La place de la religion dans le Traité de Lisbonne

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La place de la religion dans le Traité de Lisbonne
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Actualité bimestrielle du droit des religions
Responsable : SEBASTIEN LHERBIER-LEVY
VOL.5
N°28 Décembre 2007 / Janvier 2008
Sommaire détaillé page suivante
Au sommaire notamment…
EDITORIAL
ACTUALITE
La place de la
religion
dans le Traité de
Lisbonne
Conformité du culte protestant danois à la
Convention européenne des droits de l’homme
Le Liechtenstein projette une séparation entre
l'Etat et l'Eglise
Le consistoire central israélite saisit la Halde à
propos des dates d'examen
JURISPRUDENCE (France)
Par Sébastien Lherbier-Levy
Conseil d'Etat (4 espèces) 5 décembre 2007
Le bandana et le sous-turban ne sont pas des
signes religieux discrets
CourEDH
CourEDH, n°30273/03, 8 novembre 2007,
PERRY c. LETTONIE
De la liberté religieuse des étrangers
CourEDH, n° 37614/02,
29 novembre 2007, Ismaïlova c. Russie
Prise en compte de la religion dans la décision
de confier la garde des enfants à l’un des
parents
Conseil d’Etat, ord. Ref., 22 novembre 2007,
FEDERATION CHRETIENNE DES TEMOINS
DE JEHOVAH DE France.
Rejet de la demande de suspension de l'exécution
de la décision de la mission interministérielle de
vigilance et de lutte contre les dérives sectaires
(Miviludes) de mettre en ligne sur son site Internet
un extrait de la 4ème couverture du livre de M.
Nicolas J. intitulé « Nicolas, 25 ans, rescapé des
témoins de Jéhovah. »
DROIT COMPARE / CANADA
Cour Suprême du Canada, n°31212, 14 décembre 2007, Stephanie Brenda Bruker c/
Jessel (Jason) Benjamin Marcovitz ( 2007 CSC 54)
Indemnisation du préjudice subi par une épouse suite au refus de son ex-conjoint
de lui accorder le divorce religieux juif après le divorce civil.
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SOMMAIRE
N°28
Décembre / Janvier 2008
L’équipe de la lettre du droit des religions
vous présente ses meilleurs vœux pour l’année 2008
EDITORIAL
La place de la religion dans le Traité de Lisbonne
Par Sébastien Lherbier-Levy
p.9
ACTUALITE EN BREF novembre 2007
p.12
„ Un curé jugé pour avoir détruit une fresque dans une église de sa paroisse
„ CourEDH : annonce d’arrêt Perry c. Lettonie (n° 30273/03)
„ Conformité du culte protestant danois à la Convention européenne des droits de l’homme
„ Espagne: la justice admet la scientologie parmi les "entités religieuses"
„ Atteinte à la liberté religieuse: la Lettonie condamnée par la CEDH
„ Le Liechtenstein projette une séparation entre l'Etat et l'Eglise
„ Magasins ouverts le dimanche en Allemagne: plainte des Eglises catholique et protestante
berlinoises devant la cour constitutionnelle
„ Diffamation religieuse: le maire d'Asnières relaxé, son 1er adjoint condamné
„ Belgique Création d'un Conseil des leaders religieux.
„ Une action en diffamation de l'Opus Dei contre un roman jugée irrecevable
ACTUALITE EN BREF décembre 2007
p.16
„ Le consistoire central saisit la Halde à propos des dates d'examen
„ USA: Rejet d'un recours intenté par les parents d'un mineur hospitalisé, membre des témoins de
Jéhovah
„ La Miviludes publie un guide sur le risque sectaire en entreprise
„ La Cour suprême du Canada indemnise le préjudice subi par une épouse suite au refus de son
ex-conjoint de lui accorder le divorce religieux juif après le divorce civil
„ Russie: publicité de Coca-Cola jugée "blasphématoire" par des orthodoxes
„ Projet de Grande mosquée à Marseille : audience au Tribunal administratif de Marseille.
„ ONU Conseil des droits de l'homme. sur l'élimination de toutes les formes d'intolérance et de
discrimination fondées sur la religion ou la conviction
„ Rejet du recours contre la délibération du conseil municipal de la ville de Marseille ayant
approuvé la mise à disposition par bail emphytéotique, une parcelle de terrain communal au profit
de l'association "La mosquée de Marseille".
PARLEMENT EUROPEEN Questions
p.19
„ Position de la minorité alevi en Turquie E-5766/07 12 novembre 2007. QUESTION ÉCRITE
posée par Frank Vanhecke (NI) à la Commission
„ Investissements sur le site du cimetière juif de Snipiskes à Vilnius (Lituanie) P-6083/07 28
novembre 2007. QUESTION ÉCRITE posée par Filip Kaczmarek (PPE-DE) à la Commission
„ Actes de vandalisme et saccage d'églises chrétiennes grecques en Turquie E-6053/07 27
novembre 2007. QUESTION ÉCRITE posée par Katerina Batzeli (PSE) et Maria Eleni Koppa (PSE)
au Conseil
„ Financement de la Grande Mosquée à Cologne-Ehrenfeld E-6052/0727 novembre 2007.
QUESTION ÉCRITE posée par Renate Sommer (PPE-DE) à la Commission
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„ Violation de la liberté religieuse en Turquie P-6232/07 3 décembre 2007. QUESTION ÉCRITE
posée par Antonios Trakatellis (PPE-DE) à la Commission
„ L'Europe doit rappeler la Turquie au respect des règles du fair-play dans le football E-6413/07
12 décembre 2007. QUESTION ÉCRITE posée par Mario Borghezio (UEN) à la Commission
ASSEMBLEE NATIONALE Question écrites novembre 2007
p.22
„ Question N° : 9310 de M. Pinte Étienne(Union pour un Mouvement Populaire Yvelines) QE
„ Question N° : 3403 de Mme Poletti Bérengère(Union pour un Mouvement Populaire - Ardennes)
QE
„ Question N° : 3401 de Mme Poletti Bérengère(Union pour un Mouvement Populaire - Ardennes)
QE
„ Question N° : 9807 de M. Tardy Lionel(Union pour un Mouvement Populaire - Haute-Savoie) QE
„ Question N° : 10467 de M. Lasbordes Pierre(Union pour un Mouvement Populaire - Essonne)
QE
„ Question N° : 10335 de M. Kucheida Jean-Pierre(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche Pas-de-Calais) QE
„ Question N° : 11070 de M. Remiller Jacques(Union pour un Mouvement Populaire - Isère) QE
„ Question N° : 4285 de M. Vigier Philippe(Nouveau Centre - Eure-et-Loir) QE
„ Question N° : 10660 de M. Saint-Léger Francis(Union pour un Mouvement Populaire - Lozère)
QE
„ Question N° : 4724 de M. Vanneste Christian(Union pour un Mouvement Populaire - Nord) QE
ASSEMBLEE NATIONALE Question écrites décembre 2007
p.28
„ Question N° : 12359 de M. Valax Jacques(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Tarn)
QE
„ Question N° : 12271 de M. Eckert Christian(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche Meurthe-et-Moselle) QE
„ Question N° : 6869 de M. Raoult Éric(Union pour un Mouvement Populaire - Seine-Saint-Denis)
QE
„ Question N° : 13325 de M. Rogemont Marcel(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Illeet-Vilaine) QE
„ Question N° : 8354 de M. Demange Jean-Marie(Union pour un Mouvement Populaire - Moselle)
QE
„ Question N° : 4738 de M. Vanneste Christian(Union pour un Mouvement Populaire - Nord) QE
„ Question N° : 8488 de M. Vuilque Philippe(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche Ardennes)
QE
„ Question N° : 13672 de Mme Lignières-Cassou Martine(Socialiste, radical, citoyen et divers
gauche - Pyrénées-Atlantiques) QE
„ Question N° : 13793 de M. Renucci Simon(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Corsedu-Sud) QE
„ Question N° : 13514 de M. Grall Michel(Union pour un Mouvement Populaire - Morbihan) QE
ASSEMBLEE NATIONALE Propositions et Projets de loi
p.34
„ Proposition de loi du 24 octobre 2007 de M. Bernard Accoyer complétant l'ordonnance n°
58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires
„ RAPPORT FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET
DU PLAN SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2008 (n° 189),PAR M. GILLES CARREZ,
Rapporteur Général, Député. ANNEXE N° 14 DIRECTION DE L'ACTION DU GOUVERNEMENT
PUBLICATIONS OFFICIELLES ET INFORMATION ADMINISTRATIVE Rapporteur spécial : M. JeanPierre Brard Député Extrait
SENAT Questions écrites
p.39
„ Retraite des anciens ministres du culte et anciens membres des congrégations et
communautés religieuses Question orale sans débat n° 0122S de M. Auguste Cazalet
(Pyrénées-Atlantiques - UMP) publiée dans le JO Sénat du 06/12/2007 - page 2204
„ Dimension subjective de la différence entre la notion de secte et celle de religion
Question écrite n° 02438 de M. Jean Louis Masson (Moselle - NI) publiée dans le JO Sénat du
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08/11/2007 - page 2018
SENAT Projet de loi
p.41
„
Projet de loi de finances pour 2008 : Administration générale et territoriale de
l'État
Extrait
Avis No 96 tome 1 de M. José BALARELLO, fait au nom de la commission des Lois
constitutionnelles, de la législation, du suffrage universel, du Règlement et
d'administration général
HALDE
p.44
„ Délibération relative au port du niqab au sein d’un établissement public de santé n°
2007-210 du 03/09/2007
„ Délibération relative à des autorisations d’absence pour fêtes religieuses n° 2007301 du 13/11/2007
CONSEIL SUPERIEUR DE L’AUDIOVISUEL
p.50
„ Décision n° 2007-864 du 25 septembre 2007 mettant en demeure l'association Ici et
Maintenant
CONSEIL CONSTITUTIONNEL
p.53
„ Conseil constitutionnel Décision n° 2007-3882 du 26 juillet 2007 M. GÉRARD G.
REGLEMENTATION
p.56
„ Décret n° 2007-1853 du 26 décembre 2007 pris pour l'application de l'article 16 ter de
l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 et relatif à la mesure d'activité de jour
„ Décret n° 2007-1829 du 24 décembre 2007 modifiant le décret n° 88-145 du 15 février
1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant
dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents non
titulaires de la fonction publique territorial
DISCOURS / ALLOCUTIONS
„ Discours de Monsieur Nicolas Sarkozy, Président de la République française au
Palais du Latran lors de sa visite au pape Benoît XVI.
Rome, Palais du Latran, jeudi 20 décembre 2007
p.60
JURISPRUDENCE ADMINITRATIVE
p.66
„ Tribunal administratif de Paris, n° 0702693/7, 5 juillet 2007, SYNDICAT NATIONAL
DES PROFESSIONNELS DE LA KINESIOLOGIE
Les dispositions précitées de la loi du 17 juillet 1978 n'ont pas pour objet ou pour effet de charger
l'administration de procéder à des recherches en vue de fournir ou de reconstituer pour le
demandeur une documentation sur un sujet donné ; que, par suite, en refusant la communication
de " l'ensemble des documents qui ont servi de support à la rédaction des développements
concernant la kinésiologie et figurant dans le rapport de la MIVILUDES pour l'année 2005 " au
syndicat requérant, dont la demande était dépourvue de toute précision quant à la nature des
pièces demandées, l'administration n'a pas méconnu les dispositions de l'article 2 et, en tout état
de cause, de l'article 3 de la loi du 17 juillet 1978
„ Tribunal administratif de Paris, n°0601801/5, 14 novembre 2007, M. Mourad B
Le requérant, gardien de la paix stagiaire, a, à maintes reprises, manifesté dans l'exercice de ses
fonctions un militantisme religieux, créant des conflits avec ses collègues ; qu'il a ainsi manqué au
principe de laïcité et à l'obligation de neutralité qui s'impose à tout agent public.
„ Tribunal administratif de Rouen, nos 0402836 - 0402837 - 0501823 - 0501828 0503175 - 0600475 - 0700317 - 0700318 - 0700661 - 0700662, 16 octobre 2007,
ASSOCIATION CULTUELLE LECTORIUM ROSICRUCIANUM
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Il ne résulte aucunement de l'instruction que les maisons d'habitation susmentionnées sises
respectivement sur le territoire des communes de (…) et comprenant chacune cuisine, salle à
manger, salle de bain et plusieurs chambres seraient affectées à un usage autre que purement
privatif à destination des membres de l'association requérante ; que celle-ci ne peut, dès lors,
sérieusement demander qu'ils soient exonérés de taxe d'habitation et de taxe foncière.
„ Tribunal administratif de Versailles, n° 0600977, 26 octobre 2007, Mme Christine E
Si l'avis du conseil d'Etat du 3 mai 2000 porte en particulier sur le cas d'un agent du service public
de l'enseignement, il précise également qu'il résulte des textes constitutionnels et législatifs que le
principe de liberté de conscience ainsi que celui de la laïcité de l'Etat et de neutralité des services
publics s'appliquent à l'ensemble des services publics ; que si les agents publics bénéficient
comme tous les citoyens de la liberté de conscience et de religion édictée par les textes
constitutionnels, conventionnels et législatifs, qui prohibent toute discrimination fondée sur leurs
croyances religieuses ou leur athéisme, notamment pour l'accès aux fonctions, le déroulement de
carrière ou encore le régime disciplinaire, le principe de laïcité de l'Etat et de ses démembrements
et celui de la neutralité des services publics font obstacle à ce que ses agents disposent, dans
l'exercice de leurs fonctions, du droit de manifester leurs croyances religieuses, notamment par
une extériorisation vestimentaire ; que ce principe, vise à protéger les usagers du service de tout
risque d'influence ou d'atteinte à leur propre liberté de conscience.
„ Tribunal administratif de Toulouse, n°0603496, 5 novembre 2007, M. Raphaël R.
Le requérant a présenté par une lettre en date du 15 juin 2006, soit dans le délai du recours
contentieux ouvert contre la décision litigieuse, une demande de communication des motifs de la
décision implicite de rejet de sa demande d'agrément en qualité d'aumônier du centre
pénitentiaire de M. du 25 février 2006 ; qu'il est constant que, bien que la demande ait été
adressée au ministre de la justice, l'administration n'a pas communiqué les motifs de cette
décision dans le délai d'un mois prévu par la disposition précitée; que, dès lors, la décision
implicite de rejet est entachée d'illégalité.
„ Tribunal administratif de Dijon, n°0600661, 13 novembre 2007, M. Bernard R.
Pour établir le comportement, équivoque et fautif du vérificateur, qui aurait délibérément cherché
à lui nuire, M. R. soutient que ce dernier entretenait des rapports étroits, en raison de ses liens
avec l'Eglise de Scientologie, avec la propriétaire des locaux professionnels qu'il louait ; qu'il fait
notamment valoir que seule cette relation peut expliquer la mention manuscrite portée sur la fiche
de programmation des opérations de contrôle indiquant que l'affaire a été attribuée au vérificateur
" à sa demande " ;Considérant cependant, qu'il ne résulte pas de l'instruction que le vérificateur
ayant été en charge du dossier de M. R. pour les années 1996 et 1997 soit un membre actif ou un
sympathisant de l'Eglise de Scientologie, ni qu'il soit entré en contact, par cette appartenance
avec son bailleur ; qu'ainsi, la mention manuscrite portée sur la fiche de programmation des
opérations de contrôle n'est pas de nature à faire regarder comme anormale l'attribution au
vérificateur, sur sa demande, de ce dossier par son supérieur hiérarchique et comme révélant un
soi disant fait de " concussion " ; qu'enfin, il ne résulte pas de l'instruction que le comportement
du vérificateur ait été guidé par une volonté délibérée de nuire ou que ce dernier ait refusé
d'engager un débat oral et contradictoire avec le contribuable ou son représentant.
„ Tribunal administratif de Strasbourg, n0505482, 20 novembre 2007, M. et Mme
Thierry G.
Eu égard aux dispositions de l'article L. 911-1 du code de l'éducation, il n'appartient pas à la
juridiction administrative de connaître d'un recours indemnitaire contre le directeur d'un
établissement public local d'enseignement agricole et horticole, introduit par les parents d'une
élève qui a déclaré en classe être témoin de Jéhovah et avoir ainsi été la cible par les autres
élèves de l'établissement d'une attitude discriminatoire à son égard
„ Tribunal administratif de Bordeaux, ord. Ref., n°0705282, 18 décembre 2007,
FEDERATION CHRETIENNE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE FRANCE et M. et Mme M.
La mise en garde du public scolaire contre le risque social lié au prosélytisme de mouvements
sectaires paraît relever de la mission éducative confiée aux établissements d'enseignement par les
textes législatifs et réglementaires qui les régissent ; qu'en admettant que la note incriminée ait à
tort assimilé les Témoins de Jéhovah à une secte dangereuse, il n'en résulte pas nécessairement
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l'illégalité d'une décision autorisant la tenue d'une conférence destinée à mettre en garde les
lycéens contre les périls des dérives sectaires ; que la circonstance que cette autorisation rendrait
possible l'expression de propos excessifs ou diffamatoires à l'encontre du mouvement des Témoins
de Jéhovah ne saurait, par elle-même, justifier la suspension d'exécution demandée, le prononcé
en référé d'une telle mesure ne pouvant être l'instrument d'une censure préventive du contenu
supposé de réunions publiques ; qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions aux fins de
suspension susvisées doivent, en tout état de cause, être rejetées.
„ Cour administrative d'appel de Paris, n° 04PA00568, 7 juin 2007, FEDERATION
CHRETIENNE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE France
Un rapport établi pour l'information du législateur dans le cadre des travaux d'une commission
d'enquête parlementaire, qui n'est pas par lui-même un acte administratif et ne se rattache à
aucune activité de nature administrative, n'est pas détachable de la fonction de contrôle
constitutionnellement dévolue au Parlement pour qu'il l'exerce souverainement ; que, hors les cas
où le législateur y aurait lui-même consenti, il n'appartient au juge administratif de connaître ni
des actes relatifs à cette fonction, ni des conditions dans lesquelles celle-ci s'exerce, ni même des
conséquences pouvant en résulter ; qu'il s'ensuit que la compétence pour en connaître ne lui ayant
pas été, fût-ce implicitement, conférée, les litiges trouvant leur cause dans un rapport
parlementaire ne sauraient ressortir à la compétence du juge administratif ; que la circonstance
qu'aucune juridiction ne peut être saisie d'un tel litige ne saurait avoir pour conséquence
d'autoriser le juge administratif à se déclarer compétent.
„ Cour administrative d'appel de Marseille, n°05MA00225, 17 octobre 2007,
COMMUNE DE M.
Un bâtiment destiné à l'exercice d'un culte ne saurait être regardé comme une construction à
usage d'équipements collectifs ou de service au sens des dispositions précitées de l'article UE1 du
règlement du plan d'occupation des sols de M., dès lors qu'il résulte de ce règlement que la zone
UE a essentiellement une vocation économique et commerciale ; qu'ainsi, l'édifice envisagé par
l'association locale pour le culte des témoins de Jéhovah de X. Y. , destiné à l'exercice d'un culte,
ne figure pas au nombre des constructions admises dans la zone UE ; que, dans ces conditions, le
maire de M. n'a pas fait une inexacte application du règlement de la zone UE du plan d'occupation
des sols en délivrant un certificat d'urbanisme négatif à l'association locale pour le culte des
témoins de Jéhovah de X. Y. (Annulation du jugement).
„ Cour administrative d'appel de Nancy, n°06NC01625, 6 décembre 2007,
DEPARTEMENT DES ARDENNES c/ M. et Mme S.
En réservant la gratuité aux seuls collégiens fréquentant l'établissement privé le plus proche de
leur secteur scolaire, le DEPARTEMENT DES ARDENNES établit une sectorisation scolaire
comparable à celle prévalant pour les seuls établissements publics ; qu'il favorise ainsi l'exercice
effectif de la liberté de l'enseignement consacrée par l'article premier de la loi susvisée du 31
décembre 1959, désormais codifié sous l'article L. 151-1 du code de l'éducation, et ne viole ni la
laïcité républicaine, ni la liberté de conscience des collégiens et de leurs parents.
„ Conseil d'Etat, ord. Ref., n° 310221, 22 novembre 2007, FEDERATION CHRETIENNE
DES TEMOINS DE JEHOVAH DE France.
Rejet de la demande de suspension de l'exécution de la décision de la mission interministérielle de
vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) de mettre en ligne sur son site Internet
un extrait de la 4ème couverture du livre de M. Nicolas J. intitulé " Nicolas, 25 ans, rescapé des
témoins de Jéhovah.
„ Conseil d'Etat, n° 285394, 5 décembre 2007, M. S. ; Conseil d'Etat, n° 285395, 5
décembre 2007, M. S. ; Conseil d'Etat, n° 285396, 5 décembre 2007, M. S. ; Conseil
d'Etat, n° 295671, 5 décembre 2007, M. et Mme G.
Si les élèves des écoles, collèges et lycées publics peuvent porter des signes religieux discrets,
sont en revanche interdits, d'une part, les signes ou tenues, tels notamment un voile ou un foulard
islamique, une kippa ou une grande croix, dont le port, par lui?même, manifeste ostensiblement
une appartenance religieuse, d'autre part, ceux dont le port ne manifeste ostensiblement une
appartenance religieuse qu'en raison du comportement de l'élève ;
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„ Conseil d'Etat, n°294439, 19 décembre 2007, M. V.
Le régime applicable aux établissements publics du culte dans les départements du Bas-Rhin, du
Haut-Rhin et de la Moselle ne relève pas de la compétence exclusive du législateur et peut être
réformé par des dispositions réglementaires dès lors que ces dispositions n'ont pour effet ni de
créer une nouvelle catégorie d'établissement public ni de modifier, dans un sens ou dans l'autre,
les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice de la liberté du culte ; que,
s'agissant de l'Eglise protestante réformée d'Alsace et de Lorraine, le décret attaqué ne confie
aucun pouvoir propre de décision aux organes de l'Union ; qu'en particulier, contrairement à ce
que soutient le requérant, la seule circonstance que ce décret, d'une part, substitue l'avis facultatif
du conseil restreint de l'Union à l'avis facultatif du conseil synodal sur les admissions au ministère
pastoral, alors même que les consistoires conservent leur pouvoir de nomination, et d'autre part,
en matière de création et de transfert de postes pastoraux, substitue au pouvoir d'approbation du
conseil synodal le pouvoir d'approbation du conseil restreint de l'Union, alors même que les
consistoires conservent leur pouvoir de proposition, ne suffit pas, par elle-même, à porter atteinte
aux garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice de la liberté du culte.
„ Conseil d'Etat, n° 295828,310522, 19 décembre 2007, CONSEIL PRESBYTERAL DE
L'EGLISE REFORMEE DE SARREBOURG et autres
La délibération attaquée, qui porte sur un projet de création d'une Union des Eglises protestantes
d'Alsace et de Lorraine, " chargée de conduire des actions communes et de resserrer les liens
entre les deux Eglises protestantes d'Alsace et de Lorraine " ainsi que sur la création d'un corps
pastoral unique et d'une commission des ministères commune chargée de délivrer aux candidats
au ministère pastoral un certificat d'aptitude aux fonctions pastorales, constitue non un acte
faisant grief mais un vœu adressé au gouvernement, manifestement insusceptible de faire l'objet
d'un recours devant le juge de l'excès de pouvoir ; que, dès lors, ni le CONSEIL PRESBYTERAL DE
L'EGLISE REFORMEE DE SARREBOURG et autres, ni M. G. ne sont recevables à en demander
l'annulation.M. G., qui ne soutient pas être membre de l'église de la Confession d'Augsbourg
d'Alsace et de Lorraine, est sans intérêt et partant sans qualité pour demander l'annulation de la
délibération susvisée du consistoire supérieur de cette église, contre laquelle il ne formule
d'ailleurs aucun moyen.
„ Conseil d'Etat, n°282100, 21 décembre 2007, M. B. et autres
Si les requérants font valoir qu'en rendant illégal l'usage de l'Ayahuasca ou du Daime, alors qu'ils
sont utilisés lors de cérémonies organisées par des associations telles que " l'Eglise du Santo
Daime ", l'arrêté du 20 avril 2005 du ministre de la solidarité, de la santé et de la famille fixant la
liste des plantes et substances classées comme stupéfiants, en tant qu'il classe les plantes "
Psychotria viridis " et " Banisteriopsis caapi " parmi les substances stupéfiantes, porte atteinte à la
fois à la liberté de pensée, de conscience et de religion, garantie tant par la Constitution que par
les articles 9 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés
fondamentales et 18 et 19 du pacte international relatif aux droits civils et politiques, ainsi qu'au
respect de la vie privée garanti par l'article 8 de cette même convention et par l'article 9 du code
civil, les atteintes portées par l'arrêté attaqué ne sont ni excessives ni disproportionnées au regard
des préoccupations de santé publique.
JURISPRUDENCE JUDICIAIRE
p.133
„ Cour d'appel d'Orléans, N° 06/03234, 13 Septembre 2007, Association LE VERBE DE
VIE c/ Mr Denis F. et autres
Existence d’un contrat de travail liant chacun des époux F. à l’Association LE VERBE DE VIE
JURISPRUDENCE COUREDH
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p.141
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„ CourEDH, n°30273/03, 8 novembre 2007, PERRY c. LETTONIE
Aucune disposition du droit letton en vigueur à l’époque des faits n’autorisait la Direction des
affaires de nationalité et de migration de se servir d’un changement de permis de séjour comme
prétexte pour interdire à un étranger l’exercice d’activités religieuses sur le sol letton.
Par ailleurs, bien que le requérant ait pu, suite à la décision no 5/12-S, continuer de participer à la
vie spirituelle de sa paroisse en tant que membre ordinaire, la Cour rappelle que les communautés
religieuses existent universellement sous la forme de structures organisées et qu’elles respectent
des règles que les adeptes considèrent souvent comme étant d’origine divine. Dès lors, les
cérémonies religieuses ont une valeur sacrée pour les fidèles lorsqu’elles sont célébrées par des
ministres du culte qui y sont habilités en vertu de ces règles.
„ CourEDH, n° 37614/02, 29 novembre 2007, Ismaïlova c. Russie
La requérante, Kourbankiz Ismaïlova, membre des témoins de Jéhovah, est une ressortissante
russe née en 1972 et résidant à Makhachkala (Russie). L’intéressée se plaint de la décision rendue
par les tribunaux russes de confier la garde de ses deux enfants à leur père. La Cour conclut par
quatre voix contre trois qu’il n’y a pas eu violation de l’article 8 (droit au respect de la vie privée et
familiale) combiné avec l’article 14 (interdiction de discrimination).
DROIT COMPARE
p.176
„ CANADA
Cour Suprême du Canada, n°31212, 14 décembre 2007, Stephanie Brenda Bruker c/
Jessel (Jason) Benjamin Marcovitz ( 2007 CSC 54)
Indemnisation du préjudice subi par l'épouse suite au refus de son ex-conjoint de lui accorder le
divorce religieux juif après le divorce civil.
„ USA
Secretariat d'Etat
2007 Report on International Religious Freedom
September 14, 2007
Released by the Bureau of Democracy, Human Rights and Labor
Extrait
France
BLBLIOGRAPHIE
p.233
Droitdesreligions.net / Mises à jour du Répertoire
p.235
INDEX
p.237
© La lettre du droit des religions n°28 décembre 2007 / janvier 2008
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EDITORIAL
Par Sébastien Lherbier-Levy
La place de la religion
dans le Traité de Lisbonne
Le 13 décembre 2007, les chefs d’Etat et de gouvernement des 27 Etats-membres de l’Union européenne se
sont réunis à Lisbonne afin de signer le nouveau traité européen.1 Les Etats procéderont à la ratification du
texte au plus tard avant les élections européennes de juin 2009. Sortant l’UE d’une situation de paralysie
consécutive au blocage du processus de ratification du Traité portant établissement d’une Constitution pour
l’Europe après le « non » français puis néerlandais au printemps 2005, le Traité de Lisbonne engage
plusieurs réformes institutionnelles essentielles parmi lesquelles figurent notamment la personnalité juridique
de l’UE, la simplification du processus de décision au Conseil, une présidence permanente
du Conseil européen ou encore le renforcement du rôle des parlements nationaux.
S’agissant de la question religieuse, trois points dans le nouveau Traité retiennent
l’attention.
1. L’héritage religieux de l’Europe. Le préambule du Traité modifié fait ainsi référence
aux « héritages culturels, religieux et humanistes de l'Europe, à partir desquels se sont
développées les valeurs universelles que constituent les droits inviolables et inaliénables
de la personne humaine, ainsi que la liberté, la démocratie, l'égalité et l'État de droit. ».
L’expression « héritage religieux » qui émane du texte du Traité établissant une Constitution pour l’Europe,
signée le 29 octobre 2004, s’abstient de faire du christianisme, une source unique d’inspiration.
2. Le statut des Eglises et des organisations non confessionnelles. Sur ce point, le Traité de
Lisbonne se borne, aux termes de son article 16C, à reproduire le contenu de l’article 51 du Traité
établissant une Constitution pour l’Europe, qui s’inspirait déjà de la déclaration n°11 relative au statut des
Eglises et des organisations non confusionnelles annexée en 1997 au Traité d’Amsterdam.2 L’article 16C
énonce ainsi : « 1. L'Union respecte et ne préjuge pas du statut dont bénéficient, en vertu du droit national,
les églises et les associations ou communautés religieuses dans les États membres. 2. L'Union respecte
également le statut dont bénéficient, en vertu du droit national, les organisations philosophiques et non
confessionnelles. 3. Reconnaissant leur identité et leur contribution spécifique, l'Union maintient un dialogue
ouvert, transparent et régulier avec ces églises et organisations." La première phrase vise les associations et
communautés religieuses des Etats-membres. Le mot « Eglise » n’apparaît donc pas. Par ailleurs, en prônant
le respect et l’absence de tout préjugé quant au statut des mouvements religieux dans le droit interne des
Etats-membres, l’UE opte pour la neutralité. La deuxième phrase, en s’adressant cette fois aux organisations
philosophiques et non confessionnelles, évite toute discrimination. Enfin, la troisième phrase inscrit dans la
lettre du Traité le principe d’un dialogue ouvert, transparent et régulier avec les organisations
confessionnelles et non confessionnelles. Toutefois, le mot « églises » est employé comme synonyme
d’organisations confessionnelles. Peut-être, eut-il été préférable de retenir le mot « culte », plus neutre.
Par ailleurs, en maintenant le « dialogue », l’UE démontre que si elle ne reconnaît aucun culte, elle n’entend
toutefois pas méconnaître les religions. Dans les faits, ce dialogue existe depuis presque 30 ans. La
1
Texte disponible à cette adresse :
http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cmsUpload/cg00014.fr07.pdf
2
Déclaration n°11 relative au statut des Eglises et des organisations non confusionnelles annexée en 1997
au Traité d’Amsterdam: « L'Union européenne respecte et ne préjuge pas le statut dont bénéficient, en vertu
du droit national, les Églises et les associations ou communautés religieuses dans les États membres.
L'Union européenne respecte également le statut des organisations philosophiques et non
confessionnelles. »
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Commission européenne, et plus précisément le Bureau des Conseillers de politique européenne s’entretient
régulièrement avec les représentants permanents à Bruxelles de plusieurs organisations religieuses. Une liste
a été établie par la Commission1.
3. Une valeur juridique contraignante conférée à la Charte des droits fondamentaux. Les
dispositions de l’article 10 de la Charte intéressent la liberté de pensée, conscience et religion. Cet article
énonce : « 1. Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion. Ce droit implique la
liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction
individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et
l'accomplissement des rites. 2. Le droit à l'objection de conscience est reconnu selon les lois nationales qui
en régissent l'exercice. ». Ces dispositions s’inspirent de l’article 9 de la Convention européenne des droits
de l’homme. L’article 21 retient pour sa part « 1. Est interdite, toute discrimination fondée notamment sur le
sexe, la race, la couleur, les origines ethniques ou sociales, les caractéristiques génétiques, la langue, la
religion ou les convictions, les opinions politiques ou toute autre opinion, l'appartenance à une minorité
nationale, la fortune, la naissance, un handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle. 2. Dans le domaine
d'application du traité instituant la Communauté européenne et du traité sur l'Union européenne, et sans
préjudice des dispositions particulières desdits traités, toute discrimination fondée sur la nationalité est
interdite. » Enfin, l’article 22 énonce que « L'Union respecte la diversité culturelle, religieuse et
linguistique. » Dans la perspective de la ratification du nouveau Traité, la question de la compatibilité de
l’article 10 de la Charte avec le principe de laïcité risque fort de resurgir en France. Toutefois, au plan
juridique, le Conseil Constitutionnel, à l’occasion de l’examen de la conformité du Traité établissant une
Constitution pour l'Europe à la Constitution du 4 octobre 1958, a retenu que l'article II-70 reconnaissant le
droit à chacun, individuellement ou collectivement, de manifester, par ses pratiques, sa conviction religieuse
en public, n'était pas contraire au principe de laïcité résultant de l'article 1er de la Constitution.2
1
http://ec.europa.eu/dgs/policy_advisers/activities/dialogues_religions/docs/list_of_dialogue_partners_fr.pdf
Conseil Constitutionnel, décision n° 2004-505 DC - 19 novembre 2004, Traité établissant une Constitution
pour l'Europe : http://www.conseilconstitutionnel.fr/decision/2004/2004505/index.htm ;
et sans que le Conseil Constitutionnel juge nécessaire de réexaminer la question : décision n° 2007-560 DC 20 décembre 2007 Traité de Lisbonne modifiant le traité sur l’Union européenne et le traité instituant la
Communauté européenne:
http://www.conseilconstitutionnel.fr/decision/2007/2007560/index.htm
2
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Annexe
Traité de Lisbonne modifiant le Traité sur l'Union européenne et le Traité instituant la
Communauté européenne
13 décembre 2007
(…)
ARTICLE PREMIER
Le traité sur l'Union européenne est modifié conformément aux dispositions du présent article.
PRÉAMBULE
1) Le préambule est modifié comme suit:
a) le texte suivant est inséré comme deuxième considérant: "S'INSPIRANT des héritages culturels, religieux
et humanistes de l'Europe, à partir desquels se sont développées les valeurs universelles que constituent les
droits inviolables et inaliénables de la personne humaine, ainsi que la liberté, la démocratie, l'égalité et l'État
de droit;";
(…)
8) L'article 6 est remplacé par le texte suivant:
"ARTICLE 6
1. L'Union reconnaît les droits, les libertés et les principes énoncés dans la Charte des droits fondamentaux
de l'Union européenne du 7 décembre 2000, telle qu'adaptée le 12 décembre 2007 à Strasbourg, laquelle a
la même valeur juridique que les traités.
Les dispositions de la Charte n'étendent en aucune manière les compétences de l'Union telles que définies
dans les traités.
Les droits, les libertés et les principes énoncés dans la Charte sont interprétés conformément aux
dispositions générales du titre VII de la Charte régissant l'interprétation et l'application de celle-ci et en
prenant dûment en considération les explications visées dans la Charte, qui indiquent les sources de ces
dispositions.
2. L'Union adhère à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés
fondamentales. Cette adhésion ne modifie pas les compétences de l'Union telles qu'elles sont définies dans
les traités.
3. Les droits fondamentaux, tels qu'ils sont garantis par la Convention européenne de sauvegarde des droits
de l'Homme et des libertés fondamentales et tels qu'ils résultent des traditions constitutionnelles communes
aux États membres, font partie du droit de l'Union en tant que principes généraux."
(…)
30) Le nouvel article 16 C suivant est inséré:
"ARTICLE 16 C
1. L'Union respecte et ne préjuge pas du statut dont bénéficient, en vertu du droit national, les églises et les
associations ou communautés religieuses dans les États membres.
2. L'Union respecte également le statut dont bénéficient, en vertu du droit national, les organisations
philosophiques et non confessionnelles.
3. Reconnaissant leur identité et leur contribution spécifique, l'Union maintient un dialogue ouvert,
transparent et régulier avec ces églises et organisations."
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Actualité en bref
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Novembre 2007
3 novembre 2007
Un curé jugé pour avoir détruit une fresque dans une église de sa paroisse
Le curé de Saint-Etienne-du-Grès (Bouches-du-Rhône) a comparu vendredi le 2 novembre 2007
devant le tribunal correctionnel de Tarascon pour avoir détruit une fresque dans une des églises
de sa paroisse, qu'il jugeait dégradante.
A la demande de la commune de ce petit village, le peintre Jacques Descordes avait réalisé dans
la chapelle Notre-Dame-du-Château une fresque murale ayant pour thème les quatre évangélistes
(Luc, Jean, Matthieu et Marc). L'oeuvre qui occupait tout l'espace du choeur de la chapelle
montrait un lion, un aigle, un taureau et un ange, quatre figures traditionnellement utilisées pour
représenter les auteurs des évangiles.
Mais, le 25 février 2006, le curé de la paroisse jugeant que cette peinture n'avait pas sa place
dans ce lieu de culte, l'avait entièrement détruite.
Devant le tribunal, l'abbé a assumé son geste "au nom de la loi, tout simplement".
"On n'a pas le droit de peindre des horreurs dans une fresque", a-t-il déclaré.
De son côté l'artiste a estimé que l'ecclésiastique n'avait pas à "faire cet acte violent". "Il pouvait
s'adresser soit à la justice, soit à la mairie", a-t-il fait remarquer, considérant que les explications
du prêtre arguant du soi-disant caractère blasphématoire de l'oeuvre n'étaient qu'un "prétexte".
Le représentant du parquet de Tarascon n'a pas pris de position tranchée sur cette affaire, s'en
remettant à l'appréciation du tribunal tout en regrettant cependant la médiatisation du dossier.
Jugement le 16 novembre.
3 novembre 2007
COUR EUROPÉENNE DES DROITS DE L’HOMME
736
31.10.2007
Communiqué du Greffier
ANNONCE ARRÊTS DE CHAMBRE
Le jeudi 8 novembre 2007
Perry c. Lettonie (n° 30273/03)
Le requérant, Robert Philip Perry, est un ressortissant américain né en 1957. Il est un pasteur
appartenant à Morning Star International, une fédération de communautés chrétiennes
d’inspiration évangélique protestante dont le siège central se trouve aux Etats-Unis. En 1997, il
vint s’établir en Lettonie et y créa une communauté de la fédération, nommée Rita Zvaigzne («
Etoile du matin »). Invoquant les articles 9 (droit à la liberté de pensée, de conscience et de
religion) et 14 (interdiction de la discrimination), il dénonce notamment le fait que les autorités
lettonnes lui avaient délivré un permis de séjour tout en lui refusant l’autorisation d’exercer des
activités religieuses.
5 novembre 2007
Conformité du culte protestant danois à la Convention européenne des droits de
l'Homme
La Cour suprême du Danemark a débouté ce 05.11.2007 un catholique qui accusait la religion
évangélique-luthérienne d'Etat d'être discriminatoire et de violer la Convention européenne des
droits de l'Homme. Le requérant, appartenant à la minorité catholique de 35.000 fidèles du
royaume scandinave, s'était plaint du fait que sa fille avait dû être enregistrée à sa naissance, en
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2003, dans les registres de l'Eglise protestante. Il trouvait également injuste de participer, par le
biais de ses impôts, au paiement des salaires du personnel ecclésiastique d'un culte dont il n'est
pas membre. L'Eglise protestante regroupe quelque 83% de la population et est financée par les
pouvoirs publics. Les sept juges de la Haute cour de justice ont estimé que l'enregistrement des
naissances à l'Eglise protestante est "une tâche administrative sans contenu religieux", et qu'il
n'était pas déraisonnable que les catholiques et les autres confessions soient obligés de contribuer
financièrement à son fonctionnement. Ils affirment que cette pratique "n'enfreint pas" les
principes de la Convention européenne des droits de l'Homme sur le droit à la liberté de religion
et au respect de la vie privée et familiale. Les magistrats ne pensent pas non plus que les droits
individuels de l'intéressé a ont été violés en raison de sa contribution au financement de l'Eglise
par le biais de ses impôts. Les personnes non membres de l'Eglise d'Etat ne financent
qu'"indirectement" celle-ci, soulignent-ils, observant qu'il "n'y a pas de relation directe entre le
paiement des impôts et les activités religieuses de l'Eglise". Ce verdict est une confirmation d'un
jugement précédent de la Cour d'appel prononcé en février 2006.
5 novembre 2007
Espagne: la justice admet la scientologie parmi les "entités religieuses"
La justice espagnole a statué en faveur d'une inscription de l'Eglise de scientologie au "Registre
des entités religieuses", selon une décision rendue récemment. Le tribunal administratif de
l'Audience nationale de Madrid, haute instance judiciaire espagnole, a fait droit un recours
déposé par ce mouvement. La scientologie contestait une décision en 2005 du ministère espagnol
de la Justice, qui l'avait écartée de ce registre. Le tribunal a annulé cette décision comme étant
"contraire au droit", estimant notamment qu'"aucun des documents présentés" par le
mouvement ou par l'administration espagnole "montre qu'il ne s'agit pas d'une entité religieuse
ou avec des fins religieuses". "Pour cela, il apparaît plus correct et conforme à l'interprétation
libérale en vigueur en la matière d'accorder l'inscription demandée", estime le tribunal dans ce
jugement daté du 11 octobre 2007.
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10 novembre 2007
Atteinte à la liberté religieuse: la Lettonie condamnée par la CEDH
La Lettonie a été condamnée mardi par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) pour
ingérence dans la liberté religieuse d'un pasteur américain, privé de permis de séjour.
Robert Philip Perry, pasteur appartenant à Morning Star International, une fédération de
communautés d'inspiration évangélique protestante, s'était installé en 1997 en Lettonie où il avait
créé la communauté Rita Zvaigzne (Étoile du matin).
La Direction des affaires de migration lui délivra jusqu'en 2000 des permis l'autorisant à organiser
des activités publiques de caractère religieux.
En juillet 2000, elle lui refusa un renouvellement au motif qu'il ne pouvait être délivré à une
personne "militant au sein d'une organisation totalitaire ou terroriste ou membre d'une
organisation secrète dirigée contre l'Etat".
La décision a été motivée par le fait qu'il y avait des "informations négatives" à l'encontre du
pasteur qui s'était vainement pourvu en justice.
Dans son arrêt, la CEDH rappelle que la liberté religieuse implique la liberté de "manifester sa
religion individuellement ou en public et dans le cercle de ceux dont on partage la foi".
Elle souligne que cette affaire constitue "un exemple typique d'une ingérence dans le droit à la
liberté de pensée, de conscience et de religion".
10 novembre 2007
Le Liechtenstein projette une séparation entre l'Etat et l'Eglise
La principauté du Liechtenstein a annoncé vendredi 9 novembre un projet d'amendement de la
constitution qui instaurera la séparation entre l'Etat et l'Eglise catholique et accordera un statut
aux autres cultes chrétiens. Le chef du gouvernement, Otmar Hasler, a précisé que des
amendements constitutionnels et une nouvelle législation supprimant le caractère de religion
d'Etat pour le catholicisme feront l'objet de propositions concrètes tout prochainement, selon
l'agence de presse suisse ATS. L'église catholique deviendra une communauté religieuse au
même titre que les protestants et les églises évangéliques. D'autres communautés religieuses
pourront demander également leur reconnaissance officielle à condition qu'elles prouvent leur
importance sociale, leur tolérance et leur respect des lois du pays. En outre, les 35.000 habitants
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de cette principauté, située entre Suisse et Autriche, auront à l'avenir la possibilité de verser une
partie de leurs impôts au bénéfice de telle ou telle communauté religieuse plutôt qu'au profit
exclusif des caisses de l'Etat.
13 novembre 2007
Magasins ouverts le dimanche en Allemagne: plainte des Eglises catholique et
protestante berlinoises devant la cour constitutionnelle
Les Eglises catholique et protestante berlinoises, ont porté plainte le 12.11.2007 devant la cour
constitutionnelle allemande contre l'ouverture des magasins le dimanche permise jusqu'à dix fois
par an.
"La protection des dimanches et jours fériés est un droit constitutionnel", indique l'église
protestante dans un communiqué au nom des deux Eglises.
Le fait que les magasins puissent être ouverts tous les dimanches de l'Avent constitue une
atteinte au droit constitutionnel allemand "particulièrement éclatante", poursuit le communiqué.
20 novembre 2007
Diffamation religieuse: le maire d'Asnières relaxé, son 1er adjoint condamné
Le tribunal de grande instance de Nanterre a relaxé le 20.11.2007 le député-maire d'Asnières
(Hauts-de-Seine), du délit de diffamation à l'encontre d'une réalisatrice de télévision. Le TGI a
toutefois condamné son premier adjoint à 3.000 euros d'amende
En mars 2007, la mairie avait fait distribuer aux Asniérois 40.000 exemplaires d'un dépliant de
quatre pages sur la fondation Ostad Elahi, soupçonnée par la municipalité de dérives sectaires et
placée sous observation par la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives
sectaires (Miviludes).
Le dépliant, titré "La Miviludes donne raison à la mairie d'Asnières", désignait nommément des
associations et des personnes, dont la plaignante, comme faisant partie de la "nébuleuse", terme
utilisé par la Miviludes.
Le premier adjoint au maire y donnait aussi une interview où il justifiait la détermination de la
mairie en évoquant les "ateliers éthiques pour des enfants de 4 à 10 ans, avec des pédagogues",
organisés par la fondation.
21 novembre 2007
Belgique
Création d'un Conseil des leaders religieux.
Le Conseil des leaders religieux de Belgique a été mis sur pied mardi 20 novembre 2007 lors
d'une conférence au château Saint-Anne d'Auderghem réunissant les principaux représentants
des religions présentes dans le pays.
Il se veut un instrument de dialogue entre les religions implantées en Belgique ainsi qu'une
interface entre les religions et les autorités civiles et politiques dans les grands débats de société.
Le conseil réunit des représentants bouddhistes, juifs, musulmans, chrétiens, hindous, sikhs, etc.
S'il ne rassemble pas toutes les confessions spirituelles existant en Belgique, il est ouvert à
toutes, a souligné le Dr. Guy Liagre, bouddhiste tibétain et modérateur de la conférence. Le
nouvel organe est destiné à fournir un apport constructif aux discussions éthiques, morales et
sociétales.
23 novembre 2007
L'action en diffamation de l'Opus Dei contre un roman jugée irrecevable
Le tribunal de grande instance de Paris a jugé irrecevable la plainte déposée par l'Opus Dei contre
l'auteur et l'éditeur du roman Camino 999, dans lequel l'organisation est décrite comme complice
de malversations financières et organisatrice d'assassinats.
Publié en mars 2007 aux éditions "Après la lune", Camino 999 met en scène un chef de groupe de
la brigade criminelle de Lyon qui enquête sur des meurtres orchestrés par l'Opus Dei.
Fin mai, l'Opus Dei avait assigné en justice l'éditeur ainsi que la romancière, estimant que
l'ouvrage devait "être considéré comme entièrement diffamatoire". L'organisation catholique
conservatrice réclamait notamment 30.000 euros de dommages et intérêts.
Dans une ordonnance rendue mercredi 22 novembre 2007, le magistrat de la mise en état a
déclaré nulle l'assignation déposée par l'Opus Dei, considérant que les passages poursuivis
n'étaient pas assez "précis", tant sur l'imputation de "détournements de fonds publics" que sur
celle "d'organisation d'assassinats".
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Selon le TGI, une tel "manque à l'exigence de précision" met "les défendeurs dans l'impossibilité
d'organiser leur défense, en les privant notamment de la possibilité de contester, le cas échéant,
le caractère diffamatoire de chacun des faits susceptibles d'être visés".
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Actualité en bref
Décembre 2007
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1er décembre 2007
Le consistoire central saisit la Halde à propos des dates d'examen
Le consistoire central et l'association du rabbinat français ont indiqué mercredi avoir saisi la Halde
à propos du cas des étudiants juifs pratiquants dont les dates d'examen tombent les samedis et
jours fériés du calendrier juif, confirmant une information publiée dans Le Monde. La Haute
autorité de lutte contre la discrimination et l'exclusion (Halde) confirme avoir été saisie de la
question. "Le samedi et certains jours de fêtes, il est interdit religieusement dans le judaïsme
d'écrire et de composer pour un examen", écrivent le rabbin Haïm Korsia et le président du
consistoire central, Jean Kahn, en préambule du document adressé à la Halde le 19 novembre
2007."De tout temps la question s'est posée et il a toujours été possible de trouver des solutions
de bon sens permettant à la fois le respect des principes d'égalité et de laïcité et les convictions
religieuses des uns et des autres", poursuivent-ils. Ils remarquent qu'en 1953 le bulletin officiel de
l'Education nationale reconnaissait comme jours fériés chômés (donc sans examens) toutes les
fêtes juives alors que maintenant il ne retient plus que les deux jours de nouvel an et le jour du
Grand Pardon (Kippour).Ils disent se heurter "depuis peu" à un "refus de discussion" sur la
question. "Nous estimons ainsi le nombre de cas non résolus en 2007 à plus d'une cinquantaine,
touchant près de 200 étudiants juifs pratiquants qui ont donc dû rater leur année universitaire",
ajoutent-ils. "Nous ne demandons évidemment pas qu'il n'y ait aucun examen aux jours interdits
pour les juifs pratiquants (...), nous espérons simplement obtenir que les universités, dans le
cadre de la loi de 1905, acceptent des discussions avec les étudiants concernés pour tenter de
trouver, au cas par cas, des solutions de bon sens". "Il est malheureusement vrai qu'à ce rythme
de dégradation, les étudiants juifs pratiquants vont être amenés à ne plus pouvoir étudier en
France et ils se tournent soit vers Israël, soit vers les Etats Unis où la connaissance de ces
impératifs et l'écoute des élèves sont une évidence"."C'est la grandeur de la France que de ne
placer personne dans une situation où il doit choisir" entre "son engagement religieux et son
engagement citoyen", écrivent-ils en conclusion.
3 décembre 2007
USA: Rejet d'un recours intenté par les parents d'un mineur hospitalisé, membre des
témoin de Jéhovah, ayant refusé une transfusion sanguine.
Un mineur âgé de 14 ans, membre des témoin de Jéhovah, est décédé des suites d'une leucémie
après avoir refusé une transfusion sanguine, conformément à ses convictions religieuse et malgré
l'avis contraire de ses parents.
Saisi du litige, la justice a rejeté le recours des parents de l'adolescent qui souhaitaient le
contraindre à recevoir une transfusion, au motif que le jeune malade était suffisamment âgé
pour comprendre que son refus équivalait à une «condamnation à mort» et qu'il avait le droit de
prendre cette décision.
14 décembre 2007
La Miviludes publie un guide sur le risque sectaire en entreprise
La Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires a publié ce jeudi
13 décembre 2007 un guide sur le risque sectaire dans l'entreprise destiné aux entreprises,
administrations, et organisations professionnelles.
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Selon le président de la Miviludes, Jean-Michel Roulet, la réalisation d'un tel guide pratique s'est
"imposé" en raison des possibles conséquences des dérives sectaires sur la gouvernance, la
gestion des ressources humaines, la sécurité des fichiers, la sécurité patrimoniale des entreprises.
Au fil des chapitres, le guide développe la perception, la mesure et la détection du risque sectaire,
la prise en charge de ce risque et fournit des renseignements pratiques notamment sur les
organismes capables d'aider les entreprises, et sur la législation.
La Miviludes, au cours des deux dernières années, avait constaté un glissement de l'activité des
sectes vers la formation, le conseil, l'assistance psychologique et plus généralement vers le
monde de l'entreprise. Elle considère que le risque sectaire est "une préoccupation à intégrer
dans la sécurité de l'entreprise".
17 décembre 2007
La Cour suprême du Canada indemnise le préjudice subi par une épouse suite au refus
de son ex-conjoint de lui accorder le divorce religieux juif après le divorce civil.
La Cour suprême a infirmé le 14.12.2007 une décision de la Cour d'appel et a donné raison à une
femme de confession juive qui poursuivait son ex-mari pour dommages et intérêts parce qu'il a
refusé pendant 15 ans de consentir à un divorce religieux traditionnel.
Stephanie Brenda Bruker réclamait 1,35 million de dollars à son ex-mari, Jessel Benjamin
Marcovitz, « parce qu'elle n'a pu reprendre sa vie après le prononcé du jugement conditionnel de
divorce [...], qu'elle a été empêchée de se remarier suivant la foi juive [et] qu'elle a été
empêchée d'avoir des enfants ».
Le couple, marié en 1969, avait conclu un divorce civil en 1980, dans le cadre duquel les deux
parties s'étaient entendues pour se rencontrer à nouveau devant un rabbin pour obtenir un
divorce religieux traditionnel, ce qu'on appelle le get. M. Marcovitz a refusé d'obtempérer, ce qui
a entraîné la poursuite.
La Cour supérieure avait donné raison à Mme Bruker en affirmant que M. Marcovitz avait manqué
à ses obligations contractuelles et lui avait octroyé 47 000 $. La Cour d'appel avait plutôt statué
que l'obligation était de nature religieuse, qu'il s'agissait d'une obligation morale et que, par
conséquent, les tribunaux ne pouvaient en ordonner l'exécution.
Dans un jugement partagé 7-2, la Cour suprême infirme ce dernier jugement. Elle précise que M.
Marcovitz a bel et bien brisé un contrat et le condamne conséquemment à dédommager son exconjointe.
« L'atteinte à la liberté de religion de l'époux, peut-on lire dans le jugement, est beaucoup moins
grave que le préjudice causé tant à l'épouse personnellement qu'à l'intérêt, pour le public,
d'assurer la protection de valeurs fondamentales tels les droits à l'égalité et l'exercice indépendant
du choix pour une personne de se marier et de divorcer ».
Pascale Fournier, Professeur à l'Université d'Ottawa, y voit une victoire pour de nombreuses
femmes de partout au Canada. « C'est vraiment une victoire pour les femmes religieuses qui
souffrent en silence de discrimination dans leur communauté respective et qui ont un pied dans le
droit civil et la société séculière, et un pied dans la société religieuse et le droit religieux », ditelle.
21 décembre 2007
Russie: publicité de Coca-Cola jugée "blasphématoire" par des orthodoxes
Un groupe de croyants orthodoxes indignés ont élevé une vigoureuse protestation auprès des
autorités religieuses de la ville russe de Nijni-Novogorod contre une publicité de Coca-cola qu'ils
jugent "blasphématoire".
Le bureau du procureur régional a reçu une plainte émanant de fidèles de Nijni-Novogorod qui
accusent la compagnie Coca-Cola d'insulter leur sentiments religieux.
La compagnie (Coca-Cola) a installé dans la ville de distributeurs de boissons qui sont frappées de
logos représentant la croix orthodoxe et des coupoles. Tous ces logos sont ornés d'une bouteille
de Coca-Cola avec des croix même mises à l'envers, selon les plaignants.
21 décembre 2007
Projet de Grande mosquée à Marseille : audience au Tribunal administratif de
Marseille.
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Suite à l'annulation, le 17 avril 2007, par le tribunal administratif de Marseille d'une précédente
délibération du conseil municipal qui donnait le coup d'envoi à un projet de grande mosquée, des
élus du Conseil municipal de Marseille ont déposé un nouveau recours pour faire annuler une
nouvelle délibération du 16 juillet 2007. Lors de l'audience, le commissaire du gouvernement a
demandé que la requête soit rejetée, la commune ayant respecté selon lui les règles liées à ce
projet, estimant notamment que la fixation du montant du loyer ne saurait être entachée d'une
erreur d'appréciation et ne saurait être considérée comme une subvention déguisée qui serait
contraire à la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des églises et de l'Etat.
21 décembre 2007
ONU Conseil des droits de l'homme. Résolutions adoptées durant la reprise de la
sixième session
Résolution sur l'élimination de toutes les formes d'intolérance et de discrimination
fondées sur la religion ou la conviction (A/HRC/6/L.15/Rev.1).
Par une résolution sur l'élimination de toutes les formes d'intolérance et de discrimination fondées
sur la religion ou la conviction (A/HRC/6/L.15/Rev.1), adoptée avec 29 voix pour, aucune voix
contre et 18 abstentions, le Conseil décide de renouveler le mandat de la Rapporteuse spéciale
sur la liberté de religion ou de conviction pour une autre période de trois ans. Il constate avec
une profonde inquiétude l'augmentation générale du nombre de cas d'intolérance et de violence
visant les membres de nombreuses communautés religieuses et autres, dans diverses régions du
monde, y compris des cas motivés par l'islamophobie, l'antisémitisme et la christianophobie. Il se
déclare en outre préoccupé par la persistance de l'intolérance et de la discrimination sociales
institutionnalisées, qui sont pratiquées au nom d'une religion ou d'une conviction à l'égard d'un
grand nombre. Le Conseil souligne par ailleurs qu'aucune religion ne doit être assimilée au
terrorisme car cela peut avoir des conséquences fâcheuses sur la jouissance de la liberté de
religion ou de conviction par tous les membres des communautés religieuses concernées.
22 décembre 2007
Rejet du recours contre la délibération du conseil municipal de la ville de Marseille
ayant approuvé la mise à disposition par bail emphytéotique, une parcelle de terrain
communal au profit de l’association "La mosquée de Marseille".
Conformément aux conclusions du commissaire du gouvernement, le tribunal administratif de
Marseille a rejeté vendredi 21 décembre 2007, une requête contre le projet de grande mosquée,
estimant notamment que le prix du loyer demandé, jugé dérisoire par les requérants, ne
constituait pas une subvention déguisée.
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Parlement européen
Questions
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Position de la minorité alevi en Turquie E-5766/07
12 novembre 2007
QUESTION ÉCRITE posée par Frank Vanhecke (NI) à la Commission
Dans son rapport 2007 sur le progrès des négociations avec la Turquie du 6 novembre 2007
(SEC(2007)1436), la Commission se penche sur la question de la liberté de religion et sur la
manière dont la Turquie respecte les arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme
(CourEDH).
La CourEDH a récemment condamné la Turquie pour avoir imposé un enseignement religieux
sunnite à tous les enfants, y compris aux Alevi, qui constituent environ 15 % de la population
turque. Le Coran est étudié dans les livres scolaires, les élèves visitent ensemble des mosquées,
apprennent toutes sortes de prières, de rituels, etc.
Malgré la condamnation, le ministère turc de l'éducation ne tient pas à modifier fondamentalement
le système d'enseignement. Les Turcs se justifient en invoquant leur réserve de droit international
sur l'unicité de leur système éducatif. Ils soulignent en outre que le contenu des livres scolaires a
été modifié («Ankara ignoriert Strassburger Gerichtsurteil», Die Presse, 12 octobre 2007).
La Commission a-t-elle été informée de ce différend? Quelles sont, d'après la Commission, les
mesures que la Turquie doit prendre pour respecter l'arrêt en question de la CEDH? Que pense la
Commission des arguments juridiques de la Turquie? Les modifications apportées par la Turquie
suffisent-elles pour se conformer à l'arrêt?
Réponse
E-5766/07EN
Answer given by Mr Rehn
on behalf of the Commission
(21.12.2007)
The Commission has covered extensively in its Turkey 2007 Progress Report the case mentioned
by the Honourable Member.
The Commission expects Turkey to execute the judgement of the European Court of Human Rights
on the case of Hasan and Eylem Zengin v. Turkey of 9 October 2007 as soon as this becomes final.
Investissements sur le site du cimetière juif de Snipiskes à Vilnius (Lituanie) P6083/07
28 novembre 2007
QUESTION ÉCRITE posée par Filip Kaczmarek (PPE-DE) à la Commission
La communauté juive s'inquiète des travaux entrepris sur le site du cimetière juif de Snipiskes à
Vilnius (Lituanie). Ces travaux, destinés à la construction d'immeubles commerciaux, se situent à
l'emplacement d'un des plus anciens cimetières juifs d'Europe. Malgré les assurances fournies par
les autorités lituaniennes quant à la protection des lieux, le chantier menace l'existence de ce lieu
saint pour la communauté juive.
Les travaux entrepris sur le site du cimetière juif de Vilnius ne sont-ils pas contraires aux règles
imposées par l'Union européenne, notamment en matière de respect du patrimoine culturel et de la
diversité religieuse, et en l'occurrence des principes de la religion juive, pour laquelle le lieu de
sépulture revêt une importance particulière?
Actes de vandalisme et saccage d'églises chrétiennes grecques en Turquie E-6053/07
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27 novembre 2007
QUESTION ÉCRITE posée par Katerina Batzeli (PSE) et Maria Eleni Koppa (PSE) au
Conseil
Les actes de vandalisme auxquels des nationalistes turcs se sont récemment livrés à l'encontre de
l'église de la Sainte-Trinité à Kadiköy et de l'église des Saints Archanges à Istanbul, ainsi que la
tentative de démolition partielle du monastère de la Transfiguration sur l'île de Chalki, sur décision
des pouvoirs publics turcs, ont suscité de vives inquiétudes au sein du Patriarcat œcuménique et de
la diaspora grecque, qui craignent une nouvelle recrudescence des attaques contre des églises
chrétiennes et contre la minorité grecque en Turquie.
Les actes de vandalisme et le saccage des églises en question portent un grand coup à la défense
de la liberté religieuse en Turquie, mais aussi au patrimoine culturel mondial, ces églises étant des
monuments culturels historiques de renommée internationale.
Dans quelle mesure le Conseil se propose-t-il d'intervenir afin d'apporter son soutien au Patriarcat
œcuménique et de garantir que la Turquie se conformera aux obligations qui sont les siennes dans
le cadre des négociations en vue de son adhésion à l'Union européenne et qu'elle respectera les
traités internationaux relatifs à la défense des droits de l'homme, parmi lesquels figure notamment
la liberté religieuse des minorités?
Financement de la Grande Mosquée à Cologne-Ehrenfeld E-6052/07
27 novembre 2007
QUESTION ÉCRITE posée par Renate Sommer (PPE-DE) à la Commission
Selon le magazine allemand CICERO, le projet de construction de la Grande Mosquée de
Cologne?Ehrenfeld et /ou du centre socioculturel qui y est associé sera subventionné à hauteur de
7,5 millions d'euros par l'UE. Le promoteur est l'Union turque musulmane de la fondation pour la
religion (DITIB).
Dans son prospectus d'information sur la construction de la mosquée, la DITIB affirme, je cite: "En
tant qu'association autonome, nous finançons la construction de notre mosquée centrale
entièrement à partir de nos recettes propres et des dons que nous recevons. Nous ne bénéficions
donc d'aucune subvention publique - ni de l'Allemagne, ni de la Turquie. C'est pourquoi nous
dépendons des dons qui nous sont faits." On peut remarquer que l'Europe n'est expressément pas
citée parmi les sources de subventions publiques.
La Commission peut-elle indiquer si des fonds européens ont été octroyés pour la construction du
centre socioculturel ou de la mosquée?
Dans l'affirmative, la Commission peut-elle indiquer de quels fonds il s'agit et à concurrence de quel
montant?
Violation de la liberté religieuse en Turquie P-6232/07
3 décembre 2007
QUESTION ÉCRITE posée par Antonios Trakatellis (PPE-DE) à la Commission
Il ressort d'articles et de reportages récents que les autorités turques persistent, en violation des
droits fondamentaux et notamment de la liberté religieuse, à opprimer le patriarcat et les églises
qui le constituent, lesquels se trouvent, de ce fait, confrontés à de graves problèmes.
Concrètement, dans la perspective de l'adoption attendue de la loi sur les établissements religieux
(«Vakoufia»), on constate que les atteintes contre des monastères «occupés» appartenant au
patriarcat et contre des biens immobiliers dont le régime de propriété présente des lacunes ne
cessent de se multiplier. À la lumière de ce qui précède, et compte tenu du fait qu'elle s'avère
incapable de gérer les dossiers en question malgré les nombreux avertissements qui lui ont été
adressés sur le sujet, la Commission européenne pourrait-elle répondre aux questions suivantes: 1.
A-t-elle été informée du fait que le monastère Métamorphossi tou Sotiros (également connu sous le
nom de monastère Makarios), situé dans la ville de Chalkis et appartenant au patriarcat, ainsi que
les bâtiments annexes situés dans son enceinte sont menacés de destruction par la Direction des
forêts de la municipalité concernée?
2. A-t-elle été informée du fait que les employés de la Direction générale des «Vakoufia» se sont
rendus dans le monastère Aghios Georgios de Karipis, ont procédé à une estimation des biens
immobiliers situés à l'extérieur de son périmètre et ont à nouveau exigé le versement de loyers de
la part des ressortissants grecs qui y résident?
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3. A-t-elle été informée des événements regrettables dont l'Église grecque orthodoxe a été
récemment victime, comme ce fut le cas pour l'église Pammegiston Taxiarchon Sosthéniou et pour
l'église Ilias Skutareos, qui ont dû faire face à de violentes attaques imputables au climat de
nationalisme exacerbé qui prévaut actuellement en Turquie?
4. Les actions précitées et les actes récents de vandalisme dont des églises grecques orthodoxes
ont été victimes sont-elles compatibles avec les perspectives d'adhésion de la Turquie, avec le
partenariat entre la Turquie et l'UE(1) et avec le fait que la ville d'Istanbul
a été proclamée capitale européenne pour l'année 2010? Quand la Commission se décidera-t-elle à
suspendre les négociations relatives à l'adhésion tant que la Turquie ne se sera pas concrètement
portée garante du respect des droits fondamentaux et de la liberté religieuse?
L'Europe doit rappeler la Turquie au respect des règles du fair-play dans le football E6413/07
12 décembre 2007
QUESTION ÉCRITE posée par Mario Borghezio (UEN) à la Commission
L'incroyable affaire de la plainte déposée par l'avocat turc Baris Kaska auprès d'un tribunal de
Smyrne pour obtenir sur le tapis vert la victoire de l'équipe de Fenerbahçe, battue sur le score de 3
buts à 0 par l'Inter de Milan lors d'un match de la Ligue des champions de football, illustre le degré
de rancœur qui anime certains secteurs de la société turque.
L'incroyable motivation formulée, à savoir que la croix - symbole de la ville de Milan - qu'arboraient
à cette occasion sur leur maillot les joueurs de l'Inter serait une affirmation de "supériorité"
religieuse et rappellerait les "jours sanguinaires du passé", les Croisades et particulièrement les
Templiers, nous renforce dans la conviction que l'esprit qui flotte sur la Turquie de 2007 est celui
de l'affrontement des religions et des civilisations.
La Commission est-elle au courant de cette initiative?
Ne juge-t-elle pas utile de prendre contact avec les autorités turques afin de demander des
justifications sur les suites données par le tribunal de Smyrne à une action judiciaire qui n'est qu'un
prétexte?
N'estime-t-elle pas qu'il lui appartient d'engager l'UEFA à adresser à la Fédération turque de
football un sérieux avertissement?
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Assemblée Nationale
Questions écrites
13ème législature
Novembre 2007
Question N° : 9310 de M. Pinte Étienne(Union pour un Mouvement Populaire Yvelines)
QE
Ministère interrogé : Économie, finances et emploi
Ministère attributaire : Économie, finances et emploi
Question publiée au JO le : 06/11/2007 page : 6794
Rubrique : emploi
Tête d'analyse : politique de l'emploi
Analyse : contrats aidés. associations à caractère cultuel. réglementation
Texte de la QUESTION : M. Étienne Pinte attire l'attention de Mme la ministre de l'économie,
des finances et de l'emploi sur les difficultés que rencontrent certains employeurs autorisés à avoir
recours aux contrats aidés. Il s'agit, en particulier, des associations et fondations régulièrement
déclarées et les congrégations reconnues en tant qu'organismes de droit privé à but non lucratif.
Les congrégations sont expressément mentionnées dans la réponse ministérielle à la question
écrite n° 31193 du 29 décembre 2003 (Journal officiel, questions Assemblée nationale, 30 mars
2004, p. 2507). Il lui expose que les associations à but non lucratif régies par la loi du 1er juillet
1901 oeuvrant dans les domaines éducatif, caritatif et social et qui sont d'inspiration religieuse ou
confessionnelle ainsi que plusieurs congrégations et associations culturelles - se voient
fréquemment refuser le bénéfice des contrats aidés alors qu'ils sont des employeurs à part entière,
assumant l'intégralité des obligations légales et réglementaires attachées à cette qualité. Les
décisions de refus considèrent que les avantages qui seraient ainsi accordés à ces personnes
morales auraient le caractère de subventions indirectes prohibées par l'article 2 de la loi du 9
décembre 1905. Il lui expose qu'une interprétation aussi extensive de cet article paraît dépourvue
de fondement légal et de nature à discriminer un grand nombre d'activités fortement porteuses
d'intérêt général. Cette interprétation extensive n'est pas conforme à la distinction établie par l'avis
du conseil d'État du 15 avril 1962 en matière d'exonérations fiscales (applicable par analogie au
domaine social) qui déclare que les oeuvres ou organismes confessionnels, y compris les
associations culturelles, peuvent être considérés comme des organismes d'intérêt général dans la
mesure où ils incitent à des activités à caractère philanthropique, éducatif ou social. Les décisions
de refus ne sont pas davantage conformes aux dispositions de la loi du 23 juillet 1987. Il lui
demande, en conséquence, de bien vouloir lui faire connaître les dispositions que le Gouvernement
entend prendre afin de faire respecter le droit de ces employeurs à bénéficier de contrats aidés.
Question N° : 3403 de Mme Poletti Bérengère(Union pour un Mouvement Populaire Ardennes) QE
Ministère interrogé : Éducation nationale
Ministère attributaire : Éducation nationale
Question publiée au JO le : 14/08/2007 page : 5216
Réponse publiée au JO le : 06/11/2007 page : 6878
Rubrique : ésotérisme
Tête d'analyse : sectes
Analyse : commission d'enquête. rapport. conclusions
Texte de la QUESTION : Mme Bérengère Poletti attire l'attention de M. le ministre de l'éducation
nationale sur le rapport n° 3507 remis au Gouvernement au nom de la commission d'enquête
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relative à l'influence des mouvements à caractère sectaire et aux conséquences de leurs pratiques
sur la santé physique et mentale des mineurs. Ledit rapport propose, dans le domaine de
l'éducation, et plus particulièrement dans le cadre du régime de l'enseignement à distance, de
soumettre les dirigeants des organismes d'enseignement à distance aux exigences suivantes : ne
pas avoir encouru une des incapacités mentionnées à l'article L. 911-5 du code de l'éducation, ne
pas avoir été condamné à une peine d'au moins deux mois d'emprisonnement sans sursis pour les
délits prévus à l'article 223-15-2 du code pénal et avoir soit le diplôme du baccalauréat, soit le
diplôme de licence ou un des certificats d'aptitude aux enseignements primaire ou secondaire.
Aussi, il lui serait agréable de connaître la position du Gouvernement quant à ces propositions,
d'une part, et dans quel délai il compte les mettre en oeuvre, d'autre part.
Texte de la REPONSE :
L'accès aux fonctions de direction des organismes privés
d'enseignement à distance est soumis aux articles L. 444-5 et L. 444-6 du code de l'éducation,
modifiés par la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance, qui reprend
notamment les propositions du rapport n° 3507 relatif à l'influence des mouvements à caractère
sectaire. Aux termes de l'article L. 444-5 du code de l'éducation, les personnels de direction et
d'enseignement des établissements privés dispensant un enseignement à distance doivent
satisfaire à des conditions de moralité, diplômes, titres et références définies par décret. Ce renvoi
à un décret, inséré par la loi du 5 mars 2007, conforte le décret n° 72-1218 du 22 décembre 1972,
qui doit d'ailleurs prochainement faire l'objet d'une codification. Les conditions fixées par les articles
10 et 11 de ce décret n'ont pas à être modifiées. En effet, le niveau de qualification requis est déjà
supérieur à celui souhaité par la commission d'enquête. L'article 11 prévoit notamment que les
dirigeants des organismes privés d'enseignement à distance doivent justifier, outre des diplômes au
moins équivalents à ceux exigés pour enseigner dans les établissements publics de nature et de
niveau correspondants, cinq ans de fonctions d'enseignement dans un établissement quelconque
d'enseignement. En outre, l'article L. 444-6 du code de l'éducation interdit les fonctions de direction
ou d'enseignement aux personnes ayant subi certaines condamnations, interdictions ou privations.
Ces incapacités, énoncées pour les dirigeants des organismes privés d'enseignement à distance,
sont identiques à celles définies à l'article L. 911-5 du code de l'éducation pour les personnels de
l'éducation : sont concernées les personnes qui ont subi une condamnation judiciaire pour crime ou
délit contraire à la probité et aux moeurs, celles qui ont été privées par jugement de tout ou partie
des droits civils, civiques et de la famille mentionnés à l'article 131-26 du code pénal, ou qui ont
été déchues de l'autorité parentale, celles qui ont été frappées de l'interdiction d'enseigner.
Conformément aux conclusions de la commission d'enquête, la loi du 5 mars 2007 a ajouté une
incapacité en cas de condamnation à une peine d'au moins deux mois d'emprisonnement sans
sursis pour les délits prévus à l'article 223-15-2 du code pénal.
Question N° : 3401 de Mme Poletti Bérengère(Union pour un Mouvement Populaire Ardennes) QE
Ministère interrogé : Éducation nationale
Ministère attributaire : Éducation nationale
Question publiée au JO le : 14/08/2007 page : 5215
Réponse publiée au JO le : 06/11/2007 page : 6878
Rubrique : ésotérisme
Tête d'analyse : sectes
Analyse : commission d'enquête. rapport. conclusions
Texte de la QUESTION : Mme Bérengère Poletti attire l'attention de M. le ministre de l'éducation
nationale sur le rapport n° 3507 remis au Gouvernement au nom de la commission d'enquête
relative à l'influence des mouvements à caractère sectaire et aux conséquences de leurs pratiques
sur la santé physique et mentale des mineurs. Ledit rapport propose, dans le domaine de
l'éducation et, plus particulièrement dans le domaine de l'amélioration du public et la coordination
des actions de l'éducation nationale avec celles de la jeunesse et des sports, de prévoir une
sensibilisation aux dérives sectaires dans les programmes d'éducation civique au collège et au
lycée. Aussi, il lui serait agréable de connaître la position du Gouvernement quant à cette
proposition, d'une part, et dans quel délai il compte la mettre en oeuvre, d'autre part.
Texte de la REPONSE : Au-delà des dispositifs de lutte contre les mouvements à caractère sectaire
mis en place au sein de l'éducation nationale, c'est par une démarche de raison appuyée par un
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rappel constant des valeurs qui fondent l'école et notre démocratie que l'on doit éclairer les élèves
sur l'aliénation et les dangers auxquels peut conduire l'adhésion à des groupes sectaires. Le
programme d'éducation civique au collège et celui d'éducation civique, juridique et sociale au lycée
sont conçus de manière à favoriser chez chacun l'appropriation personnelle des connaissances, des
valeurs et des principes qui fondent la citoyenneté. Dès le collège, puis au lycée, autour de thèmes
comme ceux de « libertés », « droits », « justice », « sûreté », l'indispensable réflexion sur les
phénomènes sectaires peut être mise en oeuvre, selon une démarche appropriée à l'âge et au
niveau des élèves.
Question N° : 9807 de M. Tardy Lionel(Union pour un Mouvement Populaire - HauteSavoie) QE
Ministère interrogé : Justice
Ministère attributaire : Justice
Question publiée au JO le : 13/11/2007 page : 6979
Rubrique : justice
Tête d'analyse : fonctionnement
Analyse : magistrats. transport sur place. coût. statistiques
Texte de la QUESTION : M. Lionel Tardy demande à Mme la garde des sceaux, ministre de la
justice, de lui donner des indications sur le coût du déplacement, en février 2007, des magistrats
du tribunal de grande instance de Draguignan et, en septembre 2007, de ceux de la cour d'appel
d'Aix-en-Provence qui, pour les besoins d'un procès, sont allés dans la commune de La Motte afin
de mesurer la distance entre un lieu de culte et un débit de boissons.
Question N° : 10467 de M. Lasbordes Pierre(Union pour un Mouvement Populaire Essonne) QE
Ministère interrogé : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Ministère attributaire : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Question publiée au JO le : 13/11/2007 page : 6978
Rubrique : ésotérisme
Tête d'analyse : sectes
Analyse : commission d'enquête. rapport. conclusions
Texte de la QUESTION : M. Pierre Lasbordes attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur,
de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur les conclusions qu'elle tire du récent rapport
parlementaire sur les sectes « l'Enfance volée : les mineurs victimes de sectes », qui révèle le
chiffre de 80 000 enfants sous influence directe de mouvements sectaires. Aussi, il lui demande de
bien vouloir lui communiquer son sentiment et les mesures qu'elle entend prendre pour lutter
contre ce phénomène.
Question N° : 10335 de M. Kucheida Jean-Pierre(Socialiste, radical, citoyen et divers
gauche - Pas-de-Calais) QE
Ministère interrogé : Éducation nationale
Ministère attributaire : Éducation nationale
Question publiée au JO le : 13/11/2007 page : 6965
Rubrique : enseignement privé
Tête d'analyse : établissements sous contrat
Analyse : financement. charges scolaires. répartion intercommunale. réglementation
Texte de la QUESTION : M. Jean-Pierre Kucheida attire l'attention de M. le ministre de
l'éducation nationale sur la publication de la circulaire n° 2007-142 du 27 août 2007 ayant pour
objet de préciser les modalités d'application de l'article 89 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004
relative aux libertés et responsabilités locales. Cette nouvelle circulaire rend obligatoire la
contribution des communes de résidence aux frais de scolarisation des enfants fréquentant une
école privée sous contrat d'association d'une autre commune, alors que cette même mesure a été
précédemment annulée le 4 juin dernier par le Conseil d'État. La possible entrée en vigueur de
l'article 89 de la loi du 13 août 2004 soulève toujours émoi et inquiétude dans les écoles publiques,
qu'elles soient situées en zone rurale, dans les « quartiers populaires » ou dans les zones
d'éducation prioritaire. L'application de cet article menace de mettre à mal la parité entre le public
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et le privé d'autant que son cadre de mise en oeuvre ne souffre aucune contrainte. Dans sa forme
actuelle, l'article 89 institutionnalise un raccourci dangereux pour l'avenir de l'école publique, à
savoir qu'il sera facilement interprété comme donnant lieu au versement d'une participation
communale à tout élève du primaire scolarisé dans un établissement privé. L'article 89 représente
une charge supplémentaire pour les communes, sans compensation financière aucune, ce qui
conduirait à favoriser l'enseignement privé, donc confessionnel, par rapport à l'enseignement
public. En conséquence, c'est au nom de l'égalité et du principe de laïcité qu'il lui demande de bien
vouloir proclamer l'abrogation de l'article 89 de la loi du 13 août 2004.
Question N° : 11070 de M. Remiller Jacques(Union pour un Mouvement Populaire Isère) QE
Ministère interrogé : Justice
Ministère attributaire : Justice
Question publiée au JO le : 20/11/2007 page : 7201
Rubrique : cultes
Tête d'analyse : culte musulman
Analyse : infiltration. islamistes radicaux. lutte et prévention
Texte de la QUESTION : M. Jacques Remiller appelle l'attention de Mme la garde des sceaux,
ministre de la justice, sur la protection d'associations musulmanes influentes dont bénéficient dixsept imams pourtant sous le coup d'un arrêté ministériel d'expulsion pour des prêches radicaux ou
des comportements susceptibles d'attenter à la sécurité du territoire. Le futur imam de la grande
mosquée de Créteil, qui devrait être terminée au premier trimestre 2008, est « connu pour son
engagement au profit de l'idéologie salafiste » et aurait prononcé depuis son arrivée en France en
1999 toute une série de prêches « soutenant les moudjahidins et fustigeant Israël et les États-Unis
» selon des rapports de police auxquels Le Figaro a eu accès. Or cet imam est soutenu par la
Mosquée de Paris et par l'union des organisations islamiques de France (UOIF). Il souhaite par
conséquent connaître son sentiment sur cette question.
Question N° : 4285 de M. Vigier Philippe(Nouveau Centre - Eure-et-Loir) QE
Ministère interrogé : Éducation nationale
Ministère attributaire : Éducation nationale
Question publiée au JO le : 11/09/2007 page : 5499
Réponse publiée au JO le : 20/11/2007 page : 7305
Rubrique : enseignement privé
Tête d'analyse : établissements sous contrat
Analyse : financement. communes. réforme
Texte de la QUESTION : M. Philippe Vigier alerte M. le ministre de l'éducation nationale sur le
danger de faire financer par les communes le budget des établissements privés primaires. Non
seulement il revient aux parents qui font le choix d'inscrire leurs enfants dans une école privée d'en
assumer les conséquences, mais il faut en outre rappeler le principe de laïcité, incompatible avec ce
mode de financement. Enfin, cela constitue une charge trop importante pour de nombreuses
communes.
Texte de la REPONSE : Il convient de rappeler que le financement public des écoles privées est
strictement encadré par la loi. L'État assure la rémunération ainsi que les charges sociales
afférentes pour les enseignants qui exercent dans les classes placées sous contrat simple ou
d'association au titre des articles L. 442-12 et L. 442-5 du code de l'éducation. Les dépenses de
fonctionnement de ces dernières sont prises en charge, dans le premier degré, par les communes
de résidence des élèves sous forme de forfait communal. Cette prise en charge n'est toutefois
obligatoire que pour les classes du niveau élémentaire sous contrat d'association avec l'État. Le
montant du forfait communal est déterminé par parité avec le coût consacré par la commune au
fonctionnement de ses écoles publiques. Les dépenses d'investissement, ainsi que celles liées à la
demi-pension ou encore à des activités ne ressortissant pas à l'obligation scolaire, ne sont pas
prises en compte dans le calcul du forfait communal. Il appartient aux établissements
d'enseignement privés sous contrat d'association de demander le cas échéant aux familles une
contribution qui permette de faire face à ces dépenses. De plus, les établissements d'enseignement
privés peuvent, s'ils le souhaitent, développer librement des activités à caractère confessionnel.
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Toutefois, en application de l'article L. 442-5 du code de l'éducation, ces activités sont
nécessairement hors contrat et ne peuvent donner lieu à financement public. Le financement par
les communes des classes sous contrat d'association ne méconnaît donc pas, en tout état de cause,
le principe de laïcité.
Question N° : 10660 de M. Saint-Léger Francis(Union pour un Mouvement Populaire Lozère) QE
Ministère interrogé : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Ministère attributaire : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Question publiée au JO le : 20/11/2007 page : 7194
Rubrique : ésotérisme
Tête d'analyse : sectes
Analyse : lutte et prévention
Texte de la QUESTION : M. Francis Saint-Léger attire l'attention de Mme la ministre de
l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur l'activité des sectes dans notre pays. Il
désire connaître les mesures qu'elle entend mettre en oeuvre afin de mieux contrôler ces activités.
Question N° : 4724 de M. Vanneste Christian(Union pour un Mouvement Populaire Nord) QE
Ministère interrogé : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Ministère attributaire : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Question publiée au JO le : 18/09/2007 page : 5628
Réponse publiée au JO le : 27/11/2007 page : 7513
Rubrique : patrimoine culturel
Tête d'analyse : protection
Analyse : lieux de culte
Texte de la QUESTION : M. Christian Vanneste alerte Mme la ministre de l'intérieur, de l'outremer et des collectivités territoriales sur le grand nombre de vols dans les églises et autres lieux de
culte. Ainsi, la cathédrale de Perpignan s'est retrouvée littéralement pillée début septembre. Il
aimerait savoir ce que compte faire le Gouvernement pour protéger les richesses de notre
patrimoine et les lieux de culte.
