Mélanome - Cabinet de dermatologie
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Mélanome - Cabinet de dermatologie
D e r m a t o l ogie mélanome FZ. Belgnaoui1, K. Setti2, A. Al Bouzidi2, N. Benchakroun3, H. Malajati4, Y. El Fakir4, K. El Khatib5 1 2 3 4 5 Dermatologue, Anatomo-pathologiste, Oncologue, Radiologue, Chirurgien plasticien Le mélanome est une tumeur maligne qui se développe à partir des cellules mélanocytaires. D’origine neuro-ectodermique, les mélanocytes migrent durant l’embryogénèse vers l’épiderme, les follicules pileux, certaines muqueuses, et aussi vers l’uvée, la conjonctive, l’oreille interne et les leptoméninges. Leur rôle est de produire de la mélanine. Plus de 90% des mélanomes naissent des mélanocytes cutanés mais les autres sites de mélanocytes peuvent aussi en être le point de départ. Il s’agit de la tumeur cutanée la plus redoutable à cause de son agressivité locale et de son très fort potentiel métastatique, à l’origine de 90% de la mortalité par cancer cutané. Elle constitue un véritable problème de santé publique dans certains pays comme l’Australie. Dans le reste du monde, quoique rare, la maladie connaît une hausse régulière de son incidence. Il est donc essentiel que tout praticien garde cette pathologie à l’esprit et qu’il en connaisse les principaux aspects cliniques afin de permettre un diagnostic précoce, seul garant d’une guérison. De même, toutes les mesures préventives sont à connaître et à conseiller aux patients, en particulier à ceux parmi eux qui présentent des facteurs de risque les prédisposant à développer cette maladie. Données générales Epidémiologie Mortalité Incidence La mortalité est de 1,2 à 1,5 /100.000 en France, de 5 en Australie et tend à augmenter (7% de 1990 à 2006 aux Etats Unis d’Amérique) mais pas de façon proportionnelle à l’élévation de l’incidence. Le mélanome est classiquement considéré comme une tumeur rare, représentant 1% des cancers en général et 5% des cancers cutanés. Cependant, son incidence a connu une très nette augmentation au point de devenir, après le cancer du sein de la femme, le cancer dont l’incidence a le plus augmenté durant ces 10 dernières années. Son incidence double ainsi environ tous les 10 ans et continue d’augmenter de 5% par an chez les personnes de phototype clair, soumises à un fort taux d’ensoleillement. Variant en fonction de la latitude (exposition au soleil) et du phototype des patients, l’incidence est de 5 à 10 nouveaux cas/100.000 habitants/an en France et dans la majorité des pays européens, de 20 à 30 nouveaux cas /100.000 habitants/an aux Etats Unis et de 40 nouveaux cas/100.000 habitants/an en Australie. Age et sexe Le mélanome peut se voir à tout âge mais c’est l’un des cancers les plus fréquents chez l’adulte jeune et surtout la femme jeune. Il reste exceptionnel chez l’enfant avant la puberté. Le sex-ratio est proche de 1. 250 CANCER Données marocaines Au Maroc, ainsi que dans les autres pays du Maghreb et d’Afrique, cette maladie est qualifiée de rare malgré le fort ensoleillement, avec une incidence variant entre 0,07 et 0,14/100000 habitants/an. Une étude marocaine réalisée entre 1973 et 1994 a permis de chiffrer le nombre de nouveaux cas par an à 13, ce qui réalise un chiffre de prévalence évaluée à 0,048 cas/100.000 habitants/an et une fréquence relative de 5% par rapport aux autres cancers cutanée. Ce chiffre doit toutefois être relativisé notamment en raison du nombre élevé de patients opérés sans étude histologique ou encore de patients ne consultant pas. L’âge moyen des patients était de 51 ans chez la femme et 60 ans chez l’homme (extrêmes de 6 à 95 ans). Le sexratio femme/homme était de 61%. Les facteurs prédisposant qui ont pu être relevés sont : les traumatismes (6%) et le xéroderma pigmentosum (1,2%). La maladie est survenue sur naevus pré-existant dans 18% des cas. La localisation plantaire était nettement prédominante (49,3%), suivie des membres supérieurs (12%), des localisations céphaliques (10%) et des localisations muqueuses (8,5%). Les formes nodulaires étaient les plus fréquemment observées mais ceci est plutôt témoin d’un retard de diagnostic : la majorité étant déjà aux stades II et III de la maladie. E nf in, s ur le p l a n é v o l u ti f, i l a é té o b s ervé une augmentation de fréquence de la maladie, déjà notée dans l’étude de Biaz et al, puisque 58% des patients avaient été diagnostiqués durant les 5 dernières années. L’étude plus récente de Benchikhi et al, conforte ce phénomène. Facteurs de risque Les principaux facteurs de risque sont la génétique et des facteurs environnementaux, principalement représentés par l’exposition solaire. Facteurs génétiques Antécédents personnels ou familiaux de mélanome : Un mélanome familial se définit par l’existence d’au moins deux mélanomes sur trois générations (surtout parents de premier degré). Ces conditions sont présentes en fonction des séries, chez 0,6 à 12,5% des mélanomes et sont souvent associées à un nombre élevé de naevi atypiques. Une personne qui a parenté de 1er degré atteint de mélanome, voit son risque de développer un mélanome multiplié par 2 à 3. Lorsque ceci survient dans un cadre de mélanome familial, le risque avoisine les 100%. D’autre part, une personne qui a elle même déjà développé un premier mélanome est plus à risque d’en développer d’autres. Plusieurs gènes de susceptibilité au mélanome ont été identifiés et leurs voies de signalisation sont de mieux en mieux connues. Les récentes études ont également révélé l’hétérogénéité de la génétique du mélanome. C‘est ainsi que la principale mutation concerne le gène CDKN2A et a été corrélée aux mélanomes du tronc et des extrémités, chez des sujets ayant eu des expositions solaires intenses et intermittentes. Une mutation de NRAS est observée, quoique moins fréquemment, au cours des mélanomes de l’extrémité céphalique de sujets exposés de façon chronique au soleil. Enfin, de plus rares mutations de cKIT ont été associées au mélanome acral. Ces avancées dans les domaines génétique et biologique ont permis de mieux comprendre les modalités de développement et de progression des mélanomes. Le développement de traitements inhibiteurs ciblés a également eu un très net impact sur l’amélioration de la prise en charge de cette maladie. La recherche de ces mutations, fait actuellement partie du bilan préthérapeutique de certains mélanomes évolués où le traitement chirurgical est insuffisant. Phototype : représenté par la couleur de la peau, des yeux et des cheveux et du type de réaction à l’exposition solaire. Les personnes les plus à même de développer un mélanome sont les sujets se rapprochant des phototypes I et II avec une peau claire, des cheveux blonds ou surtout roux, des éphélides (taches de rousseur) et ayant plutôt tendance a bruler qu’à bronzer lorsqu’ils s’exposent au soleil. Phototype Cheveux Carnation Ephelides Coups de soleil bronzage 0 I II III IV V VI Blancs Roux Blonds Blonds à chatains Bruns Bruns Noirs Albinos Laiteux Claire Claire à Mate Mate Brune Noire 0 +++ ++ +à0 0 0 0 Constants (+++) Constants (++) Constants (+) Fréquents Rares Exceptionnels Absents 0 0 Hâle Clair à moyen Foncé Très foncé Noir Tableau I : Classification des phototypes selon Fitzpatrick Xéroderma pigmentosum (XP) : Il s’agit d’une génodermatose de transmission autosomique récessive caractérisée par le déficit en facteurs de réparation des lésions d’ADN causées par les rayonnements ultra-violets. Sa fréquence est élevée au Maghreb et au Moyen Orient à cause de la fréquence des mariages consanguins. La connaissance de cette maladie est essentielle dans notre contexte étant donné la fréquence de survenue chez ces patients de tumeurs cutanées et oculaires : 80% selon une étude de Casablanca contre 45% dans la littérature, avec 11% de cas de mélanomes versus 1% dans la littérature. Le XP est aussi le plus grand pourvoyeur de mélanomes de l’enfant dans notre pays. 251 CANCER D e r m a t o l ogie Capacité de générer des naevus (ou naevi) atypiques. Ces derniers sont caractérisés par leur grande taille (> à 6 mm de diamètre), leurs formes ou couleurs irrégulières et leur siège pouvant se situer en zones non photoexposées. Une forme particulière est représentée par le syndrome du naevus atypique, où le nombre de naevi atypiques dépasse les cinquante. Dans ce contexte, le risque de développer un mélanome est d’autant plus important qu’il est associé à un contexte familial de naevus atypiques et/ou d’antécédents personnel ou familial de mélanome. Il est important de noter qu’il est inutile de réaliser des exérèses prophylactiques, le mélanome peut se développer sur n’importe quelle zone du tégument et pas seulement sur les naevi atypiques. Naevus congénitaux : Classiquement, seuls les naevus congénitaux géants dont la taille dépasse les 20 cm sont à risque de générer des mélanomes. Cette transformation peut être observée dans 5 à 15% des cas, le plus souvent durant l’enfance. Le risque de dégénérescence sur des naevi congénitaux de petite taille et de taille intermédiaire est controversé. Une étude tunisienne en a rapporté des cas. Exposition solaire Ce facteur de risque est évoqué devant la forte prévalence de la maladie chez les sujets de phototype clair exposés à des climats très ensoleillés (exemple des australiens). L’exposition aux rayons ultraviolets (UV) est un facteur de risque prouvé, et ce d’autant plus qu’elle a été intense, à l’origine de coups de soleil durant l’enfance. Une exposition continue ou répétée est plutôt incriminée dans la survenue des mélanomes de Dubreuilh. Les UVA (320-400 nm) et UVB (280-320 nm) sont tous les deux incriminés et agissent en créant des mutations au sein des molécules d’ADN. Une étude réalisée en 2013 sur 279 patients français a clairement mis en évidence l’impact de l’exposition solaire et de la photoprotection