Le débit de boisson municipal

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Le débit de boisson municipal
SAGITTA
Consultants en gestion publique
Le débit de boisson municipal
Le « bistrot du village », est un lieu privilégié de convivialité. La fermeture du dernier café
est vécue comme le signe de la fin du village. La démographie et les changements du mode
vie affectent fortement l’équilibre économique de ces petites entreprises et, l’âge du
dirigeant aidant, la fermeture semble inéluctable. Ces éléments légitiment souvent une
intervention publique : les communes se substituent à l’initiative privée défaillante mais
cette intervention s’exerce dans un champ très réglementé qu’il faut connaître et dans des
conditions économiques qu’il faut apprécier.
Le débit de boisson, activité réglementée
La vente de boisson est réglementée par les dispositions du code de la santé publique. Celui-ci
classe les boissons en 5 catégories : 1- sans alcool, 2- vins et autres boissons non distillées
(bières et cidres), 3- jusqu’à 18° d’alcool (vins doux naturels, vermouth), 4 & 5 – au-delà de
18° (apéritifs anisés, whiskies). Pour vendre les boissons des groupes 3 à 5, il faut être
titulaire d’une licence IV, la licence III s’appliquant aux restaurants. Or, le nombre des
licences IV est contingenté et, sauf exception dans les villes nouvelles, on ne peut pas en créer
de nouvelles. Cette contrainte oblige les collectivités à obtenir des licences IV et à se trouver
dans la situation d’un exploitant de débit de boisson. En outre, on ne peut implanter un café à
proximité d’un lieu de culte, d’un établissement d’enseignement, d’un hôpital ou d’un
cimetière. Cette interdiction ne joue pas dans les communes de moins de 2000 habitants et,
sur autorisation préfectorale, dans les zones où « les nécessités touristiques ou d’animation
locale le justifient ». L’ouverture de tout débit de boisson doit faire l’objet d’une déclaration
en mairie.
Comment obtenir une licence IV ?
Le contingentement des licences oblige à acheter une licence IV à quelqu’un qui en détient
une et à la faire transférer pour « nécessité touristique » dans la commune où doit s’ouvrir le
débit. Cette nécessité est démontrée lorsque la commune d’implantation et ses environs sont
dépourvus d’un tel établissement. La licence doit être achetée sous condition suspensive
d’obtention de l’autorisation et elle coûte de 7 000 à 15 000 € selon les régions. Ce transfert
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doit être demandé auprès des douanes qui instruisent la demande et saisissent une commission
présidée par le procureur de la République. La Direction régionale des douanes notifie
l’acceptation ou le refus de transfert au demandeur. Après un transfert touristique, un débit de
boissons ne peut plus être transféré en dehors de la commune de son établissement, la licence
se périme si elle n’est pas exploitée pendant trois ans. Beaucoup d’exploitants, privés ou
publics, n’ouvrent qu’un jour par an pour maintenir la validité, et donc la valeur, de leur
licence. Cette ouverture coïncide souvent avec la fête locale ou autre manifestation périodique
telle qu’une foire annuelle.
Une solution partielle : le débit temporaire
Il est possible d’ouvrir sans licence un débit de boissons de 4ème catégorie dans l’enceinte
d’une exposition ou d’une foire organisée par une personne publique sur autorisation de
l’organisateur et après déclaration en mairie et au service des douanes et droits indirects. Le
maire peut également délivrer des autorisations de débits temporaires (48 heures) dans les
installations sportives pour la vente de boissons des 2ème et 3ème catégorie à des associations
sportives (10 autorisations par an), pour des manifestations à caractère agricole (2
autorisations par an) et dans les communes touristiques pour des manifestations à caractère
touristique (4 autorisations par an).
Ne laissez pas fermer le dernier café !
La licence IV du dernier débit de la commune ne peut pas être transférée pour des besoins
touristiques : elle risque donc de disparaître faute d’ouverture temporaire ou d’exploitation.
