LES DROITS ET LES OBLIGATIONS DES FONCTIONNAIRES

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LES DROITS ET LES OBLIGATIONS DES FONCTIONNAIRES
MILAN
Wilfried
LES DROITS ET LES
OBLIGATIONS DES
FONCTIONNAIRES
LAP
Il existe un statut général de la fonction publique composé de quatre lois dont
la loi du 13 juillet 1983 portant sur les droits et les obligations des
fonctionnaires qui s’applique à l’ensemble de la fonction publique civile
(fonction publique de l’Etat, fonction publique territoriale, fonction publique
hospitalière).
Les fonctionnaires sont, au sens du droit administratif (au sens de l’article 2 de
la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la
fonction publique de l’Etat), les personnes qui ont été nommées dans un
emploi permanent et titularisées dans un grade de la hiérarchie de
l’administration centrale de l’Etat, des services déconcentrés en dépendant ou
des établissements publics de l’Etat. La définition du fonctionnaire ne peut être
que relative car une personne est fonctionnaire que par rapport à un texte, au
sens de.
La définition du fonctionnaire proposée par le statut général de la fonction
publique n’est pas celle retenue par le code pénal, par le code des juridictions
financières....Cette même définition n’est pas celle retenue par le droit européen
et par le droit communautaire qui préfèrent retenir le terme d’agent public.
Comme l’indique l’intitulé de la loi du 13 juillet 1983, les fonctionnaires ont
des droits mais aussi des obligations.
LES DROITS DES
FONCTIONNAIRES
LES DROITS COLLECTIFS DES
FONCTIONNAIRES
Le droit français de la fonction publique oscille à l’égard des fonctionnaires
entre deux tendances :
-les fonctionnaires sont considérés comme des citoyens ordinaires et bénéficient
à ce titre de droits et de libertés fondamentales.
-ces droits et ces libertés ne leur sont pas toujours applicables comme ils le
seraient à des citoyens ordinaires et donnent lieu à des régimes dérogatoires
spécifiques.
La jurisprudence a plutôt tendance à considérer les fonctionnaires comme des
citoyens spéciaux (ce qui rejoint la thèse de monsieur Hauriou). Depuis plus de
vingt ans, elle a précisé le cadre juridique des droits et des libertés des
fonctionnaires exprimés par le statut de 1983.
I/Les libertés de réunion et d’association.
A/Le droit de réunion.
Il n’existe pas de réglementation spécifique relative au droit de réunion des
fonctionnaires. Les fonctionnaires sont donc soumis à la loi du 30 juin 1881
relative à la liberté de réunion comme tous les citoyens.
Néanmoins, l’exercice du droit de réunion est limité par les spécificités du droit
de la fonction publique. Il faut distinguer selon si les réunions ont lieu dans le
cadre du service ou si elles ont lieu en dehors du service.
-Les Réunions tenues pendant le service.
Les réunions doivent être autorisées et elles ne doivent pas troubler le
fonctionnement normal du service. C’est à l’administration qu’il appartient de
décider si cette réunion est compatible avec les besoins du service.
Il y a peu de contentieux en la matière (CE 1963 « Perreur »).
-Les réunions en dehors du service.
Ces réunions ne nécessitent aucun régime d’autorisation préalable.
B/La liberté d’association.
L’origine des associations de fonctionnaires est ancienne (III ème République).
Ces associations ont pendant longtemps servi de camouflages aux syndicats de
fonctionnaires qui ont été interdits jusqu’en 1946.
Aujourd’hui, les fonctionnaires bénéficient pleinement de la loi de 1901 et ces
associations peuvent être constituées pour la défense des intérêts professionnels
des agents ou bien à des fins amicales ou spécifiques. Ces associations peuvent
agir en justice pour défendre les intérêts de leurs membres.
L adhésion d’un fonctionnaire à une association n’empêche pas son adhésion à
un syndicat.
II/Les libertés d’opinion et d’expression.
A/La liberté d’opinion.
La liberté d’opinion des fonctionnaires, garantie par l’article 6 de la loi du 13
juillet 1983, est identique à celle de tous les autres citoyens et bénéficie de la
même protection constitutionnelle (protection par l’article 10 de la déclaration
des droits de l’Homme et du citoyen de 1789). Les fonctionnaires peuvent
donc avoir les opinions politiques et religieuses qu’ils veulent sans crainte de
subir aucune contrainte (liberté de pensée politique et liberté de conscience).
La carrière des fonctionnaires ne peut pas être pénalisée du fait de l’exercice de
mandats électifs et de prises de position dans l’exercice de ces mandats.
Il n’est pas interdit de révoquer un fonctionnaire dont les opinions politiques ou
syndicales sont notoirement connues dés lors que cette décision n’a pas été
influencée par des motifs politiques (CE 1962 « sieur Frischmann »).
Selon l’article 18 de la loi du 13 juillet 1983, il est interdit de faire mention des
opinions politiques, religieuses…dans le dossier du fonctionnaire.
Il est interdit à l administration de tenir compte des opinions de l’agent pour lui
refuser ou lui accorder un avancement (CE 1963 « Durrieux »).
B/La liberté d’expression.
La liberté d’expression des fonctionnaires n’est pas sans limite. Elle n’a aucune
commune mesure avec celle des citoyens.