Texte de la REPONSE : Le Gouvernement est naturellement attentif à la protection du patrimoine
historique et artistique des lieux de culte. Pour lutter contre le trafic des biens culturels, la France
dispose d'ailleurs et de longue date d'outils juridiques et opérationnels permettant l'inventaire et la
protection de ses trésors nationaux, ainsi que le contrôle du marché de l'art et de l'exportation des
biens culturels. Parmi ceux-ci, le registre d'objets mobiliers, encore appelé registre de police, et
auquel sont soumis tous les marchands de biens d'occasion (antiquaires, brocanteurs,
commissaires-priseurs), permet d'établir la traçabilité des objets circulant sur le marché. Il
constitue en outre un outil efficace pour retrouver les objets dérobés, identifier les voleurs et les
receleurs. Outre les sanctions attachées au vol et au recel, le code pénal réprime également la nontenue, y compris par négligence, de ce registre de police par les marchands, qui constitue un délit
assimilé au recel, passible d'une peine de six mois d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende
(art. 321-7 du code pénal). Dès 1975 a par ailleurs été créé au sein de la direction centrale de la
police judiciaire un office central pour la répression des vols d'oeuvres et d'objets d'art, devenu
depuis le 25 mars 1997 l'office central de lutte contre le trafic des biens culturels (OCBC). Cette
structure, à vocation interministérielle, participe à la protection des biens culturels, anime et
coordonne au plan national la répression de leurs vols et effectue ou fait effectuer à l'étranger la
recherche de leurs auteurs. Sous la coordination générale de l'OCBC, la lutte contre le trafic de
biens culturels repose sur un dispositif dont les principales caractéristiques sont les suivantes : la
constitution, depuis 1995, d'une photothèque informatisée nationale des biens culturels volés Thesaurus de recherche électronique et d'imagerie en matière artistique (TREIMA) - alimentée par
les services de police et de gendarmerie, répertoriant à ce jour plus de 70 000 photographies dont
celles des biens culturels volés à l'étranger communiquées par Interpol. Celle-ci est accessible aux
policiers et gendarmes, à la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières ainsi
qu'à certains services du ministère de la culture. Une nouvelle version de cette base, qui intègre
désormais à une interface web une fonctionnalité de reconnaissance par similarité visuelle, a été
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mise en oeuvre en avril 2005. Elle constitue un outil indispensable pour permettre des
rapprochements sur les objets découverts lors des enquêtes ou dans le cadre de la surveillance
permanente du marché de l'art, et pourrait servir de modèle à une base de données européenne
d'objets volés. La mise en place d'une base « miroir » de TREIMA à l'usage des professionnels du
marché de l'art est par ailleurs envisagée. Elle permettrait, en multipliant les interrogations du
système, d'augmenter le nombre de découvertes de biens culturels volés et de renforcer l'efficacité
de la lutte contre les réseaux de recel ; l'activité de l'OCBC comporte naturellement une dimension
internationale. Cet office a notamment été désigné « autorité centrale » pour l'application de la
directive 93/7/CE du Conseil du 15 mars 1993 relative à la restitution de biens culturels ayant
quitté illicitement le territoire d'un État membre de l'Union européenne. L'OCBC participe aux
travaux des instances internationales et nationales, gouvernementales ou non, impliquées dans la
lutte contre le trafic des biens culturels et la protection du patrimoine (UNESCO, International
Council of Museum, observatoire des mouvements internationaux des oeuvres d'art, etc.), ainsi
bien entendu qu'aux efforts conduits en la matière dans le cadre d'Europol et d'Interpol. L'OCBC
mène également une politique active de collaboration bilatérale avec les services étrangers
spécialisés, policiers ou non, par exemple avec l'office hongrois de protection du patrimoine
culturel, le commandement des carabiniers italiens pour la tutelle du patrimoine, les polices
fédérales belge et néerlandaise, l'art and antics desk de New Scotland Yard ou l'art crime team du
FBI ; un réseau national de correspondants composé d'enquêteurs spécialisés a été créé au sein
des services régionaux de police judiciaire et des sections de recherches de la gendarmerie
nationale. De plus, des formations spécifiques sont organisées au profit de magistrats, policiers et
gendarmes français et étrangers ; l'OCBC a par ailleurs développé un partenariat de qualité avec
les ministères concernés, notamment celui chargé de la culture, et les différents acteurs du secteur
culturel. Deux officiers de police sont ainsi affectés au sein des missions « sécurité » des directions
des musées de France et de l'architecture et du patrimoine du ministère de la culture, et un
troisième auprès du conseil supérieur des ventes volontaires de biens mobiliers aux enchères
publiques, gages d'échange d'informations et de réactivité. Un réseau de correspondants « sécurité
» a également été mis en place au sein des directions régionales des affaires culturelles. Une
concertation régulière est ainsi conduite avec les responsables d'associations représentatives des
propriétaires, le conseil supérieur des ventes volontaires de biens meubles aux enchères publiques,
les présidents de syndicats des marchands d'art et des organismes représentatifs des experts d'art.
Ce dispositif global, à la fois préventif et répressif, est efficace. En attestent les statistiques de
l'OCBC qui recensent, en 2006, 2 751 vols, soit une baisse de 21 % par rapport à 2005. Il s'agit de
la baisse la plus significative depuis quinze ans, attribuable en partie au renforcement de la
coordination entre les services d'enquête. S'agissant plus précisément des vols d'objets religieux, ils
ont également diminué entre 2006 et 2005 (208 contre 259). Une sensible recrudescence des vols
dans les lieux de culte est cependant constatée depuis le début de l'année 2007. Plusieurs affaires
témoignent, pour 2006 et pour le premier semestre 2007, des succès remportés par les services
répressifs dans la lutte contre les vols dans les lieux de culte. En mars 2006, l'OCBC a rapatrié de
Belgique huit oeuvres volées (sculptures religieuses) dont cinq inscrites ou classées à l'inventaire
des monuments historiques, restituées en présence du ministre de la culture. En juin 2006, il a été
procédé à Paris, dans une salle de vente aux enchères, à la saisie d'un important groupe de bois
polychrome du XVIe siècle classé aux monuments historiques, volé il y a plus de quarante ans dans
une église de Seine-et-Marne. En novembre 2006, une crosse épiscopale du XIIe siècle, classée
aux monuments historiques et volée à la cathédrale de Châlons-sur-Saône en 1993, était localisée
au musée archidiocésain de Varsovie et est en voie de restitution. En février 2007, ont été
interpellés quatre membres d'une même famille soupçonnés du vol, dans divers cimetières de Paris
et de province, en 2006 et 2007, d'une trentaine de bustes en bronze du XIXe siècle. Les objets qui
ont pu être identifiés ont été restitués aux communes gestionnaires des cimetières.
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Assemblée Nationale
Questions écrites
13ème législature
Décembre 2007
Question N° : 12359 de M. Valax Jacques(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche Tarn) QE
Ministère interrogé : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Ministère attributaire : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Question publiée au JO le : 04/12/2007 page : 7603
Rubrique : mort
Tête d'analyse : funérailles
Analyse : locaux. mise à disposition
Texte de la QUESTION : M. Jacques Valax attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de
l'outre-mer et des collectivités territoriales sur les difficultés rencontrées par de nombreuses
familles pour honorer convenablement la mémoire des défunts. Les possibilités de rendre
hommage aux défunts en dehors des lieux de culte, des salles funéraires des hôpitaux et des
crématoriums apparaissent quasiment inexistantes. Des associations demandent donc la mise à
disposition gratuite pour les familles qui le souhaitent de locaux municipaux leur permettant de se
réunir pour honorer la mémoire des défunts. De ce fait, les participants aux obsèques civiles se
trouvent le plus souvent dans l'incapacité d'honorer la mémoire des disparus dans des conditions
garantissant l'intimité nécessaire. C'est pourquoi il lui demande de lui préciser les intentions du
Gouvernement sur ce dossier.
Question N° : 12271 de M. Eckert Christian(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
- Meurthe-et-Moselle) QE
Ministère interrogé : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Ministère attributaire : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Question publiée au JO le : 04/12/2007 page : 7602
Rubrique : mort
Tête d'analyse : funérailles
Analyse : locaux. mise à disposition
Texte de la QUESTION : M. Christian Eckert attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur,
de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur les difficultés rencontrées par de nombreuses
familles à honorer convenablement la mémoire des défunts. Les possibilités de rendre hommage
aux défunts en dehors des lieux de culte, des salles funéraires des hôpitaux et des crématoriums
sont quasi inexistantes. Dans un pays comme la France, fortement urbanisé, marqué par la
dispersion des familles et les migrations intérieures, nombreux sont les participants aux obsèques
civiles qui se trouvent dans l'incapacité d'honorer la mémoire des disparus dans des conditions
garantissant l'intimité nécessaire. Aussi, il souhaiterait savoir s'il est possible de mettre à disposition
gratuitement des locaux municipaux, pour permettre aux familles de se réunir et d'honorer
convenablement la mémoire des défunts.
Question N° : 6869 de M. Raoult Éric(Union pour un Mouvement Populaire - SeineSaint-Denis) QE
Ministère interrogé : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Ministère attributaire : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Question publiée au JO le : 09/10/2007 page : 6080
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Réponse publiée au JO le : 04/12/2007 page : 7702
Rubrique : cultes
Tête d'analyse : culte musulman
Analyse : instance représentative
Texte de la QUESTION : M. Éric Raoult attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de
l'outre-mer et des collectivités territoriales sur les modalités d'organisation de l'élection des
instances du Conseil français du culte musulman (CFCM). En effet, les termes de sa question n°
14743 restent d'actualité même si la réponse ministérielle d'alors était intéressante sur le rappel
des grands principes animant le gouvernement d'alors. Des critiques souvent fondées avaient été
formulées alors, notamment quant à la représentativité basée sur la superficie des mosquées. Il
conviendrait donc pour le prochain renouvellement de ces instances de prendre en compte
l'expérience des difficultés constatées durant cette période du premier mandat du CFCM pour
proposer des améliorations. Parmi celles-ci, il serait important d'associer les collectivités locales aux
modalités d'organisation du scrutin : les maires ne peuvent pas être sollicités pour la création sur le
territoire de leur commune et complètement écartés de ce processus électoral du CFCM. Il lui
demande donc de lui préciser ses orientations en ce domaine ainsi que le calendrier prévisionnel du
prochain renouvellement du CFCM.
Texte de la REPONSE : Comme tous les cultes en régime de laïcité, le culte musulman
s'organise librement dans le cadre législatif et règlementaire en vigueur. À ce titre, le Conseil
français du culte musulman, association déclarée, demeure le seul maître de ses statuts et de son
règlement électoral, sans possibilité d'intervention publique autre que de simple conseil juridique,
lorsque celui-ci est sollicité. Enfin, il est précisé que les statuts du Conseil français du culte
musulman prévoient un renouvellement par élection de ses instances dirigeantes au mois de juin
2008.
Question N° : 13325 de M. Rogemont Marcel(Socialiste, radical, citoyen et divers
gauche - Ille-et-Vilaine) QE
Ministère interrogé : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Ministère attributaire : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Question publiée au JO le : 18/12/2007 page : 7952
Rubrique : patrimoine culturel
Tête d'analyse : protection
Analyse : lieux de culte
Texte de la QUESTION : M. Marcel Rogemont attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur,
de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur les vols dans les églises et autres lieux de culte.
90 % du patrimoine mobilier protégé au titre des Monuments historiques se trouve dans les
édifices religieux. Ainsi, la cathédrale de Rennes a été victime du vol d'un retable Renaissance. Au
fil des ans le patrimoine s'effrite. Or retrouver une oeuvre nécessite plusieurs années, d'autant plus
que dans certains États, comme la Belgique ou les Pays-Bas, le délit de recel est quasiment
impossible à établir. Il lui demande ce que compte faire le Gouvernement pour protéger les
richesses de notre patrimoine et les lieux de culte.
Question N° : 8354 de M. Demange Jean-Marie(Union pour un Mouvement Populaire Moselle) QE
Ministère interrogé : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Ministère attributaire : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Question publiée au JO le : 23/10/2007 page : 6464
Réponse publiée au JO le : 18/12/2007 page : 8057
Rubrique : cultes
Tête d'analyse : Alsace-Moselle
Analyse : financement. dons et legs. réglementation
Texte de la QUESTION : M. Jean-Marie Demange attire l'attention de Mme la ministre de
l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur les incidences en droit local de la
réforme de l'article 910 du code civil par l'ordonnance n° 2005-856 du 28 juillet 2005, complétée
par le décret n° 2007-807 du 11 mai 2007, qui a simplifié la procédure applicable aux libéralités
consenties aux associations, fondations et congrégations. L'alinéa 2 de l'article 910 du code civil
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modifié par cette réforme prévoit que la procédure d'approbation préalable, jusqu'alors en vigueur
pour les libéralités consenties aux fondations, congrégations et associations ayant la capacité d'en
recevoir, est remplacée par une procédure d'opposition pouvant être exercée par le Préfet.
Toutefois, les établissements publics du culte des départements d'Alsace-Moselle ne sont pas
expressément visés à l'alinéa 2 de l'article 910 du code civil, qui apparaît formellement comme une
exception au principe posé à l'alinéa 1 disposant du maintien de la procédure d'approbation dans
tous les autres cas de libéralités. Par conséquent, considérant la circulaire ministérielle du 1er août
2007 précisant que les libéralités consenties à ces établissements cultuels seraient soumises à la
nouvelle procédure d'opposition, il est permis de s'interroger quant à la conformité de cette
interprétation à la lettre de l'article 910 du code civil. En cas de litige porté devant les tribunaux,
considérant qu'en principe « toute exception est d'interprétation stricte », il souhaite, dans un souci
de sécurité juridique du dispositif, qu'elle lui précise si les établissements publics des cultes en
Alsace-Moselle sont effectivement soumis au formalisme allégé plus favorable, institué par l'alinéa 2
de l'article 910 du code civil. Si oui, il aimerait connaître les mesures qu'elle entend mettre en
oeuvre pour garantir cette sécurité juridique.
Texte de la REPONSE : Le régime juridique des libéralités consenties aux établissements publics
du culte du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle est précisé par la loi du 2 janvier 1817 sur les
donations et legs aux établissements ecclésiastiques. L'article 1er de la loi précitée a fait l'objet
d'une modification par l'ordonnance du 28 janvier 2005 portant simplification du régime des
libéralités consenties à divers organismes sous la forme d'une référence expresse à l'alinéa 2 de
l'article 910 nouveau du code civil substituant à un régime d'autorisation, un régime de déclaration
de ces libéralités sous réserve d'opposition de l'autorité administrative. Il résulte des dispositions
combinées de ces deux textes que les libéralités consenties aux établissements du culte d'Alsace et
de Moselle obéissent au régime simplifié mis en oeuvre par l'ordonnance du 25 janvier 2005 dans
les conditions prévues par le décret du 11 mai 2007 relatif aux associations, fondations,
congrégations et établissements publics du culte et portant application de l'article 910 du code civil.
Question N° : 4738 de M. Vanneste Christian(Union pour un Mouvement Populaire Nord) QE
Ministère interrogé : Culture et communication
Ministère attributaire : Culture et communication
Question publiée au JO le : 18/09/2007 page : 5598
Réponse publiée au JO le : 18/12/2007 page : 8021
Rubrique : patrimoine culturel
Tête d'analyse : églises rurales
Analyse : conservation. aides de l'État
Texte de la QUESTION : M. Christian Vanneste attire l'attention de Mme la ministre de la culture
et de la communication sur l'avenir du patrimoine cultuel. En effet, de plus en plus de communes
sont confrontées à des difficultés pour financer l'entretien des églises. Ces lieux de culte
nécessitent des travaux d'entretien de plus en plus importants, et nombre d'entre eux menacent
ruine. Ces églises et leurs clochers sont des éléments incontestables du patrimoine architectural et
historique de notre pays. Du fait de la loi de 1905, l'entretien et la préservation de la grande
majorité des bâtiments cultuels sont à la charge de la collectivité (municipalités ou État).
L'observatoire du patrimoine religieux estime que 2 800 des 15 000 églises rurales sont en péril.
Ces destructions choquent d'ailleurs nos concitoyens. Il souhaiterait donc connaître l'avis du
Gouvernement sur ce sujet important pour notre patrimoine et notre culture, et savoir quels sont
les moyens mis en oeuvre pour remédier à ces ruines ou à ces destructions.
Texte de la REPONSE : En 2006, l'État a consacré 151,98 millions d'euros à la restauration des
monuments historiques appartenant à des collectivités territoriales et à des propriétaires privés et
11,66 millions d'euros pour leur entretien (RAP 2006 - patrimoines - crédits du programme 175).
S'il n'est pas possible d'identifier les crédits alloués aux seuls édifices religieux, on estime que 85 %
des crédits consacrés à des monuments historiques n'appartenant pas à l'État, soit 139 millions
d'euros, ont été destinés aux collectivités territoriales qui les utilisent principalement pour la
sauvegarde de leurs églises. Le patrimoine religieux représente, en effet, l'essentiel des
monuments inscrits ou classés des collectivités territoriales. En dépit de l'attachement des
collectivités à leur patrimoine monumental et à une certaine identité régionale, voire nationale, et
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de l'attrait que le patrimoine peut engendrer pour des visiteurs, il convient de noter que le mauvais
état sanitaire des monuments a souvent pour cause un manque d'entretien minimal de leur clos et
couvert depuis de très longues années. Dans un contexte budgétaire contraint, les directions
régionales des affaires culturelles ont, depuis 2006 grâce à la LOLF, la possibilité d'opérer la
fongibilité, notamment entre les titres 6 investissement et 6 fonctionnement, afin de répondre au
mieux aux besoins des communes en matière d'entretien. Par ailleurs, dans un objectif de
simplification et de modernisation du régime des travaux sur les monuments historiques,
l'ordonnance du 8 septembre 2005 relative aux monuments historiques et aux espaces protégés
confirme que la maîtrise d'ouvrage des travaux de restauration d'un monument revient à son
propriétaire. Afin d'aider les propriétaires les plus démunis, et notamment les petites communes ne
disposant pas de moyens humains et financiers suffisants, à mettre en oeuvre ces travaux, un
décret d'application, qui paraîtra au début de l'année 2008, précisera les conditions dans lesquelles
les services de l'État chargés des monuments historiques pourront apporter une assistance gratuite
à la maîtrise d'ouvrage. Enfin, l'ordonnance du 8 septembre 2005 confirme la possibilité de
versement d'un acompte avant le début des travaux de restauration lorsque ces travaux bénéficient
d'aides publiques. Cette disposition permettra de systématiser le versement d'une avance aux
propriétaires qui en feraient la demande, tant de la part de l'État que des collectivités territoriales.
Pour ce qui concerne l'État, le décret d'application augmentera significativement le taux de cet
acompte, actuellement limité à 5 %, versé lors du commencement de l'exécution des travaux.
Question N° : 8488 de M. Vuilque Philippe(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche Ardennes) QE
Ministère interrogé : Éducation nationale
Ministère attributaire : Éducation nationale
Question publiée au JO le : 23/10/2007 page : 6455
Réponse publiée au JO le : 25/12/2007 page : 8244
Rubrique : enseignement privé
Tête d'analyse : établissements sous contrat
Analyse : financement. charges scolaires. répartition intercommunale. Réglementation
Texte de la QUESTION : M. Philippe Vuilque attire l'attention de M. le ministre de l'éducation
nationale sur l'incompréhension qu'éprouvent les élus devant la volonté du Gouvernement
d'imposer, une nouvelle fois et sans concertation, aux communes de financer les frais de
scolarisation des enfants domiciliés sur leur territoire et inscrits dans l'école privée d'une ville
voisine. Cette décision porte atteinte au principe constitutionnel de laïcité, d'une part, et provoque,
d'autre part, une dépense communale supplémentaire, si la commune à la capacité d'accueillir les
élèves dans l'école de la République. Il est inadmissible que les budgets communaux soient
amputés pour des choix individuels des administrés d'éducation pour leurs enfants. Il lui demande
de bien vouloir l'informer des mesures qu'il compte prendre pour rétablir une situation plus digne
des valeurs de la République.
Texte de la REPONSE : Par l'adoption de l'article 89 de la loi du 13 août 2004 relative aux
libertés et responsabilités locales, le Parlement a souhaité que soit mieux appliquée la loi Debré qui
prévoit la parité du financement entre écoles publiques et écoles privées. En effet, le principe de la
contribution des communes pour les élèves scolarisés à l'extérieur de leur commune de résidence
s'appliquait déjà aux écoles privées comme aux écoles publiques. Toutefois, ce principe n'était
assorti d'aucun dispositif permettant de résoudre les conflits éventuels surgissant entre les
communes. Désormais, en l'absence d'accord entre les communes, le préfet interviendra pour fixer
la répartition des contributions entre les deux communes. L'article 89 ne modifie donc pas le
périmètre de la compétence des communes pour la prise en charge des dépenses de
fonctionnement des classes sous contrat, il vise simplement à mettre en place un règlement des
conflits entre communes. Les dispositions introduites par la loi du 13 août 2004 ont été complétées
par l'article 89 de la loi du 23 avril 2005 d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école qui
précise que la contribution par élève mise à la charge de chaque commune ne peut être
supérieure, pour un élève scolarisé dans une école privée située sur le territoire d'une autre
commune, au coût qu'aurait représenté pour la commune de résidence ce même élève s'il avait été
scolarisé dans une de ses écoles publiques ou, en l'absence d'école publique, au coût moyen des
classes élémentaires publiques du département. Il convient par ailleurs de rappeler que lorsqu'il est
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saisi d'un litige, le préfet peut toujours, pour arrêter la contribution de la commune de résidence,
tenir compte des ressources de cette dernière. Ainsi les communes ont-elles la garantie que le
paiement du forfait communal ne pourra mettre en péril l'équilibre de leur budget. Le financement
des écoles privées est, en application de l'article L. 442-5 du code de l'éducation, limité aux
dépenses correspondant à la scolarité obligatoire dans les classes élémentaires et si les
établissements d'enseignement privés peuvent développer librement des activités à caractère
confessionnel, ces activités sont nécessairement hors contrat et ne peuvent donc donner lieu à
financement public, en application de l'article L. 442-5 du code de l'éducation. Ainsi, le financement
par les communes des classes sous contrat d'association ne méconnaît-il pas, en tout état de
cause, le principe de laïcité.
Question N° : 13672 de Mme Lignières-Cassou Martine(Socialiste, radical, citoyen et
divers gauche - Pyrénées-Atlantiques) QE
Ministère interrogé : Santé, jeunesse et sports
Ministère attributaire : Santé, jeunesse et sports
Question publiée au JO le : 25/12/2007 page : 8155
Rubrique : professions de santé
Tête d'analyse : psychologues
Analyse : exercice de la profession
Texte de la QUESTION : Mme Martine Lignières-Cassou sollicite l'attention de Mme la ministre de
la santé, de la jeunesse et des sports sur la réglementation de l'exercice de la psychologie et la
création d'un ordre professionnel des psychologues. Il est important de protéger les patients des
manipulations mentales et des escroqueries car de nombreuses personnes s'autoproclament
psychothérapeutes. On constate aussi certaines dérives sectaires. L'encadrement actuel de la
profession par l'article 52 de la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 et le projet de décret en cours
d'examen au Conseil d'État semble insuffisant pour faire face à ces dérives. Elle souhaite savoir si
elle compte prendre d'autres mesures pour un meilleur encadrement de l'exercice de la psychologie
de façon à prévenir les dérives.
Question N° : 13793 de M. Renucci Simon(Socialiste, radical, citoyen et divers gauche Corse-du-Sud) QE
Ministère interrogé : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Ministère attributaire : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Question publiée au JO le : 25/12/2007 page : 8140
Rubrique : mort
Tête d'analyse : inhumation
Analyse : terrain privé. réglementation
Texte de la QUESTION : M. Simon Renucci attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de
l'outre-mer et des collectivités territoriales sur les caveaux familiaux, édifiés sur des terrains privés
et abandonnés. En Corse comme dans d'autres régions françaises, beaucoup de défunts sont
enterrés dans des caveaux familiaux. Certaines de ces sépultures ne sont plus entretenues soit par
carence de leurs propriétaires, soit par absence de propriétaires du fait notamment de successions
en déshérence. Suite à l'urbanisation croissante des communes, ces sépultures privées
abandonnées se trouvent parfois à proximité d'immeubles et présentent un danger pour la sécurité
et la salubrité publiques. Se pose alors la question des compétences du maire et des procédures
susceptibles d'être adoptées pour faire face à de telles situations. Plusieurs possibilités sont
envisageables mais, aucune ne paraît véritablement satisfaisante. En application des dispositions
de l'article L. 2213-10 du code général des collectivités territoriales, les pouvoirs de police des
maires sont étendus aux sépultures privées. Corrélativement, leur responsabilité s'étend en cas de
carence dans l'exercice de cette compétence. Dès lors, lorsqu'une sépulture sur un terrain privé
présente par son état un danger pour la sécurité ou la salubrité publiques, en cas de défaillance de
son propriétaire, il est souvent demandé à la commune de se substituer au propriétaire pour
effectuer les travaux nécessaires et faire cesser les troubles. Quelle procédure administrative
convient-il alors de suivre face à une telle situation ? Faut-il engager une procédure de péril
imminent telle que définie par l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation, ou
bien une procédure de déclaration de parcelle en état d'abandon manifeste telle que définie aux
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articles L. 2243-1 et suivants du code général des collectivités territoriales, ou même une
procédure d'expropriation ? Se pose également la question de l'éventuelle démolition de la
sépulture. Or, une telle démolition exige que la sépulture soit relevée puis transférée. Pour y
parvenir, la procédure des concessions abandonnées qui permet à un maire de relever les
sépultures concernées et de déposer les restes à l'ossuaire communal peut-elle être envisagée
alors qu'il s'agit de sépultures sur des terrains privés ? Une autre difficulté concerne l'exhumation
des restes inhumés dans la propriété d'un particulier organisé par les dispositions de l'article R.
2213-40 du code général des collectivités territoriales qui prescrivent que « toute demande
d'exhumation est faite par le plus proche parent de la personne défunte. Celui-ci justifie de son état
civil, de son domicile et de la qualité en vertu de laquelle il formule sa demande. L'autorisation
d'exhumer un corps est délivrée par le maire de la commune où doit avoir lieu l'exhumation (...) ».
Cette faculté est toutefois soumise à l'initiative et à l'accord du plus proche parent de la personne
défunte. Or, en cas de recherches infructueuses d'héritiers, les maires se heurtent à une difficulté
puisqu'ils ne sont pas autorisés à relever puis transférer une sépulture abandonnée. Il lui demande
donc de bien vouloir préciser les possibilités offertes aux maires et aux communes pour apporter
une solution aux atteintes portées à la sécurité et à la salubrité publiques par les caveaux
abandonnés sur les terrains privés.
Question N° : 13514 de M. Grall Michel(Union pour un Mouvement Populaire Morbihan) QE
Ministère interrogé : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Ministère attributaire : Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Question publiée au JO le : 25/12/2007 page : 8138
Rubrique : mort
Tête d'analyse : crémation
Analyse : cendres. Statut
Texte de la QUESTION : M. Michel Grall attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de
l'outre-mer et des collectivités territoriales sur les inquiétudes exprimées par l'Association
crématiste du Morbihan en matière de législation funéraire. L'Association crématiste du Morbihan
est attachée à la libre disposition des cendres cinéraires. Une proposition de loi, adoptée par le
Sénat, relative à la législation funéraire stipule dans son article 14 que les cendres devraient,
aussitôt après la crémation, être pulvérisées et recueillies dans une urne cinéraire munie
extérieurement d'une plaque portant l'identité du défunt et le nom du crématorium, et que les
cendres devraient désormais, en leur totalité, soit être conservées dans l'urne cinéraire, qui
pourrait être déposée dans une sépulture, une case de columbarium ou un cavurne, ou scellée sur
un monument funéraire à l'intérieur d'un cimetière ou d'un site cinéraire contigu d'un crématorium,
soit être dispersées dans un espace aménagé à cet effet d'un cimetière ou d'un site cinéraire
contigu d'un crématorium, soit être dispersées en pleine nature, sauf sur les voies publiques. Les
dispositions de la présente proposition de loi ont pour conséquence de prohiber tant l'appropriation
privée des urnes que le partage des cendres. L'Association crématiste du Morbihan souhaite que
soit assuré l'espace de liberté que constitue la crémation dans le domaine funéraire. Aussi, il la prie
de bien vouloir lui indiquer la position du Gouvernement dans ce domaine.
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Assemblée Nationale
Propositions et Projets de lois
ÕÕÕ
Proposition de loi du 24 octobre 2007 de M. Bernard Accoyer complétant l'ordonnance n°
58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires
RAPPORT FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU
PLAN SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2008 (n° 189),
PAR M. GILLES CARREZ,
Rapporteur Général,
Député.
ANNEXE N° 14
DIRECTION DE L’ACTION DU GOUVERNEMENT
PUBLICATIONS OFFICIELLES ET INFORMATION ADMINISTRATIVE
Rapporteur spécial : M. Jean-Pierre Brard
Député
Extrait
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
TREIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 11 octobre 2007
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR LE PROJET DE
loi de finances pour 2008 (n° 189),
PAR M. GILLES CARREZ,
Rapporteur Général,
Député.
——
ANNEXE N° 14
DIRECTION DE L’ACTION DU GOUVERNEMENT
PUBLICATIONS OFFICIELLES ET INFORMATION ADMINISTRATIVE
Rapporteur spécial : M. Jean-Pierre Brard
Député
Extrait
(...)
B.– LA MISSION INTERMINISTÉRIELLE DE VIGILANCE ET DE LUTTE CONTRE LES DÉRIVES SECTAIRES
Succédant à l’Observatoire interministériel sur les sectes, créé en 1996, et à la Mission interministérielle de
lutte contre les sectes (MILS), créée en 1998, la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les
dérives sectaires (MIVILUDES) a été instituée, auprès du Premier ministre, par un décret du 28 novembre
2002.
La MIVILUDES est chargée d’observer et d’analyser le phénomène des mouvements à caractère sectaire
dont les agissements sont attentatoires aux droits de l’Homme et aux libertés fondamentales ou constituent
une menace à l’ordre public ou sont contraires aux lois et règlements. Elle doit coordonner l’action
préventive et répressive des pouvoirs publics à l’encontre de ces agissements, et pour cela notamment
développer l’échange des informations entre les services publics sur les pratiques administratives dans le
domaine de la lutte contre les dérives sectaires. Elle doit surtout informer le public sur les risques, et le cas
échéant les dangers, auxquels les dérives sectaires l’exposent et faciliter la mise en œuvre d’actions d’aide
aux victimes de ces dérives.
À ce titre, elle remet un rapport annuel au Premier ministre. Le dernier rapport de 2006 portait sur
l’évolution du paysage sectaire.
L’activité de la MIVILUDES est en constante augmentation. Pour l’année en cours, au 15 octobre 2007, 1 871
courriers appelant réponse avaient été reçus (1 470 pour toute l’année 2006), dont 1 366 demandes
d’informations. À la même date, 1 860 personnes avaient bénéficié d’une formation (1 600 en 2006), 320
mouvements étaient observés ou signalés (220 au premier semestre 2005) et 920 autres entités juridiques
étaient signalées ou analysées.
Outre le président et la Secrétaire générale de la Mission, une grande part des effectifs sont composés de
personnels ayant le statut de fonctionnaires titulaires mis à disposition, et pour le solde, d’agents pris sur les
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ressources propres des services du Premier ministre ou intégrés par transfert. 11,5 ETPE étaient en poste à
la MIVILUDES au 30 juin 2007.
L’accroissement des demandes d’information, tout particulièrement celles en provenance des institutions et
des milieux économiques ainsi que les besoins grandissants d’analyses approfondies imposent des
contraintes nouvelles en matière de gestion et de développement de la documentation. On ne peut que
déplorer que le poste de chargé de la documentation soit vacant depuis le 1er avril alors que l’activité de la
mission augmente.
Les dotations en crédits de rémunérations sont globalement stables en 2007 et 2008 à 200 000 euros. Les
crédits de fonctionnement de la MIVILUDES ont fléchi en 2006 et ils ont été rétablis en 2007 à 150 000
euros comme en 2005. Compte tenu de l’accroissement de l’activité de la mission, il serait probablement
souhaitable de réévaluer ses besoins et de les satisfaire.
Au-delà de l’accroissement du volume des activités mentionnées ci-dessus, la mission mène des études
engagées en vue de publier des guides pratiques à destination de publics différenciés (en 2007 publication
en novembre d’un guide « l’entreprise face au risque sectaire », en janvier 2008 parution prévue d’un
ouvrage destiné aux collectivités territoriales), prépare les formations nouvelles mises en œuvre par les
préfectures de région ou à l’initiative de la mission ainsi que les sollicitations de divers services de l’État
ayant inscrit le phénomène sectaire dans leurs programmes de formation périodiques.
Le rapport 2006 a été traduit en anglais, allemand et espagnol. En 2007, des représentants de la MIVILUDES
se sont rendus dans différentes instances internationales, améliorant ainsi la possibilité d’harmoniser les
points de vue entre les Etats.
Votre Rapporteur spécial s’inquiète d’une étape nouvelle du comportement des organisations sectaires qui
étendent le harcèlement judiciaire dont elles sont coutumières aux agents de la MIVILUDES, ce qui peut
générer des dépenses nouvelles : l’État doit en effet fournir les moyens de défendre ces fonctionnaires.
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N° 325
_____
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
TREIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 24 octobre 2007.
PROPOSITION DE LOI
complétant l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées
parlementaires,
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la
République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
PRÉSENTÉE
PAR M. Bernard ACCOYER,
Président de l’Assemblée nationale.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La récente commission d’enquête sur l’influence des sectes et leurs conséquences sur la santé physique et
mentale des mineurs a donné lieu à de nombreuses actions en diffamation engagées contre des personnes
ayant témoigné devant elle.
Tenues de déposer, de le faire sous serment et désormais publiquement, passibles le cas échéant des peines
sanctionnant le faux témoignage, les personnes appelées à témoigner devant une commission d’enquête
risquent d’être poursuivies pour les propos qu’elles ont tenus, sans bénéficier d’une protection analogue à
celle des témoins devant les juridictions. Cette situation peut apparaître paradoxale, voire injuste.
Or, sur cette question de la protection des témoins des commissions d’enquête, la jurisprudence a fluctué.
Des décisions anciennes leur ont accordé une forme d’immunité, parfois en se fondant sur le fait que les
auditions avaient lieu à huis clos et que le caractère public du propos, élément constitutif du délit de
diffamation, n’existait donc pas ; mais depuis 1991, l’audition publique est devenue la règle et le huis clos
l’exception. Récemment, un arrêt de la Cour de cassation du 23 novembre 2004 a soumis une personne
appelée à témoigner devant une commission d’enquête au droit commun de la diffamation, en considérant
qu’elle ne bénéficiait ni de l’immunité des parlementaires qui doit être interprétée strictement, ni de celle
accordée aux témoins devant les tribunaux, les commissions d’enquête n’étant pas des juridictions.
Lorsque l’acharnement procédurier de certains plaignants finit par s’apparenter à une forme de harcèlement,
il risque de porter atteinte à la libre parole devant les commissions d’enquête et, par voie de conséquence à
la crédibilité de cet instrument essentiel du pouvoir de contrôle du Parlement.
Il n’apparaît néanmoins pas possible d’attribuer aux personnes déposant devant les commissions d’enquête
la même immunité que celle reconnue aux parlementaires et qui procède d’une disposition constitutionnelle.
En revanche, une solution pourrait consister à accorder aux témoins des commissions d’enquête – dont la
situation est désormais très proche de celle des témoins judiciaires – une immunité partielle ayant valeur
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législative, puisqu’identique à celle que l’article 41 de la loi du 29 juillet 1881 relative à la liberté de la presse
attribue aux personnes appelées à témoigner devant les tribunaux.
Cette protection serait limitée aux poursuites pour diffamation, injure ou outrage et ne couvrirait donc pas
les autres infractions ou manquements, notamment pas les fautes disciplinaires. En reprenant la formulation
même de la loi du 29 juillet 1881, elle devrait donner lieu aux mêmes restrictions que la jurisprudence a
dégagées concernant les témoins judiciaires : il faut que les propos tenus n’aient pas été étrangers à l’objet
de l’enquête ni inspirés par une volonté manifeste de nuire, afin d’éviter qu’un témoin ne profite de cette
immunité pour se livrer à des attaques sans rapport avec l’objet de son audition.
Par ailleurs, tirant les conséquences du caractère désormais public de ces auditions, cette adjonction
législative pourrait être aussi l’occasion de régler expressément la question de la diffusion par la presse,
notamment audiovisuelle, des propos tenus devant les commissions d’enquête, en étendant aux comptes
rendus de leurs auditions publiques l’immunité attachée au compte rendu de bonne foi des seules séances
publiques des assemblées elles-mêmes.
Ces modifications pourraient prendre la forme d’un alinéa nouveau inséré dans l’article 6, consacré aux
commissions d’enquête, de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées
parlementaires.
Tel est l’objet de l’article unique de la proposition de loi soumise à votre approbation.
PROPOSITION DE LOI
Article unique
Après le troisième alinéa du II de l’article 6 de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au
fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni les propos tenus ou les écrits
produits par la personne tenue de déposer devant une commission d’enquête, ni le compte rendu des
séances publiques de ces commissions fait de bonne foi. »
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Sénat
Questions écrites
13 ème législature
ÕÕÕ
Retraite des anciens ministres du culte et anciens membres des congrégations et
communautés religieuses
Question orale sans débat n° 0122S de M. Auguste Cazalet (Pyrénées-Atlantiques UMP) publiée dans le JO Sénat du 06/12/2007 - page 2204
M. Auguste Cazalet attire l'attention de M. le ministre du travail, des relations sociales et de la
solidarité sur la situation des pensionnés du régime d’assurance vieillesse des ministres des cultes
et membres des congrégations et des collectivités religieuses, géré par la CAVIMAC. Ainsi, pour une
carrière complète, le montant mensuel de la pension de retraite CAVIMAC servie à ceux qui ont
quitté le ministère ou leur communauté d’appartenance est de 349,09 €, là où le minimum
contributif normal s’élève à 573,54 €.
Ceci est particulièrement difficile, pour tous ceux dont les droits à la retraite ont été liquidés pour
des périodes antérieures au 1er janvier 1979 conformément à la loi n° 78-4 du 2 janvier 1978
instituant le régime des cultes dans le cadre de la généralisation de la protection sociale et qui
n’ont pas réussi à se constituer une retraite décente à partir d’une activité professionnelle
suffisante, salariée ou non, postérieurement à leur période d’engagement religieux. Plaçant ces
pensionnés dans une situation financière parfois extrêmement délicate, cette situation est d’autant
moins acceptable que depuis la réforme issue de la loi de financement de la sécurité sociale pour
2006 (n° 2005-1579 du 19 décembre 2005), le calcul des nouvelles pensions vieillesse CAVIMAC a
été aligné sur celui des prestations de l’assurance vieillesse du régime général.
En outre, ces pensionnés du régime CAVIMAC ne bénéficient pas de droits à retraite
complémentaire. En effet, selon les dispositions de l’article L. 921-1, alinéa premier du code de la
sécurité sociale, révisées à l’issue de la LFSS pour 2006, l’affiliation obligatoire à un régime de
retraite complémentaire obligatoire est réservée « aux personnes mentionnées à l’article L. 382-15
qui bénéficient d’un revenu d’activité perçu individuellement » (n° 2005-1579, 19 décembre 2005,
art. 75, VII).
Par conséquent, afin d’éviter de laisser ces anciens ministres des cultes et anciens membres des
congrégations et communautés religieuses dans un état de détresse financière, ne convient-il de
proposer une réforme visant à permettre une révision de leurs droits à retraite par l’octroi d’un
complément de droits à caractère contributif, c'est-à-dire proportionnel aux nombre de trimestres
cotisés auprès dudit régime ou assimilés comme tels.
Dimension subjective de la différence entre la notion de secte et celle de religion
Question écrite n° 02438 de M. Jean Louis Masson (Moselle - NI) publiée dans le JO
Sénat du 08/11/2007 - page 2018
M. Jean Louis Masson attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des
collectivités territoriales sur la part de subjectivité qui existe dans la différence entre la notion de
secte et celle de religion. Aucune disposition législative ou réglementaire ne précise cette
différence. Des exemples historiques et les comparaisons actuelles d’un pays à l’autre confirment
d’ailleurs cette dimension subjective. Ainsi à l’origine, les premiers chrétiens étaient considérés
comme une secte particulièrement dangereuse devant être réprimée. De même aujourd’hui, de
nombreux pays européens considèrent que les Témoins de Jéhovah ou l’Eglise de Scientologie sont
des religions (l’Espagne vient notamment de conférer le statut de religion à l’Eglise de
Scientologie). Or en France, de nombreux politiciens font de la lutte contre les sectes, un fond de
© La lettre du droit des religions n°28 décembre 2007 / janvier 2008
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commerce électoral. Il souhaiterait savoir si, compte tenu des critères de liberté publique retenus
dans le cadre des accords internationaux signés par la France (Convention internationale des droits
de l’Homme, Convention européenne des droits de l’Homme…), il n’y a pas un risque qu’un jour, la
France soit poursuivie en raison des dérives de la lutte antisecte. En particulier, ces dérives
risquent tôt ou tard d’aboutir à ce qu’arbitrairement, certaines religions soient assimilées à des
sectes et victimes de rétorsions diverses en totale contradiction avec les grands principes de liberté
de religion et de liberté de pensée héritées de la Révolution française. Plus généralement, certaines
religions peuvent autant conduire que les sectes à des atteintes graves aux personnes (abus sur les
mineurs de la part de sectes, mais aussi application de la charia par des fondamentalistes
musulmans…). Il lui demande si plutôt que de dresser des listes noires ou de créer une distinction
arbitraire et imprécise entre secte et religion, il ne serait pas préférable de réprimer les dérives au
sens objectif du terme tout en laissant pour le reste les croyants et notamment les adultes croyants
totalement libres d’adhérer et de pratiquer la croyance qui leur convient.
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Sénat
Projet de loi
Projet de loi de finances pour 2008 : Administration générale et territoriale de l'État
Extrait
Avis No 96 tome 1 de M. José BALARELLO, fait au nom de la commission des Lois
constitutionnelles, de la législation, du suffrage universel, du Règlement et
d'administration générale
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Projet de loi de finances pour 2008 : Administration générale et territoriale de l'État
Extrait
Avis No 96 tome 1 de M. José BALARELLO, fait au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de la
législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale
(…)
B. LA VIE CULTUELLE
La vie cultuelle, correspondant à l'action 4 du programme « vie politique, cultuelle et associative »,
rassemble les activités liées aux questions cultuelles générales, à la tutelle administrative des associations
cultuelles et des congrégations, à l'approbation de la désignation des nonces apostoliques en France et, dans
les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, à l'application du Concordat.
Les questions cultuelles générales visent, pour l'essentiel, les relations du ministère de l'intérieur avec, d'une
part, les autorités représentatives des religions pratiquées en France, d'autre part, les autres ministères
compétents en la matière (ministère de l'éducation nationale, de la culture...).
La tutelle administrative des congrégations et associations cultuelles comprend, en particulier, les
modifications de statuts des congrégations et la délivrance aux congrégations et associations cultuelles de
l'autorisation d'acceptation des libéralités en cas d'opposition des héritiers.
Quant à l'approbation par le Gouvernement français de la désignation des nonces apostoliques28(*), elle
consiste en la notification de l'accréditation de l'Etat, par l'intermédiaire du ministre des affaires étrangères.
Enfin, en Alsace et en Moselle, l'action « cultes> » concerne <la désignation et la rémunération des
ministres des cultes reconnus>.
1. <Les crédits de l'action « cultes » en léger repli>
Les crédits dédiés à la vie cultuelle résultent <quasi-exclusivement des rémunérations versées par l'Etat aux
ministres des cultes en Alsace et en Moselle, soit 1.393 équivalents temps plein travaillés (ETPT)>.
Le principe de cette rémunération procède :
- <pour le culte catholique, de la convention du 26 messidor an IX et des articles organiques 65, 66 et 68 de
la loi du 18 germinal an X> ;
- <pour le culte protestant, de l'article organique 7 de la loi du 18 germinal an X> ;
- <pour le culte israélite de la loi du 8 février 1831> ;
<L'action « cultes> » est ainsi dotée de 53,7 millions d'euros en crédits de paiement et autant en
autorisations d'engagement au sein du projet de loi de finances pour 2008.
Ces crédits sont <en diminution de 4 % par rapport à 2007, conséquence d'une nouvelle baisse des effectifs
du personnel des cultes, à hauteur, en 2008, de 16 ETPT, contre 20 en 2007>. Les recrutements devraient,
cette année encore, être inférieurs aux départs à la retraite.
Rappelons, <à cet égard, que les ministres du culte n'étant pas soumis au droit commun de la date de
cessation d'activité>, il n'existe pas d'âge officiel de départ à la retraite, bien que le droit canonique
catholique ait posé le principe d'un départ à la retraite à l'âge de soixante-quinze ans.
<Outre les dépenses de rémunération du personnel, les crédits de l'action « cultes> » comprennent
<600.000 euros en crédits de paiement destinés à l'entretien des lieux de culte> et à en assurer la mise en
conformité au regard des normes de sécurité.
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Enfin, 1,25 million d'euros de crédits de paiement sont demandés <dans le cadre du projet de loi de finances
pour 2008, au titre des transferts financiers aux communes pour la réalisation de travaux sur les édifices
cultuels et le versement des subventions de fonctionnement aux cultes>.
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HALDE
Délibérations
Délibération relative au port du niqab au sein d’un établissement public de santé n°
2007-210 du 03/09/2007
Une réclamante, accompagnant à l’hôpital son enfant qui devait y subir une intervention
chirurgicale, s’est vu demander par une infirmière d’ôter la partie de son voile masquant son visage
avant d’entrer dans une chambre où séjournaient des enfants. L’enquête menée par la haute
autorité a permis de mettre en évidence que cette demande répondait à un besoin lié à la
spécificité de la mission de service public dévolue à l’hôpital, à savoir prodiguer des soins de qualité
à des enfants hospitalisés. Ce faisant, l’administration hospitalière a recherché une solution
permettant l’application d’une mesure appropriée à la situation sans qu’à aucun moment,
n’apparaisse la volonté de porter atteinte aux convictions religieuses de la réclamante. Ainsi,
compte tenu des circonstances particulières de l’espèce, le Collège de la haute autorité a constaté
que la demande formulée par l’infirmière ne présentait pas un caractère discriminatoire.
Délibération relative à des autorisations d’absence pour fêtes religieuses n° 2007-301
du 13/11/2007
En sa qualité de salarié, le travailleur se trouve sous la subordination de l’employeur qui dispose
d’un pouvoir d’organisation et de direction. Cependant, la religion peut être une composante de la
vie personnelle du salarié.
Si toute discrimination fondée sur les convictions religieuses est prohibée lors de l’exécution du
contrat de travail, des limitations peuvent être imposées dès lors qu’elles sont justifiées et
proportionnées notamment par l’organisation du travail dans l’entreprise.
Il en résulte que l’employeur doit justifier, par des éléments objectifs étrangers à toute
discrimination, le refus d’accorder une autorisation d’absence pour fête religieuse.
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Délibération n°2007-210 du 03 septembre 2007
La haute autorité a été saisie, le 30 novembre 2006, par Mme V, d’une réclamation relative à la demande
d’une infirmière, faite le même jour, d’ôter la partie de son voile masquant son visage, alors qu’elle
accompagnait avec son époux, sa fille, qui devait se rendre dans l’unité d’anesthésie de chirurgie
ambulatoire d’un établissement de santé public. La réclamante estime que cette demande porte atteinte à sa
liberté religieuse et qu’à ce titre, elle est discriminatoire.
Mme V, de confession musulmane, porte un niqab, un voile couvrant tout le visage à l’exception d’une fente
pour les yeux. Le niqab est un prolongement du hijab, qui lui couvre la tête. Ces deux éléments sont
dissociables.
Le 30 novembre 2006, Mme V et son époux ont accompagné leur fille dans l’unité d’anesthésie de chirurgie
ambulatoire d’un établissement de santé public, au sein de laquelle leur fille devait subir une intervention
chirurgicale à la jambe. Les deux parents étaient présents ce jour là comme le stipule la fiche explicative des
recommandations à prendre avant une anesthésie en ambulatoire.
La réclamante déclare qu’ils se sont installés dans la salle d’attente se trouvant dans un couloir où une
infirmière du service, s’est adressée à elle pour lui demander « de se découvrir le visage car elle allait faire
peur aux enfants».
La réclamante indique avoir refusé en précisant « qu’aucune loi ne l’y obligeait et qu’il était inacceptable que
l’on intervienne dans sa vie privée ou ses convictions religieuses et qu’elle devait être traitée avec autant de
déférence que les autres mamans accompagnant leurs enfants».
Selon la réclamante, l’infirmière aurait rétorqué « qu’il s’agit d’un hôpital laïc et qu’il fallait se plier aux règles
en insistant avec véhémence».
Le climat de tension était tel que l’enfant, émotionnellement trop stressée par cette altercation, n’était plus
en mesure de subir l’opération chirurgicale prévue. C’est pourquoi, M. et Mme V indiquent avoir « décidé
d’annuler l’intervention jusqu’au jour où ils seraient mieux accueillis. ».
Mme V a, par courrier en date du 30 novembre 2006, informé la direction clientèle de l’hôpital de cet
événement.
Par courrier en date du 25 avril 2007, la directrice de l’hôpital a communiqué à la haute autorité, la copie de
la lettre qu’elle a adressée à Mme V, ainsi que la copie du rapport circonstancié, dressé par l’infirmière de
service en date du 30 novembre 2006.
L’instruction menée par la haute autorité a permis d’établir les faits suivants. Si la réclamante n’a pas précisé
les circonstances qui ont conduit l’équipe soignante à lui demander d’ôter son niqab, l’enquête a montré que
cette demande a été formulée par une infirmière lorsqu’il s’est agi d’installer l’enfant dans une chambre au
sein de laquelle se trouvaient déjà plusieurs enfants devant subir ou ayant subi une opération chirurgicale.
La mesure proposée par l’administration consistait à ce que Mme V enlève la partie de son voile masquant le
bas du visage en attendant de disposer d’une chambre libre au sein de laquelle elle aurait pu le remettre, sa
fille étant alors seule avec elle.
La loi du 31 décembre 1970 portant réforme hospitalière a créé le service public hospitalier, qui est assuré,
d'une part, par les établissements publics, d'autre part, par les établissements privés.
Les établissements publics, dont le statut relève désormais de la loi du 31 juillet 1991, assurent des missions
de service public, en particulier les soins préventifs, curatifs et palliatifs. Ils sont soumis à des obligations
dites "contraignantes".
A ce titre, l’article L 6112-2 du code de la santé publique (ancien article L 711-4, rédaction des lois n° 91748 du 31 juillet 1991 et n°98 657 du 29 juillet 1998) dispose que « Les établissement de santé publique
(…) garantissent l’égal accès de tous aux soins qu’ils dispensent. Ils sont ouverts à toutes les personnes dont
l’état requiert leurs services. Ils doivent être en mesure de les accueillir de jour et de nuit, éventuellement
en urgence, ou d’assurer leur admission dans un autre établissement mentionné au premier alinéa. Ils
dispensent aux patients les soins préventifs, curatifs ou palliatifs que requiert leur état et veillent à la
continuité de ces soins. (…) Ils ne peuvent établir aucune discrimination entre les malades en ce qui
concerne les soins. Ils ne peuvent organiser des régimes d’hébergement différents selon la volonté exprimée
par les malades que dans les limites et selon les modalités prévues par les textes législatifs et
réglementaires en vigueur ».
Le Ministre de la santé a d’ailleurs rappelé, par une circulaire en date du 2 février 2006, la signification du
principe de laïcité dans les établissements de santé. Cette circulaire, qui n'a en principe pas de valeur
normative mais une portée interprétative, opère une compilation de textes législatifs, réglementaires et
d'origine jurisprudentielle existant quant à la liberté religieuse des patients et aux obligations des soignants
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au regard du respect des principes de laïcité, neutralité et non discrimination. Elle invite à ce que « tous les
patients soient traités de la même façon qu’elles que puissent être leurs croyances religieuses» afin que «
les patients ne puissent douter de la neutralité des agents hospitaliers ».
En effet, la personne hospitalisée étant dans un état de dépendance sinon de vulnérabilité, celleci doit
pouvoir le plus librement possible manifester ses opinions religieuses et ne pas être influencée ou contrariée
dans ses convictions par le personnel soignant ou par des tiers.
L’exercice de la liberté religieuse doit demeurer compatible avec les exigences d’une bonne dispensation des
soins telle qu’elle est définie par l’équipe médicale. Selon la circulaire n°2005- 57 du 2 février 2006, il
convient de veiller à ce que l’expression des convictions religieuses ne porte pas atteinte :
a-à la qualité des soins et aux règles d’hygiène (le malade doit accepter la tenue vestimentaire imposée
compte tenu des soins qui lui sont donnés) ;
b-à la tranquillité des autres personnes hospitalisées et de leurs proches ;
c-au fonctionnement régulier du service.
Dans le même esprit, la Charte du Patient Hospitalisé du 2 mars 2006, tout en affirmant la liberté d’action et
d’expression des patients dans le domaine religieux, rappelle que « ces droits s’exercent dans le respect de
la liberté des autres. Tout prosélytisme est interdit, qu’il soit le fait d’une personne accueillie dans
l’établissement, d’une personne bénévole, d’un visiteur ou d’un membre du personnel. »
La circulaire rappelle également que pour assurer le strict respect de ces garanties essentielles pour les
malades, il appartient aux directeurs d’établissement de faire usage, le cas échéant, de leur pouvoir général
de police au sein de leur établissement (article L. 6143-7 du code de la santé publique).
Plus récemment, la Charte sur la laïcité dans les services publics du 20 avril 2007, qui n’a pas de caractère
réglementaire, a rappelé les limites au droit d’expression des convictions religieuses des usagers. Sont ainsi
évoqués la neutralité du service public et de son bon fonctionnement, mais également « des impératifs
d’ordre public, de sécurité, de santé et d’hygiène. »
S’agissant des enfants, le point 1 de l’article 3 de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant du 20
novembre 1989, dispose que « Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait
des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou
des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale».
De plus, le point 7 de la Charte Européenne de l’Enfant Hospitalisé de 1988, énonce que « l'hôpital doit
fournir aux enfants un environnement correspondant à leurs besoins physiques, affectifs et éducatifs, tant
sur le plan de l'équipement que du personnel et de la sécurité ».
Ainsi, il appartient à l’hôpital d’assurer les soins prodigués aux enfants hospitalisés en veillant à ce qu’aucun
trouble ne vienne perturber la qualité de ces soins.
En l’espèce, il ressort des éléments du dossier que ni l’accès à l’établissement de santé, ni la dispensation de
soins pour son enfant n’ont été refusés à la réclamante. C’est de leur propre initiative que les parents, et
plus particulièrement le conjoint de Mme V, ont décidé d’annuler l’opération chirurgicale prévue pour leur
fille.
Par ailleurs, l’administration ne reproche pas à Mme V de faire acte de prosélytisme par le port d’un signe
religieux.
La haute autorité rappelle que le port d’un signe religieux est possible dès lors qu’il ne soulève pas de
problème relatif à des nécessités d’identification de la personne et qu’il n’est pas de nature à apporter un
trouble.
L’exigence vestimentaire n’est pas rare en milieu hospitalier puisque des médecins ôtent leur blouse blanche,
leur charlotte ou encore leur masque avant de faire leur visite afin de ne pas effrayer les enfants qu’ils vont
devoir examiner. En effet, les professionnels de la santé estiment que, dès son admission à l’hôpital, l'enfant
bascule dans un monde qui lui est étranger ; il perd tous ses repères (odeurs familières, voix et visages
connus), tout ce qui l'entoure est susceptible de l’inquiéter. C'est pourquoi une préparation et une
organisation spécifique sont souvent nécessaires.
C’est d’ailleurs ce qui ressort de la proposition faite par l’administration hospitalière dans son courrier en
date du 12 janvier 2007 précité, qui indique que « La solution d’une chambre seule proposée permettait à
l’infirmière de concilier vos convictions et la prise en charge des autres enfants sous réserve d’une
préparation et organisation préalable en amont ».
Il apparaît ainsi que la demande de l’infirmière répondait à un besoin lié à la spécificité de la mission de
service public qui lui est dévolue, à savoir prodiguer les meilleurs soins possibles à des enfants hospitalisés.
En outre, le personnel médical apparaît le mieux à même de déterminer ce qui convient aux enfants placés
dans une situation de vulnérabilité.
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Ce faisant, l’administration hospitalière a recherché une solution permettant l’application d’une mesure
appropriée à la situation sans qu’à aucun moment, n’apparaisse la volonté de porter atteinte aux convictions
religieuses de la réclamante.
Ainsi, les éléments du dossier ne permettent pas de démontrer que la demande faite à Mme V d’ôter une
partie de son voile reposerait sur l’interdiction du port d’un signe religieux et présenterait, à ce titre, un
caractère discriminatoire. Il convient d’en donner acte à l’administration.
C’est pourquoi, le Collège de la haute autorité constate que, compte tenu des circonstances de l’espèce, la
réclamante n’a pas fait l’objet d’une mesure discriminatoire et décide qu’il y a lieu de clore le dossier.
Le Président,
Louis SCHWEITZER
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Délibération n° 2007-301 du 13 novembre 2007
Emploi privé / Religion / Autorisation d’absence / Rappel à la loi / Recommandation
En sa qualité de salarié, le travailleur se trouve sous la subordination de l’employeur qui
dispose d’un pouvoir d’organisation et de direction. Cependant, la religion peut être une
composante de la vie personnelle du salarié.
Si toute discrimination fondée sur les convictions religieuses est prohibée lors de l’exécution
du contrat de travail, des limitations peuvent être imposées dès lors qu’elles sont justifiées et
proportionnées notamment par l’organisation du travail dans l’entreprise.
Il en résulte que l’employeur doit justifier, par des éléments objectifs étrangers à toute
discrimination, le refus d’accorder une autorisation d’absence pour fête religieuse.
Le Collège :
Vu le Code du travail ;
Vu la loi n° 2004-1486 du 30 décembre 2004 portant création de la haute autorité de lutte
contre les discriminations et pour l’égalité ;
Vu le décret n° 2005-215 du 4 mars 2005 relatif à la haute autorité de lutte contre les
discriminations et pour l’égalité.
Sur proposition du Président,
Décide :
La haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité a été saisie le 3 octobre 2006 par un
représentant syndical d’une réclamation relative à des autorisations d’absence pour fêtes religieuses,
accordées par la société Y.
Le représentant syndical X a adressé, le 2 octobre 2006, un courrier au Directeur Général de la société Y lui
faisant part d’ « une différence de traitement entre les salariés d’origines et de religions différentes ».
Il est ainsi mentionné que « l’autorisation d’absence pour la journée du Kippour est proposé aux salariés
concernés - et c’est une très bonne chose que j’aimerais voir appliquer dans d’autres entreprises ; par
contre, le jour de l’Aïd, fête chère et importante pour une partie de votre personnel qui travaille
consciencieusement malgré le ramadan, ne l’est pas. Je ne doute pas que votre souci d’éviter toute
discrimination vous entraînera à réparer cet oubli ».
Le représentant syndical X, n’ayant reçu aucune réponse de la société, a saisi la haute autorité.
La société Y a refusé toute forme de coopération avec les services de la haute autorité, lors de la phase
d’enquête.
En sa qualité de salarié, le travailleur se trouve sous la subordination de l’employeur qui dispose d’un pouvoir
d’organisation et de direction. Cependant, dans l’entreprise, le salarié ne peut pas totalement faire
abstraction de ses opinions ni de sa vie spirituelle.
Conformément à l’article L.120-2 du Code du travail, « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux
libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient justifiées par la nature de la tâche à
accomplir ni proportionnées au but recherché ».
L’article L.122-45 du Code du travail interdit toute mesure discriminatoire, directe ou indirecte, fondée sur
les convictions religieuses.
Le droit du travail s’efforce de concilier des intérêts antagonistes : d’une part, la subordination inhérente au
contrat de travail et la finalité de l’entreprise et, d’autre part, la fixation de limites que cette subordination ne
saurait franchir sans porter atteinte aux libertés du citoyensalarié.
Le Code du travail impose donc un subtil équilibre entre liberté religieuse et intérêt de l’entreprise. Si toute
discrimination fondée sur les convictions religieuses est prohibée lors de l’exécution du contrat de travail, des
limitations peuvent être imposées dès lors qu’elles sont justifiées et proportionnées notamment par
l’organisation du travail dans l’entreprise.
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Aucune disposition du Code du travail ne porte sur les autorisations exceptionnelles d’absence liées à une
fête religieuse.
L’employeur, qui assume la responsabilité et les risques de la bonne marche de l’entreprise, exerce vis-à-vis
de ses salariés un pouvoir de direction et de discipline.
Sous réserve du détournement de pouvoir, l’employeur peut refuser une autorisation d’absence le jour d’une
fête religieuse, si celle-ci perturbe l’organisation du travail dans l’entreprise.
Toute demande de congé ou d’autorisation d’absence exceptionnelle est soumise à la décision du chef de
service.
Or, s’agissant de la société Y, le service juridique n’a pas été en mesure d’examiner et de vérifier si le refus
de principe d’autorisation d’absence pour la fête de l’Aïd, opposé à certains salariés, était justifié par des
raisons objectives et légitimes.
En conséquence, le Collège de la haute autorité rappelle à la société Y les dispositions de l’article L.122-45
du Code du travail aux termes desquelles « aucun salarié ne peut faire l’objet d’une mesure discriminatoire,
directe ou indirecte, en raison de ses convictions religieuses ».
Afin de concilier notamment « liberté religieuse/contingences économiques de l’entreprise », le Collège
recommande au Ministre du Travail, des Relations Sociales et de la Solidarité d’inscrire dans le Code du
travail une procédure d’autorisation d’absence, transparente et contrôlable, fondée sur des critères objectifs
étrangers à toute discrimination, en vue de faciliter les demandes d’absences des salariés du secteur privé,
par la pose d’un jour de congé ou d’une JRTT, sous réserve des nécessités de service, et ce, dans un délai
de six mois à compter de la notification de la présente délibération et d’en rendre compte à la haute
autorité.
Le Président
Louis SCHWEITZER
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CONSEIL SUPERIEUR DE
L’AUDIOVISUEL
Décision n° 2007-864 du 25 septembre 2007 mettant en demeure l'association Ici et
Maintenant
La radio Ici et Maintenant (Paris) a été mise en demeure pour absence de maîtrise de l'antenne, en
contradiction avec l'article 2-10 de sa convention. Lors de l'émission Soleil de Perse diffusée le 3
juillet 2007, une auditrice avait en effet tenu des propos susceptibles d'inciter à la violence pour
des raisons de religion, et l'animateur n'était pas intervenu pour corriger ou interrompre
l'intervenante
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J.O n° 252 du 30 octobre 2007
texte n° 111
Conseil supérieur de l'audiovisuel
Décision n° 2007-864 du 25 septembre 2007 mettant en demeure l'association Ici et
Maintenant
NOR: CSAX0701864S
Le Conseil supérieur de l'audiovisuel,
Vu la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée relative à la liberté de communication, notamment ses
articles 15, 28, et 42 ;
Vu la décision n° 92-797 du 2 septembre 1992 reconduite par la décision n° 2001-223 du 18 avril 2001
autorisant l'association Ici et Maintenant à exploiter un service de radio en modulation de fréquence
dénommé Ici et Maintenant ;
Vu la convention conclue le 22 novembre 2005 entre le Conseil supérieur de l'audiovisuel et l'association Ici
et Maintenant, notamment ses articles 2-4, 2-10 et 4-2-1 ;
Vu les comptes rendus des enregistrements des programmes diffusés par l'association Ici et Maintenant le 3
juillet 2007 à l'antenne du service de radio Ici et Maintenant ;
Considérant qu'en vertu de l'article 2-4 de la convention du 22 novembre 2005 l'association Ici et Maintenant
doit veiller dans son programme à ne pas encourager des comportements discriminatoires à l'égard des
personnes à raison de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une religion déterminée ; qu'en
vertu de l'article 2-10 de la même convention l'association Ici et Maintenant doit mettre en oeuvre les
procédures nécessaires pour assurer, y compris dans le cadre des interventions des auditeurs, la maîtrise de
son antenne et le respect des principes définis à l'article 2-4 ;
Considérant qu'en vertu de l'article 4-2-1 de la convention du 22 novembre 2005 le Conseil supérieur de
l'audiovisuel peut mettre en demeure l'association Ici et Maintenant de respecter les stipulations figurant
dans cette convention et dans les avenants qui lui sont annexés ;
Considérant qu'il ressort des comptes rendus des enregistrements que le service de radio Ici et Maintenant a
diffusé le 3 juillet 2007 une émission intitulée Soleil de Perse ; qu'au cours de cette émission, à 15 h 32, une
auditrice a tenu les propos suivants : « Par contre, tout ce que je vois me démontre que l'islam est non
seulement intolérant mais très dangereux pour la planète entière et pour les musulmans eux-mêmes !
L'islam défend à ses adeptes, je parle bien d'adeptes puisque je pense que c'est une secte d'appartenir à
l'islam ! En tous les cas, ça a tous les traits d'une secte [...] ils veulent rien entendre. Ils restent dans leur
merde, ils ne veulent absolument pas progresser. Pour eux, c'est comme ça. Pour eux, de la pisse de
chamelle dans du lait ça guérit [...]. Mais quand le vieux, là, quand Mohamed voit Zeïnab, sa belle-fille, il la
voit un peu dénudée, ça lui donne envie. Il est en train de manger du poulet ou je ne sais quoi, et tout de
suite, il a envie. Il a envie de se la faire. Disons-le tout de suite, enfin, sans ambiguïtés. Il a vraiment envie
de Zeïnab. Et là, il reçoit un message express d'Allah qui lui dit : "Bah tu peux prendre Zeïnab et donc tu
dois faire divorcer ton fils et puis tu prends ta belle-fille et tu l'épouses. Et puis tout de suite, tu peux la
consommer. Mais enfin, réveillez-vous ! Réveillez-vous ! Quand un homme est capable d'abuser d'une petite
fille de neuf ans. Réveillez-vous, c'est un pédophile ! C'est ni plus ni moins qu'un pédophile [...]. D'ailleurs
les islamistes, ce sont de vrais musulmans ! Ils exécutent ce qu'il y a dans le Coran : "Tuez tous les infidèles.
C'est bien écrit dans le Coran. Ils exécutent ! Donc eux sont des vrais musulmans ! Alors quand on nous dit
qu'il y a des musulmans modérés, non ! Ce sont des gens qui ne sont pas musulmans et qui n'osent pas se
le dire ! [...] » ; que l'animateur de l'émission n'a ni interrompu, ni modéré les propos de cette intervenante
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;
Considérant que ces propos sont susceptibles d'encourager des comportements discriminatoires à l'égard
des personnes en raison de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une religion déterminée ; que
l'absence d'intervention de l'animateur pendant la diffusion de ces propos constitue un défaut de maîtrise de
l'antenne de Ici et Maintenant ; qu'ainsi les stipulations de l'article 2-10 de la convention du 22 novembre
2005 ont été méconnues ; qu'en conséquence, il y a lieu de mettre en demeure l'association Ici et
Maintenant de se conformer dans l'exploitation du service Ici et Maintenant à ces stipulations,
Décide :
Article 1
L'association Ici et Maintenant est mise en demeure de se conformer, dans l'exploitation du service Ici et
Maintenant, aux stipulations de l'article 2-10 de la convention du 22 novembre 2005 en mettant en oeuvre
les procédures nécessaires pour assurer, y compris dans le cadre des interventions des auditeurs, la maîtrise
de son antenne et le respect des principes définis aux articles 2-2 à 2-9 de cette convention.
Article 2
La présente décision sera notifiée à l'association Ici et Maintenant et publiée au Journal officiel de la
République française.
Fait à Paris, le 25 septembre 2007.
Pour le Conseil supérieur de l'audiovisuel :
Le président
M. Boyon
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CONSEIL CONSTITUTIONNEL
Conseil constitutionnel
Décision n° 2007-3882 du 26 juillet 2007
M. GÉRARD G.
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J.O n° 176 du 1 août 2007 page 12953
texte n° 91
Conseil constitutionnel
Décision n° 2007-3882 du 26 juillet 2007
NOR: CSCX0710761S
AN, CORRÈZE (3e CIRCONSCRIPTION)
M. GÉRARD G.
Le Conseil constitutionnel,
Vu la requête présentée par M. Gérard G., demeurant (…), enregistrée le 27 juin 2007 au secrétariat général
du Conseil constitutionnel et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les
10 et 17 juin 2007 dans la 3e circonscription du département de la Corrèze pour la désignation d'un député
à l'Assemblée nationale ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu la Constitution, notamment son article 59 ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil
constitutionnel, notamment son article 38, alinéa 2 ;
Vu le code électoral ;
Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de
l'élection des députés et des sénateurs ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
1. Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article 38 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée
: « le Conseil, sans instruction contradictoire préalable, peut rejeter, par décision motivée, les requêtes
irrecevables ou ne contenant que des griefs qui manifestement ne peuvent avoir une influence sur les
résultats de l'élection » ;
2. Considérant que M. G., candidat du parti « La France en Action » dans la 3e circonscription du
département de la Corrèze, dénonce le discrédit jeté sur sa candidature par les déclarations, relayées dans
les médias nationaux et régionaux, d'un député alléguant les liens entre ce parti et les mouvements sectaires
;
3. Considérant que, eu égard au faible nombre de voix recueillies par le requérant et sans qu'il soit besoin
d'apprécier le prétendu caractère diffamatoire des propos dénoncés, les faits allégués n'apparaissent pas
susceptibles d'avoir influencé le résultat du scrutin ;
4. Considérant que les autres allégations du requérant ne sont pas assorties des précisions et justifications
suffisantes permettant au juge de l'élection d'en apprécier la portée ;
5. Considérant qu'il s'ensuit que la requête de M. G. doit être rejetée,
Décide :
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Article 1
La requête de M. Gérard G. est rejetée.
Article 2
La présente décision sera notifiée au président de l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la
République française.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 26 juillet 2007, où siégeaient : M. Jean-Louis
Debré, président, MM. Guy Canivet, Renaud Denoix de Saint Marc et Olivier Dutheillet de Lamothe, Mme
Jacqueline de Guillenchmidt, MM. Pierre Joxe et Jean-Louis Pezant, Mme Dominique Schnapper et M. Pierre
Steinmetz.
Le président,
Jean-Louis Debré
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REGLEMENTATION
Décret n° 2007-1853 du 26 décembre 2007 pris pour l'application de l'article 16 ter de
l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 et relatif à la mesure d'activité de jour
Décret n° 2007-1829 du 24 décembre 2007 modifiant le décret n° 88-145 du 15 février
1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée
portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif
aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale
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J.O n° 302 du 29 décembre 2007 page 21778
texte n° 42
Décret n° 2007-1853 du 26 décembre 2007 pris pour l'application de l'article 16 ter de
l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 et relatif à la mesure d'activité de jour
Extrait
(…)
Article 8
Le juge des enfants établit la liste des activités après avis du procureur de la République. Il consulte le
conseil départemental de prévention de la délinquance, d'aide aux victimes et de lutte contre la drogue, les
dérives sectaires et les violences faites aux femmes et tout organisme public compétent en la matière qu'il
juge utile. Les organismes consultés disposent d'un délai de deux mois pour donner leur avis.
Cette liste est portée à la connaissance du président du tribunal de grande instance, du procureur de la
République et du directeur départemental de la protection judiciaire de la jeunesse.
Article 9
Le juge des enfants ou le procureur de la République choisit une activité parmi celles inscrites sur la liste de
son ressort.
Article 10
La liste des activités est révisée au moins une fois par an. Le conseil départemental de prévention de la
délinquance, d'aide aux victimes et de lutte contre la drogue, les dérives sectaires et les violences faites aux
femmes est consulté chaque année sur cette liste.
En cas d'urgence le juge des enfants peut procéder à la radiation d'une activité inscrite sur la liste, après
avis du procureur de la République.
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J.O n° 301 du 28 décembre 2007
texte n° 26
Décret n° 2007-1829 du 24 décembre 2007 modifiant le décret n° 88-145 du 15 février 1988
pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions
statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents non titulaires de la
fonction publique territoriale
Extrait
Le Premier ministre,
Sur le rapport de la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales et du ministre du
budget, des comptes publics et de la fonction publique,
Vu le code de l'action sociale et des familles ;
Vu le code pénal ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique
territoriale, notamment son article 136 ;
Vu la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à
la fonction publique, notamment son article 20 ;
Vu l'ordonnance n° 82-298 du 31 mars 1982 relative à la cessation progressive d'activité des agents
titulaires des collectivités locales et de leurs établissements publics à caractère administratif, notamment ses
articles 3-1 à 4 ;
Vu le décret n° 88-145 du 15 février 1988 modifié pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26
janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux
agents non titulaires de la fonction publique territoriale ;
Vu le décret n° 96-1087 du 10 décembre 1996, modifié par le décret n° 2006-148 du 13 février 2006, relatif
à l'application de l'article 38 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 susvisée ;
Vu le décret n° 2004-777 du 29 juillet 2004 relatif à la mise en oeuvre du temps partiel dans la fonction
publique territoriale, modifié par le décret n° 2006-1284 du 19 octobre 2006 ;
Vu l'avis du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale en date du 4 juillet 2007 ;
Le Conseil d'Etat (section de l'intérieur) entendu,
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Décrète
(…)
Article 3
Sont insérés, après l'article 1er, trois articles ainsi rédigés :
« Art. 1er-1. - I. - Le dossier des agents mentionnés à l'article 1er doit comporter toutes les pièces
intéressant leur situation administrative, enregistrées, numérotées et classées sans discontinuité.
« Ce dossier, de même que tout document administratif, ne peut faire état des opinions ou des activités
politiques, syndicales, religieuses ou philosophiques de l'intéressé.
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DISCOURS / ALLOCUTIONS
Discours de Monsieur Nicolas Sarkozy, Président de la République française au Palais
du Latran lors de sa visite au pape Benoît XVI.
Rome, Palais du Latran, jeudi 20 décembre 2007
Source : Elysée
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Discours de Monsieur Nicolas Sarkozy, Président de la République française au Palais du Latran
lors de sa visite au pape Benoît XVI.
Rome, Palais du Latran, jeudi 20 décembre 2007
Source : Elysée
Messieurs les cardinaux,
Mesdames et Messieurs,
Chers amis,
Permettez-moi d'adresser mes premières paroles au cardinal Ruini, pour le remercier très chaleureusement
de la cérémonie qu'il vient de présider. J'ai été sensible aux prières qu'il a bien voulu offrir pour la France et
le bonheur de son peuple. Je veux le remercier également pour l'accueil qu'il m'a réservé dans cette
cathédrale de Rome, au sein de son chapitre.
Je vous serais également reconnaissant, Eminence, de bien vouloir transmettre à sa Sainteté Benoît XVI mes
sincères remerciements pour l'ouverture de son palais pontifical qui nous permet de nous retrouver ce soir.
L'audience que le Saint Père m'a accordée ce matin a été pour moi un moment d'émotion et de très grand
intérêt. Je renouvelle au Saint Père l'attachement que je porte à son projet de déplacement en France au
deuxième semestre de l'année 2008. En tant que Président de tous les Français, je suis comptable des
espoirs que cette perspective suscite chez mes concitoyens catholiques et dans de nombreux diocèses.
Quelles que soient les étapes de son séjour, Benoît XVI sera le bienvenu en France.
En me rendant ce soir à Saint-Jean de Latran, en acceptant le titre de chanoine d'honneur de cette basilique,
qui fut conféré pour la première fois à Henri IV et qui s'est transmis depuis lors à presque tous les chefs
d'Etat français, j'assume pleinement le passé de la France et ce lien si particulier qui a si longtemps uni notre
nation à l'Eglise.
C'est par le baptême de Clovis que la France est devenue Fille aînée de l'Eglise. Les faits sont là. En faisant
de Clovis le premier souverain chrétien, cet événement a eu des conséquences importantes sur le destin de
la France et sur la christianisation de l'Europe. A de multiples reprises ensuite, tout au long de son histoire,
les souverains français ont eu l'occasion de manifester la profondeur de l'attachement qui les liait à l'Eglise
et aux successeurs de Pierre. Ce fut le cas de la conquête par Pépin le Bref des premiers Etats pontificaux ou
de la création auprès du Pape de notre plus ancienne représentation diplomatique.
Au-delà de ces faits historiques, c'est surtout parce que la foi chrétienne a pénétré en profondeur la société
française, sa culture, ses paysages, sa façon de vivre, son architecture, sa littérature, que la France
entretient avec le siège apostolique une relation si particulière. Les racines de la France sont essentiellement
chrétiennes. Et la France a apporté au rayonnement du christianisme une contribution exceptionnelle.
Contribution spirituelle et morale par le foisonnement de saints et de saintes de portée universelle : saint
Bernard de Clairvaux, saint Louis, saint Vincent de Paul, sainte Bernadette de Lourdes, sainte Thérèse de
Lisieux, saint Jean-Marie Vianney, Frédéric Ozanam, Charles de Foucauld... Contribution littéraire et
artistique : de Couperin à Péguy, de Claudel à Bernanos, Vierne, Poulenc, Duruflé, Mauriac ou encore
Messiaen. Contribution intellectuelle, si chère à Benoît XVI, Blaise Pascal, Jacques Bénigne Bossuet, Jacques
Maritain, Emmanuel Mounier, Henri de Lubac, René Girard... Qu'il me soit permis de mentionner également
l'apport déterminant de la France à l'archéologie biblique et ecclésiale, ici à Rome, mais aussi en Terre
sainte, ainsi qu'à l'exégèse biblique, avec en particulier l'Ecole biblique et archéologique française de
Jérusalem.
Je veux aussi évoquer parmi vous ce soir la figure du cardinal Jean-Marie Lustiger qui nous a quittés cet été.
Son rayonnement et son influence ont eux aussi très largement dépassé les frontières de la France. J'ai tenu
à participer à ses obsèques car aucun Français n'est resté indifférent au témoignage de sa vie, à la force de
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ses écrits, au mystère de sa conversion. Pour tous les catholiques, sa disparition a représenté une grande
peine. Debout à côté de son cercueil, j'ai vu défilé ses frères dans l'épiscopat et les nombreux prêtres de son
diocèse, et j'ai été touché par l'émotion qui se lisait sur le visage de chacun.
***
Cette profondeur de l'inscription du christianisme dans notre histoire et dans notre culture, se manifeste ici à
Rome par la présence jamais interrompue de Français au sein de la Curie, aux responsabilités les plus
éminentes. Je veux saluer ce soir le cardinal Etchegaray, le cardinal Poupard, le cardinal Tauran,
Monseigneur Mamberti, dont l'action honore la France.
Les racines chrétiennes de la France sont aussi visibles dans ces symboles que sont les Pieux établissements,
la messe annuelle de la Sainte-Lucie et celle de la chapelle Sainte-Pétronille. Et puis il y a bien sûr cette
tradition qui fait du Président de la République française le chanoine d'honneur de Saint-Jean de Latran.
Saint-Jean de Latran, ce n'est pas rien. C'est la cathédrale du Pape, c'est la « tête et la mère de toutes les
églises de Rome et du monde », c'est une église chère au coeur des Romains. Que la France soit liée à
l'Eglise catholique par ce titre symbolique, c'est la trace de cette histoire commune où le christianisme a
beaucoup compté pour la France et la France beaucoup compté pour le christianisme. Et c'est donc tout
naturellement, comme le Général de Gaulle, comme Valéry Giscard d'Estaing, et plus récemment Jacques
Chirac, que je suis venu m'inscrire avec bonheur dans cette tradition.
***
Tout autant que le baptême de Clovis, la laïcité est également un fait incontournable dans notre pays. Je
sais les souffrances que sa mise en oeuvre a provoquées en France chez les catholiques, chez les prêtres,
dans les congrégations, avant comme après 1905. Je sais que l'interprétation de la loi de 1905 comme un
texte de liberté, de tolérance, de neutralité est en partie une reconstruction rétrospective du passé. C'est
surtout par leur sacrifice dans les tranchées de la Grande guerre, par le partage des souffrances de leurs
concitoyens, que les prêtres et les religieux de France ont désarmé l'anticléricalisme ; et c'est leur
intelligence commune qui a permis à la France et au Saint-Siège de dépasser leurs querelles et de rétablir
leurs relations.
Pour autant, il n'est plus contesté par personne que le régime français de la laïcité est aujourd'hui une liberté
: liberté de croire ou de ne pas croire, liberté de pratiquer une religion et liberté d'en changer, liberté de ne
pas être heurté dans sa conscience par des pratiques ostentatoires, liberté pour les parents de faire donner
à leurs enfants une éducation conforme à leurs convictions, liberté de ne pas être discriminé par
l'administration en fonction de sa croyance.
La France a beaucoup changé. Les Français ont des convictions plus diverses qu'autrefois. Dès lors la laïcité
s'affirme comme une nécessité et une chance. Elle est devenue une condition de la paix civile. Et c'est
pourquoi le peuple français a été aussi ardent pour défendre la liberté scolaire que pour souhaiter
l'interdiction des signes ostentatoires à l'école.
Cela étant, la laïcité ne saurait être la négation du passé. Elle n'a pas le pouvoir de couper la France de ses
racines chrétiennes. Elle a tenté de le faire. Elle n'aurait pas dû. Comme Benoît XVI, je considère qu'une
nation qui ignore l'héritage éthique, spirituel, religieux de son histoire commet un crime contre sa culture,
contre ce mélange d'histoire, de patrimoine, d'art et de traditions populaires, qui imprègne si profondément
notre manière de vivre et de penser. Arracher la racine, c'est perdre la signification, c'est affaiblir le ciment
de l'identité nationale, et dessécher davantage encore les rapports sociaux qui ont tant besoin de symboles
de mémoire.
C'est pourquoi nous devons tenir ensemble les deux bouts de la chaîne : assumer les racines chrétiennes de
la France, et même les valoriser, tout en défendant la laïcité enfin parvenue à maturité. Voilà le sens de la
démarche que j'ai voulu accomplir ce soir à Saint-Jean de Latran.
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***
Le temps est désormais venu que, dans un même esprit, les religions, en particulier la religion catholique qui
est notre religion majoritaire, et toutes les forces vives de la nation regardent ensemble les enjeux de
l'avenir et non plus seulement les blessures du passé.
Je partage l'avis du pape quand il considère, dans sa dernière encyclique, que l'espérance est l'une des
questions les plus importantes de notre temps. Depuis le siècle des Lumières, l'Europe a expérimenté
beaucoup d'idéologies. Elle a mis successivement ses espoirs dans l'émancipation des individus, dans la
démocratie, dans le progrès technique, dans l'amélioration des conditions économiques et sociales, dans la
morale laïque. Elle s'est fourvoyée gravement dans le communisme et dans le nazisme. Aucune de ces
différentes perspectives - que je ne mets évidemment pas sur le même plan - n'a été en mesure de combler
le besoin profond des hommes et des femmes de trouver un sens à l'existence.
Bien sûr, fonder une famille, contribuer à la recherche scientifique, enseigner, se battre pour des idées, en
particulier si ce sont celles de la dignité humaine, diriger un pays, cela peut donner du sens à une vie. Ce
sont ces petites et ces grandes espérances « qui, au jour le jour, nous maintiennent en chemin » pour
reprendre les termes même de l'encyclique du Saint Père. Mais elles ne répondent pas pour autant aux
questions fondamentales de l'être humain sur le sens de la vie et sur le mystère de la mort. Elles ne savent
pas expliquer ce qui se passe avant la vie et ce qui se passe après la mort.