conférée par les cheveux en montrant que chez la femme, le mélanome se localisait plutôt dans la zone centrale de l’extrémité céphalique (joues, nez ou menton), alors que chez les hommes, il était de siège périphérique (tempes, cuir chevelu, oreilles, cou) (p< 0,0001). D’autre part, lorsque ces mélanomes étaient au niveau de ces zones périphériques chez la femme, ils l’étaient sur le côté droit dans 73% des cas, alors qu’ils étaient dans 58% des cas à gauche chez les hommes. Une autre étude effectuée en 2014, a montré un incidence rate ratio (IRR) supérieur chez la population militaire active par rapport à la population générale : IRR = 1.62, 95%, confidence interval = 1.40-1.86 Enfin, il est à noter que les UV artificiels des cabines de bronzage sont aussi dangereux que les UV naturels. Traumatismes Ils sont depuis longtemps incriminés dans la survenue des mélanomes acraux des maghrébins et africains subsahariens, sans que leur rôle en tant qu’inducteurs ou révélateurs de la maladie n’ait jamais pu être démontré. Plus récemment, une possible relation dose-effet entre traumatismes répétés et progression tumorale a été avancée, impliquant les cytokines secrétées lors de la cicatrisation ou encore le relargage des cellules tumorales dans la microcirculation. Immuno-dépression Constitue, quelle qu’en soit la cause, un facteur de risque. Les sujets les plus à risque de développer un mélanome sont donc Les personnes de phototype clair (couleur claire de la peau et des cheveux, cheveux roux, éphelides taches de rousseurs), bronzant peu et brulant facilement à chaque exposition solaire Les personnes ayant de nombreux naevi atypiques et ce d’autant plus qu’il existe des antécédents personnels ou familiaux de mélanome Les personnes ayant déjà fait un mélanome Les personnes ayant des antécédents familiaux de mélanome, surtout s’il s ‘agit d’une parenté de 1er degré Les enfants ayant un naevus congénital géant Les sujets fortement exposés au soleil avec coups de soleil fréquents, surtout dans l’enfance Tableau II 252 CANCER Aspects cliniques Les mélanomes surviennent de novo dans 75% des cas. Ils proviennent de la dégénérescence d’une lésion préexistante dans 20-30% des cas, en sachant que le risque de transformation d’un naevus dans une vie est estimé à 0,03%. Principales formes Figure 1 : Histoire naturelle du mélanome et de ses différentes formes anatomocliniques (extrait du Précis de dermatologie - 5ème édition) 253 CANCER D e r m a t o l ogie Le mélanome superficiel extensif (SSM : superficial spreading melanoma) : (Fig. 2, 3, 4, 5) Il survient plus fréquemment chez les sujets de 40 à 50 ans, avec une prédilection d’atteinte du dos chez les sujets de sexe masculin et des membres inférieurs chez les sujets de sexe féminin. Qu’il soit de novo ou sur naevus pré-existant, ce type de mélanome se caractérise par une évolution en 2 phases. La première radiale ou horizontale va permettre à la lésion d’évoluer lentement sur des mois voire des années, parallèlement à la membrane basale, avant que son évolutivité n’accélère lors de la deuxième phase dite de croissance verticale. La membrane basale est alors traversée et le risque d’emboles métastatiques devient très important même pour une très petite épaisseur de tumeur. Sur le plan sémiologique, il s’agit d’une lésion pigmentée dont le caractère de malignité est recherché par le classique « ABCDE »: A : Asymétrie B : irrégularité des Bords, souvent encochés ou polycycliques C : Couleurs inhomogènes (du brun au noir, bleu, zone dépigmentée, érythème), alors qu’en pratique, les patients sont plutôt alarmés par une lésion très foncée. D : Diamètre supérieur à 6 mm E : Extension en surface ou évolutivité récente remarquée par le patient ou son entourage. L’évolutivité peut concerner outre la taille, la couleur et/ou le relief. Un saignement ou un prurit peuvent également être rapportés. Une lésion qui présente un ou plusieurs de ces critères est très suspecte d’un mélanome en phase radiale lorsqu’il s’agit d’une macule, alors que la présence en son sein d’un nodule évoque un passage à la phase verticale. Cette règle n’est toutefois pas applicable chez les patients dont les naevi sont en majorité « inquiétants ». Dans ce cas, c’est le naevus qui ne ressemble pas aux autres qui devra être pris en considération. Il s’agit du signe du « vilain petit canard ». Le mélanome superficiel extensif est de meilleur pronostic que le mélanome nodulaire, mais à épaisseur égale, le taux de survie dans les deux formes devient similaire. Figure 2 : Mélanome de type SSM : Macule Figure 4 : Même patient en dematoscopie : pigmentée de la cuisse, éléments d’orientation : Survenue récente chez une patiente de 37 ans ; irrégularité de forme et de la pigmentation, taille > 6 mm Pigmentation épaisse envahissant les ostiums folliculaires Figure 3 : Mélanome de type SSm : Macule pigmentée, asymétrique, bords irréguliers et encochés, diamètre > 6 mm et évolutivité Figure 5 : Mélanome SSM superficiel vu 254 CANCER en dermatoscopie : Notons la présence de pseudopodes disposés de façon irrégulière à certains niveaux de la bordure de la lésion Mélanome acrolentigineux (Fig. 7, 8) Rare en occident où il représente 2 à 8% des cas, il s’agit de la forme la plus observée au Maghreb et en Afrique subsaharienne (49,3% au Maroc, 100% au Mali, 62% en Côte d’Ivoire, 76% en Algérie). La marche pieds nus a été longtemps incriminée mais cette prédominance s’est maintenue jusqu’à présent, longtemps après l’introduction du chaussage dans les sociétés africaines. Cette prédominance a également été retrouvée chez les noirs d’Amérique. Figure 6 : Mélanome acrolentigineux du talon : Placard pigmenté de grande taille et de limites irrégulières avec zone ulcérée de la composante verticale Chez des sujets âgés en moyenne de 50 à 60 ans, la lésion se présente sous forme d’une macule brune à noire, à bords irréguliers, siégeant volontiers sur le talon ou la région péri-unguéale et évoluant également en 2 phases, la phase verticale étant suspectée sur la présence d’un nodule ou d’une ulcération. De par sa localisation fréquemment cachée de la vue des patients, son diagnostic en est souvent fait à un stade tardif. Figure 7 : Mélanome acrolentigineux au stade de tumeur mamelonnée. La pigmentation visible à certains niveaux de la bordure permet d’orienter vers le mélanome Figur e 8 : A s p e c t e n d e r m a t o s c o p i e : Pi g mentation orientant vers l’origine mélanique. Multiples couleurs et vascularisation atypique orientant vers la malignité Mélanome de Dubreuilh (Fig. 9) Il représente 5 à 10 % des mélanomes et présente de nombreuses particularités par rapport aux autres formes cliniques de mélanome : Atteinte des zones photo-exposées, essentiellement le visage (tempes et régions malaires ++) Survenue chez les sujets de plus de 60 ans, plus fréquemment de sexe féminin et ayant été exposés à un rayonnement solaire chronique Couleur généralement plus claire de la lésion (chamoix à bistre) mais pouvant chez certains être brune ou même noire Extension progressive et lente sur de nombreuses années, aboutissant à une plaque parfois de plusieurs centimètres de diamètre, à contours irréguliers, bien limités et polycycliques. Sa surface est lisse ou légèrement mamelonnée. En revanche, l’apparition d’un nodule ou d’une ulcération est là encore le témoin de l’évolution vers la phase verticale. Figure 9 : Mélanome de Dubreuil de la joue : Placard pigmenté de plusieurs centimètres, pigmentation et forme irrégulières. Nodule témoignant de la phase verticale 255 CANCER D e r m a t o l ogie Mélanome nodulaire Il représente 15 à 30 % des mélanomes mais en est la forme la plus agressive puisqu’il présente une évolution d’emblée verticale avec un risque d’invasion métastatique rapide en quelques semaines ou mois. Les sujets de sexe masculin de 50 à 60 ans sont plus souvent concernés par cette forme clinique qui les atteint plus à l’extrémité céphalique ou au tronc. Cliniquement, il s’agit d’un nodule brun ou noir généralement homogène, de forme arrondie ou encore surmonté d’une ulcération. La principale difficulté diagnostique dans cette forme est rencontrée lorsque la lésion est achromique, faisant plus évoquer un granulome pyogénique, un carcinome basocellulaire ou un naevus dermique. Autres formes cliniques Mélanome unguéal (Fig. 10, 11) L’apparition ou la modification récente La largeur supérieure à 4 mm et surtout l’élargissement en allant vers la racine de l’ongle; ce qui témoigne de l’extension du processus Bandes multiples sur un seul ongle avec une irrégularité dans les épaisseurs des différentes bandes et dans les distances séparant les unes des autres (photos). En revanche, l’existence des bandes mélanonychiques sur plusieurs ongles est plus rassurante et peut être d’origine raciale ou iatrogène. Débord de la pigmentation sur la peau péri-unguéale, également dénommé signe de Hutchinson. En pratique, au moindre doute, il ne faut pas hésiter à réaliser une biopsie de l’appareil unguéal. L’évolution spontanée du mélanome au niveau de cette localisation se fait vers la dystrophie de l’ongle voire sa destruction ou vers une tumeur ulcérée. Figure 10 : Mélanome unguéal : Bandes mélanonychiques Figure 11 : Mélanome unguéal : Même patiente vue en der- de couleur, épaisseur et espacement irréguliers + élargissement de la pigmentation en allant vers le bord proximal de l’ongle (Coll Pr FZ. Belgnaoui) matoscopie (Coll Pr FZ. Belgnaoui) Il atteint volontiers le pouce et le gros orteil, sous l’aspect d’une mélanonychie ou bande pigmentée. Les signes d’orientation sont : D’autres diagnostics peuvent être évoqués devant une pigmentation unguéale : hématome sous unguéal, pigmentation ethnique Figure 12 : Pigmentation raciale : régularité des bandes par rapport au mélanome, ancienneté, stabilité et atteinte polydactylique fréquente (Coll Pr FZ. Belgnaoui) 256 CANCER Mélanome des muqueuses : Observé dans 5% des cas. Il peut toucher les muqueuses buccale, nasale, génitale ou ano-rectale. De diagnostic souvent tardif, le pronostic est généralement très sombre Mélanome de l’enfant : Il représente 0,5% des mélanomes et survient généralement sur naevus congénital géant ou sur terrain de xéroderma pigmentosum Mélanome métastatique de primitif inconnu : il peut s’agir de métastases cutanées, ganglionnaires ou viscérales d’un mélanome méconnu car ayant été détruit (sans analyse histologique), régressé ou encore siègeant sur une muqueuse. Mélanome achromique (Fig. 13, 14) : Il fait partie des formes les plus redoutables à cause du retard diagnostic qu’il induit. Il se présente habituellement sous forme d’un nodule rosée peu spécifique. Trouver une pigmentation en périphérie permet de le rattacher à une lésion mélanocytaire mais dans tous les cas, il ne faut pas hésiter à le biopsier au moindre doute. Figure 13 : Mélanome achromique plantaire Figure 14 : Mélanome achromique plantaire en dermatoscopie : vascularisation atypique et voile bleuté Diagnostic positif ou encore chronique et répétée lors d’activités professionnelles ou de loisir, l’apparition ou la modification récente d’une lésion pigmentée (lorsqu’elle est remarquée par le ou la patiente). Il est posé devant un faisceau d’arguments cliniques et anatomo-pathologiques. Clinique Interrogatoire : A la recherche d’antécédents de mélanomes personnel ou familial, la notion d’exposition solaire intempestive, notamment durant l’enfance Examen clinique : Il permet de retrouver des aspects classiquement décrits ou d’autres moins typiques. Cet examen clinique est aussi l’occasion d’évaluer l’état locorégional et général, à la recherche notamment de lésions satellites ou « en transit ». 257 CANCER D e r m a t o l ogie Dermatoscopie (Fig. 15) : Il s’agit d’une technique non invasive qui a été développé depuis quelques années dans le but d’améliorer la sensibilité du diagnostic clinique de mélanome qui est ainsi passé de 70% à 89%. Son principe est d’utiliser un système optique permettant un grossissement de la lésion cutanée de x10 à x80 en interposant ou pas une goutte d’huile, en fonction du type de lumière utilisée, polarisée ou non. Initialement mise au point pour permettre de faire la distinction entre lésions mélanocytaires ou non mélanocytaires, elle est actuellement d’un grand apport pour aider le médecin à distinguer une lésion naevique bénigne d’une lésion suspecte de malignité. Sa performance dépend fortement de l’expérience du manipulateur, l’obligeant ainsi à se former à une sémiologie spécifique assez complexe. Microscopie confocale in vivo : Il s’agit d’une nouvelle technique d’imagerie cutanée non invasive. Elle permet de visualiser l’épiderme et le derme superficiel avec une résolution cellulaire. Le but étant d’aider le praticien pour établir le diagnostic du mélanome. La sensibilité pour le diagnostic de mélanome de Dubreuilh a ainsi atteint dans certains cas les 100% avec une spécificité de 90%. La microscopie confocale sert aussi au suivi pour la détection des sites de récidives. Télédermatologie : C’est une discipline en pleine expansion dans certains pays comme la nouvelleZélande, l’Australie et l’Angleterre. Elle est basée sur le principe d’envoie de la photographie de la lésion suspecte à une plateforme pour être analysée par des experts, permettant ainsi au praticien une collégialité dans la décision thérapeutique. En Espagne, cette méthode a permis une réduction du Breslow au moment du dépistage. Le principe a par la suite été vulgarisé par la mise au p oi n t de r éc ent es a p p l i c a ti o n s p o u r s ma rtp hones permettant aux praticiens mais également aux patients tout venant de diagnostiquer un mélanome parmi ses lésions pigmentées. Cette méthode s’est révélée pour l’heure peu sensible et manque de cadre légal Données anatomo-pathologiques L’examen anatomo-pathologique permet le diagnostic positif et l’appréciation des facteurs pronostiques. Il guide la prise en charge thérapeutique. Actuellement, il fournit aussi le matériel tissulaire nécessaire pour les examens de biologie moléculaire. Ainsi, toute lésion suspecte de mélanome doit être excisée en vue d’un examen histopathologique. Techniques et moyens d’étude Cytodiagnostic, utile dans les tumeurs ulcérées ou suintantes, 258 CANCER Figure 15 : Dermatoscope Pièce d’exérèse, doit être complète (proscrire les biopsies partielles sauf au niveau des ongles ou en cas de tumeur de très grande taille en vue de mettre en place une stratégie thérapeutique après le diagnostic positif). Examen extemporané, aucune indication sauf pour le ganglion sentinelle. Ganglions régionaux et ganglion sentinelle Le principe du ganglion sentinelle est de réaliser l’exérèse du premier relai de drainage lymphatique du mélanome dans le but de dépister les micro-métastases chez les patients ayant des ganglions palpables cliniquement et de leur proposer, en plus d’un curage, un traitement adjuvant. La nouvelle classification de l’American Joint Comite on Cancer (AJCC) qui est entrée en vigueur en 2002 comprend les données obtenues lors de l'examen du ganglion sentinelle : le nombre de ganglions métastatiques représente le meilleur indicateur de survie à dix ans lors de ganglion sentinelle positif. Immunohistochimie, d’une aide précieuse pour le diagnostic positif et différentiel : Anti-PS100 : Très sensible mais non spécifique. Anti-HMB45 et Melan-A : plus spécifiques mais ne marquent pas tous les mélanomes. Anti-MiTF et anti-Tyrosinase : non spécifiques. - Sensibilité : PS100 >Melan-A > HMB-45 - Spécificité : Melan-A et HMB-45 Classification histologique : La classification des mélanomes repose sur l’architecture de la composante latérale intra épidermique et sur le contexte cutané. La composante mélanocytaire latérale est le témoin histologique du développement d’abord horizontale (intraépidermique, au-dessus de la membrane basale) des mélanomes. Dans une seconde phase, l’extension est « verticale » avec envahissement du derme superficiel (phase micro-invasive), puis du derme profond et de l’hypoderme (phase invasive). Mélanome avec composante latérale intra-épidermique Mélanome a extension superficielle : SSM (superficial spreading melanoma) : 50 - 60 % des cas, Composante latérale de type pagétoïde (les cellules tumorales prolifèrent sous forme de cellules globuleuses isolées ou en thèques dispersées dans toute l’épaisseur de l’épiderme) et ceci quelque soit la nature de la peau. Mélanome sur mélanose de Hutchinson-Dubreuilh (HMF-M/LMM) : 12% des cas, composante latérale de type lentigineuse (multiplication des mélanocytes dans l’épiderme sous forme de cellules isolées le long de la basale),contexte de peau sénile, avec dommage actinique. Mélanome acrolentigineux : ALM/MLM : 13% des cas de mélanome palmo-plantaire, péri unguéal et des muqueuses : composante latérale de type lentigineuse. Contexte : peau glabre ou muqueuse. Mélanome avec composante latérale inclassable : 10% des cas. La composante latérale est impossible à classer dans l’une des 3 catégories sus-citées. Mélanome sans composante latérale intra épidermique : < 10% des cas. Mélanome nodulaire (MN) : pas de composante latérale car le mélanome se développe d’emblée de façon verticale vers le derme. Mélanose / mélanome de Dubreuilh Début : stade horizontal intra épidermique, stade de «Mélanose» : prolifération mélanocytaire lentigineuse atypique Puis apparition de thèques horizontales avec extension aux infundibulums pilaires Puis envahissement du derme papillaire (souvent Cellules fusiformes) Mélanome acral lentigineux (ALM) Hyperplasie épidermique Prolifération mélanocytaire lentigineuse atypique avec de longs dendrites Composante invasive : extension aux canaux sudoraux avec coulées périvasculaires Mélanome nodulaire Pas de composante intra-épidermique latérale Co m p o s a n t e d e r m i q u e t r è s i n v a s i v e f a i t e d ’ u ne population mélanocytaire polyclonale (grandes cellules globoïdes, plages fusocellulaires…), pigmentée ou achromique avec mitoses nombreuses et stroma-réaction inflammatoire d’intensité variable (fig. 17) . Mélanome inclassable Aspects histologiques : Le diagnostic histologique du mélanome repose sur des critères architecturaux et cytologiques qui permettent de le distinguer d’une tumeur naevique bénigne. Les critères architecturaux : observés au faible grossissement. La nature maligne d’une lésion naevique, est évoquée devant : Asymétrie de la lésion Mauvaise délimitation latérale Thèques mélanocytaires épidermiques confluentes, variables en taille et forme, disposées de façon désordonnée (« pontage ») Prédominance de mélanocytes isolés intra-épidermiques, disposés de façon désordonnée Composante dermique invasive sans gradient de maturation Figure 16 : (HE, Gx40) Les critères cytologiques : observés au fort grossissement Pléomorphisme nucléaire. Nucléole proéminent Mitoses atypiques Pigment mélanique poussiéreux, verdâtre ou brunâtre. Formes histologiques classiques Mélanome à extension superficielle (SSM) Prolifération intra-épidermique de mélanocytes atypiques, isolés ou groupés en thèques Migration intra-épidermique pagétoide (fig. 16). Composante invasive polyclonale au sein d’un stroma inflammatoire Figure 17 : (HE, GX100) 259 CANCER D e r m a t o l ogie Formes inhabituelles des mélanomes Aspect clinique particulier : achromique, verruqueux, de petite taille (< 6mm), multiples. A cytologie particulière : ballonisantes, bagues à chatons, rhabdoïdes, fusiformes. A stroma particulier : desmoplastique, myxoïde, squelettogène. Sur naevus préexistant : congénital ou acquis. Mélanome régressif : disparition spontanée totale ou focale des mélanocytes tumoraux dans le derme et/ou l’hypo et /ou l’épiderme, ce qui