Les fonctionnaires sont astreints aux obligations de neutralité et de réserve qui
sont autant de limites à leur liberté d’expression (ces éléments seront étudiés
dans la partie consacrée à la déontologie des fonctionnaires).
III/Le dialogue social et le droit syndical.
A/La liberté syndicale.
-La liberté de création des organisations syndicales.
Jusqu’en 1946, les fonctionnaires ne disposaient pas de la liberté syndicale et
ne pouvaient recourir qu’à des associations professionnelles autorisées par la loi
de 1901.Le préambule de la constitution de 1946, auquel renvoie celui de la
constitution de 1958, est venu donner un fondement constitutionnel à cette
liberté syndicale affirmée dans la loi du 19 octobre 1946.
Les fonctionnaires bénéficient depuis 1946 de la liberté syndicale en vertu de
l’article 8 de la loi du 13 juillet 1983 qui leur donne le droit de créer des
organisations syndicales et celui d’adhérer à des organisations existantes.
Il est interdit de soumettre la création de syndicats à un régime d’autorisation
préalable mais seulement à celui d’une déclaration préalable (conseil
constitutionnel 1971 « liberté d’association »). L’autorité administrative doit
être informée en cas de création de syndicat ou d’une section de syndicat et les
statuts et la liste des responsables de l’organisme syndical doivent lui être
communiqués.
Il est interdit de revendiquer la qualité de syndicat pour une organisation liée à
un parti politique (CCASS 1998 « front national police » à l’égard d’une
organisation de policiers liée à un parti d’extrême droite).
-Les prérogatives syndicales.
L’article 8 de la loi de 1983 dispose que les organisations syndicales
« peuvent se pourvoir devant les juridictions compétentes contre les actes
réglementaires concernant le statut du personnel et contre les décisions
individuelles portant atteinte aux intérêts collectifs des fonctionnaires ».
Exemple : Un syndicat ne peut pas directement agir contre une sanction
disciplinaire infligée à un fonctionnaire adhérent car c’est une décision
individuelle qui ne porte pas atteinte aux intérêts collectifs.
Le droit des syndicats d’agir en justice a donc une valeur législative tandis que
la liberté syndicale est garantie par la constitution. Mais il est légitime que le
législateur ait permis aux organisations syndicales d’introduire des actions en
justice. Le droit communautaire fait de même puisque la cour de justice des
communautés européennes a jugé que la liberté syndicale « implique non
seulement le droit pour les fonctionnaires et les agents de constituer librement
des associations de leur choix mais encore celui, pour ces associations, de se
livrer à toute activité licite dans la défense des intérêts professionnels de leurs
membres, notamment aux moyens d’action en justice » (CJCE 1994 « syndicat
général du personnel des organismes européens contre commission »).
A côté de ces grands principes, les fonctionnaires syndiqués bénéficient de
franchises syndicales qui sont des privilèges accordés par les textes pour
l’exercice concret de la liberté syndicale. Ainsi, les syndicats ont droit à des
locaux situés dans l’enceinte de l’administration et à l’affichage dans des lieux
non ouverts au public. Ces fonctionnaires bénéficient du droit de collecter des
cotisations syndicales dans leurs locaux et ils peuvent bénéficier d’autorisation
spéciale d’absence, pour participer à des réunions locales ou nationales, ou
même de décharge d’activité de service qui permet aux fonctionnaires investis
d’un mandat syndical de ne pas remplir toutes ses obligations et ses heures de
service. L’administration n’a pas à apprécier le bien fondé et l’utilisation des
autorisations spéciales d’absence et des décharges d’activité de service.
B/Le dialogue social.
Les organisations syndicales remplissent une fonction de représentation des
fonctionnaires dans toutes les instances paritaires et les procédures de
consultation.
Le fonctionnaire est dans une situation légale et réglementaire, la négociation
n’est donc pas en principe prévue pour son statut hormis le cas de la
rémunération (article 9 de la loi de 1983). Dés lors, les accords et les protocoles
n’ont pas de portée juridique mais seulement une valeur politique et morale. Le
juge administratif n’accepte donc pas que ces accords ou que ces protocoles
soient invoqués par les syndicats lors d’un contentieux (CE 1999 « association
syndicale des cadres supérieurs et des ingénieurs aux télécom »).
IV/Le droit de grève.
A/La reconnaissance du droit de grève aux fonctionnaires.
Jusqu’au préambule de la constitution de 1946, le droit de grève était interdit
aux fonctionnaires. Depuis 1946, le droit de grève s’exerce dans le cadre des lois
qui le réglementent (alinéa 7 du préambule de la constitution de 1946).
Depuis 1946, le droit de grève a une valeur constitutionnelle.
Pour éviter que le droit de grève ne l’emporte systématiquement sur la continuité
du service public, le conseil constitutionnel a élevé d’un étage dans la hiérarchie
des normes le principe de continuité du service public en en faisant un principe
général de droit à valeur constitutionnelle, ce qui est un cas unique (décision du
conseil constitutionnel du 25 juillet 1979). Il appartient au législateur
d’intervenir pour réglementer le droit de grève, le gouvernement pouvant
compléter par décret cette intervention (CE 1950 « Dehaene »). Le législateur
n’a pas osé adopter de texte venant encadrer, limiter l’exercice du droit de grève.