Ces questions sont de toutes les civilisations et de toutes les époques. Et ces questions essentielles n'ont
rien perdu de leur pertinence. Bien au contraire. Les facilités matérielles de plus en plus grandes qui sont
celles des pays développés, la frénésie de consommation, l'accumulation de biens, soulignent chaque jour
davantage l'aspiration profonde des femmes et des hommes à une dimension qui les dépasse, car moins que
jamais elles ne la comblent.
« Quand les espérances se réalisent, poursuit Benoît XVI, il apparaît clairement qu'en réalité, ce n'est pas la
totalité. Il paraît évident que l'homme a besoin d'une espérance qui va au-delà. Il paraît évident que seul
peut lui suffire quelque chose d'infini, quelque chose qui sera toujours ce qu'il ne peut jamais atteindre. [...]
Si nous ne pouvons espérer plus que ce qui est accessible, ni plus que ce qu'on peut espérer des autorités
politiques et économiques, notre vie se réduit à être privée d'espérance ». Ou encore, comme l'écrivit
Héraclite, « Si l'on n'espère pas l'inespérable, on ne le reconnaîtra pas ».
Ma conviction profonde, dont j'ai fait part notamment dans ce livre d'entretiens que j'ai publié sur la
République, les religions et l'espérance, c'est que la frontière entre la foi et la non-croyance n'est pas et ne
sera jamais entre ceux qui croient et ceux qui ne croient pas, parce qu'elle traverse en vérité chacun de
nous. Même celui qui affirme ne pas croire ne peut soutenir en même temps qu'il ne s'interroge pas sur
l'essentiel. Le fait spirituel, c'est la tendance naturelle de tous les hommes à rechercher une transcendance.
Le
fait
religieux,
c'est
la
réponse
des
religions
à
cette
aspiration
fondamentale.
Or, longtemps la République laïque a sous-estimé l'importance de l'aspiration spirituelle. Même après le
rétablissement des relations diplomatiques entre la France et le Saint-Siège, elle s'est montrée plus méfiante
que bienveillante à l'égard des cultes. Chaque fois qu'elle a fait un pas vers les religions, qu'il s'agisse de la
reconnaissance des associations diocésaines, de la question scolaire, des congrégations, elle a donné le
sentiment qu'elle agissait parce qu'elle ne pouvait pas faire autrement. Ce n'est qu'en 2002 qu'elle a accepté
le principe d'un dialogue institutionnel régulier avec l'Eglise catholique. Qu'il me soit également permis de
rappeler les critiques virulentes dont j'ai été l'objet au moment de la création du Conseil français du culte
musulman. Aujourd'hui encore, la République maintient les congrégations sous une forme de tutelle, refuse
de reconnaître un caractère cultuel à l'action caritative ou aux moyens de communication des Eglises,
répugne à reconnaître la valeur des diplômes délivrés dans les établissements d'enseignement supérieur
catholique alors que la Convention de Bologne le prévoit, n'accorde aucune valeur aux diplômes de
théologie.
Je pense que cette situation est dommageable pour notre pays. Bien sûr, ceux qui ne croient pas doivent
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être protégés de toute forme d'intolérance et de prosélytisme. Mais un homme qui croit, c'est un homme qui
espère. Et l'intérêt de la République, c'est qu'il y ait beaucoup d'hommes et de femmes qui espèrent. La
désaffection progressive des paroisses rurales, le désert spirituel des banlieues, la disparition des
patronages, la pénurie de prêtres, n'ont pas rendu les Français plus heureux. C'est une évidence.
Et puis je veux dire également que, s'il existe incontestablement une morale humaine indépendante de la
morale religieuse, la République a intérêt à ce qu'il existe aussi une réflexion morale inspirée de convictions
religieuses. D'abord parce que la morale laïque risque toujours de s'épuiser ou de se changer en fanatisme
quand elle n'est pas adossée à une espérance qui comble l'aspiration à l'infini. Ensuite parce qu'une morale
dépourvue de liens avec la transcendance est davantage exposée aux contingences historiques et finalement
à la facilité. Comme l'écrivait Joseph Ratzinger dans son ouvrage sur l'Europe, « le principe qui a cours
maintenant est que la capacité de l'homme soit la mesure de son action. Ce que l'on sait faire, on peut
également le faire ». A terme, le danger est que le critère de l'éthique ne soit plus d'essayer de faire ce que
l'on doit faire, mais de faire ce que l'on peut faire. C'est une très grande question.
Dans la République laïque, l'homme politique que je suis n'a pas à décider en fonction de considérations
religieuses. Mais il importe que sa réflexion et sa conscience soient éclairées notamment par des avis qui
font référence à des normes et à des convictions libres des contingences immédiates. Toutes les
intelligences, toutes les spiritualités qui existent dans notre pays doivent y prendre part. Nous serons plus
sages si nous conjuguons la richesse de nos différentes traditions.
C'est pourquoi j'appelle de mes voeux l'avènement d'une laïcité positive, c'est-à-dire une laïcité qui, tout en
veillant à la liberté de penser, à celle de croire et de ne pas croire, ne considère pas que les religions sont un
danger, mais plutôt un atout. Il ne s'agit pas de modifier les grands équilibres de la loi de 1905. Les Français
ne le souhaitent pas et les religions ne le demandent pas. Il s'agit en revanche de rechercher le dialogue
avec les grandes religions de France et d'avoir pour principe de faciliter la vie quotidienne des grands
courants spirituels plutôt que de chercher à la leur compliquer.
***
Messieurs les cardinaux, Mesdames et Messieurs, au terme de mon propos, et à quelques jours de cette fête
de Noël qui est toujours un moment où l'on se recentre sur ce qui est le plus cher dans sa vie, je voudrais
me tourner vers ceux d'entre vous qui sont engagés dans les congrégations, auprès de la Curie, dans le
sacerdoce et l'épiscopat ou qui suivent actuellement leur formation de séminariste. Je voudrais vous dire très
simplement les sentiments que m'inspirent vos choix de vie.
Je mesure les sacrifices que représente une vie toute entière consacrée au service de Dieu et des autres. Je
sais que votre quotidien est ou sera parfois traversé par le découragement, la solitude, le doute. Je sais
aussi que la qualité de votre formation, le soutien de vos communautés, la fidélité aux sacrements, la lecture
de la Bible et la prière, vous permettent de surmonter ces épreuves.
Sachez que nous avons au moins une chose en commun : c'est la vocation. On n'est pas prêtre à moitié, on
l'est dans toutes les dimensions de sa vie. Croyez bien qu'on n'est pas non plus Président de la République à
moitié. Je comprends que vous vous soyez sentis appelés par une force irrépressible qui venait de l'intérieur,
parce que moi-même je ne me suis jamais assis pour me demander si j'allais faire ce que j'ai fait, je l'ai fait.
Je comprends les sacrifices que vous faites pour répondre à votre vocation parce que moi-même je sais ceux
que j'ai faits pour réaliser la mienne.
Ce que je veux vous dire ce soir, en tant que Président de la République, c'est l'importance que j'attache à
ce que vous faites et à ce que vous êtes. Votre contribution à l'action caritative, à la défense des droits de
l'homme et de la dignité humaine, au dialogue inter-religieux, à la formation des intelligences et des coeurs,
à la réflexion éthique et philosophique, est majeure. Elle est enracinée dans la profondeur de la société
française, dans une diversité souvent insoupçonnée, tout comme elle se déploie à travers le monde. Je veux
saluer notamment nos congrégations, les Pères du Saint-Esprit, les Pères Blancs et les Soeurs Blanches, les
fils et filles de la charité, les franciscains missionnaires, les jésuites, les dominicains, la Communauté de
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Sant'Egidio qui a une branche en France, toutes ces communautés, qui, dans le monde entier, soutiennent,
soignent, forment, accompagnent, consolent leur prochain dans la détresse morale ou matérielle.
En donnant en France et dans le monde le témoignage d'une vie donnée aux autres et comblée par
l'expérience de Dieu, vous créez de l'espérance et vous faites grandir des sentiments nobles. C'est une
chance pour notre pays, et le Président que je suis le considère avec beaucoup d'attention. Dans la
transmission des valeurs et dans l'apprentissage de la différence entre le bien et le mal, l'instituteur ne
pourra jamais remplacer le pasteur ou le curé, même s'il est important qu'il s'en approche, parce qu'il lui
manquera toujours la radicalité du sacrifice de sa vie et le charisme d'un engagement porté par l'espérance.
Je veux évoquer la mémoire des moines de Tibhérine et de Monseigneur Pierre Claverie, dont le sacrifice
portera un jour des fruits de paix, j'en suis convaincu. L'Europe a trop tourné le dos à la Méditerranée alors
même qu'une partie de ses racines y plongent et que les pays riverains de cette mer sont au croisement
d'un grand nombre d'enjeux du monde contemporain. J'ai voulu que la France prenne l'initiative d'une Union
de la Méditerranée. Sa situation géographique tout comme son passé et sa culture l'y conduisent
naturellement. Dans cette partie du monde où les religions et les traditions culturelles exacerbent souvent
les passions, où le choc des civilisations peut rester à l'état de fantasme ou basculer dans la réalité la plus
tragique, nous devons conjuguer nos efforts pour atteindre une coexistence paisible, respectueuse de
chacun sans renier nos convictions profondes, dans une zone de paix et de prospérité. Cette perspective
rencontre, me semble-t-il, l'intérêt du Saint-Siège.
Mais ce que j'ai le plus à coeur de vous dire, c'est que dans ce monde paradoxal, obsédé par le confort
matériel, tout en étant chaque jour de plus en plus en quête de sens et d'identité, la France a besoin de
catholiques convaincus qui ne craignent pas d'affirmer ce qu'ils sont et ce en quoi ils croient. La campagne
électorale de 2007 a montré que les Français avaient envie de politique pour peu qu'on leur propose des
idées, des projets, des ambitions. Ma conviction est qu'ils sont aussi en attente de spiritualité, de valeurs,
d'espérance.
Henri de Lubac, ce grand ami de Benoît XVI, « La vie attire, comme la joie ». C'est pourquoi la France a
besoin de catholiques heureux qui témoignent de leur espérance.
Depuis toujours, la France rayonne à travers le monde par la générosité et l'intelligence. C'est pourquoi elle
a besoin de catholiques pleinement chrétiens, et de chrétiens pleinement actifs.
La France a besoin de croire à nouveau qu'elle n'a pas à subir l'avenir, parce qu'elle a à le construire. C'est
pourquoi elle a besoin du témoignage de ceux qui, portés par une espérance qui les dépasse, se remettent
en route chaque matin pour construire un monde plus juste et plus généreux.
J'ai offert ce matin au Saint Père deux éditions originales de Bernanos. Permettez-moi de conclure avec lui :
« L'avenir est quelque chose qui se surmonte. On ne subit pas l'avenir, on le fait [...] L'optimisme est une
fausse espérance à l'usage des lâches [...]. L'espérance est une vertu, une détermination héroïque de l'âme.
La plus haute forme de l'espérance, c'est le désespoir surmonté ». Comme je comprends l'attachement du
pape à ce grand écrivain qu'est Bernanos !
Partout où vous agirez, dans les banlieues, dans les institutions, auprès des jeunes, dans le dialogue interreligieux, dans les universités, je vous soutiendrai. La France a besoin de votre générosité, de votre courage,
de votre espérance.
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Jurisprudence administrative
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Tribunal administratif de Paris, n° 0702693/7, 5 juillet 2007, SYNDICAT NATIONAL
DES PROFESSIONNELS DE LA KINESIOLOGIE.
les dispositions précitées de la loi du 17 juillet 1978 n’ont pas pour objet ou pour effet de charger
l’administration de procéder à des recherches en vue de fournir ou de reconstituer pour le
demandeur une documentation sur un sujet donné ; que, par suite, en refusant la communication
de « l’ensemble des documents qui ont servi de support à la rédaction des développements
concernant la kinésiologie et figurant dans le rapport de la MIVILUDES pour l’année 2005 » au
syndicat requérant, dont la demande était dépourvue de toute précision quant à la nature des
pièces demandées, l’administration n’a pas méconnu les dispositions de l’article 2 et, en tout état
de cause, de l’article 3 de la loi du 17 juillet 1978
Tribunal administratif de Paris, n°0601801/5, 14 novembre 2007, M. Mourad B.
Le requérant, gardien de la paix stagiaire, a, à maintes reprises, manifesté dans l’exercice de ses
fonctions un militantisme religieux, créant des conflits avec ses collègues ; qu’il a ainsi manqué au
principe de laïcité et à l’obligation de neutralité qui s’impose à tout agent public.
Tribunal administratif de Rouen, nos 0402836 – 0402837 – 0501823 – 0501828 –
0503175 – 0600475 – 0700317 – 0700318 – 0700661 – 0700662, 16 octobre 2007,
ASSOCIATION CULTUELLE LECTORIUM ROSICRUCIANUM.
Il ne résulte aucunement de l’instruction que les maisons d’habitation susmentionnées sises
respectivement sur le territoire des communes de (…) et comprenant chacune cuisine, salle à
manger, salle de bain et plusieurs chambres seraient affectées à un usage autre que purement
privatif à destination des membres de l’association requérante ; que celle-ci ne peut, dès lors,
sérieusement demander qu’ils soient exonérés de taxe d’habitation et de taxe foncière.
Tribunal administratif de Versailles, n° 0600977, 26 octobre 2007, Mme Christine E.
Si l’avis du conseil d’Etat du 3 mai 2000 porte en particulier sur le cas d’un agent du service public
de l’enseignement, il précise également qu’il résulte des textes constitutionnels et législatifs que le
principe de liberté de conscience ainsi que celui de la laïcité de l’Etat et de neutralité des services
publics s’appliquent à l’ensemble des services publics ; que si les agents publics bénéficient
comme tous les citoyens de la liberté de conscience et de religion édictée par les textes
constitutionnels, conventionnels et législatifs, qui prohibent toute discrimination fondée sur leurs
croyances religieuses ou leur athéisme, notamment pour l’accès aux fonctions, le déroulement de
carrière ou encore le régime disciplinaire, le principe de laïcité de l’Etat et de ses démembrements
et celui de la neutralité des services publics font obstacle à ce que ses agents disposent, dans
l’exercice de leurs fonctions, du droit de manifester leurs croyances religieuses, notamment par
une extériorisation vestimentaire ; que ce principe, vise à protéger les usagers du service de tout
risque d’influence ou d’atteinte à leur propre liberté de conscience.
Tribunal administratif de Toulouse, n°0603496, 5 novembre 2007, M. Raphaël R.
Le requérant a présenté par une lettre en date du 15 juin 2006, soit dans le délai du recours
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contentieux ouvert contre la décision litigieuse, une demande de communication des motifs de la
décision implicite de rejet de sa demande d’agrément en qualité d’aumônier du centre
pénitentiaire de M. du 25 février 2006 ; qu’il est constant que, bien que la demande ait été
adressée au ministre de la justice, l’administration n’a pas communiqué les motifs de cette
décision dans le délai d’un mois prévu par la disposition précitée; que, dès lors, la décision
implicite de rejet est entachée d’illégalité.
Tribunal administratif de Dijon, n°0600661, 13 novembre 2007, M. Bernard R.
Pour établir le comportement, équivoque et fautif du vérificateur, qui aurait délibérément cherché
à lui nuire, M. R. soutient que ce dernier entretenait des rapports étroits, en raison de ses liens
avec l’Eglise de Scientologie, avec la propriétaire des locaux professionnels qu’il louait ; qu’il fait
notamment valoir que seule cette relation peut expliquer la mention manuscrite portée sur la fiche
de programmation des opérations de contrôle indiquant que l’affaire a été attribuée au
vérificateur « à sa demande » ;
Considérant cependant, qu’il ne résulte pas de l’instruction que le vérificateur ayant été en charge
du dossier de M. R. pour les années 1996 et 1997 soit un membre actif ou un sympathisant de
l’Eglise de Scientologie, ni qu’il soit entré en contact, par cette appartenance avec son bailleur ;
qu’ainsi, la mention manuscrite portée sur la fiche de programmation des opérations de contrôle
n’est pas de nature à faire regarder comme anormale l’attribution au vérificateur, sur sa
demande, de ce dossier par son supérieur hiérarchique et comme révélant un soi disant fait de
« concussion » ; qu’enfin, il ne résulte pas de l’instruction que le comportement du vérificateur ait
été guidé par une volonté délibérée de nuire ou que ce dernier ait refusé d’engager un débat oral
et contradictoire avec le contribuable ou son représentant.
Tribunal administratif de Strasbourg, n0505482, 20 novembre 2007, M. et Mme
Thierry G.
Eu égard aux dispositions de l’article L. 911-1 du code de l’éducation, il n’appartient pas à la
juridiction administrative de connaître d’un recours indemnitaire contre le directeur d’un
établissement public local d’enseignement agricole et horticole, introduit par les parents d’une
élève qui a déclaré en classe être témoin de Jéhovah et avoir ainsi été la cible par les autres
élèves de l’établissement d’une attitude discriminatoire à son égard
Tribunal administratif de Bordeaux, ord. Ref., n°0705282, 18 décembre 2007,
FEDERATION CHRETIENNE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE FRANCE et M. et Mme M.
La mise en garde du public scolaire contre le risque social lié au prosélytisme de mouvements
sectaires paraît relever de la mission éducative confiée aux établissements d’enseignement par les
textes législatifs et réglementaires qui les régissent ; qu’en admettant que la note incriminée ait à
tort assimilé les Témoins de Jéhovah à une secte dangereuse, il n’en résulte pas nécessairement
l’illégalité d’une décision autorisant la tenue d’une conférence destinée à mettre en garde les
lycéens contre les périls des dérives sectaires ; que la circonstance que cette autorisation rendrait
possible l’expression de propos excessifs ou diffamatoires à l’encontre du mouvement des
Témoins de Jéhovah ne saurait, par elle-même, justifier la suspension d’exécution demandée, le
prononcé en référé d’une telle mesure ne pouvant être l’instrument d’une censure préventive du
contenu supposé de réunions publiques ; qu’il résulte de ce qui précède que les conclusions aux
fins de suspension susvisées doivent, en tout état de cause, être rejetées.
Cour administrative d’appel de Paris, n° 04PA00568, 7 juin 2007, FEDERATION
CHRETIENNE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE France
Un rapport établi pour l'information du législateur dans le cadre des travaux d'une commission
d’enquête parlementaire, qui n'est pas par lui-même un acte administratif et ne se rattache à
aucune activité de nature administrative, n'est pas détachable de la fonction de contrôle
constitutionnellement dévolue au Parlement pour qu'il l'exerce souverainement ; que, hors les cas
où le législateur y aurait lui-même consenti, il n'appartient au juge administratif de connaître ni
des actes relatifs à cette fonction, ni des conditions dans lesquelles celle-ci s'exerce, ni même des
conséquences pouvant en résulter ; qu'il s'ensuit que la compétence pour en connaître ne lui
ayant pas été, fût-ce implicitement, conférée, les litiges trouvant leur cause dans un rapport
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parlementaire ne sauraient ressortir à la compétence du juge administratif ; que la circonstance
qu'aucune juridiction ne peut être saisie d'un tel litige ne saurait avoir pour conséquence
d'autoriser le juge administratif à se déclarer compétent.
Cour administrative d’appel de Marseille, n°05MA00225, 17 octobre 2007, COMMUNE
DE M.
Un bâtiment destiné à l’exercice d’un culte ne saurait être regardé comme une construction à
usage d’équipements collectifs ou de service au sens des dispositions précitées de l’article UE1 du
règlement du plan d’occupation des sols de M., dès lors qu’il résulte de ce règlement que la zone
UE a essentiellement une vocation économique et commerciale ; qu’ainsi, l’édifice envisagé par
l’association locale pour le culte des témoins de Jéhovah de X. Y. , destiné à l’exercice d’un culte,
ne figure pas au nombre des constructions admises dans la zone UE ; que, dans ces conditions, le
maire de M. n’a pas fait une inexacte application du règlement de la zone UE du plan d’occupation
des sols en délivrant un certificat d’urbanisme négatif à l’association locale pour le culte des
témoins de Jéhovah de X. Y. (Annulation du jugement).
Cour administrative d’appel de Nancy, n°06NC01625, 6 décembre 2007,
DEPARTEMENT DES ARDENNES c/ M. et Mme S.
En réservant la gratuité aux seuls collégiens fréquentant l’établissement privé le plus proche de
leur secteur scolaire, le DEPARTEMENT DES ARDENNES établit une sectorisation scolaire
comparable à celle prévalant pour les seuls établissements publics ; qu’il favorise ainsi l’exercice
effectif de la liberté de l’enseignement consacrée par l’article premier de la loi susvisée du 31
décembre 1959, désormais codifié sous l’article L. 151-1 du code de l’éducation, et ne viole ni la
laïcité républicaine, ni la liberté de conscience des collégiens et de leurs parents.
CE, ord. Ref., n° 310221, 22 novembre 2007, FEDERATION CHRETIENNE DES
TEMOINS DE JEHOVAH DE France.
Rejet de la demande de suspension de l'exécution de la décision de la mission interministérielle de
vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) de mettre en ligne sur son site
Internet un extrait de la 4ème couverture du livre de M. Nicolas J. intitulé « Nicolas, 25 ans,
rescapé des témoins de Jéhovah.
Conseil d’Etat, n° 285394, 5 décembre 2007, M. S.
Conseil d’Etat, n° 285395, 5 décembre 2007, M. S.
Conseil d’Etat, n° 285396, 5 décembre 2007, M. S.
Conseil d’Etat, n° 295671, 5 décembre 2007, M. et Mme G.
Si les élèves des écoles, collèges et lycées publics peuvent porter des signes religieux discrets,
sont en revanche interdits, d'une part, les signes ou tenues, tels notamment un voile ou un
foulard islamique, une kippa ou une grande croix, dont le port, par lui?même, manifeste
ostensiblement une appartenance religieuse, d'autre part, ceux dont le port ne manifeste
ostensiblement une appartenance religieuse qu'en raison du comportement de l'élève ;
Conseil d’Etat, n°294439, 19 décembre 2007, M. V.
Le régime applicable aux établissements publics du culte dans les départements du Bas-Rhin, du
Haut-Rhin et de la Moselle ne relève pas de la compétence exclusive du législateur et peut être
réformé par des dispositions réglementaires dès lors que ces dispositions n’ont pour effet ni de
créer une nouvelle catégorie d’établissement public ni de modifier, dans un sens ou dans l’autre,
les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice de la liberté du culte ; que,
s’agissant de l'Eglise protestante réformée d'Alsace et de Lorraine, le décret attaqué ne confie
aucun pouvoir propre de décision aux organes de l’Union ; qu’en particulier, contrairement à ce
que soutient le requérant, la seule circonstance que ce décret, d’une part, substitue l’avis
facultatif du conseil restreint de l’Union à l’avis facultatif du conseil synodal sur les admissions au
ministère pastoral, alors même que les consistoires conservent leur pouvoir de nomination, et
d’autre part, en matière de création et de transfert de postes pastoraux, substitue au pouvoir
d’approbation du conseil synodal le pouvoir d’approbation du conseil restreint de l’Union, alors
même que les consistoires conservent leur pouvoir de proposition, ne suffit pas, par elle-même, à
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porter atteinte aux garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice de la liberté
du culte.
Conseil d’Etat, n° 295828,310522, 19 décembre 2007, CONSEIL PRESBYTERAL DE
L'EGLISE REFORMEE DE SARREBOURG et autres
La délibération attaquée, qui porte sur un projet de création d’une Union des Eglises protestantes
d'Alsace et de Lorraine, « chargée de conduire des actions communes et de resserrer les liens
entre les deux Eglises protestantes d'Alsace et de Lorraine » ainsi que sur la création d’un corps
pastoral unique et d’une commission des ministères commune chargée de délivrer aux candidats
au ministère pastoral un certificat d’aptitude aux fonctions pastorales, constitue non un acte
faisant grief mais un vœu adressé au gouvernement, manifestement insusceptible de faire l'objet
d'un recours devant le juge de l'excès de pouvoir ; que, dès lors, ni le CONSEIL PRESBYTERAL DE
L'EGLISE REFORMEE DE SARREBOURG et autres, ni M. G. ne sont recevables à en demander
l’annulation.
M. G., qui ne soutient pas être membre de l’église de la Confession d’Augsbourg d’Alsace et de
Lorraine, est sans intérêt et partant sans qualité pour demander l’annulation de la délibération
susvisée du consistoire supérieur de cette église, contre laquelle il ne formule d’ailleurs aucun
moyen.
Conseil d’Etat, n°282100, 21 décembre 2007, M. B. et autres
Si les requérants font valoir qu’en rendant illégal l’usage de l’Ayahuasca ou du Daime, alors qu’ils
sont utilisés lors de cérémonies organisées par des associations telles que « l’Eglise du Santo
Daime », l'arrêté du 20 avril 2005 du ministre de la solidarité, de la santé et de la famille fixant la
liste des plantes et substances classées comme stupéfiants, en tant qu'il classe les plantes
« Psychotria viridis » et « Banisteriopsis caapi » parmi les substances stupéfiantes, porte atteinte
à la fois à la liberté de pensée, de conscience et de religion, garantie tant par la Constitution que
par les articles 9 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des
libertés fondamentales et 18 et 19 du pacte international relatif aux droits civils et politiques, ainsi
qu’au respect de la vie privée garanti par l’article 8 de cette même convention et par l’article 9 du
code civil, les atteintes portées par l’arrêté attaqué ne sont ni excessives ni disproportionnées au
regard des préoccupations de santé publique.
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TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PARIS
N° 0702693/7
REPUBLIQUE FRANCAISE
___________
SYNDICAT NATIONAL DES
PROFESSIONNELS DE LA
KINESIOLOGIE
___________
Mme Sirinelli
Rapporteur
___________
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Tribunal administratif de Paris,
(7ème section, 1ère chambre),
Mme Fuchs
Commissaire du Gouvernement
___________
Audience du 7 juin 2007
Lecture du 5 juillet 2007
___________
Vu la requête, enregistrée le 23 février 2007, présentée par le SYNDICAT NATIONAL DES
PROFESSIONNELS DE LA KINESIOLOGIE, dont le siège est (…) ; le SYNDICAT NATIONAL DES
PROFESSIONNELS DE LA KINESIOLOGIE demande au Tribunal :
1) d’annuler la décision implicite de refus opposée par la mission interministérielle de vigilance et de
lutte
contre
les
dérives
sectaires
(MIVILUDES)
à
sa
demande
du
19 septembre 2006 concernant l’accès à certains documents administratifs ;
2) d’enjoindre à l’administration de lui communiquer l’ensemble des documents ayant servi de support
à la rédaction des développements concernant la kinésiologie et figurant dans le rapport de la
MIVILUDES pour l’année 2005, dans un délai de huit jours à compter de la notification du jugement
à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
3) de condamner l’Etat aux entiers dépens en application de l’article L 761-1 du code de justice
administrative ;
…………………………………………………………………………………………………
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 juin 2007 :
- le rapport de Mme Sirinelli, rapporteur ;
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- les observations de Maître Jacquot, représentant le SYNDICAT NATIONAL DES
PROFESSIONNELS DE LA KINESIOLOGIE ;
- et les conclusions de Mme Fuchs, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par un courrier du 19 septembre 2006, le SYNDICAT NATIONAL DES
PROFESSIONNELS DE LA KINESIOLOGIE a demandé à la mission interministérielle de vigilance et de lutte
contre les dérives sectaires (MIVILUDES) communication de « l’ensemble des documents qui ont servi de
support à la rédaction des développements concernant la kinésiologie et figurant dans le rapport de la
MIVILUDES pour l’année 2005 » ; qu’à la suite du refus qui lui a été opposé le 9 octobre 2006, le
syndicat requérant a saisi le 23 octobre 2006 la commission d’accès aux documents administratifs d’une
demande d’avis, enregistrée le 25 octobre suivant ; que, par courrier du 24 novembre 2006, ladite
commission a notifié au syndicat intéressé que, lors de sa séance du 23 novembre 2006, elle avait émis
un avis défavorable à la communication du document sollicité, en application du paragraphe I de l’article
6 de la loi susvisée du 17 juillet 1978 ; que le SYNDICAT NATIONAL DES PROFESSIONNELS DE LA
KINESIOLOGIE demande l’annulation de la décision implicite de refus de communication née du silence
gardé par la MIVILUDES dans le délai de deux mois suivant la saisine de cette commission ;
Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article 1er de la loi du 17 juillet 1978 susvisée :
« Le droit de toute personne à l'information est précisé et garanti par les dispositions des chapitres Ier,
III et IV du présent titre en ce qui concerne la liberté d'accès aux documents administratifs./ Sont
considérés comme documents administratifs, au sens des chapitres Ier, III et IV du présent titre, quel
que soit le support utilisé pour la saisie, le stockage ou la transmission des informations qui en
composent le contenu, les documents élaborés ou détenus par l'Etat, les collectivités territoriales ainsi
que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées de la gestion d'un
service public, dans le cadre de leur mission de service public. Constituent de tels documents notamment
les dossiers, rapports, études, comptes rendus, procès-verbaux, statistiques, directives, instructions,
circulaires, notes et réponses ministérielles, correspondances, avis, prévisions et décisions (…) » ; qu'aux
termes des dispositions de l'article 2 de la même loi : « Sous réserve des dispositions de l'article 6, les
autorités mentionnées à l’article 1er sont tenues de communiquer les documents administratifs qu’elles
détiennent aux personnes qui en font la demande (…) » ; qu’aux termes de l’article 3 de cette loi : « (…)
Toute personne a le droit de connaître les informations contenues dans un document administratif dont
les conclusions lui sont opposées » ; qu'enfin, aux termes des dispositions de l'article 6 du même texte :
« I. Ne sont pas communicables les documents administratifs dont la consultation ou la communication
porterait atteinte : (…) à la sûreté de l’Etat, à la sécurité publique ou à la sécurité des personnes (…) » ;
Considérant que les dispositions précitées de la loi du 17 juillet 1978 n’ont pas pour objet ou pour
effet de charger l’administration de procéder à des recherches en vue de fournir ou de reconstituer pour
le demandeur une documentation sur un sujet donné ; que, par suite, en refusant la communication de
« l’ensemble des documents qui ont servi de support à la rédaction des développements concernant la
kinésiologie et figurant dans le rapport de la MIVILUDES pour l’année 2005 » au syndicat requérant, dont
la demande était dépourvue de toute précision quant à la nature des pièces demandées, l’administration
n’a pas méconnu les dispositions de l’article 2 et, en tout état de cause, de l’article 3 de la loi du 17 juillet
1978 ; qu’enfin, la MIVILUDES pouvant régulièrement refuser la communication demandée pour ce seul
motif, il n’y a pas lieu d’examiner le moyen relatif aux dispositions de l’article 6-I de cette loi ;
Considérant, en second lieu, qu’il ne ressort pas des circonstances de l’espèce, telles qu’elles ont
été exposées ci-dessus, que le refus de communication opposé par l’administration à la demande du
syndicat requérant aurait méconnu le principe général du respect des droits de la défense ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin pour le Tribunal de demander,
avant-dire-droit, la communication des documents en litige, que la demande d’annulation présentée par
le syndicat requérant doit être rejetée ; que, par voie de conséquence, il ne peut davantage être fait droit
à ses conclusions aux fins d’injonction et d’astreinte ;
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Sur l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : "Dans toutes
les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à
l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge
tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office,
pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant qu'en vertu des dispositions précitées de l’article L. 761-1 du code de justice
administrative, le Tribunal ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie
des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées par le
SYNDICAT NATIONAL DES PROFESSIONNELS DE LA KINESIOLOGIE sur le fondement de ces dispositions
doivent dès lors, et en tout état de cause, être rejetées ;
DECIDE:
Article 1er : La requête du SYNDICAT NATIONAL DES PROFESSIONNELS DE LA KINESIOLOGIE est
rejetée.
Article 2 : Le présent jugement sera notifié au SYNDICAT NATIONAL DES PROFESSIONNELS DE LA
KINESIOLOGIE et au Premier ministre.
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TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PARIS
N°0601801/5
___________
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
M. Mourad B.
___________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
M. Pagès
Rapporteur
___________
Le Tribunal administratif de Paris
M. Chazan
Commissaire du gouvernement
___________
(5ème Section - 3ème Chambre )
Audience du 17 octobre 2007
Lecture du 14 novembre 2007
___________
Vu la requête, enregistrée le 4 février 2006, présentée pour M. Mourad B., demeurant (…), par Me
Mounzer, avocat ;
M. B. demande que le Tribunal :
1°) annule l’arrêté du 1er décembre 2005 par lequel le préfet de police a refusé de le titulariser à
issue de son stage de gardien de la paix et l’a licencié ;
2°) enjoigne au préfet de police de le réintégrer dans ses précédentes fonctions et de lui verser la
rémunération qu’il aurait dû percevoir entre le 1er décembre 2005 et le jour de sa réintégration effective ;
3°) condamne l’Etat à lui verser la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles ;
……………………………………………………………………………………………………
Vu la décision attaquée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée ;
Vu le décret n° 2004-1439 du 23 décembre 2004 ;
Vu le code de justice administrative ;
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Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 octobre 2007,
- le rapport de M. Pagès, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Chazan, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. B. conteste l’arrêté du 1er décembre 2005 par lequel le préfet de police a
refusé de le titulariser à l’issue de son stage de gardien de la paix et a prononcé son licenciement ;
Considérant, en premier lieu, qu’une décision portant refus de titularisation et licenciement en fin de
stage n’est au nombre ni des décisions qui doivent être motivées en application de la loi susvisée du 11
juillet 1979, ni des décisions dont l’intervention doit être précédée de la communication de son dossier à
l’intéressé ; que les moyens tirés du vice de procédure et du défaut de motivation doivent donc être
écartés ;
Considérant, en deuxième lieu, que M. B. n’est pas fondé à invoquer une violation de la règle du
« non bis in idem » dès lors que l’arrêté attaqué n’est pas une sanction disciplinaire et que rien n’interdisait
à l’administration de prendre en compte les faits ayant donné lieu à un blâme lors de la formation de
l’intéressé à l’école de police nationale ; que ce moyen doit donc également être écarté ;
Considérant, en troisième lieu, que le requérant, outre quelques négligences dans le service a, à
maintes reprises, manifesté dans l’exercice de ses fonctions un militantisme religieux, créant des conflits
avec ses collègues ; qu’il a ainsi manqué au principe de laïcité et à l’obligation de neutralité qui s’impose à
tout agent public ; que, dès lors, M. B. n’est fondé à soutenir ni que l’arrêté repose sur des faits
matériellement inexacts ni que l’appréciation par le préfet de police de son aptitude professionnelle, qui doit
prendre en compte l’ensemble de son comportement dans le travail, a été entachée d’une erreur manifeste
d’appréciation ;
Considérant, en dernier lieu, que le détournement de pouvoir allégué n’est pas établi ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. B. n’est pas fondé à demander l’annulation de
l’arrêté susvisé du 1er décembre 2005 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d’injonction et
ses conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative doivent
également être rejetées ;
DECIDE:
Article 1er : La requête de M. B. est rejetée.
Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. Mourad B. et au ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des
collectivités territoriales. Copie en sera adressée au préfet de police.
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TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE ROUEN
Nos 0402836 – 0402837 – 0501823 – 0501828 –
0503175 – 0600475 – 0700317 – 0700318 –
0700661 – 0700662
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
___________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ASSOCIATION CULTUELLE LECTORIUM
ROSICRUCIANUM
Le Tribunal administratif de Rouen
___________
Le magistrat-délégué
M. Marjanovic
Magistrat-délégué
___________
M. L’Etang
Commissaire du gouvernement
___________
Audience du 25 septembre 2007
Lecture du 16 octobre 2007
___________
Vu 1°), sous le n° 0402836, la requête enregistrée le 23 décembre 2004, présentée pour
l’association cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM dont le siège est (…), par Me Guiroy, avocat à la cour ;
l’association cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM demande :
la décharge de la taxe d’habitation à laquelle elle a été assujettie au titre de l’année 2003
dans les rôles de la commune de Longroy (Seine-Maritime) ;
la condamnation de l’administration à lui verser une somme de 1 800 euros au titre des
frais irrépétibles ;
………………………………………………………………………………………………………….
Vu 2°), sous le n° 0402837, la requête enregistrée le 23 décembre 2004, présentée pour
l’association cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM dont le siège est (…), par Me Guiroy, avocat à la cour ;
l’association cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM demande :
la décharge de la taxe d’habitation à laquelle elle a été assujettie au titre de l’année 2003
dans les rôles de la commune de G. (Seine-Maritime) ;
la condamnation de l’administration à lui verser une somme de 1 800 euros au titre des
frais irrépétibles ;
Vu 3°), sous le n° 0501823, la requête enregistrée le 23 juillet 2005, présentée pour l’association
cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM dont le siège est (…), par Me Guiroy, avocat à la cour ; l’association
cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM demande :
la décharge de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au
titre de l’année 2004 dans les rôles de la commune de G. (Seine-Maritime) ;
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la condamnation de l’administration à lui verser une somme de 1 800 euros au titre des
frais irrépétibles ;
………………………………………………………………………………………………………..
-
Vu 4°), sous le n° 0501828, la requête enregistrée le 23 juillet 2005, présentée pour l’association
cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM dont le siège est (…), par Me Guiroy, avocat à la cour ; l’association
cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM demande :
la décharge de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au
titre de l’année 2004 dans les rôles de la commune de Longroy (Seine-Maritime) ;
la condamnation de l’administration à lui verser une somme de 1 800 euros au titre des
frais irrépétibles ;
………………………………………………………………………………………………………….
Vu 5°), sous le n° 0503175, la réclamation adressée à l’administration des impôts, transmise au
Tribunal par application de l’article R 199-1 du livre des procédures fiscales et enregistrée
le 30 décembre 2005, présentée pour l’association cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM dont le siège est
(…), parMe Guiroy, avocat à la cour ; l’association cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM demande la
décharge de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au titre de l’année 2005
dans les rôles de la commune de G. (Seine-Maritime) ;
………………………………………………………………………………………………………….
Vu le mémoire enregistré le 29 mars 2006, présenté pour l’association cultuelle LECTORIUM
ROSICRUCIANUM qui conclut aux mêmes fins que sa réclamation et demande, en outre, la condamnation de
l’administration à lui verser une somme de 1 800 euros au titre des frais irrépétibles ;
……………………………………………………………………………………………………….
Vu 6°), sous le n° 0600475, la requête enregistrée le 13 février 2006, présentée pour l’association
cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM dont le siège est (…), par Me Guiroy, avocat à la cour ; l’association
cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM demande :
la décharge de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au
titre de l’année 2005 dans les rôles de la commune de Longroy (Seine-Maritime) ;
la condamnation de l’administration à lui verser une somme de 1 800 euros au titre des
frais irrépétibles ;
Vu 7°), sous le n° 0700317, la requête enregistrée le 5 février 2007, présentée pour l’association
cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM dont le siège est (…), par Me Guiroy, avocat à la cour ; l’association
cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM demande :
la décharge de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au
titre de l’année 2005 dans les rôles de la commune de G. (Seine-Maritime) ;
la condamnation de l’administration à lui verser une somme de 1 800 euros au titre des
frais irrépétibles ;
…………………………………………………………………………………………………………
Vu 8°), sous le n° 0700318, la requête enregistrée le 5 février 2007, présentée pour l’association
cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM dont le siège est (…), par Me Guiroy, avocat à la cour ; l’association
cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM demande :
la décharge de la taxe d’habitation à laquelle elle a été assujettie au titre de l’année 2005
dans les rôles de la commune de G. (Seine-Maritime) ;
la condamnation de l’administration à lui verser une somme de 1 800 euros au titre des
frais irrépétibles ;
…………………………………………………………………………………………………………
Vu 9°), sous le n° 0700661, la réclamation adressée à l’administration des impôts, transmise au
Tribunal par application de l’article R 199-1 du livre des procédures fiscales et enregistrée
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le 15 mars 2007, présentée pour l’association cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM dont le siège est (…),
par Me Guiroy, avocat à la cour ; l’association cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM demande la décharge
de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au titre de l’année 2006 dans les
rôles de la commune de Longroy (Seine-Maritime) ;
………………………………………………………………………………………………………….
Vu le mémoire enregistré le 16 avril 2007, présenté pour l’association cultuelle LECTORIUM
ROSICRUCIANUM qui conclut aux mêmes fins que sa réclamation et demande, en outre, la condamnation de
l’administration à lui verser une somme de 1 800 euros au titre des frais irrépétibles ;
………………………………………………………………………………………………………….
Vu 10°), sous le n° 0700662, la réclamation adressée à l’administration des impôts, transmise au
Tribunal par application de l’article R 199-1 du livre des procédures fiscales et enregistrée le 15 mars 2007,
présentée pour l’association cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM dont le siège est (…), par Me Guiroy,
avocat à la cour ; l’association cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM demande la décharge de la taxe
foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au titre de l’année 2006 dans les rôles de la
commune de G. (Seine-Maritime) ;
………………………………………………………………………………………………………….
Vu le mémoire enregistré le 16 avril 2007, présenté pour l’association cultuelle LECTORIUM
ROSICRUCIANUM qui conclut aux mêmes fins que sa réclamation et demande, en outre, la condamnation de
l’administration à lui verser une somme de 1 800 euros au titre des frais irrépétibles ;
Vu la décision en date du 2 janvier 2007 par laquelle le président du tribunal administratif de Rouen
a désigné M. Marjanovic, conseiller, aux fins de statuer sur les litiges énumérés à l’article
R 222-13 du code de justice administrative ;
Vu les décisions attaquées ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir au cours de l'audience publique du 25 septembre 2007, présenté son rapport et
entendu :
- les observations orales de Mme Canu, pour le directeur des services fiscaux de la
Seine-Maritime,
- et les conclusions de M. L’Etang, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes susvisées n° 0402836, n° 0402837, n° 0501823, n° 0501828,
n° 0600475, n° 0700317, n° 0700318 et les réclamations n° 0503175, n° 0700661 et n° 0700662 de
l’association cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM concernent un même contribuable et présentent à juger
des questions en partie semblables ; qu’elles ont fait l’objet d’une instruction commune ; qu’il y a lieu de les
joindre pour statuer par un même jugement ;
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Considérant que l’association cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM, dont les services fiscaux du
département de la Seine-Maritime n’ont pas, à ce jour, remis en cause le caractère cultuel et dont le
« temple » affecté à l’exercice du culte qu’elle prétend exercer est situé sur le territoire de la commune de
(…), est également propriétaire, d’une part, dans la même commune, d’une maison d’habitation d’une
superficie de 120 m2 et, d’autre part, d’un château, dit « Château de la Haye », et d’une maison d’habitation
de 145 m2 situés dans le même département, sur le territoire de la commune de G. ; que l’association
requérante, dont le « temple » n’a été imposé ni à la taxe foncière, ni à la taxe d’habitation, conteste
l’assujettissement à ces deux impôts des trois immeubles susmentionnés ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 1407 du code général des impôts : « I. La taxe
d'habitation est due : ...2° Pour les locaux meublés conformément à leur destination et occupés à titre
privatif par les sociétés, associations et organismes privés et qui ne sont pas retenus pour l'établissement
de la taxe professionnelle ... » et qu’aux termes de l'article 4 de la loi du 2 janvier 1907 :
« Indépendamment des associations soumises aux dispositions du titre IV de la loi du
9 décembre 1905, l'exercice public d'un culte peut être assuré tant au moyen d'associations régies par la loi
du 1er juillet 1901 (articles 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 12 et 17) que par voie de réunions tenues sur initiatives
individuelles en vertu de la loi du 30 juin 1881 et selon les prescriptions de l'article 25 de la loi du 9
décembre 1905 » ; que l’article 25 de la loi du 9 décembre 1905 dispose : « Les réunions pour la
célébration d'un culte tenues dans les locaux appartenant à une association cultuelle ou mis à sa disposition
sont publiques. Elles sont dispensées des formalités de l'article 8 de la loi du 30 juin 1881, mais restent
placées sous la surveillance des autorités dans l'intérêt de l'ordre public » ; qu’il résulte de la combinaison
de ces dispositions que ne peuvent être regardés comme occupés à titre privatif les locaux affectés
exclusivement à l’exercice public d’un culte et gérés selon l’une des modalités prévues à l’article 25 de la loi
du 9 décembre 1905 et à l’article 4 de la loi du 2 janvier 1907 ;
Considérant, d’autre part, qu’en application du 4° de l’article 1382 du code général des impôts, sont
dispensés de la taxe foncière sur les propriétés bâties, les édifices affectés à l’exercice du culte ; qu’il résulte
de ces dispositions que sont exclus de l’exonération les bâtiments ou parties de bâtiment qui n’auraient pas
cette destination immédiate, ce qui exclut les locaux à usage privatif ainsi que ceux où se tiennent des
activités connexes à l’exercice d’un culte ;
Considérant, d’une part, qu’il ne résulte aucunement de l’instruction que les maisons d’habitation
susmentionnées sises respectivement sur le territoire des communes de (…) et comprenant chacune cuisine,
salle à manger, salle de bain et plusieurs chambres seraient affectées à un usage autre que purement privatif
à destination des membres de l’association requérante ; que celle-ci ne peut, dès lors, sérieusement
demander qu’ils soient exonérés de taxe d’habitation et de taxe foncière ;
Considérant, d’autre part, qu’à supposer même que le Château de la Haye, situé à plus de cinq
kilomètres du « temple », soit affecté à la méditation, la préparation, la distribution et le partage des repas
végétariens ou le respect des normes strictes de pureté et d’hygiène des personnes et des lieux, ces activités,
en tout état de cause connexes aux pratiques occultistes de la société requérante, ne sauraient justifier que
l’immeuble dans lequel elles se déroulent soit exonéré de taxe foncière et de taxe d’habitation en application
des dispositions susrappelées ;
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que l’association cultuelle LECTORIUM
ROSICRUCIANUM, qui ne peut utilement se prévaloir de l’autorité de chose jugée qui s’attache au jugement
définitif rendu le 28 décembre 2001 par le Tribunal de céans et admettant l’exonération de taxe foncière du
seul « complexe de temples » situé à (…), n’est pas fondée à demander la décharge des impositions qu’elle
conteste ;
Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L.761-1 du code
de justice administrative :
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Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les
instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre
partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient
compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des
raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation » ;
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l’ Etat, qui n’ est pas partie perdante dans la
présente instance, soit condamné à payer à l’association cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM la somme
qu’ elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE:
Article 1er : Les requêtes et réclamations de l’association cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM
sont rejetées.
Article 2 : Le présent jugement sera notifié à l’association cultuelle LECTORIUM ROSICRUCIANUM
et au directeur des services fiscaux de la Seine-Maritime.
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TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
N° 0600977
___________
Mme Christine E.
___________
Mme Orio
Rapporteur
___________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Tribunal administratif de Versailles
M. Grimaud
Commissaire du Gouvernement
___________
(4ème Chambre)
Audience du 12 octobre 2007
Lecture du 26 octobre 2007
___________
Vu l’ordonnance, en date du 26 janvier 2006, par laquelle le président du tribunal administratif de
Paris a transmis au tribunal administratif de Versailles la requête enregistrée le 13 janvier 2006 pour Mme
E. ;
Vu la requête, enregistrée le 31 janvier 2006 au greffe du tribunal administratif de Versailles,
présentée pour Mme Christine E., demeurant (…), par Me Thiant, avocat ; Mme E. demande au tribunal :
- d’annuler la décision en date du 13 mai 2005 par laquelle le directeur du centre d'accueil et de
soins hospitaliers de Nanterre a refusé de renouveler son contrat de travail ;
- d’enjoindre au directeur du centre d'accueil et de soins hospitaliers de Nanterre de la réintégrer
dans ses fonctions ;
- de mettre à la charge du centre d'accueil et de soins hospitaliers de Nanterre une somme de
2.500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 27 août 2007, présentée pour le centre d’accueil et de soins
hospitaliers de Nanterre par Me Abecassis, avocate qui conclut à titre principal à l’irrecevabilité de la requête
et à titre subsidiaire à son rejet et à ce qu’il soit mis à la charge de Mme E. la somme de 2.000 euros ;
Vu la décision attaquée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la constitution de la République et notamment son article 1 ;
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Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
Vu le décret n° 91-155 du 6 février 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 octobre 2007 :
- le rapport de Mme Orio, conseiller ;
- les observations de Me Abecassis, avocate pour le centre d’accueil et de soins hospitaliers de
Nanterre ;
- et les conclusions de M. Grimaud, commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions à fin d’annulation, sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir
opposée par le centre d’accueil et de soins hospitaliers de Nanterre :
Paris :
En ce qui concerne le moyen tiré de la non-exécution de l’arrêt de la cour administrative d’appel de
Considérant que par un arrêt du 2 février 2004, la cour administrative d’appel de Paris a annulé pour
vice de procédure la décision du 11 décembre 2000 par laquelle la directrice des ressources humaines du
centre d’accueil et de soins hospitaliers de Nanterre a informé
Mme E. de ce que son contrat ne serait
pas renouvelé à compter du 31 décembre 2000 ;
Considérant que lorsque des décisions ont été annulées pour vice de forme ou vice de procédure
comme en l’espèce, l’autorité administrative, afin d’exécuter le jugement ou l’arrêt en cause, peut
légalement reprendre des décisions identiques à celles annulées, mais en respectant les procédures et les
formes prescrites ; qu’il ressort des pièces du dossier, que suite à l’arrêt de la Cour du 2 février 2004, le
centre d’accueil et de soins hospitaliers de Nanterre a invité la requérante, par lettre du 12 avril 2005, à
venir prendre connaissance de son dossier administratif en lui précisant qu’il lui était possible de se faire
assister des personnes de son choix ; que celle-ci n’est pas donc fondée à soutenir que son employeur
n’aurait pas exécuté l’arrêt de la Cour administrative d’appel en reprenant une décision de non
renouvellement ;
En ce qui concerne le moyen tiré de ce que le non-renouvellement serait infondé :
Considérant que Mme E. soutien que le non-renouvellement de son contrat serait infondé dès lors
que l’avis du conseil d’Etat mis en avant par son employeur pour justifier le licenciement ne s’applique
qu’aux enseignants ;
Considérant cependant que si l’avis du conseil d’Etat du 3 mai 2000 porte en particulier sur le cas
d’un agent du service public de l’enseignement, il précise également qu’il résulte des textes constitutionnels
et législatifs que le principe de liberté de conscience ainsi que celui de la laïcité de l’Etat et de neutralité des
services publics s’appliquent à l’ensemble des services publics ; que si les agents publics bénéficient comme
tous les citoyens de la liberté de conscience et de religion édictée par les textes constitutionnels,
conventionnels et législatifs, qui prohibent toute discrimination fondée sur leurs croyances religieuses ou leur
athéisme, notamment pour l’accès aux fonctions, le déroulement de carrière ou encore le régime
disciplinaire, le principe de laïcité de l’Etat et de ses démembrements et celui de la neutralité des services
publics font obstacle à ce que ses agents disposent, dans l’exercice de leurs fonctions, du droit de manifester
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leurs croyances religieuses, notamment par une extériorisation vestimentaire ; que ce principe, vise à
protéger les usagers du service de tout risque d’influence ou d’atteinte à leur propre liberté de conscience ;
Considérant qu’à raison des principes sus-énoncés relatifs à la manifestation d’opinions religieuses
au sein des services publics, l’autorité administrative, en décidant de ne pas renouveler le contrat
d’assistante sociale de Mme E. pour le motif implicite du port d’un vêtement manifestant, de manière
ostentatoire, l’appartenance à une religion n’a commis aucune illégalité ;
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de la loi du 9 janvier 1986 :
Considérant qu’aux termes de l’article 9 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée dans sa rédaction
applicable en l’ espèce: « : « Par dérogation à l’article 3 du titre Ier du statut général, les emplois
permanents ( …) peuvent être occupés par des agents contractuels lorsque la nature des fonctions ou les
besoins du service le justifient ( …) / Les établissements peuvent recruter des agents contractuels pour
assurer le remplacement momentané de fonctionnaires hospitaliers indisponibles ou autorisés à exercer leurs
fonctions à temps partiel. Ils peuvent également recruter des agents contractuels pour faire face
temporairement et pour une durée maximale d'un an à la vacance d'un emploi qui ne peut être
immédiatement pourvu dans les conditions prévues par le présent titre. / Ils peuvent, en outre, recruter des
agents contractuels pour exercer des fonctions occasionnelles pour une durée maximale d’un an » ;
Considérant que si Mme E. soutient que le centre d’accueil et de soins hospitaliers de Nanterre a
méconnu le texte précité en reconduisant son contrat à plusieurs reprises, ce moyen est sans incidence sur
la légalité de la décision de non-renouvellement attaquée ;
En ce qui concerne le moyen tiré du défaut d’information de la possibilité d’être recrutée sur titre :
Considérant que ce moyen est sans influence sur la légalité de la décision attaquée ;
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d’annulation présentées par
la requérante doivent être rejetées ;
Sur les conclusions à fin d’injonction :
Considérant qu'aux termes des dispositions de l’article L.911-1 du code de justice administrative :
« Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de
droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé,
la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas
échéant, d'un délai d'exécution. » ; qu’aux termes des dispositions de l’article L.911-2 du même code :
«Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de
droit privé chargé de la gestion d’un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle
instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle,
que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé » ;
Considérant que le présent jugement qui rejette les conclusions à fin d’annulation présentées par la
requérante n’appelle aucune mesure d’exécution ;
Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
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Considérant qu'aux termes de ces dispositions : « Dans toutes les instances, le juge condamne la
partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine
au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation
économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, ou pour des raisons tirées des mêmes
considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation » ;
Considérant que les dispositions précitées s’opposent à ce qu’il soit mis à la charge du centre
d’accueil et de soins hospitaliers de Nanterre qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante,
tout ou partie de la somme que Mme E. demande au titre des dispositions précitées ;
Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions
présentées par le centre d’accueil et de soins hospitaliers de Nanterre au titre des dispositions précitées ;
DECIDE:
Article 1er : La requête de Mme E. est rejetée.
Article 2 : Les conclusions à fin de frais irrépétibles présentées par le centre d’accueil et de soins hospitaliers
de Nanterre sont rejetées.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié à Mme Christine E. et au centre d'accueil et de soins hospitaliers
de Nanterre.
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TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE TOULOUSE
N°0603496
___________
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
M. Raphaël R.
___________
Mme Cabanne
Rapporteur
___________
M. Truilhé
Commissaire du gouvernement
___________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Tribunal administratif de Toulouse
(2ème Chambre)
Audience du 16 octobre 2007
Lecture du 5 novembre 2007
___________
Vu la requête, enregistrée le 12 septembre 2006, présentée pour M. Raphaël R., demeurant (…), par
Me Goni ; M. R. demande au tribunal :
1°) d’annuler la décision implicite née le 20 mai 2006 par laquelle le directeur régional des services
pénitentiaires de Toulouse a refusé de l’agréer en qualité d’aumônier du centre pénitentiaire de M. ;
2°) d’enjoindre au directeur régional des services pénitentiaires de réexaminer sa demande dans un
délai d’un mois ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code
de justice administrative ;
Il soutient :
- que le refus de communication des motifs dans le délai d’un mois rend illégale la décision implicite
de rejet ;
- qu’une absence de motifs entache d’illégalité la décision attaquée ;
- qu’en refusant l’agrément susvisé, le détenu se trouve privé de la possibilité de pratiquer le culte
de son choix et qu’ainsi la décision attaquée méconnaît les articles D. 432 du code de procédure pénale, 9
de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 1er de la
Constitution du 4 octobre 1958, 18 et 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et 18 et
19 de la déclaration universelle des droits de l’homme ;
- que la décision attaquée méconnaît les stipulations de l’article 9 combinées à celles de l’article 14
de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales dès lors
que, l’administration évoquant la liste limitative des cultes autorisés dont les témoins de Jéhovah ne font pas
partie, le détenu et lui se voient appliquer un traitement distinct de ceux dont bénéficient les détenus et
ministres du culte d’autres religions ;
Vu le mémoire, enregistré le 2 octobre 2006, présenté par le directeur régional des services
pénitentiaires de Toulouse ; le directeur régional des services pénitentiaires de Toulouse conclut au rejet de
la requête ;
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Il soutient :
- qu'il ne peut être répondu à du courrier non reçu ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 janvier 2007, présenté par le ministre de la justice ; le
ministre de la justice conclut au rejet de la requête ;
Il soutient :
- que le mouvement des témoins de Jéhovah ne figure pas sur la liste limitative des cultes reconnus
et officiellement autorisés dressée par la circulaire du ministère de la justice en date du 18 décembre 1997
relative à la nomination des aumôniers indemnisés des établissements pénitentiaires ;
- que le refus d'agrément n'empêche ni le détenu de se conformer aux exigences de son culte ni le
requérant d'apporter une assistance spirituelle à ce détenu en lui rendant visite dans les conditions de droit
commun ou en correspondant avec lui ; que, par suite, les articles D. 432 du code de procédure pénale et 9
de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne sont
pas méconnus ;
- qu'aucun texte supranational n'impose à l'administration d'offrir à tous les détenus la possibilité
d'avoir accès à un représentant de leur culte dans les établissements pénitentiaires ;
Vu le mémoire, enregistré le 10 février 2007, présenté pour M. R. concluant aux mêmes fins que la
requête ;
Il soutient, en outre:
- que la circulaire du 18 décembre 1997 méconnaît l'article 2 de la loi du 9 décembre 1905 ;
- que la liste définie par la circulaire du 18 décembre 1997 n'est pas limitative ;
- que, dans un domaine similaire, celui des autorisations d'absence pour motif religieux, il a été jugé
que la liste, définie par la circulaire générale FP n°901 du 23 septembre 1967 et qui ne mentionne que
quelques cultes, ne pouvait qu'être indicative ; que cette analyse doit être transposée à la liste qui figure
dans la circulaire du 18 décembre 1997 ;
- qu'un détenu ne peut accomplir les rites prescrits par sa religion sans la présence d'un ministre du
culte ;
- que la voie épistolaire, la seule concrètement possible pour assister spirituellement les détenus
témoins de Jéhovah, est inadéquate ;
- que les règles de la Recommandation Rec (2006)2 du Comité des ministres aux Etats membres sur
les règles pénitentiaires européennes devraient être prises en compte ;
- que l'administration ne justifie pas les contraintes particulières liées à la situation du détenu en
cause ;
- qu'aucune disposition légale n'impose un nombre minimum de détenus appartenant à une même
religion pour qu'un aumônier puisse officier en prison ;
Vu le mémoire, enregistré le 15 octobre 2007, présenté pour M. R. ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de procédure pénale ;
Vu la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs ;
Vu la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les
administrations ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
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Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 octobre 2007 ;
- le rapport de Mme Cabanne ;
- les observations de Me Goni ;
- et les conclusions de M. Truilhé, commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions aux fins d’annulation :
En ce qui concerne la fin de non recevoir soulevée par le directeur régional des services
pénitentiaires de Toulouse :
Considérant que M. R. a présenté le 15 juin 2006 une demande d’agrément en qualité d’aumônier du
centre pénitentiaire de M. au ministre de la justice ; que, nonobstant la circonstance que le ministre de la
justice n’a pas transmis la demande au directeur régional des services pénitentiaires de Toulouse, compétent
en application de l’article R. 57-8 du code de procédure pénale, du silence gardé pendant deux mois à
compter de la date de réception de sa demande par le ministre de la justice est née une décision implicite de
rejet émanant du directeur régional des services pénitentiaires de Toulouse ; que, par suite, cette autorité
n’est pas fondée à soutenir que la requête est irrecevable faute de décision liant le contentieux ;
En ce qui concerne le moyen tiré du défaut de communication des motifs et sans qu’il soit besoin
d’examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu’aux termes de l’article 5 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes
administratifs : « une décision implicite intervenue dans des cas où une décision explicite aurait dû être
motivée n’est pas illégale du seul fait qu’elle n’est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande
de l’intéressé formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet
devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours
contentieux contre ladite décision est prorogé jusqu’à l’expiration de 2 mois suivant le jour où les motifs lui
auront été communiqués » ; qu’il résulte de ces dispositions qu’en l’absence de communication des motifs
dans le délai d’un mois la décision implicite se trouve entachée d’illégalité ;
Considérant qu’il ressort des pièces versées au dossier que M. R. a présenté par une lettre en date
du 15 juin 2006, soit dans le délai du recours contentieux ouvert contre la décision litigieuse, une demande
de communication des motifs de la décision implicite de rejet de sa demande d’agrément en qualité
d’aumônier du centre pénitentiaire de M. du 25 février 2006 ; qu’il est constant que, bien que la demande ait
été adressée au ministre de la justice, l’administration n’a pas communiqué les motifs de cette décision dans
le délai d’un mois prévu par la disposition précitée; que, dès lors, la décision implicite de rejet est entachée
d’illégalité ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. R. est fondé à demander l’annulation de la
décision implicite en date du 20 mai 2006 par laquelle le directeur régional des services pénitentiaires de
Toulouse a refusé de l’agréer en qualité d’aumônier des établissements pénitentiaires ;
Sur les conclusions aux fins d’injonction :
Considérant qu’eu égard au moyen d’annulation retenu, il convient d’enjoindre au directeur régional
des services pénitentiaires de Toulouse de procéder au réexamen de la demande d’agrément de M. R. dans
le délai de deux mois suivant la notification du présent jugement ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice
administrative :
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Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : "Dans toutes les
instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre
partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient
compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des
raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de condamner l’Etat à verser à M. R. la
somme de 1000 euros qu ’il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DECIDE:
Article 1er : La décision en date du 20 mai 2006 par laquelle le directeur régional des services
pénitentiaires de Toulouse a implicitement refusé d’agréer M. Raphaël R. en qualité d’aumônier des
établissements pénitentiaires est annulée.
Article 2 : Il est enjoint au directeur régional des services pénitentiaires de Toulouse de procéder à
un nouvel examen de la demande d’agrément présentée par M. Raphaël R. dans le délai de deux mois
suivant la notification du présent jugement.
Article 3 : L’Etat versera à M. Raphaël R. une somme de 1000 (mille) euros au titre de l'article L.
761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent jugement sera notifié à M. Raphaël R., au ministre de la justice et au directeur régional
des services pénitentiaires de Toulouse.
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TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE DIJON
N° 0600661
___________
M. Bernard R.
___________
Mme Michel
Rapporteur
___________
M. Feral
Commissaire du gouvernement
___________
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Tribunal administratif de Dijon
(2ème chambre)
Audience du 23 octobre 2007
Lecture du 13 novembre 2007
___________
Vu la requête, enregistrée le 11 mars 2006, présentée pour M. Bernard R., demeurant 3 (…), par
Me Binisti ; M. R. demande au Tribunal de lui attribuer une somme globale de 400 000 euros à titre de
dommages et intérêts ou de 479 496,94 euros au cas où la demande relative au remboursement de ses frais
ne serait pas retenue dans le cadre de l’instance n° 0502600 ;
Vu les décisions implicites par lesquelles le ministre de l’économie des finances et du budget a
rejeté les demandes préalables présentées les 15 septembre et 8 novembre 2004 par M. R. ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 27 juillet 2006, présenté par le directeur général des
impôts qui conclut au rejet de la requête et sollicite, en application des dispositions de l'article 41 de la loi du
29 juillet 1881 et des dispositions codifiées à l'article L. 741-2 du code de justice administrative, que la
suppression de passages à caractère diffamatoire figurant dans la requête soit ordonnée ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 28 octobre 2006, présenté pour M. R., qui conclut aux
mêmes fins et par les mêmes moyens que sa requête ; il sollicite, en outre, sur le fondement de l'article R.
623-1 du code de justice administrative, l'organisation d'une mesure d'enquête sur l'appartenance ou les
sympathies du vérificateur à l'égard de l'Eglise de Scientologie et ses liens avec la personne qui l'a dénoncé ;
Vu le mémoire, enregistré le 19 mai 2007, présenté par le directeur général des impôts qui conclut
aux mêmes fins et par les mêmes moyens et sollicite, en outre, en application des dispositions de l'article 41
de la loi du 29 juillet 1881 et des dispositions codifiées à l'article L. 741-2 du code de justice administrative,
d'ordonner la suppression de passages à caractère diffamatoire figurant dans le mémoire en réplique ;
Vu les pièces du dossier ;
Vu le dossier de l’instance n° 0502600 ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 octobre 2007 ;
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- le rapport de Mme Michel, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Feral, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. R., domicilié à X. dans Y. exerce une activité de consultant en transport et
logistique (…) à Paris ; qu’il a fait, à ce titre, l’objet d’une vérification de comptabilité portant sur les
bénéfices non commerciaux des années 1996 et 1997 et d’un examen de sa situation fiscale personnelle ;
qu’à la suite de ces opérations de contrôle, des redressements ont été notifiés à l’intéressé en matière de
bénéfices non commerciaux et de taxe sur la valeur ajoutée ; que ce dernier à obtenu le dégrèvement des
droits et impositions supplémentaires mis à sa charge au titre de l’année 1996 ainsi que leur réduction au
titre de l’année 1997, après production des pièces justificatives que le vérificateur n’avait pu obtenir au
cours des opérations de contrôle ; que, par lettres des 15 septembre et 8 novembre 2004, M. R. a présenté
une demande d’indemnisation des préjudices qu’il estimait avoir subis à la suite des opérations de contrôle
diligentées pour les années 1996 et 1997 ; qu’il soutient qu’à cette occasion le vérificateur aurait commis
des fautes de nature à engager la responsabilité de l’Etat ;
Sur le principe de la responsabilité des services fiscaux :
Considérant que les erreurs commises par l’administration fiscale lors de l’exécution d’opérations
qui se rattachent aux procédures d’établissement ou de recouvrement de l’impôt ne sont, en principe,
susceptibles, en raison de la difficulté que présente la mise en œuvre des ces procédures, d’engager la
responsabilité de l’Etat que si elles constituent une faute lourde ;
Considérant en premier lieu, que M. R. soutient qu’il a été victime d’actes de malveillance de la part
de la propriétaire des locaux professionnels qu’il louait, laquelle l’a d’ailleurs dénoncé dans un courrier
adressé aux services fiscaux ; que, toutefois, les diverses péripéties ayant émaillé les rapports de M. R. avec
son bailleur, consistant notamment en des vols de courriers contenant des chèques, se rapportent à des
questions de droit privé dont il n’appartient pas au juge administratif de connaître et qui, pour cette raison,
ne peuvent être utilement invoqués à l’appui de la requête de M. R. ;
Considérant en deuxième lieu, que pour établir le comportement, équivoque et fautif du
vérificateur, qui aurait délibérément cherché à lui nuire, M. R. soutient que ce dernier entretenait des
rapports étroits, en raison de ses liens avec l’Eglise de Scientologie, avec la propriétaire des locaux
professionnels qu’il louait ; qu’il fait notamment valoir que seule cette relation peut expliquer la mention
manuscrite portée sur la fiche de programmation des opérations de contrôle indiquant que l’affaire a été
attribuée au vérificateur « à sa demande » ;
Considérant cependant, qu’il ne résulte pas de l’instruction que le vérificateur ayant été en charge
du dossier de M. R. pour les années 1996 et 1997 soit un membre actif ou un sympathisant de l’Eglise de
Scientologie, ni qu’il soit entré en contact, par cette appartenance avec son bailleur ; qu’ainsi, la mention
manuscrite portée sur la fiche de programmation des opérations de contrôle n’est pas de nature à faire
regarder comme anormale l’attribution au vérificateur, sur sa demande, de ce dossier par son supérieur
hiérarchique et comme révélant un soi disant fait de « concussion » ; qu’enfin, il ne résulte pas de
l’instruction que le comportement du vérificateur ait été guidé par une volonté délibérée de nuire ou que ce
dernier ait refusé d’engager un débat oral et contradictoire avec le contribuable ou son représentant ;
Considérant en troisième lieu, que M. R. prétend que sa comptabilité était régulière et ne justifiait
pas le recours à une reconstitution du chiffre d’affaire et du bénéfice ; qu’en outre, le vérificateur a effectué
des redressements aberrants et « l’a noyé » sous les informations et les papiers pour qu’il ne comprenne pas
ce qu’il faisait ;
Considérant que, toutefois, par les pièces qu’il produit, le requérant n’établit pas que les
redressements mis à sa charge à l’issue des opérations de contrôle étaient aberrants eu égard aux pièces
qu’il avait alors mises à la disposition du vérificateur ou que ce dernier l’aurait délibérément noyé sous les
informations et les papiers pour qu’il ne comprenne pas ce qu’il faisait ;
© La lettre du droit des religions n°28 décembre 2007 / janvier 2008
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Considérant, en quatrième lieu, que M. R. ne saurait se prévaloir de l’abandon ultérieur de la
majorité des chefs de redressement retenus à son encontre par le vérificateur, dès lors que cet abandon n’a
été motivé que par le long délai qu’il a mis pour produire les documents justifiant tant la régularité de la
comptabilisation de ses recettes que la déduction de ses charges ;
Considérant qu’enfin et en tout état de cause, M. R. n’établit ni l’existence ni le montant des
préjudices moraux, psychologiques et commerciaux dont il demande l’indemnisation ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin de prescrire la mesure d’enquête
sollicitée par le contribuable, que la requête de M. R. doit être rejetée ;
Sur la suppression de passages contenant des propos injurieux, outrageants ou
diffamatoires :
Considérant qu’en application des dispositions de l’article 41 de la loi du 29 juillet 1881 et de
l’article L. 741-2 du code de justice administrative, les tribunaux administratifs peuvent, dans les causes dont
ils sont saisis, prononcer, même d’office, la suppression des écrits injurieux, outrageants ou diffamatoires ;
Considérant que l’administration est fondée à demander la suppression des énonciations de la
requête et du mémoire en réplique présenté par M. R. présentant un caractère outrageant et diffamatoire ;
que, pour la requête, celles-ci figurent en page 1 de « Le soussigné… » à «… cette secte », en page 2 de
« 4) La vérificatrice… » à « …qu’il avait pris », en page 4 de « Surtout… » à « …vérificateur compétent » et
de « autrement que par une volonté… » à « …pour le moins suspecte », en page 5 de « le caractère
exceptionnel… » à «… vérificateur » et de « Pourtant… » à « …son fonctionnement » ; que, pour ce qui
concerne le mémoire en réplique présenté par le contribuable, ces énonciations figurent en page 2 de « Il
estime qu’il s’agit… » à « volonté de spoliation », et en page 6 de « J’observe… » à « ne relève pas de
l’affabulation » ; qu’enfin, les termes de « collusion » et de « persécuté » utilisés par le requérant dans ces
deux mémoires seront également supprimés ;
Sur les dispositions de l’article R. 741-12 du code de justice administrative :
Considérant qu’aux termes de l’article R. 741-12 du code de justice administrative : « Le juge peut
infliger à l’auteur d’une requête qu’il estime abusive une amende pouvant aller jusqu’à 3 000 euros » ; qu’en
l’espèce, la requête de M. R. présente un caractère abusif ; qu’il y a lieu de le condamner à verser une
amende de 3 000 euros ;
DECIDE :
Article 1er : Les passages de la requête commençant en page 1 par « Le soussigné… » à « … cette
secte », en page 2 par « 4) La vérificatrice… » à « …qu’il avait pris », en page 4 par « Surtout… » à «
…vérificateur compétent » et par « autrement que par une volonté… » à
« …pour le moins suspecte
», en page 5 par « le caractère exceptionnel… » à « … vérificateur » et par « Pourtant… » à « …son
fonctionnement » et du mémoire en réplique du 28 octobre 2006 commençant en page 2 par « Il estime
qu’il s’agit… » à « volonté de spoliation » et en page 6 par « J’observe… » à « ne relève pas de l’affabulation
» ainsi que les termes de « collusion » et de « persécuté » utilisés par le requérant dans ces deux mémoires
sont supprimés.
Article 2 : La requête de M. R. est rejetée.
Article 3 : M. R. est condamné à payer une amende de 3 000 (trois mille) euros.
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TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE STRASBOURG
N° 0505482
___________
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
M. et Mme Thierry G.
___________
Mme Guidi
Rapporteur
___________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Tribunal administratif de Strasbourg
M. Richard
Commissaire du gouvernement
___________
(2ème chambre)
Audience du 16 octobre 2007
Lecture du 20 novembre 2007
___________
Vu la requête, enregistrée le 20 décembre 2005, présentée pour M. et Mme Thierry G., élisant
domicile (…), par Me Trizac ; M. et Mme G. demandent au tribunal :
- d’annuler la décision du 20 octobre 2005 par laquelle le directeur de l’établissement public local
d’enseignement agricole et horticole de X a refusé de leur verser une indemnité de un euro ;
- de condamner l’établissement public local d’enseignement agricole et horticole de X à leur verser
la somme de un euro ;
- de mettre à la charge de l’établissement public local d’enseignement agricole et horticole de X la
somme de 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
……………………………………………………………………………………………….……..
Vu la décision attaquée ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 avril 2006, présenté par le ministre de l'agriculture et de
la pêche qui conclut au rejet de la requête ;
……………………………………………………………………………………………….……..
Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 mai 2006, présenté pour l'établissement public local
d'enseignement agricole et horticole de X, par Me Sultan qui conclut au rejet de la requête et demande en
outre que la somme de 800 euros soit mise à la charge de M. et Mme G. au titre de l'article L. 761-1 du code
de justice administrative ;
……………………………………………………………………………………………….……..
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Vu le mémoire, enregistré le 11 septembre 2006, présenté pour M. et Mme G. qui concluent aux
mêmes fins ;
……………………………………………………………………………………………….……..
Vu le mémoire, enregistré le 8 octobre 2007 présenté par le ministre de l'agriculture et de la pêche
qui conclut aux mêmes fins ;
……………………………………………………………………………………………….……..
Vu le mémoire, enregistré le 11 octobre 2007 présenté pour l'établissement public local
d'enseignement agricole et horticole de X qui conclut aux mêmes fins et demande en outre que la somme de
3 000 euros soit mise à la charge de M. et Mme G. au titre de l'article L. 761-1 du code de justice
administrative ;
……………………………………………………………………………………………….……..
Vu le mémoire, enregistré le 12 octobre 2007, présenté pour M. et Mme G. qui concluent aux
mêmes fins ;
……………………………………………………………………………………………….……..
Vu le mémoire, enregistré le 16 octobre 2007, présenté par le ministre de l'agriculture et de la
pêche qui conclut aux mêmes fins ;
……………………………………………………………………………………………….……..
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l’éducation ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 octobre 2007 :
- le rapport de Mme Guidi, rapporteur,
- les observations de :
* Mlle G., fille des requérants,
* Me Trizac, avocat des requérants,
* Me Sultan, avocat de l’établissement public local d’enseignement agricole et
horticole de X,
- les conclusions de M. Richard, commissaire du gouvernement ;
Considérant que Mélanie G., alors âgée de 17 ans, était scolarisée pour l’année 2004/2005 à
l’établissement public local d’enseignement agricole et horticole de X (EPLA) en classe de 2nde professionnelle
travaux paysagers ; que, durant un cours d’introduction aux techniques documentaires qui a eu lieu le 23
novembre 2004, l’enseignante a illustré son cours relatif à l’esprit critique à partir de l’exemple des témoins
de Jéhovah ; que l’élève a pris la parole durant ce cours pour indiquer qu’elle était témoin de Jéhovah ; que
les élèves de l’établissement ont alors eu une attitude discriminatoire à son égard qui s’est notamment
traduite par des graffitis sur son casier ; que M. et Mme G. ont formé auprès du directeur de l’établissement
une réclamation préalable en vue d’obtenir un euro de dommages et intérêts en réparation du préjudice
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moral subi par leur fille par une lettre, en date du 12 octobre 2005 ; que, par une décision, en date du 20
octobre 2005, le directeur de l’établissement a rejeté leur demande ; que M. et Mme G. demandent la
condamnation de l’établissement public local d’enseignement agricole et horticole de X à leur verser un euro
de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par leur fille ;
Sur les conclusions tendant à la réparation du dommage causé par les propos tenus par l’enseignante :
Considérant qu’aux termes de l’article L. 911-1 du code de l’éducation : « Dans tous les cas où la
responsabilité des membres de l'enseignement public se trouve engagée à la suite ou à l'occasion d'un fait
dommageable commis, soit par les élèves ou les étudiants qui leur sont confiés à raison de leurs fonctions,
soit au détriment de ces élèves ou de ces étudiants dans les mêmes conditions, la responsabilité de l'Etat est
substituée à celle desdits membres de l'enseignement qui ne peuvent jamais être mis en cause devant les
tribunaux civils par la victime ou ses représentants. Il en est ainsi toutes les fois que, pendant la scolarité ou
en dehors de la scolarité, dans un but d'enseignement ou d'éducation physique, non interdit par les
règlements, les élèves et les étudiants confiés ainsi aux membres de l'enseignement public se trouvent sous
la surveillance de ces derniers. L’action récursoire peut être exercée par l'Etat soit contre le membre de
l'enseignement public, soit contre les tiers, conformément au droit commun. Dans l'action principale, les
membres de l'enseignement public contre lesquels l'Etat pourrait éventuellement exercer l'action récursoire
ne peuvent être entendus comme témoins. L'action en responsabilité exercée par la victime, ses parents ou
ses ayants droit, intentée contre l'Etat, ainsi responsable du dommage, est portée devant le tribunal de
l'ordre judiciaire du lieu où le dommage a été causé et dirigée contre le représentant de l'Etat dans le
département. La prescription en ce qui concerne la réparation des dommages prévus par le présent article
est acquise par trois années à partir du jour où le fait dommageable a été commis. » ;
Considérant qu'il résulte des dispositions de l’article L. 911-1 du code de l’éducation que, par
dérogation aux principes généraux qui régissent la séparation de l'autorité administrative et de l'autorité
judiciaire, la compétence de la juridiction civile s'étend à l'ensemble des cas où le dommage invoqué a sa
cause dans une faute d'un membre de l'enseignement, quel que soit, juridiquement, le caractère de cette
faute ; que la requête de M. et Mme G. tend à la réparation du dommage subi par Mélanie G. en raison de la
faute commise par un membre de l’enseignement ; qu'ainsi le litige soulevé par la requête susvisée n'est pas
au nombre de ceux dont il appartient à la juridiction administrative de connaître ;
Sur les conclusions tendant à la réparation du dommage causé en l’absence de mesure de nettoyage des
graffitis réalisés par les élèves sur le casier de Mélanie G. :
Considérant que les conclusions tendant à la condamnation de l’établissement public local agricole
et horticole de X en raison du défaut d’organisation du service public de l’enseignement sont mal dirigées ;
qu’elles sont, par suite, irrecevables ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes
les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre
partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient
compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des
raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. » ;
Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle
à ce que soit mise à la charge de l’établissement public local d’enseignement agricole et horticole de X, qui
n’est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. et Mme G., au titre des
frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu’il n'y a pas lieu, en l’espèce, de faire application
de ces dispositions et de mettre à la charge de M. et Mme G. la somme demandée par l’établissement public
local d’enseignement agricole et horticole de X, au même titre ;
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DECIDE:
Article 1er : La requête susvisée de M. et Mme G. est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de l’établissement public local d’enseignement agricole et horticole de X tendant à
la condamnation de M. et Mme G. au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens sont
rejetées.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. et Mme Thierry G., à Mlle Mélanie G., au ministre de
l’agriculture et de la pêche et à l’établissement public local d’enseignement agricole et horticole.
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TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE BORDEAUX
N°0705282
___________
FEDERATION CHRETIENNE DES TEMOINS DE
JEHOVAH DE FRANCE et M. et Mme M.
___________
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
M. Delignat-Lavaud
Vice-président
Juge des référés
___________
Le vice-président du tribunal,
juge des référés
Audience du 18 décembre 2007
Ordonnance du 18 décembre 2007
__________
Vu la requête, enregistrée le 7 décembre 2007 sous le n° 0705282, par laquelle :
- la Fédération chrétienne des Témoins de Jéhovah de France, association cultuelle dont le siège est (….) ;
- M. et Mme M. demeurant (…),
aux écritures de Me Goni , avocat, demandent au juge des référés administratifs :
- sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, d’ ordonner la suspension
d’exécution d’une décision du proviseur du lycée Victor Louis de T. en date du 15 novembre 2007 qui a
autorisé, au sein de l’établissement, la tenue d’une conférence d’information sur les sectes par l’Association
pour la défense des familles et de l’individu (ADFI) le 20 décembre 2007 ;
- de condamner le lycée Victor Louis, sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative,
à leur payer « une indemnité qui ne saurait être inférieure à 1 000 € » ;
Ils invoquent l’urgence qui s’attache à la suspension d’exécution d’une décision, susceptible de leur
occasionner un grave préjudice, qui produira tous ses effets le 20 décembre prochain ; à l’encontre de la
légalité de la décision litigieuse, ils font valoir que la tenue de ce type de conférences dans les
établissements scolaires donnant fréquemment lieu, de la part de l’ADFI, à des propos excessifs et
diffamatoires vis-à-vis du mouvement des Témoins de Jéhovah et de ses adeptes, le proviseur du lycée ne
pouvait légalement, en organisant cette réunion, ouvrir la voie à des débordements déjà sanctionnés à
diverses reprises par l’autorité judiciaire ; que la note du proviseur exprime, à l’encontre d’un mouvement
religieux arbitrairement qualifié de secte, une prise de position contraire à l’obligation de neutralité
religieuse, corollaire du principe de laïcité qui s’impose à toute autorité administrative, et plus
particulièrement aux établissements publics d’enseignement ; que l’attitude observée par le proviseur du
lycée, qui contrevient aux normes légales de droit interne et aux circulaires du ministre de l’éducation
nationale, méconnaît en outre les droits et principes fondamentaux garantis notamment par les articles 9 et
14 et par l’article 2 du premier protocole additionnel de la convention européenne de sauvegarde des droits
de l’homme et des libertés fondamentales ;
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Vu le mémoire, enregistré le 13 décembre 2007, par lequel le recteur de l’ académie de Bordeaux :
- tire des fins de non-recevoir de l’absence de caractère décisoire de la note incriminée, du défaut
d’habilitation régulière à agir du président de la Fédération chrétienne des Témoins de Jéhovah de France et
de l’absence d’intérêt à agir de M. et Mme M. ;
conteste la réalité de l’urgence alléguée ;
- réfute les moyens invoqués à l’encontre de l’acte litigieux et conclut à l’entier rejet de la requête ;
Vu le mémoire, enregistré le 17 décembre 2007, par lequel les requérants réfutent les fins de non-recevoir
opposées en défense, réaffirment l’urgence à suspendre et persistent, de plus fort, dans les conclusions et
moyens de leur requête ;
Vu l’acte dont il est demandé suspension d’exécution et l’ensemble des pièces du dossier ;
Vu la requête au fond n° 0705300 ;
Vu la décision en date du 19 mars 2007, par laquelle le président du tribunal a désigné M. Delignat-Lavaud,
vice-président, pour statuer sur les demandes de référé ;
Vu le code de l’éducation ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir, au cours de l’audience tenue au tribunal le 18 décembre 2007, les parties ayant été dûment
convoquées, donné lecture de son rapport et entendu les observations de Me Goni, pour la Fédération
requérante et pour M. et Mme M., eux-mêmes présents à l’audience, ainsi que celles de M. C., pour le
recteur de l’académie de Bordeaux ;
Sur les conclusions en suspension d’exécution :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision
administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des
référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de
certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de
l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (...) » ;
Considérant que, si la note affichée par le proviseur le 15 novembre 2007 dans les locaux du lycée Victor
Louis de T. a la valeur d’une simple note de service à l’égard des élèves qu’elle avise de la tenue d’une
conférence, elle n’en contient pas moins une décision administrative faisant grief, en ce qu’elle autorise,
comme participant de la mission éducative impartie au lycée, la tenue dans l’établissement d’une conférence
d’information et de sensibilisation des élèves sur les dangers des sectes ;
Considérant toutefois qu’en l’état de l’instruction, aucun des moyens invoqués à l’encontre de cette décision
n’est susceptible de faire naître un doute sérieux sur sa légalité ; qu’en effet, la mise en garde du public
scolaire contre le risque social lié au prosélytisme de mouvements sectaires paraît relever de la mission
éducative confiée aux établissements d’enseignement par les textes législatifs et réglementaires qui les
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régissent ; qu’en admettant que la note incriminée ait à tort assimilé les Témoins de Jéhovah à une secte
dangereuse, il n’en résulte pas nécessairement l’illégalité d’une décision autorisant la tenue d’une conférence
destinée à mettre en garde les lycéens contre les périls des dérives sectaires ; que la circonstance que cette
autorisation rendrait possible l’expression de propos excessifs ou diffamatoires à l’encontre du mouvement
des Témoins de Jéhovah ne saurait, par elle-même, justifier la suspension d’exécution demandée, le
prononcé en référé d’une telle mesure ne pouvant être l’instrument d’une censure préventive du contenu
supposé de réunions publiques ; qu’il résulte de ce qui précède que les conclusions aux fins de suspension
susvisées doivent, en tout état de cause, être rejetées ;
Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les conclusions par lesquelles les requérants sollicitent, sur le fondement dudit article, la
condamnation du lycée Victor Louis à leur rembourser des frais de procès, tout à la fois mal dirigées et non
fondées, sont vouées au rejet,
ORDONNE
Article 1er : La requête de Fédération chrétienne des Témoins de Jéhovah de France et de M. et Mme M.,
est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la Fédération chrétienne des Témoins de Jéhovah de
France, à M. et Mme M. et au recteur de l’académie de Bordeaux. Copie en sera délivrée au ministre de
l’éducation nationale et au lycée Victor Louis de T..