peut poser d’énormes problèmes de diagnostic positif. Éléments pronostiques des mélanomes cutanés Critères principaux obligatoires dans le compte rendu : Niveau d’invasion selon Clark (fig. 18) Il permet d'évaluer le pronostic du mélanome en fonction du niveau d'invasion du derme. Cinq niveaux sont distingués : - Niveau 1 : Mélanome intraépidermique (mélanome « in situ ») - Niveau 2 : Invasion partielle du derme papillaire (DP) sans atteindre l’interface DP/DR (derme réticulaire) - Niveau 3 : Comblement du derme papillaire ou appui des cellules sur l’interface DP-DR. - Niveau 4 : Infiltration du derme réticulaire - Niveau 5 : Invasion de la graisse hypodermique Figure 18 : (niveau d’invasion de Clark) 260 CANCER Epaisseur maximale selon Breslow Sur coupe histologique colorée standard avec un micromètre oculaire étalonné, elle correspond à l'épaisseur tumorale maximale : mesure verticale depuis la couche granuleuse épidermique la plus superficielle jusqu’à la cellule tumorale la plus profonde (fig. 4) - Mesurée depuis le fond de l’ulcération en cas de mélanome ulcéré. - Ulcération : de grande valeur pronostique (après l’épaisseur) - Corrélée à l’épaisseur et l’activité mitotique. - Se définit par une interruption microscopique plus ou moins étendue de l’épiderme par la tumeur. Régression : Se définit par la disparition spontanée totale ou focale des mélanocytes tumoraux dans le derme et/ou l’hypo et /ou l’épiderme. Elle sous-estime le pronostic réel. Phase de croissance : Horizontale et verticale. Permet de distinguer parmi les mélanomes superficiels et minces ceux qui sont de bon pronostic (en phase horizontale) et ceux qui sont de mauvais pronostic (en phase verticale) Figure 19 (Epaisseur maximale selon Breslow) Critères accessoires - Type histologique : meilleur pronostic des mélanomes de Dubreuilh - Activité mitotique : mauvais pronostic si ˃1 mitose/ champ au G×40 - Profil tumoral : mauvais pronostic pour les lésions polypoïdes et bon pour les planes - Type cellulaire : mélanome fusocellulaire pur est de meilleur pronostic - Pigment mélanique : le mélanome achromique serait de plus mauvais pronostic. Éléments du compte rendu - Type histologique - Niveau de Clark et Mihm - Epaisseur selon Breslow - Ulcération - Index mitotique - Infiltrat lymphoïde : densité, topographie - Existence ou non de zone de régression - Existence ou non d’emboles vasculaires et d’envahissement nerveux Classification TNM (AJCC/UICC 7th edition, 2009) pTx : la tumeur primitive ne peut être évaluée PT0 : pas de tumeur primitive identifiable pTis : mélanome in situ PT1 : mélanome ≤ 1mm d’épaisseur a : sans ulcération, ˂ 1 mitose/mm2 b : avec ulcération et/ou au moins 1 mitose/mm2 - PT2 : mélanome >1 ≤ 2mm d’épaisseur a : sans ulcération b : avec ulcération - PT3 : mélanome >2 ≤ 4mm d’épaisseur a : sans ulcération b : avec ulcération - - PT4 : mélanome ˃ 4mm d’épaisseur a : sans ulcération b : avec ulcération Biologie moléculaire des mélanomes Les deux principales voies oncogéniques impliquées dans les mélanomes sont la voie B-Raf et la voie C-kit ; elles sont exclusives. Voie RTK – Ras – B-Raf Voie activée de façon permanente, hyperactivée dans les tumeurs à cause de mutations somatiques des protéines impliquées - Mutation en aval du RTK - 40-50% des patients sont B-Raf mutés - 90% des mutations concernent le gène V600E (les autres sont moins fréquentes et moins actives) Voies C-kit - C-kit est un RTK particulier - 2-6% des mutations des mélanomes malins - Voie surtout hyperactive dans les sites acro-lentigineux (10-20%) Autres voies - Voies de CDKN2A / p16 : impliquée dans le contrôle du cycle cellulaire - Voie β-caténine / MITF : impliquée dans le développement et la survie des mélanocytes Classification moléculaire et cytogénétique des mélanomes - Basée essentiellement sur le type d’exposition solaire : Exposition solaire intermittente : mutation B-Raf, mélanome à extension superficielle (SSM) E xposi ti on sol ai re chroni que (C S D : chronic sun disease) : mutation C-kit, mélanome de Dubreuilh Exposition solaire faible : mutation de C-kit ou B-Raf, mélanome acro-lentigineux Diagnostics différentiels Le diagnostic différentiel se fera avec les autres lésions pigmentées. Lésion d’origine mélanocytaire Naevus irrégulier ou atypique, surtout s’il est isolé, Naevus traumatisé ou folliculite sous-naevique : à l’origine d’un saignement et/ou de signes inflammatoires locaux ou loco-régionaux. Ces modifications, quoique généralement très inquiétantes pour le patient, sont très rapidement régressives sous traitements cicatrisants ou antibiotiques. Lésion d’origine non mélanocytaire Carcinome basocellulaire pigmenté ou tatoué. Très fréquent sur zones photoexposées de personnes de phototype clair et se caractérise par une bordure surélevées par des perles translucides. Kératoses séborrhéiques. Ressemblent à des lésions «comme» posées sur la peau, à bordure nette et à surface mate et verruqueuse, criblée de bouchons kératosiques. Histiocytofibromes pigmentés, donnant à la palpation un aspect de pastille indurée. Leur stabilité clinique, leur bordure nette et leur symétrie sont autant d’éléments rassurants. 261 CANCER D e r m a t o l ogie Granulome pyogénique, qui réalise une petite tumeur inflammatoire, saignant au moindre contact. La distinction clinique avec un mélanome achromique peut être difficile si aucune notion de traumatisme antérieur de cette zone n’est rapportée par le patient. Hémangiomes thrombosés qui peuvent simuler un mélanome nodulaire. Hématome sous-unguéal : peut prêter à confusion avec un mélanome unguéal à moins de retrouver les caractères évocateurs : survenue brutale, notion de traumatisme (même si le patient n’en garde pas toujours le souvenir), absence de signe de Hutchinson et évacuation facile du sang après percement de la tablette de l’ongle. Profil évolutif de la maladie et pronostic L’évolution spontanée du mélanome se fait vers : Les métastases La gravité du mélanome est liée au fait que ce risque est très élevé chaque fois que la membrane basale est traversée par les cellules tumorales. Les métastases peuvent se faire par voie lymphatique ou hématologique, et sont subdivisées en : Micrométastases ganglionnaires régionales dont l’identification ne peut se faire que par la méthode du ganglion sentinelle. La survie à 10 ans est de 30 à 70%. Métastases cutanées satellites : lorsqu’elles se trouvent dans un périmètre inferieure à 2 cm de la lésion initiale. Métastases cutanées en transit : pouvant aller d’une zone se trouvant dans un périmètre à 2 cm de la lésion primitive au premier site de drainage ganglionnaire (métastases en transit). Survie à 10 ans de 30 à 50% dans le cas des métastases satellites et en transit. Métastases ganglionnaires régionales. Survie à 10 ans de 20-40%. Métastases viscérales pouvant toucher n’importe quel organe mais avec une prédilection pour le poumon, le système nerveux central, le foie et l’os. Elles entrainent généralement le décès après un délai de 6 à 9 mois. La survenue d’un second mélanome primitif Ce risque est de l’ordre de 5-8%. Les récidives Les récidives après traitement sont étroitement liées à l’indice de Breslow. Bilan d’extension, classification et suivi Classification et pronostic L’étude histopathologique de la lésion et le bilan d’extension initial éventuellement complété par l’étude du ganglion sentinelle, permettent de définir le stade de la maladie. Classification TNM des mélanomes (AJCC 2009) Classification T épaisseur (Breslow) Tis mélanome in situ Tx épaisseur non déterminée T1 < ou = à 1 mm Ulcération/ mitoses a : sans ulcération et mitoses < 1/ mm2 b : avec ulcération ou mitoses >ou= 1/mm2 T2 1,01- 2 mm a : sans ulcération b : avec ulcération T3 2,01- 4,00 mm a : sans ulcération b : avec ulcération T4> 4 mm a : sans ulcération b : avec ulcération Tableau III : Classification TNM 262 CANCER Classification N Nombre de ganglions envahis N1 N2 N3 > ou = ou ou ou Invasion métastatique 1 seul ganglion envahi a : micrométastase b : macrométastase 2 à 3 ganglions envahis a : micrométastase b : macrométastase c : métastases en transit/nodules satellites sans envahissement ganglionnaire 4 ganglions envahis masse polyganglionnaire métastases en transit/nodules satellites avec ganglions envahis Classification M Site des métastases M1a M1b M1c Taux sérique de LDH Cutané, sous-cutané ou ganglionnaire au delà de l’aire ganglionnaire régionale Normal Pulmonaire Normal Toutes métastases à distance Augmenté Micro-métastases : métastases ganglionnaires décelées à l’examen anatomopathologique du ganglion sentinelle tandis que le ganglion n’est pas palpable. Macro-métastases : ganglion cliniquement palpable (et/ou d’allure tumorale à l’échographie ganglionnaire) et métastatique Tableau III : Classification TNM Stades anatomiques selon la classification AJCC 2009 Stade I : Mélanome localisé (N0M0) à faible risque évolutif - IA T1a - IB T1b ou T2a Stade II : Mélanome localisé (N0M0) avec risque de rechute - IIA T2b ou T3a - IIB T3b ou T4a - IIC T4b Stade III : Mélanome avec atteinte ganglionnaire régionale (N+M0) - IIIA N1a ou N2a (mélanome non ulcéré T1- T4) - IIIB N1a ou N2a (mélanome ulcéré T1- T4b) N1b ou N2b (mélanome non ulcéré T1- T4a) N2c (mélanome ulcéré ou non T1- T4a/b) - IIIC N1b ou N2b (mélanome ulcéré T1- T4b) N3 (mélanome ulcéré ou non) Stade IV : Mélanome avec métastases au delà du 1er relai ganglionnaire régional (M+) Tableau IV : Stades anatomiques selon la classification AJCC 2009 Le pronostic est essentiellement en rapport avec les caractéristiques histopathologiques de la lésion : indice de Breslow, présence d’une ulcération, taux de mitoses et indice de Clark. Ces deux derniers arguments sont pris en considération seulement dans les cas où la tumeur a moins d’1 mm d’épaisseur. 