Diagnostiquer une douleur thoracique aigu

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Diagnostiquer une douleur thoracique aigu
APPAREIL RESPIRATOIRE – Orientation diagnostique devant une douleur thoracique aiguë et chronique
21/10/2013
LEONART Valérie L3
Appareil Respiratoire
F. BARLESI
8 pages
ORIENTATION DIAGNOSTIQUE DEVANT UNE DOULEUR THORACIQUE AIGUË ET CHRONIQUE
Plan
A. Physiopathologie
B. Examen clinique
I. Antécédents personnels et familiaux
II. Facteurs de risque vasculaire
III.Sémiologie de la douleur
IV.Signes associés
V. Examen physique
C. Examen para-clinique
D. Diagnostic étiologique
I. Syndrome coronarien aiguë
II. Dissection aortique
III.Tamponnade péricardique
IV. Embolie pulmonaire
V. Pneumopathie
E. Douleur
I. Rythmée par la respiration
II. Non rythmée par la respiration
F. Conclusion
Objectifs : Diagnostiquer une douleur thoracique aiguë et chronique. Identifier les situations d'urgences et
planifier leur prise en charge.
Les douleurs thoraciques sont des motifs fréquents de consultation. Il n'y a pas vraiment de définition dans la
littérature pour dire à partir de quand une douleur thoracique est chronique (pour la toux chronique, ça
existe). L'important quand quelqu'un se plaint d'avoir mal à la poitrine, ce qui est urgent, c'est de ne pas rater
le diagnostic qui va engager le pronostic vital et qu'il faut prendre en charge dans les meilleurs délais. Après,
pour le reste, on a un peu de temps.
A. Physiopathologie
Ce qui fait mal dans le thorax :
– La paroi : cotes, muscles...
– Les organes : cœur, aorte, œsophage...
– Les enveloppes : plèvre, péricarde...
Les bronches, et le parenchyme pulmonaire n’entraînent aucune douleur (seules les pathologies
pulmonaires survenant au contact de la plèvre sont éventuellement sources de douleur thoracique). Ce qui
explique qu'une maladie bronchique ou pulmonaire, tant qu'elle n'aura pas atteint les éléments environnant
comme la plèvre, ne déclenchera pas de douleur, elle sera donc diagnostiquée tardivement. C'est la cas pour le
cancer pulmonaire qui ne présente aucun symptôme dans la phase précoce.
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B. Examen clinique
I. Antécédents personnels et familiaux
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Durant l'interrogatoire, il est important de relever les antécédents personnels et familiaux suivants :
Coronarien : infarctus, angine de poitrine (pour le patient et la famille)
Maladies thrombo-emboliques veineuses : phlébites, embolies
Maladies respiratoires particulières
Cancer
Traitements en cours
II. Facteurs de risque vasculaires
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Age et sexe : > 50ans chez l'homme et > 60 ans chez la femme
Diabète
Hypertension artérielle
Tabagisme
Dyslipidémie : hypercholestérolémie et hypoHDLémie
Obésité : IMC (>30kg/m²) et Tour de taille (102cm pour l'homme et 88cm pour la femme)
Antécédents familiaux d'infarctus du myocarde et d'accident vasculaire cérébrale qui ont déjà été mis en
évidence dans l'interrogatoire des ATCD familiaux et personnels (Hérédité)
III. Sémiologie de la douleur
.
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Type : (piqûre, brûlure, serrement, striction, décharge électrique, crampe).
- Une douleur constrictive, en étau, évoque une anomalie coronarienne.
- Une douleur en coup de poignard, en pincement évoque un problème pleural ou d'embolie pulmonaire.
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Localisation : - Une douleur rétrosternale (les gens montrent avec le doigt au milieu)ou
médiothoracique évoque une douleur coronarienne, trachéale, ou œsophagienne.
- Une douleur en bas, sur le côté et/ou dans le dos fait penser à une atteinte pleurale ou pleuroparenchymateuse.
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Irradiation : - Les douleurs coronariennes (constrictives, rétrosternales) irradient soit dans la mâchoire,
soit dans les membres supérieures.