La commune peut intervenir pour acheter la licence à un prix très inférieur à celui de la
licence transférable et maintenir ainsi l’activité. Souvent, elle peut aussi acheter les murs et le
fond de commerce.
Exploiter un débit de boisson
En règle générale, l’exploitation d’un café rural ne peut dégager de gros résultats et rend
aléatoire la rémunération d’une famille tout comme le retour des fonds investis par la
collectivité. Le promoteur public doit être très attentif au compte de résultat prévisionnel, il
doit s’assurer que les bases de calcul du chiffre d’affaires sont réalistes et conforme à ce qui
est observé dans des situations similaires. Il faut également choisir un mode d’exploitation qui
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procure un revenu décent au gestionnaire diligent et un intéressement substantiel à la
valorisation du fonds de commerce. Le mode d’exploitation dépend aussi du régime de
propriété de l’établissement.
1. En régie directe : La jurisprudence a admis qu’un bar hôtel restaurant dans un canton
rural puisse être érigé en service public. Dans ce cas, le débit peut être exploité en
régie directe par la collectivité : c’est peu approprié. Ce service public peut-être
délégué à un exploitant, personne physique ou morale après la publicité et les
procédures prévues par la loi Sapin.
2. En location simple : Quand la commune est propriétaire de murs et du fonds, licence
comprise, et que des subventions ont concouru à la mise à niveau de l’établissement,
ce dernier est réputé faire partie du domaine public communal. Cette caractéristique
donne à la convention d’occupation avec l’exploitant un caractère précaire et rend
impossible la constitution d’une propriété commerciale. Dans cette hypothèse, il est
très difficile de trouver un exploitant qui accepte de ne pas bénéficier des efforts qu’il
fait pour développer le fonds.
3. En location-gérance : lorsque le fonds de commerce a été exploité au moins deux ans,
la commune peut y installer un locataire-gérant. Le loyer qui lui sera demandé par la
collectivité doit laisser un revenu suffisamment attractif au locataire. La formule,
obligatoirement limitée en durée, permet à la collectivité d’apprécier la qualité d’un
gérant et à celui-ci de s’essayer au métier et à la localisation sans mise de fonds
initiale. Le bail de location-gérance peut prévoir la cession du fonds à son expiration.
D’autres formules sont possibles mais c’est la rentabilité prévisionnelle de l’établissement qui
guidera le responsable public : il ne peut généralement pas attendre un retour sur
investissement très rapide. Le choix de l’exploitant est la condition impérative de la réussite
de son opération.
Un concept attractif : le « Bistrot de pays »
Soucieuse d’enrayer la désertification des territoires et d’ajouter un élément de qualité à
l’attraction touristique, le SIVOM du Pays de Forcalquier a déposé le label « Bistrot de
Pays ». Adhérents d’une charte, les exploitants s’engagent à faire de leur établissement un
lieu de vie culturelle et, en l’absence de commerces locaux, un relais multiservices avec dépôt
de pain, timbres, épicerie de dépannage. On y délivre de l’information touristique et
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l’établissement dispose d’un présentoir avec quelques brochures. Le bistrot dispose également
d’une vitrine de produits du terroir sélectionnés avec les producteurs que l’on peut déguster en
« casse-croûte » ou au menu si l’établissement fait aussi restaurant. Les Bistrots de pays
participent également à l’organisation de manifestations culturelles et festives et organisent
chez eux des soirées à thème.
Remco WALLIG
Associé-gérant
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www.wallig.com
Pour en savoir plus :
-
Un ouvrage pratique sur les aspects économiques et juridiques : J'ouvre un café.
ACFCI CECOD 45, avenue d’Iéna - BP 448-16 75769 PARIS CEDEX 16
-
label « Bistrot de pays » : Bureau national des Bistrots de Pays - BP 41- 04300
FORCALQUIER Tél : 04 92 75 23 96 - Fax : 04 92 75 27 50 – Mél :
[email protected] Site : http://www.bistrotdepays.com
Cet article a été publié par Territorial en mars 2005

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