La grève est une cessation concertée de travail pour la défense des intérêts
professionnels (décision du conseil constitutionnel du 25 juillet 1979). La
grève est donc en principe une action collective et ne peut être le fait d’un agent
seul. La jurisprudence considère qu’un agent peut faire grève si celui-ci exerce
des fonctions spécifiques et qu’il se retrouve seul à pouvoir défendre utilement
ses revendications professionnelles ( CAA Marseille 1998 « Mademoiselle
Thomas » à propos d’une gardienne d’un château).
Certaines formes de grève sont interdites en France tant à l’intention du secteur
public qu’à l’égard du secteur privé. Les grèves politiques, les grèves surprises
(sans préavis), les grèves perlées (grève une heure par jour par service), les
grèves tournantes (répartition d’heures par jour), les grèves dites sur le tas
(grève avec occupation des locaux)…sont prohibées.
B/Les modalités du droit de grève.
Ce sont les dispositions du code du travail qui sont applicables aux
fonctionnaires. Lorsque les fonctionnaires font usage du droit de grève, la
cessation doit être précédée d’un préavis qui doit émaner d’une ou des
organisations syndicales représentatives sur le plan national, au sein de
l’employeur ou au sein du service concerné. Ce préavis doit préciser les motifs
du recours à la grève (afin de favoriser les négociations) et il doit parvenir cinq
jours francs avant le déclenchement de la grève. Le préavis fixe le lieu, la date,
l’heure du début de la grève et sa durée (durée pouvant être limitée ou illimitée).
Aucune réglementation concernant le droit de grève n’est applicable pour les
collectivités territoriales de moins de dix mille habitants car le droit du travail ne
s’applique qu’aux communes de plus de dix mille habitants. Mais le maire,
autorité territoriale, peut toujours réglementer l’exercice du droit de grève dans
le but de maintenir l’ordre public et de préserver la sécurité des biens et des
personnes (CE 1965 « Pouzenc »).
C/Les retenues sur traitement.
Le fonctionnaire se voit appliquer une retenue sur son traitement lorsqu’il
participe à une grève. Le calcul des retenues sur traitement varie selon les
fonctions publiques concernées.
-Dans la fonction publique de l’Etat, il y a application de la règle dite du
trentième indivisible, c'est-à-dire que la retenue est égale au trentième du
traitement pour chaque jour de grève que ce soit une heure ou une demijournée.
-Dans la fonction publique territoriale et la fonction publique hospitalière, les
fonctionnaires ne sont pas assujettis à la règle du trentième indivisible (faute de
texte). Ces fonctionnaires se voient donc appliquer des retenues calculées au
prorata de la durée de la grève (CAA Nancy 2001 « département de la
Moselle »).
La retenue sur traitement est calculée sur l’ensemble des rémunérations ; c'est-àdire que le traitement, l’indemnité de résidence et les primes sont pris en compte
dans le calcul.
La retenue sur traitement n’est pas une sanction disciplinaire. Au contraire, c’est
une mesure de comptabilité publique liée à la notion de service fait (absence de
service fait ici). La retenue sur traitement repose donc sur un simple constat
d’absence de l’agent et d’accomplissement de ses fonctions. Elle ne porte donc
aucune appréciation sur le comportement personnel du fonctionnaire.
LES DROITS INDIVIDUELS DES
FONCTIONNAIRES
I/Le traitement.
Selon l’article 20 de la loi de 1983, les fonctionnaires ont droit à une
rémunération après le service fait. Cette rémunération comprend plusieurs
éléments comme le traitement (défini par un indice fixé par rapport à un échelon
détenu par l’agent dans un grade), l’indemnité de résidence (complément de
rémunération), le supplément familial de traitement (calculé en fonction du
nombre d’enfants)….
L’aspect indemnitaire n’est pas négligeable car les primes peuvent représenter
de 10 à 90% de rémunération en plus. Les primes sont plus importantes pour les
fonctionnaires des administrations financières que pour les enseignants. Les
aiguilleurs du ciel battent tous les records avec des primes qui représentent 90%
de rémunération en plus.
La rémunération n’est due qu’en cas de service fait. Le service fait équivaut à
l’accomplissement du service, c'est-à-dire qu’il n’y a pas de service fait lorsque
l’agent n’effectue pas totalement son service ou lorsqu’il effectue mal son
service. Ainsi, la présence physique de l’agent dans le service n’emporte pas
satisfaction de la règle du service fait. Exemple : l’enseignant qui exerce une
rétention des notes et des copies accomplit mal son service (CE 1996
« Janton »).
La loi est cependant venue déroger à la règle du service fait en précisant que le
droit au traitement est maintenu pendant les périodes de congés annuels.
En matière de rémunération, le principe d’égalité entre les agents doit prévaloir
en ce qui concerne la rémunération principale, les primes et les indemnités. Mais
quatre nuances sont possibles :
-Il est possible d’instaurer une différence de traitement en matière indemnitaire
en raison de la localisation géographique des agents pour répondre aux besoins
de la population et aux nécessités du service (CE 2001 « syndicat
départementale CFDT du Gard »).