- Une douleur qui irradie dans le dos est plutôt aortique.
- Les douleurs qui partent de la poitrine vers le bras en suivant la topographie d'un nerf périphérique
souligne l'atteinte du plexus brachial→ Dans les cancers du poumon du sommet, il peut y avoir le
syndrome de Pancoast-Tobias avec une douleur au niveau de C8, T1, T2 et il peut également y avoir
une atteinte du plexus brachial (compression du plexus par la tumeur).
- Et enfin, les douleurs qui suivent le trajet des côtes orientent vers un ZONA ou une névralgie.
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Facteurs déclenchants : - Quand les gens subissent des traumatismes et ont mal à la poitrine, on sait
que c'est dû à une lésion pariétale
- Les douleurs survenant au cours d'un effort (constrictive et rétrosternale) font penser à une douleur
coronarienne.
- Une douleur favorisée par l'ingestion d'aliments évoque une douleur œsophagienne.
- et les douleurs aggravées lorsque l'on se penche en avant révèlent un reflux gastro-oesophagien :
pyrosis (brûlure rétrosternale ascendante)
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Facteurs calmants : - Pour les douleurs coronariennes, l'action de la trinitine (en sublingual) soulage la
douleur par vasodilatation en moins de 3 minutes (la trinitine est un élément fort de diagnostic).
- La position penchée en avant calme les douleurs dues à la péricardite et à la pancréatite.
- La prise alimentaire calme les douleur de l'estomac.
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Une douleur rythmée par la respiration se majorant à l'inspiration profonde , à la toux et à la
palpation oriente vers une douleur pariétale ou pleurale (car en respirant, on met en mouvement la paroi
thoracique) et JAMAIS PULMONAIRE.
IV. Signes associés
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Généraux : fièvre et altération de l'état général
Cardiovasculaires : palpation et douleur des membres inférieurs
Respiratoires : dyspnée, toux, hémoptysie, cyanose
Neurologiques (syncope, lipothymie,troubles de la vigilance,...)
Digestifs (vomissements, dysphagie)
Rappel : dans le thorax, tout peut faire mal sauf le poumon. Donc c'est normal de faire l'interrogatoire sur tous
les appareils en lien avec le thorax.
V. Examen physique
L’objectif est d'identifier des signes de gravité, comme par exemple :
• Les signes de détresse respiratoire : cyanose, tachypnée, signes de lutte avec tirage (mise en jeu
des muscles accessoires pour respirer), asynchronisme thoraco-abdominal
• Les signes cardiovasculaires : signes de choc : pâleur, tachycardie, hypotension, marbrures,
extrémités froids
• Les signes neurologiques : syncope, lipothymie, agitation, trouble de la vigilance.
C. Examens para-cliniques
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Radiographie du thorax (de face, en inspiration) : analyse du cadre osseux, on peut voir des fractures de
côtes, une pleurésie.
Électrocardiogramme
Gazométrie artérielle
Bilan biologique : standard, enzymes cardiaques (troponine Ic qui s'élève en cas de souffrance
myocardique), D-dimères
D. Diagnostics étiologiques
Il faut bien connaître les urgences vitales, il y en a cinq : syndrome coronaire aiguë, dissection
aortique, tamponnade péricardique, embolie pulmonaire, pneumothorax.
I. Syndrome coronarien aiguë (SCA) (angor instable ou même infarctus du myocarde)33% des cas
Le SCA, donne classiquement une douleur brutale, constrictive, rétrosternale qui irradie dans la mâchoire et les
membres supérieurs. Elle peut aussi bien survenir au repos que pendant un effort. La prise de trinitine, soulage
la douleur.
Aucun de ces signes n'est spécifique mais ils peuvent orienter vers le diagnostic.
