hedy la bombe d`hollywood, l`humanitaire 2.0, bollywood, indochine
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ÉLU LEUR E « M IL INE Z A MAG DE E» PRESS #31 - Janvier 2013 France METRO : 4,90 ¤ - BEL/LUX : 5,50 ¤ DOM/S : 5,60 ¤ - CH : 7,80 FS – CAN : 7,95 $ cad L 16045 - 31 - F: 4,90 € HEDY LA BOMBE D’HOLLYWOOD, L’HUMANITAIRE 2.0, BOLLYWOOD, INDOCHINE-SUR-LOT, LE SONDAGEOSCOPE POLITIQUE P O L I T I Q U E RADIO NUMÉRIQUE TERRESTRE Des ondes en disgrâce N’avez-vous jamais pesté contre un poste de radio qui, installé dans une région reculée, ne captait pas votre station préférée ? Figurez-vous que l’on connaît l’antidote, il s’agit de la radio numérique terrestre. Avec elle, point de parasites ni de “zones blanches” : la petite sœur de la TNT offrirait une meilleure couverture géographique et favoriserait les naissances de radios. Mais elle est boudée par les grands groupes privés et par les pouvoirs publics. Une révolution technologique... tuée dans l’oeuf ? la multiplication des radios libres dans les années 1980 ! Plutôt que de contribuer à faire émerger une RNT anonyme et gratuite, laissant leur chance aux petites et moyennes stations, ils préfèrent lorgner sur l’Internet mobile, surfant sur la mode des smartphones. L’ère serait donc aux « radios IP » (pour Internet Protocol). Une diffusion qui ne se ferait plus sur les ondes, mais par la Toile. Les radios commerciales rêvent ainsi de traçabilité des auditeurs-internautes (via vos fameuses adresses IP, sortes de cartes d’identité numérique), avec ventes aux enchères instantanées des écrans pubs et dialogue avec votre (futur) portefeuille électronique. Trop sympa ! P eu de gens savent ce que c’est, peu de gens en parlent et, pourtant, la radio numérique terrestre (RNT) est à la radio ce que la TNT est à la télé. Soit une petite révolution technologique. En ville, où la bande FM est saturée, elle permettrait de créer de nouvelles stations. Alors qu’il en existe actuellement mille six cents en France, la RNT permettrait de multiplier leur nombre par quatre. À la 16 CAUSETTE #31 campagne, cette technologie pourrait élargir l’offre radiophonique, souvent bien pauvre. Oui, mais voilà, cette évolution – qui nécessiterait que les auditeurs investissent dans de nouveaux récepteurs – risque de ne jamais voir le jour en France… Il faut dire que les patrons des grandes radios commerciales traînent des pieds. C’est drôle, ce sont ceux-là mêmes qui ont bâti leur fortune sur « À un clic des sites marchands » « Dans un univers IP, vous pouvez vous adresser à des publics segmentés tout en étant un média de masse », se réjouit Pierre Bellanger, le patron de Skyrock. Concrètement, grâce à votre adresse IP, Skyrock pourra vous envoyer une pub de jeux vidéo si vous avez moins de 25 ans et une pub de couches pour bébé si vous avez plus de 30 ans... Dans Libération daté du 9 novembre, Jean-Paul Baudecroux, PDG du groupe NRJ (NRJ, Chérie FM, Nostalgie, Rire & Chansons), s’extasie lui aussi : « Internet est un formidable relais de croissance, les “mobinautes” sont à un clic des sites marchands. Grâce à la géolocalisation, on peut même savoir où ils se trouvent. Un jour, on saura tout d’eux. » Alors, pourquoi mettre en place la RNT – anonyme, celle-là, qui ne suit donc pas ses auditeurs à la trace – alors qu’Internet apporte tellement d’avantages financiers ? « En réalité, la RNT classique n’a pas de véritable support économique, martèle Pierre Bellanger. Elle ne peut fonctionner que sous perfusion publique, via des subventions. » Et de qualifier la RNT de technique « paléonumérique », car « vous ne savez pas qui écoute ». Là, face au flot de paroles du patron de Skyrock, une question nous taraude : l’intérêt de la radio n’est-il justement pas sa gratuité et son anonymat ? Une histoire de gros sous De toute façon, le combat « Internet contre RNT » est d’abord une histoire de gros sous. Comme le note Frédéric Schlesinger, ancien directeur de France Inter (également ex-patron du Mouv’ et du pôle radio de Lagardère – RFM et Europe 2), « la RNT permettrait à davantage de radios FM de disposer d’une véritable couverture nationale. L’histoire est simple : les grands groupes en position dominante sont contre les nouveaux entrants, car ils ont peur de se faire grignoter leur audience ». Un big bang qui explique pourquoi le déploiement de la RNT – acté par la loi audiovisuelle de mars 2007 – n’a cessé d’être remis à plus tard… De fait, ses plus fervents défenseurs, on les trouve du côté des radios indépendantes présentes dans les grandes villes, mais qui sont bloquées dans leur développement en FM, comme Oüi FM, Radio FG ou Radio Nova. « En analogique, Nova