263 CANCER D e r m a t o l ogie Risque de récidive Risque d’être décédé 5 ans plus tard Risque d’être décédé 10 ans plus tard Mélanome primitif, après exérèse - intra-épidermique 0%-- Breslow : 0,20- 0,75mm<10%<5%<5% - Breslow : 0,75- 1,5 mm 20% 10% 15% - Breslow : 1,5- 4 mm 40% 30% 40% - Breslow : > 4 mm 70% 40% 50% Mélanome régional, après curage - 1 adénopathie + - > 4 adénopathie + 70% > 80% > 70% 50% > 80% > 60% Tableau IV : Risque de récidive et risque de décès à 5 et 10 ans (à titre informatif) D’autres facteurs pronostic cliniques sont à noter : l’âge avancé, sexe masculin, atteinte du tronc et de l’extrémité céphalique Place de l’imagerie médicale Échographie de contraste Le staging actuel du mélanome souligne l’importance de l’atteinte ganglionnaire, de l’épaisseur et de l’ulcération de la tumeur primaire. L’échographie ganglionnaire est plus fiable pour dépister les envahissements loco-régionaux, ce qui a un intérêt potentiel, car ils sont chirurgicalement curables. Elle est indiquée dans la récidive locorégionale, non opérable de mélanome du membre initialement atteint (le plus souvent sous forme de nodules en transit) sans métastase à distance. Elle sera réalisée dès J+1 après traitement des patients « non répondeurs » afin de leur proposer rapidement un nouveau traitement. Elle permet de détecter et quantifier les modifications précoces de la perfusion tumorale après chimiothérapie. Échographie L’échographie est fiable dans la détection des ganglions envahis. La sémiologie échographique du ganglion métastatique est celle d’un ganglion hypertrophié, sphérique, très hypoéchogène, avec perte du hile hyperéchogène. Le seul signe doppler intéressant est la disparition des vaisseaux hilaires et parfois une perfusion périphérique. L’échographie est également fiable pour la détection de métastases en transit (visibles dès 3 mm, car très hypoéchogènes). Des signes plus subtils ont été décrits (nodule hypoéchogène au sein d’un ganglion normal, hile excentré, épaississement cortical asymétrique). Les aires ganglionnaires explorées correspondent aux deux premiers relais ganglionnaires, en étant plus large et bilatéral pour les mélanomes de la tête et du tronc. Cette échographie est réservée aux mélanomes de stade II et III. Si le ganglion est échographiquement envahi, une biopsie chirurgicale confirme le diagnostic avant curage (après repérage par un harpon si le ganglion n’est pas palpable). Si le ganglion est échographiquement douteux, un contrôle échographique à quatre semaines est demandé et une cytoponction peut être proposée. 264 CANCER Scanner Les métastases du mélanome peuvent siéger n’importe où. Elles sont volontiers hypervascularisées, d’où la nécessité de réaliser des scanners triphasiques comportant un temps artériel à l’étage thoracique, abdominal et pelvien, pour augmenter leur fiabilité. La détection systématique de métastase(s) cérébrale(s) est importante, car elle induit un changement de chimiothérapie +/- une radiothérapie stéréotaxique. Le scanner s’impose par sa résolution spatiale à l’étage pulmonaire. IRM Il est réalisé sur l’ensemble du corps une séquence pondérée T2 STIR (Short Tau Inversion Recuperation), une séquence d’écho planar avec gradient de diffusion (DW EPI) et une séquence 3D pondérée T1 après injection de chélate de gadolinium. Les métastases, riches en mélanine, ont une sémiologie IRM évocatrice (hypersignal T1 et hyposignal en T2), les métastases cérébrales sont souvent multiples et souspiales. L’IRM est supérieure au scanner et au Pet scan pour les localisations osseuses, hépatiques et cérébrales. La séquence de diffusion est particulièrement sensible dans la recherche des adénopathies et des lésions des parties molles. L’IRM corps entier est en passe de devenir l’examen de base dans le bilan d’extension. Le Pet scan Le Pet scan au 18FDG a un rôle important à jouer dans la prise en charge du mélanome, mais elle ne doit pas être utilisée dans toutes les situations. C’est un examen intéressant chez les patients porteurs d’un mélanome à risque métastatique élevé (Breslow sup à 1,5mm) ou dans le bilan d’opérabilité des patients de stade III ganglionnaire et IV : bilan avant curage ganglionnaire (sauf dans le cadre où seule une micrométastase du ganglion sentinelle est retrouvée) et bilan d’extirpabilité d’une métastase viscérale unique. Il permet de rechercher des métastases occultes à distance et d’éviter une chirurgie inutile qui n’apportera aucun gain de survie à des patients déjà polymétastatiques. Le Pet scan est moins sensible que la TDM pour la détection des petites métastases pulmonaires, et moins sensible que l’IRM pour les métastases cérébrales. En l’occurrence, il est plus sensible pour la détection des métastases dans le médiastin, la région abdominale, la peau, les aires ganglionnaires, les muscles et les os. Les faux positifs sont représentés par les lésions inflammatoires, notamment les sites opératoires récents et les tumeurs bénignes. Le Pet scan au 18FDG a aussi un intérêt pour confirmer ou infirmer la malignité d’une lésion douteuse, en tenant compte des possibilités des faux positifs et des faux négatifs. Il peut également permettre en cas de lésions douteuses profondes peu accessibles à un diagnostic histologique, de trouver des lésions hypermétaboliques plus superficielles. Enfin, le pet scan, n’est pas indiqué pour l’évaluation de la réponse aux thérapies systémiques, hors protocoles de recherche clinique. Indications de l’imagerie selon les recommandations de pratiques cliniques de 2005 Stade I Aucun examen d’imagerie complémentaire n’est à réaliser en dehors de signes d’appel. Stades IIA et IIB Le bilan est optionnel. Il est fait sur avis spécialisé et repose sur une échographie locorégionale de la zone de drainage tous les 3 à 6 mois pendant les 5 premières années. Aucun autre examen d’imagerie n’est recommandé en dehors de signes d’appel ou pour les patients recevant un traitement adjuvant. Stades IIC et III Le bilan est optionnel. Il est fait sur avis spécialisé et repose sur : Une échographie locorégionale (fig. 20) de la zone de drainage tous les 3 à 6 mois pendant les 5 premières années Une TDM abdomino-pelvienne (fig. 21), cérébrale et thoracique (fig. 22) et parfois un Pet scan (fig. 23) qui peuvent être pratiquées pour la recherche de métastases à distance. Leur fréquence est à adapter au cas par cas Eventuellement une IRM cérébrale. Figure 20 : Échographie axillaire au cours de l’évolution d’un mélanome inguinal : Adénomégalies axillaires 265 CANCER D e r m a t o l ogie Figure 21 : Même patient : TDM Abdomino-pelvienne en coupes axiales après injection de produit de contraste : Métastases ganglionnaires : iliaques externes, iliaques internes, retro péritonéale et inframédiastinales postérieures 266 CANCER Figure 22 : TDM Thoracique : Métastases parenchymateuses et ganglionnaires Figure 23 : Pet scanner : Récidive d’un mélanome du dos. Localisations ganglionnaires axillaires et sus claviculaires droites avec lésion active de la paroi thoracique 267 CANCER D e r m a t o l ogie Traitement Traitement chirurgical Quelque soit le protocole thérapeutique choisi, la première étape reste souvent chirurgicale. Exérèse de la lésion primitive : L’exérèse d’une lésion cutanée mélanocytaire, suspecte de malignité ou non, doit à chaque fois que cela est possible être complète et de pleine épaisseur (on parle de biopsie-exérèse), afin de pouvoir déterminer de façon fiable sa nature histologique et, en cas de malignité, de pouvoir déterminer la profondeur de son envahissement en terme d’indice de Breslow et de niveau de Clark. De nombreuses études ont montré la supériorité de cette technique devant les autres types de biopsie. La biopsie-incision ne sera utilisée que pour les lésions de grande taille ne permettant pas la fermeture directe après exérèse, ou pour les localisations qui nécessitent un procédé de reconstruction complexe. La biopsie exérèse est alors réalisée avec une marge péritumorale macroscopique, en zone saine, d’au moins 2 mm pour lecture histologique fine. L’infiltration de l’anesthésique local doit se faire à l’extérieur de la ligne d’incision, en intra et sous-dermique pour ne pas disséminer des cellules tumorales par voie hématogène. L’incision cutanée doit se faire perpendiculairement à la peau, au bistouri lame froide pour ne pas détériorer les berges de la pièce d’exérèse et permettre une bonne analyse histologique. Les pièces sont orientées et adressées en anatomo-pathologie. reprise chirurgicale en cas de malignité. L’examen extemporané de la lésion primitive est abandonné car le taux de faux négatifs est trop important. L’envoi en analyse définitive de la pièce d’exérèse, fixée au formol, devra être accompagné d’une fiche de renseignements cliniques qui précisera l’âge, le sexe, le phénotype, les antécédents personnels et familiaux du patient, le site et les caractéristiques de la lésion, le dessin de la pièce avec orientation des berges ainsi que les marges chirurgicales employées car il se produit une rétraction trompeuse des berges après fixation. Exérèse élargie : Une fois cette exérèse initiale faite et le diagnostic de mélanome malin confirmé histologiquement, on procédera à une reprise chirurgicale ou exérèse élargie, en fonction des données histologiques, afin d’éliminer les éventuelles micrométastases tégumentaires juxta-tumorales. Idéalement, cette reprise se fera dans la troisième semaine après la biopsie-exérèse, sans dépasser 2 mois, au risque de modifier le pronostic de la maladie. Figure 25 : Reprise chirurgicale d’une cicatrice de mélanome malin de la fesse droite. Marges d’exérèse de 2 cm Ces marges d’exérèse latérales sont déterminées en fonction de l’indice de Breslow : Mélanome in situ (pTis) : marges latérales de 0,5 cm Breslow < 1 mm : marges de 1 cm Breslow de 1,01 à 2 mm : marges entre 1 et 2 cm Breslow de 2,01 à 4 mm : marges de 2 