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Les éléments contre un diagnostic de SCA :
▪ Pas d'ATCD coronariens
▪ Douleur en coup de couteau
▪ Reproduite à la palpation (oriente plutôt vers douleur pariétale)
▪ Variant avec la respiration
▪ Variant avec la position
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Les éléments pour le diagnostic de SCA :
▪ Irradiation dans les deux bras
▪ Irradiation dans les membre supérieurs
▪ Irradiation dans l'épaule droite
▪ Sueurs diffuses
Le diagnostic se fait grâce à l'ECG qui peut révéler certaines anomalies et par le dosage de la troponine qui est
augmentée en cas de souffrance myocardique.
Il faut faire le diagnostic rapidement, car sinon une partie du cœur va se nécroser, entraînant une insuffisance
cardiaque. Le traitement consiste en une revascularisation de l'artère qui s'est bouchée, dans un délai de six
heures : coronarographie (chercher où c'est bouché pour déboucher grâce à un stent).
II. Dissection aortique (rare)
Elle correspond à une déchirure de la média (c'est une des couches de l'aorte : intima, média, adventice) de
l'aorte, créant un faux chenal et présentant un risque hémorragique important. Avant que l'aorte ne se perce, elle
se dissèque. Elle est très douloureuse.
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Douleur :
▪ Très intense
▪ Installation brusque
▪ Rétro-sternale
▪ Irradiant vers le dos
▪ Migratrice vers l'abdomen (car déchirure sur le long de la média de l'aorte).
▪ Non modifiée par la position
▪ Non modifiée par la respiration
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Les signes évocateurs d'une dissection aortique :
▪ Déficit neurologiques car l'aorte donne naissance aux artères nourricières du cerveau et la
déchirure de la média de l'aorte peut commencer au niveau de la carotide.
▪ Différence tensionnelle entre le bras gauche et le bras droit. La dissection aortique peut avoir
touchée les artères du bras gauche entraînant une différence de tension entre les deux bras.
▪ Souffle d'insuffisance aortique
▪ Élargissement médiastinal sur le cliché du thorax.
La dissection aortique est très grave et nécessite une chirurgie aortique en urgence. Les éléments de
diagnostic sont : l'échographie trans-thoracique (ETT), l'échographie trans-œsophagienne (ETO), le scanner
injecté (angio-TDM thoracique), l'IRM injectée (angio-IRM thoracique).
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III.Tamponnade péricardique (rare)
Cela correspond à un excès de liquide dans le péricarde (péricardite+++), empêchant la dilatation du
cœur, car le péricarde est inextensible.
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Instauration aiguë de la tamponnade péricardique : (tachypnée, collapsus, pouls paradoxal)
En plus de la douleur rétrosternale, un peu à type de pesanteur (soulagée par la position penchée en
avant), il y aura des retentissements respiratoires (tachypnée).
Le cœur ne se remplissant pas bien, il y aura une baisse de la tension artérielle entraînant un signe de
choc : collapsus.
De plus, on peut noter un pouls paradoxal marqué par une chute d'au moins 20mmHg de la pression
artérielle systolique entre l'inspiration et l'expiration (Pendant l'expiration, il y a diminution de
pression dans le thorax, le cœur peut ainsi plus se remplir, faisant augmenter la tension à
l'expiration).
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Instauration subaiguë de la tamponnade péricardique : (dyspnée, bruits du cœur assourdis)
Cette instauration fait plutôt penser à une insuffisance cardiaque droite avec la turgescence des veines
jugulaires, l'hépatomégalie douloureuse, le reflux hépato-jugulaire.
Pour faire le diagnostic de la tamponnade péricardique, le mieux est l'échographie cardiaque trans-thoracique
(ETT). Le traitement indiqué en urgence est le drainage péricardique.
IV. Embolie pulmonaire (fréquent)
Elle correspond a une douleur basithoracique brutale, comme un coup de poignard, elle est associée à une
tachycardie, une tachypnée et à une faible hémoptysie.
C'est un diagnostic fréquent et difficile à faire en se basant juste sur l'interrogatoire et l'examen. Ce qui oriente
le diagnostic c'est la probabilité clinique calculée à partir de scores et le dosage de D-Dimères (produit de
dégradation de la fibrine). Si D-Dimères positifs (test très sensible mais peu spécifique), on confirme le
diagnostic par un angio-scanner thoracique et on traite avec des anti-coagulants.
