les applications militaires de l`observation dans l`infrarouge

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les applications militaires de l`observation dans l`infrarouge
Thermogram’ 2009
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LES APPLICATIONS MILITAIRES
DE L’OBSERVATION DANS L’INFRAROUGE
Joseph CANIOU
ex-ingénieur Délégation Générale de l'Armement
Chargé d'expertise en optronique au CELAR – 35170 BRUZ
[email protected]
Résumé.
Alors que les premières applications militaires de l’infrarouge en contexte opérationnel remontent à
la seconde guerre mondiale, le vrai départ de l’optronique militaire en France se situe vers le milieu
des années 1970, lorsque la DGA décide de lancer son programme d’armement appelé Système
Modulaire Thermique (SMT). Depuis, l’importance de l’optronique infrarouge n’a fait que croître, tout
particulièrement à des fins d’observation, de détection, de reconnaissance et d’indentification. Il est
intéressant de noter que les performances de portée ayant été pratiquement atteintes dès les
premières générations de matériels, l’effort a ensuite essentiellement consisté à réduire les
contraintes d’utilisation, en particulier par la réduction des masses, des encombrements et des
consommations électriques. Avec l’augmentation des séries, on comprend qu’un effort important à
également été fait pour diminuer les coûts. L’article propose un survol rapide de cette évolution de la
technologie, des premiers équipements aux systèmes les plus récents intégrant les dernières
innovations techniques que sont les détecteurs non refroidis et les détecteurs à puits quantiques.
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D’un point de vue militaire, il est courant d’opposer le domaine optique au domaine radar en comparant
les distances de portée et les conditions d’utilisation des équipements issus des deux technologies. En
effet, tandis que le radar est un système ‘tout temps’ et à très grande portée, la propagation des
ondes optiques est rapidement perturbée par les effets de l’atmosphère et des aérosols, ce qui a
pour conséquence d’en restreindre les conditions d’emploi. Malgré cela, on a pu constater tout au long
des dernières décennies, la diffusion progressive et régulière de l’optronique sur le champ de
bataille, tout particulièrement à des fins d’observation.
Les premières applications militaires de l’optronique en contexte opérationnel remontent à la seconde
guerre mondiale. Dès l’automne 1942, les allemands installent des équipements de vision semi-actifs
en infrarouge sur certains canons antichars et sur le char Panther. Début 44, les alliés ayant acquis la
supériorité aérienne, des équipements analogues sont distribués à certaines unités blindées
allemandes contraintes de se déplacer de nuit. Courant 45, on relève dans la littérature des
offensives allemandes menées avec succès en Europe centrale, grâce à leurs équipements de vision
nocturne. Côté allié, bien que le niveau technologique soit au moins équivalent, l’apparition des
matériels sur le champ de bataille semble un peu plus tardive. La première application importante
identifiée est le débarquement d’Okinawa (Avril 1945) pendant la guerre du Pacifique, où l’on estime à
environ 30 % les pertes japonaises attribuées à l’utilisation des lunettes de tir infrarouge semiactives.
Depuis, l’intérêt pour cette technologie et les concepts d’emploi associés, n’a fait que se renforcer. Il
suffit de se rappeler les récents conflits (Guerres du Golfe, ex-Yougoslavie...) pour constater qu’une
grande partie des opérations sont à présent menées de nuit. Aujourd’hui, l’optronique est devenue une
composante majeure du renseignement pour la préparation de mission ; pendant les opérations, elle
améliore la précision des armes, ce qui a pour effet de réduire les coûts d’intervention et de limiter
les effets collatéraux ; en tout temps, elle permet une surveillance indispensable à la sécurité des
pays et contribue ainsi activement au maintien de la paix.
Les fonctions militaires liées à l’observation dans l’infrarouge sont essentiellement :
le renseignement stratégique, en particulier d’origine aérienne ou spatiale ;
le renseignement tactique, c'est-à-dire en cours d’opération, par les dispositifs de veille, de
surveillance, d’alerte ou de reconnaissance ;
la mobilité, par l’aide au pilotage ou à la navigation ;
la conduite de tir ou le pointage, par l’aide à la détection, l’identification et la poursuite des
cibles ;
le guidage de précision, par la désignation d’objectif et l’autoguidage des missiles.