cm Breslow > 4 mm : marges entre 2 et 3 cm Figure 24 : Pièce d’exérèse orientée par un fil à 12H Il est contre-indiqué de fermer la perte de substance par un lambeau de rotation ou de transposition qui va modifier l’architecture cutanée et fausser la reprise chirurgicale éventuelle. Le patient sera, bien sûr, averti d’une possibilité de 268 CANCER Pour les localisations difficiles (visage, extrémités), la possibilité d’appliquer ces marges est appréciée au cas par cas avec un minimum de 1 cm pour les mélanomes invasifs. L’exérèse emporte en profondeur tout le tissu cellulograisseux sous-cutané jusqu’à la structure anatomique sous-jacente qui est respectée (fascia musculaire, aponévrose…). Figure 26 : exérèse en profondeur jusqu’au plan aponévrotique La fermeture s’effectue si possible en cicatrisation dirigée, de manière directe ou fait appel idéalement à des greffes de peau de préférence non amplifiée dans le même temps opératoire ou secondairement après bourgeonnement du sous-sol. Figure 28 : Mélanome malin du talon, exérèse reconstruction par un lambeau neurosural distal Figure 27 : Cicatrisation dirigée de la perte de substance après ablation d’un mélanome malin du bord externe du pied. Résultats à 3 mois Ces greffes de peau devant être prélevées à distance de la lésion, en évitant les sites potentiels de métastase en transit, et cela en particulier pour les membres, où il faudrait mieux prélever sur le membre controlatéral à la tumeur. L’utilisation du derme artificiel associé à une greffe de peau mince permet, quand il est disponible, la couverture de larges pertes de substance en un temps. Certaines localisations particulières imposent une prise en charge différente : les lésions digitales unguéales et sous unguéales doivent être prélevées en totalité emportant l’ongle, son lit et la matrice. Les tumeurs invasives, quant à elles, imposent l’amputation du doigt. Figure 29 : Amputation du 4ème orteil, siège d’un mélanome malin invasif Au niveau de la face, il est préférable d’utiliser des techniques de reconstructions autoplastiques plutôt que des greffes de peau pour des raisons esthétiques. 269 CANCER D e r m a t o l ogie Chirurgie des ganglions régionaux Il n’y a pas d’indication de curage ganglionnaire prophylactique car il a été prouvé qu’il n’apporte aucun bénéfice en terme de survie. Selon la localisation de la lésion primitive et de la présence de ganglion palpable dans son territoire de drainage, sera indiqué un des curages suivants : Le curage inguino-crural : Il emporte l’aponévrose fémorale superficielle et la crosse de la veine saphène interne avec tout le tissu cellulo-ganglionnaire en avant des vaisseaux fémoraux. Il peut être complété, si nécessaire, le long des vaisseaux iliaques externes après section de l’arcade crurale ou par une seconde voie d’abord rétro péritonéale. Il n’est pas recommandé d’effectuer un curage ilio-obturateur associé en l’absence d’adénopathie visible au scanner ou de ganglion palpable en per opératoire (ganglion de Cloquet). Figure 30 : Curage inguinal, découverte d’une énorme adénopathie mélanique Le curage axillaire : Il emporte les ganglions des niveaux I, II et III de Berg en avant des vaisseaux axillaires et en particulier les ganglions situés le long de la ligne axillaire postérieure, au niveau de la partie inférieure de la paroi thoracique, et le long du nerf thoracique long. Il doit respecter si possible le pédicule vasculo-nerveux du muscle grand dorsal ainsi que les muscles pectoraux. guidée par scintigraphie pré-opératoire et détection peropératoire (fig. 31). Le curage cervical : Il est fonctionnel emportant les différents groupes ganglionnaires du cou. L’évidemment est bilatéral si la lésion est médiane. Pour les mélanomes de l’oreille et de la région temporale, on peut être amené à réaliser un curage cervical associé à une parotidectomie superficielle conservatrice du nerf facial. Technique du ganglion sentinelle : Le mélanome malin est une tumeur lymphophile. Le statut histologique ganglionnaire constitue par conséquent un facteur pronostique majeur. Dans la majorité des cas, lors du diagnostic initial, les patients ne présentent pas de gan-glions palpables dans l'aire de drainage de la tumeur. En outre, si le curage systématique en cas de métastases ganglionnaires est un geste indiscutable dont l'impact positif sur la survie est aujourd'hui reconnu, à contrario, le curage prophylactique ne permet de détecter que 15 à 20 % de métastases occultes, sans aucun effet statistiquement prouvé sur la survie. De plus la morbidité per et péri-opératoire est non négligeable. Le consensus actuel préconise donc la surveillance clinique des aires ganglionnaires. Entre ces deux attitudes extrêmes que sont la simple surveillance clinique et le curage ganglionnaire systématique, une voie médiane s'est dessinée ces dernières années, à savoir: l'adénectomie fonctionnelle du ganglion sentinelle 270 CANCER Figure 31 : Repérage préopératoire par scintigraphie du ganglion sentinelle en acquisition dynamique et statique. Marquage du ganglion sentinelle pour ablation chirurgicale Le ganglion sentinelle correspond au premier relais de drainage lymphatique du mélanome malin. Il est recherché, prélevé puis analysé histologiquement. Le résultat de son analyse va conditionner la poursuite ou non du curage ganglionnaire. La procédure est actuellement fiable et techniquement reproductible, son intérêt pronostique est reconnu mais son intérêt thérapeutique est en cours d’évaluation. Les indications de cette procédure pour le mélanome malin sont un indice de Breslow supérieur à 1 mm et inférieur à 4 mm, une ulcération ou des signes de régression clinique, une absence d’adénopathie suspecte cliniquement (N0) et un âge supérieur à 18 ans. Les recommandations actuelles proposent un curage ganglionnaire régional chez les patients cliniquement N1 ou plus ou chez les patients dont le ganglion sentinelle est positif. Traitement oncologique Radiothérapie La radiothérapie est un traitement efficace pour les patients atteints de mélanome. Radiothérapie adjuvante Elle permet de réduire le taux de récidive locale. L'impact est observé chez les patients qui ont une maladie régionale à haut risque mais sans preuve évidente dans la littérature. Aucune étude randomisée n’en a confirmé l’intérêt. Les indications sont discutées en concertation multidisciplinaire surtout en cas d’atteinte ganglionnaire ou de marges limites dans la chirurgie des mélanomes de la sphère ORL et les métastases satellites. Le mélanome a toujours était considéré comme radiorésistant. Pour pallier à cet effet, la radothérapie hypofractionnée a été développée mais n’a pas montré de supériorité par rapport aux schémas classiques. La technique utilisée pour irradier le lit tumoral est souvent un faisceau direct aux électrons avec un bolus pour bien couvrir la dose à la peau. Le volume est celui de la cicatrice avec 3 cm de marges et une marge de PTV de 5mm est rajoutée pour pallier aux problèmes de positionnement. La dose est de 54 Gy en 27 fractions ou 30 Gy en 5 fractions. L’irradiation des ganglions doit inclure toute l’aire ganglionnaire avec des marges de 7 mm. La dose est la même que celle du lit tumoral. Radiothérapie des métastases Métastases cérébrales : La radiothérapie de tout le cerveau est le traitement standard des métastases multiples des mélanomes à la dose de 30 Gy en 10 fractions. Pour la métastase unique ou en cas d’oligométastases du cerveau, un complément d’irradiation administré par stéréotaxie a permis d’augmenter le contrôle de la maladie. Métastases osseuses : La radiothérapie des sites osseux douloureux améliore la qualité de vie dans 70 à 80% des cas. La dose peut être 8 Gy en une fraction ou 30 Gy en 10 fractions. Traitements systémiques adjuvants L’Interféron alpha, utilisé dans l’hépatite est le premier médicament utilisé dans le traitement adjuvant des mélanomes des stades IIb et IIIc. 18 études randomisées du traitement adjuvant par interferon rapporté par la méta analyse de Cochrane montre une nette amélioration de la survie sans rechute qui est de 0.83 avec un intervalle de confiance de 0.78 à 0.87 et un p de 0.00001 mais aussi en survie globale 0.91 avec un intervalle de confiance de 0.85 à 0.97 et un p de 0.003. Cependant, une méta analyse antérieure n’avait pas retrouvé un gain en survie globale. Pour cela, le traitement par interferon n’est pas considéré comme un standard dans les recommandations, mais plutôt une option thérapeutique pour les patients associant des facteurs de mauvais pronostic. La dose Si les ganglions ne sont pas envahis, l'interféron alpha peut être proposé à faible dose (3 MUI - Millions d'Unités Internationales) à raison de 3 injections sous cutanées 3 fois par semaine pendant 18 mois Si les ganglions sont envahis, l'interféron alpha peut être proposé à forte dose (20MUI/m 2 de peau/jour) en perfusion intraveineuse 5 jours sur 7 pendant 1 mois suivi d'une dose un peu plus faible (10MUI/m2) en sous cutanée, 3 fois par semaine pendant 11 mois. Une hospitalisation est alors souvent nécessaire mais le traitement peut être réalisé en ambulatoire. Les complications sont très fréquentes et variables d’une personne à l’autre : une fièvre et des courbatures, une grande fatigue, une réaction dépressive, des troubles digestifs (nausées, diarrhées), un mauvais fonctionnement de la thyroïde et du foie, une leucopénie et une thrombopénie. Perfusion du membre isolé sous circulation extra corporelle : Les métastases en transit du mélanome par les lymphatiques sont difficiles à traiter. Plusieurs traitements locaux ont été tentés comme l’exérèse au bistouri, au laser ou la cryocoagulation. Cependant les rechutes restent importantes. Un traitement récent largement utilisé dans le traitement des sarcomes des membres inopérables est celui de la perfusion du membre isolé (ILP) qui a donné de très bons résultats (fig.. 32). Ce traitement régional consiste en une isolation chirurgicale du membre atteint par un garrot, raccordé à un cœur poumon artificiel, ce qui permet de donner des doses très importantes de chimiothérapies impossible à donner par voie intraveineuse. Les résultats sont très satisfaisants : Une dose importante de Melphalan seule sous hyperthermie, donne 50% de rémission complète et 80% de réponse objective et quand on associe du TNF qui augmente la perméabilité des vaisseaux, le taux de réponse complète est de 80 % et de réponse objective de 99 %. C’est un traitement locorégional efficace qui permet d’éviter une amputation inutile, mais sans impact sur la survie puisque les malades meurent de métastases à distance. 