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COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE PARIS
N° 04PA00568
---FEDERATION CHRETIENNE DES TEMOINS
DE JEHOVAH DE FRANCE
_________
Mme Sichler
Président
_________
M. Bouleau
Rapporteur
_________
M. Bachini
Commissaire du gouvernement
_________
Audience du 24 mai 2007
Lecture du 7 juin 2007
_________
Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif, enregistrés les 11 février 2004 et 11 mai 2004, présentés
pour la FEDERATION CHRETIENNE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE FRANCE dont le siège est (…), par Me
Blondel ; la FEDERATION CHRETIENNE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE FRANCE demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 0012106 du 15 décembre 2003 par laquelle le Tribunal administratif
de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite du 23 avril 2000 du président de
l'Assemblée nationale rejetant sa demande de retrait de certains passages du rapport déposé à la suite des
travaux de la commission d'enquête sur la situation financière, patrimoniale et fiscale des mouvements
chrétiens, ainsi qu'à la condamnation de l'Etat à lui allouer le franc symbolique à titre de dommages et
intérêts en réparation du préjudice moral résultant de l'atteinte à l'honneur de ses fidèles et sympathisants
et à lui verser la somme de 7 892 000 F, assortie des intérêts de droit ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme d'un euro symbolique ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761?1 du code
de justice administrative ;
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution ;
Vu l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées
parlementaires ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mai 2007 :
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- le rapport de M. Bouleau, rapporteur,
- et les conclusions de M. Bachini, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la FEDERATION CHRETIENNE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE FRANCE relève appel
de l'ordonnance par laquelle a été rejetée sa demande tendant à l'annulation du refus opposé à sa demande
de retrait d'extraits du rapport déposé à la suite des travaux d'une commission d'enquête parlementaire
relative aux aspects économiques et financiers du phénomène sectaire et à ce qu'elle soit indemnisée des
conséquences dommageables ayant résulté pour elle d'assertions contenues dans ledit rapport ;
Considérant qu'un rapport établi pour l'information du législateur dans le cadre des travaux d'une
commission créée en application de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 susvisée, qui n'est pas
par lui-même un acte administratif et ne se rattache à aucune activité de nature administrative, n'est pas
détachable de la fonction de contrôle constitutionnellement dévolue au Parlement pour qu'il l'exerce
souverainement ; que, hors les cas où le législateur y aurait lui-même consenti, il n'appartient au juge
administratif de connaître ni des actes relatifs à cette fonction, ni des conditions dans lesquelles celle-ci
s'exerce, ni même des conséquences pouvant en résulter ; qu'il s'ensuit que la compétence pour en
connaître ne lui ayant pas été, fût-ce implicitement, conférée, les litiges trouvant leur cause dans un rapport
parlementaire ne sauraient ressortir à la compétence du juge administratif ; que la circonstance qu'aucune
juridiction ne peut être saisie d'un tel litige ne saurait avoir pour conséquence d'autoriser le juge
administratif à se déclarer compétent ;
Considérant qu'il suit de là que, comme il l'a fait par l'ordonnance attaquée, le tribunal ne pouvait
que rejeter comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître une demande de
l'association requérante qui, dans toutes ses conclusions, mettait directement en cause ledit rapport ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la FEDERATION CHRETIENNE DES TEMOINS DE
JEHOVAH DE FRANCE n'est pas fondée à se plaindre que, par l'ordonnance attaquée, qu'il pouvait prendre à
bon droit sur le fondement de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, le Tribunal administratif de
Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice
administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à
ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante soit condamné à payer à
l'association requérante la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle dans cette
instance ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par l'Etat et tendant au
remboursement des frais exposés dans l'instance et non compris dans les dépens ;
DECIDE:
Article 1er : La requête de LA FEDERATION CHRETIENNE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE FRANCE
est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice
administrative sont rejetées.
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COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL
DE MARSEILLE
N° 05MA00225
---RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
COMMUNE DE M.
M. Laffet
Rapporteur
---M. Cherrier
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
La Cour administrative d'appel de Marseille
Commissaire du gouvernement
----
1ère chambre
Séance du 4 octobre 2007
Lecture du 17 octobre 2007
Vu la requête, enregistrée le 1er février 2005 par télécopie et régularisée le 9 février 2005,
présentée pour la COMMUNE DE M., représentée par son maire en exercice à ce dûment autorisé par
délibération en date du 23 mars 2001 du conseil municipal, par Me Bernard Asso ;
La COMMUNE DE M. demande à la Cour :
1°) d’annuler le jugement n° 0004983 en date du 17 novembre 2004 par lequel le Tribunal
administratif de Nice a annulé la décision en date du 28 avril 2000 par laquelle le maire de M. a délivré un
certificat d’urbanisme négatif à l’association locale pour le culte des témoins de Jehovah de X. Y. ;
Nice ;
2°) de rejeter la demande présentée par ladite association devant le Tribunal administratif de
Il soutient que l’édifice cultuel projeté ne présente pas le caractère d’une installation d’intérêt
général et ne peut être regardé comme une construction à usage d’équipements collectifs ; que le Tribunal
administratif de Nice a commis une erreur d’appréciation en jugeant ainsi cette opération ; qu’en effet, en
raison du principe de laïcité, il ne peut être admis qu’un lieu de culte soit assimilé à un équipement public
dans la mesure où aucune collectivité publique ne peut intervenir dans les dossiers religieux ; que, depuis la
loi du 9 décembre 1905, le service public du culte n’existe plus ; que le projet, qui ne peut être assimilé à un
ouvrage public, n’est d’aucune utilité publique ; qu’un terrain, situé dans une zone d’activité UE1 ne saurait
constituer l’assiette d’un établissement de culte ; que, contrairement à ce qu’a jugé le Tribunal, un lieu de
culte ne peut être considéré conne un lieu de conférence, mais comme un lieu de réflexion, de recueillement
et de prière ; que, d’ailleurs les témoins de Jéhovah revendiquent eux-mêmes que leur salle du « royaume »
est un lieu de culte et refusent de considérer qu’il s’agit d’une salle de réunion ; que la demande de certificat
d’urbanisme concernait bien un établissement de culte ; que la salle projetée est destinée aux adeptes du
culte, lesquels ne présentent qu’une infime partie de la population (…) ;
Vu le jugement attaqué ;
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Vu le mémoire, enregistré le 1er juin 2005, présenté pour l'association locale pour le culte des
témoins de Jéhovah de X. Y., représentée par son président en exercice et dont le siège est 45 avenue de
Grasse à X. (06400), par Me. Goni ;
Elle conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la COMMUNE DE M. à lui verser la
somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
Elle fait valoir que la requête d'appel est irrecevable car enregistrée le 9 février 2005 plus de deux
mois après la notification du jugement intervenu le 1er décembre 2004 ; que, s'agissant du fond, un
bâtiment recevant du public et destiné à l'exercice d'un culte constitue un équipement collectif au même titre
qu'un équipement culturel ; que, si les édifices culturels sont affectés à une activité privée, celle-ci présente
un caractère d'intérêt général, dans le sens où elle intéresse l'exercice de la liberté du culte d'une partie de
la population ; que, contrairement à ce que voudrait laisser croire la COMMUNE DE M., ni le préambule du
règlement de la zone UE ni les articles UE1 et UE2 du POS de M. ne prévoient que seules les activités à
caractère purement économique sont autorisées ; que le règlement de la zone ne précise pas que les
activités de service, les équipements collectifs ou les salles de spectacles doivent tous avoir un caractère
exclusivement économique ; que le projet constitue une activité tertiaire, c'est-à-dire de service, activité
expressément prévue par l'article UE1 du règlement du POS ; qu'une salle affectée à l'usage du public pour
les conférences et enseignements bibliques peut être qualifiée d'édifice de culte ; qu'elle est bien une
association cultuelle au sens des dispositions de la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des églises et
de l'Etat ; que ce statut lui a été expressément reconnu par un arrêté en date du 17 janvier 2002 du préfet
des Alpes-Maritimes, alors qu'elle satisfaisait aux trois critères définis par l'avis du Conseil d'Etat rendu le 24
octobre 1997 ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré par télécopie le 6 juillet 2005 et régularisé le 8 juillet 2005,
présenté pour la COMMUNE DE M., par Me Asso ;
Elle maintient ses conclusions à fin d’annulation ; outre les moyens déjà développés, elle fait valoir
que la requête n’est pas tardive car enregistrée le 1er février 2005 ; que les arrêts dont se prévaut
l’association intimée ne sont pas transposables au cas d’espèce ; que cette association a une attribution
exclusivement cultuelle et en rien culturelle ;
Vu, enregistrée le 21 novembre 2005, la pièce versée au débat par Me. Goni pour l’association
locale pour le culte des témoins de Jéhovah de X. Y. ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l’urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 octobre 2007 :
- le rapport de M. Laffet, rapporteur,
- les observations de Me Philip-Gillet substituant Me Asso pour la COMMUNE DE M.,
- et les conclusions de M. Cherrier, commissaire du gouvernement ;
Considérant que l’association locale pour le culte des témoins de Jéhovah de X. Y. (ALCTJ) a
sollicité un certificat d’urbanisme en vue de savoir si elle avait la possibilité de réaliser une construction à
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usage d’établissement de culte sur un terrain cadastré section G n°6146-6147 et 6149 sur le territoire de la
COMMUNE DE M. ; que, par décision en date du 28 avril 2000, le maire de M. lui a délivré un certificat
d’urbanisme négatif au motif que la construction envisagée n’était pas autorisée par l’article UE1 du
règlement du plan d’occupation des sols ; que, par jugement du 17 novembre 2004 dont la COMMUNE DE
M. relève appel, le Tribunal administratif de Nice, a annulé ledit certificat d’urbanisme négatif ;
Y. :
Sur la fin de non-recevoir opposée par l’association locale pour le culte des témoins de Jéhovah de X.
Considérant qu’aux termes de l’article R.811-2 du code de justice administrative : « Sauf disposition
contraire, le délai d’appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l’instance à compter du jour où la
notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R.751-3 et R.751-4 » ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que la télécopie de la requête formée par la
COMMUNE DE M. contre le jugement attaqué, qui lui a été notifié le 2 décembre 2004, a été enregistrée au
greffe de la Cour le 1er février 2005 ; qu’ainsi, alors même que l’exemplaire original de cette requête qui était
nécessaire à sa régularisation n’a été enregistrée que le 9 février 2005, soit postérieurement à l’expiration du
délai de deux mois imparti pour faire appel, la fin de non-recevoir, opposée par l’association locale pour le
culte des témoins de Jéhovah de X. Y. et tirée de la tardiveté, ne saurait être accueillie ;
Sur la légalité de la décision attaquée :
Considérant que le règlement du plan d’occupation des sols de la COMMUNE DE M. précise que la
zone UE « est destinée à recevoir des activités commerciales et d’entrepôts, équipements et services » ; que
l’article UE1 du règlement de ce même plan dispose que : « 1 – Sont admises les occupations et utilisations
du sol ci-après : - les constructions à usage d’équipements collectifs, - les constructions à usage de
commerces, d’artisanat, et d’activité industrielle, - les constructions à usage de bureaux et services, - les
aires et constructions à usage de stationnement, à l’exclusion des garages collectifs de caravanes, - les
installations classées ou non nécessaires au fonctionnement des appareillages indispensables aux
constructions autorisées dans la zone, - les salles de spectacles, - les lotissements correspondant aux
affectations précédentes, - les serres à usage agricole, - les constructions à usage agricole » ; qu’aux termes
de l’article UE2 : « Toutes les occupations et utilisations du sol non mentionnées à l’article UE1 sont
interdites » ;
Considérant qu’un bâtiment destiné à l’exercice d’un culte ne saurait être regardé comme une
construction à usage d’équipements collectifs ou de service au sens des dispositions précitées de l’article UE1
du règlement du plan d’occupation des sols de M., dès lors qu’il résulte de ce règlement que la zone UE a
essentiellement une vocation économique et commerciale ; qu’ainsi, l’édifice envisagé par l’association locale
pour le culte des témoins de Jéhovah de X. Y. , destiné à l’exercice d’un culte, ne figure pas au nombre des
constructions admises dans la zone UE ; que, dans ces conditions, le maire de M. n’a pas fait une inexacte
application du règlement de la zone UE du plan d’occupation des sols en délivrant un certificat d’urbanisme
négatif à l’association locale pour le culte des témoins de Jéhovah de X. Y. ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède, et alors que le moyen retenu par les premiers juges était
le seul développé en première instance, que la COMMUNE DE M. est fondée à soutenir que c’est à tort que,
par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a annulé le certificat d’urbanisme négatif délivré le
28 avril 2000 par son maire à l’association locale pour le culte des témoins de Jéhovah de X. Y. ; qu’en
conséquence, ledit jugement doit être annulé et la demande présentée par l’association intimée devant le
Tribunal administratif rejetée ;
Sur l’application de l’article L.761-1 du code de justice administrative :
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Considérant que les dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à
ce que la COMMUNE DE M., qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à
payer à l’association locale pour le culte des témoins de Jéhovah de X. Y. la somme qu’elle demande au tire
des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement 0004986 du Tribunal administratif de Nice en date du 17 novembre 2004
est annulé.
Article 2 : La demande présentée par l’association locale pour le culte des témoins de Jéhovah de X.
Y. devant le Tribunal administratif de Nice est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de l’association locale pour le culte des témoins de Jéhovah de X.
Y. tendant au bénéfice de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE M., à l'association locale pour le culte des
témoins de Jéhovah et au ministre d’Etat, ministre de l’écologie, du développement et de l’aménagement
durables.
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COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL
DE NANCY
N° 06NC01625
-------DEPARTEMENT DES ARDENNES
c/ M. et Mme S.
______
REPUBLIQUE FRANCAISE
M. Desramé
Président
______
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
M. Tréand
Rapporteur
______
M. Collier
Commissaire du gouvernement
_______
La Cour administrative d’appel de Nancy
(3ème Chambre)
Audience du 18 octobre 2007
Lecture du 6 décembre 2007
_______
Vu la requête, enregistrée le 19 décembre 2006, présentée pour le DEPARTEMENT DES
ARDENNES, par Me Bazin, avocat ; le DEPARTEMENT DES ARDENNES demande à la Cour :
1°) d’annuler le jugement n° 0201649 en date du 19 octobre 2006 en tant que le Tribunal
administratif de Châlons-en-Champagne a, à la demande de M. et Mme S., annulé la décision en date du 28
juin 2002 par laquelle le président du Conseil général des Ardennes a refusé de prendre en charge les frais
de transport de leur fille X. scolarisée au collège public de V. ;
2°) de rejeter la demande formée par M. et Mme S. devant le tribunal ;
3°) de mettre à la charge de M. et Mme S. une somme de 2.000 € au titre des dispositions de
l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Le DEPARTEMENT DES ARDENNES soutient que :
- les élèves fréquentant un collège privé ne sont pas dans la même situation que ceux scolarisés
dans un collège public, qui sont soumis au respect de la carte scolaire organisée par les dispositions des
articles D 211-9 et suivants du code de l’éducation ; en appliquant à ces deux catégories d’usagers des
règles de prise en charge différentes, tout en limitant le bénéfice de la gratuité aux seuls collégiens
fréquentant le collège privé le plus proche de leur secteur scolaire, il n’a pas instauré une inégalité de
traitement illégale dans l’accès au service public des transports scolaires géré par le département ;
- l’assemblée départementale a pu régulièrement écarter le choix de la langue vivante des
dérogations justifiant le maintien de la gratuité pour les collégiens dérogeant au respect de la carte scolaire ;
la circonstance que l’inspecteur d’académie ait autorisé une dérogation à la carte scolaire pour permettre à
X. S. de fréquenter le collège public de V. ne lui est pas opposable ;
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- la discrimination créée trouve sa justification dans une nécessité d’intérêt général en rapport
avec le service public tant des transports scolaires (économies réalisées) que de l’éducation
nationale (condition indispensable au regroupement, à la mise en réseau des petits collèges ruraux et à la
création de collèges multisites) ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 avril 2007, présenté par M. et Mme S., qui concluent
au rejet de la requête et à ce qu’une somme de 2.000 € soit mise à la charge du DEPARTEMENT DES
ARDENNES au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que :
- le refus d’accorder une carte de transport gratuit à leur fille X. viole le principe d’égalité entre les
citoyens ; des collégiens habitant la même commune et souhaitant apprendre l’espagnol en seconde langue
vivante bénéficient des transports gratuits s’ils fréquentent un établissement privé alors qu’ils sont exclus de
cet avantage s’ils sont scolarisés dans un collège public ;
- la réglementation appliquée par le département viole le principe de laïcité, la liberté de
conscience de l’enfant et de ses parents ainsi que la liberté de l’enseignement ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l’éducation ;
Vu la loi n° 59-1557 du 31 décembre 1959 ;
Vu la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 ;
Vu le décret n° 80-11 du 3 janvier 1980 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 18 octobre 2007 :
- le rapport de M. Tréand, premier conseiller,
- les observations de M. S.,
- et les conclusions de M. Collier, Commissaire du Gouvernement ;
Sur les conclusions d’annulation :
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que M. et Mme S., domiciliés à (…), ont, en
application des dispositions de l’article 6 du décret susvisé du 3 janvier 1980, obtenu de l’inspecteur
d’académie une dérogation pour que leur fille soit scolarisée au collège public Paul Drouot à V., situé hors de
leur secteur scolaire de rattachement, pour y suivre, au titre de la langue vivante II, un enseignement
d’espagnol ; qu’ils ont ensuite sollicité du président du conseil général des Ardennes qu’il leur accorde une
carte de transport scolaire à titre gratuit ; que, par décision du 28 juin 2002, le président du conseil général
a refusé ; que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont annulé cette décision en faisant droit au
moyen soulevé par les demandeurs et tiré de l’existence d’une rupture d’égalité entre les élèves de
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l’enseignement privé et les élèves de l’enseignement public, en se fondant sur la circonstance que les élèves
résidant à Y., et scolarisés dans un établissement privé de V. leur permettant de suivre un enseignement
d’espagnol, bénéficiaient de la gratuité du transport solaire ;
Considérant que l’organisation et le fonctionnement des transports scolaires, dont la responsabilité
a été transférée aux départements en vertu des dispositions de l’article 29 de la loi du 22 juillet 1983,
complétant la loi du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les
départements, les régions et l’Etat, désormais codifiées sous l’article L. 213-11 du code de l’éducation,
présentent le caractère d’un service public dont l’accès est soumis au respect du principe d’égalité entre les
usagers ;
Considérant que la décision litigieuse a été prise en application d’une délibération en date du 13
février 1996, confirmée le 19 décembre 2001, par laquelle le conseil général du DEPARTEMENT DES
ARDENNES a défini les modalités d’organisation du service départemental des transports scolaires ; qu’aux
termes de cette délibération, la collectivité a pris en compte les exigences des articles 5 et 6 du décret
susvisé du 3 janvier 1980 et décidé que seuls les élèves de l’enseignement public fréquentant le collège situé
dans le secteur scolaire dont ils relèvent bénéficient, à titre gratuit, de la délivrance d’une carte de transport
scolaire ; que s’agissant des élèves fréquentant un établissement privé sous contrat ou bénéficiant de la
reconnaissance, le DEPARTEMENT DES ARDENNES a décidé de les prendre en charge sur les circuits
existants selon les mêmes conditions que les élèves de l’enseignement public, dans la mesure où ils sont
inscrits dans l’établissement le plus proche de leur secteur scolaire ; qu’eu égard aux modalités différentes
d’affectation des élèves dans l’enseignement public et dans l’enseignement privé, le DEPARTEMENT DES
ARDENNES a pu légalement distinguer la situation des élèves de l’enseignement public et des élèves de
l’enseignement privé dès lors que les élèves qui fréquentent un établissement d’enseignement public situé
hors du secteur de ramassage scolaire dont dépend leur domicile ne se trouvent pas, à l’égard du service
public des transports scolaires, contrairement à ce qu’a jugé le tribunal, dans la même situation que les
élèves qui fréquentent l’établissement privé le plus proche de leur domicile et que la différence de traitement
analysée plus haut, qui est en rapport avec l’objet de la loi du 31 décembre 1959 susvisée, n’est pas
manifestement disproportionnée au regard de la différence de situation qui la justifie ; que, dans ces
conditions, le DEPARTEMENT DES ARDENNES est fondé à soutenir que c’est à tort que les premiers juges
ont estimé que la décision refusant d’accorder à M. et Mme S. une carte de transport scolaire à titre gratuit
pour leur fille était illégale à raison de la discrimination de traitement existant entre les usagers du service
public ;
Considérant qu’il appartient à la Cour, saisie du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les
autres moyens soulevés par M. et Mme S. devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne et
devant la Cour ;
Considérant, d’une part, que la circonstance qu’en application des dispositions de l’article 6 du
décret susvisé du 3 janvier 1980, l’inspecteur d’académie, directeur des services départementaux de
l’éducation nationale des Ardennes, a, par décision du 30 avril 2002, accordé à X. S. une dérogation pour
qu’elle soit scolarisée au collège Paul Drouot à V., situé hors de son secteur scolaire de rattachement, est
sans influence sur la légalité de la décision en date du 28 juin 2002 par laquelle le président du Conseil
général des Ardennes a refusé de prendre en charge gratuitement ses frais de transport scolaire ;
Considérant, d’autre part, qu’en réservant la gratuité aux seuls collégiens fréquentant
l’établissement privé le plus proche de leur secteur scolaire, le DEPARTEMENT DES ARDENNES établit une
sectorisation scolaire comparable à celle prévalant pour les seuls établissements publics ; qu’il favorise ainsi
l’exercice effectif de la liberté de l’enseignement consacrée par l’article premier de la loi susvisée du 31
décembre 1959, désormais codifié sous l’article L. 151-1 du code de l’éducation, et ne viole ni la laïcité
républicaine, ni la liberté de conscience des collégiens et de leurs parents ; que, par suite, le moyen tiré de
la méconnaissance des principes sus-énoncés, qui n’est au surplus pas assorti de précisions, doit, en tout
état de cause, être écarté ;
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Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que le DEPARTEMENT DES ARDENNES est fondé à
soutenir que, c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé la décision du 28
juin 2002 refusant d’accorder à M. et Mme S. une carte de transport scolaire à titre gratuit ;
Sur l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu’aux termes de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes
les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre
partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient
compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des
raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y pas lieu à cette condamnation » ;
Considérant, d’une part, que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative
font obstacle à ce que soit mise à la charge du DEPARTEMENT DES ARDENNES, qui n’est pas partie
perdante dans la présente instance, la somme que demandent M. et Mme S. au titre des frais exposés par
eux et non compris dans les dépens ;
Considérant, d’autre part, qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la
charge de M. et Mme S. la somme que demande le DEPARTEMENT DES ARDENNES au titre des dispositions
de l’article L 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en date du 19 octobre 2006
est annulé en tant qu’il a annulé la décision en date du 28 juin 2002 par laquelle le président du Conseil
général des Ardennes a refusé de prendre en charge les frais de transport de X. S., scolarisée au collège
public de V. .
Article 2 : La demande d’annulation présentée par M et Mme S. devant le Tribunal administratif de Châlonsen-Champagne, le surplus des conclusions de la requête du DEPARTEMENT DES ARDENNES et les
conclusions de M. et Mme S. au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative
sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au DEPARTEMENT DES ARDENNES et à M et Mme Manuel S..
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CONSEIL D'ETAT
statuant au contentieux
N° 310221
__________
FEDERATION CHRETIENNE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE France
__________
Ordonnance du 22 novembre 2007
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE JUGE DES RÉFÉRÉS
Vu la requête, enregistrée le 25 octobre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par
la FEDERATION CHRETIENNE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE FRANCE, dont le siège social est (…),
représentée par son président en exercice ; la FEDERATION CHRETIENNE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE
FRANCE demande au juge des référés du Conseil d'Etat :
1°) de suspendre l'exécution de la décision de la mission interministérielle de vigilance et de lutte
contre les dérives sectaires (Miviludes) de mettre en ligne sur son site Internet un extrait de la 4ème
couverture du livre de M. Nicolas J. intitulé « Nicolas, 25 ans, rescapé des témoins de Jéhovah » ;
2°) d'enjoindre à la Miviludes de retirer la publication sur son site Internet de l'extrait précité ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de
justice administrative ;
Elle soutient que la condition d'urgence est remplie dès lors que la décision litigieuse constitue un
soutien donné par l'administration à une prise de position partisane et qu'elle porte atteinte à son honneur
et à sa considération ; qu'il existe un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée ; qu'en effet, cette
décision méconnaît les principes de laïcité, de neutralité et d'impartialité de l'Etat ; qu'elle porte atteinte à la
liberté de culte ; qu'elle méconnaît les articles 9 et 14 de la convention
européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle donne la caution
des autorités publiques à des accusations non fondées portant ainsi atteinte à l'honneur, la réputation et la
présomption d'innocence de la FEDERATION CHRETIENNE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE FRANCE ; que la
présomption d'innocence doit être respectée par toute autorité publique ; que la FEDERATION CHRETIENNE
DES TEMOINS DE JEHOVAH DE FRANCE s'est vu reconnaître le statut d'association cultuelle ;
Vu la décision dont la suspension est demandée ;
Vu la copie de la requête à fin d'annulation présentée à l'encontre de cette décision ;
Vu, enregistré le 15 novembre 2007, le mémoire en défense présenté pour la mission interministérielle de
vigilance et de lutte contre les dérives sectaires, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la
charge de la FEDERATION CHRETIENNE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE FRANCE le versement d'une
somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que la requête est irrecevable ; qu'en effet seul le juge du plein contentieux serait compétent
pour connaître d'une éventuelle action en responsabilité fondée sur la méconnaissance de la loi du 29 juillet
1881 relative à la liberté de la presse ; qu'en outre la mesure contestée n'a pas le caractère d'une décision
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susceptible de recours ; que l'urgence n'est pas établie dès lors que le livre de M. Nicolas J. est mentionné
sur de nombreux autres sites Internet et fait l'objet d'autres mesures de publicité et de promotion ; que les
moyens invoqués sont inopérants en ce qu'ils ne visent pas la mention de l'ouvrage sur le site de la
Miviludes mais le contenu de ce livre ; que le principe de neutralité ne limite pas la liberté d'informer et n'a
pas été méconnu ; que la mission de la Miviludes consiste précisément à informer le public sur l'existence de
tels ouvrages ; que la reconnaissance à deux associations locales du statut d'association cultuelle au sens
de l'article 1382 du code général des impôts est sans incidence sur le présent litige ;
Vu, enregistré le 15 novembre 2007, les observations présentées par M. Nicolas J., qui conclut au rejet de la
requête ; il soutient que son ouvrage ne constitue pas une critique de la FEDERATION CHRETIENNE DES
TEMOINS DE JEHOVAH DE FRANCE mais une description de sa propre expérience ;
que les publications de la FEDERATION CHRETIENNE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE FRANCE confirment
ses propos ; que la Miviludes agit dans le cadre de sa mission en informant de la publication d'un tel ouvrage
;
Vu, enregistré le 19 novembre 2007, le mémoire en réplique présenté pour la FEDERATION CHRETIENNE
DES TEMOINS DE JEHOVAH DE FRANCE, qui reprend les conclusions et les moyens de sa requête ; elle
soutient en outre que sa requête, qui tend à l'annulation d'une décision administrative, est indépendante des
actions qui peuvent être engagées sur le fondement de la loi du 29 juillet 1881 et est ainsi parfaitement
recevable ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution, notamment son article 1er ;
Vu la convention européenne de sauvegarde et des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ;
Vu le décret n° 2002-1392 du 28 novembre 2002 instituant une mission interministérielle de vigilance et de
lutte contre les dérives sectaires ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part la FEDERATION CHRETIENNE DES TEMOINS DE
JEHOVAH DE FRANCE et, d'autre part, la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives
sectaires et M. Nicolas J. ;
Vu le procès-verbal de l'audience publique du lundi 19 novembre à 14h30 au cours de laquelle ont été
entendus :
- Me Blondel, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, représentant de la FEDERATION
CHRETIENNE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE FRANCE ;
- Me de Chaisemartin, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, représentant de la mission
interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires et de M. Nicolas J. ;
- les représentants
FRANCE ;
de
la
FEDERATION
CHRETIENNE
DES
TEMOINS
DE
JEHOVAH
DE
- les représentants de la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires ;
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- M. Nicolas J. ;
Considérant que l'article L. 521-1 du code de justice administrative prévoit que le juge des référés
peut ordonner la suspension de l'exécution d'une décision administrative lorsque l'urgence le justifie et qu'il
est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de cette
décision ; que la condition d'urgence posée par ces dispositions n'est satisfaite que dans le cas où l'exécution
de la décision dont la suspension est demandée porte atteinte de manière suffisamment grave et immédiate
à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ;
Considérant que, s'il incombe à la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives
sectaires de respecter, dans l'exercice de la mission d'échange et de diffusion des informations qui lui est
confiée, les obligations d'équilibre et d'impartialité qui s'imposent à toute autorité administrative, la décision
dont la suspension est demandée se borne à prévoir la mention sur l'une des rubriques du site Internet de
cette mission de la parution d'un ouvrage, présenté avec la reproduction de sa quatrième de couverture ;
qu'eu égard à la publicité qui a été faite par ailleurs de cet ouvrage, qui est notamment mentionné sur
plusieurs autres sites Internet, aux modalités indirectes d'accès à l'information contestée sur le site de la
mission et au caractère limité de l'audience de ce site, il ne résulte pas de l'instruction que l'exécution de la
décision litigieuse porte une atteinte suffisamment grave et immédiate aux intérêts que la FEDERATION
CHRETIENNE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE FRANCE entend défendre pour constituer une situation
d'urgence ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de nonrecevoir opposées par la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires, que
les conclusions à fin de suspension présentées par la FEDERATION CHRETIENNE DES TEMOINS DE
JEHOVAH DE FRANCE ne peuvent être accueillies ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin
d'injonction et à fin d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être
également rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette
fédération la somme dont la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires
demande sur le même fondement le versement à l'Etat ;
ORDONNE:
Article 1er : La requête de la FEDERATION CHRETIENNE DES TEMOINS DE JEHOVAH DE FRANCE
est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives
sectaires tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la FEDERATION CHRETIENNE DES TEMOINS DE
JEHOVAH DE FRANCE, à la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives
sectaires, à M. Nicolas J. et au Premier ministre.
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CONSEIL D'ETAT
statuant
au contentieux
N° 285394
REPUBLIQUE FRANÇAISE
__________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
M. S.
__________
M. Philippe Barbat
Rapporteur
__________
M. Rémi Keller
Commissaire du gouvernement
__________
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 4ème et 5ème sous-sections
réunies)
Séance du 9 novembre 2007
Lecture du 5 décembre 2007
__________
Sur le rapport de la 4ème sous-section
de la Section du contentieux
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 septembre et 22 décembre 2005
au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Chain S., représentant son fils mineur
Ranjit S., demeurant (…) ; M. S. demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 19 juillet 2005 par lequel la
cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 19 avril 2005
du tribunal administratif de Melun rejetant sa demande tendant à l'annulation de la décision du 10 décembre
2004 du recteur de l'académie de Créteil confirmant la mesure d'exclusion définitive de Ranjit S. du lycée
Louise Michel de Bobigny prononcée le 5 novembre 2004 par le conseil de discipline du lycée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'éducation ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Philippe Barbat, Auditeur,
- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. S.,
- les conclusions de M. Rémi Keller, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que le conseil de discipline du
lycée Louise Michel de Bobigny (Seine?Saint-Denis), a, lors de sa séance du 5 novembre 2004, prononcé la
sanction de l'exclusion définitive sans sursis de l'établissement de Ranjit S., élève de première, pour ne pas
avoir respecté la loi du 15 mars 2004 encadrant, en application du principe de laïcité, le port de signes ou de
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tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics ; que, par une
décision du 10 décembre 2004, prise après avis de la commission académique d'appel, le recteur de
l'académie de Créteil a maintenu cette sanction ; que M. Chain S., agissant en qualité de représentant de
son fils mineur Ranjit, demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 19 juillet 2005 par lequel la cour
administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 19 avril 2005 par
lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 10 décembre
2004 ;
Considérant que le moyen tiré de ce que l'arrêt attaqué n'aurait pas répondu au moyen tiré de ce
que le sous-turban porté au lycée par Ranjit S. n'est pas un vêtement religieux et n'est pas un signe dont le
port est interdit dans les lycées publics par l'article L. 141-5-1 du code de l'éducation, manque en fait ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 141-5-1 du code de l'éducation issu de la loi du 15 mars
2004 : "Dans les écoles, les collèges et les lycées publics, le port de signes ou tenues par lesquels les élèves
manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit. / Le règlement intérieur rappelle que la
mise en oeuvre d'une procédure disciplinaire est précédée d'un dialogue avec l'élève" ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, si les élèves des écoles, collèges et lycées publics
peuvent porter des signes religieux discrets, sont en revanche interdits, d'une part, les signes ou tenues, tels
notamment un voile ou un foulard islamique, une kippa ou une grande croix, dont le port, par lui-même,
manifeste ostensiblement une appartenance religieuse, d'autre part, ceux dont le port ne manifeste
ostensiblement une appartenance religieuse qu'en raison du comportement de l'élève ;
Considérant qu'en estimant que le "keshi" sikh (sous-turban), porté par Ranjit S. dans l'enceinte
scolaire, bien qu'il soit d'une dimension plus modeste que le turban traditionnel et de couleur sombre, ne
pouvait être qualifié de signe discret et que l'intéressé, par le seul port de ce signe, a manifesté
ostensiblement son appartenance à la religion sikhe, la cour administrative d'appel de Paris n'a pas fait une
inexacte application des dispositions de l'article L. 141-5-1 du code de l'éducation ;
Considérant qu'aux termes de l'article 9 de la convention européenne de sauvegarde des droits de
l'homme et des libertés fondamentales : "1. Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et
de religion ; ce droit implique (...) la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou
collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des
rites. - 2. La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l'objet d'autres restrictions que
celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la
sécurité publique, à la protection de l'ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des
droits et libertés d'autrui" ; que selon l'article 14 de la même convention : "La jouissance des droits et
libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment
sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions,
l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre
situation" ; que, compte tenu de l'intérêt qui s'attache au respect du principe de laïcité dans les
établissements scolaires publics, la sanction de l'exclusion définitive prononcée à l'égard d'un élève qui ne se
conforme pas à l'interdiction légale du port de signes extérieurs d'appartenance religieuse n'entraîne pas une
atteinte excessive à la liberté de pensée, de conscience et de religion garantie par l'article 9 cité ci?dessus ;
que ladite sanction, qui vise à assurer le respect du principe de laïcité dans les établissements scolaires
publics sans discrimination entre les confessions des élèves, ne méconnaît pas non plus le principe de
non?discrimination édicté par les stipulations de l'article 14 cité ci?dessus ; que dès lors, en jugeant que la
décision attaquée ne méconnaissait pas les articles 9 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des
droits de l'homme et des libertés fondamentales, la cour administrative d'appel de Paris n'a commis aucune
erreur de droit ;
Considérant que les moyens tirés de ce que la décision attaquée serait constitutive d'une
discrimination à l'égard de la minorité nationale que formerait la communauté sikhe de France, contraire à
l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales
et d'une violation de l'article 8 de la même convention, sont nouveaux en cassation et ne sont donc pas
recevables ;
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Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Chain S. n'est pas fondé à demander l'annulation
de l'arrêt attaqué ;
DECIDE:
-------------Article 1er : La requête formée par M. Chain S. représentant son fils mineur Ranjit S. est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Chain S. et au ministre de l'éducation nationale.
Copie en sera adressée pour information au recteur de l'académie de Créteil.
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CONSEIL D'ETAT
statuant
au contentieux
N° 285395
__________
REPUBLIQUE FRANÇAISE
M. S.
__________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
M. Philippe Barbat
Rapporteur
__________
M. Rémi Keller
Commissaire du gouvernement
__________
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 4ème et 5ème sous-sections
réunies)
Séance du 9 novembre 2007
Lecture du 5 décembre 2007
__________
Sur le rapport de la 4ème sous-section
de la Section du contentieux
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 septembre et 22
décembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Gurdial S., représentant
son fils mineur Jasvir S., demeurant (…) ; M. S. demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 19 juillet
2005 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du
jugement du 19 avril 2005 du tribunal administratif de Melun rejetant sa demande tendant à l'annulation de
la décision du 10 décembre 2004 du recteur de l'académie de Créteil confirmant la mesure d'exclusion
définitive de Jasvir S. du lycée Louise Michel de Bobigny prononcée par le conseil de discipline du lycée ;
…………………………………………………………………………
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'éducation ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Philippe Barbat, Auditeur,
- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. S.,
- les conclusions de M. Rémi Keller, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que le conseil de discipline du
lycée Louise-Michel de Bobigny (Seine?Saint?Denis), a, lors de sa séance du 5 novembre 2004, prononcé la
sanction de l'exclusion définitive sans sursis de l'établissement de Jasvir S., élève de seconde, pour ne pas
avoir respecté la loi du 15 mars 2004 encadrant, en application du principe de laïcité, le port de signes ou de
tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics ; que, par une
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décision du 10 décembre 2004, prise après avis de la commission académique d'appel, le recteur de
l'académie de Créteil a maintenu cette sanction ; que M. Gurdial S., agissant en qualité de représentant de
son fils mineur Jasvir S., demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 19 juillet 2005 par lequel la cour
administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 19 avril 2005 par
lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 10 décembre
2004 ;
Considérant que le moyen tiré de ce que l'arrêt attaqué n'aurait pas répondu au moyen tiré de ce
que le sous-turban porté au lycée par Jasvir S. n'est pas un vêtement religieux et n'est pas un signe dont le
port est interdit dans les lycées publics par l'article L. 141?5-1 du code de l'éducation, manque en fait ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 141-5-1 du code de l'éducation issu de la loi du 15 mars
2004 : "Dans les écoles, les collèges et les lycées publics, le port de signes ou tenues par lesquels les élèves
manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit. / Le règlement intérieur rappelle que la
mise en oeuvre d'une procédure disciplinaire est précédée d'un dialogue avec l'élève" ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, si les élèves des écoles, collèges et lycées publics
peuvent porter des signes religieux discrets, sont en revanche interdits, d'une part, les signes ou tenues, tels
notamment un voile ou un foulard islamique, une kippa ou une grande croix, dont le port, par lui?même,
manifeste ostensiblement une appartenance religieuse, d'autre part, ceux dont le port ne manifeste
ostensiblement une appartenance religieuse qu'en raison du comportement de l'élève ;
Considérant qu'en estimant que le "keshi" sikh (sous?turban), porté par Jasvir S. dans l'enceinte
scolaire, bien qu'il soit d'une dimension plus modeste que le turban traditionnel et de couleur sombre, ne
pouvait être qualifié de signe discret et que l'intéressé, par le seul port de ce signe, a manifesté
ostensiblement son appartenance à la religion sikhe, la cour administrative d'appel de Paris n'a pas fait une
inexacte application des dispositions de l'article L. 141-5-1 du code de l'éducation ;
Considérant qu'aux termes de l'article 9 de la convention européenne de sauvegarde des droits de
l'homme et des libertés fondamentales : "1. Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et
de religion ; ce droit implique (...) la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou
collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des
rites. - 2. La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l'objet d'autres restrictions que
celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la
sécurité publique, à la protection de l'ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des
droits et libertés d'autrui" ; que selon l'article 14 de la même convention : "La jouissance des droits et
libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment
sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions,
l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre
situation" ; que, compte tenu de l'intérêt qui s'attache au respect du principe de laïcité dans les
établissements scolaires publics, la sanction de l'exclusion définitive prononcée à l'égard d'un élève qui ne se
conforme pas à l'interdiction légale du port de signes extérieurs d'appartenance religieuse n'entraîne pas une
atteinte excessive à la liberté de pensée, de conscience et de religion garantie par l'article 9 cité ci?dessus ;
que ladite sanction, qui vise à assurer le respect du principe de laïcité dans les établissements scolaires
publics sans discrimination entre les confessions des élèves, ne méconnaît pas non plus le principe de
non?discrimination édicté par les stipulations de l'article 14 cité ci?dessus ; que dès lors, en jugeant que, la
décision attaquée ne méconnaissait pas les articles 9 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des
droits de l'homme et des libertés fondamentales, la cour administrative d'appel de Paris n'a commis aucune
erreur de droit ;
Considérant que les moyens tirés de ce que la décision attaquée serait constitutive d'une
discrimination à l'égard de la minorité nationale que formerait la communauté sikhe de France, contraire à
l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales
et d'une violation de l'article 8 de la même convention, sont nouveaux en cassation et ne sont donc pas
recevables ;
© La lettre du droit des religions n°28 décembre 2007 / janvier 2008
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Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Gurdial S. n'est pas fondé à demander
l'annulation de l'arrêt attaqué ;
DECIDE :
----------------Article 1er : La requête formée par M. Gurdial S. représentant son fils mineur Jasvir S. est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Gurdial S. et au ministre de l'éducation nationale.
Copie en sera adressée pour information au recteur de l'académie de Créteil.
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CONSEIL D'ETAT
statuant
au contentieux
N° 285396
__________
REPUBLIQUE FRANÇAISE
M. S.
__________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
M. Philippe Barbat
Rapporteur
__________
M. Rémi Keller
Commissaire du gouvernement
__________
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 4ème et 5ème sous-sections
réunies)
Séance du 9 novembre 2007
Lecture du 5 décembre 2007
__________
Sur le rapport de la 4ème sous-section
de la Section du contentieux
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 septembre et 22 décembre 2005
au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Bikramjit S., demeurant (…) ; M. S.
demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 19 juillet 2005 par lequel la cour administrative d'appel de
Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement du 19 avril 2005 du tribunal administratif de
Melun rejetant sa requête tendant à l'annulation de la décision du 10 décembre 2004 du recteur de
l'académie de Créteil confirmant la mesure d'exclusion définitive du lycée Louise Michel de Bobigny
prononcée à son encontre le 5 novembre 2004 par le conseil de discipline du lycée ;
…………………………………………………………………………
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'éducation ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Philippe Barbat, Auditeur,
- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. S.,
- les conclusions de M. Rémi Keller, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que le conseil de discipline du
lycée Louise-Michel de Bobigny (Seine?Saint?Denis), a, lors de sa séance du 5 novembre 2004, prononcé la
sanction de l'exclusion définitive sans sursis de l'établissement de M. Bikramjit S., élève de terminale, pour
ne pas avoir respecté la loi du 15 mars 2004 encadrant, en application du principe de laïcité, le port de
signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics ;
© La lettre du droit des religions n°28 décembre 2007 / janvier 2008
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que, par une décision du 10 décembre 2004, prise après avis de la commission académique d'appel, le
recteur de l'académie de Créteil a maintenu cette sanction ; que M. S. demande au Conseil d'Etat d'annuler
l'arrêt du 19 juillet 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à
l'annulation du jugement du 19 avril 2005 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande
d'annulation de la décision du 10 décembre 2004 ;
Considérant que le moyen tiré de ce que l'arrêt attaqué n'aurait pas répondu au moyen tiré de ce
que le sous-turban porté au lycée par M. S. n'est pas un vêtement religieux et n'est pas un signe dont le
port est interdit dans les lycées publics par l'article L. 141-5-1 du code de l'éducation, manque en fait ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 141-5-1 du code de l'éducation issu de la loi du 15 mars
2004 : "Dans les écoles, les collèges et les lycées publics, le port de signes ou tenues par lesquels les élèves
manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit. / Le règlement intérieur rappelle que la
mise en oeuvre d'une procédure disciplinaire est précédée d'un dialogue avec l'élève" ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, si les élèves des écoles, collèges et lycées publics
peuvent porter des signes religieux discrets, sont en revanche interdits, d'une part, les signes ou tenues, tels
notamment un voile ou un foulard islamique, une kippa ou une grande croix, dont le port, par lui?même,
manifeste ostensiblement une appartenance religieuse, d'autre part, ceux dont le port ne manifeste
ostensiblement une appartenance religieuse qu'en raison du comportement de l'élève ;
Considérant qu'en estimant que le "keshi" sikh (sous?turban), porté par M. S. dans l'enceinte
scolaire, bien qu'il soit d'une dimension plus modeste que le turban traditionnel et de couleur sombre, ne
pouvait être qualifié de signe discret et que l'intéressé, par le seul port de ce signe, a manifesté
ostensiblement son appartenance à la religion sikhe, la cour administrative d'appel de Paris n'a pas fait une
inexacte application des dispositions de l'article L. 141-5-1 du code de l'éducation ;
Considérant qu'aux termes de l'article 9 de la convention européenne de sauvegarde des droits de
l'homme et des libertés fondamentales : "1. Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et
de religion ; ce droit implique (...) la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou
collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des
rites. - 2. La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l'objet d'autres restrictions que
celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la
sécurité publique, à la protection de l'ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des
droits et libertés d'autrui" ; que selon l'article 14 de la même convention : "La jouissance des droits et
libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment
sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions,
l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre
situation" ; que, compte tenu de l'intérêt qui s'attache au respect du principe de laïcité dans les
établissements scolaires publics, la sanction de l'exclusion définitive prononcée à l'égard d'un élève qui ne se
conforme pas à l'interdiction légale du port de signes extérieurs d'appartenance religieuse n'entraîne pas une
atteinte excessive à la liberté de pensée, de conscience et de religion garantie par l'article 9 cité ci?dessus ;
que ladite sanction, qui vise à assurer le respect du principe de laïcité dans les établissements scolaires
publics sans discrimination entre les confessions des élèves, ne méconnaît pas non plus le principe de
non?discrimination édicté par les stipulations de l'article 14 cité ci?dessus ; que dès lors, en jugeant que, la
décision attaquée ne méconnaissait pas les articles 9 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des
droits de l'homme et des libertés fondamentales, la cour administrative d'appel de Paris n'a commis aucune
erreur de droit ;
Considérant que les moyens tirés de ce que la décision attaquée serait constitutive d'une
discrimination à l'égard de la minorité nationale que formerait la communauté sikhe de France, contraire à
l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales
et d'une violation de l'article 8 de la même convention, sont nouveaux en cassation et ne sont donc pas
recevables ;
© La lettre du droit des religions n°28 décembre 2007 / janvier 2008
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Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. S. n'est pas fondé à demander l'annulation de
l'arrêt attaqué ;
DECIDE:
-------------Article 1er : La requête formée par M. S. est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Bikramjit S. et au ministre de l'éducation nationale.
Copie en sera adressée pour information au recteur de l'académie de Créteil.
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CONSEIL D'ETAT
statuant
au contentieux
N° 295671
__________
REPUBLIQUE FRANÇAISE
M. et Mme G.
__________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
M. Philippe Barbat
Rapporteur
__________
M. Rémi Keller
Commissaire du gouvernement
__________
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 4ème et 5ème sous-sections
réunies)
Séance du 9 novembre 2007
Lecture du 5 décembre 2007
__________
Sur le rapport de la 4ème sous-section
de la Section du contentieux
Vu la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 20 juillet, 19 octobre et 9
novembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme Bessam G.,
agissant au nom de leur fille mineure Sara, demeurant (…) ; M. et Mme G. demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 24 mai 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté leur
requête tendant à l'annulation du jugement du 30 août 2005 du tribunal administratif de Nancy rejetant leur
demande tendant à l'annulation de la décision du 6 décembre 2004 par laquelle le recteur de l'académie de
Nancy?Metz a confirmé l'exclusion définitive de leur fille Sara du collège Guillaume?Apollinaire au Tholy
(Vosges) prononcée le 22 novembre 2004 par le conseil de discipline de l'établissement ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L.
761-1 du code de justice administrative ;
…………………………………………………………………………
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'éducation, notamment son article L. 141?5?1 issu de la loi n° 2004?228 du 15 mars 2004 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Philippe Barbat, Auditeur,
- les observations de Me Blanc, avocat de M. et Mme G.,
© La lettre du droit des religions n°28 décembre 2007 / janvier 2008
120
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- les conclusions de M. Rémi Keller, Commissaire du gouvernement ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 141?5?1 du code de l'éducation, issu de
l'article 1er de la loi du 15 mars 2004 : "Dans les écoles, les collèges et les lycées publics, le port de signes
ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit. / Le
règlement intérieur rappelle que la mise en œuvre d'une procédure disciplinaire est précédée d'un dialogue
avec l'élève." ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, si les élèves des écoles, collèges et lycées publics
peuvent porter des signes religieux discrets, sont en revanche interdits, d'une part, les signes ou tenues, tels
notamment un voile ou un foulard islamique, une kippa ou une grande croix, dont le port, par lui-même,
manifeste ostensiblement une appartenance religieuse, d'autre part, ceux dont le port ne manifeste
ostensiblement une appartenance religieuse qu'en raison du comportement de l'élève ;
Considérant qu'après avoir relevé, par une appréciation souveraine des faits, que le carré de tissu de
type bandana couvrant la chevelure de Mlle G. était porté par celle?ci en permanence et qu'elle?même et sa
famille avaient persisté avec intransigeance dans leur refus d'y renoncer, la cour administrative d'appel de
Nancy a pu, sans faire une inexacte application des dispositions de l'article L. 141?5?1 du code de
l'éducation, déduire de ces constatations que Mlle G. avait manifesté ostensiblement son appartenance
religieuse par le port de ce couvre?chef, qui ne saurait être qualifié de discret, et, dès lors, avait méconnu
l'interdiction posée par la loi ;
Considérant, en deuxième lieu, que la sanction de l'exclusion définitive de l'établissement scolaire
prononcée à l'encontre de Mlle G. résulte de son refus de respecter l'interdiction édictée à l'article L. 141?5?1
du code de l'éducation ; que cette interdiction ne méconnaît pas les stipulations de l'article 9 de la
convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatives à la
liberté de pensée, de conscience et de religion, dès lors qu'elle ne porte pas à cette liberté une atteinte
excessive au regard de l'objectif d'intérêt général poursuivi visant à assurer le respect du principe de laïcité
dans les établissements scolaires publics ; qu'ainsi, cette sanction ne saurait par elle-même méconnaître ces
stipulations ; qu'il s'ensuit que la cour administrative d'appel de Nancy n'a pas commis d'erreur de droit en
jugeant que la sanction attaquée ne méconnaissait pas les dispositions de l'article 9 de la convention
européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, en troisième lieu, qu'à la suite de son exclusion définitive du collège, Mlle G. pouvait,
pour bénéficier du droit à l'instruction, soit être inscrite dans un établissement public en se conformant aux
dispositions de l'article L. 141?5?1 du code de l'éducation, soit être inscrite au centre national de
l'enseignement à distance (CNED), soit encore être inscrite dans un établissement privé, soit enfin être
instruite dans sa famille dans les conditions prévues par l'article L. 131?2 du code de l'éducation, ainsi,
d'ailleurs, que le recteur l'a indiqué à ses parents en leur notifiant la sanction prise à son encontre ; qu'ainsi,
la cour administrative d'appel de Nancy n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que cette sanction ne
méconnaissait pas les stipulations de l'article 2 du premier protocole additionnel de la convention
européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales selon lesquelles nul ne peut
être privé du droit à l'instruction ;
Considérant, en quatrième lieu, que la sanction prise à l'encontre de Mlle G., qui vise à assurer le
respect du principe de laïcité dans les établissements scolaires publics sans discrimination entre les
confessions des élèves, ne méconnaît pas le principe général de non discrimination édicté par les stipulations
de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés
fondamentales ; qu'ainsi, la cour administrative d'appel de Nancy n'a pas commis d'erreur de droit en
jugeant que cette sanction ne méconnaissait pas ces stipulations ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander
l'annulation de l'arrêt attaqué ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, leurs conclusions
tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761?1 du code de justice administrative ;
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DECIDE:
-------------Article 1er : La requête de M. et Mme G. est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme Bessam G. et au ministre de l'éducation
nationale.
Copie en sera adressée pour information au recteur de l'académie de Nancy-Metz.
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CONSEIL D'ETAT
statuant
au contentieux
N° 294439
REPUBLIQUE FRANÇAISE
__________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
M. V.
__________
M. Brice Bohuon
Rapporteur
__________
Mme Claire Landais
Commissaire du gouvernement
__________
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 10ème et 9ème sous-sections réunies)
Sur le rapport de la 10ème sous-section
de la section du contentieux
Séance du 14 novembre 2007
Lecture du 19 décembre 2007
__________
Vu la requête, enregistrée le 19 juin 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M.
Eugène V., demeurant (…) à Strasbourg (67000) ; M. V. demande au Conseil d’Etat :
1°) d'annuler le décret du 18 avril 2006 modifiant le décret du 26 mars 1852 sur l'organisation des cultes
protestants dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ;
2°) de condamner l’Etat aux entiers dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 14 novembre 2007, présentée pour M. V. ;
Vu la Constitution, notamment ses articles 34 et 37 ;
Vu la charte des Nations-Unies signée à San Francisco le 26 juin 1945 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
Vu les articles organiques applicables aux cultes protestants de la loi du 18 germinal an X relative à
l’organisation des cultes ;
Vu la loi locale du 21 juin 1905 relative à l’organisation synodale de l’Eglise réformée en Alsace-Lorraine et
portant abrogation de certaines dispositions de la loi du 18 germinal an X ;
Vu la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du BasRhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ;
Vu le décret du 26 mars 1852 modifié sur l’organisation des cultes protestants ;
Vu le code de justice administrative ;
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123
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Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Brice Bohuon, Auditeur,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de M. Eugène V., du Conseil presbytéral de
l'église réformée de Lixheim du Conseil presbytéral de l'église réformée de Sarrebourg, de M. Michel C., de
M. Sylvain D., de M. Philippe F., de M. Jean-Marc S., de M. Gabriel V.,
- les conclusions de Mme Claire Landais, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. V. demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 18
avril 2006 modifiant le décret du 26 mars 1852 sur l'organisation des cultes protestants dans les
départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle en tant que ce décret porte atteinte à la liberté
d’exercice de culte des membres de l’Eglise réformée d’Alsace et de Lorraine ;
Sur l’intervention du Conseil presbytéral de l'église réformée de Lixheim et autres :
Considérant que le Conseil presbytéral de l'église réformée de Lixheim et autres ont intérêt à
l’annulation du décret attaqué ; qu’ainsi, leur intervention est recevable ;
Sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par le ministre de l’intérieur et de
l’aménagement du territoire ;
Sur les conclusions aux fins d’annulation :
Considérant que l’article 3 du décret du 18 avril 2006 instaure une Union des églises protestantes
d'Alsace et de Lorraine, « chargée de conduire des actions communes et de resserrer les liens entre les deux
églises protestantes d'Alsace et de Lorraine », qui comprend trois organes dont notamment un conseil
restreint de l’Union composée du président et du vice-président du directoire de l'église protestante de la
confession d'Augsbourg d'Alsace et de Lorraine et de deux membres de ce directoire désignés par celui-ci
ainsi que du président du conseil synodal de l'Eglise protestante réformée d'Alsace et de Lorraine et d'un
membre de ce conseil synodal désigné par celui-ci ; qu’aux termes de l’article 5 du décret du 26 mars 1852
dans sa rédaction issue de l’article 5 du décret attaqué : « Les consistoires de l'église réformée nomment les
pasteurs sur proposition du conseil presbytéral et après avis du conseil restreint de l’Union. Les consistoires
de l'église réformée proposent au ministre de l'intérieur après approbation du conseil restreint de l'Union, la
création ou le transfert des postes pastoraux. » ; qu’en vertu des dispositions de l’article 2 de la loi locale du
21 juin 1905 susvisée, le synode de l’ERAL, sans préjudice des attributions appartenant d'après le droit
existant aux différents consistoires, délibère et statue sur les affaires de l'église en général et a notamment
pour fonctions de veiller au maintien de la constitution et de la discipline de l'église, de faire ou d'approuver
les règlements concernant le régime de l'église ainsi que de juger en dernier ressort les difficultés auxquelles
leur application peut donner lieu ;
Considérant en premier lieu, que le régime applicable aux établissements publics du culte dans les
départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ne relève pas de la compétence exclusive du
législateur et peut être réformé par des dispositions réglementaires dès lors que ces dispositions n’ont pour
effet ni de créer une nouvelle catégorie d’établissement public ni de modifier, dans un sens ou dans l’autre,
les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice de la liberté du culte ; que, s’agissant de
l'Eglise protestante réformée d'Alsace et de Lorraine, le décret attaqué ne confie aucun pouvoir propre de
décision aux organes de l’Union ; qu’en particulier, contrairement à ce que soutient le requérant, la seule
circonstance que ce décret, d’une part, substitue l’avis facultatif du conseil restreint de l’Union à l’avis
facultatif du conseil synodal sur les admissions au ministère pastoral, alors même que les consistoires
conservent leur pouvoir de nomination, et d’autre part, en matière de création et de transfert de postes
pastoraux, substitue au pouvoir d’approbation du conseil synodal le pouvoir d’approbation du conseil
© La lettre du droit des religions n°28 décembre 2007 / janvier 2008
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restreint de l’Union, alors même que les consistoires conservent leur pouvoir de proposition, ne suffit pas,
par elle-même, à porter atteinte aux garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice de la
liberté du culte ; que par suite, le moyen tiré de ce que le décret attaqué interviendrait dans le domaine
législatif dès lors qu’il porte atteinte aux règles constitutives de l’Eglise réformée d’Alsace et de Lorraine ne
peut qu’être écarté ;
Considérant en second lieu que l'article 37 de la Constitution du 4 octobre 1958 habilite le
gouvernement à modifier, par décret en Conseil d'Etat, les textes de forme législative antérieurs à la
promulgation de la Constitution dès lors que ceux-ci ressortissent à la compétence du pouvoir réglementaire
telle qu'elle résulte du texte constitutionnel ; que cette procédure est susceptible de recevoir application aux
lois locales maintenues en vigueur dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle pour
autant qu'elles touchent à des matières relevant de la compétence réglementaire en vertu de la Constitution
; qu’en tout état de cause, tel est le cas de l’article 2 de la loi locale du 21 juin 1905 qui ne relève d'aucune
des matières réservées à la loi par la Constitution ; qu’ainsi, le moyen tiré de ce que le décret attaqué
interviendrait dans le domaine législatif au motif qu’il modifierait les dispositions de l’article 2 de la loi locale
du 21 juin 1905 précitée ne peut qu’être écarté ;
Considérant enfin que ni la déclaration des droits des personnes appartenant à des minorités
nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques, adoptée par l'assemblée générale des Nations unies
dans sa résolution 47/135 du 18 décembre 1992, ni de la recommandation 1134 du 1er octobre 1990 relative
aux droits des minorités de l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe ne sauraient davantage être
utilement invoquées ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. V. n’est pas fondé à demander l’annulation du
décret attaqué ; que ses conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice
administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;
DECIDE:
-------------Article 1er : L’intervention du Conseil presbytéral de l'église réformée de Lixheim et autres est admise.
Article 2 : La requête de M. V. est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Eugène V., au Conseil presbytéral de l'église réformée de
Lixheim, au Conseil presbytéral de l'église réformée de Sarrebourg, à M. Michel C., à M. Sylvain D., à
M. Philippe F., à M. Jean-Marc S., à M. Gabriel V. et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des
collectivités territoriales.
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125
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CONSEIL D'ETAT
statuant
au contentieux
Nos 295828,310522
__________
REPUBLIQUE FRANÇAISE
- CONSEIL PRESBYTERAL DE L'EGLISE
REFORMEE DE SARREBOURG et autres
- M. Romain G.
__________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
M. Brice Bohuon
Rapporteur
__________
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 10ème et 9ème sous-sections réunies)
Mme Claire Landais
Commissaire du gouvernement
__________
Sur le rapport de la 10ème sous-section
de la section du contentieux
Séance du 14 novembre 2007
Lecture du 19 décembre 2007
__________
Vu, 1°) sous le n° 295828, le jugement en date du 17 juillet 2006, enregistré le 25 juillet 2006 au secrétariat
du contentieux du Conseil d'Etat, par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a renvoyé au Conseil
d'Etat, en application des articles R. 341-1 et R. 341-2 du code de justice administrative, la demande,
enregistrée le 20 janvier 2005 au greffe du tribunal administratif de Strasbourg, présentée pour le CONSEIL
PRESBYTERAL DE L'EGLISE REFORMEE DE SARREBOURG, dont le siège est (…), le CONSEIL PRESBYTERAL
DE L'EGLISE REFORMEE DE HAGONDANGE, dont le siège est (…), M. Sylvain D., demeurant (…), M. Philippe
F., demeurant (…), M. Eugène V., demeurant (…) ; le CONSEIL PRESBYTERAL DE L'EGLISE REFORMEE DE
SARREBOURG et autres demandent :
1°) l’annulation de la délibération du 21 novembre 2004 par laquelle le synode de l'Eglise réformée
d'Alsace et de Lorraine (ERAL) a adopté le projet d'une Union entre l'Eglise réformée d'Alsace et de Lorraine
et l'Eglise de la Confession d'Augsbourg d'Alsace et de Lorraine ;
2°) la condamnation du Synode de l’Eglise réformée d’Alsace et de Lorraine aux dépens ;
Vu, 2°) sous le n° 310522, le jugement en date du 17 juillet 2006, enregistré le 25 juillet 2006 au secrétariat
du contentieux du Conseil d'Etat, par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a renvoyé au Conseil
d'Etat, en application des articles R. 341-1 et R. 341-2 du code de justice administrative, la demande
enregistrée le 2 février 2005 au greffe du tribunal administratif de Strasbourg, présentée pour M. Romain
G. demeurant (…) ; M. G. demande l’annulation des délibérations du 21 novembre 2004 par lesquelles le
synode de l'Eglise réformée d'Alsace et de Lorraine (ERAL) et le consistoire supérieur de l'Eglise de la
Confession d'Augsbourg d'Alsace et de Lorraine ont adopté le projet d'une Union entre l'Eglise réformée
d'Alsace et de Lorraine et l'Eglise de la Confession d'Augsbourg d'Alsace et de Lorraine ;
il soutient que toute délibération du synode portant atteinte à la constitution et à la discipline de l’ERAL fait
grief aux paroissiens de l’ERAL ; que la décision attaquée comporte des mesures partielles d’exécution
immédiate, en particulier en matière budgétaire ; que le synode a excédé sa compétence en soumettant au
gouvernement une telle décision sans avoir obtenu l’approbation unanime des consistoires ; qu’elle est
entachée de vices de procédure dès lors que l’ordre du jour de la réunion du synode n’a pas été soumis à
© La lettre du droit des religions n°28 décembre 2007 / janvier 2008
126
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l’agrément du gouvernement ; que la délibération contestée ne pouvait être adoptée à l’occasion d’une
assemblée commune avec le consistoire supérieur de l'Eglise de la Confession d'Augsbourg d'Alsace et de
Lorraine ; que la décision contestée est contraire à la loi de 1802, à celle du 21 juin 1905 et à la liberté du
culte réformé ; qu’elle est contraire au décret du 26 mars 1852 en matière de nomination des pasteurs ; que
l’ERAL ne peut abandonner la plénitude de ses pouvoirs en matière administrative, doctrinale et religieuses ;
Vu la délibération attaquée ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 avril 2005 au greffe du tribunal administratif de Strasbourg,
présenté pour l’ERAL qui conclut au rejet de la requête et à ce que M. G. soit condamné à lui verser 2 000
euros au titre des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que la
demande est tardive en ce que la décision contestée a été adoptée par le synode le 21 novembre 2004 et
publiée en décembre 2004 ; qu’elle est dirigée contre un acte préparatoire ne faisant pas grief dès lors
qu’aucun texte ne confie de pouvoir réglementaire d’auto-organisation aux instances de l’ERAL et qu’il
n’appartient qu’aux pouvoirs législatif et réglementaire, qui n’ont juridiquement aucun besoin d’un avis de
l’ERAL, d’organiser les cultes ; que de surcroît, la décision contestée a été prise conformément aux
procédures en vigueur ; qu’en effet, l’accord unanime des consistoires en vue d’une décision synodale n’est
plus nécessaire depuis l’entrée en vigueur de la loi du 21 juin 1905 ; que la convocation du synode siégeant
en assemblée commune s’est faite dans les règles dès lors que la seule demande du consistoire de Metz ne
suffisait pas à rendre obligatoire la convocation d’un synode extraordinaire ; que les consistoires ont été
consultés et que leurs attributions ont été respectées ; que de même, la détermination de l’ordre du jour n’a
violé aucune règle en ce que n’est plus exigé l’agrément du gouvernement mais uniquement une
communication pour information ; que la nature juridique des décisions prises par l’assemblée commune est
identique à celle des décisions émanant de chacun des organes la composant ; qu’en outre, la décision
contestée ne constituant qu’un vœu purement déclaratif, le changement de nom de l’ERAL n’a aucune portée
normative ; que le projet, qui ne comporte aucune mesure d’exécution immédiate au plan financier,
respectera l’autonomie financière des paroisses ; que la constitution de l’ERAL n’est nullement remise en
cause par la décision ; que toute décision est soumise au contrôle de l’Etat qui, seul, pourrait modifier les
dispositions relatives à la gestion du corps pastoral ; que la commission des ministères prévues par la
décision de l’Union n’est pas l’organe d’embauche des pasteurs, se borne à attribuer le certificat d’aptitude à
la fonction pastorale et aura au demeurant les mêmes attributions que la commission pro ministerio reconnue
aujourd’hui par le service des cultes ; que les responsabilités des consistoires ne sont pas remises en cause
par le projet d’Union ; qu’enfin, la décision de l’ERAL ne remet pas en question la liberté de culte ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 14 juin 2005 au greffe du tribunal administratif de Strasbourg,
présenté pour M. G. qui reprend les conclusions de sa requête par les mêmes moyens ; il soutient en outre
que sa demande n’est pas tardive dès lors qu’il n’a eu connaissance de la délibération attaquée que le 3
janvier 2005 ; que la délibération ne comporte aucun appel au gouvernement et ne constitue pas un vœu
purement déclaratif ni un acte préparatoire ;
Vu le nouveau mémoire en défense, enregistré le 20 avril 2006 au greffe du tribunal administratif de
Strasbourg, présenté pour l’ERAL qui conclut au non-lieu à statuer ; elle soutient que la parution au Journal
officiel le 19 avril 2006 du décret modifiant le décret du 26 mars 1852 rend sans objet la demande ;
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 24 mai 2006 au greffe du tribunal administratif de Strasbourg,
présenté pour M. G. qui persiste dans ses conclusions ; il soutient que la parution du décret le 19 avril 2006
ne rend pas sans objet sa demande ; que certaines des dispositions de la déclaration attaquée n’ont pas été
reprises par le décret ;
Vu les pièces du dossier dont il ressort que les requêtes ont été communiquées au ministre de l’intérieur et
de l’aménagement du territoire qui n’a pas produit d’observations ;
Vu les autres pièces du dossier ;
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Vu la note en délibéré, enregistrée le 14 novembre 2007, présentée pour le CONSEIL PRESBYTERAL DE
L'EGLISE REFORMEE DE SARREBOURG et autres ;
Vu les articles organiques applicables aux cultes protestants de la loi du 18 germinal an X relative à
l’organisation des cultes ;
Vu le décret du 26 mars 1852 modifié sur l’organisation des cultes protestants ;
Vu la loi locale du 21 juin 1905 relative à l’organisation synodale de l’Eglise réformée en Alsace-Lorraine ;
Vu la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du BasRhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ;
Vu le décret du 18 avril 2006 modifiant le décret du 26 mars 1852, sur l’organisation des cultes protestants
dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Brice Bohuon, Auditeur,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat du CONSEIL PRESBYTERAL DE L'EGLISE
REFORMEE DE SARREBOURG, du CONSEIL PRESBYTERAL DE L'EGLISE REFORMEE DE HAGONDANGE, du
CONSEIL PRESBYTERAL DE L'EGLISE REFORMEE DE LIXHEIM, de M. Michel C., de M. Sylvain D., de M.
Philippe F., de M. Jean-Marc S., de M. Gabriel V., de M. Eugène V. ;
- les conclusions de Mme Claire Landais, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, d’une part, sous le n° 295828, le CONSEIL PRESBYTERAL DE L'EGLISE REFORMEE DE
SARREBOURG et autres et, d’autre part, sous le n° 310522, M. G. demandent l’annulation pour excès de
pouvoir de la délibération du 21 novembre 2004 par laquelle le synode de l'Eglise réformée d'Alsace et de
Lorraine (ERAL) a adopté le projet d'une Union entre l'Eglise réformée d'Alsace et de Lorraine et l'Eglise de la
Confession d'Augsbourg d'Alsace et de Lorraine ; que M. G. demande en outre l’annulation de la délibération
par laquelle le consistoire supérieur de l'Eglise de la Confession d'Augsbourg d'Alsace et de Lorraine a adopté
le même projet ; que ces requêtes présentent à juger les mêmes questions et qu’il y a lieu de les joindre
pour statuer par une seule décision ;
Sur les conclusions aux fins de non-lieu à statuer présentées par l’ERAL :
Considérant que la circonstance que le décret du 18 avril 2006 postérieur à l’introduction de la requête ait
repris la majeure partie des dispositions contestées n’a pas pour effet de priver d’objet les présentes
requêtes ;
Sur les conclusions tendant à l’annulation de la délibération de l’ERAL :
Considérant que la délibération attaquée, qui porte sur un projet de création d’une Union des Eglises
protestantes d'Alsace et de Lorraine, « chargée de conduire des actions communes et de resserrer les liens
entre les deux Eglises protestantes d'Alsace et de Lorraine » ainsi que sur la création d’un corps pastoral
unique et d’une commission des ministères commune chargée de délivrer aux candidats au ministère
pastoral un certificat d’aptitude aux fonctions pastorales, constitue non un acte faisant grief mais un vœu
adressé au gouvernement, manifestement insusceptible de faire l'objet d'un recours devant le juge de
l'excès de pouvoir ; que, dès lors, ni le CONSEIL PRESBYTERAL DE L'EGLISE REFORMEE DE SARREBOURG et
autres, ni M. G. ne sont recevables à en demander l’annulation ; que cette irrecevabilité n’est pas susceptible
d’être couverte en cours d’instance ;
© La lettre du droit des religions n°28 décembre 2007 / janvier 2008
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Sur les conclusions de M. G. tendant à l’annulation de la délibération de l'Eglise de la Confession
d'Augsbourg d'Alsace et de Lorraine :
Considérant que M. G., qui ne soutient pas être membre de l’église de la Confession d’Augsbourg d’Alsace et
de Lorraine, est sans intérêt et partant sans qualité pour demander l’annulation de la délibération susvisée
du consistoire supérieur de cette église, contre laquelle il ne formule d’ailleurs aucun moyen ; que, dans ces
conditions, les conclusions de la requête de M. G. qui sont dirigées contre cette délibération sont entachées
d’une irrecevabilité manifeste insusceptible d’être couverte en cours d’instance ;
Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice
administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’ERAL, qui n’est pas, dans
la présente instance, la partie perdante, la somme que le CONSEIL PRESBYTERAL DE L'EGLISE REFORMEE
DE SARREBOURG et autres demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge ni du CONSEIL
PRESBYTERAL DE L'EGLISE REFORMEE DE SARREBOURG et autres, ni de M. G., le versement des sommes
demandées par l’ERAL au titre de ces dispositions ;
DECIDE:
Article 1er : Les requêtes du CONSEIL PRESBYTERAL DE L'EGLISE REFORMEE DE SARREBOURG et autres
d’une part, et de M. G. d’autre part, sont rejetées.
Article 2 : Le surplus des conclusions de l’Eglise reformée d'alsace et de lorraine est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au CONSEIL PRESBYTERAL DE L'EGLISE REFORMEE DE
SARREBOURG, au CONSEIL PRESBYTERAL DE L'EGLISE REFORMEE DE HAGONDANGE, au CONSEIL
PRESBYTERAL DE L'EGLISE REFORMEE DE LIXHEIM, à M. Michel C., à M. Sylvain D., à M. Philippe F., à M.
Jean-Marc S., à M. Gabriel V., à M. Eugène V., à M. Romain G. et à l’Eglise réformée d'Alsace et de Lorraine.
Copie sera transmise pour information au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités
territoriales.
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CONSEIL D'ETAT
statuant
au contentieux
N° 282100
REPUBLIQUE FRANÇAISE
__________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
M. B. et autres
__________
M. Eric Berti
Rapporteur
__________
M. Luc Derepas
Commissaire du gouvernement
__________
Séance du 3 décembre 2007
Lecture du 21 décembre 2007
__________
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 1ère et 6ème sous-sections réunies)
Sur le rapport de la 1ère sous-section
de la Section du contentieux
Vu la requête, enregistrée le 4 juillet 2005 au secrétariat du contentieux
du Conseil d'Etat, présentée pour M. Claude B., demeurant (…), Mme Ghislaine B., demeurant (…), Mme
Christine B., demeurant (…), M. Jacques M., demeurant (…), M. Christophe V., demeurant (…), M. JeanPaul VX., demeurant (…), l'ASSOCIATION POUR LA LIBERTE DU SANTO DAIME, dont le siège est (…) et
l'ASSOCIATION LA MAISON QUI CHANTE, dont le siège (…) ; M. B. et autres demandent au Conseil
d’Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 20 avril 2005 du ministre
de la solidarité, de la santé et de la famille modifiant l'arrêté du 22 février 1990 fixant la liste des plantes
et substances classées comme stupéfiants, en tant qu'il classe les plantes « Psychotria viridis » et
« Banisteriopsis caapi » parmi les substances stupéfiantes ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de
1 000 euros à chacun des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution, notamment son préambule ;
16 décembre 1966 ;
Vu le pacte international relatif aux droits civils et politiques du
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et
des libertés fondamentales, notamment ses articles 8 et 10 ;
Vu la convention unique sur les stupéfiants du 30 mars 1961 ;
Vu le code de la santé publique ;
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Vu le code civil ;
Vu l’arrêté du ministre de la solidarité, de la santé et de la protection
sociale du 22 février 1990, fixant la liste des substances classées comme stupéfiants ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Eric Berti, chargé des fonctions de Maître des requêtes,
M. B. et autres,
- les observations de la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de
- les conclusions de M. Luc Derepas, Commissaire du gouvernement ;
Sur la compétence du ministre de la santé pour prendre l’arrêté attaqué :
Considérant qu’aux termes de l’article L. 5132-7 du code de la santé
publique : « Les plantes, substances ou préparations vénéneuses sont classées comme stupéfiants ou
comme psychotropes ou sont inscrites sur les listes I et II par arrêté du ministre chargé de la santé pris
sur proposition du directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé » et
qu’aux termes de l’article R. 5132-74 du même code dans sa rédaction résultant du décret du 7 décembre
1992, applicable à la date de la décision attaquée : « Sont interdits, à moins d'autorisation expresse, la
production, la mise sur le marché, l'emploi et, d'une manière générale, les opérations agricoles,
artisanales, commerciales et industrielles relatifs aux substances ou préparations classées comme
stupéfiantes, sur proposition du directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits
de santé, après avis de la Commission nationale des stupéfiants et des psychotropes, par arrêté du
ministre chargé de la santé » ; qu’ainsi, le ministre de la santé était compétent pour ajouter, par l’arrêté
attaqué du 20 avril 2005 qui n’est pas pris en application de l’arrêté du 22 février 1990, à l’annexe IV de
ce dernier arrêté, les plantes dénommées «Banisteriopsis caapi » et « Psychotria viridis » ;
Sur la légalité interne de la décision de classement :
Considérant, d’une part, qu’il ressort des pièces du dossier que les
plantes « Banisteriopsis caapi » et « Psychotria viridis » produisent des effets psychotropes sur l’homme
lorsque, après avoir fait l’objet d’une préparation, elles sont utilisées sous forme de boisson issue d’une
décoction ou d’une macération, dénommée notamment Ayahuasca ou Daime, notamment dans le cadre de
pratiques liées au chamanisme ou lors de cérémonies dont cette boisson est l’élément central ; que, pour
classer ces plantes comme stupéfiants, le ministre de la santé, citant les travaux d’experts, indique que
ces plantes, à travers les préparations qui les associent, telles que l’Ayahuasca ou le Daime, peuvent
constituer un facteur de la déstructuration psychologique de l’individu et entraîner également une forme
de soumission chimique des utilisateurs de cette boisson ; que les pièces du dossier établissent par ailleurs
que la consommation d’Ayahuasca peut occasionner des complications cardio-vasculaires telles que
l’augmentation de la pression artérielle et de la fréquence cardiaque ; que l’enquête diligentée par le
réseau des centres d’évaluation et d’information sur la pharmacodépendance, à la demande de l’Agence
française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS), établit enfin que l’Ayahuasca, par sa
composition, présente des effets psychoactifs avérés, qu’elle entraîne des effets somatiques importants et
qu’elle est neurotoxique chez l’animal ; que, dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à
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soutenir qu’en classant les plantes « Banisteriopsis caapi » et « Psychotria viridis » au nombre des
stupéfiants, le ministre chargé de la santé a commis une erreur manifeste dans l’appréciation des risques
découlant pour la santé publique de la toxicité de ces substances ;
Considérant, d’autre part, que si les requérants font valoir qu’en rendant
illégal l’usage de l’Ayahuasca ou du Daime, alors qu’ils sont utilisés lors de cérémonies organisées par des
associations telles que « l’Eglise du Santo Daime », l’arrêté attaqué porte atteinte à la fois à la liberté de
pensée, de conscience et de religion, garantie tant par la Constitution que par les articles 9 de la
convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et 18 et 19 du
pacte international relatif aux droits civils et politiques, ainsi qu’au respect de la vie privée garanti par
l’article 8 de cette même convention et par l’article 9 du code civil, les atteintes portées par l’arrêté
attaqué ne sont ni excessives ni disproportionnées au regard des préoccupations de santé publique
rappelées ci-dessus ;
Considérant, enfin, que l’arrêté attaqué n’ayant pas pour objet de définir
les éléments constitutifs d’une infraction pénale, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de
légalité des délits et des peines ne peut qu’être écarté ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont
pas fondés à demander l’annulation de l’arrêté attaqué ; que leurs conclusions présentées au titre de
l’article L. 761-1 du code de justice administrative doivent dès lors être rejetées ;
DECIDE:
Article 1er : La requête de M. B. et autres est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Claude B., premier
requérant dénommé et au ministre de la santé, de la jeunesse et des sports. Les autres requérants seront
informés de la présente décision par la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat au Conseil d'Etat et à la
Cour de cassation, qui les représentent devant le Conseil d’Etat.
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Jurisprudence judiciaire
Cour d'appel d'Orléans, N° 06/03234, 13 Septembre 2007, Association LE VERBE DE
VIE c/ Mr Denis F. et autres
Existence d’un contrat de travail liant chacun des époux F. à l’Association LE VERBE DE VIE
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13 Septembre 2007
Décision(s) attaquée(s) : Conseil de prud'hommes de Tours, 23 Novembre 2006
COUR D'APPEL D'ORLÉANS
CHAMBRE SOCIALE
Prud'Hommes
GROSSES le
à CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE
Selarl VACCARO et ASS.
COPIES le
à ASS. LE VERBE DE VIE
M. F.
Mme F.
ARRÊT du : 13 SEPTEMBRE 2007
No :
No RG : 06/03234
DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE TOURS en date du 23 Novembre
2006
Section : ACTIVITÉS DIVERSES
ENTRE
DEMANDERESSE AU CONTREDIT
ASSOCIATION LE VERBE DE VIE
(…)
représentée par Me BEAURE D'AUGERES du cabinet CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE, avocats au barreau
de HAUTS-DE-SEINE, et M. Yvan BARADEL, Président
ET
DEFENDEURS AU CONTREDIT
Monsieur Denis F.
(….)
comparant en personne et assisté par Me François VACCARO, membre de la selarl VACCARO et associés,
avocats au barreau de TOURS
Madame Pascale F.
(….)
comparante en personne, assisté de Me François VACCARO, membre de la selarl VACCARO et associés,
avocats au barreau de TOURS
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Après débats et audition des parties à l'audience publique du 07 Juin 2007
LA COUR COMPOSÉE DE :
Monsieur Daniel VELLY, Président de Chambre
Monsieur Pierre LEBRUN, Conseiller
Madame Catherine PAFFENHOFF, Conseiller
Assistés lors des débats de Madame Ghislaine GAUCHER, Greffier,
Puis ces mêmes magistrats en ont délibéré dans la même formation et à l'audience publique du 13
Septembre 2007,
Monsieur Daniel VELLY, Président de Chambre
Assisté de Madame Ghislaine GAUCHER, Greffier,
A rendu l'arrêt dont la teneur suit :
RÉSUMÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Monsieur Denis F. et son épouse Pascale sont entrés au sein de l'ASSOCIATION LE VERBE DE VIE, le 1er
octobre 1994, communauté religieuse créée en 1986 à AUBAZINE (Corrèze) qui a pour vocation de
rassembler, dans une vie de prières et d'apostolat, différentes personnes dont des religieux .
Il s'agit d'une association privée de fidèles, au sens du droit canonique, qui participe à la mission de l'Eglise,
communauté catholique, contemplative et missionnaire. Chacun de ses membres se rend disponible au
service de la communauté et de sa mission, en renonçant à toute activité professionnelle.