ne peut pas se développer », confirme Bruno Delport, directeur général de Nova Press (Radio Nova, TSF Jazz, Nova Éditions, Nova Records, Nova Production). « Pour l’instant, la RNT est plombée, déplore- t-il. Les grands groupes sont pour la concurrence quand il n’y en a pas ! Ils préservent leur pré carré. On a donné raison à une poignée d’intérêts privés. » Le gouvernement a en effet décidé, début septembre, de ne pas préempter de fréquences pour Radio France et RFI dans le cadre des appels à candidatures pour la RNT lancés par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) en début d’année (voir l’encadré ci-dessous), reprenant à son compte les arguments des groupes privés : « Ces appels à candidature s’inscrivent dans un environnement économique et technologique très incertain », s’est Les radios retenues par le CSA Dernier rebondissement, Skyrock s’est finalement porté candidat auprès du CSA pour la RNT, car son patron, Pierre Bellanger, parie sur une nouvelle norme technique qui permettra de lier sur votre smartphone la radiodiffusion numérique et la connexion IP : « Avec ce système, tout le monde est gagnant. C’est tous les avantages de la radio IP sans les problématiques de la bande passante », remarque-t-il. Outre Skyrock, parmi les radios retenues par le CSA – un peu moins de deux cents –, on trouve pêle-mêle : Oüi FM, Goom Radio, Euronews Radio, TSF Jazz, Nova, Sud Radio, MFM, Crooner International, Radio Notre Dame, Tropiques FM, Ma Génération Radio, Intégrale Classique, Trace Radio, On’R, Radio FG, Skyrock, Néo et Aligre FM. CAUSETTE #31 17 POLITIQUE Radio France, le 12 septembre, devant des députés qui l’auditionnaient. « La RNT, c’est le nirvana pour le service public, affirmait-il. Vous avez la gratuité, vous avez l’anonymat, vous avez la garantie qu’on va transporter vos produits. Qui me donnera cette garantie si j’ai affaire à un opérateur télécom ? [...] Les citoyens de ce pays ont le droit d’accéder à la radio sans passer forcément par l’un d’eux. » Exit la gratuité justifié le ministère de la Culture et de la Communication dans un communiqué, le 6 septembre. « En particulier, le lancement à grande échelle de la RNT engendrerait des surcoûts significatifs pour les radios publiques », ajouta-t-il. Et, le problème, c’est que « si Radio France n’y va pas, ça ne se fera pas », se désespère Frédéric Schlesinger. « La gauche a libéralisé les ondes il y a trente ans, elle doit soutenir le bascu- lement de l’analogique au numérique, assure Patrick Bloche, député (PS) de Paris et président de la Commission des affaires culturelles à l’Assemblée. La radio numérique sera terrestre ou ne sera pas. Je ne désespère pas que le gouvernement finisse par trouver des marges budgétaires. » « Ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain, attendons de voir », confiait pour sa part Jean-Luc Hees, président de Eh oui ! car écouter la radio sur un smartphone, cela pompe de la bande passante, le tout pour le plus grand bonheur de ceux qui fournissent le réseau, les opérateurs de téléphonie : SFR, Bouygues et Orange ! À Radio Nova, Bruno Delport rappelle que la RNT « permet la gratuité, la mobilité et l’anonymat. Il suffira pour cela d’installer une simple puce radio sur vos appareils numériques ». On le voit, les débats techniques posent des questions politiques. « Il est évident que la RNT émergera un jour, assure Frédéric Schlesinger. La multiplication de l’offre est inéluctable, sinon c’est un formidable cadeau aux géants de l’Internet. » Heu... a-t-on vraiment envie de lier nos oreilles et nos cerveaux à Google et Apple ? Marc ENDEWELD Ilustrations : Manu BOISTEAU Maurice, exilé radiophonique : « En France, la radio est figée » Il n’est pas content, le Maurice : « En France, la radio est figée ! », critique l’animateur radio, personnalité culte de la libre antenne à la française des années 90 (ex-Oüi FM, ex-Skyrock). Il s’est installé depuis quelques mois à La Nouvelle-Orléans. Grâce à la magie de l’Internet, cet exilé radiophonique continue ses émissions pour le plus grand plaisir de nos oreilles francophones. Mais il en veut aujourd’hui aux « grands groupes privés de radio » – parmi lesquels on trouve Lagardère (Europe 1, Virgin, RFM), RTL, NRJ 18 CAUSETTE #31 (Chérie FM, Rire & Chansons, Nostalgie, NRJ) et NextRadioTV (RMC) –, ces « monstres » qui ont décidé de ne pas se porter candidats auprès du CSA pour la RNT : « Ils ne veulent pas y aller, car la RNT va morceler leur gâteau publicitaire. Or, dans ce cadre-là, je pense qu’il y a de place à la fois pour les monstres et pour les radios alternatives », estime Maurice. À écouter sur www.mauriceradiolibre.com