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V. Pneumothorax (fréquent)
Correspond à un épanchement d'air dans la cavité pleurale (épanchement aérien, gazeux), obligeant le poumon
à se rétracter sur son hile.
Pneumothorax complet gauche avec hyperclarté de l'hémithorax gauche ne contenant pas de structures
vasculaires et opacité hiliaire gauche (poumon gauche rétracté sur le hile).
Douleur brutale, en coup de poignard survenant surtout chez des personnes jeunes, longilignes et fumeuses.
L'examen clinique oriente assez bien le diagnostic : tympanisme à la percussion, diminution des vibrations
vocales à la palpation, et une diminution des murmures vésiculaires à l'auscultation.
On réalise une radio thorax à l'inspiration.
Le traitement consiste en l'évacuation de l'air par l'utilisation d'une aiguille ou d'un drain thoracique.
E. Douleurs SANS URGENCE VITALE
I. Rythmée par la respiration
•
Problème de la paroi thoracique :PARIETALES :
- post-traumatique (côtes cassées),
- tumeurs costales (métastases osseuses sur vertèbres et côtes).
- lésions vertébrales
- nevralgies cervicobrachiales Les nerfs sortent des vertèbres par les trous de conjugaison (entre chaque
vertèbre) et peuvent être comprimés par une tumeur, cette compression conduit à des névralgies.
•
Problème de la plèvre :
▪ La pneumonie infectieuse avec irritation pleurale peut donner des douleurs thoraciques rythmées
par la respiration. Le contexte infectieux et la radiographie du thorax oriente le diagnostic.
▪ La pleurésie est une douleur plutôt latérale et qui peut être brutale. C'est l'examen physique qui
dirige le diagnostic puisqu'il y a diminution des vibrations vocales et des murmures
vésiculaires et une matité à la percussion. On fait une radio du thorax et une ponction pleurale.
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L'image de gauche montre une pneumonie lobaire supérieure droite. Le scanner n'est pas nécessaire pour le
diagnostic de pneumonie. L'image de droite illustre une pleurésie, avec une opacité dense, homogène, concave
en haut et en dedans.
II. Non rythmées par la respiration
a. Angor d'effort stable
Douleur peut être typique (constrictive...) ou plus atypique avec une sensation d'oppression thoracique. Souvent
déclenchée par un effort, elle se calme dès que l’effort s’arrête (2 à 5 minutes après l'arrêt) ou après la prise de
trinitine. L'ECG est normal en dehors des crises donc recours possible à une épreuve d'effort pour confirmer le
diagnostic.
b. Péricardite
Avant qu'apparaisse la tamponnade, on observe une péricardite.
La péricardite entraîne une douleur inconstante liée à l'inflammation du péricarde. Elle se caractérise par une
localisation rétrosternale, est augmentée par l'inspiration et soulagée par la position penchée en avant. La
péricardite survient le plus souvent dans un contexte viral.
Le diagnostic est établie avec l'ECG, la radiographie (élargissement du thorax) et l'ETT.
c. Zona intercostal
Non traité en cours
d. Digestif
RGO, spasmes œsophagien, syndrome de Malory-Weiss (douleur faisant suite à des vomissements pouvant
entraîner des ulcérations de l’œsophage avec saignement), etc.
e. Psychogène
Ce diagnostic doit rester un diagnostic d'élimination.
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F. Conclusion
S'il y a des signes de gravités immédiates (respiratoires, neurologiques...), il faut penser aux cinq diagnostics les
plus urgents. Il faut aussi essayer de voir si la douleur est rythmée par la respiration.
A retenir :
1.
2.
3.
4.
Motif fréquent de consultation
évaluation clinique méticuleurse
2 examens indispensables : radio du thorax et ECG
5 urgences vitales → Traitement en urgence :
• SCA
• Dissection aortique
• Tamponnade
• Embolie pulmonaire
• Pneumothorax compressif
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