A - LE DÉVELOPPEMENT DE L’OPTRONIQUE MILITAIRE EN FRANCE
Le vrai départ de l’optronique militaire en France à des fins d’observation passive remonte au milieu
des années 1970. Il fait suite à une longue période d’études et d’évaluations. Après la seconde guerre
mondiale, il était devenu évident que des équipements capables d’étendre les capacités naturelles du
visible allaient donner, à ceux qui en étaient équipés, une supériorité souvent décisive. Cependant, le
choix des technologies restait à faire. On reprochait aux premiers équipements infrarouges semiactifs leur faible sensibilité, ainsi que les contraintes liées à l’emploi du projecteur associé, avec pour
conséquence, gros handicap sur le plan militaire, leur manque de discrétion. Mais quelles alternatives
envisager ?
Potentiellement, deux solutions étaient en concurrence. La première, l’intensification de lumière, déjà
bien connue, présente l’avantage d’utiliser l’éclairement naturel résiduel ; mais cette qualité même
constitue aussi son principal défaut, puisqu’elle devient, de ce fait, particulièrement vulnérable à
l’éblouissement. La seconde, la détection passive dans infrarouge, fonctionne à partir du rayonnement
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spontané des objets ; mais des travaux préliminaires importants étaient à prévoir pour améliorer la
sensibilité des détecteurs existants ou en inventer de nouveaux. Et dans le cas de l’infrarouge, quelle
bande spectrale choisir ? Pour illustrer cette période de réflexion, nous nous contenterons de citer
quelques équipements développés par TRT-Philips : caméras Luther et Thermidor ; et ceux de la
SAT : caméra Chamois, line-scanners Cyclope, super-Cyclope…
1 - Les équipements embarqués
● Le modulaire thermique de 1ère génération : 20 kg / 25 l / 140 W
La première période débute en 1976, lorsque la DGA décide de lancer son programme d’armement
appelé Système Modulaire Thermique (SMT) [*]. Certes, il existait déjà des matériels civils
fonctionnant dans l’infrarouge, caméras AGA et Inframetrics, en particulier. Mais ces équipements
destinés principalement à la radiométrie ne fournissaient pas une image de qualité suffisante pour
être exploitée sur le champ de bataille. L’enjeu fût donc de tendre vers le standard télévision de
l’époque, objectif qui s’accompagnait de plusieurs défis technologiques, à savoir :
la réalisation d’une petite matrice de détecteurs adaptée à la bande spectrale 3, et pour cela, le
choix d’un alliage nouveau pour l’époque, le Tellurure de Cadmium-Mercure (MCT) ;
un balayage série-parallèle capable de produire des images au format 4/3 de 500 lignes à 25 Hz ;
l’autonomie cryogénique, grâce à l’intégration d’une machine à froid split-Stirling ;
un traitement numérique du signal.
Image de contrôle d’une caméra radiométrique
AGA Thermovision 780.
Image d’une caméra SMT-Castor (Thalès).
La définition et la réalisation des modules furent confiées à SAT et TRT-Philips en coopération. Dans
la solution retenue, la matrice de 11x4 détecteurs décrit simultanément 11 lignes en parallèle, tandis
que les 4 détecteurs en série, reliés à un circuit à intégration de charges (TDI) synchronisé avec le
balayage, permettent de doubler la valeur du rapport signal à bruit.
L’architecture modulaire visait à faciliter par la suite, l’adaptation des éléments aux diverses
applications envisagées et, par la même, à réduire les coûts de développement et les délais de
conception et de fabrication. Le concept fût fructueux. De nombreux équipements furent réalisés
par les divers équipementiers du domaine : la caméra Castor de l’AMX30-B2, la caméra Athos des
premiers Leclerc, le viseur Victor pour hélicoptères, la boule gyrostabilisée Chlio pour les
hélicoptères civils et militaires, le pod aéroporté PDLCT pour avion de chasse, etc. Certains de ces
équipements sont encore en service aujourd’hui. L’exemple le plus connu est, sans doute, la boule
gyrostabilisée Tango du Bréguet-Atlantic 2, utilisée fréquemment pour la lutte anti-pollution et les
recherches en mer.
[*] Des programmes analogues sont conduits simultanément aux USA (Common Module) et en GrandeBretagne (Thermal Imaging Common Module ou TICM).
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Modules du Système modulaire thermique : balayage
optomémcanique, détection, cryogénie, électronique.
Bréguet-Atlantic 2 : Missions de reconnaissance,
détection, recherche, lutte anti-pollution, sauvetage
en mer.