-Il est possible d’avoir une approche différente en matière indemnitaire à l’égard
de la situation maritale des fonctionnaires (CE 2002 « Villemain » à propos des
partenaires d’un PACS qui ne sont pas traités de la même manière que des
mariés).
-Le principe d’égalité ne joue pas nécessairement uniquement entre les
fonctionnaires appartenant à un même corps mais s’applique aussi à des
fonctionnaires occupant des emplois similaires (CE 2005 « syndicat national
unitaire et indépendant des officiers de police »).
-Depuis 2002 et l’application de la LOLF, une rémunération plus individualisée,
en fonction du mérite et de récompense collective liée à la performance,
s’instaure dans la fonction publique. Ces changements sont pour l’instant limités
car il n’existe pas de mesure de la performance.
II/Les pensions de retraite.
Actuellement, c’est la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites qui
régit le droit des retraites des salariés du privé et des agents publics. L’idée
générale est d’aligner la retraite des fonctionnaires (par le bas) sur la retraite des
salariés du privé. Cette loi ne s’intéresse pas aux agents qui bénéficient des
régimes spéciaux (SNCF, EDF…). Le législateur de 2003 n’a pas atteint son
objectif mais il a instauré une logique de convergence entre les deux systèmes.
A/L’alignement du secteur public sur le secteur privé.
L’idée d’alignement n’emporte pas celle de l’égalité. Il y a simplement une
tendance à harmoniser les règles de droit public et celles de droit privé en
matière de retraite (illustration avec le code des pensions civiles et militaires de
retraite par exemple).
La tendance est d’allonger la durée de cotisation. En 2008, le taux maximum de
liquidation de la pension, qui est aujourd’hui de 75% de la rémunération du
fonctionnaire dans les six derniers mois de sa carrière, est obtenu après quarante
années de service contre trente sept années et un semestre auparavant. Entre
temps, l’allongement de la durée de cotisation sera fait au rythme d’un semestre
supplémentaire par année (ça devrait passer à quarante et une annuités en 2012).
Le législateur de 2003 a instauré un coefficient de minoration. Il s’agit d’une
sorte de décote, applicable à compté de 2006, qui sanctionne l’absence de
trimestre nécessaire pour obtenir le pourcentage maximum de la pension. Ainsi,
la pénalité est de 1,25% par trimestre dans la limite de cinq années. Ce
coefficient s’élèvera à 3% par annuité manquante en 2011 et à 5% en 2015.
B/Le maintien de règles spécifiques.
La loi n’a pas touché au maximum de 75% de la pension, ce qui est loin d’être
le taux applicable au secteur privé.
Le montant de la pension est calculé en multipliant le pourcentage de liquidation
par le traitement détenu depuis six mois au moins par le fonctionnaire au
moment de la cessation des services (alors que c’est la moyenne des vingt cinq
dernières années dans le secteur privé).
Certaines pratiques administratives débouchent sur des promotions en fin de
carrière qui ne sont en réalité que destinées à faire atteindre au bénéficiaire le
taux le plus avantageux de sa liquidation.
LA DEONTOLOGIE DES
FONCTIONNAIRES
Il n’existe pas dans la fonction publique de code de déontologie applicable à
l’ensemble des fonctionnaires. De même, le statut général de la fonction
publique ne fait pas référence expressément à la déontologie des fonctionnaires.
Le terme de déontologie procède de l’association des mots déon (devoir) et
logos (science, discours). A l’origine, la déontologie est donc la science des
devoirs. Ce mot est un néologisme crée par un économiste utilitariste anglais
Benthem qui l’a employé en 1834 dans son ouvrage « Déontologie ou science
de la morale ». Ce mot entre officiellement dans la langue française en 1874.
Depuis, le développement de la déontologie s’est fait indépendamment des
règles juridiques. La déontologie fait référence à des valeurs morales qui
transcendent les disciplines (économie, droit…) et qui sont appréhendées par le
droit à sa façon. Ainsi, le droit recèle de codes de déontologie édictés par décrets
mais aussi de codes de bonne conduite édictés par voie de circulaires. Il s’est
donc développé dans les administrations un droit flou ou un droit à l’état gazeux
qui nuit à la compréhension des règles juridiques.
La déontologie des fonctionnaires peut être définie comme l’ensemble des
obligations qui s’imposent aux fonctionnaires dans l’exercice de leurs fonctions
mais également en dehors de l’exercice de celles-ci. Cette déontologie des
fonctionnaires se compose de règles juridiques formulées au sein du statut
général de la fonction publique, du code pénal, de textes constitutionnels
(déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789) mais aussi de
pratiques administratives dénuées de valeur normative. La jurisprudence a bien
souvent pourvu aux lacunes des textes pour rappeler aux fonctionnaires la portée
et l’étendue de leurs obligations.
LA LOYAUTE ET L’INDEPENDANCE
POLITIQUE DES FONCTIONNAIRES
I/L’exigence de loyalisme à l’égard des institutions et de la
nation.
Le loyalisme est une forme renforcée de la loyauté exigé par tout régime
démocratique de ses agents à l’égard des institutions. Les fonctionnaires sont
donc astreints à une obligation de loyalisme à l’égard de la nation, de son régime
démocratique et du pouvoir constituant. C est le loyalisme national et
constitutionnel mais qui ne suppose pas l’adhésion du fonctionnaire au
gouvernement.