Comme la communauté du VERBE DE VIE n'avait pas la personnalité morale, l'association créée à cette fin le
6 août 1986 a mis en place une protection sociale minimale en considérant ses membres comme des salariés
au pair, assujettis au régime général sur la seule base des avantages dont ils bénéficiaient (logement et
nourriture).
Aussi l'association a-t-elle procédé, à l'affiliation des personnes concernées au régime général des salariés,
au paiement de l'ensemble des cotisations et à la rédaction de bulletins de paie.
Madame Pascale F. a intégré cette communauté en 1994 après une période sabbatique et une autre de
réflexion personnelle, et en échange des différentes missions qui lui ont été confiées, elle a bénéficié de la
mise à disposition d'un logement et de la nourriture, d'une affiliation au régime général et du paiement des
cotisations en qualité de salariée au pair.
Cependant, la situation s'est dégradée et Madame F. a adressé un courrier, le 4 février 2005, au président
de l'association, annonçant leur départ de la communauté, qui n'est devenu effectif que le 30 juin 2005.
Le 29 juin 2005, elle a saisi le conseil de prud'hommes de TOURS d'une action contre l'association pour voir
reconnaître l'existence d'un contrat de travail, alors que tous les éléments constitutifs étaient réunis :
rémunération, activité pour le compte d'un employeur et lien de subordination juridique. Elle a sollicité :
- 6 925 € de dommages et intérêts pour travail dissimulé
- 56 508 € de rappel de salaires et 5 650 € de congés payés afférents
- 1 154, 21 € d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse
-3 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Et la remise des documents habituels de rupture.
Par jugement du 23 novembre 2005, le Conseil de Prud'hommes de TOURS, section activités diverses
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- s'est déclaré incompétent, en application de l'article L 511-1 du code du travail, pour connaître des
demandes de Madame FAVRE
- renvoyé les parties pour plaider au fond le 8 février 2007 à 9 heures, à défaut de contredit dans les 15
jours du prononcé du jugement
- réservé les dépens en fin de cause.
Le 5 décembre 2006, l'ASSOCIATION LE VERBE DE VIE a déclaré former un contredit, en motivant sa
fonction sur 25 pages, auprès du conseil de prud'hommes de TOURS.
De son côté, Monsieur Denis F., engagé par écrit dès le 15 juillet 1994, a bénéficié du statut de salarié au
pair figurant sur ses fiches de paie.
En novembre 2001, il déménage et intègre les locaux 13 rue des Ursulines à TOURS. Ses fiches de paie
comportent, désormais, en plus des avantages "repas" les avantages en nature "logement".
Le 5 février 2005, il écrit au responsable de la communauté du VERBE DE VIE son intention de partir, tout
en manifestant le désir de loger dans les lieux jusqu'au 31 août 2005.
Le 30 juin 2005, il a, lui aussi, saisi le conseil de prud'hommes de TOURS, section activités diverses, d'une
action contre L'ASSOCIATION LE VERBE DE VIE afin de la voir condamner à lui payer
- 6 925 € de dommages et intérêts pour travail dissimulé
- 56 508 € de rappels de salaires et 5 650 € de congés payés afférents
- 1 154,21 € d'indemnité compensatrice de congés payés et 115,42 € de congés payés afférents
- 13 850 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
- 3000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile
et à lui remettre les documents habituels de rupture, sous astreinte de 50 € par jour et pour l'ensemble des
documents.
L'association a soulevé l'incompétence du conseil de prud'hommes, avant toute défense au fond.
Par jugement du 23 novembre 2006, le conseil de prud'hommes de TOURS
- s'est déclaré compétent pour connaître des demandes de Monsieur F. en application de l'article L 511-1 du
code du travail
- dit qu'à défaut de contredit dans le délai imparti de 15 jours, les parties étaient invitées à comparaître à
l'audience du 8 février 2007 à 9 heures
- réservé les dépens en fin de cause.
Le 5 décembre 2006, L'ASSOCIATION LE VERBE DE VIE a également déposé des conclusions de contredit à
ce jugement auprès du conseil de prud'hommes de TOURS.
DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES
1) ceux de l'ASSOCIATION LE VERBE DE VIE.
Elle conclut
- à la recevabilité de son contredit
- à l'infirmation du jugement critiqué
- au constat de l'absence de contrat de travail entre l'association et Madame F. et au renvoi, en conséquence
de l'examen de ce litige devant le tribunal de grande instance de TOURS.
Elle soutient, en premier lieu, l'incompétence de la juridiction prud'homale, au soutien des articles L 511-1, L
120-3 du code du travail, mais en invoquant une jurisprudence de 1989, 1992 et 1993.
Elle insiste sur la notion de prestations qui ne peut se réduire à la réalisation de prières et de louanges alors
que, selon elle, les tâches réalisées dans le cadre d'un engagement de nature religieuse ne peuvent donner
lieu à la conclusion d'un contrat de travail et qu'il n'y a pas lieu de séparer les aspects profanes et religieux
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d'un engagement de ce type.
Elle disserte sur la notion de subordination juridique, en soulignant que la subordination ne saurait être
caractérisée par les simples contraintes inhérentes à toute organisation et opère une distinction entre la
communauté du VERBE DE VIE et l'association du même nom, auprès de laquelle elle n'a bénéficié du statut
de salarié au pair qu'à partir d'octobre 1994.
Elle remarque que les ordres et directives émanant du "berger" qui gouverne chaque maison de la
communauté, mais qui n'est pas désigné par l'association civile, en sorte qu'aucune trace de subordination
juridique n'existe envers l'association.
Elle développe le caractère religieux de la communauté, et relève que l'engagement de Madame F. s'analyse
comme l'aboutissement d'un cheminement spirituel, cette démarche ne pouvant être assimilée à l'obtention
d'un emploi, tandis que l'association ne peut être considérée que comme l'organe de gestion de la
communauté.
Sur la nature des biens unissant Madame F. à la communauté, elle affirme que le véritable engagement, le
don de soi et l'esprit de service ne sauraient nullement être assimilés à une subordination juridique, alors
que par deux courriers au moins, du 29 juin 1994 et 7 décembre 1997, elle a évoqué son engagement
religieux définitif dans la communauté, à temps plein, qui ne peut se confondre avec un choix professionnel.
Elle nie tout horaire établi, et tout pouvoir disciplinaire. Elle souligne que la prière ou les offices ne sauraient
participer d'un quelconque travail et que les activités réelles de la communauté se déroulent pendant 5
heures 30 du mardi au vendredi et 7 heures chaque week end, aussi pour des tâches matérielles, à la
lingerie, au secrétariat, à l'accueil et à l'organisation d'événements.
Elle relève aussi que la principale raison de leur départ est de "retrouver leur autonomie familiale" comme
annoncée dans la lettre du 5 février 2005 au modérateur général de la communauté du VERBE DE VIE.
Elle met en valeur également qu'aucun des membres n'a bénéficié d'une rémunération constituant une
contrepartie à la nature des activités réalisées.
Elle rejette les arguments de Madame F., alors que la distinction entre sa vie personnelle et ses relations
avec l'association reste abusive, puisqu'il n'existe aucune dissociation possible de l'engagement pris par les
époux F. à son égard, comme la Cour de cassation l'a rappelé récemment.
Dans ce contexte, elle estime incompétente la juridiction prud'homale et critique, point par point, les
éléments retenus par le jugement contesté, en soulignant l'analogie avec l'engagement religieux .
2) ceux de Monsieur et Madame F., défenseurs au contredit;
Ils concluent
- à l'irrecevabilité des conclusions et pièces du 12 février 2007 déposées par l'association
-au débouté du contredit et à la confirmation des décisions critiquées
et à la condamnation de l'association à leur verser, à chacun, la somme de 3 000 €, au titre de l'article 700
du nouveau code de procédure civile.
Ils spécifient que l'association a déposé, le 12 février 2007, des conclusions complémentaires, assorties de
pièces nouvelles, qui doivent être rejetées, sur le fondement combiné des article 82 et 85 du nouveau code
de procédure civile, alors que seul le contredit formé du greffe de la juridiction lie la Cour.
Au fond, elle observe que la thèse de l'association ne résiste pas à l'examen, puisqu'elle est composée de
fidèles, laïcs et ne peut ainsi être assimilée à une congrégation religieuse .
Pour eux, l'existence d'un contrat de travail obéit à une réglementation d'ordre public, qui ne dépend ni de la
volonté exprimée par les parties, ni de la dénonciation donnée à leur convention, mais des conditions de fait
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dans lesquelles s'est exercée l'activité, tandis que le juge doit restituer aux faits leur exacte qualification.
Ils ajoutent que les statuts de l'association prévoient clairement le recours à des salariés, embauchés par le
bureau qui peut les licencier, l'émission de fiches de paie sous le régime du "salarié au pair".
Ils observent que l'on peut retenir la nature du travail et des heures de travail effectuées, pour Madame F.,
l'accueil, le secrétariat et l'organisation de grands rassemblements et pour Monsieur F., la direction du site
de TOURS, l'entretien du patrimoine, la responsabilité de la logistique des festivals.
Le lien de subordination se manifestait, en particulier, dans l'action des congés après autorisation préalable,
dans l'obligation de se rendre à la médecine du travail sur convocation, au sein d'une organisation nationale
dirigée par Monsieur CHABOT qui signait les courriers en qualité de directeur général, leur activité étant
inscrite dans un ordre économique indépendant de l'ordre spirituel.
Ils font enfin remarquer que leurs fiches de paie évoquaient un travail mensuel de 169 heures, alors que la
rémunération en nature ne dépassait pas 304, 40 € par mois.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Le contredit a été motivé et déposé dans les 15 jours du jugement (23 novembre et 5 décembre 2006) au
greffe du conseil de prud'hommes de TOURS, en sorte qu'il est recevable en la forme.
1o) Sur la demande d'irrecevabilité des conclusions et pièces déposées le 12 février 2007 par l'association
La déclaration de contredit reçue le 5 décembre 2006 au conseil de prud'hommes de TOURS comporte 31
pages et les conclusions du 12 février 2007, postérieures déposées au greffe de cette Cour, 42 pages.
Ces deux pièces comprennent la même argumentation, plus étoffée dans la seconde. Mais les pièces versées
ne font que développer et conforter les moyens exprimés dans le contredit initial et au total la Cour estime
que les écritures et pièces produites devant elle ne contreviennent pas aux prescriptions combinées des
articles 82 et 85 du nouveau code de procédure civile.
Ainsi l'exception d'irrecevabilité, formée par Monsieur et Madame F. sera-t-elle rejetée, comme mal fondée.
2o) Sur l'incompétence soulevée du conseil de prud'hommes de TOURS
L'article L 511-1 du code du travail dispose que les conseils de prud'homme jugent les différends qui
peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail et à l'égard desquels la conciliation n'a pas abouti.
Il est constant que le juge soit rétablir la véritable qualification du contrat, qui est d'ordre public et ne peut
dépendre de la seule volonté des parties, conformément aux dispositions de l'arrêt de l'assemblée plénière
de la Cour de cassation du 4 mars 1983.
En l'espèce, il importe d'opérer la distinction entre la communauté DU VERBE DE VIE, organisée selon les
principes du droit canon et dont les membres ont adhéré au "credo" de toute leur âme et l'ASSOCIATION
"LE VERBE DE VIE" association privée de fidèles, constituée le 2 juillet 1986 et dont la publication est parue
au journal officiel du 6 août 1986. Elle est composée de laïcs et non de religieux .
L'article 3 précise que l'équipe d'animation est composée d'engagés bénévoles ou de salariés sous la
direction du directeur général.
L'article 18 stipule que le personnel est engagé par le conseil d'administration sur la proposition du directeur
général.
La pratique quotidienne démontre, en outre
- que Monsieur et Madame F. ont reçu des fiches de paie du 1er octobre 1994 au 30 octobre 2002 en
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CORREZE et du 1er novembre 2002 au 31 mars 2005 à TOURS, que celles-ci faisaient figurer "salaire de
base 151 heures", c'est à dire l'horaire légal mensuel et portaient le salaire, composé par l'addition de
l'avantage en nature logement, 59 € et l'avantage en nature repos 153,40 €
- que les charges sociales étaient calculées sur les avantages en nature précités
- que les conseillers rapporteurs du conseil de prud'hommes, dans leur rapport du 28 octobre 2005, ont pu
évaluer que les époux F. intervenaient dans un cadre hiérarchique précis dont les règles étaient bien
établies. Le mari était responsable de la gestion, de l'entretien du patrimoine, et responsable des maisons de
SOLIGNAC et TOURS.
L'épouse, pour sa part, avait reçu pour missions, la lingerie, le secrétariat, l'accueil et l'organisation des
grands rassemblements.
Des emplois du temps horaires sont fournis aux débats comprenant temps de prière, de chant mais où le
travail garde toute sa place initiale (de 9h à 11h30 et de 14h30 à 17h).
- que les congés payés, à hauteur de quatre semaines seulement, pouvaient être pris, à condition d'obtenir
l'autorisation de l'autorité hiérarchique
- que les époux F. ont passé des visites médicales auprès de la médecine du travail, organisme médical
compétent pour examiner l'aptitude médicale des salariés pour effectuer leur tâche
- qu'en 2004, le président de l'association donne délégation de pouvoir à Monsieur C.-B., Vice-Président pour
"embaucher et licencier des salariés"
- qu'à compter de septembre 2004, Madame F., ayant repris des cours à l'université s'est vue couper les
vivres et les fiches de paie.
Le lien de subordination juridique, qui caractérise le contrat de travail, suppose l'exécution d'un travail sous
l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution
et de sanctionner les manquements.
Ce lien de subordination juridique était concrétisé
- par l'application de chacun à un travail déterminé
- qui devait être effectué dans un cadre horaire déterminé par l'association
- par la nécessité de solliciter des congés accordés selon la décision de l'association, d'aller à des visites
médicales régulières à la médecine du travail sur convocation
- par l'obéissance aux règles édictées par les supérieurs hiérarchiques comme en témoignent les lettres
administratives de Monsieur F., qui tient compte des ordres reçus à cet égard, l'existence d'un directeur
général, d'un responsable des ressources humaines, toute une articulation administrative dont Monsieur et
Madame F. n'étaient que des maillons.
Leur activité s'inscrivait dans un ordre économique indépendamment de l'ordre spirituel auquel ils avaient
adhéré.
Tous ces éléments militent en faveur du contrat de travail liant chacun des époux F. à L'ASSOCIATION LE
VERBE DE VIE.
Le jugement critiqué sera donc confirmé en tous ses motifs pertinents, l'association étant déboutée de
toutes ses demandes et motifs mal fondés.
Il est opportun de condamner l'association à leur verser globalement une somme de 2 000 euros au titre des
frais exposés au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
La Cour ordonnera, enfin, la jonction des deux procédures, dans le but d'une bonne administration de la
justice, puisque le cas des deux époux est semblable pour statuer en un seul et même arrêt.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement
RECOIT, en la forme, le contredit de l'ASSOCIATION LE VERBE DE VIE
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ORDONNE la jonction des deux procédure 06/3234 et 06/3235 pour statuer en une seule procédure 06/3234
REJETTE l'exception d'irrecevabilité des conclusions et pièces du 12 février 2007 déposées par
l'ASSOCIATION LE VERBE DE VIE
DEBOUTE l'ASSOCIATION LE VERBE DE VIE de son contredit et CONFIRME les jugements critiqués (CPH
TOURS, AD, 23 novembre 2006) en toutes leurs dispositions, le contrat de travail liant les époux F. à
l'association étant constaté
DEBOUTE l'ASSOCIATION LE VERBE DE VIE de ses autres demandes et la CONDAMNE à verser aux époux F.
une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile
CONDAMNE L'ASSOCIATION LE VERBE DE VIE aux dépens d'appel et de première instance.
Et le présent arrêt a été signé par Monsieur Daniel VELLY, Président de Chambre et par Madame Ghislaine
GAUCHER, Greffier
Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,
N° 06/03234
l'Association LE VERBE DE VIE
Contre Mr Denis F. et autres
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Jurisprudence
Cour européenne des droits de l’homme
ÕÕÕ
ÕÕÕ
CourEDH, n°30273/03, 8 novembre 2007, PERRY c. LETTONIE
Aucune disposition du droit letton en vigueur à l’époque des faits n’autorisait la Direction des
affaires de nationalité et de migration de se servir d’un changement de permis de séjour comme
prétexte pour interdire à un étranger l’exercice d’activités religieuses sur le sol letton.
Par ailleurs, bien que le requérant ait pu, suite à la décision no 5/12-S, continuer de participer à la
vie spirituelle de sa paroisse en tant que membre ordinaire, la Cour rappelle que les communautés
religieuses existent universellement sous la forme de structures organisées et qu’elles respectent
des règles que les adeptes considèrent souvent comme étant d’origine divine. Dès lors, les
cérémonies religieuses ont une valeur sacrée pour les fidèles lorsqu’elles sont célébrées par des
ministres du culte qui y sont habilités en vertu de ces règles.
CourEDH, n° 37614/02, 29 novembre 2007, Ismaïlova c. Russie
La requérante, Kourbankiz Ismaïlova, membre des témoins de Jéhovah, est une ressortissante
russe née en 1972 et résidant à Makhachkala (Russie). L’intéressée se plaint de la décision rendue
par les tribunaux russes de confier la garde de ses deux enfants à leur père. La Cour conclut par
quatre voix contre trois qu’il n’y a pas eu violation de l’article 8 (droit au respect de la vie privée et
familiale) combiné avec l’article 14 (interdiction de discrimination).
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TROISIÈME SECTION
AFFAIRE PERRY c. LETTONIE
(Requête no 30273/03)
ARRÊT
STRASBOURG
8 novembre 2007
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l'article 44 § 2 de la Convention. Il
peut subir des retouches de forme.
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En l'affaire Perry c. Lettonie,
La Cour européenne des Droits de l'Homme (troisième section), siégeant en une chambre composée de :
MM. B.M. Zupančič, président,
C. Bîrsan,
Mme A. Gyulumyan,
MM. E. Myjer,
David Thór Björgvinsson,
Mmes I. Ziemele,
I. Berro-Lefèvre, juges,
et de M. S. Naismith, greffier adjoint de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 11 octobre 2007,
Rend l'arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1. A l'origine de l'affaire se trouve une requête (no 30273/03) dirigée contre la République de Lettonie et
dont un ressortissant des États-Unis d'Amérique, M. Robert Philip Perry (« le requérant »), a saisi la Cour le
22 août 2003 en vertu de l'article 34 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés
fondamentales (« la Convention »).
2. Le requérant est représenté par M. G. Senkāns, directeur du bureau de consultation juridique SIA
Vindeks M, à Riga. Le gouvernement letton (« le Gouvernement ») est représenté par son agente, Mme I.
Reine.
3. Le requérant alléguait en particulier que le fait, pour les autorités lettonnes, de lui délivrer un permis de
séjour tout en lui refusant l'autorisation d'exercer des activités religieuses en Lettonie, a constitué une
violation de l'article 9 de la Convention à son égard. Il s'estimait également victime d'une discrimination
prohibée par l'article 14 de la Convention.
4. Par une décision du 18 janvier 2007, la chambre a déclaré la requête partiellement recevable, tout en
joignant au fond l'exception d'irrecevabilité soulevée par le Gouvernement et portant sur la prétendue
incompatibilité de la requête ratione materiae avec les dispositions de la Convention.
5. Tant le requérant que le Gouvernement ont déposé des observations écrites complémentaires
(article 59 § 1 du règlement).
EN FAIT
I. LES CIRCONSTANCES DE L'ESPÈCE
6. Né en 1957, le requérant est un pasteur appartenant à Morning Star International, une fédération de
communautés chrétiennes d'inspiration évangélique protestante dont le siège central se trouve aux ÉtatsUnis.
A. Genèse de l'affaire
7. En 1997, le requérant vint s'établir en Lettonie et y créa une communauté de la fédération
susmentionnée, nommée Rīta Zvaigzne (« Étoile du matin »). Le 6 janvier 1998, celle-ci fut enregistrée en
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tant que paroisse (draudze) par la Direction des affaires religieuses (Reliģijas lietu pārvalde), acquérant ainsi
la personnalité morale. Le certificat d'enregistrement qu'elle reçut était valable jusqu'au 8 janvier 2002 ;
cependant, conformément à la loi sur les organisations religieuses, il y était indiqué que la paroisse devait
obtenir un réenregistrement (pārreģistrācija) avant le 8 janvier 2001 afin de pouvoir continuer ses activités.
D'après les données publiées par la Direction des affaires religieuses, Rīta Zvaigzne a effectivement obtenu
un tel réenregistrement et fonctionne régulièrement jusqu'à présent.
8. Jusqu'en 1999, le requérant résidait en Lettonie sous couvert d'un permis de séjour temporaire délivré
« en relation avec ses activités pédagogiques ». Le 8 juillet 1999, la Direction des affaires de nationalité et
de migration (Pilsonības un migrācijas lietu pārvalde) lui délivra un nouveau permis temporaire, valable
jusqu'au 15 juillet 2000. Les conditions attachées à ce nouveau permis stipulaient que celui-ci avait été
délivré « aux fins d'activités religieuses » (sakarā ar reliģisko darbību), c'est-à-dire que le requérant avait le
droit d'organiser, sur le territoire letton, des activités publiques de caractère religieux.
9. En juillet 2000, le requérant sollicita un nouveau permis de séjour temporaire. Cependant, par une
décision no 5/12-S du 28 juillet 2000, la Direction des affaires de nationalité et de migration rejeta sa
demande. Le rejet était fondé sur l'article 35, alinéa 8, de la loi relative à l'entrée et au séjour des étrangers
et des apatrides en République de Lettonie (ci-après la « loi sur les étrangers »), aux termes duquel un
permis de séjour ne pouvait pas être délivré à une personne qui « milit[ait] au sein d'une organisation
totalitaire, terroriste ou utilisant des méthodes violentes ; qui met[tait] en danger la sécurité nationale ou
l'ordre public, ou qui [était] membre de n'importe quelle organisation secrète dirigée contre l'État ou
criminelle ».
10. Le requérant ne reçut jamais le texte intégral de la décision no 5/12-S ; il lui fut expliqué que cet acte
était classifié secret. Seul le dispositif de la décision lui fut notifié par une lettre du 11 septembre 2000 ; les
passages pertinents de ce courrier se lisaient ainsi :
« (...) Le 28 juillet 2000, la [Direction] a pris la décision no 5/12-S selon laquelle il n'y a pas lieu de délivrer à
Robert Perry et à sa famille un permis de séjour permanent aux fins d'activités religieuses (...)
conformément aux dispositions de l'article 35, alinéa 8, de la loi [sur les étrangers].
Robert Perry pourrait solliciter un permis de séjour temporaire fondé sur des relations de travail en
Lettonie, à condition de recevoir une invitation de l'employeur (...). »
11. Le requérant attaqua la décision no 5/12-S par la voie d'un recours hiérarchique devant le chef de la
Direction qui l'avait prise. Peu après, le 26 octobre 2000, la Direction délivra un permis de séjour temporaire
à son épouse, embauchée comme enseignante par l'Académie de culture de Lettonie. Le même jour, des
permis temporaires furent également délivrés au requérant – en tant que conjoint de sa femme – ainsi qu'à
leurs quatre enfants. Tous ces permis venaient à expiration le 30 juin 2002. Il ressort des explications des
deux parties qu'au moment de la délivrance du permis, les agents de la Direction déclarèrent au requérant
que son nouveau titre de séjour ne comportait pas l'autorisation de se livrer à des activités religieuses ; par
conséquent, il dut officiellement abandonner son poste de pasteur au sein de sa paroisse et en devenir un
membre ordinaire.
12. En novembre 2000, le requérant saisit le chef de la Direction d'un nouveau recours. Dans son mémoire,
il critiqua le fait qu'en lui refusant un permis de séjour « aux fins d'activités religieuses », la Direction avait
tout simplement cité l'article 35, alinéa 8, de la loi sur les étrangers, sans préciser de quelle manière il
entrait en jeu dans son cas concret. A ses yeux, la position adoptée par l'administration était illogique : en
effet, s'il faisait vraiment partie d'une organisation visée par ladite disposition et dangereuse pour la sécurité
de l'État, la Direction aurait dû appliquer l'article 36, alinéa 5, de la même loi (paragraphe 31 ci-après),
annuler son permis de séjour et l'expulser de Lettonie, au lieu de lui délivrer un nouveau permis. De même,
selon lui, si sa communauté avait accompli des actes dangereux pour l'État ou pour l'ordre public, les
autorités auraient dû saisir le juge compétent d'une demande de dissolution de celle-ci. En d'autres termes,
la Direction l'autorisait à demeurer en Lettonie tout en lui refusant le droit de prêcher. Selon le requérant,
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une telle situation enfreignait son droit de manifester sa religion, garanti par la Constitution et par l'article 9
de la Convention.
13. Par une lettre du 14 décembre 2000, le chef de la Direction rejeta le recours. Le requérant s'adressa
alors au ministre de l'Intérieur, qui, le 7 février 2001, fit de même, lui rappelant qu'il disposait déjà d'un
permis de séjour temporaire en tant qu'époux de sa femme qui était employée comme enseignante en
Lettonie.
14. Le 22 janvier 2001, le requérant se plaignit à la Direction des affaires religieuses d'une ingérence
injustifiée dans ses droits fondamentaux. Donnant suite à cette plainte, la Direction des affaires religieuses
demanda à celle des affaires de nationalité et de migration de lui fournir des explications sur son attitude à
l'égard du requérant. Le 14 février 2001, le chef de cette dernière Direction informa son homologue que la
décision no 5/12-S avait été prise « sur la base des renseignements fournis par des organes compétents ».
Par une lettre du 19 février 2001, le chef de la Direction des affaires religieuses en informa le requérant, tout
en soulignant que, pour leur part, ni lui-même ni sa Direction n'avaient aucun reproche à lui faire et aucune
objection à ce qu'il demeurât en Lettonie.
15. Le requérant s'adressa également au Bureau national des Droits de l'Homme (Valsts Cilvēktiesību
birojs), demandant son opinion au sujet de la situation dans laquelle il se trouvait. Le 10 décembre 2001, le
directeur du Bureau lui répondit qu'à son avis, il y avait eu violation du droit à la liberté religieuse en
l'espèce.
B. Procédure devant les tribunaux
16. En mars 2001, le requérant saisit le tribunal de première instance de l'arrondissement du Centre de la
ville de Riga d'un recours en annulation de la décision no 5/12-S. Dans son mémoire, il réitéra en substance
les arguments déjà exposés dans ses recours hiérarchiques, insistant notamment sur le fait que sa paroisse
n'avait reçu aucun avertissement de la part de la Direction des affaires religieuses, et qu'il ne comprenait pas
quel danger pourraient représenter ses activités religieuses en Lettonie.
17. Le recours fut inscrit au rôle du tribunal, et l'autorité défenderesse fut invitée à fournir ses observations
écrites préliminaires, si elle le souhaitait. Le 4 mai 2001, le chef de la Direction des affaires de nationalité et
de migration adressa au tribunal un mémoire en réplique dont les parties pertinentes se lisaient comme
suit :
« (...) Le 28 juillet 2000, sur la base d'un avis exprimé par les organes compétents, la Direction a pris la
décision no 5/12-S, aux termes de laquelle R. Perry ne se verrait plus délivrer un permis de séjour
temporaire en sa qualité de missionnaire, aux fins d'activités religieuses, et ce, conformément à l'article 35,
alinéa 8, de la loi [sur les étrangers]. Cette décision a été notifiée à R. Perry par une lettre du 11 septembre
2000.
(...)
A l'origine du refus de la Direction de délivrer à R. Perry un permis de séjour temporaire aux fins d'activités
religieuses (...), il y avait un avis exprimé par un organe compétent, d'après lequel un permis de séjour de
ce type ne devait pas lui être délivré. Le 26 octobre 2000, un permis de séjour temporaire a été refusé à R.
Perry, mais délivré à [sa femme] en raison de son contrat de travail ; par conséquent, il est évident que les
circonstances visées à l'article 35, alinéa 8, de la loi [sur les étrangers], et justifiant le refus d'un permis de
séjour, sont liées uniquement aux activités religieuses de R. Perry en Lettonie, et qu'elles ne constituent pas
une interdiction générale, à la famille Perry, de demeurer en République de Lettonie.
Pour ce qui est du caractère secret de la décision, nous voudrions rappeler qu'aux termes de l'article 2 § 3
de la loi sur les secrets de l'État, « constitue l'objet du secret de l'État un élément d'information (un
renseignement, un ensemble de renseignements), fixé de n'importe quelle manière techniquement possible,
qui, conformément à la présente loi, a été reconnu ou peut être reconnu comme faisant partie du secret de
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l'État ». L'article 4 § 1 de la même loi prévoit, quant à lui, que « la liste des questions considérées comme
secret de l'État, leur étendue et leur contenu, ainsi que les délais du maintien du caractère secret, sont
établis par le conseil des ministres ». Le paragraphe 3 du chapitre XIV (...) du règlement no 226 (...) du 25
juin 1997 portant la liste des questions considérées comme secret de l'État dispose que les pièces d'enquête
peuvent être qualifiées d'ultrasecrètes, de secrètes ou de confidentielles.
Les pièces du dossier de R. Perry ont été soumises à une nouvelle vérification de la part de la Direction, à
l'époque où son permis de séjour temporaire venait à expiration ; on a alors reçu un avis de l'organe
compétent selon lequel on ne devrait pas délivrer à R. Perry un permis de séjour aux fins d'activités
religieuses. Cela étant, le fait que la décision no 5/12-S a été déclarée secrète et que l'on a refusé à R. Perry
de porter les pièces de l'enquête à sa connaissance, est conforme aux actes normatifs en vigueur en
République de Lettonie. (...) »
18. Le recours du requérant fut examiné à l'audience du 10 mai 2001. C'est à ce moment-là que le
représentant de la Direction des affaires de nationalité et de migration révéla au juge et à la partie opposée
que « l'organe compétent » cité dans ses observations était en effet le Bureau de protection de la
Constitution (Satversmes aizsardzības birojs, également connu sous l'abréviation « SAB »). Il demanda alors
de citer cet organe en qualité de tiers intervenant, ce à quoi le requérant s'opposa. Par une ordonnance
prise sur-le-champ, le tribunal rejeta la demande de la Direction au motif que les dispositions du droit
procédural en vigueur à l'époque ne prévoyaient pas de tierce intervention dans cette catégorie d'affaires.
19. Par un jugement prononcé à la même date, le 10 mai 2001, le tribunal fit droit au recours du requérant
et annula la décision entreprise. Il releva notamment :
« (...) La décision no 5/12-S n'a pas été notifiée à R. Perry. De même, cette décision n'a pas été produite
devant le tribunal, sous prétexte des dispositions de la loi sur les secrets de l'État et du règlement no 226
(...) portant la liste des questions considérées comme secret de l'État. Cela étant, le tribunal n'est pas en
mesure de vérifier si cet acte administratif est conforme aux exigences de forme et de substance posées par
le règlement no 154 du 13 juin 1995 sur la procédure des actes administratifs.
(...)
A l'audience, excipant du secret de l'État, le représentant de la Direction des affaires de nationalité et de
migration n'a pas pu préciser laquelle des circonstances énumérées à l'article 35, alinéa 8, [de la loi sur les
étrangers] concerne le requérant.
Le tribunal estime que, dans le contexte de cet article, il s'agit sans aucun doute de circonstances qui
excluent la délivrance d'un permis de séjour d'une manière absolue, et non dans un but précis quelconque.
Il n'y a pas de doute de ce qu'un étranger militant dans une organisation totalitaire, terroriste, utilisant des
méthodes violentes, mettant en danger la sécurité nationale ou l'ordre public, ou qui est membre d'une
organisation secrète dirigée contre l'État ou criminelle, ne peut pas demeurer en République de Lettonie.
(...)
Le tribunal ne dispose d'aucune preuve de ce que (...) la paroisse chrétienne Rīta Zvaigzne ait accompli des
actes mettant en danger la sécurité nationale, ou que R. Perry ait accompli des actes incompatibles avec les
principes de fonctionnement de la paroisse chrétienne Rīta Zvaigzne.
L'article 93 de la loi sur la procédure civile oblige les parties à démontrer les faits qu'elles avancent pour
fonder leurs prétentions et objections.
Dans ces circonstances, et compte tenu du fait que la [Direction], excipant du secret de l'État, n'a produit
aucune preuve à l'appui de ses prétentions, le tribunal estime que l'attitude de la [Direction] à l'égard de R.
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Perry montre qu'il ne tombe pas sous le coup de l'article 35, alinéa 8, de la loi [sur le étrangers] ; sinon, il
aurait dû être expulsé de la République de Lettonie.
(...) »
20. Contre ce jugement, la Direction défenderesse interjeta appel devant la cour régionale de Riga. Le 22
avril 2002, la juge d'appel chargée du dossier demanda au SAB de l'informer des circonstances précises
militant contre l'octroi, au requérant, d'un permis de séjour « aux fins d'activités religieuses ». Par un
courrier du 15 mai 2002, le directeur du SAB lui expliqua que l'attitude défavorable de son organe était
« fondée sur le fait que Robert Philip Perry n'a[avait] aucune formation théologique, [même] pas une
licence, [et qu']il y a[vait] des informations opérationnelles négatives à son encontre ». A l'appui de la
première partie de cette assertion, le SAB fournit deux lettres, émanant respectivement du Centre
d'informations académiques de Lettonie et de l'Académie Luther (Lutera akadēmija), et affirmant que les
diplômes délivrés au requérant aux États-Unis n'équivalaient pas au diplôme letton d'enseignement supérieur
de base. Quant à la deuxième partie de sa thèse, le directeur du SAB refusa de la préciser, se référant à cet
égard à la loi sur les secrets de l'État.
21. Par un arrêt du 21 mai 2002, la cour régionale de Riga fit droit à l'appel de la Direction, annula le
jugement entrepris et débouta le requérant. La cour souligna notamment que, du point de vue formel, les
exigences de la loi avaient été observées, et ce, tant au regard de la loi sur les étrangers qu'au regard de
celle sur les secrets de l'État. Quant au caractère secret de la décision no 5/12-S, la cour déclara qu'elle
n'avait aucune raison de le mettre en cause.
22. Le requérant se pourvut alors en cassation devant le sénat de la Cour suprême, qui, par un arrêt du 1er
octobre 2002, cassa et annula l'arrêt entrepris et renvoya le dossier devant la cour régionale de Riga. Les
parties pertinentes de l'arrêt disposaient :
« (...) Le chapitre IX de la loi [sur les étrangers], intitulé « Les cas où des permis de séjour ne sont pas
délivrés » [et notamment son] article 35, énumèrent les cas où un permis de séjour en Lettonie ne doit pas
être délivré. Chacune des circonstances mentionnées dans cet article constitue une menace pour la
République de Lettonie ; dès lors, l'objectif visé par la loi est de ne pas permettre le séjour de telles
personnes en Lettonie ; [la loi] ne prévoit pas qu'en présence d'une circonstance mentionnée à l'article 35,
la Direction des affaires de nationalité ou de migration puisse délivrer un permis de séjour dont les
conditions dépendraient du but du séjour de l'intéressé dans le pays.
(...)
Vu le fait que les renseignements [fournis par le SAB] ne correspondaient à aucune des circonstances
énumérées à l'article 35, alinéa 8, la cour [d'appel] aurait dû établir si ces renseignements étaient suffisants
pour servir de fondement au refus d'un permis de séjour.
(...) [L]e fait que Robert Perry soit toujours en possession d'un permis de séjour lié à l'emploi de sa femme
(...) en Lettonie, réfute la thèse selon laquelle [il] entrerait dans la catégorie des personnes visées par
l'article 35 de la loi et auxquelles (...) on ne délivre pas des permis de séjour.
(...)
Aucun des cas prévus par la loi n'a été constaté ; par conséquent, ni la Direction des affaires de nationalité
et de migration ni la cour [d'appel] n'ont indiqué la base légale de l'ingérence ; dès lors, il est impossible de
juger la proportionnalité de l'ingérence et sa conformité à l'objectif [poursuivi] ; qui plus est, la Direction des
affaires religieuses n'a pas d'objections à ce que Robert Perry séjourne en Lettonie et à ce qu'il y organise
des activités religieuses ; Robert Perry a été invité par la paroisse chrétienne Rīta Zvaigzne, qui a été
enregistrée auprès du ministère de la Justice et au sein de laquelle Robert Perry s'est livré à des activités
religieuses. (...) »
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23. Nonobstant l'arrêt du sénat, le 7 novembre 2002, le SAB adressa à la Direction des affaires de
nationalité et de migration une lettre dans laquelle il insistait sur sa position critique à l'encontre des activités
religieuses du requérant, précisant que c'était essentiellement le cercle des fréquentations personnelles de
celui-ci, potentiellement dangereuses pour l'État, qui l'avait mené à cette conclusion.
24. Par un arrêt du 27 novembre 2002, la cour régionale de Riga, statuant sur renvoi du sénat, rejeta le
recours du requérant. Après avoir cité la lettre du SAB du 7 novembre 2002 et rappelé les fonctions
principales de cet organe, elle releva :
« (...) Le [SAB] ayant constaté une menace éventuelle pour la sécurité nationale, il n'y a pas eu violation de
(...) l'article 9 § 2 de la Convention (...). Le refus de délivrer un permis de séjour aux fins d'activités
religieuses ne peut pas être interprété comme une interdiction générale de recevoir toute forme de permis
de séjour en Lettonie ; de même, on ne saurait soutenir que la liberté de conviction religieuse de Robert
Perry (...) aurait été restreinte, car le fait qu'il n'obtient pas l'autorisation d'organiser des activités
religieuses ne limite pas pour autant son droit d'adhérer à une religion ou d'être affilié à une organisation
religieuse.
(...) En tant qu'État souverain, la Lettonie a le droit d'adopter des mesures pour garantir la sécurité nationale
et de créer des organes compétents pour le faire ; tant que l'organe compétent de la République de Lettonie
– à savoir le [SAB] – maintient son avis selon lequel les activités religieuses de (...) Robert Philip Perry (...)
constituent une menace pour la sécurité nationale, il n'y a aucune raison de considérer le comportement de
la [Direction des affaires de nationalité et de migration] comme illégal. (...) »
25. Le requérant forma alors un nouveau pourvoi en cassation devant le sénat de la Cour suprême. Par un
arrêt du 19 février 2003, le sénat rejeta le pourvoi, réitérant en substance les motifs de l'arrêt de la cour
régionale. Il ajouta encore que, si le requérant n'était pas satisfait de l'avis défavorable émis par le SAB, il
pouvait attaquer cet acte par la voie d'un recours devant le procureur ou le tribunal compétent, une telle
possibilité étant expressément prévue à l'article 6 de la loi relative aux services de sécurité de l'État. Or,
l'intéressé n'ayant pas exercé ce recours, la Direction pouvait raisonnablement se considérer liée par l'avis
du SAB et obligée de le suivre.
C. Développements postérieurs
26. Le 5 mai 2003, le requérant écrivit au SAB, dénonçant la situation d'incertitude légale dans laquelle il se
trouvait et demandant des explications quant à l'étendue précise de ses droits en Lettonie. En particulier, il
déclara ne pas comprendre lesquelles de ses activités religieuses étaient dangereuses pour la sécurité de
l'État, et dans quelle mesure il avait le droit de participer dans la vie de sa paroisse. Par une lettre du 26 mai
2003, le directeur du SAB refusa de lui répondre sur le fond, le renvoyant aux dispositions pertinentes de la
législation nationale.
27. Le 15 août 2003, le requérant saisit le procureur général de la République d'une plainte dénonçant le
comportement du SAB et demandant l'appréciation formelle de la nécessité et de la proportionnalité de
l'ingérence dans ses droits fondamentaux. Le 29 septembre 2003, le procureur compétent lui répondit
qu'aucune « violation intentionnelle » de la loi n'avait été constatée de la part du SAB. Toutefois, selon le
procureur, le SAB l'avait assuré « qu'à l'époque actuelle », il n'avait constaté, dans le comportement du
requérant, aucun agissement illégal ou dangereux pour la sécurité nationale. Par conséquent, le procureur
déclara, au nom du SAB, que ce dernier n'avait plus d'objections à ce que le requérant reçût un permis de
séjour « aux fins d'activités religieuses ».
28. Le 5 mars 2004, le requérant se vit enfin délivrer un permis de séjour temporaire, valable jusqu'au 10
février 2005, « aux fins d'activités religieuses ». Cependant, il ressort de ses explications que, vers la fin de
l'année 2004, à une date non précisée, il quitta la Lettonie et rentra aux États-Unis, où il réside à présent.
Selon le requérant, le 29 septembre 2005, il reçut un courrier du parquet général letton lui annonçant qu'il
ne posait plus aucun danger pour la sécurité nationale de ce pays.
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II. LE DROIT INTERNE PERTINENT
A. Organisations religieuses
29. Le droit à la liberté de religion est garanti par la première phrase de l'article 99 de la Constitution
lettonne (Satversme), tandis que la deuxième phrase énonce le principe de séparation des Églises et de
l'État. L'article 116, quant à lui, dispose :
« Les droits de la personne consacrés par les articles 96, 97, 98, 100, 102, 103, 106 et 108 peuvent être
restreints dans les cas prévus par la loi, afin de protéger les droits d'autrui, le régime étatique démocratique,
la sécurité, le bien-être et la morale publics. Sur la base des conditions mentionnées dans le présent article,
on peut également restreindre l'expression des convictions religieuses. »
30. Le fonctionnement des communautés religieuses et leurs relations avec l'État sont régis par la loi du 7
septembre 1995 sur les organisations religieuses (Reliģisko organizāciju likums). Les dispositions pertinentes
de cette loi sont ainsi libellées :
Article premier, alinéa 1o
« [Une] activité religieuse [est] le fait de s'adonner à une religion ou à une croyance, en pratiquant un culte,
en célébrant des cérémonies religieuses ou rituelles et en prêchant une doctrine. »
Article 8 § 1
« Les organisations religieuses sont enregistrées par la Direction des affaires religieuses. (...) »
Article 11
« 1o Une organisation religieuse n'est pas enregistrée, lorsque :
(...)
2) la doctrine, les buts et les devoirs de l'organisation, fixés dans ses statuts (...), sont contraires à la
Constitution lettonne et la législation ;
3) par ses activités (ou sa doctrine), [l'organisation] crée une menace pour la sécurité, l'ordre, la santé
ou la morale publics, les droits et les libertés d'autrui, propage des idées d'intolérance ou de haine religieuse,
ou entre en conflit avec la loi d'une autre manière.
2o Une décision refusant l'enregistrement doit comporter les raisons pour lesquelles l'enregistrement (...)
est refusé. (...) »
Article 14 § 4
« Les ministres des cultes ou les missionnaires, censés d'effectuer des activités religieuses en République
de Lettonie, ne peuvent être invités que par des organisations religieuses, en leur faisant obtenir des permis
de séjour selon les modalités définies par la loi. »
Article 18
« 1o Lorsqu'une organisation religieuse enfreint la Constitution et les lois lettonnes, elle peut être
dissoute par un tribunal.
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2o Lorsqu'une organisation religieuse enfreint les lois, la Direction des affaires religieuses émet un
avertissement écrit au chef de l'organisation respective et lui demande de faire cesser le comportement
illégal.
3o Ont le droit de saisir un tribunal d'une demande de dissolution d'une organisation religieuse :
1) le procureur général de la République ;
2) le chef de la Direction des affaires religieuses.
4o Le tribunal peut prononcer la dissolution d'une organisation religieuse, lorsque celle-ci :
1) propage des idées d'intolérance ou de haine religieuse ;
2) n'observe pas les lois ou incite les autres à ne pas les observer ;
3) enfreint ou n'observe pas [ses propres] statuts (...) ;
4) crée, par ses activités (ou sa doctrine), une menace pour la sécurité, la paix et l'ordre publics, ainsi
que pour la santé et la morale d'autrui.
(...) »
B. Entrée et séjour des ressortissants étrangers
31. A l'époque des faits, les dispositions pertinentes de la loi du 9 juin 1992 relative à l'entrée et au séjour
des étrangers et des apatrides en République de Lettonie (Likums « Par ārvalstnieku un bezvalstnieku
ieceļošanu un uzturēšanos Latvijas Republikā »), en vigueur jusqu'au 1er mai 2003, se lisaient ainsi :
Article 17
« Un étranger ou un apatride peut obtenir un permis de séjour temporaire :
1) pour une durée n'excédant pas six mois ;
2) pour le temps fixé dans le contrat de travail ou prévu pour accomplir une autre tâche, ou bien
fixé dans le plan de coopération pédagogique ou scientifique ;
(...).
Dans les cas visés par les alinéas 1 et 2 du présent article, un permis de séjour temporaire est également
délivré aux membres de famille de l'étranger ou de l'apatride. »
Article 35
« Un permis de séjour n'est pas délivré à une personne qui :
(...)
8) milite au sein d'une organisation totalitaire, terroriste ou utilisant des méthodes violentes ; qui met en
danger la sécurité nationale ou l'ordre public, ou qui est membre d'une organisation secrète dirigée contre
l'État ou criminelle ;
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(...) »
Article 36, premier alinéa
« Un permis de séjour est annulé, si la personne [concernée] :
(...)
5) milite au sein d'une organisation totalitaire, terroriste ou utilisant des méthodes violentes ; ne
reconnaît pas le régime étatique de la République de Lettonie, ou est membre d'une organisation secrète
dirigée contre l'État ou criminelle ;
(...) »
Article 38, premier alinéa
« Le chef de la Direction ou le chef de l'unité régionale de la Direction prend un arrêté d'expulsion (...) :
1) dans les cas visés à l'article 36 de la présente loi ;
(...) »
32. A l'époque des faits, les modalités de délivrance des permis de séjour étaient définies par le règlement
no 417 du 16 décembre 1997 relatif à la délivrance et l'enregistrement des permis de séjour (Uzturēšanās
atļauju izsniegšanas un reģistrēšanas kārtība), en vigueur jusqu'au 20 décembre 2001. L'article 7 de ce
règlement disposait :
« En fonction de l'objectif du séjour, et en plus des documents mentionnés à l'article 6 du présent
règlement, la personne [concernée] doit fournir les documents suivants :
(...)
7.8) lorsque la personne souhaite séjourner en vue d'organiser des activités religieuses, au sens de l'article
17, point 2, de la loi [sur les étrangers] :
7.8.1) une lettre émanant d'une organisation religieuse enregistrée auprès de la Direction des affaires
religieuses, [signée après avoir recueilli] l'avis de la Direction des affaires religieuses, et mentionnant le
domaine d'activités du ministre de culte ou du missionnaire étranger, la durée prospective [de ces activités],
sa résidence éventuelle et la source légale de ses revenus ;
7.8.2) une lettre de recommandation de l'organisation religieuse étrangère ;
7.8.3) copie d'un document d'ordination ou d'un diplôme reconnu et assimilé à une licence [bakalaurs] en
théologie obtenue en République de Lettonie, conformément à l'article 85 de la loi sur les établissements
d'enseignement supérieur ;
7.8.4) copies des certificats d'enregistrement et des statuts de l'organisation religieuse enregistrée en
République de Lettonie et avec laquelle coopère le ministre de culte ou le missionnaire en question. »
33. A l'exception des dispositions particulières concernant l'emploi ou les activités commerciales des
ressortissants étrangers, aucune disposition du droit letton ne prévoyait des conditions ou des restrictions
spécifiques quant à l'étendue des droits du bénéficiaire d'un permis de séjour sur le territoire letton.
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C. Dispositions régissant la sécurité et les secrets de l'État
34. La loi du 5 mai 1994 relative aux services de sécurité de l'État (Valsts drošības iestāžu likums) est
applicable aux autorités publiques chargées de prendre des mesures de renseignement, de contreespionnage et des mesures opérationnelles d'enquête (article 2). Le Bureau de protection de la Constitution
(le SAB) est l'un des trois établissements visés par ladite loi. L'article 5 consacre les principes de
constitutionnalité, de légalité, de proportionnalité et de respect des droits fondamentaux, qui doivent régir
toute mesure prise par les établissements en question. Selon l'article 6, si une personne estime que, par leur
comportement, les services de sécurité de l'État ont porté atteinte à ses droits, elle peut adresser une plainte
au procureur ; après avoir effectué une vérification, celui-ci émet un avis sur la légalité de la mesure en
cause ou, le cas échéant, « introdui[t] une demande devant le tribunal ».
35. La loi sur le Bureau de protection de la Constitution (Satversmes aizsardzības biroja likums), adopté à la
même date que la loi précédente, précise les fonctions de cet organe, défini comme « un établissement non
militarisé de sécurité de l'État » (article 1 § 1). Aux termes de l'article 13 § 2 de ladite loi,
« Le Bureau de protection de la Constitution est soumis au contrôle de la part des tribunaux, et ce, dans les
cas et selon les modalités établies par la loi relative aux mesures opérationnelles. »
36. D'après l'article 4 § 1 de la loi du 17 octobre 1996 sur les secrets de l'État (Likums « Par valsts
noslēpumu »), la liste des questions considérées comme secret de l'État, c'est-à-dire des informations
classées, est établie par le conseil des ministres. Sur la base de cet article, a été adopté le règlement no 226
du 25 juin 1997 portant la liste des questions considérées comme secret de l'État (Valsts noslēpuma objektu
saraksts). Le paragraphe 5 du chapitre IX de cette liste permettait de classer les informations obtenues dans
le cadre de mesures opérationnelles comme « ultrasecrètes » (sevišķi slepeni), « secrètes » (slepeni) ou
« confidentielles » (konfidenciāli).
37. Enfin, la loi du 16 décembre 1993 relative aux mesures opérationnelles (Operatīvās darbības likums) est
applicable à l'ensemble des opérations, secrètes ou non, tendant à la protection des particuliers, de
l'indépendance et de la souveraineté de l'État, de l'ordre constitutionnel, du potentiel économique et
scientifique national, ainsi que des informations classées, contre des menaces extérieures et intérieures
(article 1er). Toutes les mesures opérationnelles doivent être effectuées dans le plus strict respect de la loi et
des droits de l'homme. Toute personne s'estimant lésée par le comportement des agents de sécurité
publique dans le cadre de ces mesures peut adresser une plainte au procureur ou saisir le tribunal
compétent d'une demande (article 5).
EN DROIT
I. SUR LES EXCEPTIONS DU GOUVERNEMENT
A. Exception de non-épuisement des voies de recours internes
38. Le Gouvernement réitère son exception d'irrecevabilité tirée du non-épuisement, par le requérant, des
voies de recours internes à sa disposition. D'après le Gouvernement, le requérant aurait dû introduire un
recours séparé contre l'avis défavorable du SAB, sur la base duquel la Direction des affaires de nationalité et
de migration avait pris la décision litigieuse (voir la décision du 18 janvier 2007 sur la recevabilité de la
présente affaire). A cet égard, le Gouvernement ajoute que la procédure devant les tribunaux qu'a suivie le
requérant, et le recours devant le parquet contre le comportement du SAB n'étaient pas deux voies
alternatives, mais servaient deux buts différents. Par conséquent, le fait que l'intéressé ait effectivement
épuisé le premier de ces recours ne le libérait pas de l'obligation de tenter le second.
39. La Cour rappelle d'emblée que l'exception tirée du non-épuisement des voies de recours internes a été
dûment examinée et rejetée par la décision sur la recevabilité de la présente requête du 18 janvier 2007.
Aux termes de cette décision, « le requérant a épuisé tous les recours accessibles et adéquats contre l'acte
visant directement l'exercice de ses droits religieux. D'autre part, on ne saurait lui reprocher de ne pas avoir
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attaqué la manière dont le SAB avait traité et utilisé les renseignements secrets le concernant, un tel recours
entrant en jeu plutôt sous l'angle de l'article 8 de la Convention relatif au respect de la « vie privée » ». La
Cour ne voit aucune raison de revenir sur cette décision, d'autant plus que le Gouvernement n'a produit
aucun élément nouveau susceptible de la faire modifier ses conclusions. Dans ces circonstances, elle rejette
l'exception en cause.
B. Demande d'application de l'article 37 § 1 b) de la Convention
40. Dans ses observations du 22 mai 2007 sur le fond de l'affaire, le Gouvernement fait remarquer que, le 5
mars 2004, la Direction des affaires de nationalité et de migration a délivré au requérant un permis de
séjour temporaire « aux fins d'activités religieuses » (paragraphe 28 ci-dessus). Ce permis a donc mis fin à
la situation dénoncée par le requérant, tout en restaurant pleinement sa situation juridique telle qu'elle était
avant le 28 juillet 2000. Invoquant l'arrêt Syssoyeva et autres c. Lettonie ([GC], no 60654/00, CEDH 2007...), le Gouvernement conclut que le litige à l'origine de la présente affaire a été résolu et que la requête doit
être rayée du rôle en application de l'article 37 § 1 b) de la Convention.
41. La Cour rappelle d'emblée qu'aux termes de l'article 55 de son règlement, si la partie défenderesse
entend soulever une exception d'irrecevabilité, elle doit le faire – pour autant que la nature de l'exception et
les circonstances le permettent –, dans ses observations écrites ou orales sur la recevabilité de la requête ;
dans le cas contraire, il y a forclusion (voir, par exemple, Jurjevs c. Lettonie, no 70923/01, § 33, 15 juin
2006). La Cour estime que cette règle s'applique également au regard de l'article 37 § 1 b) de la Convention.
En effet, dans la plupart des cas, la solution définitive du litige va de pair avec la perte, par le requérant, de
son statut de « victime », au sens de l'article 34 de la Convention, de sorte qu'une demande de radiation
fondée sur l'article 37 § 1 b) est très souvent assimilable à une exception d'irrecevabilité tirée de l'article 34
(voir Fjodorova et autres c. Lettonie (déc.), no 69405/01, 6 avril 2006, ainsi que l'arrêt Syssoyeva et autres
précité, §§ 92-96, et, mutatis mutandis, Glod c. Roumanie, no 41134/98, § 45, 16 septembre 2003). Au
demeurant, il ressort de la jurisprudence ancienne et bien établie de la Cour que pareils moyens doivent être
soulevés en temps opportun, faute de quoi ils se heurtent à forclusion (voir, parmi d'autres, Artico c. Italie,
arrêt du 13 mai 1980, série A no 37, p. 13, § 27, et Campbell et Fell c. Royaume-Uni, arrêt du 28 juin 1984,
série A no 80, p. 31, § 57).
42. En l'espèce, le Gouvernement reconnaît lui-même que le fait juridique sur lequel il fonde sa demande de
radiation, à savoir l'octroi au requérant d'un permis de séjour l'autorisant à organiser des activités religieuses
en Lettonie, a eu lieu plus de six mois avant la communication de la requête ; en d'autres termes, ce fait
existait déjà lors de l'examen de la recevabilité de celle-ci. Dès lors, il était loisible au Gouvernement de
formuler sa demande de radiation au stade de la recevabilité ; ne l'ayant pas fait, il est forclos à le faire
aujourd'hui. Sur ce point, la Cour n'aperçoit aucune similitude entre la présente affaire et l'affaire Syssoyeva
et autres précitée, dans laquelle la proposition de régularisation du séjour des requérants en Lettonie n'est
intervenue qu'après la décision de la Cour déclarant la requête recevable (ibidem, §§ 5 et 38-44).
43. Par conséquent, la Cour rejette la demande du Gouvernement.
C. Exception d'incompatibilité ratione materiae
44. Le Gouvernement soutient que le grief du requérant n'entre pas dans le champ d'application ratione
materiae de l'article 9 de la Convention. Il commence par rappeler les dispositions pertinentes de la loi sur
les organisations religieuses (paragraphe 30 ci-dessus), insistant en particulier sur le principe constitutionnel
de séparation des Églises et de l'État et sur celui de l'autonomie interne des organisations religieuses. Le
Gouvernement explique que, même si le requérant était en possession d'un permis de séjour « aux fins
d'activités religieuses » avant le 28 juillet 2000 et après le 5 mars 2004, ce permis ne lui garantissait pas le
droit d'exercer effectivement une fonction pastorale au sein de sa paroisse ; en effet, cette question ne
dépendait pas de l'État, mais des règles canoniques internes de cette communauté, règles au regard
desquelles l'État n'a aucune compétence. A cet égard, le Gouvernement fait valoir que l'article 9 « ne
protège pas les ambitions de l'intéressé de devenir prêtre, y compris la question de savoir s'il remplit les
critères juridiquement établis pour exercer la fonction professionnelle susmentionnée ».
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45. Aux yeux du Gouvernement, le souhait de l'intéressé d'exercer les fonctions de pasteur ne relève pas du
domaine de la liberté de religion, mais plutôt de celui d'activité professionnelle ; il doit dès lors être examiné
sous l'angle de l'article 8 relatif à la « vie privée » (voir Sidabras et Džiautas c. Lituanie, nos 55480/00 et
59330/00, §§ 42-47, CEDH 2004-VIII). Au demeurant, même si, entre les 28 juillet 2000 et 5 mars 2004, le
requérant ne pouvait pas être employé par sa communauté et y occuper un poste officiel quelconque, rien
ne l'empêchait de participer à la vie de cette communauté en qualité de simple paroissien. En résumé, selon
le Gouvernement, l'article 9 de la Convention ne trouve pas à s'appliquer dans la présente affaire, et le grief
tiré de l'article 14 doit donc partager le même destin.
46. Le requérant conteste les thèses du Gouvernement. Selon lui, le fait d'être ministre du culte est
intimement lié à l'expression des croyances et des sentiments religieux et requiert une dévotion à plein
temps ; ainsi, lui-même exerce la fonction de pasteur depuis plus de vingt-cinq ans, et il se sent appelé d'en
haut pour être missionnaire. Le fait que l'office pastoral constitue également une activité professionnelle
n'est ici que largement secondaire. Par ailleurs, certificat à l'appui, le requérant déclare ne pas avoir perçu
de rémunération régulière pendant ses activités missionnaires en Lettonie.
47. La Cour estime que l'exception d'incompatibilité ratione materiae soulevée par le Gouvernement est si
étroitement liée à la substance du grief du requérant formulé sur le terrain de l'article 9 de la Convention
qu'il y a lieu de la joindre au fond.
II. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L'ARTICLE 9 DE LA CONVENTION
48. Le requérant allègue une violation de l'article 9 de la Convention, ainsi libellé :
« 1. Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté
de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction
individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et
l'accomplissement des rites.
2. La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles
qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité
publique, à la protection de l'ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et
libertés d'autrui. »
A. Sur l'applicabilité de l'article 9 et l'existence d'une ingérence
1. Arguments des parties
49. Le Gouvernement estime qu'à supposer même que l'article 9 soit applicable dans la présente affaire, il
n'y a eu en l'espèce aucune ingérence dans les droits qu'il garantit. Se référant à l'arrêt Cha'are Shalom Ve
Tsedek c. France ([GC], no 27417/95, CEDH 2000-VII), il fait valoir que, nonobstant la mesure critiquée, le
requérant a tout de même pu pratiquer sa religion d'une autre manière que celle initialement envisagée : en
effet, rien ne l'empêchait de demeurer un membre actif de sa paroisse et de participer aux services religieux
au sein de celle-ci. Le Gouvernement soutient ensuite que la présente requête ressemble à beaucoup
d'égards à l'affaire Église de X. c. Royaume-Uni (no 3798/68, décision du 17 décembre 1968, Recueil 29, p.
70), dans laquelle la Commission européenne des Droits de l'Homme a décidé que le refus ou le retrait d'un
visa pour des raisons de sécurité nationale n'empêchait pas les membres de l'organisation concernée
d'entrer dans l'État défendeur pour de diverses raisons et d'y pratiquer leur religion.
50. Le requérant maintient que ses droits au titre de l'article 9 ont fait l'objet d'une ingérence de la part de
l'État. Il souligne qu'il a été autorisé à demeurer en Lettonie, tout en étant privé du droit de prêcher et
d'exercer le reste des fonctions pastorales, alors qu'il est pasteur. De ce fait, l'étendue de ses droits au titre
de l'article 9 est, par définition, différente de celle d'un simple paroissien.
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2. Appréciation de la Cour
51. A titre préliminaire, la Cour tient à rappeler que la Convention ne garantit pas, en tant que tel, le droit
d'entrer ou de résider dans un État dont on n'est pas ressortissant, et que les États contractants ont le droit
de contrôler, en vertu d'un principe de droit international bien établi, l'entrée, le séjour et l'éloignement des
non-nationaux (voir, parmi beaucoup d'autres, El Boujaïdi c. France, arrêt du 26 septembre 1997, Recueil
1997-VI, p. 1992, § 39, Baghli c. France, no 34374/97, § 45, CEDH 1999-VIII, et Boultif c. Suisse,
no 54273/00, § 39, CEDH 2001-IX). De même, elle estime, avec l'ancienne Commission, que l'article 9 de la
Convention ne garantit aucun droit, pour un ressortissant étranger, d'être employé dans un État contractant,
même si l'employeur est une organisation religieuse (voir Hüsnü Öz c. Allemagne, no 32168/96, décision de
la Commission du 3 décembre 1996, non publiée). En l'espèce, la Cour constate que le requérant n'a pas été
empêché de demeurer légalement en Lettonie ; en revanche, le permis de séjour qu'il a reçu le 26 octobre
2000 était dépourvu d'autorisation de se livrer à des activités religieuses sur le sol letton (paragraphes 10-11
ci-dessus).
52. La Cour rappelle ensuite que si la liberté religieuse, au sens de l'article 9 de la Convention, relève
d'abord du for intérieur, elle implique de surcroît la liberté de « manifester sa religion » individuellement et
en privé, ou de manière collective, en public et dans le cercle de ceux dont on partage la foi. L'article 9
énumère les diverses formes que peut prendre la manifestation d'une religion ou d'une conviction, à savoir
le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des rites. En particulier, il comporte en principe
le droit d'essayer de convaincre son prochain, par exemple au moyen d'un « enseignement », ou, plus
précisément, d'une prédication (voir Kokkinakis c. Grèce, arrêt du 25 mai 1993, série A no 260-A, p. 17, § 31,
Larissis et autres c. Grèce, arrêt du 24 février 1998, Recueil des arrêts et décisions 1998-I, p. 379, § 45,
ainsi que Église métropolitaine de Bessarabie et autres c. Moldova, no 45701/99, § 114, CEDH 2001-XII). En
l'occurrence, la Cour relève que le requérant est ministre d'un culte, et que la raison principale de son
établissement en Lettonie était, de toute évidence, la création d'une communauté de sa confession et la
prédication au sein de celle-ci. Il avait donc justement exercé l'un de ses droits au titre de l'article 9 de la
Convention.
53. La Cour note en particulier que, de juillet 1999 jusqu'en juillet 2000, le requérant bénéficiait d'un permis
de séjour impliquant une autorisation d'organiser de activités publiques de caractère religieux. Par sa
décision no 5/12-S du 28 juillet 2000, la Direction des affaires de nationalité et de migration a refusé de
prolonger son séjour sous les mêmes conditions et le même régime ; peu après, il s'est vu délivrer un permis
d'un autre type, assorti d'une explication dont il ressortait qu'il n'avait plus le droit de s'adonner aux activités
litigieuses (paragraphes 10-11 ci-dessus). En d'autres termes, le requérant s'est vu retirer l'autorisation alors
qu'il souhaitait continuer de l'exercer. Selon la Cour, il s'agit d'un exemple typique d'une « ingérence » au
sens de l'article 9 § 2 de la Convention.
54. La Cour comprend mal la thèse du Gouvernement fondée sur l'autonomie des organisations religieuses
par rapport à l'État (paragraphe 44 ci-dessus). En effet, il ressort clairement des faits de l'affaire qu'aucun
conflit n'a opposé le requérant à la fédération Morning Star International ou à la communauté locale Rīta
Zvaigzne au sujet de sa qualité de pasteur ou de sa charge pastorale. La situation qu'il dénonce résultait
uniquement de la décision no 5/12-S et de l'interdiction explicite qu'elle avait entraînée ; elle est donc
pleinement imputable à l'État.
55. Certes, le requérant pouvait continuer de participer à la vie spirituelle de sa paroisse en tant que
membre ordinaire. Toutefois, la Cour rappelle que les communautés religieuses existent traditionnellement
et universellement sous la forme de structures organisées, et qu'elles respectent des règles que les adeptes
considèrent souvent comme étant d'origine divine. Les cérémonies religieuses ont une signification et une
valeur sacrée pour les fidèles lorsqu'elles sont célébrées par des ministres du culte qui y sont habilités en
vertu de ces règles. La personnalité de ces derniers est assurément importante pour tout membre actif de la
communauté, et leur participation à la vie de cette communauté est donc une manifestation particulière de
la religion qui jouit en elle-même de la protection de l'article 9 de la Convention (voir Hassan et Tchaouch
c. Bulgarie [GC], no 30985/96, § 62, CEDH 2000-XI).
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56. Il s'ensuit que les faits dénoncés par le requérant concernent directement son droit à la liberté de
religion, tel que le consacre l'article 9 de la Convention. Cet article trouve donc à s'appliquer, et il y a en
l'espèce eu ingérence dans le droit du requérant à la liberté de religion. Partant, l'exception du
Gouvernement tirée de l'incompatibilité de la requête ratione materiae avec les dispositions la Convention ne
saurait être retenue.
B. Sur la justification de l'ingérence
57. Pareille ingérence emporte violation de l'article 9, sauf si elle est prévue par la loi et nécessaire dans
une société démocratique pour atteindre un but légitime (voir Cha'are Shalom Ve Tsedek précité, §§ 75 et
84).
1. Arguments des parties
58. Selon le Gouvernement, l'ingérence litigieuse avait pour fondement l'article 35, alinéa 8, de la loi sur les
étrangers. En adoptant la décision no 5/12-S, la Direction des affaires de nationalité et de migration a agi
dans les limites de sa compétence ; cette décision a été prise sur la base d'un avis secret que le SAB avait
également formulé conformément aux compétences qui lui étaient dévolues par la loi.
59. Le Gouvernement soutient ensuite que l'ingérence critiquée poursuivait au moins deux buts légitimes au
sens de l'article 9 § 2 de la Convention, à savoir la protection de la sécurité publique et celle de l'ordre. Cette
mesure était également proportionnée à ces buts : en effet, nonobstant la menace que le requérant
représentait initialement pour la sécurité nationale, les autorités lettonnes ont choisi de ne pas l'expulser de
Lettonie, lui appliquant une mesure beaucoup plus clémente et se limitant simplement à restreindre ses
activités qu'elles jugeaient nuisibles. De surcroît, cette mesure n'était que temporaire : en effet, après avoir
surveillé les activités du requérant pendant un certain temps, le SAB est parvenu à la conclusion que ses
activités religieuses ne mettaient plus en péril la sécurité de l'État ; il en a informé la Direction des affaires
de nationalité et de migration, et celle-ci a fini par lui délivrer un permis de séjour « aux fins d'activités
religieuses ».
60. Selon le requérant, l'ingérence critiquée n'avait aucune base législative ni réglementaire en droit letton,
aucune disposition interne n'autorisant une telle restriction des activités religieuses d'un étranger résidant
régulièrement sur le territoire national. Le requérant estime que l'article 14 § 4 de la loi sur les organisations
religieuses, aux termes duquel « [l]es ministres des cultes ou les missionnaires, censés d'effectuer des
activités religieuses en République de Lettonie, ne peuvent être invités que par des organisations religieuses,
en les faisant obtenir des permis de séjour selon les modalités définies par la loi », ne peut pas non plus être
invoqué à cet égard.
61. En tout état de cause, le requérant est convaincu que la mesure en cause était manifestement
injustifiée et disproportionnée. En effet, si les autorités estimaient qu'il mettait en péril la sécurité nationale,
elles auraient dû soit l'expulser du territoire national, soit imposer à ses activités religieuses publiques des
restrictions spécifiques bien définies et motivées. En revanche, une interdiction générale, à laquelle il s'est vu
confronter, ne peut pas être jugée proportionnée. Le requérant explique que, du fait d'avoir reçu le refus
d'autorisation de se livrer aux activités religieuses publiques, il s'est retrouvé dans l'impossibilité de prêcher
et d'exercer le reste des fonctions faisant partie de sa vocation pastorale ; par ailleurs, c'est pour cette
raison qu'il a finalement quitté la Lettonie.
2. Appréciation de la Cour
62. La Cour rappelle sa jurisprudence constante selon laquelle l'expression « prévues par la loi » figurant à
l'article 9 § 2 de la Convention non seulement exige que la mesure incriminée ait une base en droit interne,
mais vise aussi la qualité de la loi en cause. Ainsi, celle-ci doit être suffisamment accessible et prévisible,
c'est-à-dire énoncée avec assez de précision pour permettre à l'individu – en s'entourant au besoin de
conseils éclairés – de régler sa conduite. Le niveau de précision de la législation interne – qui ne peut en
aucun cas prévoir toutes les hypothèses – dépend dans une large mesure du contenu de l'instrument en
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question, du domaine qu'il est censé couvrir et du nombre et du statut de ceux à qui il est adressé. En outre,
le droit interne doit offrir une certaine protection contre des atteintes arbitraires de la puissance publique
aux droits garantis par la Convention. Lorsqu'il s'agit de questions touchant aux droits fondamentaux, la loi
irait à l'encontre de la prééminence du droit, l'un des principes fondamentaux d'une société démocratique
consacrés par la Convention, si le pouvoir d'appréciation accordé à l'exécutif ne connaissait pas de limite. En
conséquence, elle doit définir l'étendue et les modalités d'exercice d'un tel pouvoir avec une netteté
suffisante (voir les arrêts précités Hassan et Tchaouch, § 84, et Église métropolitaine de Bessarabie et
autres, § 109).
63. En l'occurrence, le Gouvernement invoque l'article 35, alinéa 8, de la loi sur les étrangers qui était en
vigueur à l'époque des faits. Cette disposition prévoyait le refus de permis de séjour à toute personne qui
« milit[ait] au sein d'une organisation totalitaire, terroriste ou utilisant des méthodes violentes ; qui met[tait]
en danger la sécurité nationale ou l'ordre public, ou qui [était] membre de n'importe quelle organisation
secrète dirigée contre l'État ou criminelle ». Comme l'a à juste titre relevé le sénat de la Cour suprême dans
son arrêt du 1er octobre 2002 (paragraphe 22 ci-dessus), le libellé précité avait trait au refus de permis de
séjour en général, et non relativement à une activité concrète. Dès lors, si l'alinéa 8 pouvait effectivement
servir de fondement à la décision no 5/12-S refusant au requérant un permis de séjour, il ne prévoyait en
revanche aucune possibilité de lui délivrer un tel permis en l'assortissant de conditions restrictives quant à
l'étendue de ses droits en Lettonie.
64. La Cour note que le requérant avait initialement obtenu un permis de séjour « aux fins d'activités
pédagogiques », puis « aux fins d'activités religieuses ». Elle relève qu'à l'époque des faits, l'article 17, alinéa
2, de la loi sur les étrangers prévoyait l'octroi d'un permis temporaire « pour accomplir une autre tâche »,
formule qui pouvait raisonnablement englober des activités religieuses. L'article 7 du règlement no 417,
quant à lui, prévoyait effectivement un séjour « en vue d'organiser des activités religieuses » et énumérait
les documents particuliers nécessaires pour son autorisation (paragraphes 31-32 ci-dessus). Cependant,
« les activités religieuses » n'y figuraient qu'en tant que cause justificative de l'entrée en Lettonie, et aucune
loi ni règlement n'autorisait la Direction des affaires de nationalité et de migration de se servir du
changement de permis de séjour comme prétexte pour interdire à un étranger l'exercice d'activités
religieuses sur le sol letton. Quant à l'article 14 § 4 de la loi sur les organisations religieuses, cité par le
requérant, il se limite à définir les conditions générales sous lesquelles des missionnaires étrangers peuvent
venir prêcher en Lettonie ; cela étant, il ne pouvait pas non plus servir de base juridique suffisante à
l'ingérence litigieuse.
65. En résumé, aucune disposition du droit letton en vigueur à l'époque des faits ne permettait à la
Direction d'indiquer à un étranger bénéficiaire d'un permis de séjour ce qu'il avait et ce qu'il n'avait pas le
droit de faire sur le territoire letton. En l'absence d'autres explications de la part du Gouvernement, force est
à la Cour de conclure que l'ingérence dans le droit du requérant à la liberté de religion n'était pas « prévue
par la loi ». Eu égard à ce constat, il n'y a pas lieu de poursuivre l'examen du grief pour rechercher si
l'ingérence visait un « but légitime » et était « nécessaire dans une société démocratique ».
66. Il y a donc eu violation de l'article 9 de la Convention dans la présente affaire.
III. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L'ARTICLE 14 DE LA CONVENTION
67. Le requérant s'estime également victime d'une discrimination prohibée par l'article 14 de la Convention,
qui se lit ainsi :
« La jouissance des droits et libertés reconnus dans la (...) Convention doit être assurée, sans distinction
aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou
toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la
naissance ou toute autre situation. »
68. A cet égard, le requérant rappelle que l'attitude négative du SAB à son égard était, au moins en partie,
fondée sur deux avis défavorables formulés respectivement par le Centre d'informations académiques et par
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l'Académie Luther. S'agissant du premier avis, le requérant considère que le fait d'exiger des missionnaires
étrangers entrant en Lettonie un niveau minimum agréé de formation théologique – condition inapplicable
aux ressortissants lettons – crée une distinction injustifiée fondée sur la nationalité. Quant à l'Académie
Luther – donc, luthérienne –, le requérant fait valoir qu'il est injuste et discriminatoire de prendre une
décision concernant une communauté religieuse et fondée sur un avis émis par les représentants d'une autre
confession.
69. Le Gouvernement reconnaît que les autorités ont invoqué l'absence de formation théologique adéquate
dans le chef du requérant – condition inapplicable aux ressortissants lettons – pour justifier la restriction de
ses activités pastorales. Toutefois, il explique que cette raison n'a été que secondaire, la raison principale de
la mesure critiquée relevant du secret de l'État et, par conséquent, ne pouvant pas être dévoilée. Au
demeurant, cette mesure a été examinée par le parquet, qui a conclu à sa régularité.
70. Eu égard à la conclusion à laquelle elle est parvenue sur le terrain de l'article 9 de la Convention, la
Cour n'estime pas nécessaire d'examiner de surcroît le grief tiré de l'article 14.
IV. SUR L'APPLICATION DE L'ARTICLE 41 DE LA CONVENTION
71. Aux termes de l'article 41 de la Convention,
« Si la Cour déclare qu'il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la
Haute Partie contractante ne permet d'effacer qu'imparfaitement les conséquences de cette violation, la
Cour accorde à la partie lésée, s'il y a lieu, une satisfaction équitable. »
A. Dommage
72. Selon le requérant, la restriction de ses activités religieuses pour des motifs tenus secrets, mais
supposant une menace pour la sécurité de l'État, a porté une très grave atteinte à sa réputation, qui doit se
mesurer eu égard à sa position particulière en tant que ministre de culte. Pour réparer le dommage moral
qu'il a subi du fait des soupçons pesant contre lui, il réclame 70 000 euros (EUR), à raison de 1 000 EUR par
mois pour la période allant du 11 septembre 2000 au 29 septembre 2005, et de 500 EUR par mois pour la
période postérieure.
73. Le Gouvernement considère que le montant indiqué ci-dessus manque de fondement. Il souligne
d'emblée que la seule base à retenir pour l'octroi d'une satisfaction équitable au requérant réside, en
l'espèce, dans le fait d'une ingérence injustifiée dans sa liberté de religion. Quant au raisonnement exposé
par le requérant, il porte plutôt sur la mémorisation et la conservation, par les autorités, de données de
caractère personnel le concernant ; ce raisonnement ne serait donc pertinent que sur le terrain de l'article 8
de la Convention relatif au droit au respect de la vie privée. Or, dans sa décision du 18 janvier 2007, la Cour
a justement déclaré irrecevable, pour non-épuisement des voies de recours internes, le grief du requérant
tiré de l'article 8. En tout état de cause, le Gouvernement rappelle que l'article 9 de la Convention ne
protège pas l'honneur et la réputation d'une personne.
74. La Cour estime qu'eu égard à toutes les circonstances de l'affaire, le constat de violation de l'article 9 de
la Convention figurant dans le présent arrêt fournit par lui-même une satisfaction équitable suffisante pour
tout préjudice moral subi par le requérant.
B. Frais et dépens
75. S'agissant des frais et dépens, le requérant réclame 10 323,58 EUR, correspondant à 7 225,45 lati (LVL)
qu'il a engagés tant devant les instances nationales que devant la Cour. A l'appui de sa demande, il présente
douze factures émises par son représentant, M. G. Senkāns, au cours de la période allant de 2000 à 2003.
Chacune de ces factures explique en détail les opérations effectuées par M. Senkāns, qui chiffre ses services
à un taux de 100 dollars américains (USD, soit environ 73,20 EUR) l'heure.
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76. Selon le Gouvernement, la demande de remboursement des frais et dépens présentée par le requérant
ne remplit pas toutes les exigences posées par la jurisprudence de la Cour en la matière, la désignation de
chaque service rendu par M. Senkāns ayant été exposée en des termes trop généraux. En tout état de
cause, le Gouvernement est d'avis que la somme exigée est excessive puisqu'elle excède plusieurs fois les
sommes fixées dans les barèmes d'assistance judiciaire approuvés par le conseil des ministres.
77. La Cour rappelle qu'au titre de l'article 41 de la Convention elle rembourse les frais dont il est établi
qu'ils ont été réellement et nécessairement exposés et sont d'un montant raisonnable. De plus, l'article
60 § 2 du règlement prévoit que les prétentions soumises au titre de l'article 41 de la Convention doivent
être chiffrées et ventilées par rubrique et être accompagnées des justificatifs pertinents, faute de quoi la
Cour peut rejeter la demande, en tout ou en partie (voir, entre autres, Svipsta c. Lettonie, no 66820/01,
§ 170, CEDH 2006-...). Par ailleurs, la Cour peut accorder à la partie lésée le paiement non seulement des
frais et dépens encourus devant elle, mais aussi de ceux qui ont été engagés devant les juridictions
nationales pour prévenir ou faire corriger une violation constatée par la Cour (voir, par exemple, Rotaru c.
Roumanie [GC], no 28341/95, § 86, CEDH 2000-V).
78. En l'espèce, la Cour relève que la demande du requérant est accompagnée de douze factures détaillées
exposant la nature et le coût de chacune des opérations effectuées par M. Senkāns ; cette demande semble
donc a priori remplir les exigences formelles précitées. D'autre part, eu égard au degré de complexité de
l'affaire et aux autres circonstances pertinentes, il est évident que le montant réclamé est excessif. Dans ces
conditions, la Cour, statuant en équité comme le veut l'article 41, décide d'allouer au requérant 5 000 EUR,
tous frais confondus, plus tout montant pouvant être dû à titre d'impôt.
C. Intérêts moratoires
79. La Cour juge approprié de baser le taux des intérêts moratoires sur le taux d'intérêt de la facilité de prêt
marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.
PAR CES MOTIFS, LA COUR, À l'UNANIMITÉ,
1. Rejette l'exception du Gouvernement tirée du non-épuisement des voies de recours internes et sa
demande de radiation de la requête ;
2. Joint au fond l'exception du Gouvernement tirée de l'incompatibilité de la requête ratione materiae avec
les dispositions de la Convention et la rejette ;
3. Dit qu'il y a eu violation de l'article 9 de la Convention ;
4. Dit qu'il n'y a pas lieu d'examiner séparément le grief tiré de l'article 14 de la Convention ;
5. Dit que le constat d'une violation fournit en soi une satisfaction équitable suffisante pour le dommage
moral subi par le requérant ;
6. Dit
a) que l'État défendeur doit verser au requérant, dans les trois mois à compter du jour où l'arrêt sera
devenu définitif conformément à l'article 44 § 2 de la Convention, 5 000 EUR (cinq mille euros) pour frais et
dépens, plus tout montant pouvant être dû à titre d'impôt ;
b) qu'à compter de l'expiration dudit délai et jusqu'au versement, ce montant sera à majorer d'un intérêt
simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable
pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;
7. Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.
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Fait en français, puis communiqué par écrit le 8 novembre 2007 en application de l'article 77 §§ 2 et 3 du
règlement.
Stanley Naismith Boštjan M. Zupančič
Greffier adjoint Président
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FIRST SECTION
CASE OF ISMAILOVA v. RUSSIA
(Application no. 37614/02)
JUDGMENT
STRASBOURG
29 November 2007
This judgment will become final in the circumstances set out in Article 44 § 2 of the Convention. It may be
subject to editorial revision.
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In the case of Ismailova v. Russia,
The European Court of Human Rights (First Section), sitting as a Chamber composed of:
Mr L. Loucaides, President,
Mrs N. Vajić,
Mr A. Kovler,
Mrs E. Steiner,
Mr K. Hajiyev,
Mr D. Spielmann,
Mr S.E. Jebens, judges,
and Mr A. Wampach, Deputy Section Registrar,
Having regard to the decision to grant priority to the above application under Rule 41 of the Rules of Court.
Having deliberated in private on 8 November 2007,
Delivers the following judgment, which was adopted on the last-mentioned date:
PROCEDURE
1. The case originated in an application (no. 37614/02) against the Russian Federation lodged with the
Court under Article 34 of the Convention for the Protection of Human Rights and Fundamental Freedoms
(“the Convention”) by a Russian national, Mrs Kurbankiz Ismailova, on 5 October 2002. She was represented
before the Court by Mr A. Leontyev and Mr R. Daniel, lawyers practising in St Petersburg and Norfolk
respectively.
2. The Russian Government (“the Government”) were represented by Mr P. Laptev, Representative of the
Russian Federation at the European Court of Human Rights.
3. The applicant alleged, in particular, that the decision to grant the custody of her two children to their
father had been in breach of Articles 8, 9 and 14 of the Convention.
4. By a decision of 31 August 2006 the Court declared the application partly admissible.
5. The applicant and the Government each filed further written observations (Rule 59 § 1). The Court
having decided, after consulting the parties, that no hearing on the merits was required (Rule 59 § 3 in fine),
the parties replied in writing to each other's observations.
THE FACTS
I. THE CIRCUMSTANCES OF THE CASE
6. The applicant was born in 1972 and lives in the town of Makhachkala.
A. Events prior to custody proceedings of 2001
7. The applicant married in 1990. The applicant and her husband were nominal but non-practising Muslims
at that time.
8. Two children, a boy and a girl, were born to the couple in 1993 and 1997 respectively.
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9. It appears that the family lived at a house of the paternal grandparents in the village of Novomugri,
Sergokalinskiy District of the Republic of Dagestan.
10. Being upset with various difficulties in the relations with her husband who was a seaman and frequently
away at sea, in June 1999 the applicant started associating with the Jehovah's Witnesses.
11. In June 2000 the mounting tensions between the spouses over the applicant's religious interests
resulted in the applicant's decision to leave the matrimonial home together with the children. The applicant
and children started living with the maternal grandparents.
12. In December 2000 the applicant was baptised as a Jehovah's Witness.
13. There appear to have been only occasional contacts between the applicant's husband and the children
between June 2000 and July 2001. As the applicant's husband failed systematically to provide financial
support for the upbringing of the children, in early 2001 the applicant filed in court a request for
maintenance. On 26 April 2001 the court ordered the husband to pay for the support of the children.
14. On 1 July 2001 the children went to visit their paternal grandparents and on 26 August 2001 the
grandparents refused to return the children to the applicant. The applicant submits that she has had no
regular access to the children since then.
B. First-instance proceedings
15. On 17 September 2001 the father filed a divorce petition in the Leninskiy District Court of Makhachkala
(“the District Court” – Ленинский районный суд г. Махачкала).