●
Caméra SMT-Castor (Thales).
Version militarisée pour l’AMX30-B2.
La boule gyrostabilisée Tango de l’ATL 2 contenant
les éléments SMT.
Le modulaire thermique de 2nde génération : 12 kg / 12 l / 80 W
Le modulaire thermique de seconde génération prend le relai au début des années 90. Le concept
reste le même que précédemment, mais en intégrant les avancées technologiques, en particulier la
nouvelle barrette Sofradir de grande dimension (288x4), qui permet d’améliorer la sensibilité tout en
simplifiant le balayage optomécanique. L’image de 576 lignes est décrite en 2 bandeaux successifs de
288 lignes, tandis que les 4 détecteurs en ligne continuent d’assurer l’intégration des charges pour
améliorer le rapport signal à bruit. Parmi les équipements fabriqués par les deux principaux
industriels du domaine, citons :
les caméras Catherine-GP, FP, FC et la boule gyrostabilisée Chlio-S à partir des modules Synergi
de TTD-Thalès ;
les viseurs de toit ou de mât du Tigre, la boule Euroflir du drone Sperwer, des équipements
aéroportés pour le Mirage 2000, des équipements pour le périscope des SNLE-NG, à partir
des modules Iris de Sagem.
Les portées de détection atteintes sont typiquement de 12 km sur fantassin, 15 km sur char et 25 km
sur avion de chasse, tandis que les portées de reconnaissance sont environ moitié.
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Système modulaire thermique 2ème génération Synergi (TTD-Thales) :
Caméra Catherine-GP (General purpose)
12,5 kg / 16 l / 75 W
Caméra Catherine-FC (Fire Control)
5,5 kg / 7,2 l / 25 W
Système modulaire thermique 2ème génération Iris (Sagem) :
Viseur de mât du Tigre HAD.
Drone Sperwer équipé de la boule gyrostabilisée
Euroflir.
2 - Les équipements transportables : 7 kg / 27 l / 12 W
Les spécifications de portées de détection-reconnaissance-identification étant globalement atteintes
avec les équipements précédents, de nouveaux besoins apparaissent nécessitant de pousser plus avant
les efforts déjà entrepris pour la réduction des masses et des encombrements. Les équipements
doivent à présent devenir transportables par l’homme, l’application typique étant les postes de tir des
missiles anti-chars ou de défense anti-aérienne à courte ou très courte portée (SACP et SATCP).
Le concept du modulaire a vécu. Réduire la masse et le volume nécessite d’optimiser l’architecture
d’ensemble pour aboutir à une meilleure intégration des éléments. Selon les constructeurs, le
détecteur de base peut être la barrette 288x4 (Thales) ou d’autres formats spécifiques (Sagem).
Parmi les réalisations typiques, citons :
les caméras Mira puis Mirabel de TTD-Thales, pour les viseurs des postes de tir des missiles
anti-chars, respectivement, Milan et Eryx ;
les caméras Tiger puis Alis de Sagem, respectivement, pour le poste de tir du Milan et le poste de
tir du missile de défense anti-aérienne SATCP Mistral.
En parallèle, des équipements dérivés fournissent les viseurs de plates-formes légères, telles que les
véhicules blindés légers (VBL, AMX10-RC), les hélicoptères ou les drones.
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Caméra Mira (TTD-Thales) pour le poste
de tir du missile anti-chars Milan.
Caméra Alis (Sagem) pour le poste de tir du missile SATCP
Mistral.
3 - Les équipements portables
● Les jumelles du fantassin : 2 kg / 8 l / 12 W
A partir de 1995, l’optimisation des équipements va se poursuivre. En plus des domaines d’application
précédents, il s’agit à présent d’équiper le fantassin de jumelles de vision nocturne pour la
surveillance du champ de bataille ou la conduite des véhicules. Au prix d’une réduction des
performances, compatible toutefois avec l’application envisagée, les masses et les volumes vont être
réduits environ de moitié.
Plusieurs technologies de détecteurs sont employées concurremment. Ainsi, tandis que les jumelles
Matis de Sagem intègrent de nouvelles matrices plan-focal InSb de 320x240 (pas de 30 µm) ou de
384x256 (pas de 25 µm), les premières jumelles Sophie LR de TTD-Thales conçues à partir du
module Synergi restent fidèles au format 288x4 déjà éprouvé. La version XR, plus récente, utilisera
cependant une matrice plan-focal MCT de 640x512 (pas de 15 µm) fonctionnant en bande spectrale 2.