Exemple : Manque à son obligation de loyalisme le fonctionnaire qui participe à
un congrès au cours duquel l’indépendance de certains départements est
revendiquée (CE 1964 « Beville »).
Exemple : Un brigadier de police ne méconnaît pas son obligation de loyalisme
en prônant publiquement l’indépendance de la Nouvelle Calédonie car la loi
elle-même permet à cette région de parvenir dans le futur à l’indépendance
(CAA Paris 1996 « Sako »).
II/La loyauté à l’égard de l’exécutif.
A/Obéissance.
L’article 28 du statut général de la fonction publique prescrit au
fonctionnaire d’obéir aux ordres qui lui sont donnés par son supérieur
hiérarchique.
Néanmoins, le fonctionnaire doit désobéir si deux conditions cumulatives sont
satisfaites :
-L’ordre donné doit être manifestement illégal (illégal de manière évidente).
-Cet ordre doit gravement compromettre un intérêt public.
Exemple : Il y a obligation de désobéir lorsque le préfet de Corse ordonne aux
gendarmes de brûler des paillotes.
Les fonctionnaires ont l’obligation de refuser les actes de harcèlement sexuel,
de harcèlement moral et ils bénéficient en contrepartie d’une protection
statutaire et pénale.
Il existe un cas particulier de désobéissance : c est le droit de retrait qui est le
droit pour les fonctionnaires de se retirer de leur situation de travail lorsqu’un
danger grave et imminent menace leur santé ou leur vie. Ce droit de retrait a été
instauré par une directive communautaire en 1982 pour les salariés du secteur
privé et il a été étendu à la fonction publique en 1995. Il existe aussi la théorie
du risque accepté (droit de retrait pas possible). Lorsque le droit de retrait a été
utilisé de manière fondée, l’agent ne peut pas être sanctionné disciplinairement
pour le refus d’obéissance et aucune retenue sur traitement n’est effectuée.
B/L’obligation de réserve des fonctionnaires.
Les fonctionnaires sont astreints à une obligation de réserve en vertu de la
jurisprudence (et non des textes) que ce soit dans l’exercice des fonctions ou en
dehors.
Exemple : CE 1965 « Pouzenc » à propos d’injures proférées par un
fonctionnaire à l’encontre de son collègue.
Exemple : manque à son obligation de réserve une institutrice qui a poussé des
parents d’élèves à faire des projets afin d’influencer sa hiérarchie.
Exemple : CE 1994 « Monsieur Robin » à propos d’un fonctionnaire qui se
livre à une distribution de tracts politiques au sein de son service.
Le Conseil d’Etat n’a pas une idée extrêmement précise de ce qu’est
l’obligation de réserve. Il y a donc une appréciation au cas par cas en dehors de
toute définition prédéfinie. L’obligation de réserve implique l’abstention du
fonctionnaire dans sa critique à l’égard de son employeur public. La
jurisprudence sanctionne en fait le caractère excessif de la critique, c'est-à-dire
que toute critique n’est pas sanctionnée mais seulement les injures, les
comportements agressifs, la diffamation…
Le juge administratif utilise la méthode dite du faisceau d’indices convergents
pour identifier l’existence ou non d’un manquement à l’obligation de réserve
(quatre indices cumulatifs) :
-La publicité des propos tenus ou des écrits formulés.
-Le niveau de l’agent dans la hiérarchie. L’exigence est plus importante à
l’égard d’un haut fonctionnaire que d’un fonctionnaire de catégorie C.
Exemple : CE 1953 « Teissier » à propos du directeur du CNRS.
-La nature des fonctions exercées. Une confidentialité est plus exigée dans
certaines domaines (administration fiscale, police, éducation nationale…).
-La forme de l’expression, c'est-à-dire ce qu’elle comporte d’excessif, de
diffamant…
Il existe aussi des circonstances aggravantes pour le juge administratif.
Exemple : pour les agents se trouvant à l’étranger, pour les agents collaborant
étroitement avec les autorités décisionnaires (préfets, élus locaux…).
Mais il y a aussi des circonstances atténuantes : la détention d’un mandat
politique, la détention d’un mandat syndical…
A chaque faute disciplinaire, des sanctions différentes sont appliquées car il y a
une gradation dans la sanction des manquements à l’obligation de réserve.
III/La loyauté à l’égard de l’administration.
Selon l’article 26 de la loi du 13 juillet 1983, les fonctionnaires sont tenus à
une obligation de discrétion professionnelle pour tous les faits (informations,
documents) dont ils ont connaissance dans l’exercice ou à l’occasion de
l’exercice de leurs fonctions. L’obligation de discrétion professionnelle protège
les secrets de l’administration/du service. C’est cette obligation qui interdit la
communication de certains documents à des personnes privées mais aussi à des
fonctionnaires qui n’ont pas la qualité à recevoir de tels documents.
Les limites de la confidentialité sont celles établies par la réglementation sur la
transparence administrative et celles posées par les chefs de service.
Il y a peu de contentieux disciplinaire en la matière.