16. He also submitted that he was ready to provide the children with better living and moral conditions than
the applicant, that the applicant had taken the children to religious meetings with a view to converting them
to the faith of the Jehovah's Witnesses, that the children had become irritable and did not want to return to
their mother, and requested the court to grant him custody of both children.
17. In response, the applicant accepted that the marriage had irretrievably broken down but contested the
husband's claim for custody.
1. Report on the case by the Custody and Guardianship Agency
18. At a preliminary hearing the District Court ordered a report on the issue of custody of the children to be
prepared by the Custody and Guardianship Agency attached to Leninskiy District Council of the town of
Makhachkala (“the Custody and Guardianship Agency” – Орган опеки и попечительства при
Администрации Ленинского района
г. Махачкалы).
19. A letter of instruction dated 24 October 2001 contained a request to report on the applicant's living
conditions and to give a conclusion concerning “the possibility of leaving the children with her, having regard
to the fact that [the applicant] attends [meetings of] the sect 'Jehovah's Witnesses'”.
20. On 4 December 2001 an official, U., drew up a report on the preliminary inquiry into [the applicant's]
living conditions. The report described the three room flat measuring in total 68.5 square metres in which
the applicant, her two parents and three brothers were living and then stated:
“... Additional information about [the applicant's] family: [the applicant] attends [meetings] of the
organisation 'Jehovah's Witnesses'; members of the organisation sometimes meet at her home and study
the relevant literature. [The applicant's] parents are critical of her religion.
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I deem it, in the interests of the minor children, to be more advisable for them to live with their father ... in
the village of Novomugri, Sergokalinskiy District.”
21. On an unspecified date the District Court added the report of 4 December 2001 to the case-file.
2. Observations by the Leninskiy District Council of the town of Makhachkala
22. On 11 December 2001, upon the District Court's request, the Leninskiy District Council of the Town of
Makhachkala (“the District Council” – Администрация Ленинского районного г. Махачкалы) submitted to
the court observations (заключение) in which it advised that custody of the children should be granted to
their father.
23. The District Council reasoned as follows:
“The Custody and Guardianship Agency attached to Leninskiy District Council of the town of Makhachkala
established that [the applicant] resided in her parents' house... In 1990 she had married Mr Magomed
Gazimagomedov, from whom she bore two minor children: Abdul Gazimagomedov, born in 1993, and
Aminat Gazimagomedova, born in 1997.
The spouses resided in the village Novomugri of the Sergokalinskiy District. She worked in a neighbour
village as a school teacher; his work was related to sea trips.
As of June 2000 spouses Gazimagomedovy de facto interrupted their marital relations. The children started
living with their mother in Makhachkala.
Long before their divorce, [the applicant] began attending [meetings of] the religious organisation 'Jehovah's
Witnesses'. Her attendance at [these] meetings which involved travelling [to other towns] was the reason
for the discord and break-up of the family. Villagers and relatives spoke out against the conduct of [the
applicant].
When living with the children in Makhachkala, contrary to her parents' will, she did not refrain from regularly
attending the meetings of the 'Jehovah's Witnesses'. She began actively advocating the ideas of this
organisation. Sometimes her fellow believers gather together at her parents' home and they study the
relevant literature. She would also take her children to the meetings. After attending these meetings, the
children became shy and irritable, they perceived the surrounding world and natural phenomena in the way
the 'Jehovah's Witnesses' teaching presents it (the children were afraid of the 'Worldwide Flood' whenever it
rained, they called the [applicant's] mother-in-law 'Satan', they would not attend their classmates' birthdays
or other celebrations because the religion did not permit this).
The children's father ... was seriously concerned that the children's association with their mother threatened
their upbringing; he was against their returning to Makhachkala.
The minor children are presently living with their father. [The son] is now getting good marks at [school]...
On the basis of the aforementioned, considering the fact that the parents must provide each child with the
possibility of growing healthy, physically and spiritually, and based on the interests of the minor children, the
Custody and Guardianship Agency deems it advisable for the children to reside with their father.”
3. Judgment of 15 March 2002
24. On 15 March 2002 the District Court terminated the marriage between the applicant and her husband
and granted custody of the children to their father.
25. The District Court reasoned as follows:
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“... [The spouses] married on 6 December 1990, then resided in different locations, and since 1997 in a
private house of Gazimagomedov in the village of Novomugri of the Sergokalinskiy District of the Republic of
Dagestan.
[They] have children in marriage: Abdula, born on 30 May 1993, and Aminat, born on 15 January 1997.
In June 2000, having gone to visit her parents, [the applicant] joined the organisation 'Jehovah's Witnesses'.
The family began to have problems and since that time they have not been living together as husband and
wife. The family has split apart. The court fixed them a period for reconciliation but the parties failed to
reunite and have requested to terminate their marriage.
It follows that the family cannot be preserved and the marriage should be dissolved.
From the submissions of [the applicant] and her mother ... it transpires that the members of the 'Jehovah's
Witnesses' organisation come to the flat in which [the applicant] and her parents reside a few times a week
to conduct their activities. Furthermore, [the applicant] attends the weekly meetings of the 'Jehovah's
Witnesses'.
[The applicant's mother] was questioned in court and confirmed the fact that at the beginning her
grandchildren had been very afraid of rain and wind and had been saying that a 'Worldwide Flood' and an
earthquake would take place. That is when [the applicant's mother] learned that [the applicant] had been
taking the children to meetings of the sect 'Jehovah's Witnesses'.
From the case-file documents and the parties' submissions it transpires that at present [the applicant's
husband] resides, along with his parents, in the village of Novomugri in a two-storey house. The household
in fact belongs to him. For a few months of the year he works at sea and the same amount of time he
spends at home.
The children have been living with him and his parents.
According to a certificate of a Novomugri Secondary School, [the applicant's son] has excellent results at
school.
[The applicant] works as a teacher and has good references.
From a report on [her] living conditions it transpires that a three-room flat is occupied by the applicant, her
parents and [the applicant's] three brothers.
The members of the 'Jehovah's Witnesses' organisation gather at the same place and study the relevant
literature. According to a report on [the applicant's] living conditions and the observations of the Custody
and Guardianship Agency, 'the parents are obliged to provide their children with an opportunity to grow
physically and spiritually healthy; regard being had to the interests of [the children], the Custody and
Guardianship Agency considers it appropriate to grant custody [of both children] to their father'.
The court too is of the view that, having regard to the fact that [the children] have been living with their
father for more than five years and have not yet attained the age of 10, and also in the interests [of the
children] as defined by sections 54-56 and 61-66 of the RF Family Code, that custody should be granted to
their father...”
C. Appeal proceedings
26. The applicant and her counsel appealed against the judgment of 15 March 2002 to the Supreme Court
of the Republic of Dagestan (“the Supreme Court” – Судебная коллегия по гражданским делам
Верховного суда Республики Дагестан).
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27. In her grounds of appeal she argued that the first-instance judgment was discriminatory in that it had
been based on the applicant's affiliation to the Jehovah's Witnesses, that the first-instance court's findings
were perverse, unsustainable and misconstrued, that the court had failed to take account of all the factors
which were relevant to the case according to section 65 (3) of the Family Code (the father's frequent
absence owing to his work at sea, the applicant's demonstrated pedagogical competence as a professional
school teacher, a prior and recent history of both parents' involvement in the upbringing of their children,
the father's allegedly immoral adulterous behaviour, etc.) and that the court had acted on the presumption
of the Jehovah's Witnesses being a dangerous organisation.
28. The applicant also cited domestic jurisprudence in child custody cases and the judgment of 23 June
1993 of the European Court of Human Rights in the case of Hoffmann v. Austria.
29. On 17 April 2002 the Supreme Court, sitting in a composition of three professional judges, examined the
applicant's appeal and by two votes to one rejected it as unfounded.
30. In particular, the majority established the following:
“... In making the decision that the father should have custody of the children, the trial court came to the
sound conclusion that this was in the best interests of the children. The court decision is based on the
conclusion of the Custody and Guardianship Agency and the case circumstances established in court.
Thus the court established that the children's mother ... who is a member of the Jehovah's Witnesses
organisation, took the children with her to the sect's meetings, and involved them in associating with the
sect's members at their homes. She thereby violated the requirements of Article 28 of the Constitution of the
Russian Federation, under which everyone is guaranteed freedom of conscience and religion. Under Article
17 (2) of the Constitution fundamental human rights are unalienable and belong to everyone at birth. The
[court] finds irrelevant [the applicant's] arguments that the court, by its decision, has deprived her of the
right to educate her children because of her religion and membership of the Jehovah's Witnesses
organisation. Pursuant to Article 17 (3) of the Constitution and Article 65 (1) of the Family Code, [the
applicant's] exercise of her constitutional rights, including the right to practice any religion and her parental
rights, must not impinge on the rights and freedoms of others or conflict with the interests of the children.
The right of a parent to educate a child from whom he or she is living apart, is guaranteed by section 66 of
the Family Code, which defines the procedure for a parent to exercise parental rights.
The court also established that [the applicant's husband's] financial status and housing conditions are better
than those of [the applicant]. [The applicant's husband] is employed, lives with his parents, and owns a twostorey house with the necessary living conditions for the children. [The paternal grandparents] do not object
to their grandchildren living with them. [The applicant] works as a history teacher in [a school] in
Makhachkala. She lives in her parents' 48-square-metre, three-bedroom flat, along with her father, mother
and three brothers, born in 1977, 1983, and 1985.
The Custody and Guardianship Agency concluded that it was in the best interests of the children that they
remain in the custody of their father... [The applicant's] argument, stated in her appeal, that the granting of
custody to the father would have negative repercussions on the children's emotional state in the future, was
not substantiated. The argument that the religious organisation Jehovah's Witnesses has state registration,
benefits society, and so forth, cannot be taken into consideration since it is irrelevant to the matter being
examined by the court. There are no reasons in [the applicant's] appeal to reverse [the first-instance
judgment] handed down in the case...”
31. The dissenting judge gave the following opinion:
“... I hold that the decision handed down by the first-instance court was subject to reversal owing to the
failure to investigate the circumstances specified in
section 65 (3) of the Family Code of the RF.”
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32. The applicant's subsequent attempts to seek reconsideration of the decisions in her case by way of
supervisory review were unsuccessful.
33. All her respective requests were dismissed as unfounded.
34. The latest decision in this respect was taken by the Supreme Court of the Republic of Dagestan on 28
November 2003.
D. Events subsequent to custody proceedings
35. The applicant alleged that her former husband had remarried and that his new wife had not attempted
to assume the role or responsibilities of step-mother. In the absence of the father, who was frequently away
at sea, the paternal grandmother had effectively become the sole carer.
36. The applicant further alleged that she was allowed to visit her children only occasionally and could
never remain with them alone.
37. The Government submitted that, according to the information provided by the head of the
Sergokalinskiy local administration of the Republic of Dagestan, the applicant's children resided with their
father and paternal grandparents in a two-storey private house. They had all necessary facilities for the
upbringing and education of the children. Their father had remarried and had had a third child. The
applicant's children had developed emotional ties with the third child.
II. RELEVANT DOMESTIC LAW
38. Article 28 of the Russian Constitution of 12 December 1993 reads:
“Everyone shall be guaranteed the right to freedom of conscience, freedom of religion, including the right to
profess, either alone or in community with others, any or no religion, to choose, have and disseminate
religious or other convictions freely and to act according to them.”
39. Section 65 (on the exercise of parental rights) of the Family Code of the Russian Federation provides as
follows:
“3. The place of the children's residence, if the parents live apart, shall be established by an agreement
between the parents.
In the absence of an agreement, the dispute between the parents shall be resolved in court, proceeding
from the children's interests and taking into account the children's opinion. In doing so, the court shall take
into account the child's affection for each of his parents and for his brothers and sisters, the child's age, the
moral and other personal characteristics of the parents, the relations existing between each of the parents
and the child, and the possibility of creating optimal conditions for the child's upbringing and development
(the parent's kind of activity and work regime, their material situation and family status, etc.).”
40. Section 66 (on the exercise of parental rights by the parent residing separately from the child) of the
Code provides as follows:
“1. The parent residing separately from the child shall have the right to communicate with the child and to
take part in his upbringing and in resolving the issue of the child's education.
The parent with whom the child lives shall not prevent the child's communication with the other parent,
unless such communication damages the child's physical and mental health or his moral development.
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2. The parents shall have the right to enter into a written agreement on the way the parent residing apart
from the child may exercise his or her parental duties.
If the parents cannot reach an agreement, the dispute shall be resolved in court with the participation of the
guardianship and trusteeship body, upon the claim of the parents (or one of them).
3. In the event of failure to abide by the court decision, the measures stipulated by the civil procedural
legislation shall be applied to the respective parent. In the case of persistent failure to comply with the court
decision, the court shall have the right, upon the claim of the parent residing separately from the child to
take a decision on passing the child over to that parent, proceeding from the child's interests and taking into
account the child's opinion.
4. The parent residing separately from the child shall have the right to obtain information on his or her child
from the educational establishments and medical centres, from the institutions for the social protection of
the population and from other similar institutions. The information may be refused only if the parent
presents a threat to the child's life and health. Refusal to provide information may be disputed in court.”
THE LAW
I. THE GOVERNMENT'S PRELIMINARY OBJECTION
41. In their observations on the merits of the case the Government submitted that in its admissibility
decision of 31 August 2006 the Court had failed to examine their non-exhaustion argument in its entirety. In
particular, the Court failed to take into account the fact that the domestic legal system provided the
applicant with the possibility of requesting the court to review the decision on the custody of the children if
the conditions of their upbringing changed.
42. The Court notes that in its decision of 31 August 2006 it examined and rejected the Government's plea
of non-exhaustion. The Court considered that the procedure for determination of the right of a parent living
separately from the child to communicate with the child and to participate in his or her upbringing, as
referred to by the Government, might have had some incidence on the applicant's relations with her
children, but could not have remedied her personal situation and brought relief in respect of her complaint
against the decisions determining the place of her children's residence at their father's home. The Court
finds that similar considerations apply in relation to the Government's argument that the domestic legal
system provided for a claim for review of the decision on the custody of the children in cases where the
conditions of their upbringing changed. Had the applicant applied for review of the court decisions which
granted custody of her children to their father under the above-mentioned procedure, the proceedings might
have had some incidence on the applicant's relations with her children for the future. However, the findings
and the ruling made in the domestic courts' decisions of 15 March and 17 April 2002 would have remained
unaffected and the applicant would not have obtained any redress for the alleged violations of her
Convention rights in the past.
43. In the light of the foregoing, the Court finds that that the proceedings referred to by the Government
were not a remedy for purposes of exhaustion under Article 35 § 1. Therefore, the Court dismisses the
Government's preliminary objection.
II. ALLEGED VIOLATION OF ARTICLE 8 OF THE CONVENTION IN CONJUNCTION WITH ARTICLE 14
44. The applicant was dissatisfied with the decisions of the domestic courts to grant custody of her two
children to their father. She complained that the decision had been in breach of Article 8 of the Convention
in conjunction with Article 14. These Convention provisions, in so far as relevant, provide as follows:
Article 8
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“1. Everyone has the right to respect for his private and family life, his home and his correspondence.
2. There shall be no interference by a public authority with the exercise of this right except such as is in
accordance with the law and is necessary in a democratic society in the interests of national security, public
safety or the economic well-being of the country, for the prevention of disorder or crime, for the protection
of health or morals, or for the protection of the rights and freedoms of others.”
Article 14
“The enjoyment of the rights and freedoms set forth in [the] Convention shall be secured without
discrimination on any ground such as ... religion ... or other status.”
A. The parties' submissions
1. The Government's submissions
45. In their submissions on the admissibility of the case, the Government argued that the decision to grant
custody of the children to their father had been lawful, reasonable and taken in the best interests of the
children, and that the children would have been far worse off living with the applicant, not only because of
Jehovah's Witnesses' meetings and strangers visiting the applicant's flat, but also because the applicant had
insufficient financial means. They argued that the father's income and living conditions were much better
than those of the mother and that the children did not want to live with their mother. The Government also
relied on the findings of the District Council's report of 11 December 2002 from which it followed that after
attending the religious meetings the children had become nervous, tearful and had lost touch with reality.
Overall, the Government argued that there had been no interference with the applicant's Article 8 rights as a
result of the decision in question and that, in any event, any interference was justified under the second
paragraph of that Convention provision. In addition, the Government submitted that according to the
information received from the head of a local council at the place of residence of the applicant's former
husband, the children were living and studying at their father's home in very good conditions. In their
observations on the merits of the case, the Government also argued that the applicant's religious affiliation
had not been a decisive factor or a factor of any significance capable of affecting the custody decision and
that in any event the decision in question had been taken in the best interests of the children. They argued
that the applicant had not been stripped of her parental rights and that she could freely participate in the
education and upbringing of her children.
2. The applicant's submissions
46. The applicant argued that the Government's reliance on events or facts subsequent to the proceedings
in question was incorrect as those events were irrelevant to the issues of the present case. The applicant
submitted that the court decisions in the custody proceedings had been in breach of Article 65 § 3 of the
Family Code and were therefore unlawful. She also argued that the decisions were unreasonable, baseless
and clearly discriminatory.
B. The Court's assessment
47. The Court reiterates that Article 14 of the Convention complements the other substantive provisions of
the Convention and the Protocols. It has no independent existence since it has effect solely in relation to
“the enjoyment of the rights and freedoms” safeguarded by those provisions. Although the application of
Article 14 does not presuppose a breach of those provisions – and to this extent it is autonomous – there
can be no room for its application unless the facts at issue fall within the ambit of one or more of the latter
(see, among many other authorities, Van Raalte v. the Netherlands, judgment of 21 February 1997, Reports
of Judgments and Decisions 1997-I, p. 184, § 33, and Camp and Bourimi v. the Netherlands, no. 28369/95,
§ 34, ECHR 2000-X).
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1. Whether the facts of the case fall within the ambit of Article 8 of the Convention
48. It should be noted at the outset that, in the instant case, the two children were living with their mother
since she had left the matrimonial house in June 2000 and until August 2001 when the parental
grandparents refused to return them to the applicant after a visit. In such circumstances, the Court
considers that the subsequent judgment granting custody over the children to their father constitutes an
interference with the applicant's right to respect for her family life and cannot be regarded merely as the
judicial interference necessary in any divorce. The case therefore falls within the ambit of Article 8 of the
Convention (see Hoffmann v. Austria, judgment of 23 June 1993, Series A no. 255-C, p. 58, § 29, and PalauMartinez v. France, no. 64927/01, § 30, ECHR 2003-XII).
2. Whether the applicant and her former husband were in an analogous or substantially comparable
situation and were treated differently
49. The Court further recalls that Article 14 of the Convention only comes into play where an applicant
demonstrated that he or she has been treated differently from a person in a comparable position with
respect to a substantive right guaranteed by the Convention (Fredin v. Sweden (no. 1), judgment of 18
February 1991, Series A no. 192, § 61).
50. The Court must therefore first examine whether the applicant can claim to have been treated differently
from her husband and whether they were in a comparable position.
51. In establishing the children's residence at their father's home, the District Court ruled on the conditions
in which the applicant and her ex-husband respectively were raising their children. To do this, the District
Court, on the one hand, took account of the following factors concerning the applicant's former husband:
“From the case-file documents and parties' submissions it transpires that at present [the applicant's
husband] resides, along with his parents, in the village of Novomugri in a two-storey house. The household
in fact belongs to him. For a few months of the year he works at sea and the same amount of time he
spends at home. ...
The children have been living with him and his parents.
According to a certificate of a Novomugri Secondary School, [the applicant's son] has excellent results at
school.”
52. On the other hand, the District Court noted in respect of the applicant that:
“... From the submissions of [the applicant] and her mother ... it transpires that the members of the
'Jehovah's Witnesses' organisation come to the flat in which [the applicant] and her parents reside a few
times a week to conduct their activities. Furthermore, [the applicant] attends the weekly meetings of the
'Jehovah's Witnesses'. ...
[The applicant's mother] was questioned in court and confirmed the fact that at the beginning her
grandchildren had been very afraid of rain and wind and had been saying that a 'Worldwide Flood' and an
earthquake would take place. That is when [the applicant's mother] learned that [the applicant] had been
taking the children to meetings of the sect 'Jehovah's Witnesses'. ...
[The applicant] works as a teacher and has good references. ...
From a report on [her] living conditions it transpires that a three-room flat is occupied by the applicant, her
parents and [the applicant's] three brothers.
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The members of the 'Jehovah's Witnesses' organisation gather at the same place and study the relevant
literature. According to a report on [the applicant's] living conditions and the observations of the Custody
and Guardianship Agency, 'the parents are obliged to provide their children with an opportunity to grow
physically and spiritually healthy; regard being had to the interests of [the children] ...”
53. The District Court concluded:
“... the Custody and Guardianship Agency considers it appropriate to grant custody [of both children] to their
father'. ...
The court too is of the view that, having regard to the fact that [the children] have been living with their
father for more than five years and have not yet attained the age of 10, and also in the interests [of the
children] as defined by sections 54-56 and 61-66 of the RF Family Code, that custody should be granted to
their father...”
54. Having examined the case on appeal, the Supreme Court held that:
“... In making the decision that the father should have custody of the children, the trial court came to the
sound conclusion that this was in the best interests of the children. The court's decision was based on the
conclusion of the Custody and Guardianship Agency and the case circumstances established in court.
Thus the court established that the children's mother ... who is a member of the Jehovah's Witnesses
organisation, took the children with her to the sect's meetings, and involved them in associating with the
sect's members at their homes. She thereby violated the requirements of Article 28 of the Constitution of the
Russian Federation, under which everyone is guaranteed freedom of conscience and religion. Under Article
17 (2) of the Constitution fundamental human rights are unalienable and belong to everyone at birth. The
[court] finds irrelevant [the applicant's] arguments that the court, by its decision, has deprived her of the
right to educate her children because of her religion and membership of the Jehovah's Witnesses
organisation. Pursuant to Article 17 (3) of the Constitution and Article 65 (1) of the Family Code, [the
applicant's] exercise of her constitutional rights, including the right to practice any religion and her parental
rights, must not impinge on the rights and freedoms of others or conflict with the interests of the children.
The right of a parent to educate a child from whom he or she is living apart, is guaranteed by section 66 of
the Family Code, which defines the procedure for a parent to exercise parental rights.
The court also established that [the applicant's husband's] financial status and housing conditions are better
than those of [the applicant]. [The applicant's husband] is employed, lives with his parents, and owns a twostorey house with the necessary living conditions for the children. [The paternal grandparents] do not object
to their grandchildren living with them. [The applicant] works as a history teacher in [a school] in
Makhachkala. She lives in her parents' 48-square-meter, three-bedroom flat, along with her father, mother
and three brothers, born in 1977, 1983, and 1985.
The Custody and Guardianship Agency concluded that it was in the best interests of the children that they
remain in the custody of their father .... [The applicant's] argument, stated in her appeal, that the granting
of custody to the father would have negative repercussions on the children's emotional state in the future,
was not substantiated. The argument that the religious organisation Jehovah's Witnesses has state
registration, benefits society, and so forth, cannot be taken into consideration since it is irrelevant to the
matter being examined by the court. There are no reasons in [the applicant's] appeal to reverse [the firstinstance judgment] handed down in the case.”
55. The Court finds that by contrast to the aforementioned Palau Martinez judgment (see §§ 33-38) it
cannot be said that the domestic courts decided the present case solely or principally on the basis of the
applicant's religious affiliation. In fact, the court decisions made it clear that the applicant and her former
husband were in completely different situations in so far as the relevant factors, such as their financial status
and housing conditions, were concerned. It is true that the domestic courts did examine the arguments
concerning the incidence of and implications on the applicant's religious affiliation on the children's
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upbringing, but nothing in the reasoning of the domestic courts suggests that the case might have been
decided differently had it not been for the applicant's religion (see also by contrast to Hoffmann, cited
above, § 33 and Fretté v. France, no. 36515/97, § 32, ECHR 2002-I).
56. In any event, the Court does not consider that it has to resolve this issue, especially since the
arguments on the effects on the applicant's religion on the children situation are of relevance in determining
whether the difference of treatment was justified. The Court will proceed on the assumption the applicant
and her former husband were in an analogous situation and that they were treated differently.
3. Whether any difference in treatment was justified
57. The different treatment is considered discriminatory for the purposes of Article 14 if it “has no objective
and reasonable justification”, that is, if it does not pursue a “legitimate aim” or if there is not a “reasonable
relationship of proportionality between the means employed and the aim sought to be realised”. The
Contracting States enjoy a certain margin of appreciation in assessing whether and to what extent
differences in otherwise similar situations justify a different treatment (see Karlheinz Schmidt v. Germany,
judgment of 18 July 1994, Series A no. 291-B, pp. 32-33, § 24, and Camp and Bourimi, cited above, § 37).
58. The Court is of the opinion that the aim pursued in the instant case, namely protection of the children's
interests, is legitimate.
59. As to whether there was a reasonably proportionate relationship between the means employed and the
legitimate aim pursued, the Court notes that unlike in the mentioned Palau Martinez judgment (see §§ 42
and 43) the domestic authorities in the present case made conclusions concerning the incidence of the
applicant's religious affiliation on her children's upbringing on the basis of the direct and concrete evidence
demonstrating the influence of the applicant's religion on her two children's upbringing and daily life.
60. The Court accepts in this respect the Government's reference to the findings contained in the
observations of the District Council of 11 December 2001 which were relied upon by the authorities in the
course of the domestic proceedings. They read in their relevant parts as follows:
“... after attending these meetings, the children became shy and irritable, they perceived the surrounding
world and natural phenomena in the way the 'Jehovah's Witnesses' teaching presents it (the [applicant's]
children were afraid of the 'Worldwide Flood' whenever it rained, they called the [applicant's] mother-in-law
'Satan', they would not attend their classmates' birthdays or other celebrations because the religion does not
permit this)...”
61. The Court also notes the following findings of the District Court in its judgment of 15 March 2002:
“... the members of the 'Jehovah's Witnesses' organisation come to the flat in which [the applicant] and her
parents reside a few times a week to conduct their activities. Furthermore, [the applicant] attends the
weekly meetings of the 'Jehovah's Witnesses'. ...
[The applicant's mother] was questioned in court and confirmed the fact that at the beginning her
grandchildren had been very afraid of rain and wind and had been saying that a 'Worldwide Flood' and an
earthquake would take place. That is when [the applicant's mother] learned that [the applicant] had been
taking the children to meetings of the sect 'Jehovah's Witnesses'. ...
The members of the 'Jehovah's Witnesses' organisation gather at the same place and study the relevant
literature”.
62. The reasoning presented by the domestic courts shows that they focused solely on the interests of the
children. The courts did not rely on their mother being a member of the Jehovah's Witnesses, but on the
applicant's religious practices, in which she had included her children and failed to protect them. In the view
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of the domestic courts, this had led to social and psychological repercussions for the children. The courts
considered that this would have negative effects on the children's upbringing. Furthermore, this was only
one of the elements in the courts' reasoning, which was largely based on the children's age and the
financial, housing and general living conditions the parents could provide them with. There is nothing to
suggest that the national courts' reasoning was arbitrary or unreasonable
63. In such circumstances, the Court cannot but conclude that there existed a reasonable relationship of
proportionality between the means employed and the legitimate aim pursued (see Hoffmann, cited above, §
36, and Palau-Martinez, cited above, §§ 42-43). Accordingly, the Court finds that there has been no violation
of Article 8 of the Convention taken in conjunction with Article 14.
III. ALLEGED VIOLATION OF ARTICLE 8 TAKEN ALONE AND ARTICLE 9 TAKEN ALONE OR IN
CONJUNCTION WITH ARTICLE 14
64. The applicant complained that there had been an interference with her freedom of religion within the
meaning of Article 9, and that this interference was discriminatory within the meaning of Article 9 taken in
conjunction with Article 14. She also complained that there had been a breach of Article 8 taken alone.
65. The Court considers that no separate issue arises under Article 8 taken alone and Article 9 taken alone
or in conjunction with Article 14, since the factual circumstances relied on are the same as those for the
complaint under Article 8 taken in conjunction with Article 14, of which no violation has been found.
FOR THESE REASONS, THE COURT
1. Dismisses unanimously the Government's preliminary objection;
2. Holds by four votes to three that there has been no violation of Article 8 of the Convention taken in
conjunction with Article 14;
3. Holds unanimously that no separate issue arises under Article 8 taken alone and Article 9 taken alone or
in conjunction with Article 14;
Done in English, and notified in writing on 29 November 2007, pursuant to Rule 77 §§ 2 and 3 of the Rules
of Court.
André Wampach Loukis Loucaides
Deputy Registrar President
In accordance with Article 45 § 2 of the Convention and Rule 74 § 2 of the Rules of Court, the dissenting
opinion of Mrs Vajić, Mrs Steiner and Mr Hajiyev is annexed to this judgment.
L.L.
A.W.
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DISSENTING OPINION OF JUDGE HAJIYEV, JOINED BY JUDGES VAJIĆ AND STEINER
To our regret, we are unable to share the opinion of the majority of the Chamber that there has not been, in
the present case, a violation of Article 8 of the Convention taken in conjunction with Article 14.
The majority in the Chamber rely on the reasoning set out by the domestic courts which, in their opinion,
was mainly based on the interests of the children and not on their mother's being a member of the
Jehovah's Witnesses.
In our opinion, however, the national courts' judgments do not provide sufficient justification for such an
unambiguous conclusion. On the contrary, we are of the opinion that, as in the Hoffmann v. Austria
(no. 12875/87) and Palau and Martinez v. France (no. 64927/01) judgments, there has been a difference in
treatment on the ground of religious convictions, based on the mother's religious practices as a member of
the Jehovah's Witnesses. Our conclusion is supported by the tone and phrasing of the considerations
regarding the practical consequences of the applicant's religion, whereas the requirement of a tolerant
society is to respect the religious convictions of the mother that may accordingly affect her children's
education. Moreover, the domestic decisions did not take into account all the circumstances of the case,
especially those relating to the upbringing of the children, but mainly concentrated on the specific effects of
the mother's religious practices upon their daily life (see paragraphs 23 and 25).
In this connection it should also be noted that the domestic courts did not take into consideration the age of
the children, in particular that of the four-year-old daughter who should have stayed with her mother and
should not have been removed from her unless compelling evidence of grave harm to the child was proven.
Further, they did not balance properly the interests of both parents before arriving at their decision. For
instance, they did not refer to any fact that would show the mother generally to be unfit to bring up her
children: no complaint of any kind was ever raised about the parenting and educational skills of the mother
(who is a qualified teacher), or questioning whether she was a loving and caring mother capable of bringing
up her children, or claiming that she had neglected her children. In addition, the fact that the father is a
seaman who is absent for half the year, or that before the divorce, between June 2000 and July 2001, he
had failed systematically to provide financial support for the upbringing of the children so that on 26 April
2001 the court had had to order the husband to pay such child support, was not examined by the courts.
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In this regard we also wish to underline the significance of the Supreme Court's dissenting judge's opinion
about the failure to investigate the circumstances specified in domestic law.
Thus, the national courts mainly balanced the financial situation of the father and the housing conditions he
was providing to the children, on the one hand, and the mother's religious activities of which the family and
villagers disapproved, on the other. Therefore, even if there are no direct negative declarations about the
Jehovah's Witnesses to be found in the national courts' judgments, the arguments concerning the
implications of the applicant's religious affiliation on the children's upbringing suggest that the case might
have been decided differently had it not been for the applicant's religion (see mutatis mutandis, Hoffmann, §
33).
We are therefore of the opinion that there was a difference in treatment and that the difference was based
on religion and was not justified. Thus such a decision interfered in a discriminatory way with the maternal
rights and obligations of the applicant.
For these reasons we, unlike the majority, were in favour of finding a violation of Article 8 of the Convention
taken in conjunction with Article 14.
ISMAILOVA v. RUSSIA JUDGMENT
ISMAILOVA v. RUSSIA JUDGMENT
ISMAILOVA v. RUSSIA JUDGMENT
ISMAILOVA v. RUSSIA JUDGMENT – DISSENTING OPINION OF
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DROIT COMPARE
ÕÕÕ
ÕÕÕ
Cour Suprême du Canada, n°31212, 14 décembre 2007, Stephanie Brenda Bruker c/
Jessel (Jason) Benjamin Marcovitz ( 2007 CSC 54)
Indemnisation du préjudice subi par l'épouse suite au refus de son ex-conjoint de lui accorder le
divorce religieux juif après le divorce civil.
USA
Secretariat d'Etat
2007 Report on International Religious Freedom
September 14, 2007
Released by the Bureau of Democracy, Human Rights and Labor
Extrait
France
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COUR SUPRÊME DU CANADA
RÉFÉRENCE : Bruker c. Marcovitz, 2007 CSC 54
ENTRE :
DATE : 20071214
DOSSIER : 31212
Stephanie Brenda Bruker
Appelante
et
Jessel (Jason) Benjamin Marcovitz
Intimé
- et Association canadienne des libertés civiles
Intervenante
TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE : Motifs de la juge Abella
CORAM : La juge en chef McLachlin et les juges Bastarache, Binnie, LeBel, Deschamps, Fish, Abella,
Charron et Rothstein
MOTIFS DE JUGEMENT :
(par. 1 à 100)
La juge Abella (avec l’accord de la juge en chef McLachlin et des
juges Bastarache, Binnie, LeBel, Fish et Rothstein)
MOTIFS DISSIDENTS :
(par. 101 à 185)
La juge Deschamps (avec l’accord de la juge Charron)
NOTE : Ce document fera l’objet de retouches de forme avant la parution de sa version définitive dans le
Recueil des arrêts de la Cour suprême du Canada.
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bruker c. marcovitz
Stephanie Brenda Bruker
Appelante
c.
Jessel (Jason) Benjamin Marcovitz
Intimé
et
Association canadienne des libertés civiles
Intervenante
Répertorié : Bruker c. Marcovitz
Référence neutre : 2007 CSC 54.
No du greffe : 31212.
2006 : 5 décembre; 2007 : 14 décembre.
Présents : La juge en chef McLachlin et les juges Bastarache, Binnie, LeBel, Deschamps, Fish, Abella,
Charron et Rothstein.
en appel de la cour d’appel du québec
Contrats — Validité — Violation — Entente comportant un aspect religieux — Refus de l’époux
d’accorder à l’épouse le divorce religieux juif après le divorce civil malgré son engagement à l’accorder —
Action en dommages-intérêts contre l’époux pour violation de l’entente — La question est-elle justiciable? —
Les conditions pour que l’entente soit valide et exécutoire en droit québécois sont-elles respectées? —
L’époux peut-il invoquer la liberté de religion pour se soustraire aux conséquences juridiques de son refus de
se conformer à l’entente? — Code civil du Québec, L.Q. 1991, ch. 64, art. 1373, 1385, 1412, 1413 — Charte
des droits et libertés de la personne, L.R.Q. ch. C-12, art. 3, 9.1.
Droits de la personne — Liberté de conscience et de religion — Entente comportant un aspect
religieux — Divorce religieux juif ou « get » — Refus de l’époux d’accorder à l’épouse le divorce religieux juif
après le divorce civil malgré son engagement à l’accorder — Action en dommages-intérêts contre l’époux
pour violation de contrat — L’époux peut-il se soustraire à l’obligation de payer des dommages-intérêts pour
sa violation du contrat en invoquant la liberté de religion ? — Charte des droits et libertés de la personne,
L.R.Q. ch. C-12, art. 3, 9.1.
Les parties se sont mariées en 1969. L’action en divorce a été engagée en 1980 et trois mois
plus tard, les parties ont négocié une entente relative aux mesures accessoires. Selon le paragraphe 12 de
l’entente, les parties ont convenu de se présenter devant les autorités rabbiniques en vue d’obtenir un
divorce juif, ou get, immédiatement après le prononcé du divorce. Le divorce civil est devenu irrévocable en
1981; M, l’époux, avait alors 48 ans et B, l’épouse, en avait 31.
Une épouse ne peut obtenir le get que si son époux consent à l’accorder. Sans le get, elle
reste son épouse et ne peut se remarier selon la loi juive. En l’espèce, malgré les demandes répétées de
l’épouse, l’époux a refusé pendant 15 ans de lui accorder le get et lorsqu’il l’a accordé, elle avait presque 47
ans. L’épouse a réclamé des dommages-intérêts pour violation de l’entente. L’époux a prétendu que son
engagement à accorder le get n’était pas valide en droit québécois et que son droit à la liberté de religion le
soustrayait à l’obligation de payer des dommages-intérêts pour la violation de l’entente.
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Le juge de première instance a conclu que l’entente était valide et obligatoire et que la
réclamation de dommages-intérêts fondée sur une violation de cette obligation civile relevait de la
compétence des tribunaux civils. La Cour d’appel a accueilli l’appel de l’époux. Elle a statué que, puisque
l’essence de l’obligation était de nature religieuse, il s’agissait d’une obligation morale et les tribunaux ne
pouvaient donc en ordonner l’exécution.
Arrêt (les juges Deschamps et Charron dissidentes): Le pourvoi est accueilli.
La juge en chef McLachlin et les juges Bastarache, Binnie, LeBel, Fish, Abella et Rothstein : Le
fait qu’un litige comporte un aspect religieux ne le rend pas nécessairement non justiciable. Reconnaître aux
tribunaux civils la faculté d’ordonner l’exécution des ententes afin de décourager les obstacles religieux au
remariage offre une réponse à la discrimination fondée sur le sexe que peuvent représenter ces obstacles et
atténue les effets qu’ils peuvent avoir sur la possibilité de soutirer des concessions inéquitables dans un
divorce. Le caractère exécutoire de ces ententes s’harmonise avec l’approche canadienne en matière de
droits à l’égalité, de divorce et de mariage de façon générale et de liberté de religion, et est conforme à
l’approche retenue dans d’autres pays. [41] [63]
Le paragraphe 12 de l’entente en cause respecte toutes les conditions du Code civil pour que
l’entente soit valide et exécutoire en droit québécois. La promesse de l’époux d’accorder le get faisait partie
d’un échange volontaire d’engagements censés avoir des conséquences juridiquement exécutoires et
négociés entre deux adultes consentants, tous deux représentés par un avocat. On ne demande pas à la
Cour de trancher des questions de doctrine religieuse, et le Code civil n’empêche nullement une personne de
transformer ses obligations morales en obligations juridiquement valides et exécutoires. [16] [20] [47] [51]
L'époux ne peut non plus se soustraire à l'obligation de payer des dommages-intérêts pour sa
violation unilatérale du contrat en invoquant la liberté de religion reconnue à l’art. 3 de la Charte des droits
et libertés de la personne du Québec. La revendication du droit à la liberté de religion doit être appréciée et
conciliée avec les droits, les valeurs et le préjudice opposés, y compris la mesure dans laquelle ce droit est
compatible avec les valeurs fondamentales canadiennes. Déterminer les circonstances dans lesquelles
l'affirmation d'un droit doit céder le pas à un intérêt public plus pressant constitue un exercice complexe,
nuancé, tributaire des faits propres à chaque espèce. [2] [20] [77]
En l’espèce, la revendication de l’époux ne résiste pas à l’exercice d’appréciation que
prescrivent la Charte québécoise et la jurisprudence de cette Cour. L’atteinte à la liberté de religion de
l’époux est beaucoup moins grave que le préjudice causé tant à l’épouse personnellement qu’à l’intérêt, pour
le public, d’assurer la protection de valeurs fondmentales telles les droits à l’égalité et l’exercice indépendant
du choix pour une personne de se marier et de divorcer. Ces intérêts, tout comme l’avantage pour le public
d’assurer le respect des obligations contractuelles valides et exécutoires, comptent parmi les inconvénients
qui l’emportent sur la prétention de l’époux. [17] [70] [92]
Aucune raison ne justifie une modification de la décision du juge de première instance relative
aux dommages-intérêts, aux intérêts et à l’indemnité additionnelle. [97-99]
Les juges Deschamps et Charron (dissidentes): Le droit canadien ne prohibe pas la prise en
considération par les tribunaux de questions à caractère religieux, à condition que la réclamation soit fondée
sur la violation d’une règle reconnue en droit positif. Le rôle des tribunaux appelés à trancher un litige privé
qui touche la religion se limite à déterminer le point de convergence des droits dans une quête de respect de
la liberté de religion. Les tribunaux ne peuvent tenir ce rôle qu’en demeurant neutres devant les préceptes
religieux. Le principe de non-intervention dans les pratiques religieuses permet d’éviter que les tribunaux
aient à trancher entre diverses normes religieuses ou entre les règles du droit laïque et les normes
religieuses. En l’espèce, l’épouse, B, n’a pas prétendu que ses droits civils étaient brimés par une norme
civile émanant du droit positif. En vertu du droit canadien et du droit québécois, elle pouvait se remarier et
les enfants qui auraient pu naître de cette nouvelle union auraient eu les mêmes droits civils que les enfants
« légitimes ». Seuls ses droits religieux sont en cause, et c’est le fait de normes religieuses. Le motif pour
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lequel B demande à être indemnisée se heurte donc à des acquis chers à la société civile et sa demande met
les tribunaux en contradiction avec les lois qu’ils sont chargés de faire respecter. L’État laisse à chacun le
soin de s’autoréglementer en matière religieuse. Il ne revient pas à l’État de faire la promotion d’une norme
religieuse. Cela est laissé aux autorités religieuses. [102] [122-132]
Un survol de l’approche générale des tribunaux étrangers à l’égard de la religion et des
mécanismes juridiques utilisés au sujet du get montre que certaines des solutions retenues sont déjà
ouvertes aux justiciables québécois et canadiens, mais que plusieurs autres se heurtent à l’existence de
règles différentes au Canada. Les décisions étrangères reposent sur les mécanismes propres à chaque pays,
et ne contiennent pas de principe de droit public qui justifierait les tribunaux canadiens de modifier leur
approche. Au Canada, le problème du get relève des règles internes de droit privé. [154-155]
La clause en litige figure dans une entente sur les mesures accessoires incorporée à un
jugement qui ordonne aux parties de se conformer à leurs engagements. D’inclure à l’entente sur les
mesures accessoires un engagement de se présenter devant les autorités rabbiniques ne fait pas de
l’engagement un droit ou une obligation prévus par la Loi sur le divorce ou le Code civil du Québec et n’en
fait pas non plus une mesure accessoire au divorce. Si la clause 12 peut fonder un recours distinct, elle doit
être considérée comme une clause autonome et doit satisfaire aux exigences du droit civil québécois. Dans
la présente affaire, cette clause ne peut pas, juridiquement, être qualifiée de contrat. Elle constitue un
engagement purement moral. Ni les engagements à consentir à un divorce religieux ni le divorce religieux
lui-même n’ont de conséquences civiles. Comme les parties n’envisageaient pas une opération juridique, il
faut conclure que l’un des éléments essentiels à la formation du contrat, soit l’objet (art. 1412 C.c.Q.), est
inexistant. [157-161] [174-176]
Même si l’engagement moral avait donné ouverture à une action en justice, l’évaluation des
dommages-intérêts obligerait le tribunal à mettre en oeuvre une règle du droit religieux qui n’est pas de son
ressort et qui porte atteinte à la loi laïque qu’il est constitutionnellement chargé d’appliquer. Les
dommages-intérêts réclamés par B découlent de son adhésion à des préceptes religieux identifiés. La liberté
de religion n’est pas reconnue comme moyen de contraindre une autre personne à accomplir un acte
religieux. De plus, les tribunaux civils ne peuvent être utilisés pour sanctionner le défaut d’accomplir un tel
acte. L’argument de B, s’il était retenu, obligerait à reconnaître une situation juridique contraire aux règles
du droit de la famille canadien et québécois, et sanctionner la loi religieuse reviendrait à imposer une règle
incompatible avec les droits que les tribunaux laïques ont par ailleurs la responsabilité de faire reconnaître.
[176-180]
Jurisprudence
Citée par la juge Abella
Arrêts mentionnés : Syndicat Northcrest c. Amselem, [2004] 2 R.C.S. 551, 2004 CSC 47;
McCaw c. United Church of Canada (1991), 4 O.R. (3d) 481; Lindenburger c. United Church of Canada
(1985), 10 O.A.C. 191; Nathoo c. Nathoo, [1996] B.C.J. No. 2720 (QL); Amlani c. Hirani (2000), 194 D.L.R.
(4th) 543, 2000 BCSC 1653; M. (N.M.) c. M. (N.S.) (2004), 26 B.C.L.R. (4th) 80, 2004 BCSC 346; Lakeside
Colony of Hutterian Brethren c. Hofer, [1992] 3 R.C.S. 165; Re Morris and Morris (1973), 42 D.L.R. (3d) 550;
R. c. Big M Drug Mart Ltd., [1985] 1 R.C.S. 295; Young c. Young, [1993] 4 R.C.S. 3; P. (D.) c. S. (C.), [1993]
4 R.C.S. 141; B. (R.) c. Children’s Aid Society of Metropolitan Toronto, [1995] 1 R.C.S. 315; Ross c. Conseil
scolaire du district no 15 du Nouveau-Brunswick, [1996] 1 R.C.S. 825; Multani c. Commission scolaire
Marguerite-Bourgeoys, [2006] 1 R.C.S. 256, 2006 CSC 6; Temple Mount Faithful c. Jerusalem District Police
Commander, H.C. 292/83, 38(2) P.D. 449; Christian Education South Africa c. Minister of Education (2000),
10 B. Const. L.R. 1051, CCT 4/00; Aubry c. Éditions Vice-Versa Inc., [1998] 1 R.C.S. 591; D. c. France
(1983), 35 Comm. Eur. D.H. D.R. 199; Trib. civ. Seine, 22 février 1957, Gaz. Pal. 1957.1.246; Civ. 2e, 13
décembre 1972, D.1973.493; Brett c. Brett, [1969] 1 All E.R. 1007; In the Marriage of Shulsinger (1977), 13
A.L.R. 537; In the Marriage of Steinmetz (1980), 6 F.L.R. 554; Avitzur c. Avitzur, 459 N.Y.S.2d 572 (1983);
Waxstein c. Waxstein, 395 N.Y.S.2d 877 (1976), conf. par 394 N.Y.S.2d 253; Rubin c. Rubin, 348 N.Y.S.2d
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61 (1973); Minkin c. Minkin, 434 A.2d 665 (1981); Jane Doe c. John Doe, Jérusalem 19270/03, 21 décembre
2004; Sabag c. Supreme Rabbinical Court of Appeals, HCJ 6751/04.
Citée par la juge Deschamps (dissidente)
Congrégation des témoins de Jéhovah de St-Jérôme-Lafontaine c. Lafontaine (Village), [2004] 2
R.C.S. 650, 2004 CSC 48; Haig c. Canada, [1993] 2 R.C.S. 995; Re Morris and Morris (1973), 42 D.L.R. (3d)
550; Nathoo c. Nathoo, [1996] B.C.J. No. 2720 (QL); Amlani c. Hirani (2000), 194 D.L.R. (4th) 543, 2000
BCSC 1653; M. (N.M.) c. M. (N.S.) (2004), 26 B.C.L.R. (4th) 80, 2004 BCSC 346; Kaddoura c. Hammoud
(1998), 168 D.L.R. (4th) 503; Despatie c. Tremblay (1921), 47 B.R. 305; Ukrainian Greek Orthodox Church
of Canada c. Trustees of Ukrainian Greek Orthodox Cathedral of St. Mary the Protectress, [1940] R.C.S. 586;
Ouaknine c. Elbilia, [1981] C.S. 32; Lakeside Colony of Hutterian Brethren c. Hofer, [1992] 3 R.C.S. 165;
Syndicat Northcrest c. Amselem, [2004] 2 R.C.S. 551, 2004 CSC 47; Ouellette c. Gingras, [1972] C.A. 247;
Curé et marguilliers de l’œuvre et fabrique de la paroisse de St-Zacharie c. Morin, [1968] C.S. 615; Mathys c.
Demers, [1968] C.S. 172; Bergeron c. Proulx, [1967] C.S. 579; Trib. civ. Metz, 27 avril 1955, Trib. civ.
Grenoble, 7 mai 1958, Paris 1re, 4 février 1959, J.C.P. 1960.II.11632, obs. de Naurois; Civ. 2e, 13 décembre
1972, Bull. civ. II, no 320; Civ. 2e, 21 avril 1982, Bull. civ. II, no 62; Civ. 2e, 5 juin 1985, Bull. civ. II, no 113;
Civ. 2e, 15 juin 1988, Bull. civ. II, no 146; Civ. 2e, 21 novembre 1990, D.1991.434; Civ. 2e, 5 juin 1985, J.C.P.
1987.II.20728, obs. Agostini; Civ. 2e, 13 décembre 1972, D.1973.493, note Larroumet; R. (S.B.) c.
Governors of Denbigh High School, [2007] 1 A.C. 100, [2006] UKHL 15; Brett c. Brett, [1969] 1 All E.R.
1007; Leskun c. Leskun, [2006] 1 R.C.S. 920, 2006 CSC 25; Serbian Eastern Orthodox Diocese for the
United States of America and Canada c. Milivojevich, 426 U.S. 696 (1976); Schwartz c. Schwartz, 583
N.Y.S.2d 716 (1992); Giahn c. Giahn, N.Y. Sup. Ct., avril 2000, non publié; Avitzur c. Avitzur, 459 N.Y.S.2d
572 (1983); Segal c. Segal, 650 A.2d 996 (1994); Temple Mount Faithful c. Jerusalem District Police
Commander, H.C. 292/83, 38(2) P.D. 449; Yosifof c. Attorney General, Cr. A. 112/50; Jane Doe c. John Doe,
Jérusalem 19270/03, 21 décembre 2004; Frame c. Smith, [1987] 2 R.C.S. 99; Christiaenssens c. Rigault,
[2006] J.Q. no 5765 (QL), 2006 QCCA 853.
Lois et règlements cités
Acte de Québec (R.-U.), 14 Geo. 3, ch. 83.
Charte canadienne des droits et libertés, art. 2.
Charte des droits et libertés de la personne, L.R.Q., ch. C-12, art. 3, 9.1.
Code civil du Bas Canada, art. 982, 983, 984.
Code civil du Québec, L.Q. 1991, ch. 64, art. 1373, 1378, 1385, 1410, 1412, 1413, 1607, 1618, 1619.
Constitution des États-Unis d’Amérique, Premier amendement.
Domestic Relations Law, N.Y. Stat., art. 253.
Foundations of Law Act, 1980, 5741-1981, 34 L.S.I. 181 (1979-80), art. 1.
Loi sur l’application de la réforme du Code civil, L.Q. 1992, ch. 57, art. 9.
Loi sur le divorce, L.R.C. 1985, ch. 3 (2e suppl.), art. 15.1, 15.2, 16, 21.1.
Loi sur le multiculturalisme canadien, L.R.C. 1985, ch. 24 (4e suppl.).
Traités et autres instruments internationaux
Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 213 R.T.N.U. 221, art. 9.
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13563 (QL), 2005 QCCA 835, qui a infirmé une décision du juge Mass, [2003] R.J.Q. 1189, [2003] R.D.F.
342, [2003] J.Q. no 2896 (QL). Pourvoi accueilli, les juges Deschamps et Charron sont dissidentes.
Alan M. Stein, William Brock, David Stolow et Brandon Wiener, pour l’appelante.
Anne-France Goldwater et Marie-Hélène Dubé, pour l’intimé.
Andrew K. Lokan et Jeff Larry, pour l’intervenante.
Version française du jugement de la juge en chef McLachlin et des juges Bastarache, Binnie,
LeBel, Fish, Abella et Rothstein rendu par
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1
LA JUGE ABELLA — Le Canada est fier avec raison de sa tolérance évolutive à l’égard de la
diversité et du pluralisme. Au fil des ans, l’acceptation du multiculturalisme n’a cessé de croître et l’on
reconnaît que les différences ethniques, religieuses ou culturelles seront acceptées et respectées. Confirmé
dans des textes de loi, que ce soit par des mesures de protection figurant dans les codes des droits de la
personne ou par son inscription dans la Charte canadienne des droits et libertés, le droit de chacun de
s’intégrer dans la société canadienne avec ses différences — et malgré celles-ci — est devenu un élément
déterminant de notre caractère national.
2
Toutefois, le droit à la protection des différences ne signifie pas que ces différences restent
toujours prépondérantes. Celles-ci ne sont pas toutes compatibles avec les valeurs canadiennes
fondamentales et par conséquent, les obstacles à leur expression ne sont pas tous arbitraires. Déterminer
les circonstances dans lesquelles l’affirmation d’un droit fondé sur une différence doit céder le pas à un
intérêt public plus pressant constitue un exercice complexe, nuancé, tributaire des faits propres à chaque
espèce qu’il serait illusoire d’encadrer nettement. Mais cette tâche est également une délicate nécessité,
requise afin de protéger l’intégrité évolutive du multiculturalisme et de l’assurance du public quant à son
importance.
Contexte
3
Le get est un divorce juif. Seul l’époux peut l’accorder. L’épouse ne peut obtenir le get
que si son époux consent à l’accorder. Selon la loi juive, il le fait en « libérant » son épouse du mariage et
en l’autorisant à se remarier. Le processus se déroule devant trois rabbins, devant ce qu’on appelle un Beth
Din ou tribunal rabbinique.
4
L’époux doit accorder volontairement le get, et l’épouse doit accepter de le recevoir. Si le
premier ne l’accorde pas, la seconde est sans recours religieux; elle conserve le statut d’épouse et ne peut
se remarier jusqu’à ce que l’époux décide, à son entière discrétion, de divorcer. Elle est considérée comme
une agunah — une « femme enchaînée ». Tout enfant né d’un remariage civil serait considéré comme
« illégitime » selon la loi juive.
5
Une juive pratiquante vivant au Canada se trouve donc dans une situation dichotomique :
en droit canadien, elle est libre de divorcer de son époux peu importe qu’il y consente ou non, mais, selon la
loi juive, elle reste mariée à lui sauf s’il consent au divorce. Ce qui signifie que, alors qu’elle peut se
remarier suivant le droit canadien, elle ne peut le faire conformément à sa religion. Pour bien des femmes
juives, cette incapacité entraîne la perte de la faculté de se remarier un jour.
6
Dans la vaste majorité des cas, l’époux juif qui divorce accorde de son plein gré le get à
son épouse. Toutefois, le refus de l’époux d’accorder le get représente depuis longtemps une source
d’inquiétude et de frustration au sein des communautés juives (Talia Einhorn, « Jewish Divorce in the
International Arena », dans J. Basedow et al., Private Law in the International Arena: From National Conflict
Rules Towards Harmonization and Unification: Liber Amicorum Kurt Siehr (2000), 135; H. Patrick Glenn,
« Where Heavens Meet: The Compelling of Religious Divorces » (1980), 28 Am. J. Comp. L. 1;
M. D. A. Freeman, « Jews and the Law of Divorce in England » (1981), 4 Jewish Law Annual 276;
Bernard J. Meislin, « Pursuit of the Wife’s Right to a ‘Get’ in United States and Canadian Courts » (1981), 4
Jewish Law Annual 250; Mark Washofsky, « The Recalcitrant Husband: The Problem of Definition » (1981),
4 Jewish Law Annual 144; M. Chigier, « Ruminations Over the Agunah Problem » (1981), 4 Jewish Law
Annual 207; Shlomo Riskin, A Jewish Woman’s Right to Divorce: A Halakhic History and a Solution for the
Agunah (2006); Ayelet Shachar, Multicultural Jurisdictions: Cultural Differences and Women’s Rights (2001);
J. D. Bleich, « Jewish Divorce: Judicial Misconceptions and Possible Means of Civil Enforcement »
(1983-1984), 16 Conn. L.R. 201).
7
En 1990, en réponse à ces préoccupations, à la suite de consultations auprès des chefs de
cinquante groupes religieux au Canada et après avoir obtenu l’accord spécifique des Églises catholique
romaine, presbytérienne et anglicane, le ministre de la justice, M. Doug Lewis, a proposé dans le projet de
loi C-61 des modifications à la Loi sur le divorce, L.R.C. 1985, ch. 3 (2e suppl.), conférant aux tribunaux le
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pouvoir discrétionnaire d’empêcher un époux d’obtenir réparation sous le régime de la loi si ce dernier refuse
de supprimer tout obstacle au remariage religieux (l’art. 21.1). Lors de l’examen de ces modifications en
deuxième lecture, le ministre a expliqué ainsi la motivation de cette modification :
Le projet de loi que nous devons examiner aujourd’hui vise à modifier la Loi sur le divorce
afin de reconnaître à un tribunal les pouvoirs discrétionnaires nécessaires pour empêcher un
conjoint d’obtenir des mesures accessoires ou d’exercer des recours aux termes de la Loi sur le
divorce lorsque ce conjoint ne veut pas supprimer un obstacle au remariage religieux et lorsque
seule cette personne peut supprimer cet obstacle au remariage religieux. Si le tribunal est
convaincu que le conjoint qui ne veut pas supprimer l’obstacle agit ainsi pour des motifs de
religion et de conscience, il aura la discrétion de refuser ce remède.
Un conjoint ne devrait pas avoir la possibilité de refuser de participer à un divorce religieux juif
(un Get) afin d’obtenir des concessions dans un divorce civil. Le Get ne devrait pas être utilisé
comme outil de marchandage à des fins de garde d’enfants, de droit de visite et de pension
alimentaire.
[j]’ai à coeur d’assurer le respect de la Loi sur le divorce et d’éviter que des personnes ne se
soustraient à l’application des principes que contient cette loi. Par exemple, afin d’obtenir un
Get, une épouse peut se sentir obligée de consentir à une entente de garde d’enfant qui ne soit
pas véritablement dans le meilleur intérêt de l’enfant du couple.
Permettez-moi de décrire brièvement le dilemme auquel certaines personnes juives doivent
faire face à cause de leurs procédures de divorce religieux. Dans la religion juive, le divorce se
réalise quand le mari accorde un Get et que sa femme l’accepte devant le tribunal rabbinique.
Selon la tradition judaïque, cette procédure ne peut pas être changée. Sans un Get, une
femme juive ne peut pas se remarier dans sa religion. Les enfants issus de tout mariage civil
subséquent ne sont pas reconnus comme juifs à part entière. Pour un homme, dans les
mêmes circonstances, le remariage dans la religion juive, quoique difficile, reste possible.
...
[l]e gouvernement tente quand il le peut, et quand on attire son attention sur ce genre de
question, de supprimer dans la loi tout élément sexiste ou tout préjugé contre les femmes.
...
Il est vrai que dans certaines religions, chez les Catholiques romains, les Grecs orthodoxes
et les Musulmans par exemple, une annulation de mariage ou un divorce peut être obtenu plus
facilement et plus rapidement s’il y a consentement du couple.
Cependant, dans tous les cas, c’est le tribunal religieux et non pas le couple qui détient le
pouvoir d’accorder l’annulation du mariage ou le divorce.
Un conjoint récalcitrant peut faire retarder la décision, mais ultimement, il ou elle ne
pourra pas empêcher le tribunal religieux de rendre sa décision.
Dans ces religions, un conjoint brimé peut s’adresser aux autorités religieuses pour
résoudre ce problème.
Le conjoint juif ne dispose pas d’un tel recours.
...
(Débats de la Chambre des communes, vol. VI, 2è sess., 34è lég., 15 février 1990, p. 8375-8377
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8
Lors de l’examen de ces modifications en troisième lecture, Mme Kim Campbell, qui a
succédé à M. Lewis comme ministre de la Justice, a confirmé les raisons de principe justifiant cette mesure
législative :
Le projet de loi vise à aider les citoyens juifs à qui le conjoint refuse le Get, le divorce religieux
qui permettrait le remariage religieux, afin d’obtenir des concessions devant un tribunal civil.
...
Les répercussions sont très sérieuses pour les femmes fidèles à leur religion à qui le Get
est refusé. Elles ne peuvent se marier avec un coreligionnaire, même si elles ont obtenu un
divorce civil. Si elles se remarient, les enfants d’un deuxième mariage civil sont considérés
comme illégitimes et ils ne peuvent pratiquer leur religion. Pareilles conséquences exposent les
femmes religieuses au chantage que peut faire le conjoint en refusant le Get. Le conjoint
pourrait dire, par exemple : « Si tu renonces à la pension alimentaire ou à la garde des enfants,
je consentirai au divorce. » Même ceux qui ne songent pas à se remarier trouvent gênant
d’être considérés comme mariés religieusement à quelqu’un dont ils sont divorcés civilement.
La grande majorité de ceux qui adhèrent à la foi juive trouvent inacceptable cette façon de
marchander le consentement. Ils sont cependant incapables de modifier la situation.
L’intervention des rabbins est souvent sans effet. Depuis la dispersion des juifs, il n’existe pas
d’autorité juive centrale qui puisse modifier le code juridique juif [. . .] qui gouverne le
consentement au divorce. Les tribunaux rabbiniques modernes n’ont pas non plus d’autorité
sur les demandes et l’acceptation du divorce. Les principales organisations juives qui ont
assisté aux audiences du comité législatif approuvent entièrement le projet de loi C-61. Les
représentants des trois partis ont loué le projet de loi et ont adopté rapidement deux
amendements d’ordre technique.
...
En outre, le Toronto Board of Orthodox Rabbis [. . .] [a] appuyé le projet de loi et les deux
amendements.
[Français]
Le projet de loi C-61 permettra à la communauté juive du Canada de conserver ses
traditions sans déstabiliser les modèles de vie familiale. Il assure également que les principes
de la Loi sur le divorce quant à la pension alimentaire et à la garde seront appliqués également
à tous les Canadiens.
(Débats de la Chambre des Communes, vol. VIII, 2è sess., 34è lég., 4 mai 1990,
p. 11033-11034)
9
Les tribunaux civils tentent depuis de nombreuses années d’accorder une réparation ou un
dédommagement lorsque l’époux s’entête à refuser le get à son épouse. Ils se heurtent souvent aux
affirmations de l’époux voulant qu’une telle intervention constitue une violation de sa liberté de religion.
10
C’est le cas en l’espèce. L’époux et l’épouse, représentés tous deux par un avocat, ont
volontairement négocié et signé une [TRADUCTION] « Entente relative aux mesures accessoires » en vue de
régler leurs litiges matrimoniaux. Suivant un des engagements de l’entente, ils devaient tous deux se
présenter devant le tribunal rabbinique en vue d’obtenir le get.
11
Durant quinze ans, l’époux a refusé d’accorder le get, contestant la validité même de
l’entente qu’il avait conclue de plein gré. Il prétend qu’en raison de ses aspects religieux, l’entente était
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inexécutoire en droit québécois et affirme que son droit à la liberté de religion pouvait le soustraire aux
conséquences du refus de se conformer à son engagement.
12
Par contre, l’épouse a soutenu que l’entente prévoyant qu’ils se présentent devant le tribunal
rabbinique en vue d’obtenir le get s’inscrivait dans les compromis négociés par les parties (tous deux ont
signé des mainlevées) et était conforme aux valeurs et au droit québécois. Elle a demandé un redressement
sous forme de dommages-intérêts pour être indemnisée en raison du refus prolongé du mari de se
conformer à l’entente. Elle n’a pas demandé au tribunal d’ordonner à son époux de se présenter devant le
tribunal rabbinique.
13
Ainsi, deux questions se posent en l’espèce. La première est de savoir si l’engagement
d’accorder le get pris dans l’entente constitue une obligation contractuelle valide et exécutoire en droit
québécois. L’examen des dispositions et des principes du Code civil du Québec, L.Q. 1991, ch. 64 (le
« C.c.Q. ») permettra de répondre à cette première question.
14
Si l’engagement est exécutoire en droit québécois, nous devons déterminer si l’époux peut
invoquer la liberté de religion pour se soustraire aux conséquences juridiques du défaut de se conformer à
une entente légitime. L’analyse à cet égard est faite dans les limites qu’imposent les dispositions et les
principes de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, L.R.Q., ch. C-12, qui établit un
équilibre entre la revendication de la liberté de religion par l’époux et la prétention de l’épouse selon laquelle
faire droit à l’argument du mari serait démesurément préjudiciable pour elle personnellement et, de façon
plus générale, pour les valeurs démocratiques et l’intérêt du Québec.
15
Dans son rôle d’appréciation et de conciliation des intérêts et des valeurs opposés lorsque la
liberté de religion est en cause, le juge est appelé à protéger la tolérance que le Québec a préconisée dans
la Charte québécoise. L’article 9.1 prévoit que les libertés et les droits fondamentaux — y compris la liberté
de religion — « s’exercent dans le respect des valeurs démocratiques, de l’ordre public et du bien-être
général des citoyens du Québec ». Par cette disposition, le législateur québécois demande aux tribunaux
d’assurer la protection des droits des citoyens du Québec en appréciant et en conciliant ces droits avec les
autres valeurs publiques.
16
Selon moi, une entente entre les époux en vue de la prise des mesures nécessaires pour que
chaque conjoint permette à l'autre de se remarier conformément à sa religion constitue une obligation
contractuelle valide et exécutoire en droit québécois. Comme l’indiquent les commentaires des anciens
ministres de la Justice, de telles ententes sont compatibles avec l’intérêt public, avec notre approche en
matière de mariage et de divorce, et avec notre volonté de mettre fin à la discrimination fondée sur le sexe.
17
Je suis également persuadée qu’en appliquant l’analyse qu’exige l’art. 9.1 de la Charte
québécoise, l’atteinte à la liberté de religion que représente pour l’époux l’obligation de payer des
dommages-intérêts en raison de la violation unilatérale de son engagement est beaucoup moins grave que
le préjudice causé par sa décision unilatérale de ne pas respecter cet engagement.
18
Il ne s’agit pas, comme on le laisse entendre dans les motifs dissidents, d’une ingérence
injustifiée des autorités laïques dans les matières religieuses, et cela ne signifie pas que les tribunaux vont
sanctionner les caprices de la religion d’une personne. Lorsqu’ils tranchent des affaires dans lesquelles la
liberté de religion est en cause, les tribunaux ne peuvent faire abstraction de la religion. Pour déterminer si
le droit à la liberté de religion que revendique une personne doit être protégé, un tribunal doit tenir compte
de cette religion en particulier, du droit religieux en cause et des conséquences précises, y compris les
conséquences religieuses, que la décision de faire respecter ce droit aura pour la personne et le public.
19
C’est aux tribunaux que les législateurs partout au pays ont confié la tâche de concilier les
revendications, hautement personnelles, des droits religieux et l’intérêt public, plus général. Il s’agit d’une
fonction bien acceptée que les commissions des droits de la personne exercent depuis des dizaines d’années
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en vertu des lois fédérales et provinciales, et que les juges exercent depuis vingt-cinq ans en vertu de la
Charte canadienne des droits et libertés pour veiller à ce que les membres de la société canadienne ne
soient pas arbitrairement défavorisés en raison de leur religion.
20
La présente affaire cadre très bien dans cette tradition. Elle représente une autre instance
dans laquelle la revendication de la protection du droit à la liberté de religion est appréciée en regard des
intérêts concurrents. La Cour n’est pas appelée à approuver ou appliquer une norme religieuse. On lui
demande d’exercer sa responsabilité, conférée par la Charte québécoise, de déterminer si l’époux a raison
de prétendre que l’obliger à payer des dommages-intérêts pour la violation d’une entente exécutoire porte
atteinte à sa liberté de religion. Aucun principe nouveau ne se dégage de la décision en l’espèce. On
demande couramment aux tribunaux de décider si un contrat est valide. Et l’analyse en fonction de la
Charte québécoise consiste en l’application, au cas par cas, d’un exercice d’appréciation classique et prudent
que doivent entreprendre les tribunaux lorsqu’ils déterminent dans chaque cas si la revendication du droit à
la liberté de religion peut être accueillie, en s’efforçant toujours de respecter le caractère complexe, délicat
et individuel inhérent à ces questions.
Historique des procédures
21
22
Stephanie Bruker a épousé Jason Marcovitz le 27 juillet 1969. Bien que leur observance
religieuse se situe à des degrés différents, ils se considèrent tous les deux comme des juifs religieux.
Monsieur Marcovitz avait déjà été marié et avait accordé le get à sa première épouse.
23
Madame Bruker a engagé une action en divorce en 1980. Elle avait alors 31 ans et
M. Marcovitz 48. Une entente relative aux mesures accessoires a été négociée avec le concours de leurs
avocats respectifs et tous deux l’on signée trois mois plus tard. Cette [TRADUCTION] « Entente relative aux
mesures accessoires » traitait notamment de la garde de leurs deux enfants, de la pension alimentaire pour
ceux-ci et de la pension alimentaire pour l’épouse versée sous forme de somme forfaitaire.
24
Selon le par. 12 de l’entente, les parties ont convenu de se présenter devant les autorités
rabbiniques pour obtenir le get immédiatement après le prononcé du jugement conditionnel de divorce. Un
jugement conditionnel de divorce a été prononcé le 23 octobre 1980. Il ordonnait notamment aux parties
de se conformer à l’entente. Un jugement irrévocable de divorce a été prononcé le 9 février 1981.
25
Malgré les demandes répétées de Mme Bruker, faites tant personnellement que par
l’entremise de différents rabbins, M. Marcovitz a toujours refusé pendant 15 ans de lui accorder le get.
26
Comme on pouvait s’y attendre, la relation entre les parties s’est détériorée pendant que
M. Marcovitz maintenait son refus. En juillet 1989, neuf ans après le prononcé du jugement conditionnel de
divorce, Mme Bruker a intenté des procédures pour violation de l’entente, réclamant au départ la somme de
500 000 dollars en dommages-intérêts pour son incapacité à se remarier et pour avoir été empêchée d’avoir
des enfants qui seraient considérés comme « légitimes » selon la loi juive.
27
En réponse, M. Marcovitz a fait valoir que Mme Bruker avait répudié l’entente en faisant des
demandes incessantes d’augmentation de la pension alimentaire pour les enfants, et il s’est plaint du fait
qu’il ne voyait pas ses deux filles régulièrement. Il a également mis en doute la dévotion de Mme Bruker à la
foi juive.
28
En 1990, Mme Bruker a déposé en application de l’art. 21.1 de la Loi sur le divorce un affidavit
confirmant que, malgré ses demandes formelles, M. Marcovitz ne lui avait pas accordé le get. Par
conséquent, lorsque ce dernier a présenté, en novembre 1995, des requêtes en vue d’obtenir le rejet de
l’affidavit et la résiliation rétroactive de son obligation de verser une pension alimentaire pour les enfants, la
juge Marcelin a refusé d’entendre les requêtes et a reporté l’affaire au 6 décembre 1995.
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29
30
31
Le 5 décembre 1995, M. Marcovitz s’est présenté devant le tribunal rabbinique de Montréal
et a accepté d’accorder le get. Il avait alors 63 ans et Mme Bruker presque 47 ans. En 1996, celle-ci a
augmenté considérablement le montant des dommages-intérêts qu’elle réclamait.
Madame Bruker ne s’est pas remariée et n’a pas eu d’autres enfants.
Au procès, le juge Mass a statué que, dès que M. Marcovitz eût signé une entente civile,
l’obligation de se présenter devant les autorités rabbiniques pour accorder le get [TRADUCTION] « est
devenue de la compétence des tribunaux civils » ([2003] R.J.Q. 1189, par. 19). Il a conclu que, en tant que
contrat civil, l’entente était valide et obligatoire, même si elle visait en partie à imposer le respect
d’obligations religieuses, et que conformément au par. 12, M. Marcovitz avait [TRADUCTION] « une
obligation de droit civil claire et non équivoque de se présenter ‘immédiatement’ devant les autorités
rabbiniques » (par. 19). Comme l’a fait remarquer le juge :
[TRADUCTION] [l]e caractère véritable de la demande faite en l’espèce n’est pas religieux.
[. . .] [I]l s’agit d’évaluer le préjudice découlant d’une situation de fait mettant en cause
des parties et des institutions juives — mais les principes du droit juif n’ont pas à être
examinés à fond. [par. 30]
32
À son avis, la réclamation en dommages-intérêts fondée sur le manquement à une obligation
civile, même si elle comporte des aspects religieux, continue à relever des tribunaux civils.
33
En se fondant sur la preuve d’expert, le juge Mass a conclu que si M. Marcovitz avait accordé
le get immédiatement, comme il avait convenu de le faire, le tribunal rabbinique le lui aurait accordé. Cela
signifiait que les dommages-intérêts réclamés par Mme Bruker étaient attribuables au manquement à
l’obligation de se présenter devant les autorités rabbiniques. Ayant conclu que l’omission de M. Marcovitz
d’accorder le get avait eu des conséquences directes sur la vie de Mme Bruker en la privant [TRADUCTION]
« de la possibilité de se marier dans sa communauté pendant cette période » (par. 35), le juge Mass a
condamné M. Marcovitz à payer des dommages-intérêts s’élevant à 47 500 dollars : 2 500 dollars pour
chacune des 15 années écoulées entre le jugement conditionnel de divorce et le get, et 10 000 dollars pour
l’incapacité de Mme Bruker d’avoir des enfants considérés comme légitimes selon la loi juive.
34
J’ouvre une parenthèse pour aborder une question soulevée dans les motifs dissidents. Au
départ, M. Marcovitz a contesté la constitutionnalité de l’art. 21.1 de la Loi sur le divorce. En acceptant de
ne pas poursuivre cette contestation, il a accepté une ordonnance de la cour contenant les autorisations
suivantes :
[TRADUCTION]
[6] PERMET que [M. Marcovitz ] plaide le caractère justiciable en l’espèce comme si l’art. 21.1
de la Loi sur le divorce n’existait pas.
[7] PERMET que [Mme Bruker] plaide la question de la crédibilité quant aux circonstances dans
lesquelles le ghet a été accordé, en faisant mention de l’art. 21.1 de la Loi sur le divorce.
Les parties ne se sont pas entendues, comme on le laisse entendre dans les motifs dissidents, pour qu’il ne
soit pas fait mention de cet article. Elles ont plutôt convenu que M. Marcovitz pourrait plaider le « caractère
justiciable » sans qu’il soit fait mention de cet article. Mme Bruker a été expressément autorisée à citer cet
article dans ses représentations relatives aux circonstances entourant le get. De plus, M. Marcovitz traite
expressément de l’art. 21.1 dans deux paragraphes de son mémoire, dans lesquels il prétend que cet article
autorise les tribunaux civils à intervenir à tort dans des questions religieuses :
[TRADUCTION]
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Dans la communauté juive, les époux qui refusent de collaborer au sujet du ghet sont l’objet
d’une forte réprobation sociale. Ce qui a incité les juristes juifs et les leaders de la
communauté à demander — et à obtenir — l’application de l’art. 21.1 de la Loi sur le divorce
[. . .] et des par. 2(4) - 2(7) et 56(5) à (7) de la Loi sur le droit de la famille de l’Ontario, L.R.O.
1990, ch. F.3. L’État visait à protéger les époux juifs contre l’extorsion dans les négociations
relatives au divorce.
L’article 21.1 de la Loi sur le divorce s’applique peu importe que l’époux récalcitrant soit le
demandeur ou le défendeur : il empêche un époux d’exercer ses droits civils s’il refuse d’écarter
les obstacles religieux, à moins qu’il expose dans un affidavit des motifs valables de religion ou
de conscience. Dans ce cas, un juge doit nécessairement intervenir pour examiner le caractère
légitime du refus au plan religieux. [par. 178-179.]
Et dans de son plaidoyer devant cette Cour, l’avocat de M. Marcovitz a affirmé ce qui suit :
[TRADUCTION] Non seulement cela, nous avons même le remède additionnel de l’art. 21.1 de
la Loi sur le divorce, qui énonce en termes exprès l’intention claire du législateur d’écarter de la
négociation d’une entente ou des compromis dans celle-ci la question du divorce religieux [. . .]
[e]t les obstacles au divorce religieux.
35
Il est évident que les parties n’ont pas convenu de ne pas invoquer l’art. 21.1 dans l’analyse
des autres questions en l’espèce. Elles se sont entendues pour ne pas contester la constitutionnalité de
cette disposition, et cette entente a été respectée tout au long des procédures, y compris dans cette Cour.
Dans ces motifs, il n’est nullement question de trancher la constitutionnalité de l’art. 21.1, mais je vois
difficilement que l’on puisse qualifier une entente relative à l’abandon d’un argument constitutionnel visant
une disposition législative d’entente prévoyant qu’il est fait abstraction de la disposition ou des raisons de
principes qui la sous-tendent.
36
La Cour d’appel a accueilli l’appel de M. Marcovitz ([2005] R.J.Q. 2482). S’exprimant au nom
des juges unanimes, le juge Hilton a conclu que, parce que [TRADUCTION] « l’essence de [. . .] l’obligation
est de nature religieuse, quelle que soit la forme que prend l’obligation » (par. 76), il s’agissait d’une
obligation morale. Les tribunaux ne pouvaient donc pas en ordonner l’exécution. Obliger M. Marcovitz à
payer des dommages-intérêts dans de telles circonstances serait incompatible avec la reconnaissance de son
droit d’exercer ses croyances religieuses comme il l’entend sans intervention judiciaire.
37
La Cour d’appel a fondé en partie cette décision sur l’orientation donnée par notre Cour dans
Syndicat Northcrest c. Amselem, [2004] 2 R.C.S. 551, 2004 CSC 47, selon laquelle :
l’État n’est pas en mesure d’agir comme arbitre des dogmes religieux, et il ne devrait pas le
devenir. Les tribunaux devraient donc éviter d’interpréter — et ce faisant de déterminer —
explicitement ou implicitement le contenu d’une conception subjective de quelque exigence,
« obligation », précepte, « commandement », coutume ou rituel d’ordre religieux. [par. 50]
L’appel incident de Mme Bruker visant à faire augmenter le montant des dommages-intérêts a
38
été rejeté.
Analyse
A. Caractère justiciable de l’entente visant la suppression des obstacles religieux au remariage
39
La disposition au cœur du présent litige est le par. 12 de l’entente sur les mesures
accessoires, selon lequel les parties ont convenu de ce qui suit :
[TRADUCTION] se présenter immédiatement après le prononcé d’un jugement conditionnel
de divorce devant les autorités rabbiniques de la ville et du district de Montréal en vue
d’obtenir le get religieux traditionnel. [Je souligne.]
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40
Comme je l’ai indiqué, le présent pourvoi soulève les questions de savoir si cette obligation
constitue une obligation civile valide et exécutoire en droit québécois et, dans l’affirmative, si M. Marcovitz
est exonéré de toute responsabilité pour ne pas avoir respecté son obligation au motif qu’elle violait sa
liberté de religion.
41
Contrairement à ma collègue la juge Deschamps, j’estime, en tout respect, que les tribunaux
peuvent à juste titre examiner cette affaire. Le fait qu’un litige comporte un aspect religieux ne le rend pas
nécessairement non justiciable. Dans Boundaries of Judicial Review: The Law of Justiciability in Canada,
(1999), Lorne Sossin a défini le caractère justiciable comme suit :
[TRADUCTION] un ensemble de règles, de normes et de principes jurisprudentiels délimitant la
portée de l’intervention judiciaire dans la vie sociale, politique et économique. Bref, si un objet
est considéré comme se prêtant à une décision judiciaire, on dit qu’il est justiciable; si un objet
est considéré comme ne se prêtant pas à une décision judiciaire, on dit qu’il est non justiciable.
[p. 2]
42
Dans Religious Institutions and the Law in Canada, (2e éd. 2003), M. H. Ogilvie a expliqué
pourquoi les questions comportant un aspect religieux peuvent néanmoins être justiciables :
[TRADUCTION]
Sous réserve de la protection que la Charte canadienne des droits et libertés accorde aux
personnes et aux groupes religieux, dont les détails n’ont pas encore été fixés par les
tribunaux, les personnes et les institutions religieuses au Canada sont assujetties à la
souveraineté du Parlement et au pouvoir de sanction de l’État qu’invoquent les tribunaux
lorsqu’ils sont appelés à trancher des litiges ayant trait à la religion.
Néanmoins, les tribunaux se sont montrés réticents à examiner des questions relatives aux
institutions religieuses, manifestant un certain embarras à l’idée que les litiges ecclésiastiques
internes doivent être tranchés par les tribunaux séculiers et doutant de la pertinence de
l’intervention judiciaire. Les tribunaux ont dit qu’ils n’examineraient pas les questions de nature
strictement spirituelle ou purement doctrinale, mais qu’ils interviendraient dans les cas de
violation des droits civils ou des droits de propriété. [Je souligne; p. 217-218.]
43
Dans son mémoire, l’Association canadienne des libertés civiles énonce correctement la façon
d’aborder ces questions :
[TRADUCTION] aucun arrêt n’est allé jusqu’à dire que, même dans les affaires fondées sur une
obligation civile, le tribunal, s’il n’a pas à se prononcer sur des questions de doctrine religieuse,
devrait être empêché de trancher les litiges portant sur des obligations à caractère religieux.
[par. 26]
44
Cette approche se reflète dans McCaw c. United Church of Canada (1991), 4 O.R. (3d) 481
(C.A.), une affaire portant sur le renvoi d’un pasteur de son église. L’aspect religieux du litige n’a pas
empêché la Cour d’appel de l’Ontario de décider que le litige était justiciable. Même si la [TRADUCTION]
« loi de l’Église énoncée dans les dispositions du Guide [de l’Église] » était en cause (p. 485), le tribunal
s’est déclaré compétent et a accordé au pasteur des dommages-intérêts pour la perte de salaire et
d’avantages. (Voir également Lindenburger c. United Church of Canada (1985), 10 O.A.C. 191; Nathoo c.
Nathoo, [1996] B.C.J. no 2720 (QL) (C.S.) ; Amlani c. Hirani (2000), 194 D.L.R. (4th) 543, 2000 BCSC 1653;
et M. (N.M.) c. M. (N.S.) (2004), 26 B.C.L.R. (4th) 80, 2004 BCSC 346).
45
De même, dans l’arrêt Lakeside Colony of Hutterian Brethren c. Hofer, [1992] 3 R.C.S. 165,
une colonie huttérite a décidé d’expulser certains de ses membres de la communauté sans leur donner la
possibilité de répondre à cette décision. Lorsque les membres ont refusé de quitter, la colonie a demandé
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aux tribunaux de faire exécuter l’expulsion et d’ordonner à ces membres de rendre à la colonie tous les biens
lui appartenant. Les membres ont prétendu qu’ils avaient le droit de rester dans la colonie et que les
tribunaux ne pouvaient intervenir pour faire exécuter l’expulsion. S’exprimant au nom des juges
majoritaires, le juge Gonthier a fait remarquer que, bien que les tribunaux ne peuvent intervenir dans les
affaires purement doctrinales ou spirituelles, ils le feront lorsque des droits civils ou des droits de propriété
sont en cause. Une fois que le tribunal se déclare compétent pour connaître d’un litige comportant des
aspects religieux, a-t-il ajouté, il doit s’efforcer « d’arriver à la meilleure compréhension possible de la
tradition et de la coutume applicable » (p. 191). Le juge Gonthier a conclu qu’en l’absence d’une possibilité
suffisante de répondre donnée en temps voulu, les membres ne pouvaient pas être expulsés.
46
En l’espèce, je trouve convaincants les motifs dissidents dans l’arrêt Re Morris and Morris
(1973), 42 D.L.R. (3d) 550 (C.A. Man.). Si le litige dans cette affaire concernait le caractère exécutoire
d’une disposition d’un ketubah, ou contrat de mariage juif, une question que nous n’avons pas à examiner,
le propos du juge Freedman est tout de même utile :
[TRADUCTION]
[l]e fait que le contrat [de mariage] soit profondément empreint de considérations religieuses
n’est pas déterminant quant à la question en litige. C’est le début et non la fin de l’affaire.