En petit champ (4°x3°), les portées de détection sont typiquement de 5 km sur fantassin, 8 km sur
char et 16 km sur avion de chasse. Elles sont divisées par 2 en grand champ (8°x6°).
Sans toutefois atteindre des réductions de masse et de volume aussi importantes, les évolutions
technologiques profitent également aux équipements longue portée. Les matrices µ-balayées 2x2 des
versions STD (Standard) et LR (Long range) de Matis, par exemple, produisent des images de
640x480 ou 678x576 pixels. Aussi, ces matériels plus performants vont-ils remplacer la caméra Iris
de la boule Euroflir, ainsi que les viseurs des postes de tir du Milan et du Mistral.
Plusieurs versions de la caméra Matis (Sagem) :
STD (Standard), LR (Long range), Handheld
(Jumelles), MP1 (Man portable).
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Jumelles Sophie-LR (Thales). En dotation dans
l’armée française (IRTTA OB-72B).
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● Le non-refroidi : 1,5 kg / 4,5 l / 6 W
A partir de l’année 2000, un nouveau pas vers la simplification est franchi avec l’arrivée des
détecteurs non-refroidis. L’abandon des machines cryogéniques permet de gagner à nouveau sur les
masses, les encombrements et la consommation électrique. La fiabilité s’en trouve également accrue.
Autre avantage appréciable pour l’opérateur, les matériels deviennent inaudibles et aptes à
fonctionner quasi immédiatement.
Des jumelles sont réalisées à partir des deux principales technologies alors en concurrence. Ainsi, les
jumelles LION de TOSA-Thales sont-elles équipées, d’abord d’une matrice pyroélectrique
QinétiQ/BAE de 256x128, puis d’une matrice bolométrique ULIS de 320x240. Sagem, pour sa part,
propose également les jumelles Lutis, soit en version pyroélectrique, soit en version bolométrique.
Ces équipements sont plus particulièrement destinés à l’observation, la conduite de nuit des véhicules
ou les viseurs d’armes. Les portées de détection typiques sont de 1 km sur fantassin et 2,5 km sur
char.
4 - Les jumelles multifonctions
Vers 2005 apparaît le concept multifonctions. Avec les mêmes contraintes de volume et
d’encombrement, il s’agit à présent d’adjoindre à la fonction principale d’observation, les capacités de
localisation et de transmission de données. Les jumelles JIM-MR de Sagem en sont l’exemple le plus
typique. Elles viennent d’être adoptées par l’Armée française pour l’équipement du fantassin du futur
Félin. A l’imageur infrarouge en bande 3 au champ de 8°x6° équipé d’une loupe électronique x2, elles
associent :
un télémètre à sécurité oculaire ;
un compas magnétique capable d’indiquer la direction de visée en azimut et en élévation.
La masse est inférieure à 2 kg et l’autonomie sur batterie est de 3 h. Les portées de détection et de
reconnaissance sont respectivement de 3,5 km et 1 km sur fantassin.
Par comparaison, les jumelles JIM-LR en sont la version longue portée. Dérivées de Matis, elles sont
refroidies et fonctionnent en bande spectrale 2. Les champs commutables sont de 3°x2° et 9°x6°
avec une loupe électronique de grossissements 2, 4 ou 8. En plus des fonctions de la version MR
précédente, ces jumelles intègrent :
un pointeur laser rouge ;
une localisation GPS externe ;
la transmission numérique filaire ou hertzienne des images et des données au standard PR4G. La
masse totale est inférieure à 2,8 kg.
Les jumelles JIM-MR (Sagem) adoptées pour
l’équipement du fantassin Félin
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Pour comparaison, les jumelles à intensification de
lumière Lucie (Thales). En dotation dans l’armée
française (OB-70)
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Les portées de détection et de reconnaissance sont respectivement de 9 et 3,5 km sur fantassin.
Des jumelles multifonctions dérivées de Sophie sont proposées par Thales.
5 - Vers l’intégration des nouvelles technologies
Des développements en cours visent à intégrer des détecteurs à multi-puits quantiques dans les
caméras les plus récentes. Les avantages attendus en sont, d’une part, l’imagerie à très haute
résolution, d’autre part, une meilleure utilisation des caractéristiques spectrales du rayonnement. Ces
deux axes d’investigation sont représentés respectivement par les caméras Catherine-MP et
Catherine-XP de Thales.