CE 2003 « Monsieur Christophe X » (exemple de fait grave) : un commissaire
de police peut être sanctionné pour avoir divulgué des informations qui ont
alerté un individu sous surveillance policière et qui ont rendu son arrestation
plus difficile.
IV/La loyauté à l’égard de l’administré.
A/La neutralité des fonctionnaires.
La neutralité du fonctionnaire est en partie liée avec le principe de liberté et le
principe d’égalité qui a une valeur constitutionnelle. La neutralité impose au
fonctionnaire de traiter à égalité l’usager sans faire état des ses convictions
religieuses, philosophiques…
La neutralité des fonctionnaires repose sur une obligation d’origine
jurisprudentielle et non statutaire. La jurisprudence pose comme principe que les
fonctionnaires sont astreints, dans l’exercice de leurs fonctions, à un devoir de
stricte neutralité (CE 1950 « Mademoiselle Jamet »). L’obligation de neutralité
n’est donc plus imposée au fonctionnaire dans le cadre de sa vie privée.
La neutralité politique du fonctionnaire apparaît indispensable afin d’éviter des
conflits entre une administration permanente et des gouvernements changeants.
Michel Debré : « le fonctionnaire sert et se tait ».
L’obligation de neutralité politique ne fait guère l’objet de contentieux mais elle
n’est pas inexistante. Exemple : l’article L.50 du code électoral interdit à tout
fonctionnaire de distribuer des bulletins de vote et des professions de foi pour
les élections municipales.
La neutralité religieuse.
Pour l’enseignement préélémentaire et primaire, la loi exige que le personnel
soit laïc.
Pour l’enseignement secondaire, la jurisprudence renvoie à une stricte neutralité
(jurisprudence Jamet).
Pour l’enseignement supérieur, la cour européenne des droits de l’Homme
estime que l’interdiction du port du foulard islamique à une enseignante n’est
pas incompatible avec l’article 9 de la convention européenne de sauvegarde des
droits de l’Homme et des libertés fondamentales.
Avis CE 3 Mai 2000 « Mademoiselle Marteaux » : A propos de l’interdiction
du port du foulard islamique par un agent dans un collège.
C est le même principe pour tous les autres fonctionnaires.
CAA LYON 2003 « Mademoiselle Ben Abdallah » : A propos de
l’interdiction du port du foulard islamique par un contrôleur du travail.
Pour les sectes comme la scientologie : si le prosélytisme est intelligent, rien ne
peut être fait mais le fonctionnaire est attendu au tournant.
B/L’impartialité des fonctionnaires.
Elle est exigée pour le bon déroulement des concours et des procédures
administratives.
L’impartialité n’a rien à voir avec la liberté d’expression des fonctionnaires
(c’est différent de la neutralité). Il s’agit en fait d’apprécier la loyauté du
fonctionnaire envers les administrés. Le Conseil d’Etat a fait de l’impartialité
administrative un principe général de droit qui s’applique à tous les organismes
publics et aux membres qui les composent (CE 1949 « Monsieur Trèbes »).
La loi pénale interdit les discriminations (en fonction de la race, du sexe, de la
religion...) opérées par les fonctionnaires consistant à refuser le bénéfice d’un
droit accordé par la loi ou à entraver l’exercice normal d’une activité
économique quelconque. Exemple : l’article 432-14 du code pénal punit le
délit de favoritisme en matière de marchés publics.
C/Le secret professionnel.
Selon l’article 26 de la loi du 13 juillet 1983, les fonctionnaires sont tenus au
respect du secret professionnel dans le cadre des règles instituées dans le code
pénal.
Le secret professionnel protège les secrets des administrés qui sont confiés
volontairement ou de force par ces derniers aux fonctionnaires. Exemple :
l’article 226-13 du code pénal punit ceux qui ont enfreint le secret
professionnel sans réserver ce cas aux seuls fonctionnaires.
Le secret de la vie privée, le secret médical, le secret de la vie des affaires et le
secret fiscal sont couverts par le secret professionnel.
Le propriétaire du secret a toujours la possibilité de délier le fonctionnaire de
son obligation. Le législateur peut s’affranchir des règles relatives au secret
professionnel dans le respect des droits fondamentaux. Il y a des cas où le
législateur, pour des motifs de sécurité ou de cohésion de la vie sociale, a placé
les fonctionnaires dans une situation de secret professionnel mais aussi de
signalement de faits délictueux ou criminels auxquels ils seraient confrontés.
Exemple : les articles 226-14 et 434 du code pénal imposent la révélation du
secret en cas de sévices à l’encontre d’un mineur de moins de quinze ans ou
d’un incapable majeur ou pour prévenir ou limiter les effets d’un crime. C’est en
fait une obligation de dénonciation.
Exemple : l’article 40-2 du code de procédure pénale impose aux
fonctionnaires d’avertir sans délai le procureur de la république lorsqu’ils ont
acquis la connaissance d’un délit ou d’un crime.
Ces textes ne prévoient pas de sanction pénale pour les fonctionnaires en cas de
méconnaissance mais d’autres textes peuvent être invoqués pour les sanctionner.
De plus, la méconnaissance de ces dispositions peuvent servir de fondement à
des poursuites disciplinaires. Exemple : deux policiers participent à un congrès
au cours duquel les personnes apprennent à fabriquer des bombes. Le ministre
de l’intérieur révoque ces deux fonctionnaires car ils n’ont pas révélé les faits.
