osselets inédits d'une population de prénéandertaliens du site
pléistocène moyen de Sima de los Huesos dans la Sierra d'Atapuerca au nord de l'Espagne (Arsuaga, et
al. 1997; Bischoff et al, 1997). L'échantillon de ce site nous fournit un très grand nombre d'osselets
bien conservés et élargit notre connaissance des structures anatomiques jusqu'au Pléistocène moyen.
Pour la première fois nous pouvons étudier les capacités auditives de différents groupes d'hominidés et
leurs implications dans l'apparition de la parole.
8
Modélisation morphométrique et capacités auditives
Un modèle morphométrique pour déterminer les capacités auditives a été élaboré (Masali et
al., 1991) ; il est basé sur les aspects anatomiques fondamentaux de l'oreille moyenne et externe
(Liston et Duvall, 1988; Rosowski, 1996; Gelfand, 1998). Ce modèle a déjà été appliqué au spécimen
néandertalien de Monté Circeo 1 (Masali et al., 1991).
Transmission sonore :
Quand les ondes sonores passent de l'air environnant à la cochlée (remplie de liquide) dans
l'oreille interne, 99% de l'énergie sonore (environ 30 décibels) est perdue en raison du changement de
milieu (Masali et al., 1991; Gelfand, 1998). Deux mécanismes compensatoires agissent. La chaîne des
osselets produit une augmentation de l'intensité de l'énergie sonore frappant la membrane tympanique
(Lisont et Duvall, 1988; Rosowski, 1996; Gelfand, 1998). Par ailleurs une amplification résulte de la
disparité de taille entre la membrane tympanique et le plateau du stapes qui transmet l'énergie jusqu'à
l'oreille interne et la cochlée à travers la fenêtre ovale (Liston et Duvall, 1988; Rosowski, 1996;
Gelfand, 1998).
Une formule reposant sur quatre mesures simples peut déterminer quel pourcentage d'énergie
sonore est perdu entre l'environnement extérieur et l'oreille interne (Masali et al., 1991)(figure 2). La
proportion des bras de levier du malleus et de l'incus qui transmettent l'énergie de la membrane
tympanique au stapes, donne une estimation de l'augmentation de l'intensité. La proportion de la
surface de la membrane tympanique par rapport à la zone du plateau de l'étrier donne une estimation
de l'augmentation de la pression. Combinés, ces deux indices nous renseignent sur des capacités
auditives de l'oreille moyenne (Liston et Duvall, 1988; Rosowski, 1996; Gelfand, 1998).
L'application préliminaire du modèle aux grands singes, aux hommes modernes et à quelques
néandertaliens suggère des implications intéressantes (Masali et al, 1991; Masali, 1992). Tous les
grands singes transmettent un pourcentage beaucoup plus important d'énergie sonore à l'oreille
interne, de l'ordre de 90%, tandis que les hommes modernes souffrent d'une perte d'énergie beaucoup
plus grande, en transmettant seulement un peu de la moitié (53-58%) à l'oreille interne. Les
néandertaliens inclus dans cette étude montrent une perte de transmission d'énergie un peu plus
importante que chez les hommes modernes. Cependant la surface de la membrane tympanique est
légèrement plus grande chez les néandertaliens (Masali et al., 1991).
Fréquence fondamentale :
Le second volet du modèle morphométrique suppose de calculer la fréquence fondamentale de
résonance du canal auditif externe. La longueur du canal est directement liée à sa fréquence
fondamentale de résonance (Masali et al., 1991; Gelfand, 1998). Un tel canal résonne à une fréquence
dont la longueur d'onde est 4 fois la longueur du canal, et Gelfand (1998) suggère une fréquence
fondamentale de résonance d'un canal auditif d'homme moderne d'environ 3800Hz. Des études
cliniques suggèrent que les caractéristiques de résonance du canal de l'oreille créent une amplification
de niveau des sons de 15 décibels à environ 4000 Hz, proche de la fréquence fondamentale de
résonance (Gelfand, 1998). Pour les grands singes Masali et coll. (1991) font état d'une fréquence
fondamentale de résonance allant de 1560Hz pour le gorille à environ 2150Hz chez le chimpanzé.