La caméra Catherine-MP (Mégapixels) est réalisée à partir d’une matrice 640x512 (pas de 20 µm). Le
µ-balayage 2x2 fournit une image de 1280x1024 pixels à 25 Hz. La réponse spectrale du détecteur
refroidi à 73 K par un µ-Stirling rotatif est située dans la bande spectrale 8,6 ± 0,45 µm.
La caméra Catherine-XP bispectrale est réalisée à partir d’un matrice 384x288 (pas de 25 µm)
fonctionnant simultanément dans les bandes spectrales 4,6 ± 0,3 µm et 8,6 ± 0,45 µm. Le µ-balayage
2x2 fournit une image de 768x576 pixels à 25 Hz.
Ces deux équipements sont plus particulièrement destinés aux viseurs de char ou de véhicules
blindés. Les portées de détection typiques sont de 7 km sur fantassin et de 12 km sur char. Les
portées de reconnaissance sont environ moitié.
B - QUELQUES PLATES-FORMES REMARQUABLES
La plupart des matériels cités précédemment sont, ou ont été, en service dans l’armée française. Les
exemples de plates-formes optroniques d’observation les plus remarquables sont les suivants.
1 Pour le renseignement stratégique :
● le drone Sperwer, équipé de la boule gyrostabilisée Euroflir avec les caméras Iris ou, plus
récemment, Matis (Sagem). Mis en service 2004 en remplacement du Crécerelle, ce drone possède un
rayon d’action de 100 à 200 km à une altitude maximale de 3500 m. L’autonomie est de 6 à 8 h.
● les satellites Hélios IIA (Lancé en décembre 2004) et IIB (Lancement fin 2009 ?), comme
élément du C3R (Commandement, conduite, communication, renseignement). Placés sur orbite quasipolaire héliosynchrone à 675 km d’altitude, ils sont équipés de matériels d’observation à la fois en
visible et en IR avec une résolution au sol de l’ordre de 50 cm.
2 Pour l’observation tactique (Renseignement, surveillance, aide au pilotage ou à
la navigation, conduite de tir) :
- en milieu terrestre :
● le char Leclerc, équipé de 2 caméras Iris (Sagem), l’une pour le viseur chef de char, l’autre pour le
tireur (En remplacement à partir de 2001 du viseur tireur de première génération SMT-Athos) ;
● le véhicule blindé léger VBL-Source, équipé d’une caméra Catherine-XP (Thales) dans la tête
gyrostabilisée du mât optronique ;
● le véhicule blindé de combat d’infanterie VBCI, équipé d’une caméra Catherine-XP (Thales) asservie
au canon, avec présentation de l’image au tireur et au chef de bord.
● le fantassin Félin, équipé de la jumelle JIM-MR (Sagem) en dotation au niveau de chef de groupe
des régiments d’infanterie ;
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- en milieu air :
● le Rafale-F3, équipé du pod de reconnaissance Reco-NG (Thales) pour les vols en altitude jusqu’à
20 km. Le pod inclut deux caméras fonctionnant, l’une, dans le visible, l’autre, dans le proche IR, ainsi
que le scanner Super-VIGYL en bande spectrale 3. Le pod est relié au segment sol par une liaison
numérique en temps réel de portée 350 km ;
● l’hélicoptère EC-275 Caracal, équipé de la boule gyrostabilisée Chlio-S (Thales) pour la recherche
et sauvetage au combat (RESCO) sur terre ou en mer. Il est aussi utilisé pour des missions civiles ;
● l’hélicoptère Tigre, équipé de la caméra Iris (Sagem), soit pour le viseur de toit en version appuiprotection (Viseur Strix du HAP), soit pour le viseur de mât en version d’appui-destruction (Viseur
Osiris du HAD) ;
- en milieu marine :
● le Bréguet-Atlantic 2, équipé de la Boule Tango (Thales) pour les missions de reconnaissance,
identification, recherche. Il est également utilisé pour les missions civiles de surveillance aux
frontières en mer, la lutte anti-pollution ou le sauvetage ;
● l’hélicoptère NH-90, équipé de la boule gyrostabilisée Euroflir (Sagem) intégrant les caméras Iris
ou, plus récemment, Matis (Sagem) ;
● les frégates anti-sous-marines, anti-aériennes, multi-missions Horizon ainsi que le porte-avions
Charles-de-Gaulle, équipés de la veille panoramique Vampir-MB (Sagem) dans les bandes spectrales 2
et 3, associée à la conduite de tir Vigy-105 EOD fonctionnant dans le visible et les bandes spectrales
2 et 3 ;
● les sous-marins SNLE-NG, équipés du périscope non-pénétrant OMS (Sagem) dont la tête intègre
une caméra Iris associée aux voies visible et intensification de lumière.
