La politique de l`Europe en matière d`OGM

Transcription

La politique de l`Europe en matière d`OGM
SPEECH/03/229
Philippe Busquin
Commissaire européen chargé de la Recherche
La politique de l’Europe en matière
d’OGM
Conférence organisée par les Amis de l'Europe "Quand l'Europe
aura-t-elle une politique claire et fiable en matière d'OGM?"
Bruxelles, 5 mai 2003
La réponse courte au titre de ce débat est que l'Europe a déjà une politique claire et
fiable : des copies du document de notre stratégie 2002 pour les technologies et les
sciences de la vie sont disponibles ici, et ce document contient un plan d’action en
30 points spécifiques.
La stratégie qui a été formulée par la Commission après une consultation large, a
été fortement approuvée par le Parlement et le Conseil. Il n’y a donc pas de doute
que du point de vue des institutions européennes, nous avons un règlement
politique à Bruxelles.
En fait, nous avons produit des documents sur les politiques et les stratégies depuis
plus de 20 ans, nécessaires du fait que le développement graduel des
biotechnologies modernes a soulevé des questions politiques dans de domaines de
plus en plus nombreux – recherche, industrie, agriculture, environnement,
commerce, développement et propriété intellectuelle, éthique.
Dans le domaine de la recherche, nous avons joué un rôle de leader,
particulièrement dans un travail de pionnier en génomique où nous avons joué un
rôle de meneur dans le séquençage d’organismes clés comme la levure, la plante
modèle Arabidopsis. Les travaux majeurs en génomique et pour la production
d’aliments sains continuent sous le 6ème PCRD. Au travers l’espace européen de
la recherche, nous donnons une cohérence plus forte aux efforts de recherche
européenne et à ceux de nos Etats membres.
Mais je parle ce soir non seulement en tant que Commissaire en charge de la
recherche, mais aussi au nom de toute la Commission.
Les politiques de l’Europe en matière d’OGM ne sont pas dictées par les institutions
européennes : nous devons gagner l’accord des politiques et des décideurs au
niveau national. Pour être franc, leurs précautions nous ont retardés, et ont
provoqué la frustration des scientifiques universitaires et de l'industrie. Cependant,
notre stratégie a gagné les confiances et le soutien nationaux.
Nous sommes au fait de l’immense potentiel des technologies modernes, apportant
des bénéfices à l’agriculture et à l’industrie, pour l’alimentation, la santé publique et
l’environnement. Mais nous devons conserver la confiance publique. Le public est
sensible au potentiel de désastre, méfiant vis-à-vis des scientifiques et de l’industrie
interférant avec les bases de la vie – les fondements de l’agriculture et des
aliments, les fondements de la génétique humaine et des questions d’éthique y
afférant.
Le résultat, comme si souvent dans la vie politique, est un compromis. Nous
promouvons la recherche et les autres politiques pour récolter les potentiels des
biotechnologies modernes, pour maintenir notre position compétitive et pour obtenir
les bénéfices des nouvelles technologies.
En même temps, nous avons développé une succession d’instruments légaux pour
s’assurer de la sécurité – dans les domaines de la recherche, de l’industrie, de
l’agriculture et dans la fourniture des aliments, et l’utilisation des OGM dans
l’environnement. Non seulement pour s’assurer de la sécurité – en fait, le suivi de
la sécurité des biotechnologies moderne depuis les 25 dernières années est
excellent – mais aussi pour rassurer le public en matière de sécurité.
Nous avons depuis l’année dernière une nouvelle directive sur la dissémination des
OGM dans le milieu qui introduit des éléments de prudence concernant la
surveillance. Notre programme cadre législatif adresse les besoins des
consommateurs en termes d’information, de choix au travers des provisions
adéquates sur la traçabilité et l’étiquetage, qui sont proches d’être adoptés.
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Nous nous trouvons face à une opposition persistante de certains états membres.
Un moratoire a été imposé depuis plusieurs années. Une fois que ce moratoire
sera levé, des nouveaux produits déjà approuvés ou en attente de l’être pourraient
se trouver sur le marché l’année prochaine.
La Commission Européenne a fait sa partie du travail. Les propositions législatives
ont été soumises, les mesures d’accompagnement ont été prises ou sont prêtes. Il
appartient maintenant à nos Etats Membres de prendre les décisions requises dans
le respect du cadre législatif mis en place.
J’ajoute que la responsabilité des autorités publiques est de fournir le meilleur cadre
réglementaire possible. Il revient à l’industrie de présenter aux consommateurs les
avantages et la qualité des produits qu’ils offrent.