Certains contrats ancrés dans une confession religieuse particulière peuvent effectivement être
contraires à l’intérêt public. D’autres, pas. Notre tâche consiste à déterminer si les droits et
obligations découlant du contrat [. . .] — nommément, l’obligation de l’époux d’accorder le get
et le droit de l’épouse de l’obtenir — sont contraires à l’intérêt public.
Il m’est difficile d’établir à quel volet précis de l’intérêt public le présent [engagement à
accorder le get] porterait atteinte. L’attaque dont il fait l’objet repose sur des motifs plus
généraux. Il semble que la véritable raison pour laquelle on s’oppose à l’exécution du contrat
tienne simplement au fait qu’il s’appuie sur la religion et que, pour des motifs d’intérêt public, la
Cour devrait rester en dehors de ce domaine. Mais les recueils de jurisprudence font état de
nombreux cas de tribunaux saisis de litiges ayant une origine ou un fondement religieux. [. . .]
Confrontés dans chaque cas à un droit temporel quelconque, les tribunaux n’ont pas hésité à se
prononcer sur celui-ci. [p. 559-560]
47
Le fait que le par. 12 de l’entente comporte des éléments à caractère religieux ne le soustrait
pas par le fait même à l’examen judiciaire. Nous n’avons pas à examiner des principes religieux doctrinaux,
à savoir par exemple si un get donné est valide. Nous n’avons pas à spéculer sur ce que le tribunal
rabbinique pourrait décider. La promesse de M. Marcovitz de supprimer les obstacles religieux au remariage
en accordant le get a été négociée entre deux adultes consentants, tous deux représentés par un avocat, et
faisait partie d’un échange volontaire d’engagements censés avoir des conséquences juridiquement
exécutoires. De ce fait, les tribunaux peuvent à bon droit examiner l’obligation à la loupe.
B. Validité de l’entente en droit québécois
48
La question suivante est de savoir si l’obligation est valide et exécutoire en droit québécois.
Je signale tout d’abord que les parties ont plaidé cette affaire sans aucunement tenir compte de l’incidence
de l’entrée en vigueur du Code civil du Québec le 1er janvier 1994 et des problèmes de droit transitoire qui
pouvaient se poser. Tout au long des procédures, ni les parties ni les tribunaux inférieurs n’ont fait allusion
au Code civil du Bas-Canada. Puisque l’action de Mme Bruker a été introduite en juillet 1989, le Code civil du
Bas-Canada, et en particulier ses articles 982 à 984, s’appliquaient techniquement aux parties, comme le
prévoit l’art. 9 de la Loi sur l’application de la réforme du Code civil, L.Q. 1992, ch. 57. Toutefois, puisque le
nouveau C.c.Q. a conservé les principes clés régissant la formation des contrats en droit québécois tout en
modifiant et en précisant les dispositions pertinentes du Code civil du Québec (J. Pineau, « Théorie des
obligations », dans La réforme du Code civil (1993), p. 20-21), le fait que les parties s’appuient sur le C.c.Q.
n’a pas eu d’incidence importante sur le litige. Dans les circonstances, et sans nier l’importance du droit
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transitoire, les présents motifs, tout comme ceux du juge de première instance et de la Cour d’appel,
renvoient aux articles du C.c.Q.
49
Le droit civil québécois reconnaît trois types d’obligations : morales, civiles (ou légales) et
naturelles. Seules les deux premières sont en cause en l’espèce. Elles sont ainsi définies dans le
Dictionnaire de droit privé et lexiques bilingues : les obligations (2003) :
OBLIGATION MORALE
Obligation qui ne s’impose que sur le plan de la conscience ou de l’honneur et qui est
dépourvue de sanction étatique, par opposition à l’obligation juridique. Par ex., le devoir de
charité envers son prochain.
OBLIGATION CIVILE
Obligation susceptible d’exécution forcée. Par ex., l’obligation alimentaire entre époux. « Sur
d’autres points, cependant, les obligations naturelles se rapprochent des obligations civiles; à
celles-ci elles empruntent au moins certains de leurs effets lorsque le débiteur a librement
décidé de les exécuter » (Ghestin et Coubeaux, Introduction, no 636, p. 717).
50
Jean-Louis Baudoin et Pierre-Gabriel Jobin expliquent de la façon suivante la différence entre
une obligation morale et une obligation civile quant au caractère exécutoire :
[l]’obligation civile est sanctionnée par la loi, ce qui permet au créancier d’en exiger l’exécution
devant les tribunaux. À celle-ci, on oppose l’obligation morale, qui se situe en dehors du
domaine juridique, qui n’est pas sanctionnée par le droit et dont le pouvoir contraignant relève
uniquement du for intérieur, c’est-à-dire du remords. Le « créancier » d’une obligation morale
ne peut en poursuivre l’exécution devant les tribunaux, car elle n’est susceptible que
d’exécution volontaire. Tels sont, par exemple, le devoir de faire la charité et le devoir d’aider
son prochain – qu’il convient de distinguer de l’obligation civile de porter secours à une
personne en danger.
(Baudoin et Jobin, Les obligations (6e éd. 2005), p. 28)
(Voir également John E. C. Brierley et Roderick Macdonald, Quebec Civil Law: An Introduction
to Quebec Private Law (1993), p. 382.)
51
Je ne considère pas l’aspect religieux de l’obligation contenue au par. 12 de l’entente comme
un obstacle à sa validité civile. Certes, une personne ne peut être forcée à exécuter une obligation morale,
mais le Code civil n’empêche nullement une personne de transformer ses obligations morales en obligations
juridiquement valides et exécutoires. Le devoir de faire la charité, par exemple, pourrait être qualifié
d’obligation morale et, par conséquent, juridiquement non exécutoire. Mais si une personne s’engage par
contrat envers un organisme de charité à faire un don, l’obligation peut très bien devenir une obligation
valide et exécutoire si elle satisfait aux exigences du C.c.Q. relatives à la formation du contrat. Dans ce cas,
l’obligation morale est transformée en une obligation civile exécutoire en justice.
52
Le premier paragraphe de l’article 1378 C.c.Q. définit le contrat comme suit :
un accord de volonté, par lequel une ou plusieurs personnes s’obligent envers une ou plusieurs
autres à exécuter une prestation.
La formation du contrat est régie par l’art. 1385 C.c.Q., qui prévoit ce qui suit :
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Le contrat se forme par le seul échange de consentement entre des personnes capables de
contracter, à moins que la loi n’exige, en outre, le respect d’une forme particulière comme
condition nécessaire à sa formation, ou que les parties n’assujettissent la formation du contrat
à une forme solennelle.
Il est aussi de l’essence du contrat qu’il ait une cause et un objet.
53
La capacité et le consentement des parties ne sont pas en cause en l’espèce. Je ne trouve
non plus rien de répréhensible dans la « cause » de la disposition contractuelle, à savoir le désir des parties
de conserver dès lors la liberté de se remarier conformément à leurs croyances religieuses et au droit
séculier.
54
Monsieur Marcovitz soutient cependant que l’« objet » de la disposition contractuelle —
assurer la présence des parties devant le tribunal rabbinique en vue d’obtenir un divorce conformément à la
loi juive afin de permettre le remariage conformément à cette loi — est contraire à l’ordre public parce qu’il
porte atteinte à son droit à la liberté de religion et est donc interdit par les art. 1412 et 1413 C.c.Q.
L’argument a été formulé comme suit dans son mémoire :
[TRADUCTION] L’article 1413 C.c.Q. prévoit qu’un contrat est nul si son objet est contraire à
l’ordre public. Il est contraire à l’ordre public d’envisager qu’une personne s’engage par contrat
à restreindre le libre exercice de ses libertés fondamentales, y compris la liberté de religion et
de conscience.
55
L’objet du contrat est défini comme suit à l’article 1412 C.c.Q. :
L’objet du contrat est l’opération juridique envisagée par les parties au moment de sa
conclusion, telle qu’elle ressort de l’ensemble des droits et obligations que le contrat fait naître.
Selon les Commentaires du ministre de la Justice (1993), la définition que l’on trouve à l’art. 1412 codifie la
doctrine et la jurisprudence relatives à l’objet du contrat (vol. 1, p. 857-858). On ne trouvait pas dans le
Code civil du Bas-Canada de définition de l’objet du contrat.
56
Le C.c.Q. définit également l’objet d’une obligation comme suit (art. 1373) :
[l]’objet de l’obligation est la prestation à laquelle le débiteur est tenu envers le créancier
et qui consiste à faire ou à ne pas faire quelque chose.
La prestation doit être possible et déterminée ou déterminable; elle ne doit être ni
prohibée par la loi ni contraire à l’ordre public.
L’objet des obligations peut englober les prestations les plus diverses consistant « à faire ou ne pas faire
quelque chose » (V. Karim, Les obligations (2e éd. 2002), vol. 1, p. 19). L’objet, ou prestation, n’est pas
nécessairement une chose matérielle. Il peut s’agir, par exemple, d’un geste positif, d’un paiement ou de la
livraison d’un objet (Karim, p. 19).
57
La notion d’objet d’un contrat est même plus large que l’objet des obligations (Baudoin et
Jobin, par. 19 et 367). C’est l’opération juridique envisagée par les parties (D. Lluelles et B. Moore, Droit
des obligations (2006), par. 1051) et elle peut inclure un certain nombre d’obligations spécifiques prévoyant,
corrélativement, des objets spécifiques.
58
Soit dit en tout respect, j’estime que la notion d’« opération juridique » (ou d’objet du
contrat) à l’art. 1412 doit recevoir une interprétation beaucoup plus large que celle que propose la juge
Deschamps, surtout parce qu’à mon avis, cet article 1412 n’est restreint que par l’art. 1413 qui édicte :
[e]st nul le contrat dont l’objet est prohibé par la loi ou contraire à l’ordre public.
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59
Il n’y a donc que deux restrictions à l’objet d’un contrat : il ne doit pas être prohibé par la loi
ni être contraire à l’ordre public. Conformément au principe de la liberté contractuelle, les parties
conservent une une grande latitude en matière d’objet légalement permissible. Comme le font remarquer
Baudoin et Jobin :
[s]i tout contrat doit avoir un objet, celui-ci peut être infiniment varié, puisqu’en vertu du
principe de la liberté contractuelle, les parties peuvent réaliser toute espèce d’opération
juridique, dans les limites imposées par la loi et l’ordre public. [Je souligne; par. 368.]
60
61
Par conséquent, à moins que M. Marcovitz n’ait raison d’affirmer que l’objet du par. 12 de
l’entente est contraire à l’ordre public, l’interprétation de l’« opération juridique » visée à l’art. 1412 n’exclut
pas cet objet et l’obligation contractuelle est valide et exécutoire.
Le contenu de l’ordre public, comme l’expliquent Baudoin et Jobin, peut varier :
[le contenu de l’ordre public] change, en effet, avec le temps puisqu’il représente, au fond,
certaines valeurs à un moment donné de l’évolution de la société. [p. 203]
...
En l’absence d’indication claire dans la loi, c’est le tribunal qui évalue le caractère d’ordre public
de la disposition sous examen ainsi que sa portée concrète. [p. 206]
62
Je conviens qu’il peut très bien exister des ententes comportant des aspects religieux qui
seraient contraires à l’ordre public. Cela dépendra manifestement, dans chaque cas, de la nature de
l’engagement et, plus particulièrement, de la mesure dans laquelle la promesse est compatible avec nos lois,
nos principes et nos valeurs démocratiques. Une entente relative au règlement d’un litige concernant la
garde d’un enfant et qui porte atteinte à l’intérêt supérieur de l’enfant, ou une entente qui viole nos lois
relatives à l’emploi, pourront être jugées contraires à l’ordre public.
63
Toutefois, je n’ai aucun doute pour ce qui est de l’engagement de M. Marcovitz à accorder le
get. Cet engagement est conforme — et non contraire — à l’ordre public. Les modifications apportées en
1990 à la Loi sur le divorce, mentionnées précédemment, contredisent l’argument selon lequel une entente
prévoyant que le get sera accordé viole le principe de l’ordre public. Au contraire, le législateur a manifesté
l’intention claire d’encourager la suppression des obstacles religieux au remariage. De plus, comme je le
signale plus loin dans ces motifs, le caractère exécutoire d’une promesse d’accorder le get s’harmonise avec
l’approche canadienne en matière de liberté de religion, de droits à l’égalité et de divorce et de mariage de
façon générale, et elle est reconnue judiciairement à l’échelle internationale.
64
En conséquence, puisque l’objet n’est pas contraire à l’ordre public et que toutes les autres
conditions de validité d’un contrat conforme au droit québécois sont présentes, l’obligation contractuelle
contenue au par. 12 de l’entente est valide et juridiquement exécutoire en droit québécois.
C. Application de la Charte québécoise
65
Il reste l’argument de M. Marcovitz selon lequel l’art. 3 de la Charte québécoise l’exonère des
conséquences d’un manquement au par. 12 de l’entente. Celui-ci affirme que l’attribution de
dommages-intérêts violerait sa liberté de religion en ce qu’elle le condamnerait ex post facto [TRADUCTION]
« pour s’être conformé à sa religion ». L’article 3 prévoit ce qui suit :
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[t]oute personne est titulaire des libertés fondamentales telles la liberté de conscience, la
liberté de religion, la liberté d’opinion, la liberté d’expression, la liberté de réunion pacifique et
la liberté d’association.
66
C’est dans l’arrêt récent Amselem que notre Cour a examiné pour la dernière fois la portée
de cette disposition. Des Juifs orthodoxes propriétaires d’appartements dans un immeuble en copropriété
situé à Montréal voulaient construire sur leurs balcons, pour la fête juive du Souccoth, de petites structures
closes appelées « souccahs », ce qui était interdit par un règlement de construction incorporé dans la
déclaration de copropriété de l’immeuble.
67
Le critère appliqué par la majorité dans l’arrêt Amselem pose la question de savoir si la
croyance religieuse sincère et de bonne foi d’un individu fait l’objet d’une limite injustifiée non négligeable.
En appliquant ce critère aux faits de l’espèce, je ne constate à première vue aucune atteinte à la liberté de
religion de M. Marcovitz.
68
Je me demande d’abord si M. Marcovitz croyait sincèrement, en toute bonne foi, que le fait
d’accorder le get était un acte auquel il s’opposait par croyance ou conscience religieuse. Je ne vois pas
vraiment quel aspect de ses croyances religieuses l’a empêché d’accorder le get. En fait, il n’a jamais fourni
de motif religieux à l’appui de son refus d’accorder le get. Il a plutôt affirmé que son refus reposait sur le
fait que, pour reprendre ses propos :
[TRADUCTION] Madame Bruker m’a harcelé, elle a éloigné mes enfants de moi, elle m’a
volé de l’argent, elle a volé de l’argenterie à ma mère, elle m’a empêché d’exercer
pleinement mes droits de visite des enfants. Voilà les motifs . . . [D.A., p. 66]
69
Cet aveu confirme, selon moi, que son refus d’accorder le get était fondé moins sur une
conviction religieuse que sur le fait qu’il était fâché contre Mme Bruker. Sa religion ne l’oblige pas à refuser
d’accorder le get à Mme Bruker, bien au contraire. Il ne fait aucun doute que selon la loi juive, il pouvait
refuser de l’accorder, mais c’est tout autre chose de dire qu’un principe religieux l’a empêché de respecter
une obligation légale qu’il a volontairement conclue et dont il s’est prévalu des avantages négociés.
70
Même si l’on peut affirmer que le fait de l’obliger à respecter son engagement d’accorder le
get va à l’encontre d’une croyance religieuse sincère et a des conséquences non négligeables pour lui – et je
vois difficilement qu’il en soit ainsi – cette atteinte prima facie ne résiste pas à l’exercice d’appréciation que
prescrivent la jurisprudence de cette Cour et la Charte québécoise.
71
Je commence cet exercice d’appréciation en citant l’arrêt R. c. Big M Drug Mart Ltd., [1985] 1
R.C.S. 295, dans lequel notre Cour a pour la première fois donné à la liberté de religion une interprétation
robuste et où le juge Dickson a confirmé comme suit la portée générale de ce droit dans un contexte
constitutionnel :
Le concept de la liberté de religion se définit essentiellement comme le droit de croire ce que
l’on veut en matière religieuse, le droit de professer ouvertement des croyances religieuses
sans crainte d’empêchement ou de représailles et le droit de manifester ses croyances
religieuses par leur mise en pratique et par le culte ou par leur enseignement et leur
propagation. [p. 336]
72
Notamment, il a aussi confirmé que la liberté de religion peut néanmoins être restreinte
lorsqu’elle entre démesurément en conflit avec d’autres droits et intérêts publics importants :
La liberté signifie que, sous réserve des restrictions qui sont nécessaires pour préserver la
sécurité, l’ordre, la santé ou les moeurs publics ou les libertés et droits fondamentaux d’autrui,
nul ne peut être forcé d’agir contrairement à ses croyances ou à sa conscience. [p. 337]
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...
Les valeurs qui sous-tendent nos traditions politiques et philosophiques exigent que chacun soit
libre d’avoir et de manifester les croyances et les opinions que lui dicte sa conscience, à la
condition notamment que ces manifestations ne lèsent pas ses semblables ou leur propre droit
d’avoir et de manifester leurs croyances et opinions personnelles. [Je souligne; p. 346.]
(Voir également Young c. Young, [1993] 4 R.C.S. 3, p. 121-122; P. (D.) c. S. (C.), [1993] 4 R.C.S. 141,
p. 182; B. (R.) c. Children’s Aid Society of Metropolitan Toronto, [1995] 1 R.C.S. 315, par. 226; Ross c.
Conseil scolaire du district no 15 du Nouveau-Brunswick, [1996] 1 R.C.S. 825, par. 72 et 94; et Multani c.
Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys, [2006] 1 R.C.S. 256, 2006 CSC 6, par. 26).
73
D’autres ressorts ont également conclu que le fait d’invoquer la liberté de religion n’offre pas,
en soi, l’immunité contre la nécessité d’apprécier le droit revendiqué en regard des valeurs ou du préjudice
opposés. Deux exemples suffisent. Dans Temple Mount Faithful c. Jerusalem District Police Commander,
H.C. 292/83, 38(2) P.D. 449, la Cour suprême israélienne a accueilli la requête d’un groupe de fidèles juifs
qui demandaient à prier dans un lieu où un conflit avec des fidèles musulmans semblait inévitable. Le juge
Barak a signalé ce qui suit :
[TRADUCTION] La liberté de conscience, de croyance, de religion et de culte est relative. Elle
doit être appréciée avec les autres droits et intérêts qui méritent également d’être protégés,
comme le droit à la propriété privée et publique et la liberté de mouvement. L’ordre public et la
sécurité comptent parmi les intérêts qui doivent être pris en compte. [p. 455]
74
Puis, dans Christian Education South Africa c. Minister of Education (2000), 10 B.C. L.R. 1051
(C. const. d’Afrique du Sud), le juge Sachs, au nom d’une cour unanime, a exploré les limites de la liberté de
religion dans le cadre de la contestation d’une loi interdisant le châtiment corporel des étudiants à l’école.
La Christian Education South Africa, une association de 196 écoles chrétiennes indépendantes, a fait valoir
que le châtiment corporel était prescrit par la Bible. Dans une décision maintenant l’interdiction du
châtiment, le juge Sachs a donné l’explication suivante :
[TRADUCTION] Dans toute société ouverte et démocratique qui reconnaît la dignité humaine,
l’égalité et la liberté dans lesquels la liberté de conscience et de religion doit être considérée
avec le sérieux qui s’impose, le problème sous-jacent consiste à déterminer la mesure dans
laquelle la démocratie peut et doit permettre aux membres des communautés religieuses de
déterminer eux-mêmes les lois qu’ils respecteront et celles qu’ils ne respecteront pas. Une telle
société ne peut se tenir que si tous ses participants acceptent le caractère obligatoire de
certaines normes fondamentales. Dès lors, les croyants ne peuvent prétendre à un droit
automatique d’être soustraits, en raison de leurs croyances, aux lois du pays. En même temps,
l’État devrait, lorsque c’est raisonnablement possible, s’efforcer de ne pas obliger les croyants à
faire le choix difficile et intensément pénible entre rester fidèles à leur foi ou respecter la loi.
[par. 35]
75
Dans l’arrêt Amselem, les juges majoritaires de cette Cour ont fait observer ce qui suit :
[u]ne conduite susceptible de causer préjudice aux droits d’autrui ou d’entraver l’exercice de
ces droits n’est pas automatiquement protégée.
...
De fait, [. . .] la liberté de religion [. . .] peut être subordonnée au respect de
préoccupations sociales supérieures. [par. 62-63]
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76
Au Québec, l’art. 9.1 de la Charte québécoise prévoit que les droits et les libertés, y compris
la liberté de religion, sont restreints dans la mesure où leur exercice ne doit pas être préjudiciable à autrui.
Seul le premier paragraphe de l’art. 9.1 s’applique. Il prévoit ce qui suit :
Les libertés et droits fondamentaux s’exercent dans le respect des valeurs démocratiques, de
l’ordre public et du bien-être général des citoyens du Québec.
77
L'art. 9.1 confirme le principe selon lequel la revendication du droit à la liberté de religion
doit être conciliée avec les droits, les valeurs et le préjudice opposés. Une appréciation des droits et valeurs
opposés semble correspondre à l’intention du législateur au moment de l’adoption de l’art. 9.1 en 1982,
comme l’indique le propos suivant du ministre de la Justice du Québec de l’époque, Me Marc-André Bédard :
L’article 9.1 a pour objet d’apporter un tempérament au caractère absolu des libertés et
droits édictés aux articles 1 à 9 tant sous l’angle des limites imposées au titulaire de ces droits
et libertés à l’égard des autres citoyens, ce qui est le cas pour le premier alinéa.
(Journal des débats : Commissions parlementaires, 3e sess., 32e lég., 16 décembre 1982,
p. B-11609).
(Voir Amselem, le juge Bastarache aux par. 154 à 157, et le juge Binnie au par. 191; Aubry c. Éditions
Vice-Versa Inc., [1998] 1 R.C.S. 591.)
78
Il faut donc apprécier la revendication de M. Marcovitz en regard « des valeurs
démocratiques, de l’ordre public et du bien-être général des citoyens du Québec » dont fait état l’art. 9.1.
Ainsi, nous abordons l’exercice complexe, nuancé et tributaire des faits propres à chaque espèce mentionné
au début de ces motifs.
79
M. Marcovitz, il me semble, a bien peu à mettre dans la balance. D’abord, il a conclu de son
plein gré une obligation contractuelle valide et exécutoire qu’il cherche maintenant à faire annuler pour des
scrupules religieux qui lui sont venus après coup. À mon avis, c’est cette tentative de se désister de sa
promesse exécutoire, et non l’exécution de l’obligation, qui est contraire à l’ordre public.
80
Mais l’avantage que procure, dans l’intérêt public, le fait d’empêcher des personnes de se
soustraire aux conséquences juridiques qu’entraînent leurs violations de contrat n’est qu’un des facteurs
défavorables à la revendication de M. Marcovitz. Ce qui joue le plus contre lui, ce sont les atteintes
importantes que la violation de ses obligations juridiques porte à nos engagements — précisés dans la
Constitution et les lois — envers l’égalité, la liberté de religion et la liberté de choix en matière de mariage et
de divorce.
81
En conférant au tribunal le pouvoir discrétionnaire d’éconduire dans des procédures civiles un
époux qui fait obstacle au remariage religieux, l’art. 21.1 de la Loi sur le divorce indique clairement qu’il est
d’intérêt public au Canada de décourager les obstacles de ce genre. Comme l’indiquent les commentaires
des ministres de la Justice de l’époque, la communauté juive, incluant ses membres plus religieux, ont
accueilli très favorablement ces modifications, ce qui reflète l’opinion générale selon laquelle le refus
d’accorder le get constitue à l’égard des femmes juives une indignité injustifiée que, dans la mesure du
possible, le système juridique canadien ne devrait pas accepter.
82
Nous reconnaissons également aux Canadiens le droit de décider eux-mêmes si leur mariage
est irrémédiablement brisé et nous tentons de leur permettre – et non de les empêcher — de continuer leurs
vies, y compris avec de nouvelles familles. De plus, en droit canadien, le mariage et le divorce sont ouverts
tant aux hommes qu’aux femmes. Par contre, selon la loi juive, le get ne peut être accordé que par
l’époux. Pour la femme juive empêchée par ses principes religieux d’envisager le remariage à moins qu’il
soit conforme à la loi juive, le refus du get la prive du droit de se remarier. Certes, l’épouse doit elle aussi
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consentir au get, mais comme le souligne Ayelet Shachar dans Multicultural Jurisdictions, le droit a sur les
femmes un effet disparate :
[TRADUCTION] [l]e domaine du droit familial [. . .] illustre on ne peut mieux le troublant
paradoxe de la vulnérabilité multiculturelle en montrant de quelle façon des tentatives bien
intentionnées de respect des différences se transforment souvent en autorisation de
subordination des membres d’un groupe appartenant à une catégorie donnée – en l’occurrence,
principalement les femmes. [p. 62]
Le refus de l’époux d’accorder le get à son épouse la prive donc arbitrairement de l’accès à un recours
qu’elle possède de façon indépendante en droit canadien, et il lui enlève la possibilité de se remarier et de
refaire sa vie conformément à ses croyances religieuses.
83
Les tribunaux offrant aux femmes juives leur protection contre les époux qui refusent de leur
accorder un divorce religieux jouissent également d’un soutien au niveau international.
84
La Commission européenne des droits de l’homme a maintenu le recours aux
dommages-intérêts pour indemniser une épouse qui s’est vu refuser le get. Dans D. c. France, 35 Comm.
Eur. D.H., Déc. et Rapp. 199, (1983), l’époux avait été condamné par un tribunal français à verser
25 000 francs à son ex-épouse pour l’indemniser de son refus de lui accorder le get. L’époux s’est adressé à
la Commission, faisant valoir que son droit à la liberté de conscience et de religion garanti par la Convention
européenne des droits de l’homme avait été violé par cette condamnation. La Commission a rejeté sa
requête, faisant observer que « selon le droit hébraïque il est d’usage de délivrer la lettre de répudiation
après le prononcé du divorce civil et qu’un homme véritablement pieux ne saurait retarder la remise de cette
lettre à son ex-épouse » (p. 202). Elle a en outre estimé « qu’en refusant de remettre à son ex-épouse la
lettre de répudiation constatant le divorce religieux, le requérant n’a pas manifesté sa religion par
l’accomplissement d’un rite ou d’une pratique religieuse au sens de l’article 9, par. 1, de la Convention »
(p. 202).
85
Les tribunaux français ont statué que le refus d’accorder le get constitue une faute
délictuelle. Le recours prévu est le paiement de dommages-intérêts pour indemniser l’épouse. Dans Dame
Muskat c. Danan, 22 février 1957, Gaz. Pal. 1957.1.246, par exemple, l’époux avait divorcé de son épouse
au civil mais refusait de lui accorder le get. Le Tribunal civil de la Seine a conclu comme suit :
Attendu que le gueth est un acte de répudiation à caractère purement religieux qui ne
peut emporter aucun effet sur la rupture du lien conjugal au point de vue civil, rupture déjà
consacrée par le divorce; qu’il ne peut donc être utilement soutenu que la délivrance du gueth
soit contraire à l’ordre public. [p. 246]
Constatant que la remise du get ne nécessite aucune forme de culte particulière, le tribunal a considéré que
le refus de l’époux d’accorder le get constituait une faute délictuelle et l’épouse a obtenu des
dommages-intérêts importants. (Voir également Cass. civ. 2e, 13 décembre 1972, D.1972.493, (Gasman c.
Dame Kulbokas).
86
Au Royaume-Uni, les tribunaux se sont également montrés disposés à reconnaître les
conséquences civiles du refus de l’époux d’accorder le get et ont affirmé que l’impossibilité de se remarier
dans sa religion représente un préjudice grave donnant ouverture à indemnisation. Dans Brett c. Brett,
[1969] 1 All E.R. 1007, la Cour d’appel d’Angleterre a condamné l’époux à verser une somme forfaitaire
supplémentaire au titre de la pension alimentaire au conjoint s’il refusait d’accorder le get avant une certaine
date.
87
Les tribunaux australiens ont aussi prévu des recours à l’égard du refus de l’époux d’accorder
le get à son épouse. Dans In the Marriage of Shulsinger (1977), 13 A.L.R. 537, le tribunal de la famille de
l’Australie a affirmé que l’engagement à accorder le get pris par un époux envers le tribunal ne violait pas sa
liberté de religion, concluant comme suit :
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[TRADUCTION] [Le juge de première instance] était préoccupé par [. . .] la grave question de
l’injustice qui serait faite si l’époux demandait et obtenait un divorce en Australie, mais refusait
de libérer son épouse des obligations du mariage. Il est contraire à toutes les notions de
justice de permettre qu’une telle éventualité se produise devant un tribunal, et d’affirmer que
ce dernier n’y peut rien. [Je souligne; p. 541.]
Puis, dans In the Marriage of Steinmetz (1980), 6 F.L.R. 554, le tribunal de la famille de l’Australie a octroyé
à l’épouse une pension alimentaire plus substantielle pour « encourager » l’époux à accorder à cette
dernière un divorce religieux.
88
Se fondant principalement sur le principe voulant que l’obtention du get constitue non
seulement un acte religieux, mais aussi un acte ayant pour objet séculier de finaliser la dissolution du
mariage, les tribunaux américains se sont montrés enclins à ordonner aux parties de se soumettre à la
compétence du Beth Din. Dans Avitzur c. Avitzur, 459 N.Y.S.2d 572 (1983), la Cour d’appel de New York a
conclu que la clause d’un contrat de mariage juif obligeant les deux parties à se présenter devant le Beth Din
dès la rupture du mariage en vue d’accorder le get avait force exécutoire et n’allait pas à l’encontre de
l’interdiction constitutionnelle de la confusion excessive de l’État et de l’Église. (Voir également Waxstein c.
Waxstein, 395 N.Y.S.2d 877 (C. sup. 1976) (conf. à 394 N.Y.S. 2d 253 (Div. d’appel 1977); Rubin c. Rubin,
348 N.Y.S.2d 61 (trib. de la famille 1973); et Minkin c. Minkin, 434 A.2d 665 (Ch. sup. du N.J. 1981).)
Contrairement à la situation qui prévalait dans l’affaire Avitzur et d’autres affaires américaines, notre Cour
n’est pas appelée à ordonner l’exécution intégrale ou, comme je l’ai déjà indiqué, à déterminer le caractère
exécutoire d’un contrat de mariage juif, et la mention de ces décisions ne signifie pas que j’en accepte les
dispositifs.
89
En Israël, où les juges ont octroyé des dommages-intérêts à une épouse à titre
d’indemnisation pour le refus de son époux de lui accorder le get, l’attitude adoptée par les tribunaux à
l’égard de cette question présente un intérêt particulier. Dans Jane Doe c. John Doe, Tribunal de la famille
de Jérusalem, 19270/03, 21 décembre 2004, le juge Hacohen a reconnu que [TRADUCTION] « [l]e
problème de la réticence à accorder le ghet est un des problèmes fondamentaux du judaïsme halachique (la
loi religieuse juive) et du droit familial juif » (par. 3). Il a fait observer que dans la décision Sabag c.
Supreme Rabbinical Court of Appeals, no 6751/04, la Haute cour de justice a signalé qu’il était impératif
[TRADUCTION] « de trouver des solutions efficaces à ce phénomène [. . .] pour affranchir les couples [. . .]
et leur permettre de refaire leur vie, et d’ainsi jouir de leur droit de mener une vie indépendante sur le plan
personnel » (par. 3) (traduit de l’anglais). Après avoir pris note de l’argument de l’époux voulant que les
tribunaux rabbiniques soient mieux placés pour connaître des litiges de ce genre du fait que la loi religieuse
s’applique au mariage et au divorce en Israël, le juge Hacohen, qui a condamné l’époux à verser
425 000 shekels en dommages-intérêts, y compris 100 000 shekels en dommages-intérêts majorés, a statué
comme suit :
[TRADUCTION] Les tribunaux rabbiniques sont appelés, à un moment ou à un autre, à trouver
des solutions halachiques [de la loi religieuse] au phénomène de la réticence à accorder le get
et à imaginer des outils halachiques pour forcer les personnes qui le retiennent à accepter
d’accorder à leurs épouses le get tant attendu. En l’espèce, toutefois, la Cour ne s’ingère pas
dans ce domaine. [. . .] Le redressement demandé a pour objet d’indemniser l’épouse des
dommages importants causés par ses longues années d’aginut, de solitude et de souffrance
morale que lui a imposées son époux. [Je souligne; par. 19.]
90
Cette perspective internationale renforce l’idée que l’exécution judiciaire d’un engagement à
accorder le divorce juif est compatible avec les valeurs d’ordre public que partagent d’autres démocraties.
91
M. Marcovitz ne peut donc pas s’appuyer sur la Charte québécoise pour se soustraire aux
conséquences de son refus de donner suite à son engagement d’accorder le get.
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92
L’intérêt que porte le public à la protection des droits à l’égalité et de la dignité des femmes
juives dans l’exercice indépendant de leur capacité de divorcer et se remarier conformément à leurs
croyances, tout comme l’avantage pour le public d’assurer le respect des obligations contractuelles valides et
exécutoires, comptent parmi les inconvénients et les valeurs qui l’emportent sur la prétention de
M. Marcovitz selon laquelle l’exécution de l’engagement pris au par. 12 de l’entente pourrait restreindre sa
liberté de religion.
93
Malgré le caractère moribond de son mariage, Mme Bruker est demeurée, depuis l’âge de
31 ans jusqu’à 46 ans, l’épouse de M. Marcovitz selon la loi juive et s’est trouvée dramatiquement limitée
dans ses choix de vie personnelle. Sa faculté de vivre sa vie conformément aux lois et aux valeurs de notre
pays et à ses croyances juives s’est ainsi trouvée gravement et arbitrairement entravée. Une atteinte à la
liberté de religion de M. Marcovitz est sans conséquence en comparaison des inconvénients disproportionnés
sur la possibilité pour Mme Bruker de vivre pleinement sa vie comme femme juive au Canada.
D. Dommages-intérêts
94
Il reste à examiner la prétention de Mme Bruker selon laquelle l’indemnité accordée par le
juge de première instance était insuffisante. Monsieur Marcovitz prétend au contraire que le montant des
dommages-intérêts accordé par le juge de première instance était trop élevé et devrait être réduit.
95
Des dommages-intérêts peuvent être accordés en cas de rupture de contrat. Selon
l’art. 1607 C.c.Q., le créancier d’une obligation « a droit à des dommages-intérêts en réparation du
préjudice, qu’il soit corporel, moral ou matériel, que lui cause le défaut du débiteur et qui en est une suite
immédiate et directe ». Le juge de première instance a conclu que le manquement de M. Marcovitz à son
obligation de droit civil contenue au par. 12 de l’entente était la cause de la réclamation de
dommages-intérêts par Mme Bruker. Il a exercé son pouvoir discrétionnaire en accordant des
dommages-intérêts, et je ne vois aucune raison d’intervenir dans cet exercice.
96
Il ne fait aucun doute que la seule raison pour laquelle le get n’a pas été accordé tient au
refus de M. Marcovitz de se présenter devant le tribunal pour l’accorder. L’entente a été librement conclue,
et tout ce qui a changé entre la date de l’entente et la date du prononcé du jugement conditionnel de
divorce, c’est l’état d’esprit de M. Marcovitz. Il avait le droit de changer sa position juridique, mais non sans
en changer les conséquences juridiques. Il peut refuser d’accorder le get s’il le désire, mais non sans
accepter la responsabilité des conséquences que sa décision de revenir sur son obligation civile peut avoir
pour Mme Bruker.
97
Le juge de première instance a examiné l’ensemble de la preuve relative à l’effet que le
manquement au par. 12 de l’entente a eu sur la vie de Mme Bruker. Rien n’indique qu’il a commis une erreur
manifeste ou dominante, qu’il s’est fondé sur un principe erroné ou mauvais, ou que l’évaluation des
dommages-intérêts est erronée. L’attribution de dommages-intérêts en l’espèce indemnise bien Mme Bruker
de la perte que lui a causé le refus de M. Marcovitz d’exécuter son obligation contractuelle — soit la perte
pendant quinze ans de la faculté de se remarier ou d’avoir des enfants conformément à ses croyances
religieuses. Je ne vois aucune raison de modifier le montant des dommages-intérêts.
98
Madame Bruker a également soutenu que le juge de première instance a eu tort de
n’accorder des intérêts et une indemnité additionnelle qu’à compter de la date de la modification de sa
demande de dommages-intérêts additionnels en 1996, plutôt qu’à compter de la date du prononcé du
jugement conditionnel de divorce en 1980 ou de la date de son action initiale en 1989. L’article 1618 C.c.Q.
prévoit, relativement aux dommages-intérêts du genre de ceux que réclame Mme Bruker, le paiement de
l’intérêt « depuis la demeure ou depuis toute autre date postérieure que le tribunal estime appropriée ».
Aux termes de l’art. 1619 C.c.Q., « [i]l peut être ajouté aux dommages-intérêts accordés à quelque titre que
ce soit, une indemnité . . . ».
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99
100
Le juge de première instance a estimé que la demande de dommages-intérêts de Mme Bruker
n’est devenue une véritable question en litige qu’une fois le get accordé, lorsqu’elle a déposé sa déclaration
modifiée. C’est pourquoi il n’a accordé des intérêts et une indemnité additionnelle qu’à compter de la date
de sa signification. Je ne vois aucune raison d’intervenir dans cet exercice de son pouvoir discrétionnaire.
Le pourvoi est donc accueilli avec dépens dans toutes les cours.
Les motifs des juges Deschamps et Charron ont été rendus par
101
LA JUGE DESCHAMPS — La Cour est appelée à décider si les tribunaux civils peuvent être
utilisés non seulement comme rempart pour protéger la liberté de religion mais aussi comme arme pour
sanctionner un engagement religieux. Plusieurs auraient cru évidente, au XXIe siècle, une réponse négative.
La conclusion à laquelle arrive la majorité équivaut cependant à répondre affirmativement à cette question.
Je ne peux me ranger à cette décision.
102
L’adhésion du Canada au multiculturalisme et son attachement aux valeurs fondamentales
que constituent la liberté de conscience et de religion et le droit à l’égalité garantissent à tous les Canadiens
et Canadiennes que les tribunaux demeureront neutres devant les préceptes religieux. Cette neutralité
donne aux tribunaux la légitimité nécessaire pour s’acquitter de leur rôle d’arbitre de la cohabitation des
différentes religions et leur permet de décider comment les droits conflictuels peuvent être conciliés. Cette
attitude protectrice des tribunaux face à la liberté de conscience et de religion implique une tâche lourde et
complexe. Il ne conviendrait pas de leur imposer le fardeau additionnel de sanctionner les préceptes et
engagements religieux.
103
Dans le présent cas, le fait de sanctionner les conséquences religieuses du délai à consentir
au get signifie que le tribunal avalise ces conséquences religieuses, même si elles vont à l’encontre d’acquis
de la société canadienne. Il s’agit d’une première et elle heurte les normes du droit positif québécois et
canadien. Ni le droit public ni le droit privé ne l’autorisent.
104
Par ailleurs, j’ai certaines réserves à l’égard d’un des piliers de l’argumentaire de la majorité.
Celle-ci accorde une importance déterminante à l’art. 21.1 de la Loi sur le divorce, L.R.C. 1985, ch. 3 (2e
suppl.), lui conférant un effet interprétatif qui déborde sa portée immédiate. Cette disposition a été adoptée
à la demande de la communauté juive canadienne afin de pallier l’incapacité des autorités rabbiniques à
résoudre le problème du divorce religieux juif : « ... la communauté juive, en particulier l’association B’nai
Brith du Canada [et le Conseil Juif canadien], appuyée par les principales organisations juives, a demandé
que soit corrigée une situation qu’elle considère injuste » (Débats de la Chambre des Communes, vol. VI, 2e
sess., 34e lég., 15 février 1990, p. 8375).
105
La validité constitutionnelle de l’art. 21.1 a été contestée dans le présent dossier. La
contestation a toutefois été abandonnée, l’intimé ayant été expressément autorisé à contester la
compétence des tribunaux pour trancher la réclamation en dommages-intérêts sans égard à cette disposition
(dossier de l’appelante, p. 3). Cette autorisation a été accordée par le juge qui a entendu le procès. Ni le
juge du procès ni la Cour d’appel n’ont donc eu recours à l’art. 21.1 pour disposer de la question de la
compétence des tribunaux civils pour se saisir de la question du get. La majorité invoque cependant cette
disposition pour appuyer sa conclusion sur cette question. L’autorisation donnée par la Cour supérieure perd
son sens et le débat est transformé lorsque les tribunaux supérieurs se fondent sur un argument qui a été
exclu de celui-ci. Il est regrettable qu’un argument auquel une telle importance est attachée soit utilisé par
la majorité, d’autant plus que la décision de la Cour peut être interprétée comme ayant pour effet de
trancher, même de façon partielle, la question de la validité de la disposition, alors qu’elle n’a pas été
débattue et qu’elle a même été expressément écartée du débat par les parties.
106
Devant notre Cour, la première question soulevée par l’appelante est celle de la compétence
des tribunaux. Les juges de la majorité traitent le dossier plutôt comme une question de conciliation du droit
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des parties à leur liberté de religion. À mon avis, la question de la compétence des tribunaux de connaître
de la demande de l’appelante est décisive. Les moyens de l’intimé fondés sur la neutralité du rôle de l’État
en matière religieuse et sur l’absence d’objet au contrat sont déterminants. Le moyen qui repose sur sa
liberté de religion n’a pas besoin d’être examiné. Aucun exercice de conciliation ou d’accommodement n’est
nécessaire. Ni le droit public ni le droit des contrats ne donnent ouverture à la demande de l’appelante.
1. Les faits et l’historique judiciaire
107
En avril 1980, après 11 années de mariage, l’appelante intente une action en divorce. Le 15
juillet 1980, les parties concluent une entente sur les mesures accessoires. L’entente traite du partage des
biens, des droits de visite, de la pension alimentaire pour les deux enfants du couple, de l’attribution à
l’appelante d’une somme globale, en plus de prévoir une quittance mutuelle. L’entente contient aussi, et
c’est là la source du litige qui nous occupe, l’engagement des parties à se présenter devant les autorités
rabbiniques en vue d’obtenir un divorce religieux juif, appelé get. La clause qui concerne le get est rédigée
ainsi :
[TRADUCTION]
12. [Les parties conviennent . . .] de se présenter devant les autorités rabbiniques de la ville et
du district de Montréal en vue d’obtenir le get [divorce] religieux traditionnel immédiatement
après le prononcé d’un jugement conditionnel de divorce.
108
Peu après la signature de l’entente, les relations entre les parties se détériorent au point de
devenir orageuses. En octobre 1980, le jugement de divorce est prononcé mais l’intimé ne se présente pas
pour l’obtention du get. L’appelante travaille comme décoratrice d’intérieur et mène une vie active, marquée
par un comportement non conventionnel.
109
Débute alors une saga judiciaire. Le litige concerne principalement la modification des
mesures accessoires. Dès 1983, un premier jugement est rendu. De nombreux autres suivent. En 1989,
l’appelante intente une action dans laquelle elle réclame la somme de 500 000 $, au motif qu’elle aurait été
empêchée de mener sa vie, de se remarier selon la foi juive et d’avoir des enfants (les deux enfants du
mariage sont adoptés), le tout parce que l’intimé n’a pas donné suite à son engagement de se présenter
devant les autorités rabbiniques pour l’obtention du get. Également en 1989, l’appelante déménage à New
York en quête d’une nouvelle vie. Elle s’y rend avec les deux enfants du couple. Les relations de l’appelante
avec les filles sont aussi difficiles que celles qu’elle entretient avec l’intimé. L’une d’elles fait, en 1992, l’objet
d’une ordonnance de placement; à sa majorité, elle demande de continuer à habiter avec sa famille
d’accueil. L’autre n’habite que sporadiquement avec sa mère, passant d’un pensionnat à l’autre.
110
Le 5 décembre 1995, à une époque contemporaine à l’audition de plusieurs requêtes
présentées tant par l’intimé que par l’appelante au sujet des mesures accessoires, l’intimé consent au get; le
divorce religieux est alors prononcé. L’intimé témoigne qu’il était à ce moment satisfait de l’entente qu’il
avait avec les filles. Subvenant directement à leurs besoins, il se sentait libéré de l’appelante. L’action en
dommages-intérêts continue toutefois de suivre son cours. L’appelante modifie à 1 350 000 $ la somme
réclamée.
111
Le jugement de la Cour supérieure sur cette action est prononcé en 2003 ([2003] R.J.Q.
1189). Le juge conclut que, lors de son incorporation à l’entente sur les mesures accessoires, l’obligation
religieuse [TRADUCTION] « est devenue de la compétence des tribunaux civils, et l’obligation religieuse a
été incorporée dans une entente civile. [...] Dès lors qu’un contrat civil existe, même si ses objets ont trait à
des obligations religieuses, il est justiciable et relève de la compétence du tribunal civil. [...] Puisqu’en
l’espèce aucune question d’ordre public ne se pose, le contrat est valide. En termes simples, une obligation
civile valide teintée de religion a été créée. » (par. 19 et 20).
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112
Le juge conclut que le refus de consentir au get n’est pas justifié en droit. Il note que
l’attitude de l’intimé constitue une forme de punition ou de contrainte, parce que celui-ci prétend que
l’appelante a aliéné les enfants et l’a harcelé de demandes pécuniaires (par. 9 et 12).
113
Faisant un lien avec ce qu’il dit être l’adhésion de l’appelante aux préceptes de la
communauté orthodoxe juive, le juge accorde 2 500 $ pour chacune des 15 années pendant lesquelles celleci n’a pu se remarier (par. 46-47) :
[TRADUCTION]
Bien qu’il n’existe aucune preuve établissant qu’un prétendant ait mis fin à sa relation avec
la demanderesse à cause de l’incapacité de celle-ci de se marier avec lui devant un rabbin de la
communauté orthodoxe — d’ailleurs rien n’indique qu’elle ait jamais reçu une demande en
mariage —, la demanderesse avait néanmoins le droit d’exercer sa liberté de religion comme
elle seule l’entendait. Il n’appartient pas au défendeur de lui imposer un degré de
« religiosité », de dire qu’elle aurait pu se remarier à la Synagogue réformée ou demander une
annulation, etc.
Les questions de conscience religieuse doivent être laissées aux parties adultes qui les
invoquent et non leur être imposées par d’autrui. La demanderesse a convaincu la cour que
malgré ses nombreux accrocs aux doctrines et préceptes préconisés par la communauté juive
orthodoxe — son avortement, ses relations extra-conjugales, son usage de contraceptifs, etc.
— ,elle a été et est demeurée membre de la branche orthodoxe de la communauté juive,
qu’elle avait donc le droit de se remarier devant un rabbin de cette communauté et que, pour
ce faire, elle aurait eu besoin d’un get accordé par un Beth Din reconnu par celle-ci.
114
Il accorde aussi à l’appelante la somme de 10 000 $, pour le motif qu’elle ne pouvait pas,
pendant cette période, avoir d’enfant légitime selon les préceptes de la communauté juive orthodoxe (par.
50-52) :
[TRADUCTION]
La cour présume que toute mention par la demanderesse du fait d’avoir des enfants
s’entend nécessairement d’enfants « légitimes » selon les préceptes observés par la
communauté juive orthodoxe à laquelle elle appartenait.
Comme la demanderesse n’a produit aucune preuve de l’échec d’une relation qui aurait pu
conduire au mariage parce qu’elle n’avait pas de get, elle n’a pas été empêchée d’avoir un
enfant avec le partenaire d’une telle relation.
Toutefois, étant donné qu’elle n’était généralement pas en mesure d’avoir d’enfant
légitime, situation qui, affirme-t-elle, a influencé son choix de compagnons et d’amoureux, la
Cour lui accorde une somme symbolique de 10 000 $ à ce titre.
115
116
L’intimé porte ce jugement en appel.
La Cour d’appel souligne d’abord que si la pension alimentaire et le partage des intérêts
financiers sont des sujets relevant de la compétence du juge qui entend l’action en divorce, tel n’est pas le
cas pour l’engagement contenu à la clause 12 de l’entente sur les mesures accessoires. S’exprimant pour la
cour, le juge Hilton écrit ceci :
[TRADUCTION]
La comparution devant des autorités rabbiniques en vue d’obtenir un get, engagement
prévu au paragraphe 12 du Consentement, ne peut cependant pas vraiment être obtenue par
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voie d’ordonnance sur les mesures accessoires demandée par une partie à un divorce. Même
maintenant, le mieux que l’on puisse demander est la mesure envisagée à l’article 21.1 de la
Loi sur le divorce [note en bas de page omise], laquelle, comme nous l’avons vu, est imparfaite,
puisque son application dépend de la présentation d’une demande distincte par l’époux qui a le
pouvoir de supprimer l’obstacle à l’obtention d’un divorce religieux, l’examen par le tribunal de
cette demande étant concrètement subordonné à la suppression de l’obstacle religieux.
([2005] R.J.Q. 2482, par. 41)
117
Le juge Hilton estime aussi que le juge de la Cour supérieure a commis une erreur en faisant
primer la forme de l’obligation sur sa substance (par. 76) :
[TRADUCTION] Bien que l’on ne puisse qu’être empathique au sort d’une femme juive dont
l’ex-époux retarde l’obtention du get ou refuse de le lui accorder, qu’il ait ou non conclu une
entente prénuptiale l’obligeant à le faire ou dans le contexte d’un consentement sur les
mesures accessoires, je suis arrivé à la conclusion que l’essence de l’obligation de l’ex-époux
est de nature religieuse — quelle que soit la forme que prend l’obligation — et que, par
conséquent, il n’est pas possible en cas d’allégation de manquement à cette obligation de
s’adresser aux tribunaux séculiers pour obtenir l’exécution en nature de cette obligation ou des
dommages-intérêts. Manifestement, il n’appartient pas aux tribunaux séculiers de pallier l’effet
discriminatoire de l’absence d’un get pour une femme juive qui désire en obtenir un, pas plus
qu’il ne conviendrait que ces tribunaux, dans un contexte non contractuel, se saisissent de
litiges semblables concernant d’autres religions et où un traitement inégal est réservé aux
femmes quant à l’accès à des postes au sein du clergé, ou encore, comme nous l’avons vu
récemment dans d’autres contextes, de litiges où des conjoints de même sexe se voient refuser
le droit de se marier dans des cérémonies religieuses associées à certaines croyances
religieuses.
118
Le juge Hilton reproche enfin au juge de première instance de conclure que, puisque le get a
été accordé en 1995, il aurait pu l’être en 1980. Le juge Hilton rappelle que les conditions avaient changé
entre le moment de la signature de l’entente et le prononcé du divorce et que, selon la preuve incontestée,
les autorités rabbiniques prennent en considération, non un consentement préalable, mais seulement celui
donné librement devant le tribunal juif. Manifestement, selon le juge Hilton, le consentement n’aurait pas pu
être libre entre le moment du prononcé du divorce et celui où il a été donné. Le juge signale qu’il ne peut
concilier ce qu’il comprend être l’exercice de la conscience religieuse de l’intimé avec la position suggérée
par l’appelante sans conclure que l’intimé aurait dû mentir concernant le caractère volontaire de sa présence
devant le beth din et son consentement au get. Le juge voit tout au plus dans la clause de l’entente sur les
mesures accessoires une obligation morale dont l’exécution ne peut pas être demandée aux tribunaux civils.
119
L’appelante demande à notre Cour de reconnaître le caractère civil de l’obligation et de lui
accorder des dommages de 400 000 $, majorés des intérêts depuis la date du jugement de divorce en
1980. L’intimé, pour sa part, soutient que le droit des contrats ne permet pas de sanctionner un
engagement religieux et que l’objet de l’engagement contenu à la clause 12 est un acte religieux. Il plaide
que l’art. 3 de la Charte des droits et libertés de la personne, L.R.Q., ch. C-12, garantit le droit d’accomplir
ou de ne pas accomplir un acte religieux et que l’engagement religieux ne donne pas ouverture à une action
en justice.
2. Analyse
2.1 Le get vu sous l’angle du droit public : la judiciarisation des réclamations ayant
un fondement religieux
120
Malgré les fondements religieux du droit romain et du droit civil français dont est issu le droit
civil québécois, que l’État québécois soit neutre du point de vue religieux ne devrait faire, aujourd’hui, aucun
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doute. Une première césure s’est opérée lors de la Proclamation Royale de 1763. L’ouverture au monde faite
au XXe siècle et la prise en charge par l’État des institutions contrôlées par les communautés religieuses au
début des années 60 lors de la Révolution tranquille marquent un autre pas. Une césure plus complète est
survenue avec l’adoption, par le Canada, de la politique du multiculturalisme. (F. K. Comparato, Essai
d’analyse dualiste de l’obligation en droit privé (1964), p. 135-136; Congrégation des témoins de Jéhovah de
St-Jérôme-Lafontaine c. Lafontaine (Village), [2004] 2 R.C.S. 650, 2004 CSC 48, par. 66-68, et Loi sur le
multiculturalisme canadien, L.R.C. 1985, ch. 24 (4e suppl.).)
121
Cette neutralité ne signifie pas que l’État ne prend jamais en considération les questions
religieuses. Au contraire, l’art. 2 de la Charte canadienne des droits et libertés commande à l’État de
respecter la liberté de religion. Ainsi, dans l’affaire Congrégation des témoins de Jéhovah, c’est justement
parce que l’on plaidait la violation de la liberté de religion que les tribunaux ont eu à se pencher sur le refus
de la municipalité concernée de consentir une dérogation au règlement de zonage. Cela reflète une
conception « négative » de la liberté de religion, qui impose à l’État l’obligation de ne pas porter atteinte
plus que nécessaire au droit fondamental. Tout comme pour la liberté d’expression, l’État n’a pas à fournir
de porte-voix aux prédicateurs (Haig c. Canada, [1993] 2 R.C.S. 995).
122
Le droit canadien ne prohibe donc pas la prise en considération par les tribunaux de questions
à caractère religieux, à condition que la réclamation soit fondée sur la violation d’une règle reconnue en droit
positif. À ce propos, l’intervention de tribunaux canadiens a déjà été sollicitée en vue de donner effet à des
obligations liées au get ou à un contrat de mariage religieux. Le fait d’assujettir la recevabilité d’une
réclamation à l’existence d’une règle de droit positif constitue une base neutre permettant de distinguer les
cas où l’intervention est permise de ceux où elle ne l’est pas. Dans Re Morris and Morris (1973), 42 D.L.R.
(3d) 550, la Cour d’appel du Manitoba, à la majorité, a estimé que le get était du ressort du tribunal religieux
et non des tribunaux laïques. Elle a cassé une ordonnance enjoignant à un mari de consentir au get au motif
que le contrat de mariage religieux, la ketubbah, ne contenait pas d’obligation civile.
123
Par contre, si un époux peut démontrer que son contrat de mariage religieux remplit toutes
les conditions d’un contrat civil selon la législation provinciale, les tribunaux peuvent ordonner l’exécution
des engagements à payer les sommes qui y sont prévues. En Colombie-Britannique, ce fondement juridique
a été reconnu à l’égard d’un contrat de mariage musulman (mahr), dans les affaires Nathoo c. Nathoo,
[1996] B.C.J. No. 2720 (QL) (C.S.), Amlani c. Hirani (2000), 194 D.L.R. (4th) 543, 2000 BCSC 1653, et M.
(N.M.) c. M. (N.S.) (2004), 26 B.C.L.R. (4th) 80, 2004 BCSC 346. En Ontario, par contre, on a jugé que ce
type de contrat de mariage ne remplissait pas les conditions prévues par la législation provinciale applicable
(Kaddoura c. Hammoud (1998), 168 D.L.R. (4th) 503 (Ont. Ct. Gen. Div.)).
124
Dans chaque cas, les parties et les tribunaux doivent se reporter aux règles civiles pertinentes
pour évaluer le caractère obligatoire de l’engagement. Le présent pourvoi ne remet pas en cause les recours
déjà reconnus pour trouver une solution au problème du get, mais cherche à en créer un nouveau.
125
L’appelante demande aux tribunaux d’évaluer l’impact qu’a eu sur sa vie l’omission de l’intimé
de consentir au get. Les conséquences de l’absence du get ne sont pas prévues par des règles civiles. Elles
découlent des règles religieuses. En effet, l’épouse qui n’obtient pas de get à la dissolution du mariage civil
est considérée comme une agunah, ou « femme enchaînée », et, aux yeux de sa religion, ses enfants futurs
seront des mamzerim, ou enfants illégitimes.
126
De longue date, les tribunaux se sont refusés à endosser le genre d’intervention proposée par
l’appelante. Le rôle des tribunaux est neutre en matière de religion. Il se limite à s’assurer que les lois sont
conformes à la Constitution et, dans le cas d’un litige privé, à déterminer le point de convergence des droits
dans une quête de respect de la liberté de religion.
127
Pour se convaincre des racines maintenant profondes de ces limites, il suffit de rappeler le
commentaire de lord Moulton dans l’affaire Despatie c. Tremblay (1921), 47 B.R. 305 (p. 316), au sujet du
droit à l’époque de l’entrée en vigueur de l’Acte de Québec (R.-U.), 14 Geo. 3, ch. 83 :
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[TRADUCTION] La loi ne s’est d’aucune façon ingérée dans la compétence des tribunaux
ecclésiastiques de la religion catholique romaine sur les membres de cette foi en ce qui a trait
aux questions de conscience. Mais elle ne leur a en revanche reconnu aucun rôle au civil. La
décision des personnes touchées de choisir ou non de reconnaître ces décrets constituait une
question de choix personnel qui pouvait ou non nuire à leur capacité de continuer à être
membres de cette communion. Mais il s’agissait d’une question qui ne les concernait qu’elles.
Les lords juges refusaient ainsi d’appliquer la norme religieuse pour décider de la validité du mariage en
cause.
128
L’arrêt de notre Cour dans l’affaire Ukrainian Greek Orthodox Church of Canada c. Trustees of
Ukrainian Greek Orthodox Cathedral of St. Mary the Protectress, [1940] R.C.S. 586, est tout aussi explicite.
Le juge Crocket s’y exprime ainsi :
[TRADUCTION] . . . car qu’il est bien établi que, sauf dans les cas où un droit de propriété ou
un droit civil est touché par une telle mesure, les tribunaux civils de notre pays ne permettront
pas qu’on s’adresse à eux pour obtenir l’exécution d’un décret ou d’une ordonnance purement
ecclésiastique. [Je souligne; p. 591.]
Il conclut, à la page 594, que [TRADUCTION] « [l]e but unique et évident de la présente prétention, tout
comme celui de l’action en général, est d’obtenir l’exécution d’une décision ou d’un décret purement
ecclésiastique. Pour ce motif, j’estime que la Cour d’appel était tout à fait justifiée de rejeter l’action de la
demanderesse ».
129
Les conditions de délivrance d’un get et les conséquences de l’absence de divorce religieux
sont régies par les normes de la religion juive. L’État ne s’immisce pas dans ce domaine. Par exemple, la
Cour supérieure du Québec a refusé d’ordonner à un mari d’accorder un get à son ex-épouse en invoquant
non seulement la séparation des institutions religieuses et de l’État, mais aussi la liberté de conscience. Sur
ce dernier aspect, le juge Hurtubise a écrit ceci, dans Ouaknine c. Elbilia, [1981] C.S. 32, p. 35 :
Sous cet angle, la question qui se pose est la suivante : la Cour doit-elle contraindre l’intimé à
se présenter devant un Tribunal rabbinique et à accorder le divorce religieux? En l’absence de
preuve, devons-nous présumer que cette ordonnance n’irait pas à l’encontre des préceptes de
la religion juive? Et au-delà de l’institution, de l’Église, peut-on forcer de la sorte un individu
sans s’ingérer dans sa propre liberté de religion et de conscience et en limiter le libre exercice à
moins de sonder ses convictions profondes ou lui faire un procès d’intention? Nous ne le
croyons pas.
130
Je ne vois aucun revirement ou assouplissement dans l’approche des tribunaux à l’égard de la
sanction d’un engagement purement religieux. Qu’il s’agisse de forcer la comparution d’une partie devant les
autorités rabbiniques ou d’ordonner le paiement d’une somme d’argent, le même principe est en cause : le
pouvoir des tribunaux peut-il relever d’une norme purement religieuse? Je ne le crois pas. Dans l’affaire
Lakeside Colony of Hutterian Brethren c. Hofer, [1992] 3 R.C.S. 165, la Cour a réitéré le principe reconnu
par le juge Crocket dans l’arrêt Ukranian Greek Orthodox Church. Cet arrêt est fondé sur le fait que, pour
les membres de l’association volontaire que constituait la colonie hutérite, le droit de rester sur les terres de
la Lakeside Holding Co. constituait un droit contractuel (p. 174). À la différence du présent cas, cette affaire
reposait sur un contrat validement formé entre les parties. Elle ne peut donc être invoquée pour soutenir
que les tribunaux interviennent désormais dans les litiges religieux.
131
Ce principe de non-intervention dans les pratiques religieuses a d’ailleurs été l’une des plus
importantes considérations menant à l’adoption de la norme subjective de la croyance sincère (Syndicat
Northcrest c. Amselem, [2004] 2 R.C.S. 551, 2004 CSC 47). Il s’agit d’un principe important car il existe de
multiples circonstances dans lesquelles les tribunaux pourraient être appelés à intervenir dans les conflits
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religieux. Le principe de non-intervention permet d’éviter que les tribunaux aient à trancher entre diverses
normes religieuses ou entre les règles du droit laïques et les normes religieuses. En l’espèce, l’appelante n’a
pas prétendu que ses droits civils étaient brimés par une norme civile émanant du droit positif. Seuls ses
droits religieux sont en cause, et c’est le fait de normes religieuses. Ainsi, l’appelante ne demande pas à être
indemnisée parce qu’elle ne peut se remarier en raison d’une règle civile. C’est une règle de sa religion qui
l’en empêche. Elle ne demande pas à être indemnisée parce que les enfants auxquels elle aurait peut-être
donné naissance n’auraient pas eu les mêmes droits civils que les enfants « légitimes ». En droit canadien
et en droit québécois, tous les enfants — qu’ils soient issus ou non d’un mariage — sont égaux. Le motif
pour lequel l’appelante demande à être indemnisée se heurte à des acquis chers à la société civile. Accorder
la demande de l’appelante met les tribunaux en contradiction avec les lois qu’ils sont chargés de faire
respecter.
132
En effet, il convient de souligner que les conséquences religieuses de l’absence de get ne
priment pas sur le droit laïque. Ni la Loi sur le divorce ni le droit civil n’ont de règles d’exclusion comme
celles qui affectent l’agunah et les mamzerim. Le droit mosaïque — pas plus d’ailleurs que le droit
canonique — n’exerce aucun ascendant sur le droit laïque. La réciproque est également vraie : le droit laïque
n’a aucune autorité sur le droit religieux (Ouellette c. Gingras, [1972] C.A. 247; Despatie; Les curé et
marguilliers de l’œuvre et fabrique de la paroisse de St-Zacharie c. Morin, [1968] C.S. 615; Mathys c.
Demers, [1968] C.S. 172; Bergeron c. Proulx, [1967] C.S. 579). L’État laisse à chacun le soin de
s’autoréglementer en matière religieuse. Il ne revient pas à l’État de faire la promotion d’une norme
religieuse. Cela est laissé aux autorités religieuses.
133
On plaide que d’autres pays sanctionnent la conduite du mari qui omet de consentir au
divorce religieux juif. Il est donc nécessaire de vérifier, au moins sommairement, l’approche générale des
tribunaux étrangers à l’égard de la religion et les mécanismes juridiques utilisés dans ces pays au sujet du
get.
2.2 Le droit comparé
134
La relation entre les règles religieuses et les règles laïques varie beaucoup d’un pays à l’autre
et cela se traduit, pour ce qui est du get, par des solutions qui ne sont pas uniformes. Quatre pays offrent, à
mon avis, des éléments de réflexion pertinents quant à la situation du Québec et du Canada. La France
vient immédiatement à l’esprit, puisque le droit civil québécois a été fortement influencé par le droit français;
il est donc intéressant d’examiner l’approche française en relation avec le get ainsi que les commentaires
que suscitent les arrêts de la Cour de cassation. Je me pencherai aussi sur la situation en Angleterre. Lors de
la Conquête, le Québec a hérité du droit public de ce pays, et les arrêts anglais présentent un intérêt certain.
Je ferai aussi une revue sommaire de quelques décisions rendues aux États-Unis, étant donné que nos pays
partagent des réalités proches et que plusieurs des arrêts de notre Cour se sont, dans le passé, appuyés sur
les solutions jurisprudentielles états-uniennes. J’examinerai ensuite brièvement la situation en Israël, parce
qu’il me semble difficile de parler de la religion juive sans, à tout le moins, évoquer le régime en vigueur
dans cet État.
2.2.1 La France
135
Malgré les idéaux laïques servant de fondement à la révolution française, la France n’a
formellement intégré le principe de la séparation entre l’État et les institutions religieuses dans sa législation
qu’au début du XXe siècle, avec la Loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État
(publiée au Journal officiel du 11 décembre 1905). Cette loi pose le principe de la liberté de religion et de
culte des personnes et des communautés; l’État relâche son emprise sur les institutions religieuses, et cellesci ne peuvent plus intervenir dans le fonctionnement des institutions étatiques.
136
Les tout premiers arrêts reconnaissant le droit à une indemnisation à la suite du refus de
consentir au get sont fondés sur la doctrine de l’abus de droit résultant d’une intention malicieuse du mari
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(L. de Naurois, obs. sous Trib. civ. Metz, 27 avril 1955, Trib. civ. Grenoble, 7 mai 1958, Paris 1re, 4 février
1959, J.C.P. 1960.II.11632; Civ. 2e, 13 décembre 1972, Bull. civ. II, no 320). Subséquemment, la Cour de
cassation énonce que le get constitue pour le mari une simple faculté relevant de sa liberté de conscience et
dont l’abus ne peut donner lieu qu’à des dommages-intérêts; la cour note toutefois le but malicieux des
gestes du mari (Civ. 2e, 21 avril 1982, Bull. civ. II, no 62). L’intention de nuire n’est cependant plus retenue
comme condition dans deux arrêts ultérieurs (Civ. 2e, 5 juin 1985, Bull. civ. II, no 113 et Civ. 2e, 15 juin
1988, Bull. civ. II, no 146). Enfin, dans un arrêt plus récent, la cour réitère que la délivrance du get
constitue pour le mari une simple faculté relevant de sa conscience et dont l’abus ne peut donner lieu qu’à
des dommages-intérêts (Civ. 2e, 21 novembre 1990, D.1991.434).
137
L’évolution du droit français ne se fait pas sans provoquer des critiques. D’une part, certains
affirment qu’il est inexact d’énoncer que la délivrance du get est une simple faculté, et soutiennent que
l’écart de conduite du mari est constitutif de faute délictuelle, que rien ne s’oppose à ce qu’un tribunal
ordonne au mari de délivrer le get ou même qu’il serait « hypocrite » de refuser l’astreinte et que le fait
d’accorder des dommages-intérêts à l’époux lésé revient essentiellement à donner effet à la loi religieuse :
Civ. 2e, 21 novembre 1990, D.1991.434, p. 434-436; E. Agostini, obs. sous Civ. 2e, 5 juin 1985, J.C.P.
1987.II. 20728; C. Larroumet, note sous Civ. 2e, 13 décembre 1972, D.1973.493. D’autre part, on avance
que nier le caractère religieux du get équivaut à faire abstraction du texte qui le dicte, que l’appréciation des
cas où le get doit être délivré échappe à la compétence des tribunaux laïques et qu’il faut se demander s’il
ne s’agit pas d’une obligation purement personnelle liée à l’accomplissement d’un acte religieux : P. Barbier,
« Le problème du “Gueth” » (1987), Gaz. Pal. 484.
138
On constate donc que si, en France, le droit à l’indemnité n’est pas fondé sur le contrat, la
base conceptuelle et les conditions d’ouverture du recours sont loin d’être claires. En somme, pour les uns,
la cour ne va pas assez loin et pour les autres elle va trop loin; quelle que soit cependant la position, il ne
s’agit pas simplement de sanctionner objectivement le délai mis à consentir au get. Le fondement juridique
du recours en dommages-intérêts est tantôt la faute, tantôt l’abus de droit : G. Atlan, Les Juifs et le divorce :
Droit, histoire et sociologie du divorce religieux (2002), p. 231.
2.2.2 L’Angleterre
139
En Angleterre, la principale source de protection de la liberté de religion est l’art. 9 de la
Convention européenne des Droits de l’Homme, 213 R.T.N.U. 221. Dans cette juridiction, les débats sur la
religion portent souvent sur les entraves ou les restrictions pouvant être imposées à l’égard de la pratique ou
de la manifestation de la religion. Le seuil à partir duquel il y a entrave à la liberté de pratique religieuse est
plutôt élevé. Ainsi, dans l’affaire récente de la Chambre des lords, R. (S.B.) c. Governors of Denbigh High
School, [2007] 1 A.C. 100, [2006] UKHL 15, lord Bingham souligne que [TRADUCTION] « il existe toujours
une jurisprudence cohérente et remarquablement constante [dans les institutions de Strasbourg] dont nos
tribunaux nationaux doivent tenir compte et qui montre que l’existence d’une atteinte n’est pas facilement
établie » (par. 24). Il s’est dit d’avis de confirmer la décision de l’établissement d’enseignement lequel avait
exclu une étudiante qui insistait pour porter le jilbab. Lord Bingham a estimé que le code vestimentaire était
très explicite et que la plaignante pouvait fréquenter une autre école. Il n’y avait pas, selon lui, entrave à la
liberté de pratique religieuse dans l’affaire en question. Il a aussi ajouté que, même s’il y avait eu entrave,
elle aurait été justifiée au regard du par. 9(2) de la Convention européenne des Droits de l’Homme. Lord
Bingham a souligné à cet égard que le code vestimentaire avait été élaboré en collaboration et avec
l’approbation de plusieurs institutions des communautés musulmanes.
140
L’omission du mari de consentir au get ne semble pas faire l’objet de sanction distincte de
celles reconnues par le droit de la famille. Elle donne plutôt lieu à une évaluation de ses conséquences sur
l’autonomie financière de l’épouse. Dans Brett c. Brett, [1969] 1 All E.R. 1007 (C.A.), la Cour d’appel a eu à
se pencher sur la demande de pension d’une épouse juive contre son époux, lequel se montrait peu enclin à
lui accorder un get. En décidant du montant de la pension alimentaire que l’époux devait payer à l’épouse, le
tribunal déclara que l’époux pourrait payer une pension réduite s’il accordait le get à son épouse dans un
délai de trois mois. Je tiens toutefois à reproduire les propos suivants de la professeure Adrienne Barnett, à
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cet égard : [TRADUCTION] « bien que la décision dans l’affaire Brett c. Brett ait été jugée acceptable par les
autorités rabbiniques en 1969, elles ne l’acceptent plus et considèrent qu’il s’agit alors d’un get obtenu sous
la contrainte » : A. Barnett, « Getting a “Get” — The Limits of Law’s Authority? » (2000), 8 Fem. Legal Stud.
241, p. 252.
141
L’approche anglaise me paraît compatible avec notre droit de la famille. Si un époux est placé
dans un état de dépendance en raison de la conduite de l’autre époux, le tribunal peut tenir compte de
l’ensemble des circonstances, y compris cet état de dépendance, et attribuer une pension alimentaire en
fonction des ressources et des besoins des parties : Leskun c. Leskun, [2006] 1 R.C.S. 920, 2006 CSC 25,
par. 20-21.
2.2.3 Les États-Unis
142
Aux États-Unis, la liberté de religion est protégée par le Premier amendement à la
Constitution : [TRADUCTION] « Le Congrès ne pourra faire aucune loi concernant l’établissement d’une
religion ou interdisant son libre exercice . . . ». Cet amendement comporte deux volets : le premier prohibe
la promotion d’une religion; le deuxième permet à tout individu d’exercer librement sa liberté de croyance et
sa liberté d’agir selon sa conscience. Aux États-Unis, les tribunaux ne peuvent interpréter les lois religieuses
ni s’ingérer dans l’exercice de la religion : Serbian Eastern Orthodox Diocese for the United States of America
and Canada c. Milivojevich, 426 U.S. 696 (1976).
143
Les tribunaux de l’État de New York ont été saisis d’affaires concernant le get. Comme cet
État compte une imposante communauté juive orthodoxe, le problème social de l’agunah semble important :
K. Greenawalt, « Religious Law and Civil Law : Using Secular Law to Assure Observance of Practices with
Religious Significance » (1998), 71 S. Cal. L. Rev. 781, p. 812. Plusieurs dispositions législatives régissent
spécifiquement le get dans cet État. Par exemple, l’art. 253 du Domestic Relations Law, N.Y. Stat. (1980),
prévoit qu’une partie qui intente des procédures en divorce doit certifier qu’il n’existe pas d’empêchement au
remariage. Depuis 1993, le juge peut aussi tenir compte de toute barrière au remariage lors du partage des
actifs et de la fixation de la pension alimentaire. Le gouverneur de l’État de New York avait d’ailleurs
déclaré, lors des modifications de 1993, que [TRADUCTION] « [c]e projet de loi a été adopté à une majorité
écrasante par l’assemblée législative, parce qu’il s’attaque à une situation terriblement injuste, presque
universellement reconnue comme telle » : B. Benjamin, « Judaism and the Laws of Divorce » (2002), dans J.
Shirley, dir., UCL Jurisprudence Review 2001 177.
144
Les tribunaux new-yorkais s’inspirent des principes sous-jacents à ces dispositions pour
invoquer l’équité et prévenir l’utilisation du get par le mari comme moyen de contraindre son épouse à lui
accorder des avantages. Dans Schwartz c. Schwartz, 583 N.Y.S.2d 716 (Sup. Ct. 1992), la Cour suprême a
ainsi appliqué la théorie du « plaideur irréprochable » (« clean hands ») pour refuser à un époux le partage
égal des biens, parce que le refus de ce dernier d’accorder le get était inacceptable (voir Greenawalt).
145
Dans Giahn c. Giahn, (NY Sup. Ct., avril 2000, citée dans Benjamin, p. 188), la Cour suprême
de l’État de New York a réprimé l’utilisation du get pour contraindre une femme à accorder des concessions.
La cour s’est fondée sur la décision rendue dans l’affaire Schwartz pour décider que le refus de l’époux
d’accorder le get en l’espèce était inacceptable. Pour compenser cet abus, tous les biens du mariage ont été
attribués à l’épouse.
146
Un tribunal de l’État de New York a aussi reconnu force exécutoire à une entente de
séparation et au contrat de mariage juif (ketubbah) tout comme il l’aurait fait pour un contrat de mariage
séculier. Dans Avitzur c. Avitzur, 459 N.Y.S.2d 572 (1983), le tribunal a fait respecter l’engagement des
époux à comparaître devant le beth din. Dans ses motifs, interprétant la ketubbah signée par les parties, la
Cour d’appel de New York a souligné que la cause [TRADUCTION] « peut être tranchée en appliquant
uniquement les principes neutres du droit des contrats, sans se référer à aucun principe religieux »
(p. 574-575). L’approche de ce tribunal repose sur le fait que la décision d’accorder le get n’est pas un acte
religieux. Selon ce tribunal, l’acte d’accorder le get revêt un caractère séculier, puisque [TRADUCTION] « ...
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les dispositions de la ketoubbah invoquées par la demanderesse ne constituent rien de plus qu’une entente
prévoyant le renvoi d’une affaire de divorce religieux devant un forum non judiciaire » (Avitzur, p. 574).
147
Dans une affaire plus récente au New Jersey, Segal c. Segal, 650 A.2d 996 (N.J. Super. Ct.
1994), la Cour supérieure a invalidé une entente de séparation signée par les deux parties parce que
l’épouse l’avait signée sous la menace de ne pas se voir accorder le get.
148
L’approche des tribunaux new-yorkais ne saurait être adoptée au Canada sans nuance.
D’abord, les dispositions législatives de cet État vont plus loin que ne le fait l’art. 21.1 de notre Loi sur le
divorce, lequel autorise uniquement le rejet des actes de procédures de l’époux qui a fait défaut de
supprimer un obstacle au remariage religieux. Ensuite, en l’espèce, les parties se sont entendues pour ne
pas utiliser l’art. 21.1 dans le contexte de la question de la compétence des tribunaux pour entendre le litige.
Il me semble que l’utilisation de la jurisprudence de l’État de New York aurait pour effet de réintroduire dans
le débat un argument que les parties ont convenu de ne pas utiliser à cette fin. De plus, le large caractère
équitable reconnu aux dispositions législatives de l’État de New York, sur la base de règles de portée plus
étendue que les nôtres, ne peut être transposé au Canada. Plus spécifiquement, notre loi sur le divorce a
écarté depuis 1985 la notion de faute dans l’appréciation des ressources et des besoins des époux dans le
contexte de la contribution alimentaire. La théorie du plaideur irréprochable ne saurait donc être invoquée.
Au surplus, les arrêts qui donnent force exécutoire à un engagement de se présenter devant le tribunal
rabbinique semblent fondés sur la prémisse qui a été retenue dans Avitzur et suivant laquelle le get est un
acte laïque. La preuve au dossier dans la présente affaire est à l’effet contraire. Par ailleurs, dans les cas où
la décision est fondée sur l’absence de consentement éclairé ou sur l’état de dépendance d’une partie, un
rapprochement avec le droit canadien est possible.
2.2.4 Israël
149
Le cas de l’Israël est unique en raison du rôle fondamental que joue la religion juive dans cet
État. La liberté de conscience, de croyance, de religion, et de culte est garantie à chaque individu en Israël :
Temple Mount Faithful c. Jerusalem District Police Commander, H.C. 292/83, 38(2) P.D. 449. De plus, la
Foundations of Law Act 1980, 5741-1981, 34 L.S.I. 181 (1979-80), permet explicitement aux tribunaux
d’utiliser le droit religieux juif pour pallier les lacunes dans les textes de loi :
[TRADUCTION] Lorsque le tribunal saisi d’une question de droit ne trouve aucune réponse à
celle-ci soit dans les lois ou la jurisprudence, soit par analogie, il doit la trancher au regard des
principes de liberté, de justice, d’équité et de paix dont a hérité Israël.
Dans le contexte de cette loi, le mot « Israël » s’entend du judaïsme et du peuple juif : R. Lapidoth, «
Freedom of Religion and of Conscience in Israel » (1998), 47 Cath. U. L. Rev. 441, p. 444. Les tribunaux
peuvent aussi déterminer les limites de la religion juive elle-même. Ainsi, dans Yosifof c. Attorney General,
Cr. A. 112/50, le tribunal a jugé que l’interdiction juridique de la pratique de la bigamie n’enfreignait pas la
liberté de religion d’un homme juif membre d’une communauté particulière, puisque cette pratique n’était
pas obligatoire aux termes de la religion juive.
150
Le domaine du droit de la famille est particulier en Israël. Bien que leurs décisions soient
assujetties au pouvoir de révision de la Haute Cour de justice israélienne, les tribunaux rabbiniques ont
compétence exclusive sur les affaires de mariage et de divorce : P. Shifman, « Family Law in Israel : The
Struggle Between Religious and Secular Law » (1990), 24 Isr. L.R. 537, p. 543.
151
Les tribunaux rabbiniques hésitent souvent à ordonner à un époux d’accorder un get à son
épouse. Plusieurs se disent impuissants à contraindre l’attribution du get, même dans une situation où
l’époux a clairement enfreint la loi juive : H. L. Capell, « After the Glass Has Shattered : A Comparative
Analysis of Orthodox Jewish Divorce in the United States and Israel » (1998), 33 Tex. Int’l L.J. 331, p. 342.
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152
Cependant, dans une affaire plus récente, Jane Doe c. John Doe, un tribunal de la famille
(Jérusalem 19270/03, 21 décembre 2004), a admis qu’une épouse lésée par le défaut du mari de consentir
au get pouvait recevoir une compensation pécuniaire.
153
Il me paraît clair que les liens étroits entre la religion, la société civile et la compétence des
tribunaux sur les affaires religieuses distinguent clairement l’État d’Israël du Canada. Du fait de cette
compétence, les solutions adoptées dans ce pays ne peuvent pas être importées au Canada sans tenir
compte des lois et du contexte canadiens.
2.2.5 Conclusion sur le droit comparé
154
Le survol des solutions retenues dans les quatre pays examinés permet de mettre en relief
que certaines d’entre elles sont déjà ouvertes aux justiciables québécois et canadiens. Plusieurs autres, par
contre, se heurtent à l’existence de règles différentes au Canada. Ainsi, la solution française fondée sur la
faute ou l’abus de droit n’est pas écartée, mais, d’une part, tel n’est pas le fondement du recours de
l’appelante et d’autre part, les conditions d’application de la doctrine de l’abus de droit au Québec ne sont
pas nécessairement les mêmes qu’en France. Il me paraît impossible dans les circonstances de la présente
affaire de trouver quelque inspiration dans le modèle français. Par ailleurs, bien que compatible avec notre
droit, la solution adoptée en Angleterre dans l’affaire Brett n’est pas applicable en l’espèce, puisque
l’appelante dit avoir subi des dommages moraux et non avoir été placée dans une situation de dépendance
pécuniaire. Les décisions américaines qui tiennent compte de l’état de dépendance de la femme peuvent
elles aussi être utiles, mais il faut écarter celles qui reposent sur un objectif punitif. Par ailleurs, le cas
d’Israël est unique, mais il est pertinent simplement en ce qu’il révèle que, même dans un contexte d’interrelation étroite de l’État avec la religion, une seule décision reconnaît la possibilité pour les tribunaux civils
d’accorder une compensation pécuniaire en cas de défaut de consentir au get.
155
Après examen, je conclus que, dans les pays dont le droit se rapproche le plus du nôtre, le
problème du get relève des règles internes de droit privé. Les solutions sont très variées. Les décisions
étrangères reposent sur les mécanismes propres à chaque pays. On n’y retrouve pas un principe de droit
public qui aurait une force persuasive telle que les tribunaux canadiens devraient modifier leur approche. Les
solutions canadiennes mentionnées précédemment sont prudentes et suffisantes.
156
Ceci dit, l’appelante a fondé sa demande sur le droit des contrats. C’est d’ailleurs sous cet
angle que l’affaire a été jugée, tant en première instance qu’en appel. Il reste maintenant à examiner cette
question.
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2.3 Le droit privé : le recours contractuel
157
La clause en litige figure dans une entente sur les mesures accessoires incorporée à un
jugement qui ordonne aux parties de se conformer à leurs engagements. Les ordonnances concernant les
mesures accessoires au divorce et à la séparation des biens des parties sont régies par la Loi sur le divorce
et, au Québec, par le Code civil du Québec, L.Q. 1991, ch. 64 (« Code civil »). Avant de se pencher sur les
règles régissant les contrats en droit civil québécois, il convient d’examiner la nature des ententes sur les
mesures accessoires en général.