271 CANCER D e r m a t o l ogie Figure 32 : Perfusion du membre isolé sous circulation extra corporelle Traitements systémiques dans la maladie métastatique Les traitements systémiques contre le mélanome cutané métastasique, la forme la plus agressive de tous les cancers de la peau, restent décevants. Des rémissions de faible durée sont obtenues et l'objectif thérapeutique reste palliatif. De nombreux agents sont utilisés seuls ou en association et présentent des degrés de toxicité et des coûts variables. Les métastases à distance sont très fréquentes, elles sont de 10% au moment du diagnostic. La bio-chimiothérapie associant interféron interleukine et le cisplatine donnent de très bonnes réponses objectives à 60 % mais aussi sans impact sur la survie. Le standard jusqu’en 2011 était une monochimiothérapie à base de dacarbazine. Le témozolomide et la fotemustine ont montré un intérêt en particuliers pour les mélanomes avec métastase cérébrale. Les inhibiteurs de BRAF Les mélanomes sont dépendants de facteurs de croissance et plus de la moitié des mélanomes expriment le BRAF muté qui augmente la survie et la prolifération des cellules tumorales. Les inhibiteurs de BRAF vont 272 CANCER alors bloquer la voie de signalisation MAPKinase et arrêter la prolifération. Une étude phase 3 comparant un inhibiteur de BRAF (apparue en 2011) le Vemurafenib versus Dacarbazine sur plus de 600 patients de stade IV métastatiques au niveau du foie et de l’os a montré une survie sans progression supérieure 5 mois versus 2 mois et une survie globale de 7mois versus 1.5 mois pour la dacarbazine. Les complications du Vemurafenib sont à connaitre pour une bonne observance du traitement : fatigue, arthralgies, photosensibilité mais aussi une majoration d’incidence de carcinome épidermoïde de la peau notamment par transformation des kératoses actiniques. Les rechutes sont rapides dans les 6 mois dans près de 50 % de cas. Ceci s’explique par le relais des autres voies de signalisation notamment AKT. Les études sont en cours pour valider des médicaments des deux voies de signalisation. Immunothérapie : Les mélanomes sont immunosensibles. L’interféron alpha est le seul traitement La vaccination est très décevante, elle donne des réponses de 15 à 20 % Lpilimumab est un anticorps monoclonal visant à lever de l’immunotolérance de l’organisme vis-à-vis des cellules tumorales par ciblage des récepteurs CTLA4. Les données de la littérature reste contradictoire même si une étude randomisée comparant l’Ipilimumab plus Dacarbazine versus Dacarbazine a montré une augmentation de la survie sans rechute avec certaines stabilisations prolongés. Le traitement des mélanomes métastatiques reste modeste, aucun traitement ne permet de dépasser des survies médianes au delà de 12 mois sauf pour le veurafenib, qui donne des réponses de l’ordre de 50% avec une survie médiane de 14 mois. Suivi des patients Le rythme et les modalités de surveillance des patients opérés d’un mélanome primitif dépendent de ses risques évolutifs et en particulier de son indice de Breslow. Ce suivi a pour but de : Diagnostiquer précocement une récurrence ou une métastase en sachant que 90% de ces dernières surviennent durant les 5 années suivant le traitement du mélanome Identifier précocement la survenue d’un second mélanome primitif Apporter le support psychologique nécessaire Inculquer au patient et à sa proche famille les mesures préventives nécessaires et l’intérêt de l’auto-surveillance Evaluer l’efficacité des traitements adjuvants lorsqu’ils sont administrés et évaluer leur tolérance La prise de photographies et la vidéo-dermatoscopie sont d’un grand apport lorsque plusieurs lésions sont à surveiller. Le tableau ci-dessous, récapitule le rythme de surveillance en fonction des cas et les examens à réaliser. Modalités de suivi après exérèse d’un mélanome primitif (Consensus 2005) Mélanome stade I AJCCExamen clinique tous les 6 mois pendant 5 ans, puis tous les ans pendant toute la vie Education à l’auto-dépistage d’un nouveau mélanome et d’une récidive Mélanome stade IIA AJCC Examen clinique tous les 3 mois pendant 5 ans puis 1 fois / an toute la vie Education à l’auto-dépistage d’un nouveau mélanome et d’une récidive Option : échographie de la zone de drainage tous les 3 à 6 mois pendant 5 ans Mélanome de stade IIB et III AJCC Examen clinique tous les 3 mois pendant 5 ans puis 1 fois / an toute la vie Education à l’auto-dépistage d’un nouveau mélanome et d’une récidive Option : échographie de la zone de drainage tous les 3 à 6 mois pendant 5 ans. Les autres examens d’imagerie peuvent être pratiqués ; leur fréquence est à adapter au cas par cas 273 CANCER D e r m a t o l ogie Prévention La prévention primaire : La photo-protection externe La prévention primaire est basée sur la protection contre les effets néfastes du rayonnement solaire. L’exposition solaire est le seul facteur étiologique de mélanome sur lequel peuvent être menées des campagnes de sensibilisation de la population générale afin d’induire des modifications de comportement face au soleil. Le soleil est une étoile distante de la terre de 149 millions de kilomètres. Il s’y produit des réactions chimiques continues qui donnent naissance à un rayonnement électromagnétique qui diffuse dans l’espace et parvient entre autres à la terre. Un tiers de ce rayonnement est bloqué par la couche d’ozone : rayons cosmiques, rayons X, rayons gamma et ultraviolets C. Ce qui ne laisse parvenir à la surface de la terre que des rayons ultraviolets A et B (5% de l’énergie lumineuse totale), de la lumière visible (39%) et des rayons infrarouges (56%). Parmi ces rayons, nous nous intéresserons aux ultraviolets (UV), pour leur aptitude à induire des réactions biologiques au niveau du corps. Les rayons UV parvenant à la surface de la terre sont constitués des : UVB : 290 à 320 nm. Rayons très énergétiques. UVA : divisés en UVA1 ou longs (340- 400 nm) et UVA2 ou courts (320-340 nm). Leurs effets biologiques néfastes se sont avérés beaucoup plus importants qu’il n’était admis initialement. L’intensité des rayons UV varie selon L’épaisseur de la couche d’ozone La saison : les rayons UV sont les plus intenses en été Le moment de la journée : les UVA sont présents du lever du soleil à son coucher alors que les UVB sont prédominants en milieu de journée (11h à 15 heures mais à adapter aux horaires d’été) La latitude : l’intensité des UV est maximale à l’équateur L’altitude : les rayons UV sont plus intenses en montagnes L’épaisseur de l’atmosphère : les nuages et la pollution atténuent l’intensité des rayons UV mais sans les faire disparaître, donc attention aux surexpositions dans ces conditions Certains environnements tels que les étendues d’eau, le sable et surtout la neige sont dangereux dans la mesure où ils sont source de réflexion et donc d’amplification des rayonnements initiaux. Principaux rôles bénéfiques du soleil Réchauffement et illumination : 2 conditions essentielles pour permettre une vie sur la terre Action antirachitique par stimulation des UVB de la synthèse cutanée de vitamine D. Toutefois, avec la multiplication des campagnes de sensibilisation solaire, 274 CANCER il s’est avéré que plus d’un milliard de personnes sur terre sont carencées en vitamine D. De plus, avec la découverte des propriétés préventives de cette vitamine contre la survenue de différents types de cancers, se pose actuellement la question de savoir que favoriser. La solution proposée consiste en des expositions de moins de 15 minutes, 3 à 4 fois/ semaine, sans protection des mains, avant-bras et visage en dehors de l’intervalle 1015h entre Octobre et Mars. Une étude cas-témoin de F. Allali et coll. a mis en évidence une élévation du risque d’ostéoporose chez les femmes marocaines ménopausées et portant le voile (couvrant la tête, les bras et les jambes) avec un odds-ratio de 2,20 (IC : 95%, 1,22- 3,9) Action anti-dépressive : le meilleur exemple est représenté par le taux élevé des suicides dans les pays scandinaves où les nuits sont très longues durant plusieurs mois de l’année. Le soleil a aussi des effets néfastes Aggravation de certaines maladies comprenant une photosensibilité (exemple : maladie lupique) Survenue de toxidermie en cas de prise de médicament (s) photosensibilisant (s) Survenue d’un érythème actinique (ou « coup de soleil »). Le plus souvent de 1er degré sous forme d’érythème mais des brûlures de 2ème degré (Bulles ou phlyctènes), ne sont pas rares. Les UVB sont plus en cause mais les UVA peuvent aussi l’être à des doses beaucoup plus élevées. Ce qui explique que les brûlures pouvent survenir lors d’expositions en début ou fin de journées. Pigmentation à l’origine du bronzage. La stimulation du processus de mélanogénèse par les UV a pour rôle de produire plus de mélanine pour se mettre en bouclier autour du noyau cellulaire. L’ADN est ainsi mieux protégé contre des expositions ultérieures. Ce processus pourrait selon certains être utilisé comme « écran naturel » mais il s’accompagnerait indéniablement d’un certain degré d’inflammation même