Un lien existe entre la gamme des fréquences émises durant la communication et les fréquences au
seuil auditif le plus bas (Shaw, 1974). En général, aux fréquences plus basses les anthropoïdes tendent à
avoir une plus grande acuité auditive que les prosimiens (Eisenman, 1978; Stebbins, 1983). Une
analyse acoustique des cris produits par les grands singes démontre un lien entre leur gamme de
fréquences et la fréquence fondamentale des différents conduits auditifs (Schaller, 1963; MacKinnon,
1974; Goodall, 1986). Les deux spécimens néandertaliens étudiés par Masali et al. (1991) ont des
fréquences fondamentales de résonance qui peuvent se classer dans la gamme des hommes modernes
mais au-dessus de la moyenne. Il est intéressant de noter que les précédentes reconstructions de
l'appareil auditif des Néandertaliens (Lieberman, 1975; Laitman et Heimbuch, 1982; Laitman et al.,
1979) laissaient supposer la production de fréquences émises un peu plus hautes.
Matériel et Méthodes :
L'application du modèle morphométrique décrit ci-dessus aux spécimens fossiles est rendue
difficile par l'état fragmentaire et incomplet des pièces. Heureusement, l'enfant néandertalien de La
Ferrassie 3 et l'os temporal du Paléolithique moyen de Darra-i-Kur présentent une chaîne complète
d'osselets et des méats auditifs externes complets du même côté (Heim, 1982; Angel, 1972). De plus,
la surface du plateau du stapes est fortement corrélée aux dimensions de la fenêtre ovale. Des
spécimens comme celui de Qafzeh 11 peuvent aussi être inclus dans l'analyse (Arensburg et Nathan,
1972; Tillier, 1999). L'application de la seconde partie du modèle est moins problématique étant
donnée que la seule mesure nécessaire est la longueur du canal auditif et cette structure est conservée
sur de nombreux spécimens. Les restes pré-néandertaliens encore inédits de Sima de los Huesos
9
représentent le plus grand échantillon connu au monde d'osselets de l'oreille. Les osselets conservés de
ce site comprennent trois spécimens de malleus et d'incus et un stapes. La chaîne osseuse la plus
complète de ce site est le malleus et le stapes du Crâne 5 dont le canal auditif externe est lui aussi
conservé. La substitution des trois incus conservés de ce même échantillon à une chaîne ossiculaire
hypothétique nous donnerait une idée de la variation d'énergie transmise jusqu'à l'oreille interne.
L’échantillon disponible (Prénéandertaliens, Néandertaliens et hommes modernes) est réduit. Il peut
cependant permettre d’apprécier l'évolution de ces structures sur 300 00 ans.
L’utilisation du modèle morphométrique suppose l’acquisition de cinq dimensions conservées
sur un seul spécimen pour déterminer les capacités auditives de l'os temporal. Les longueurs de brasleviers du malleus et de l'incus, la surface du plateau du stapes et la longueur du canal auditif peuvent
être mesurés directement à partir des fossiles. Toutefois calculer les surfaces de la membrane
tympanique et de la fenêtre ovale (comme substitut pour les dimensions du stapes quand celui-ci n'est
pas conservé) nécessite l'utilisation du scanner. Le crâne 5 d'Atapuerca, La Ferrassie 3, Qafzeh 11 et
Darra-i-Kur seront scannés pour nous donner une estimation de la surface de la membrane
tympanique.
L’étude de néandertaliens isolés (12) sera complétée par l’analyse de deux séries importantes.
La série de Simas de los Huesos comporte 3 crânes complets et 13 temporaux isolés (Martinez et
Arsuaga, 1997). Il y a également 13 spécimens de Krapina convenablement conservés. Ces deux
échantillons sont ce que nous avons de plus proche des populations pléistocène et représentent des
individus apparentés. Nous étudierons également un échantillon minimum de 30 hommes modernes
Les travaux menés sur l’oreille moyenne et sur le conduit auditif externe seront comparés au
résultats obtenus dans les axes 1 et 2 et le cas échéant se valider mutuellement.
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