Pour aider dans la mise en œuvre du cadre réglementaire pour les OGM, la
Commission entreprend toute une série d’actions. Je voudrais en citer deux, à titre
d’exemple. La première est la mise sur pied du réseau européen des laboratoires
pour le contrôle et la détection des OGMs, piloté par le Centre Commun de
Recherche.
La deuxième est le financement de la recherche sur la sécurité des OGMs et la
tenue de tables rondes avec tous les acteurs intéressés sur les résultats de ces
recherches. Une dernière table ronde s’est tenue le 24 avril dernier sur la
coexistence de l’agriculture OGM, conventionnelle et biologique.
La science doit se discuter avec le public. C'est essentiel que les scientifiques – et
les responsables des politiques scientifiques au plan national et européen – soient
prêts à dialoguer avec d’autres acteurs intéressés tels qu’agriculteurs,
consommateurs, administrations nationales, media etc.
Mais cette disposition au dialogue ne peut et ne doit pas devenir un frein à la
recherche, face à une certaine hostilité devant les OGMs. Il est crucial pour
l’Europe de maintenir sa capacité de recherche et de développement dans le
domaine des OGMs et de pouvoir disposer de sa propre expertise scientifique.
Or, je constate que notre capacité de recherche dans ce domaine s’effrite très vite,
pour plusieurs raisons qui vous sont connues, notamment le moratoire sur
l’autorisation de nouveaux produits OGMs et le manque de débouchés
commerciaux en Europe sur le court et moyen terme.
Mais une raison importante qui amène les centres de recherche, publics aussi bien
que privés, à quitter l’Europe est le climat hostile vis-à-vis de ces recherches. En
tant que Commissaire européen à la Recherche, je suis indigné par le vandalisme
gratuit et impuni contre des champs de recherche, entre autres publics, qui
respectent les normes de sécurité et les procédures d’autorisation. Si cela
continue, nous risquons de perdre non seulement notre savoir-faire dans un
domaine scientifique clé pour l’avenir, mais aussi notre propre expertise scientifique
pour informer nos choix politiques.
Il est important que l’Europe, qui est à l’origine de la biologie moléculaire, reste à la
pointe de ces recherches. Notre 6ième Programme-Cadre de Rechercher prévoit
d’ailleurs sous la priorité « Sécurité et qualité alimentaire » un financement de
l’ordre de 600 millions, couvrant aussi la biotechnologie verte.
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Laissez moi m’adresser à nos partenaires internationaux : nous respectons et nous
continuerons de respecter nos obligations en relation des accords internationaux –
incluant les accords commerciaux de l’Organisation mondiale du Commerce et le
protocole de Carthagène sur la Biosecurité. Notre programme législatif est entouré
des précautions mais ne fait pas de discriminations, et nous espérons qu’il sera
adapté si nécessaire à la lumière des expériences.
A nos amis dans le monde en développement, je soulignerais la plus haute
importance d’une biotechnologie moderne, pour aller dans le sens de vos besoins
en production alimentaire, de santé publique et de protection de l’environnement.
Nous sommes heureux d’engager avec vous des actions de collaboration dans la
recherche. L’Union Européenne est le numéro un mondial en matière d’importation
de produits agricoles, et donc, nous comprenons que vous soyez concernés par
l’acceptabilité de vos exportations vers nous. Evidemment, nous maintiendrons nos
règles mais celles-ci seront claire et nous serons heureux de discuter avec vous,
dans des forums bi-lateraux et multilatéraux. Nous avons organisé fin janvier une
conférence sur la contribution de la biotechnologie à l’agriculture dans les pays en
voie de développement. Cette conférence a attiré plus de 800 participants –
scientifiques, ONGs, agriculteurs, media, industriels, etc. - de tous les coins du
monde.
Enfin, en raison des effets sur les secteurs agricoles et alimentaires en Europe,
nous sommes convaincus que nos agriculteurs bénéficieront des avantages des
nouvelles technologies, que nos consommateurs auront une gamme complète de
choix, et qu’il n’y aura aucun veto sur n'importe quel système de production agricole
en Europe, que ce soit organique, conventionnel ou employant la biotechnologie
moderne.
Nous accueillons les nouvelles connaissances dans les domaines des sciences de
la vie et des technologies. Nous savons qu'elles offrent beaucoup d'avantages, et
la connaissance n'est pas un poison. Nous attendons avec intérêt de voir leur
utilisation répandue et croissante dans l'agriculture, la production de nourriture et
dans la santé publique européenne pour les prochaines années.
Merci de votre attention.
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