Pour le Conseil d’Etat, la révocation est justifiée car il y a bien une faute
disciplinaire.
Les fonctionnaires ont l’obligation de répondre, en tant que témoin, aux
convocations des juges d’instruction. En revanche, ils ont la possibilité de se
retrancher derrière le secret professionnel et donc de ne rien dire.
Le fonctionnaire peut participer à un procès en tant que témoin et critiquer son
employeur public ou une autre personne publique.
TA Paris 2003 « Madame Lainé » (exemple) : Maurice Papon, ancien préfet de
police, fait un procès à un historien pour diffamation. L’historien demande à
deux fonctionnaires archivistes de témoigner. Maurice Papon perd son procès.
La ville de Paris mute les deux fonctionnaires qui se retrouvent « au placard ».
Le juge administratif reconnaît que c’est une sanction déguisée. Ces deux
fonctionnaires devraient normalement être réintégrés dans la ville de Paris mais
cette dernière prétexte que les places sont déjà prises !
L’INTEGRITE DES FONCTIONNAIRES ET
LA QUESTION DU CUMUL D’ACTIVITES
I/L’intégrité des fonctionnaires.
Le statut général de la fonction publique n’impose pas aux fonctionnaires des
obligations d’intégrité, d’honnêteté….La jurisprudence a suppléé au mutisme du
législateur et exige donc des fonctionnaires le respect de telles obligations car
l’idée générale est de protéger la réputation de l’administration. Tous les écarts
de conduite rejaillissant sur la personne publique et jetant le discrédit sur le
corps auquel appartient le fonctionnaire seront susceptibles d’être sanctionnés.
Ces obligations d’intégrité, de moralité sont exigées pour les agents dans
l’exercice de leurs fonctions mais aussi dans le cadre de leur vie privée.
Les actes de violence commis par un fonctionnaire en dehors de son service
mais dont le caractère public a un effet néfaste sur son administration sont
assurément des fautes disciplinaires. Exemple : la révocation d’un fonctionnaire
de police qui a, au cours d’un repas de mariage, proféré des menaces de mort et
porté des coups à son épouse et à un invité est justifiée (CAA Bordeaux 1996
« Monsieur C »).
La délinquance financière ou crapuleuse commise par les fonctionnaires à titre
privé peut également servir de fondement à des poursuites disciplinaires.
Le fonctionnaire qui a un genre de vie incompatible avec le caractère de son
emploi peut faire l’objet de sanction disciplinaire. Exemple : instituteur
sanctionné pour s’être adonné à la boisson (CE 1965 « Sieur Vialle »).
Exemple : révocation d’un policier qui a fait usage de drogues (CE 1995
« Monsieur Capel »).
Il appartient au fonctionnaire de ne pas se compromettre avec des
fréquentations douteuses. Exemple : porte atteinte au bon renom de
l’administration l’adjoint administratif qui se livre au proxénétisme (CE 1970
« Sieur Beauville »). Exemple : révocation d’un inspecteur des impôts pour
avoir entretenu des relations avec des trafiquants d’alcool car c’est incompatible
avec l’honneur professionnel (CE 1968 « Ministre des finances contre sieur
Gomard »).
Lorsque l’administration veut sanctionner un fonctionnaire pour des faits
relatifs à sa vie privée, il faut que ces faits ne soient pas dépourvus de tout lien
avec le service, c'est-à-dire que la gravité des faits doit justifier en elle-même la
sanction disciplinaire ou que cette dernière doit être justifiée par l’atteinte à la
réputation professionnelle.
La faute purement privée (sans lien avec le service) du fonctionnaire ne peut
donner lieu à des poursuites disciplinaires. Exemple : ne doit pas être révoquée
la gardienne de la paix qui a tourné dans un film X moyennant rétribution et qui
a autorisé la distribution du film dés lors qu’aucune référence n’a été faite quant
à la qualité professionnelle de la personne et à sa profession de gardienne de
police (CAA Paris 2001 « Ministre de l’intérieur contre madame Slujka »).
Exemple : gendarme sanctionné à tort pour avoir entretenu une liaison avec
l’épouse de l’un de ses collègues qui était parti assurer l’ordre public en
Nouvelle Calédonie (CE 2005 « Monsieur Charles B »).
Toutes ces affaires illustrent les limites à respecter par l’autorité disciplinaire en
cas de faute commise en dehors du service. Lorsque l’administration s’érige en
censeur moral en dehors de toute considération liée au service, le juge
administratif censure. Le pouvoir disciplinaire cesse donc lorsqu’est en cause la
sphère purement privée du fonctionnaire.
II/Les règles relatives au cumul d’activités.
Les règles ont changé avec la loi du 2 février 2007 « modernisation de la
fonction publique » qui a assoupli les règles relatives à la déontologie du cumul
des activités. Il y a eu cet assouplissement car c’est un moyen pour l’Etat de
faire augmenter le niveau de vie des fonctionnaires sans directement accroître
leur rémunération publique.
A/L’interdiction de principe des cumuls d’activités.