si elle est infra clinique Immunosuppression avec suppression de l’hypersensibilité retardée. Cet effet est toutefois recherché en photothérapie ou photochimiothérapie (exposition aux UV avec ou sans prise de photosensibilisants) dans certaines maladies tels que le psoriasis ou le lymphome cutané. Vieillissement cutané photo-induit encore appelé héliodermie. Y ont été incriminés pendant longtemps les UVB avec leur effet épidermique puis le rôle des UVA sur l’altération dermique a été démontré. Carcinogénèse cutanée : Il s’agit d’un effet à long terme, dose-dépendant. Les UVA et UVB sont là aussi tous deux incriminés notamment en induisant des mutations d’ADN en même temps qu’une tolérance visà-vis de ces mutations voire des cancers induits. Ces cancers peuvent être à agressivité locale (carcinome basocellulaire) ou à forte agressivité locale et potentiel métastatique (carcinome épidermoïde et mélanome) Quels sont les moyens de protection contre les méfaits du soleil ? Protection naturelle : Certains systèmes de protection naturelle agissent dans la mesure où l’exposition solaire reste modérée, mais ces systèmes sont très rapidement dépassés dès que l’exposition est intense : La couche cornée de l’épiderme : Possède un effet de réflexion des UV sur la kératine Les poils et les cheveux : Constituent un bon moyen de protection pour certains Le sébum : Permet un certain degré de protection La mélanine : Les grains de mélanine servent à donner la couleur à la peau. Synthétisée par les mélanocytes, il existe en fait deux types de mélanine : les phéomélanines retrouvées chez les sujets roux et les eumélanines retrouvées chez les sujets plus bruns. Les mélanines agissent en se mettant en bouclier autour du noyau pour protéger l’ADN de l’agression des UV et les eumélanines sont plus performantes pour cet effet Les systèmes de réparation de l’ADN : L’irradiation par les rayons UV crée des altérations de l’ADN sous la forme de dimères de pyrimidines. Au quotidien et dans les conditions habituelles, ces dimères sont rapidement repérés par des systèmes de réparation (endonucléase, exonucléase, ADN polymérase et ADN ligase) qui vont permettre une excision des segments d’ADN lésés suivie d’un remplacement de ce segment par un ADN normal. En revanche, dès que l’exposition est trop intense ou trop répétée ou encore lorsqu’existe un déficit en ces systèmes de réparation (cas du xéroderma pigmentosum), les dimères de pyrimidine vont s’accumuler dans la cellule, à l’origine des propriétés mutagènes des rayons UV. Protection artificielle Photo-protection vestimentaire : Elle est toujours à préconiser pour son efficacité et son coût bas. L’efficacité sera fonction de la surface couverte, de la couleur du vêtement (le noir et les couleurs foncées protégeant plus), de son épaisseur (un jean par exemple, protège beaucoup plus qu’un tissu plus fin) et de son humidité (un tissu mouillé protégea moins qu’un tissu sec). Il existe actuellement des vêtements anti-UV qui permettent une meilleure protection, surtout pour les personnes les plus vulnérables au soleil. Moyens de mise à l’ombre : Ils sont eux aussi à conseiller très largement : chapeaux (et pas visières ou casquettes qui ne protègent pas les bords latéraux des joues, les tempes et les oreilles), foulards, lunettes (dont les propriétés protectrices sont bien prouvées), gants, parasols… Filtres et écrans solaires : il s’agit de produits topiques qui, appliqués sur la peau, vont réfléchir (cas des écrans minéraux) ou absorber (cas des filtres chimiques) les rayons UV, protégeant ainsi la peau sous jacente des méfaits de ce rayonnement. - Les filtres chimiques sont donc des chromophores qui absorbent l’énergie des photons mais avec un spectre d’absorption variable en fonction des molécules. Parmi ces molécules, nous pouvons citer : l’acide para-aminobenzoïque (PABA), les cinnamates, benzophénones, l’octocrylène et les meroxyls. Ils sont très bien acceptés sur le plan cosmétique mais certains peuvent manquer de stabilité ou encore être pourvoyeurs de réactions allergiques - Les écrans minéraux (encore appelés écrans physiques) sont constitués de poudres minérales chimiquement inertes, bloquant les UVA, UVB, IR et le visible. Citons certains exemples : oxyde de titane et de zinc et le Tinosorb M. Leur principal intérêt est d’être non immunogène et donc de pouvoir être utilisés à tout âge (même le nourrisson) et chez la femme enceinte, mais la principale limite à leur utilisation réside dans l’aspect blanchâtre qu’il confère, le rendant très peu acceptable sur le plan cosmétique. C‘est pourquoi les filtres actuels associent des filtres chimiques et minéraux pour augmenter la stabilité des molécules, élargir le spectre d’action du topique tout en améliorant les caractéristiques cosmétologiques. D’autres molécules leur sont fréquemment associées : anti-radicalaires, anti-inflammatoires. D’autre part, de nouvelles formulations ont plus récemment été développées pour permettre de réduire la fréquence des applications. Afin de déterminer le niveau de protection conférée par un produit donné, deux paramètres sont importants à connaître : FPS (facteur de protection solaire) qui renseigne sur le degré de protection contre l’érythème solaire donc contre les rayons UVB Degré de protection contre les UVA, notamment, la PPD ou persistent pigmentation darkening Pour optimiser leur efficacité, les filtres et écrans doivent être bien tolérés, être acceptables sur le plan cosmétologique et avoir une bonne rémanence tout en restant photostables. Au total, les rayons solaires constituent depuis l’amincissement de la couche d’ozone une réelle agression de la peau. C’est pourquoi il est essentiel de transmettre à nos patients et à la population générale des messages clairs sur les risques inhérents à une exposition solaire excessive et sur les moyens de s’en protéger notamment en leur inculquant des règles générales d’exposition : Faire connaître sa propre sensibilité : phototype, antécédents de tumeurs cutanées dans l’entourage familial, nombre important de naevus… et insister sur le fait que les personnes les plus vulnérables sont les enfants et aussi les sujets de phototype clair, bronzant peu et brûlant facilement. Eviter les expositions solaires prolongées, en particulier si c’est en position allongée mais un enfant qui passe une journée entière à jouer au soleil reçoit une très grande quantité de rayons UV. Bannir le soleil entre 11 heures et 15 heures mais à adapter aux horaires d’été Conseiller des expositions solaires progressives en début de vacances pour aboutir à un bronzage sans coups de soleil. 275 CANCER D e r m a t o l ogie Faire doublement attention lorsque le temps est nuageux (risque de surexpositions) ou encore lorsque les conditions sont propices à une réflexion des rayons (proches de points d’eau, neige, sable). (p = 0,013) : lunettes solaires (19%), vêtements (28,2%), chapeaux et casquettes (16,3%). Une mauvaise acceptabilité du port de chapeaux chez les personnes voilées. Afin d’évaluer les connaissances de la population générale marocaine en la matière, et se basant sur les résultats d’un questionnaire remplis par 411 personnes, M. Meziane et coll ont rapportés les résultats suivants : Cette étude est une très bonne illustration des lacunes à combler dans le domaine de la sensibilisation solaire dans notre pays. Des campagnes annuelles ont été initiées au service de dermatologie du CHU Ibn Sina de Rabat puis élargies à d’autres CHU du Royaume du Maroc, mais restent très largement insuffisante, surtout dans un pays ensoleillé comme le Maroc et à une ère où l’altération de la couche d’ozone et ses conséquences sur la santé sont une réalité qui ne pourra plus être occultée. Une connaissance des méfaits du soleil était retrouvée chez 160 personnes questionnées (39%), avec un score de connaissance amélioré chez les femmes (OR : 2,99 (95% IC), 1,44-6,2, p= 0,003) et avec le niveau d’instruction (OR : 3,27 (95% IC); 1,44- 7,64 ; p : 0,006). Les méfaits reconnus étaient constitués par les cancers cutanés (36,9%), le vieillissement cutané (25,3%), les hyperpigmentations (23,1%) et les brulures (11%). Une connaissance de l’existence de mesures de photoprotection chez 259 personnes (63%) : photo-protecteurs topiques (écrans solaires) (52,8%), photo-protection vestimentaire (36%) et éviction solaire en mi-journée (32,8%). Une utilisation effective des produits solaires chez 43% des personnes mais le plus souvent à raison d’une seule application par jour. Ces produits solaires sont plus fréquemment utilisés par les femmes (p< 0,001), d’origine urbaine (p = 0,004) et ayant reçu au minium une scolarité de niveau secondaire (p< 0,001). Le facteur limitant coût a été rapporté par 231 patients (56,2%). Une meilleure connaissance des mesures physiques de photo-protection chez les personnes de phototype V La prévention secondaire Elle repose sur : Le diagnostic précoce des cas de mélanome, au mieux avant que le diamètre de la tumeur ne dépasse 1 mm La surveillance des personnes à risque : Un examen des parents, des enfants et de la fratrie des patients atteints de mélanome sporadique afin d’identifier les formes familiales et de diagnostiquer les sujets à haut risque (naevus atypique, très nombreux naevus, naevi congénitaux géants) S’il s’agit d’un mélanome familial, proposer un examen systématique des membres de la famille et proposer une surveillance clinique annuelle à chacun des membres apparentés au 1er degré, associée à des conseils d’autosurveillance et de protection solaire Références bibliographiques Références en imagerie Références PET 1- Evaluation precoce en echographie de contraste de la reponse au traitement de metastases de melanomes, Journal de Radiologie, Volume 88, Issue 10, October 2007, Page 1299, L. 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