3 Pour les postes de tir et le guidage des missiles :
● le sol-air très courte portée Mistral dont la version trépied peut être équipée de la caméra MatisMP2 (Sagem) ;
● les antichars courte portée Hot et Milan, équipés respectivement des caméras SMT-Mephira
(Thales) et Milis (Sagem) ;
● le sol-air courte portée Roland, équipé de la caméra Iris (Sagem) pour la surveillance sectorielle et
la poursuite, en association avec le radar de guidage ;
● le missile très longue portée filoguidé Polyphem (EADS) dont la pointe avant est équipée d’un
imageur infrarouge à matrice de détecteurs en bande spectrale 2 pour le téléguidage ;
● le missile de croisière anti-infrastructure Scalp-EG (MBDA) du Rafale (et sa version britannique
Storm Shadow pour l’Eurofighter), équipé d’une tête optronique pour le guidage terminal sur
l’objectif.
CONCLUSION
Ce rapide tour d’horizon confirme que l’optronique infrarouge constitue désormais un instrument
indispensable au service de la Sécurité et de la Défense du pays. Depuis le premier programme à
grande échelle lancé vers le milieu des années 1970, son importance n’a fait que croître, tout
particulièrement à des fins d’observation, de détection, de reconnaissance et d’indentification. Il est
intéressant de noter que les performances de portée ont pratiquement été atteintes dès la première
génération. L’effort à ensuite essentiellement consisté à réduire les contraintes d’utilisation par la
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réduction de la masse, de l’encombrement et des consommations électrique ou cryogénique, avec un
double objectif :
maintenir, voire améliorer encore, les performances des équipements embarqués ou
transportables ;
développer de nouveaux équipements portables à usage individuel, ce qui a permis de trouver de
nouveaux domaines d’emploi et donc, d’en étendre encore plus la diffusion.
Les séries devenant de ce fait plus importantes, on comprend qu’un effort important à également été
fait en parallèle pour réduire les coûts.
Les tendances actuelles sont principalement :
d’améliorer la définition des images, en cherchant à étendre à l’imagerie infrarouge les standards
de la télévision haute définition dans le visible ;
de mieux utiliser les informations spectrales, par le bispectral aujourd’hui, puis le multispectral
demain, et à plus long terme, le superspectral, l’hyperspectral, voire l’ultraspectral.
Le tableau 1 ci-dessous résume l’évolution des technologies optroniques pour l’observation militaire.
En ce qui concerne la miniaturisation, un effort important reste encore à faire, et l’on peut
raisonnablement envisager pour objectif, d’atteindre les caractéristiques des équipements actuels
d’intensification de lumière. Soit, pour se référer aux lunettes existantes Lucie (Thales) ou Clara
(Sagem) : une masse inférieure à 450 g, dans un volume inférieur à 0,8 l, avec une consommation
inférieure à 120 mW, soit en pratique, une autonomie typique de 50 h avec une pile AA de 3,5 V au
lithium.
Tableau 1 : Résumé de l’évolution des technologies optroniques pour l’observation militaire
Intensification de lumière active en Très-proche-infrarouge (0,8-0,9 µm)
Intensification de lumière
Infrarouge passif
Détection du rayonnement visible réfléchi
Détection du rayonnement thermique émis
dans les bandes spectrales 2 (InSb, MCT)
ou 3 (MCT)
Gen 1 :
Photocathode trialcaline
Monocellule & balayage optomécanique
Ecran phosphore
Barrettes & balayage optomécanique
Gen 2 :
Photocathode trialcaline
Galette de µ-canaux
Matrices plan-focal refroidies
Ecran phosphore
Matrices plan-focal non refroidies
Gen 3 :
Photocathode AsGa
Galette de µ-canaux
Matrices plan-focal bispectrales
Ecran phosphore
Matrices plan-focal haute résolution
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