La loi de 2007 a réécrit l’article 25 de la loi du 13 juillet 1983 et interdit
toujours aux fonctionnaires d’exercer à titre professionnel une activité privée
lucrative de quelque nature que ce soit.
Certaines activités privées sont absolument interdites même si elles sont
exercées à but non lucratif :
-la participation aux organes de direction des sociétés commerciales.
-de donner des consultations.
-de procéder à des expertises.
-de plaider en justice contre une personne publique.
-de prendre directement ou indirectement (pour un fonctionnaire) dans une
entreprise, soumise au contrôle de l’administration, à laquelle le fonctionnaire
appartient, ou en relation avec cette dernière, des intérêts de nature à
compromettre son indépendance. Le juge administratif posait déjà cette
interdiction (CE 2001 « SDIS du Nord »).
B/Les dérogations au principe.
Selon l’article 25-1 de la loi du 13 juillet 1983, les fonctionnaires peuvent
exercer à titre accessoire une activité lucrative ou non auprès d’une personne (ou
organisme) publique ou privée dés lors que cette activité est compatible avec les
fonctions qui leur sont confiées et qu’elle n’affecte pas leur exercice. Par
conséquent, il n’est plus nécessaire de distinguer aujourd’hui les cumuls
d’activités publiques ou privées.
Désormais, il faut deux conditions réunies pour que le cumul soit autorisé :
-L’activité doit être accessoire et ne doit pas affecter l’exercice de la fonction
principale. Dans le passé, l’article 7 du décret du 29 octobre 1936 (abrogé par la
loi de 2007) obligeait à ce qu’un cumul ne puisse pas porter sur plus de deux
emplois et à ce que la rémunération accessoire ne soit pas plus importante que la
rémunération principale. Les activités d’enseignement seront par exemple
considérées comme des activités accessoires.
-L’activité doit être compatible avec les fonctions. C’est à la commission de
déontologie de se prononcer sur cette compatibilité.
Il résulte de la lecture à contrario de l’article 25 de la loi de 1983 que les
fonctionnaires peuvent participer aux organes de direction d’organismes d’utilité
générale à caractère social, philosophique, culturel ou sportif qui agissent dans
un but désintéressé et dont la gestion est également désintéressée.
Les fonctionnaires peuvent aussi, pour le profit d’une personne publique,
donner des consultations, procéder à des expertises et plaider en justice. Si le
fonctionnaire donne une consultation à un particulier ou à une entreprise,
l’administration peut retenir sur son traitement l’équivalent des honoraires
demandés par le fonctionnaire. En pratique, cette sanction n’est jamais mise en
œuvre.
Le fonctionnaire peut créer ou reprendre une entreprise sans être soumis au
principe d’interdiction de cumul pendant une année. L’activité doit être déclarée
à l’administration et être examinée au préalable par la commission de
déontologie. La période d’une année peut être prorogée d’une année
supplémentaire.
Le fonctionnaire peut gérer librement son patrimoine personnel, familial et
détenir librement des parts sociales. Le Conseil d’Etat autorisait déjà ce cumul
(Avis CE 1949).
La loi de 2007 n’innove pas en reprenant l’autorisation pour les fonctionnaires
de percevoir des droits d’auteur conformément aux règles de la propriété
intellectuelle (loi du 1er août 2006 relative au droit d’auteur et aux droits
voisins dans la société de l’information).
Certains fonctionnaires peuvent exercer des professions libérales qui découlent
de la nature de leurs fonctions. Cette règle figurait déjà dans le décret de 1936.
Les fonctionnaires concernés sont les membres du personnel enseignant et les
personnes qui pratiquent des activités à caractère artistique. Exemple : cette
règle permet aux professeurs d’université d’être avocats.
Les psychologues scolaires et les professeurs de sport ne sont pas concernés par
cette règle.
Depuis la loi de 2007, les fonctionnaires peuvent bénéficier du contrat qui a
pour objet la réalisation des vendanges.
Certaines catégories de fonctionnaires bénéficient de dispositions législatives
spécifiques leur autorisant un certain cumul. Exemple : les architectes peuvent
être fonctionnaires et exercer une activité privée.
C/Les sanctions relatives à la violation des règles déontologiques.
Il existe trois formes de sanctions cumulatives :
-une sanction pénale prise sur le fondement des articles 432-12 (75 000 euros
d’amende et cinq années d’emprisonnement) et 432-13 (30 000 euros d’amende
et deux années d’emprisonnement) du code pénal. Le Conseil d’Etat n’hésite
pas à faire application des dispositions du code pénal pour annuler une
nomination qui contreviendrait aux règles relatives aux prises illégales d’intérêts
(CE 1996 « Société Lambda »).
-une sanction disciplinaire prise par l’administration pouvant aller jusqu’à la
révocation. Exemple : sanction d’un fonctionnaire territorial qui s’est livré à une
activité privée de photographe (CE 1990 « Ville de Toulouse contre
Mirguet »).
-une sanction financière (obligation de reversement instituée par la loi de 2007
qui a repris sur ce point l’article 6 du décret de 1936). Le fonctionnaire doit
reverser à son employeur l’intégralité des rémunérations irrégulièrement perçues
sans qu’il y ait une déduction du montant de l’impôt sur le revenu acquitté sur
ces rémunérations.
F
I
N