2.3.1 Les ententes sur les mesures accessoires
158
En vertu des art. 15.1 et 15.2 de la Loi sur le divorce, le tribunal compétent — en l’occurrence
la Cour supérieure — peut rendre une ordonnance enjoignant à un époux de verser une prestation pour les
aliments de l’autre époux ou des enfants à charge. L’article 16 de la Loi sur le divorce autorise quant à lui le
tribunal à rendre une ordonnance relative à la garde des enfants ou à l’accès auprès de ceux-ci. De plus, en
vertu du droit de la famille québécois, lors de la séparation ou du divorce, le tribunal partage les droits
résultant du patrimoine familial, attribue, s’il y a lieu, une prestation compensatoire et règle les droits
résultant du régime matrimonial et du contrat de mariage. La tâche du tribunal peut être facilitée par la
préparation d’une entente faisant état des modalités dont conviennent les parties. Avant de prononcer son
ordonnance, le tribunal s’assure de la conformité des engagements des parties aux principes de la Loi sur le
divorce et du droit de la famille québécois. Il peut arriver que les parties incorporent à une entente sur les
mesures accessoires des engagements qui ne sont pas liés à leurs obligations familiales découlant de la Loi
sur le divorce ou du droit de la famille québécois. Dans de tels cas, ces engagements ne sont pas, à
proprement parler, des mesures accessoires au divorce et à la séparation.
159
Lorsqu’une mesure accessoire au divorce ou à la séparation est incorporée dans une
ordonnance prononcée par la Cour supérieure, la partie créancière d’une telle obligation n’est tenue à
aucune autre formalité avant de pouvoir en demander l’exécution forcée. En d’autres mots, aucune action
distincte n’est requise pour obtenir l’exécution d’une entente sur une prestation alimentaire incorporée dans
un jugement de la Cour supérieure qui ordonne au débiteur de se conformer à son engagement. De même,
le débiteur qui ne se conforme pas à un engagement non pécuniaire qui découle de la Loi sur le divorce ou
du droit de la famille québécois s’expose à une condamnation pour outrage au tribunal.
160
D’ailleurs, il est prohibé d’intenter une action distincte pour faire sanctionner le non- respect
d’une mesure accessoire au divorce qui fait l’objet d’une ordonnance. Ainsi, la contravention par le parent
gardien à son engagement à faciliter les visites du parent non gardien ne peut donner lieu à une action en
dommages-intérêts. Dans l’arrêt Frame c. Smith, [1987] 2 R.C.S. 99, le père réclamait des dommagesintérêts, alléguant avoir dû supporter des frais considérables et avoir souffert de problèmes émotionnels en
raison des entraves créées par la mère et son nouvel époux pour faire obstacle aux rapports qu’il voulait
entretenir avec les enfants. La mère avait notamment changé le nom de famille des enfants et leur religion
et nié que l’ex-époux était le père de ceux-ci. La Cour a néanmoins conclu que, en ce qui a trait aux droits
découlant de la Loi sur le divorce et des lois provinciales régissant les conséquences de la séparation et du
divorce, les recours sont limités aux régimes adoptés par le Parlement et les assemblées législatives
provinciales (p. 112). Si la clause 12 était considérée comme une mesure accessoire au divorce, aucune des
parties ne pourrait l’invoquer pour intenter un recours distinct devant les tribunaux civils.
161
L’engagement de se présenter devant les autorités rabbiniques n’est cependant pas relié aux
droits et obligations découlant de la Loi sur le divorce ou du Code civil. Son incorporation à l’entente sur les
mesures accessoires n’en fait pas un droit ou une obligation prévus par la Loi sur le divorce ou le Code civil
et n’en fait pas, de ce seul fait, une mesure accessoire au divorce. Si la clause 12 peut fonder un recours
distinct, ce n’est pas du fait de son incorporation dans l’entente sur les mesures accessoires. Elle doit être
considérée comme une clause autonome. Pour fonder un recours civil distinct, la clause doit satisfaire aux
exigences du droit civil. Comme le dossier émane de la province de Québec, le droit applicable est le droit
civil des contrats et non la common law.
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2.3.2 Les conditions de formation du contrat
162
En 1989, au moment où l’action en dommages-intérêts a été intentée, le droit civil québécois
était régi par le Code civil du Bas Canada (« C.c.B.C. »). Les règles du droit transitoire prévoient que les
instances en cours continuent d’être régies par le C.c.B.C. (art. 9 de la Loi sur l’application de la réforme du
Code civil, L.Q. 1992, ch. 57). C’est donc principalement à ces dispositions que je me reporterai pour
évaluer la position avancée par l’appelante. Je me référerai aussi au Code civil du Québec lorsque les
nouvelles règles précisent le droit sans modifier la substance du C.c.B.C., ce qui est le cas pour la majorité
des règles de formation du contrat, plus particulièrement celles ayant trait à l’objet du contrat.
163
En l’espèce, l’appelante soutient que l’intimé est tenu de payer des dommages-intérêts en
raison d’un manquement à une obligation découlant de la clause 12. L’obligation est ainsi décrite à l’art. 982
C.c.B.C. :
982. Il est de l’essence d’une obligation qu’il y ait une cause d’où elle naisse, des
personnes entre qui elle existe, et qu’elle ait un objet.
164
Cette disposition est complétée par l’art. 983 C.c.B.C., qui précise les situations juridiques
donnant naissance aux obligations :
983. Les obligations procèdent des contrats, des quasi-contrats, des délits, des quasidélits, ou de la loi seule.
165
L’appelante soutient que le contrat est la source de laquelle procède l’obligation. Aucune autre
situation juridique n’a été invoquée ou même discutée. Il est donc important de déterminer si, en droit
québécois, la clause 12 constitue un contrat. Pour ce faire, il faut se reporter aux conditions de « validité »
du contrat. Selon l’art. 984 C.c.B.C., le contrat, doit respecter quatre conditions :
984. Quatre choses sont nécessaires pour la validité d’un contrat :
Des parties ayant la capacité légale de contracter;
Leur consentement donné légalement;
Quelque chose qui soit l’objet du contrat;
Une cause ou considération licite.
166
Il ne fait aucun doute que l’engagement a été souscrit par les deux parties. Les parties
avaient la capacité légale de contracter et elles ont donné leur consentement. Les deux autres conditions de
formation — la cause et l’objet — requièrent cependant un examen plus approfondi.
167
La notion de cause n’est pas définie dans le C.c.B.C., mais elle l’est dans le Code civil. Selon
les Commentaires du Ministre publiés lors de l’adoption du Code civil, la définition donnée à l’art. 1410 C.c.Q.
est celle qui était retenue par la doctrine et la jurisprudence lors de la réforme. Voici le texte de l’art. 1410
du Code civil :
1410. La cause du contrat est la raison qui détermine chacune des parties à le conclure.
168
Les auteurs reconnaissent un aspect objectif à la cause du contrat. C’est l’élément qui justifie
l’existence du contrat. Pour chacune des parties, la cause objective du contrat serait l’engagement de l’autre
partie. Cette information est toutefois peu utile. En effet, dans un contrat synallagmatique, la cause,
identifiée comme l’engagement de l’autre partie, n’aide en rien à l’analyse de la validité du contrat. C’est
surtout l’aspect subjectif qui est pertinent. Il s’agit du motif qui pousse une partie à s’engager. Qu’elle soit
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vue sous son aspect objectif ou subjectif, la cause n’a pas à être mentionnée au contrat. Suivant le texte de
l’art. 984 C.c.B.C. (« une cause ou considération licite »), les tribunaux ne s’intéressent à la cause du contrat
que lorsque sa licéité est contestée. En effet, si, capables et consentantes, les parties conviennent d’une
opération juridique, on peut inférer qu’un motif les guide. Seule la licéité de ce motif doit être contrôlée. (D.
Lluelles et B. Moore, Droit des obligations (2006), par. 1066 et suiv.)
169
Le lien rattachant la cause du contrat à une religion n’entache pas l’existence du contrat.
Ainsi, l’engagement d’une personne à verser à sa communauté religieuse une somme d’argent déterminée
peut être fondé sur diverses raisons, la plus élémentaire étant la volonté de contribuer à la santé financière
d’une institution. En ce sens, il est exact de dire qu’un contrat ayant une cause religieuse peut être valide.
Il n’y a rien d’illicite à être mû par un motif religieux lorsqu’on contracte. Il ne faut cependant pas confondre
la cause avec l’objet du contrat, comme l’a fait le juge de première instance et, avec égards, comme le font
les juges de la majorité.
170
La quatrième condition de formation du contrat est l’existence d’un objet. C’est cette
condition qui, selon l’intimé, fait défaut. Le Code civil reprend le droit antérieur en le précisant. L’article
1412 est rédigé ainsi :
1412. L’objet du contrat est l’opération juridique envisagée par les parties au moment de
sa conclusion, telle qu’elle ressort de l’ensemble des droits et obligations que le contrat fait
naître.
171
L’objet du contrat, précise l’art. 1412, est l’opération juridique que les parties envisagent au
moment de la conclusion du contrat. À cette étape, c’est l’ensemble de l’opération qui fait l’objet de l’examen
et non les seules obligations auxquelles les parties sont tenues. L’identification de l’objet du contrat est
important parce que seul l’objet permet de déterminer la nature de l’opération juridique sur laquelle les
parties s’entendent. Contrairement à ce qu’affirment les juges de la majorité, le contrôle de l’objet ne
consiste pas simplement à vérifier s’il y a contravention à l’ordre public (art. 1413 du Code civil). Lluelles et
Moore, dans leur traité sur le droit des obligations, précisent même que l’utilité première de l’objet du
contrat est de permettre de s’assurer de l’existence même du contrat (par. 1054) :
L’Avant-projet de loi de 1987 sur les obligations était très explicite à cet égard, lorsque son
article 1455 déclarait nul « le contrat qui n’a pas pour objet quelque opération juridique
envisagée par les parties au temps de sa conclusion [...] ». Même si l’article 1413 C.c.Q. n’a pas
repris cette précision, se contentant de frapper de nullité le contrat dont l’objet est illicite, la
solution est strictement la même : en effet, l’objet du contrat est bien présenté par le second
alinéa de l’article 1385 comme un des éléments de formation des contrats, au même titre que
le consentement et la capacité des contractants. La conformité de l’objet du contrat à l’ordre
public n’est donc pas la seule source de contentieux en ce qui concerne l’objet : l’inexistence
même de cet objet, comme élément de l’entente, peut remettre en cause la conclusion d’un
contrat. [En italique dans l’original.]
Voir aussi V. Karim, Les obligations (2e éd. 2002), vol. 1, p. 279, art. 1412.
172
La question de la contravention à l’ordre public n’a d’ailleurs pas été invoquée par l’intimé au
soutien de son argument fondé sur l’inexistence du contrat. Elle n’a été soulevée que dans le contexte de
l’argument de droit public. Il soutenait que de le condamner à des dommages-intérêts pour le seul motif
qu’il aurait exercé sa liberté de religion serait contraire à l’ordre public (mémoire de l’intimé, par. 123). Cette
notion d’ordre public ne serait donc pertinente que pour étudier cet argument particulier, ce qui n’est pas
nécessaire en l’espèce.
173
L’identification de l’objet du contrat ne se limite donc ni à déterminer l’objet de chacune des
obligations ni à vérifier la licéité de l’opération juridique. Le juge doit pouvoir déterminer si les parties se
sont engagées dans un mécanisme qui correspond à une opération juridique. Ainsi, la Cour d’appel du
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Québec, dans Christiaenssens c. Rigault, [2006] J.Q. no 5765 (QL), 2006 QCCA 853, par. 46, n’a pu que
constater l’inexistence du contrat, faute de pouvoir identifier l’opération juridique envisagée par les parties.
174
Quelle est l’opération envisagée dans la présente affaire? Les parties ont envisagé d’obtenir
un divorce religieux. Considérés dans leur ensemble, les engagements mutuels de se présenter devant les
autorités rabbiniques pour les fins du divorce religieux avaient pour but d’obtenir le divorce religieux. Est-ce
une opération juridique? Une opération juridique implique un mécanisme susceptible de qualification
juridique; cette opération doit pouvoir emporter des conséquences juridiques. Une opération juridique est,
par exemple, une vente, un service, une location ou un prêt. Ici, de quoi s’agit-il? L’obtention d’un divorce
religieux n’est pas susceptible de qualification juridique. Les autorités rabbiniques ne sont pas chargées du
divorce civil, comme le sont, pour le mariage, certaines autorités religieuses. Le geste qu’elles posent ou le
jugement qu’elles rendent n’est pas reconnu par le droit civil. Ni les engagements à consentir à un divorce
religieux ni le divorce religieux lui-même n’ont de conséquence civile. Je dois donc inférer que, dans
l’entente sur les mesures accessoires, à la clause 12, les parties ne conviennent d’aucune opération
reconnue en droit civil. Comme les parties n’envisageaient pas une opération juridique, il faut conclure que
l’un des éléments essentiels à la formation du contrat est inexistant.
175
L’engagement à comparaître devant les autorités religieuses ne constitue donc pas un contrat
comme le prétend l’appelante et comme l’acceptent les juges de la majorité. Mais, si cet engagement ne
découle pas d’un contrat, qu’est-ce que les parties ont fait en convenant de la clause 12? Quel est la nature
juridique de cet engagement? En l’espèce, au même titre que l’engagement à aller régulièrement à l’église, à
la synagogue ou à la mosquée, l’engagement à se présenter devant les autorités rabbiniques pour le divorce
religieux relève uniquement d’un devoir de conscience. La Cour d’appel a donc eu raison de considérer que
l’engagement prévu à la clause 12 est purement moral et n’est pas susceptible d’exécution civile.
176
Par conséquent, l’inclusion dans l’entente sur les mesures accessoires de l’engagement de se
présenter devant les autorités rabbiniques ne pouvait tout au plus, comme le souligne avec raison la Cour
d’appel, qu’être considéré comme un engagement moral. Par ailleurs, même si l’engagement moral avait
donné ouverture à une action en justice, la détermination de la réparation susceptible d’être accordée aurait
été problématique. C’est de cette question dont je vais traiter maintenant.
2.3.3 Les dommages-intérêts
177
Devant notre Cour, sans préciser les chefs de réclamation, l’appelante demande d’augmenter
à 400 000 $ le montant des dommages-intérêts que le juge de première instance a accordés. La réparation
demandée par l’appelante pose des problèmes. J’en ai déjà traité sous un autre angle et je n’y reviens donc
que brièvement.
178
Premièrement, les dommages-intérêts réclamés par l’appelante découlent de son adhésion à
des préceptes religieux identifiés. Autant en droit canadien qu’en droit québécois, la liberté de religion est
reconnue comme une valeur fondamentale. Elle peut servir de fondement pour revendiquer un traitement
égal dans la société civile. Elle n’a cependant pas encore été reconnue comme moyen de contraindre une
autre personne à accomplir un acte religieux ni les tribunaux utilisés pour sanctionner le défaut d’accomplir
un acte religieux.
179
Deuxièmement, l’argument sur lequel l’appelante fonde sa position oblige à reconnaître une
situation juridique contraire aux règles du droit de la famille canadien et québécois. Il ressort de la preuve
que, en l’absence de divorce religieux, une femme de confession juive orthodoxe ne peut fréquenter d’autres
hommes en vue d’un mariage, ni avoir de relations sexuelles hors du mariage, et que tout enfant né de
telles relations est considéré comme illégitime (mamzer) (témoignage du rabbin Mendel Epstein, dossier de
l’intimé, p. 904-905 et 930). En droit de la famille canadien et québécois, une femme est libre de se remarier
sans le consentement de son ex-mari. Les enfants — qu’ils soient issus ou non d’un mariage — sont traités
de façon égale. Sanctionner la loi religieuse, par exemple en ordonnant le paiement de dommages-intérêts
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parce que les enfants seraient considérés comme des mamzerim ou parce que l’appelante n’aurait pas été
libérée de son mariage malgré le prononcé du divorce, reviendrait à imposer une règle incompatible avec les
droits que les tribunaux laïques ont par ailleurs la responsabilité de faire reconnaître.
180
En résumé, le droit des contrats ne peut pas être invoqué pour obtenir l’exécution d’un
engagement religieux. En effet, ni les règles de formation du contrat ni celles qui régissent les
conséquences de la violation des obligations ne peuvent servir de véhicule pour sanctionner la violation d’un
précepte religieux. Les engagements envisagés ne constituent pas une opération juridique. La clause 12 ne
peut pas, juridiquement, être qualifiée de contrat. Elle constitue un engagement purement moral. De plus,
l’évaluation des dommages-intérêts obligerait le tribunal à mettre en œuvre une règle du droit religieux qui
n’est pas de son ressort et qui porte atteinte à la loi laïque qu’il est constitutionnellement chargé d’appliquer.
3. Conclusion
181
La réserve manifestée par les tribunaux civils canadiens à l’endroit des questions religieuses
leur permet non seulement de limiter leur action aux règles qu’ils sont explicitement chargés d’appliquer,
mais elle leur permet aussi de conserver une neutralité qui est indispensable dans une société pluraliste et
multiculturelle. Elle permet aux tribunaux de s’attacher au respect de la norme civile, sans avoir à trancher
entre diverses coutumes ou pratiques.
182
Il a fallu des siècles à l’État canadien pour en arriver à l’équilibre encore précaire que nous
connaissons. Au Québec, le passage à la neutralité de l’État est même qualifié de Révolution tranquille.
Attacher un opprobre à un enfant né hors du mariage ne serait-il pas glisser dans une sorte de « Régression
tranquille »? Le rôle des tribunaux ne peut être modifié sans remettre en cause les fondements de la relation
entre l’État et la religion. La majorité suggère de procéder au cas par cas. À mon avis, il s’agit d’une
approche à courte vue. Le Canada ouvre ses portes à toutes les religions. Toutes ont droit à la même
protection, mais non, selon moi, à la fourniture d’armes.
183
Bien que, à l’instar de la Cour d’appel, je sois sensible à la difficulté pour la communauté juive
de modifier les règles du divorce religieux, il n’en demeure pas moins que les tribunaux sont limités à se
saisir de litiges qui prennent leur source dans le droit positif. Nous sommes en présence d’un cas où le
religieux et le civil s’affrontent. À mon avis, le problème relève du droit hébraïque. Je ne vois aucune raison
de changer, pour le présent cas, la règle claire qui veut que le religieux ne constitue pas, au Canada, une
source autonome de droit.
184
Je conclus en soulignant que l’approche réservée des tribunaux canadiens face aux préceptes
religieux est, à mon avis, saine. Les droits civils naissent du droit positif, non du droit religieux. Si la
violation d’un engagement religieux correspond aussi à la violation d’une obligation civile, les tribunaux
peuvent jouer leur rôle civil. Les tribunaux ne doivent cependant pas être placés dans une situation où ils
doivent sanctionner la violation des droits religieux. Les tribunaux ne peuvent utiliser leur pouvoir laïque
pour pénaliser le refus de consentir au get, le non-paiement du mahr islamique, le refus d’élever les enfants
dans une confession donnée, le refus de porter le voile, le non-respect des fêtes religieuses, etc. Limiter le
rôle des tribunaux à l’application de la règle civile est la position la plus claire et la plus compatible avec la
neutralité de l’État en droit canadien et québécois. On prête à Gandhi d’avoir dit que chacun est responsable
de sa religion. Cette responsabilité va de pair avec la neutralité de l’État face aux préceptes religieux et
milite, en l’espèce, en faveur du rejet de la demande de l’appelante.
185
Pour ces motifs, j’aurais rejeté l’appel.
Pourvoi accueilli avec dépens, les juges DESCHAMPS et CHARRON sont dissidentes.
Procureurs de l’appelante : Stein & Stein, Montréal; Davies Ward Phillips & Vineberg, Montréal.
Procureurs de l’intimé : Goldwater, Dubé, Westmount.
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Procureurs de l’intervenante : Paliare, Roland, Rosenberg, Rothstein, Toronto.
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USA
Secretariat d'Etat
2007 Report on International Religious Freedom
September 14, 2007
Released by the Bureau of Democracy, Human Rights and Labor
Extrait
France
The Constitution provides for freedom of religion, and the Government generally respected this right in
practice; however, some religious groups remain concerned about legislation passed in 2001 and 2004,
which provided for the dissolution of groups under certain circumstances and banned the wearing of
conspicuous religious symbols by public school employees and students. A 1905 law on the separation of
religion and state prohibits discrimination on the basis of faith.
Government policy continued to contribute to the generally free practice of religion. A law prohibiting the
wearing of conspicuous religious symbols in public schools by employees and students entered into force in
September 2004. Despite significant efforts by the Government to combat anti-Semitism, anti-Semitic
attacks increased during 2006, with a marked increase in violent acts. The Government has a stated policy
of monitoring potentially "dangerous" cult activity through the Inter-Ministerial Monitoring Mission against
Sectarian Abuses (MIVILUDES). Some groups expressed concern that MIVILUDES publications contributed to
public mistrust of minority religions. Some groups also expressed concern with a government report focusing
on dangers that cults pose to minors.
Anti-Semitic acts increased by 6 percent in 2006, and violent incidents rose more sharply, from 99 in 2005 to
134 in 2006, according to the National Consultative Commission for Human Rights (NCCHR). There were 42
violent acts directed against the North African community in 2006, down from 64 in 2005. Of these
incidents, 11 were explicitly anti-Islamic in nature, targeting mosques, cemeteries, or individuals.
Government leaders, religious representatives, and nongovernmental organizations (NGOs) continued to
strongly criticize anti-Semitic and racist violence, and the Government provided increased security for Jewish
institutions.
The U.S. Government discusses religious freedom issues with the Government as part of its overall policy to
promote human rights. On May 13-16, 2007, the Special Envoy for Combating Anti-Semitism visited and met
with government officials and representatives from various religious communities as part of an ongoing
effort to assess and to support international efforts against anti-Semitism.
Section I. Religious Demography
The country has an area of 211,209 square miles and a population of 63.71 million.
In accordance with its definition of separation of state and religion, the Government does not keep statistics
on religious affiliation. According to a January 2007 poll, 51 percent of respondents indicate they are
Catholic, even if they never attend religious services. Another 31 percent of those polled state that they have
no religious affiliation. Among Catholics, only 8 percent attend Mass weekly, one third do so "occasionally,"
and 46 percent attend "only for baptisms, weddings, and funerals." Only 52 percent of declared Catholics
believe that the existence of God is "certain or possible." There are an estimated five to six million
individuals of Muslim origin in the country (8 to 10 percent of the population), although estimates of how
many of these are practicing vary widely. According to a 2004 survey, 36 percent of Muslims identify
themselves as regularly observing traditional rites and practices. However, according to press reports of a
September 2006 poll, 88 percent of Muslim respondents report that they were observing the Islamic holy
month of Ramadan, a marked increase over previously recorded levels of observance. According to press
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reports, there are more than 2,000 mosques in the country. Protestants make up 3 percent of the
population, the Jewish and Buddhist faiths each represent 1 percent, and those of the Sikh faith less than 1
percent.
The Jewish community numbers approximately 600,000. According to press reports, at least 60 percent of
Jews are not highly observant, celebrating at most only the High Holy Days. The large majority of observant
Jews are Orthodox. There are small Conservative and Reform congregations as well.
Jehovah's Witnesses reported that 250,000 persons attend their services either regularly or periodically.
Orthodox Christians number between 80,000 and 100,000; the vast majority are associated with the Greek
or Russian Orthodox Church.
Other religions present in the country include Evangelicals, Christian Scientists, and the Church of Jesus
Christ of Latter-day Saints (Mormons). Membership in evangelical churches is growing (with as many as
400,000 adherents, according to February 2007 press reports), including African-style "prosperity" churches
especially in the suburbs of Paris, in large part because of increased participation by African and Antillean
immigrants. According to the press, there are approximately 31,000 Mormons. The Church of Scientology
has an estimated 5,000 to 20,000 members.
Section II. Status of Religious Freedom
Legal/Policy Framework
The Constitution provides for freedom of religion, and the Government generally respected this right in
practice. A long history of conflict between religious groups and between the Church and the Republic led
the state to break its ties to the Catholic Church early in the last century and adopt a strong commitment to
maintaining a totally secular public sector. The 1905 law on the separation of religion and state, the
foundation of existing legislation on religious freedom, prohibits discrimination on the basis of faith. Of the
country's 10 national holidays, 5 are Christian holy days.
Religious organizations are not required to register but may apply for tax-exempt status or gain official
recognition if they so wish. The Government defines two categories under which religious groups may
register: associations cultuelles (associations of worship, which are exempt from taxes) and associations
culturelles (cultural associations, which are normally not exempt from taxes). Associations in these two
categories are subject to certain management and financial disclosure requirements. An association of
worship may organize only religious activities, defined as liturgical services and practices. A cultural
association may engage in profit-making activity. Although a cultural association is not exempt from taxes, it
may receive government subsidies for its cultural and educational operations, such as schools. Religious
groups normally register under both of these categories; the Mormons, for example, run strictly religious
activities through their association of worship and operate a school under their cultural association.
Under the 1905 statute, religious groups must apply to the local prefecture to be recognized as an
association of worship and to receive tax-exempt status. The prefecture reviews the submitted
documentation regarding the association's purpose for existence. There is a process by which groups may
appeal the initial decision of a prefecture. To qualify, the group's sole purpose must be the practice of some
form of religious ritual. Printing publications, employing a board president, or running a school may
disqualify a group from tax-exempt status.
According to the Ministry of the Interior, 109 of 1,138 Protestant associations, 15 of 147 Jewish associations,
and approximately 30 of 1,050 Muslim associations have tax-free status. Approximately 100 Catholic
associations are tax-exempt; a representative of the Ministry of Interior reports that the number of non-taxexempt Catholic associations is too numerous to estimate accurately. More than 50 associations of the
Jehovah's Witnesses have tax-free status.
According to the 1905 law, associations of worship are not taxed on the donations that they receive.
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However, the prefecture may decide to review a group's status if the association receives a large donation or
legacy that comes to the attention of the tax authorities. If the prefecture determines that the association is
not in fact in conformity with the 1905 law, its status may be changed, and it may be required to pay taxes
at a rate of 60 percent on present and past donations.
On October 17, 2006, the head of the Interior Ministry's Office for Religious Affairs, Didier Leschi, testified
before Parliament about the use of tax advantages to combat "sectarian deviance," which he specified as
violent and suicidal acts; inhumane treatment of children and adolescents, particularly victimization of young
women by confinement; denial of schooling; forced marriage; and refusal to allow sexes to mix in schools or
hospitals. He stated that the main legal measure by which his office combats such deviance is through its
power to regulate worship associations benefiting from tax advantages. This right to designate tax status
applies to taxes on residence, land, and equipment, as well as exoneration from transfer taxes on gifts,
legacies, bequeathals, and offerings; additionally, the discretion in designating tax status entails the right to
issue receipts, allowing donors tax deductions. According to Leschi's testimony, this right to assign tax status
"is useful as an instrument that may be used to control possible sectarian deviances of a group--and that at
any moment; for if an organization no longer meets the necessary conditions, in particular with regard to
public order, we may ask the prefect to repeal his authorization."
The 2001 About-Picard Law tightened restrictions on associations and provided for the dissolution of groups,
including religious groups, under certain conditions. These include: endangering the life or the physical or
psychological well-being of a person; placing minors at mortal risk; violation of another person's freedom,
dignity, or identity; the illegal practice of medicine or pharmacology; false advertising; and fraud or
falsification. In 2002 the Council of Europe passed a resolution critical of the law and invited the Government
to reconsider it to no avail. Although the provisions allowing for the dissolution of groups have never been
applied, another aspect of the law was utilized for the first time in 2004 against the leader of a cult.
For historical reasons, the Jewish, Lutheran, Reformed, and Roman Catholic groups in three departments of
Alsace and Lorraine enjoy special legal status in terms of taxation of individuals donating to these religious
groups. Adherents of these four religious groups may choose to have a portion of their income tax allocated
to their religious organization in a system administered by the central Government.
Central or local governments own and maintain religious buildings constructed before the 1905 law
separating religion and state. In Alsace and Moselle, special laws allow the local governments to provide
support for the building of religious edifices. The Government partially funded the establishment of the
country's oldest Islamic house of worship, the Paris Grand Mosque, in 1926.
Foreign missionaries from countries not exempted from visa requirements to enter the country must obtain a
three-month tourist visa before leaving their own country. All missionaries who wish to remain in the country
longer than 90 days must obtain visas before entering the country. Upon arrival, missionaries must apply
with the local prefecture for a carte de séjour (a document that allows a foreigner to remain in the country
for a given period of time) and must provide the prefecture a letter from their sponsoring religious
organization.
Public schools are secular; in 2004, the Government passed legislation prohibiting public school employees
and students from wearing conspicuous religious symbols, including the Muslim headscarf, Jewish skullcap,
Sikh turban, and large Christian crosses; the legislation took effect at the beginning of the school year in
2004. Religious instruction is not given in public schools, but facts about religions are taught as part of the
history curriculum. Parents may homeschool children for religious reasons, but all schooling must conform to
the standards established for public schools. Public schools make an effort to supply special meals for
students with religious dietary restrictions. The Government subsidizes private schools, including those
affiliated with religious organizations.
In 2004 the Government released the Rufin Report, which concluded that racism and anti-Semitism were a
threat to democracy and that anti-Semitic acts were not only carried out by elements of the extreme right
and Muslim youth of North African descent, but also by "disaffected individuals" with anti-Semitic obsessions.
The Rufin Report also warned against radical anti-Zionists who question Israel's right to exist. The report
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recommended that a law be created to punish those publicly equating Israel with apartheid or Nazi
Germany. Additionally, the report concluded that the press law of 1881, designed to guarantee freedom of
the press, was too unwieldy to adequately address the issues of racism and anti-Semitism. It recommended
removing from the press law all injunctions against incitement to racism and anti-Semitism and putting them
into a new law written specifically to address these issues. The Rufin Report also called for countering
intolerance in primary schools; educating new immigrants about the fight against racism and anti-Semitism;
and creating an observation system to monitor racist and anti-Semitic websites and to work closely with
authorities to prosecute offenders.
On June 20, 2007, President Sarkozy's newly named Interior Minister, Michèle Alliot-Marie, received
representatives of France's major religious confessions - Catholic, Protestant, Muslim, and Jewish - to hear
their perspectives on the public policy of public sphere secularism and to elicit their thoughts on the role of
religion in community life, particularly with regard to young people. Part of the impetus for the meeting was
the September 20, 2006, announcement, by then- Minister of the Interior Sarkozy, of a plan to discuss the
findings of a report from the Commission of Judicial Consideration on the Relation of Religions and Public
Authority. Sarkozy stated that he wished to facilitate "a debate without taboos" about the merits of legal
reform concerning religion.
The Commission, established in 2005 by Sarkozy and led by law professor Jean-Pierre Machelon,
recommended reforming the 1905 law separating church and state to allow local communities to finance the
construction of places of worship. The Machelon Report also proposed implementing a less rigid set of
criteria necessary for a religion to have the legal status of an association cultuelle. The proposed reform
would allow for association cultuelle to integrate activities such as social events and book selling, thereby
"enlarging the social presence" of religions. The report proposals support Sarkozy's assertion in 2002 that
the French state should encourage a public form of Islam, moderated by social recognition and open
practice: "What we should be afraid of is Islam gone astray…'garage Islam'…'basement
Islam'…'underground Islam.' It is not the Islam of the mosques, open to the light of day."
On January 8, 2007, an administrative court in Paris ruled that a nationalist group, Solidarity of the French,
could no longer hand out "pig soup," made with bacon and pig parts, to the homeless. Many saw the group
as inciting racial hatred by deliberately excluding those who follow a halal or kosher diet.
The Government has made efforts to promote interfaith understanding. Strict antidefamation laws prohibit
racially or religiously motivated attacks. Denial of crimes against humanity is illegal. The Gayssot Act (Loi
Gayssot, 1990) makes it a crime to question the existence of the category of crimes against humanity as
defined by the London Charter of 1945. The Government has programs to combat racism and anti-Semitism
through public awareness campaigns and through encouraging dialogue among local officials, police, and
citizen groups. Government leaders, along with representatives from the Jewish community, the Paris and
Marseille Grand Mosques, the Protestant Federation, and the Conference of Bishops have publicly
condemned racist and anti-Semitic violence. In 2003 a law was passed against crimes of a "racist, antiSemitic, or xenophobic" nature, and in 2004 legislation further increased punishment for "hate" crimes. The
Government regularly applies these laws in prosecuting anti-Semitic crimes.
The Government consults with the major religious communities through various formal mechanisms. The
Catholic community is represented by the Council of Bishops. The Protestant Federation of France,
established in 1905, comprises 16 churches and 60 associations, and serves as the interlocutor with the
Government. Its primary purpose is to contribute to the cohesion of the Protestant community.
The Central Consistory of Jews of France, established in 1808, includes Jewish associations cultuelles from
the entire country. It acts as a liaison with the Government, trains rabbis, and responds to other needs of
the Jewish community. In 1943 Jewish members of the Resistance formed the Representative Council of
Jewish Institutions in France (CRIF). The CRIF's mission is to fight anti-Semitism, preserve the memory of
the Holocaust, affirm solidarity with Israel, and promote peaceful settlement of the Israeli-Palestinian
conflict.
The National Council of the Muslim Faith and 25 affiliated regional councils serve as interlocutors for the
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Muslim community with local and national officials on such civil-religious issues as mosque construction,
providing chaplains for prisons and the military, and certification of halal butchers. In 2004 then-Interior
Minister Dominique de Villepin announced the creation of the Foundation for Islam to assist in the funding of
mosques, provide a transparent vehicle for individual and foreign donations, and assist in the training of
foreign imams in the country's language, history, and civics; however, it suffers from a lack of foreign or
private funding. Funding mosques has also proven to be politically divisive. On April 17, 2007, a Marseille
administrative council, at the behest of group of legislators, annulled a June 26, 2006, municipal council
decision to facilitate building the Grande Mosque of Marseille. Tribunal members judged that the rescinded
authorization, which would have provided a large tract of land for a nominal fee on a 99-year lease,
constituted a state subsidy that contravened the 1905 law separating church and state. A new, fair market
rate price is scheduled to be negotiated later in 2007.
In 2004 Parliament passed a law permitting the expulsion of individuals for "inciting discrimination, hatred or
violence against a specific person or group of persons." On September 7, 2006, authorities deported to
Algiers Chelali Benchellali, a controversial imam who made public statements in support of terrorism at his
mosque in the suburbs of Lyon. According to the Interior Ministry, 17 Islamic activists were expelled in 2006,
including at least 4 imams for promoting "propaganda in favor of radical Islam and inciting hate or violence."
French law permits the revocation of acquired citizenship and expulsion of individuals determined to have
incited hate or violence. Although authorities based their actions on security grounds in some cases, some
Muslims described the deportation of a number of radical Islamist religious figures since 2004 as a restriction
on religious freedom.
The 2006 NCCHR announced that, as of January 2007, the Ministry of Justice would replace the statistical
category of "Anti-Religious Acts" with the more precise categories of "Anti-Semitic Acts," "Anti-Islamic Acts"
and "Other, including Anti-Christian Acts."
The MIVILUDES is charged with observing and analyzing "sect/cult" movements that constitute a threat to
public order or that violate law, coordinating the appropriate responses to abuses by "cults," informing the
public about potential risks, and helping victims to receive aid. Some groups expressed concern that
MIVILUDES publications contributed to public mistrust of minority religions.
Restrictions on Religious Freedom
The United Nations Special Rapporteur on Freedom of Religion or Belief, Asma Jahangir, visited the country
in 2005 and issued a report on her findings on March 8, 2006. While the Special Rapporteur indicated that
the Government generally respected the right to freedom of religion or belief, she noted several areas of
concern; particularly the 2004 law banning the wearing of religious symbols in schools, which may "protect
the autonomy of minors who may be pressured or forced to wear a headscarf or other religious symbols" but
also may serve to deny the rights of "minors who have freely chosen to wear a religious symbol to school as
a part of their religious belief." She continued: "the stigmatization of the headscarf has provoked acts of
religious intolerance when women wear it outside school."
In 2004 the European Commission on Human Rights ruled that the law banning religious symbols in school
did not violate the freedom of religion. Some Christian, Jewish, Muslim, and Sikh leaders, human rights
groups, and foreign governments voiced concerns about the law's potential to restrict religious freedom.
Minority religious groups cite a growing body of precedent-setting case law from the European Court of
Human Rights (ECHR), which enforces the Convention for the Protection of Human Rights and is binding on
all Council of Europe members, to contest unequal treatment under law. Critics of the Government's
distinction between religions and "cults" (sectes) note that, in support of a policy of "true religious
pluralism," the ECHR has instructed governments to remain neutral and impartial, finding that the "the right
to freedom of religion as guaranteed under the Constitution excludes any discretion on the part of the state
to determine whether religious beliefs or the means used to express such beliefs are legitimate."
Following the enactment of the law, media reports indicated that a number of Muslim girls and Sikh boys
had been expelled from public school for violations; all had subsequently reportedly enrolled in private
schools, distance education courses, or schools abroad. One Muslim group indicated that the law adversely
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affected many more Muslim girls than boys, whether by causing them to seek alternative educational options
or requiring them to remove their veil. Media reports estimated that, of the country's 13 million
schoolchildren, approximately 1,200 Muslim school-aged girls wore headscarves. The Sikh community
reported that, of the roughly 200 school-aged Sikh boys, 168 (some 84 percent) were affected by the
legislation.
During the year authorities registered four legal cases involving infractions of the 2004 law. When school
resumed in September 2006 after the summer vacation, schools in Seine Saint Denis denied admission to
three Sikh students who refused to remove their turbans; two were subsequently accepted into private
schools, and the third was awaiting an appearance before a disciplinary council at year's end. On November
21, 2006, a 16 year old Sikh appealed his expulsion for refusal to take off his turban. The Association of
United Sikhs supported his appeal. Unlike in previous years, there were no reports of Muslim girls being
denied admission at the beginning of the autumn term.
According to a March 28, 2007, statement by the director of United Sikhs Legal Team for the Right to
Turban Campaign, in 2006 the United Sikhs filed a complaint with the European Court of Justice on behalf of
all Sikhs whose turban cases were outstanding. In addition, at the end of the reporting period there were
two cases awaiting appeal in the courts, one involving the petition of a group of Sikh schoolboys to wear
their turbans in school, the other involving the demand of two Sikhs to wear their turbans for their official
identification document photographs.
A respected Muslim observer complained that police sometimes singled out young Muslim men and
demanded their documents, a tactic he described as a form of harassment intended to keep them out of
certain neighborhoods.
On November 8, 2006, two of the 72 Muslim airport workers at the Paris airport Charles de Gaulle, whom
the Government had stripped of their security clearances, won back their badges after taking legal action.
The others, including six colleagues who had also been part of the legal action lodged against Interior
Minister Nicolas Sarkozy, remain barred from restricted areas at the airport. Although unions at the stateowned facility met on November 7, 2006 to consider a strike to protest the government's actions, which they
claimed discriminated against Muslim employees, the officials were unable to reach agreement. There were
also press reports that six workers were fired from Roissy Airport. Press reports indicated that lawyers for
several of the men stated that investigators asked their clients how frequently they prayed during the day, if
they had been to Mecca, and if they knew any imams. Authorities countered that thousands of Muslim
workers had received credentials authorizing them to work in the secure area of the airport. Court cases are
ongoing. In addition, according to July 24, 2006, press reports, the Minister of the Interior announced the
closure of five unofficial Muslim "prayer rooms" at Charles de Gaulle airport.
The Government continued to encourage public caution toward some minority religions that it considers
"cults" but is actively debating the basis on which religions are accorded the status of association cultuelle.
On October 17, 2006, a heated parliamentary debate took place between Office of Religious Affairs Director
Leschi and several deputies concerning the question and the status of the Jehovah's Witnesses. According to
Mr. Leschi, "the administrative judge is very clear, the Jehovah's Witnesses have the right to profit from the
[tax] advantages pertaining to worship associations." Leschi's statement elicited lively opposition, notably
from deputy George Fenech who cited reports of child abuse among members of the Jehovah's Witnesses.
In 2005 then-Prime Minister Jean-Pierre Raffarin issued a circular indicating the authorities should focus their
investigative efforts and attention on "small, fluid" groups that are "less easily identifiable," that use the
Internet for recruitment, as opposed to the Parliament identifying sects. Some religious groups hailed the
move as a step forward but asked the Ministry of Justice (MOJ) to issue a circular rescinding repressive
measures against minority religions. To date, the MOJ has issued no such circular.
In 1996 a parliamentary commission studying "cults" publicly released a report that identified 173 groups as
"cults," including the Raelians, the Association of the Triumphant Vajra, the Order of the Solar Temple,
Sukyo Mahikari, the Jehovah's Witnesses, the Theological Institute of Nimes (an evangelical Christian Bible
college), and the Church of Scientology. The Government has not banned any of the groups on the list;
however, members of some of the groups listed have alleged instances of intolerance because of the
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ensuing publicity.
On May 5, 2007, a German court ruled that European countries should drop their Schengen entry
prohibitions against Unification Church leaders the Reverend and Mrs. Moon, who are listed as "dangerous
persons" under the European Schengen Information System and consequently are forbidden entry into the
12 Schengen Convention states. Reverend and Mrs. Moon have also brought a court action in France to
overturn their designation, arguing that a reading of the Schengen Convention reveals that its security
provisions are designed to keep out drug dealers, arms smugglers, terrorists, and other dangerous criminals,
not leaders of religious groups--even controversial religious groups. Moreover, Moon's advocates have
argued that all members of the Schengen System are also obligated by their membership in the United
Nations and as signatories to the U.N.'s Universal Declaration on Human Rights.
On December 19, 2006, the Commission of Enquiry Regarding the Influence of Sects on Minors, presented
its report entitled "Stolen Childhood--Minors Victimized by Cults." The National Assembly created the
commission on June 28, 2006, to investigate the "insidious means" by which sects seek to proselytize youths
and the negative impact sects can have on youths' physical and psychological well-being. The report found
that children were increasingly easy targets for manipulation and exploitation by sectarian groups and that
public sector action was key to preventing abuse. The Commission did not produce a list of suspect groups
but defined the characteristics causing concern, including the practice of psychological destabilization,
excessive financial demands on members, and the indoctrination of children. The report cited a senior
official's assertion that "a minimum of 60,000 to 80,000 children" are being raised in a sectarian context, of
which "about 45,000 are affiliated with the Jehovah's Witnesses," and that public authorities, notably the
Ministry of Interior, had been "negligent" in their supervision of the danger.
The report concluded with 50 recommendations aimed at establishing better protection for children involved
with sectarian religious groups. Recommended actions included enhancing oversight of homeschooling,
mandating regular health check-ups for minors, providing access to legal counsel if needed, instituting
safeguards against excessive confinement, creating a post dedicated to monitoring problems related to
sectarian abuses, and strengthening MIVILUDES activities at an international level. Specifically, the report
recommended working through the Council of Europe to create a European observatory of religious groups
dedicated to facilitating intellectual exchanges among member countries to share experience and insight on
how these groups are treated by member state governments.
Certain sectarian groups protested the report, including the Church of Scientology, which rejects its
characterization as a cult, and the Jehovah's Witnesses, which asserted that on the day that the Third
Parliamentary Commission of Inquiry on Sects was created, only 10 out of 577 members of parliament were
present at the National Assembly. Members of Jehovah's Witnesses also alleged that during the reporting
period the rapporteur and the secretary of the newly convened commission openly attacked them,
describing them as delinquents and criminals and labeling their activities as "mafia like." The commission's
report also elicited criticism from other minority religious and civil rights groups, which labeled the
commission's conclusions an affront to freedom of conscience and religious belief.
On January 24, 2007, MIVILUDES published its report for 2006, focusing on new fund-raising and
recruitment strategies employed by groups it considers "cults." The report elaborated on the phenomenon of
targeting for recruitment marginalized youth from inner-city and poor suburbs, again mentioning specifically
the Church of Scientology's efforts to attract adherents from these environments. The 2006 report
elaborated on proselytizing tactics and their psychological consequences, the increasing use of
hallucinogenic drugs by members of certain cults, the effects of cult membership on extended families, and
cults' efforts to develop private sector commercial interests, including legal, media, and governmental
lobbying efforts. The MIVILUDES report concluded that certain judicial authorities remained reticent to
recognize the "mental subjugation" suffered by many members of cults and recommended more elaborate
means of information exchange among authorities, particularly in cases involving children's well-being.
Minority religious groups indicated that the allegations in the report were unsubstantiated and often false,
adding to public mistrust of the organizations involved.
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According to an April 19, 2007, press report, a Paris appeals court recently reversed a September 2006
judgment throwing out a 2002 complaint filed by a Belgian citizen against the Church of Scientology for
fraud, extortion, and illegal use of drugs. Court lawyers argued that the 2006 judgment failed to investigate
all the implicated parties and ignored psychiatric testimony according to which the plaintiff had been under
"the permanent influence [of and] pressure from harassment" from Scientologists who were accused of
having used "violent means" to intimidate and extort money.
Representatives of the Church of Scientology continued to report cases of societal discrimination, frivolous
lawsuits, and prosecution for allegedly fraudulent activity. On April 16, 2007, an administrative court in
Nantes ruled in favor of SEL, a Church of Scientology organization, and against the mayor of Angers who
had banned SEL from locally selling Dianetics and other books by L. Ron Hubbard, the founder of
Scientology. The court rejected the mayor's claim that the sales prohibition was necessary to maintain public
order and ordered the city of Angers to pay SEL $1,600 (€1,200) in damages.
Some observers voiced concerns about the tax authorities' scrutiny of the financial records of some religious
groups, including Jehovah's Witnesses, whose 2002 court ruling to pay back taxes, now currently totaling
$54,400,000 (€40,908,000), is on appeal before the ECHR, which is expected to render a judgment in the
summer of 2007. On December 21, 2006, La Croix reported that there was a good chance that the
Government would lose its court case against the Jehovah's Witnesses and would be obligated to return
$6,750,000 (€5,000,000) in property it had already confiscated from the group. Perhaps prompting this
belief that the Government would lose the case, an article published on November 1, 2006, in Le Canard
Enchaîné reported that the Government had contacted the ECHR to relate its interest in negotiating an
extra-judicial settlement with the Jehovah's Witnesses.
On October 12, 2006, the Government responded to the ECHR's May 4, 2006, notification of the Jehovah's
Witnesses' 2005 application to the court. The Government provided its written observations on the
admissibility and merits of the claims of the Jehovah's Witnesses based on the religious freedom and
discrimination conventions of the European Convention on Human Rights. The Jehovah's Witnesses
members claimed that they were discriminatorily and punitively audited because of their classification as a
cult and their placement on a 1996 parliamentary list, and that authorities adopted a new administrative
regulation to retroactively tax "manual donations" offered by adherents. The association further alleged that
this tax had not been applied to any other nonprofit or religious organization, and the amount of the tax
exceeds the assets of the Association of Jehovah's Witnesses in the country. The Association of Jehovah's
Witnesses has refused to pay what it considers an unjust tax.
Jehovah's Witnesses in the Vosges Department reported difficulty gaining permission to build a house of
worship in the town of Deyvilliers, where an opposition group has lobbied since 2004 against the
construction of a 1,500-seat Kingdom Hall by the Jehovah's Witnesses. On May 10, 2007, the Agence
France-Presse reported that a local court ruled the Jehovah's Witnesses' complaint against the opposition
group inadmissible.
On March 30, 2007, a Lyon appeals court upheld the March 15, 2007, Lyon court decision that the city, after
refusing to rent communal meeting space to the Jehovah's Witnesses for a yearly gathering of 4,500
adherents, was compelled to rent the group a conference forum.
There were no reports of religious prisoners or detainees in the country.
Forced Religious Conversion
There were no reports of forced religious conversion, including of minor U.S. citizens who had been
abducted or illegally removed from the United States, or of the refusal to allow such citizens to be returned
to the United States.
Anti-Semitism
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The NCCHR, in conjunction with the Ministry of the Interior, reported in March 2007 that 2006 witnessed a
slight increase in anti-Semitic acts-541 events, a 6 percent increase from the 508 reported events in 2005. A
larger proportion of 2006 anti-Semitic acts were violent--134 as opposed to 99 in 2005. Recorded incidents
returned to lower levels during the final months of 2006, a trend that continued into early 2007. Despite this
overall increase in anti-Semitic acts in 2006, the NCCHR also reported that anti-Semitic acts committed by
students during the 2005-2006 academic year dropped by 40 percent.
CRIF operated a hotline to register allegations of threats in the greater Paris region. Additionally, CRIF
contributed an analysis of anti-Semitic acts and threats to the NCCHR's 2006 annual report. In a parallel
study, the Service for the Protection of the Jewish Community announced on February 26, 2007, that 2006
witnessed larger increases in reported anti-Semitic activity, with 213 anti-Semitic acts (up 40 percent from
134 in 2005) and 158 anti-Semitic threats or insults (up 7 percent from 148 in 2005) for a total of 371
episodes (up 24 percent from 2005). These statistics indicate a net increase in anti-Semitic episodes for the
months following the killing of Ilan Halimi on February 13, 2006, and the Israel-Hezbollah fighting during the
summer. CRIF said in a subsequent communiqué that "the essential and most worrying aspect [of the report
is a] 45 percent increase in physical attacks" on people. CRIF stated in an earlier NCCHR report that its
figures do not always correspond to those of the Government, as victims do not always report their attacks
to both the police and CRIF. CRIF also noted its concern about the availability of anti-Semitic diffusions via
the Internet, radio, and satellite television.
The NCCHR report noted that the number of anti-Semitic threats and insults committed by those of "ArabMuslim" background increased from 99 in 2005 to 115 in 2006, an increase of 16 percent. The number of
threats and insults committed by the extreme right dropped (98 in 2006 as opposed to 150 in 2005) and
made up 24 percent of the incidents recorded. Authorities were unable to identify the perpetrators of antiSemitic violence in 61 percent of the cases. Individuals of "Arab-Muslim" background were responsible for 28
percent of violent incidents, while members of the extreme right were culpable for 10 percent.
The NCCHR report stated that "despite a significant response on the part of government authorities," there
is still much work that remains, particularly in creating a comprehensive strategy that includes judicial,
educational, and public relations elements to fight racism, anti-Semitism, and xenophobia. The NCCHR
report went on to emphasize the importance of government cooperation with civil society and the role of
preventative action led by the Ministry of Education and the Ministry of Employment, Social Cohesion and
Housing. The commission also noted certain government omissions during 2006, specifically a failure to
reconvene the Interministerial Committee for the Battle against Racism and Anti-Semitism since January
2005 and the absence of a national action plan in conformity with the final declaration of the World
Conference of the United Nations against Racism, Racial Discrimination, Xenophobia, and Intolerance.
Despite the increase in recorded anti-Semitic acts in 2006, the NCCHR cites MOJ statistics that during 2006
there were 128 court cases involving religious discrimination (up 4 percent from 123 in 2005) and 458 court
cases involving anti-Semitism (down 3 percent from 473 in 2005). (The MOJ makes a distinction between
anti-Semitic acts and religious discrimination, which includes all other crimes with religious motivations, thus
accounting for differences in statistics on overall religious discrimination.) Fifty-nine percent of the religious
discrimination cases and 38 percent of the anti-Semitism cases led to judicial proceedings.
Prosecutors were under orders to seek maximum punishments in hate crimes and to systematically appeal
sentences not considered strong enough.
On April 30, 2007, state prosecutors opened an official investigation for armed robbery and violence by a
group with racist motives after an April 26, 2007, attack on a 22-year-old Jewish student in a Marseille metro
parking area. According to the victim, two men physically assaulted her, including slashing her t-shirt with a
knife and inscribing a swastika on her torso with a felt-tipped pen before fleeing with her purse and cell
phone.
On April 21, 2007, vandals damaged 180 graves, a quarter of which were Jewish, in the main Le Havre
cemetery of Saint-Marie.
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On April 19, 2007, Lille Rabbi Elie Dahan, who presided over a well-attended commemoration ceremony
following the desecration of 51 Jewish tombs in Lille, and who had been an active spokesman for the Jewish
community during the subsequent police investigation, was verbally and physically assaulted in Paris. On
March 31, 2007, desecration of the tombs prompted widespread condemnation and a large-scale police
investigation into what one government official called "the largest event of this sort ever to happen in the
region." The vandalism elicited a solidarity march in the cemetery attended by a thousand people.
In late March 2007, a Nice-area daily published an article detailing the continued existence of Vichy-era legal
prohibitions on renting or selling property to Jews. According to the former Nice-Côte d'Azur CRIF president,
it was regrettable that the discriminatory co-ownership settlements were still found in older contractual
agreements because of the painful memories that they evoked; however, she explained that the measures
themselves became null and void immediately after World War II and have not been applied to discriminate
against Jewish property owners since that time.
On March 27, 2007, a Bordeaux Appeals Court overturned the June 2006 Toulouse administrative tribunal
conviction of the state and the state railways, the SNCF, for their role in the deportation of Jews during
World War II. The specific case was brought by the family of Georges Liepitz, whom the state railway
transferred from Pau to the transit camp of Drancy, north of Paris. (The family was ultimately liberated.) The
SNCF, which was ordered to pay $82,700 (€62,000) to the Lipietz family, successfully appealed the decision
in which presiding judges emphasized that the SNCF was compelled to render its transportation services.
According to the court, the SNCF acted as "a private entity" requisitioned by the German-controlled Vichy
government, and the case therefore did not fall within the jurisdiction of an administrative court empowered
to adjudicate disputes between citizens and the government. Lipietz announced his intention to appeal the
judgment before the State Council, the highest administrative court, on the grounds that the SNCF is a
public entity that the administrative courts should be qualified to judge. In the wake of the overturned June
2006 decision against the SNCF, 200 other families filed similar compensation claims.
On March 20, 2007, the Global News Service for the Jewish People reported that more than 7,000 individuals
(not all were Jewish and not all were from France) signed a petition asking for political asylum in the United
States because of the dangers they faced from anti-Semitism in the country. News of the petition was met
with outrage by most Jewish community spokespersons in the country. "This petition is bizarre, stupid, and
out of place," said the CRIF director in a subsequent interview with Israel's Ma'ariv newspaper. "I don't feel
threatened …, and the authorities are doing everything they can to protect the Jewish community. Jews
don't need this kind of petition."
On March 1, 2007, in a radio interview, former prime minister Raymond Barre appeared to justify the
collaboration of Vichy-era government officials with the Nazi occupiers' deportation of Jews and defended
right-wing extremist Bruno Gollnisch's right to voice opinions that falsify the magnitude of Nazi killing of
Jews. An anti-racist NGO, SOS Racism, demanded that legal action be taken against Barre, but no reports
were available to suggest that any such action had been initiated.
On February 8, 2007, in Chartres, Stellio Gilles Robert, a former member of the Nation of Islam in Paris
under the name Kemi Semba and the leader of Tribu KA, a 30-member group of extremist blacks known to
police for their racist rhetoric against Jews and whites, was charged with inciting racial hatred and antiSemitic comments after yelling epithets at authorities. The Government has repeatedly closed down the
organization's websites, only to have them appear again. During his May 3, 2007, court testimony, Semba
affirmed his comments, contending that he had only cast aspersions on Zionism and had not made antiSemitic statements. Plaintiffs have petitioned the court to impose a sentence of six months, a fine of
$13,300 (€10,000), and the deprivation of Semba's civic rights for five years, a stipulation that would
prevent Semba from acting on his stated intention of running for office in the next municipal elections. The
court announced plans to render its judgment on June 28, 2007, but had not done so by the end of the
reporting period.
On January 18, 2007, Bruno Gollnisch, a part-time university professor in Lyon, member of the European
Parliament, and vice-president of the extreme-right National Front, was sentenced to a three-month
suspended jail sentence and fined $6,500 (€5,000) for several comments made to the media in 2004
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regarding the Holocaust. He questioned the use of gas chambers and stated, "I'm not contesting the
existence of concentration camps, but as for the number of dead, historians might want to debate it." The
judge also ordered Gollnisch to pay $73,300 (€55,000) in damages to the plaintiffs and to pay for the
judgment to be published in the newspapers that originally printed his remarks. His 2005 expulsion from the
university where he was teaching and five-year banishment from teaching were confirmed on May 22, 2006.
On November 23, 2006, a policeman fatally shot one person and gravely injured another while protecting an
Israeli fan from an enraged mob following a soccer team's defeat by Hapoel Tel Aviv. A group of 150
incensed fans confronted the departing Israeli team supporter with threats and anti-Semitic epithets.
On November 9, 2006, arsonists set fire to a Jewish school in Gagny, north of Paris. The fire caused little
damage, in contrast to an arson attack on the same school in 2003 that destroyed 32,000 square feet of the
school. Police opened an investigation. Days afterward, then-president Chirac announced a tougher policy to
combat anti-Semitism.
Following the February 13, 2006, kidnapping and killing of a young Jewish man, Ilan Halimi, several antiSemitic incidents were reported, many in the Parisian suburb of Sarcelles. Previously unreported incidents
include the following: On March 12, 2006, vandals broke into a synagogue in Sarcelles and threw religious
objects to the ground; on March 6, 2006, in Lyon, a Jewish pupil was attacked and kicked in the face by four
youths, subsequently in custody for violence and injury "with anti-Semitic character."
On October 23, 2006, the local police tribunal of Colmar fined the main suspect in the 2004 cemetery
desecration of 127 graves in the Jewish cemetery in Herrlisheim $930 (700 €), plus one euro damages, for
sending anti-Semitic letters to the Haut-Rhin consistory of Jews and two others in the Jewish community.
On July 12, 2006, a higher court overruled the 2005 Versailles Court of Appeals verdict against the authors
and publisher of a 2002 article for "racial defamation" due to the article's alleged anti-Semitic content which
violated a 1990 anti racism law. The higher court annulled the racial defamation judgment, stating that the
published text was the expression of an opinion in an ideological debate.
The Government took other steps to combat anti-Semitism and other forms of intolerance, particularly
among young people; however, some groups asserted that the judicial system was lax in its sentencing of
anti-Semitic offenders. Schools emphasized the need for tolerance, and copies of the film "Shoah" were
distributed to all high schools for use in history and civics classes. Many schools feature commemoratory
plaques detailing Nazi deportation of children during the war.
Improvements and Positive Developments in Respect for Religious Freedom
Senior government officials, up to and including former president Chirac and President Sarkozy, have
strongly denounced religious discrimination, intolerance, and extremism, and in particular on March 11,
2007, at the annual CRIF dinner where the guest list included the country's most influential politicians and
public servants. Throughout his term as Interior Minister, Nicolas Sarkozy took an active public role in
denouncing and combating anti-Semitism wherever he encountered it, including personally overseeing the
dismantlement last year of the website operated by the anti-Semitic group, Tribu KA. Moreover, in the first
five months of 2007, according to the Jewish Consistory, there was almost a 30 percent drop in anti-Semitic
incidents from the same period in 2006 (112 incidents versus 158).
On March 22, 2007, a court ruled in favor of satirical weekly, Charlie Hebdo, which had published cartoons
of the Prophet Muhammad, rejecting accusations by Islamic groups who accused the paper of inciting racial
hatred. The court sided with arguments advanced by the public prosecutor that freedom of expression laws
covered the paper's actions and that the cartoons were a critique of fundamentalism rather than Islam in
general. The cartoons, originally published in 2005 by a Danish daily, provoked violent protests in Asia,
Africa, and the Middle East; several European newspapers reprinted them as affirmation of free speech.
On March 21, 2007, the Lyon school board head who opposed the opening of the country's second Muslim
school lost his position after losing a contentious struggle over the opening of the "al-Kindi" Islamic
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Association's Muslim high school on February 28, 2007. The official had vigorously opposed the new high
school, citing safety and environmental concerns and on October 4, 2006, had denied the school's original
application. The denial was followed by demonstrations and sit-ins by Muslim organizations and their
supporters.
On February 12, 2007, Alpes Maritimes Department President Christian Estrosi launched "Alpes Maritimes
Fraternité," an "informal" structure designed to promote interreligious dialogue, harmony, and respect. The
group will receive free office space from the Conseil General. Jewish, Muslim, Catholic, Orthodox, and
Protestant representatives attended the launch ceremony. The new group plans to hold periodic meetings,
issue statements based exclusively on consensus, and engage in limited activities, such as issuing an
ecumenical calendar and sponsoring historical colloquia.
Public schools made an effort to supply special meals for students with religious dietary restrictions.
On February 20, 2006, following the February 2006 killing of Ilam Halimi, then-prime minister de Villepin
highlighted current and planned government efforts to combat anti-Semitism and other religiously motivated
crimes in an address to CRIF representatives. These plans would take place over the next two years, and if
carried out, would represent a good-faith effort to promote religious and ethnic tolerance.
On December 8, 2006, according to a Paris LCI Television report, a court sentenced arsonists to jail for up to
five years for destroying the Annecy mosque and a prayer hall in 2004. The mosque representative accepted
the arsonists' apologies and forgave them. It was reported that the prison terms were accompanied by
suspended sentences and probationary periods for each of those sentenced.
According to a May 13, 2007, conversation with Embassy officials, Rabbi Michel Serfaty, co-President of the
Judeo-Muslim Friendship Association (AJMF), continued his efforts to foster intercultural dialogue and
understanding by meeting with Muslim local officials and religious counterparts. Rabbi Serfaty's efforts
include sponsoring international trips to Holocaust sites for French Muslim students.
Section III. Societal Abuses and Discrimination
Although there were anti-Semitic and anti-Islamic incidents during the period covered by this report,
prominent societal leaders took positive steps to promote religious freedom and to maintain open lines of
communication among different faith communities. The Council of Christian Churches in France, composed
of three Protestant, three Catholic, and three Orthodox Christian representatives, serves as a forum for
dialogue among the major Christian churches. There is also an organized interfaith dialogue among the
Christian, Buddhist, Muslim, and Jewish communities, which addresses and issues statements on various
national and international themes.
Please see the Anti-Semitism section above for reports of anti-Semitic incidents. Throughout 2007 there
have been weekly reports in the press of cemetery desecrations of all religious groups. On May 24, 2007, a
court convicted the author of racially motivated attacks and cemetery profanation; he was sentenced to 20
years in prison. He had attempted to kill two citizens of North African origin and had profaned 62 Jewish
tombs in a Lyon cemetery in 2004.
Members of the Arab-Muslim community experienced incidents of harassment and vandalism. However, the
situation improved in 2006, during which, according to the NCCHR, there were 344 racist (often including
anti-Islamic) acts recorded, a decrease from the 471 committed in 2005. The trend was also reflected in a
drop in the number of violent incidents (64 in 2006 as opposed to 88 in 2005). Far-right extremists were
responsible for 26 of the 42 violent racist incidents aimed at individuals of North African origin. The
Government recorded 192 threats made against individuals of North African origin, of which 65 were
explicitly anti-Islamic (up from 56 such threats in 2005). Violent racist incidents on the island of Corsica,
which made up 27 percent of the attacks in 2005, comprised only 5 percent of the incidents in 2006.
Negative societal attitudes regarding the wearing of Muslim headscarves may have led to incidents of
discrimination against Muslim women. Members of the Muslim community again alleged that, when wearing
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headscarves, they were refused service by private businesses. Media reports indicated that some companies
discouraged female employees from wearing the headscarf or encouraged them to wear a bandanna in its
place.
On May 10, 2007, a court sentenced two individuals to two years in prison (with eligibility for parole after
one year) for profaning 51 Muslim graves and the ossuary in the country's largest military cemetery, NotreDame-de-Lorette, on April 19, 2007.
On October 23, 2006, vandals profaned the future Mosque of Belfort by leaving a pig's head in a window.
Muslim worshippers also discovered posters of the National Front on the door of their temporary prayer
room. The construction of the mosque, which was scheduled to open in 2007, was a source of controversy.
On January 8, 2007, an administrative court in Paris ruled that a nationalist group, Solidarity of the French,
could no longer continue to hand out "pig soup," made with bacon and pig parts, to the homeless. On
January 3, 2007, an earlier ruling had permitted the provision of the soup to continue. The mayor of Paris
had condemned this ruling. Many saw the soup as a blatant act of racism, as it forbidden for those in the
Islamic and Jewish communities to eat pork. Paris police shut down the operation a month earlier.
Plans to open the country's fifth private Muslim school in the fall of 2007 in a Paris suburb caused
controversy among local political leaders. Muslim community spokespeople predicted a profusion of private
confessional schools in France following the 2004 law banning conspicuous religious symbols in public
schools, but almost five years later this movement has not taken place. As of early 2007, the Ministry of
Education recognized four private confessional schools nationwide.
According to September 29, 2006, press reports, a public high school teacher and writer from Saint-Orensde-Gameville (near Toulouse), who attacked the Prophet Muhammad and Islam in a newspaper
commentary, was forced to go into hiding under police protection after receiving a series of death threats,
including one diffused on a radical Islamist online forum. Then-prime minister de Villepin called the threats
"unacceptable," adding: "We are in a democracy. Everyone has the right to express his views freely, while
respecting others, of course." An official investigation was opened.
On September 24, 2006, in the opening days of the Islamic holy month of Ramadan, arsonists set fire to a
mosque in Quimper after first painting six crosses on the building. On the same day, a mosque in
Carcassonne was covered by 50 crosses and slogans, including some colloquial slurs for Arabs. The antiracist group, Mrap, declared that the far right has contributed "to create a climate" that can lead to such
acts by focusing on "the theme of the Islamization" of the country.
Racism and religious intolerance in Corsica remained a concern. On October 17, 2006, the penal court for
minors of Paris gave 12 members of the armed group Clandestini Corsi jail sentences of 6 months to 7 years
for 7 attacks against the Muslim community between March and September 2004. The court cited racism as
an aggravating factor.
The Jehovah's Witnesses reported that on December 21, 2006, the mayor of a city in Midi-Pyrénées received
a letter declaring the manager of a tourist information office as a member of "one of the most dangerous
sects" in the country because he is a Jehovah's Witness.
The Jehovah's Witnesses reported that on December 20, 2006, a teacher in a school in Provence ordered
students who were Jehovah's Witnesses to leave the classroom.
On December 18, 2006, representatives of the Jehovah's Witnesses organization asserted that 78 of their
places of worship had been vandalized since the beginning of the year. On October 20, 2006, a place of
worship was burned to the ground in Villefranche sur Saone. The Jehovah's Witnesses attributed these and
earlier attacks in part to a 1996 Parliamentary Commission of Inquiry Report that described them as a
"dangerous sect." On July 3, 2006, this designation was found to be a vague and superficial assessment by
the Council of State.
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Representatives of the Church of Scientology continued to report cases of societal discrimination during the
year. Scientologists continued to follow closely the growing body of precedent setting case law from the
ECHR in order to contest what they regarded as unequal treatment.
Section IV. U.S. Government Policy
The U.S. Government discusses religious freedom issues with the Government as part of its overall policy to
promote human rights.
Representatives from the Embassy met several times with government officials responsible for religious
freedom issues. These issues were raised regularly in meetings with other officials and Members of
Parliament. Embassy officers also met regularly with a variety of private citizens, religious organizations, and
NGOs involved in the issue. Embassy officials met with and discussed religious freedom with senior
representatives from the major faith traditions as well as representatives of the Church of Scientology and
the Unification Church. Embassy officials hosted visits from Jewish organizations, including the American
Jewish Committee, the Anti-Defamation League, the CRIF, the Central Consistory of Jews of France, the
European Jewish Congress, the Holocaust Memorial Museum, the United Jewish Communities, and the
Wiesenthal Center.
On April 10, 2007, the Ambassador, accompanied by invited alumni of a 2003 State Department
"International Visitor Leadership Program" called on Paris's Central Jewish Consistory on the occasion of its
200th anniversary and then visited a photo exhibit of Jewish children deported during WWII. The
ambassador's visit was a public demonstration of the U.S. Government's support for interfaith dialogue and
religious tolerance--the theme of the 2003 group project.
The Embassy facilitated the visit of the Special Envoy for Combating Anti-Semitism and representatives from
other government agencies to discuss religious freedom issues with religious leaders and senior government
officials.
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Bibliographie / Medias
Web
Les réponses politiques à la question des sectes : l’exemple français de
l’impossible tolérance
par MARIANI LIONEL
sous la direction de Isabelle LACOUE-LABARTHE
Institut d’Etudes Politiques de Toulouse
2007
http://www.droitdesreligions.net/memoires_pdf/MARIANI.lionel.pdf
La liberté religieuse et la Convention européenne des droits de l'Homme
Mémoire de Master 2 soutenu par Lucie VEYRETOUT
Sous la direction de Monsieur J.F. PREVOST
Université de Paris V René Descartes- Malakoff
Juin 2006
http://www.droitdesreligions.net/memoires_pdf/memoire_lucieveyretout.pdf
Miviludes
"L'entreprise face au risque sectaire"
http://www.miviludes.gouv.fr/IMG/pdf/guide_Miviludes_L_entreprise_face_au_risque_sectaire.pdf
Abattoirs temporaires : modalités d'agrément et de fonctionnement lors de la fête
de l'Aïd al Adha :
note n° 2007-8265 du 25 octobre 2007 du ministère de l'Agriculture
http://www.droitdesreligions.net/divers/DGALN20078265Z.pdf_nocache=1134040585.pdf
Suisse
Direction de l'instruction publique du Canton de Berne
Traditions et symboles religieux: quelle attitude adopter?
Octobre 2007
http://www.erz.be.ch/site/fr/guide_off_def.pdf
Ouvrages
Les ONG confessionnelles. Religions et action internationale
Auteur : Bruno Duriez, François Mabille, Kathy Rousselet
Paru le : 05/12/2007
Editeur : L'HARMATTAN - ISBN : 978-2-296-04521-7
Des dieux et des fonctionnaires. Religions et laïcités face au défi de la
construction européenne
Auteur : Bérangère Massignon
Paru le : 06/12/2007
Editeur : PU RENNES - ISBN : 978-2-7535-0488-2
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Articles
Droit funéraire et islam en France : l’acceptation de compromis
réciproques
Par Stéphane Papi
AJDA, 22 octobre 2007, p.1968
Pèlerinage et droit administratif
La Semaine Juridique Administrations et Collectivités territoriales n° 49, 3
Décembre 2007, 2318
Etude rédigée par : Frédéric Colin
maître de conférences de droit public à l'université Paul-Cézanne Aix-Marseille III
Exonération prévue par l'article 1382, 4° du CGI pour les associations
religieuses : non-application en Guyane
Note sous CE, n° 270595, 19 juin 2006, Association « La mission du plein
évangile – La porte ouverte chrétienne »
Droit fiscal n° 44, 2 Novembre 2007, commentaire n°945
A PROPOS DE L'ARRET COMMUNE DE TRELAZE DE LA COUR
ADMINISTRATIVE D'APPEL DE NANTES DU 24 AVRIL 2007, L'ORGUE
EST-IL CULTUREL OU CULTUEL ?
Par GABORIAU Vincent
2007
Actualité juridique de droit administratif 2007 n° 38, p.2086.
A PROPOS DU JUGEMENT M. DENIS R. DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE DIJON DU 20 SEPTEMBRE 2007, LE MONUMENT AUX MORTS FACE
AU PRINCIPE DE LAICITE
Conclusions TAINTURIER Olivier
Actualité juridique de droit administratif 2007, n° 40, p.2195.
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Droitdesreligions.net
Mises à jour du Répertoire
Période du 1er novembre au 31 décembre 2007
Le Répertoire du droit des religions est accessible depuis le site
: http://www.droitdesreligions.net
25.12.2007 mise à jour de l'entrée: Carrés confessionnels
23.12.2007 création d'une entrée: Aïd El Kebir
21.12.2007 mise à jour de l'entrée: Union européenne
21.12.2007 création d'une entrée: "Erouv"
15.12.2007 création d'une entrée: Mission interministérielle de lutte contre les sectes (MILS)
15.12.2007 mise à jour de l'entrée: MIVILUDES
14.12.2007 mise à jour de l'entrée Franc-maçonnerie
14.12.2007 mise à jour de l'entrée Sikhs
14.12.2007 mise à jour de l'entrée Exhumation
14.12.2007 mise à jour de l'entrée Judaïsme
14.12.2007 mise à jour de l'entrée Eglise de scientologie
09.12.2007 mise à jour de l'entrée: Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour
l'égalité
08.12.2007 création d'une entrée: Pèlerinage
08.12.2007 mise à jour de l'entrée Objecteurs de conscience
01.12.2007 mise à jour de l'entrée: Congrégation
01.12.2007 mise à jour de l'entrée: Athéisme
01.12.2007 mise à jour de l'entrée Abattage rituel
26.11.2007 création d'une entrée: Apposition de signes ou emblèmes religieux sur les monuments
publics ou emplacement public.
23.11.2007 mise à jour de l'entrée: Rapports parlementaires
21.11.2007 création d'une entrée: Diffamation religieuse
19.11.2007 création d'une entrée:Aumônerie des armées
19.11.2007 création d'une entrée:Aumônerie des hôpitaux
19.11.2007 création d'une entrée:Aumônerie des lycées
19.11.2007 création d'une entrée:Aumônerie des prisons
19.11.2007 mise à jour de l'entrée: Carte nationale d'identité
16.11.2007 mise à jour de l'entrée: Union nationale des associations de défense des familles et de
l'individu victimes des sectes (Unadfi)
16.11.2007 mise à jour de l'entrée: Portugal ( Décret-loi n°308/2003 du 10 décembre 2003;
Décret-loi n°134/2003 du 28 juin 2003; Loi de la liberté religieuse n° 16/2001 du 22juin 2001:
Traduction par Simone VICENTE)
14.11.2007 mise à jour de l'entrée: Assistantes maternelles (bibliographie)
13.11.2007 mise à jour de l'entrée: Assistantes maternelles
13.11.2007 mise à jour de l'entrée Protestantisme
03.11.2007 création d'une entrée: Cendres et urne funéraire
03.11.2007 création d'une entrée: Caisse mutuelle d'assurance maladie des cultes et de la caisse
mutuelle d'assurance vieillesse des cultes (CAVIMAC)
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03.11.2007
03.11.2007
03.11.2007
03.11.2007
02.11.2007
01.11.2007
mise à jour de l'entrée : Ministre du culte (statut)
mise à jour de l'entrée: Droit funéraire / carrés confessionnels
mise à jour de l'entrée Gueth (divorce israélite)
création d'une entrée: Droit funéraire / carrés confessionnels
mise à jour de l'entrée : Ministre du culte (statut)
création d'une entrée: Droit de la famille / Divorce
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Index
A
Abattage rituel, 240
Abattoirs, 238
Absence pour fête religieuse, 47, 51
Agent public, 77
Aïd al Adha, 238
Aïd El Kebir, 240
Allemagne, 3, 16, 22, 159
Alsace-Moselle, 31
Antisémitisme, 20
Appartenance religieuse, 5, 71, 116, 119, 121,
122, 125
Assistantes maternelles, 240
ASSOCIATION CULTUELLE LECTORIUM, 5, 69, 78
Association du rabbinat français, 18
Association Ici et Maintenant, 5, 53, 54, 55
ASSOCIATION LA MAISON QUI CHANTE, 134
ASSOCIATION LE VERBE DE VIE, 138
Association pour la défense des familles et de
l’individu, 99
ASSOCIATION POUR LA LIBERTE DU SANTO
DAIME, 134
Associations culturelles, 24, 225
Athéisme, 5, 69, 84
Athéisme, 240
Aumônerie des armées, 240
Aumônerie des hôpitaux, 240
Aumônerie des lycées, 240
Aumônerie des prisons, 240
Aumônier, 5, 70, 87, 88, 89, 90
Ayahuasca, 5, 72, 135, 136
B
Bas-Rhin, 5, 31, 45, 72, 127, 128, 129, 132
Belgique, 3, 16, 24, 31
C
Canada, 1, 3, 9, 19, 180, 181, 184, 185, 186,
187, 188, 190, 195, 196, 197, 198, 203, 205,
206, 207, 210, 211, 213, 215, 216, 217, 219,
222
Carrés confessionnels, 240
Cathédrale de Perpignan, 24
CAVIMAC, 42, 240
Cendres cinéraires, 31
Cérémonies, 5, 9, 72, 135, 136, 145, 153, 160,
210
Certificat d’urbanisme, 71, 104, 106
Charte des droits fondamentaux, 12, 13
Charte du Patient Hospitalisé, 49
Christianophobie, 20
Cimetière, 4, 21, 31
Commission d'enquête relative à l'influence des
mouvements à caractère sectaire et aux
conséquences de leurs pratiques sur la santé
physique et mentale des mineurs, 24
Commission d'enquête sur la situation financière,
patrimoniale et fiscale des mouvements
chrétiens, 102
Commissions d’enquête, 40, 41
Congrégation, 185, 210, 240
congrégations, 24
Conseil Constitutionnel, 12
Conseil des droits de l'homme, 3, 20
Conseil des leaders religieux, 3, 16
Conseil français du culte musulman, 31, 66
Conseil presbytéral de l'église réformée de
Lixheim, 128, 129
Conseil supérieur de l'audiovisuel, 21, 54, 55
Consistoire central, 1, 3, 18
Convictions religieuses, 18, 47, 48, 49, 50, 51, 52,
67, 153
Cour européenne des droits de l'homme, 15, 21,
145
Crémation, 31
Croyances religieuses, 5, 49, 69, 84, 194, 198,
200, 201, 203, 206, 210
Culte, 12, 72, 81, 104, 129, 131
Culte catholique, 45
Culte israélite, 45
Culte musulman, 24, 31
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237
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Cultes protestants, 127, 128, 132
Cultes reconnus, 88
D
Danemark, 14
Débit de boissons, 24
Défunts, 31
dérives sectaires, 1, 5, 16, 19, 24, 31, 38, 60, 70,
71, 73, 74, 101, 112, 113, 114
Diffamation, 3, 16, 40, 41
Diffamation religieuse, 3, 16, 240
Diocèses, 64
Divorce, 1, 3, 9, 19, 167, 168, 174, 178, 180,
182, 183, 184, 186, 188, 189, 190, 191, 192,
193, 194, 195, 198, 200, 203, 204, 205, 206,
207, 208, 209, 210, 212, 213, 214, 215, 216,
218, 221, 222, 240
Divorce religieux juif, 1, 3, 9, 19, 180, 182, 189,
207, 213
Droit canonique, 46, 139, 213
Droit funéraire, 238, 240
E
Ecole privée, 24, 31
Edifices culturels, 105
Eglise de la Confession d'Augsbourg d'Alsace et
de Lorraine, 130, 131, 132, 133
Eglise de scientologie, 240
Eglise de Scientologie, 5, 42, 70, 91, 92
Eglise du Santo Daime, 72, 136
Eglise réformée d’Alsace et de Lorraine, 128
Eglise réformée d'Alsace et de Lorraine, 129, 130,
132, 133
Eglises, 4, 11, 13, 14, 15, 20, 22, 24, 31, 65, 105,
128
Entreprise face au risque sectaire, 39, 238
Erouv, 240
Espagne, 3, 15, 42
Etablissement de santé public, 48
Etablissements publics du culte, 5, 31, 72, 128
Exhumation, 240
Extériorisation vestimentaire, 5, 69, 85
F
Fédération chrétienne des Témoins de Jéhovah de
France, 99, 100, 101
Football, 4, 23
Foulard islamique, 5, 71, 116, 119, 122, 125
Frais de transport, 108, 110, 111
Franc-maçonnerie, 240
Funérailles, 31
Grande croix, 5, 71, 116, 119, 122, 125
Grande mosquée à Marseille, 20
Grande Mosquée de Cologne, 22
Gueth, 186, 214, 240
Guyane, 238
H
Halde, 1, 3, 18
Haut-Rhin, 5, 31, 45, 72, 127, 128, 129, 132, 234
Héritage religieux de l’Europe, 11
Hôpitaux, 31, 240
I
Islam, 54, 238
Islamophobie, 20
J
Jours fériés, 16, 18
Judaïsme, 240
Juif, 4, 18, 21, 182, 188, 190, 193, 196, 204, 205,
210, 215, 216
K
Keshi, 116, 119, 122
Kinésiologie, 5, 69, 73, 74
Kippa, 5, 71, 116, 119, 122, 125
L
Laïcité, 5, 12, 18, 24, 31, 48, 49, 65, 69, 71, 77,
84, 99, 104, 109, 110, 112, 115, 116, 119,
121, 122, 125
Laïcité de l’Etat, 69, 84
Laïcité positive, 67
Lettonie, 3, 14, 15, 147, 148, 149, 150, 151, 152,
153, 154, 155, 156, 157, 158, 159, 160, 161,
162, 163
Liberté de religion, 14, 19, 20, 21, 42, 153, 158,
160, 161, 162, 182, 183, 184, 191, 192, 195,
198, 200, 201, 202, 203, 204, 205, 206, 207,
208, 210, 211, 212, 213, 214, 215, 216, 220,
221
liberté d'instruction religieuse, 5
Liechtenstein, 1, 3, 15
Lieu de culte, 14, 24, 104
Lieux de culte, 24, 31, 46
Lituanie, 4, 21, 158
Loi du 18 germinal an X, 45, 127, 132
Loi du 9 décembre 1905, 20, 24, 81, 88, 104, 105
Loi juive, 182, 188, 193, 198, 200, 203, 205, 216
Lycée, 24, 99, 100, 101, 115, 116, 118, 119, 121,
122
G
Gardien de la paix, 5, 69, 76, 77
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238
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R
Marseille, 3, 5, 20, 71, 104, 227, 228, 232, 238
Ministre du culte, 240
Ministres des cultes, 42, 45, 153, 160
Ministres du culte, 5, 9, 42, 45, 87, 145, 160
Mission interministérielle de lutte contre les
sectes, 38
Miviludes, 1, 3, 5, 16, 19, 71, 112, 113, 238
MIVILUDES, 5, 38, 39, 69, 73, 74, 224, 228, 230,
240
MONUMENT AUX MORTS, 238
Moselle, 127, 128, 132
Mosquée, 3, 20, 22, 24, 221
Mosquée de Paris, 24
Mouvements sectaires, 5, 24, 57, 70, 101
N
Neutralité, 5, 12, 49, 65, 69, 77, 84, 99, 112, 113,
206, 207, 210, 222
Neutralité des services publics, 5, 69, 84
Niqab, 5, 47, 48
O
Objecteurs de conscience, 240
ONG confessionnelles, 238
ONU, 3, 20
Opus Dei, 3, 16
Orgues, 238
P
Palais du Latran, 5, 63, 64
Patrimoine culturel, 21, 22, 24, 31
Pèlerinage, 238, 240
Portugal, 240
Prosélytisme, 5, 49, 67, 70, 101
Protection sociale, 42, 49, 135, 139
Protestantisme, 240
Q
Rapports parlementaires, 240
Report on International Religious Freedom, 9,
180, 224
Russie, 1, 3, 9, 19, 145
S
Secte, 5, 42, 54, 70, 93, 99, 101
Sectes, 19, 24, 38, 40, 42, 99, 101, 228, 238, 240
Signes religieux discrets, 1, 5, 71, 116, 119, 122,
125
Sikh, 116, 119, 122
Site Internet, 1, 5, 71, 112, 114
Sous-turban, 1, 116, 119, 122
Stupéfiants, 5, 72, 134, 135
Suisse, 15, 159, 238
SYNDICAT NATIONAL DES PROFESSIONNELS DE
LA KINESIOLOGIE, 5, 69, 73, 74, 75
T
Taxe foncière sur les propriétés bâties, les édifices
affectés à l’exercice du culte, 81
Témoin de Jéhovah, 5, 18, 70, 96
Témoins de Jéhovah, 1, 3, 5, 9, 42, 70, 71, 87,
88, 96, 99, 100, 101, 104, 105, 106, 107, 112,
145, 185, 210
Traité de Lisbonne, 1, 11, 12, 13
Traité établissant une Constitution pour l’Europe,
11
Turquie, 4, 21, 22, 23
U
Unadfi, 240
Union européenne, 11, 12, 13, 21, 22, 24, 240
USA, 3, 9, 18, 180, 224
V
Voile, 5, 47, 48, 50, 71, 116, 119, 122, 125, 222
Québec, 182, 183, 184, 185, 187, 191, 197, 202,
211, 212, 213, 217, 218, 219, 221, 222
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