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«Les Espagnols croient à l'avenir de l'Europe» dans Le Figaro (12 juin 1985)
Légende: Le 12 juin 1985, le quotidien français Le Figaro décrit l'état d'esprit des Espagnols face à l'adhésion de leur
pays à la Communauté économique européenne (CEE).
Source: Le Figaro. 12.06.1985. Paris: Le Figaro. "Les Espagnols croient à l'avenir de l'Europe", auteur:Acuna, RamonLuis.
Copyright: (c) Le Figaro
URL: http://www.cvce.eu/obj/les_espagnols_croient_a_l_avenir_de_l_europe_dans_le_figaro_12_juin_1985-frf1c2dd73-25bd-4bea-8d76-bd49783f4b1d.html
Date de dernière mise à jour: 20/02/2014
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Les Espagnols croient à l'avenir de l'Europe
L'entrée de l’Espagne dans le Marché commun représente un grand tournant dans la politique
extérieure de Madrid. Le gouvernement pense que l'opération commencera à être nettement payante
dans six ans.
MADRID : Ramon-Luis ACUNA
Au terme d'une longue et éprouvante négociation au finish, l'Espagne signera enfin l'acte d’adhésion à la
C.E.E. ce mercredi 12 juin. Elle le fera au cours d'une cérémonie solennelle présidée par le roi Juan Carlos
au palais royal « Oriente » avec la participation des chefs de gouvernement européens.
C'est une date historique. C'est l'amorce d'un grand tournant dans la politique extérieure de l'Espagne. Il
s'agit de son premier traité d’alliance en Europe au XXe siècle.
A l'intérieur du pays, tout le monde est d'accord, « l'Espagne est la seule nation à s'intégrer à la C.E.E. avec
l'unanimité totale de ses forces politiques », rappelle le président Felipe Gonzalez. Et il a même ajouté : «
Nous, Espagnols, nous sommes les Européens les plus convaincus. »
D'après un sondage publié dimanche par le journal « El Païs », les Espagnols croient que l'entrée de
l'Espagne dans le Marché commun va améliorer ses relations avec les pays européens, et faciliter la lutte
contre le terrorisme, l'insécurité, et même le chômage. Ils considèrent en revanche qu'elle pourrait
encourager l'inflation.
Donc, pour l'heure, le mot le moins prononcé dans la capitale espagnole est « europessimisme ». L'Europe
représente la plus grande chance de modernisation de l'Espagne actuelle. En fait, cet élan de modernisation
constitue le grand espoir ouvert par cet acte officiel de signature qui se déroulera dans ce grandiose palais
des Bourbon du XVIIIe siècle et par lequel « l'Espagne entre en Europe ».
A l'heure actuelle, en tout cas, la mode est à « l’européanisme » en Espagne, après une tendance à
l'isolationnisme, que le ministre espagnol des Affaires étrangères, Fernando Moran, a qualifié de «
dangereuse et pernicieuse ».
Pour expliquer cet « européanisme », son goût pour ce qui est européen, le président Gonzalez a dit : « Pour
nous, l’appartenance à l'Europe fait partie de notre processus d’affirmation des libertés de consolidation de
la démocratie, sans oublier combien elle peut aider au développement économique. »
L'Espagne attend donc que l’Europe soit un « aiguillon » pour son développement futur dans tous les
domaines : mais, elle-même, que peut-elle offrir en contrepartie ?
« Elle apporte une nouvelle dimension à la C.E.E. », répond Gonzalez. Pas tellement par son propre
territoire : 505 000 km2 ou l'important marché des 36 millions de consommateurs qu'elle représente, mais
surtout, par les liens très étroits avec l'Amérique latine.
Les inconvénients
En outre, l'Espagne fait de la Communauté, la première puissance mondiale en matière de pêche et elle
augmente considérablement sa richesse agricole.
En scellant mercredi son appartenance au Marché commun, l'Espagne ne fait que souligner une évidence :
ses échanges commerciaux avec l'Europe des Dix (176,3 milliards de francs en 1984) représentant la moitié
de son commerce extérieur. Le solde d’ailleurs, est favorable à l'Espagne ; il a été en 1984 de plus de 18
milliards de francs. Ce commerce espagnol à l'intérieur de la C.E.E. ne fera que se développer.
Mais il y a aussi l'impact négatif de l'adhésion. Beaucoup d'entreprises ne pourront pas supporter le choc du
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démantèlement, même progressif, des tarifs douaniers. Il y aura de sérieuses difficultés dans l’adaptation aux
normes communautaires. L'application de la T.V.A. va relancer l'inflation, maintenant que les socialistes
l'avait réduite à moins de 9 %. Il n'y a pas de postes de travail en Europe pour les trois millions de chômeurs
espagnols.
« Au moment où les Espagnols entrent dans la C.E.E., le Marché commun est une maison avec des fuites
d'eau, c'est vrai, mais c'est vrai aussi qu'il risque de tomber des cordes à l'extérieur. » Voilà la réflexion que
se sont fait les Espagnols pour expliquer la décision de l'Espagne d'adhérer à la communauté, même par
temps de crise économique.
Pour Manuel Marin, secrétaire d'État espagnol des Relations avec la C.E.E., l'impact de l'adhésion espagnole
ne se fera sentir en Espagne qu'au bout de six ans, comptés à partir de la date effective d'entrée : le 1er janvier
1986.
« L'adhésion à la C.E.E. ne va pas produire des effets dans les vingt-quatre heures », nous dit-il en ironisant.
Il n'est satisfait qu'à 60 % de ce qu'il a négocié à Bruxelles, mas il a fait son calcul : « Pendant les cinq
premières années, l'Espagne va recevoir à peu près la même chose qu'elle va payer. C’est seulement à partir
de la sixième année qu'elle obtiendra des bénéfices nets, et pas extraordinaires. »
Une telle tranquillité d'esprit ne doit pas tromper : après un isolationnisme qui date au moins du congrès de
Vienne en 1815, et avec une industrie jusqu'à présent très protégée, le pari européen ne sera pas facile à tenir
pour l'Espagne.
R.-L. A.
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