De la légitimité d`une géographie des réseaux sociaux

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De la légitimité d`une géographie des réseaux sociaux
Networks and Communication Studies
NETCOM, vol. 20, n° 3-4
p. 137-157
De la légitimité d’une géographie des réseaux
sociaux : la géographie des réseaux sociaux
au service d’une géographie des conflits
Anne Cadoret1
Résumé.— Les réseaux sociaux en géographie structurent les territoires, influencent les actions
d’aménagement et de gestion de l’espace, et participent au dynamisme des systèmes spatiaux. Au cœur
de la géographie sociale, les réseaux sociaux aident notamment à la compréhension des processus
conflictuels des espaces en mutation. Une étude de cas qualitative, relative au conflit lié à l’urbanisme
sauvage sur le littoral du Languedoc-Roussillon, met en lumière la corrélation entre géographie des
réseaux sociaux et géographie des conflits. Ce cas présente le rôle majeur des réseaux sociaux dans
l’évolution d’un conflit et les dynamiques territoriales qui en résultent.
Mots clés.— Réseaux sociaux, Réseaux d’acteurs, Conflits d’usage, Cabanisation
Abstract.— Social networks in geography shape territories, play a key role in planning and take part in
the dynamics of spatial systems. At the heart of social geography, social networks help with the
understanding of conflict processes in the context of changing spaces. A qualitative case study dealing
with the conflicts related to the spontaneous urbanisation of the coastal areas of the LanguedocRoussillon region, reveals the correlation between the geographies of social networks and conflicts. This
case study illustrates the major role that social networks play in the evolution of a conflict and the
spatial dynamics that result from it.
Keywords.— Social networks, Networks analysis, Land use conflict, Coastal zone, Town planning
Le conflit en géographie est lié à une utilisation réelle ou future de l’espace,
c’est-à-dire à un type d’occupation du territoire ou à une activité humaine, professionnelle ou non. L’étude des conflits nous conduit à étudier les relations entre les
acteurs, ainsi que le comportement et les stratégies territoriales de ces derniers.
Cette perspective mène à étudier les réseaux sociaux.
L’entité sociale constitutive du réseau social est l’acteur (Crozier, Friedberg,
1977). Il s’agit d’une personne prenant une part déterminante dans une action, et
« peut désigner un individu, un groupe, une institution ou finalement tout élément
1. Doctorante en géographie. UMR Espace, Maison de la géographie, 17 rue Abbé de l’Épée,
34090 Montpellier. E-mail : [email protected]
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social doué de capacité d’action (initiative ou réaction) et intervenant, directement
ou non, dans le processus de gestion » (Catanzano, Thébaud, 1995, p. 38.). Leur
structuration, plus ou moins organisée et formelle, donne naissance à un réseau où
l’acteur représente l’élément nodal. L’étude des réseaux sociaux permet d’appréhender la société en offrant des éclairages inattendus sur les processus sociaux
(Bakis, 1993). L’absence de visibilité spatiale des réseaux sociaux, a contrario des
réseaux techniques, ne doit pas faire oublier qu’ils structurent les territoires, influencent les actions d’aménagement et participent au dynamisme des systèmes spatiaux.
L’expression « réseaux sociaux » n’est pas née des géographes qui se l’approprient difficilement. On peut se demander si l’invisibilité matérielle des liens entre
les acteurs est la raison pour laquelle si peu de géographes s’affichent comme
« géographe des réseaux sociaux ». Serait-ce l’appréhension d’être considéré plus
comme un sociologue que comme un géographe ?
Loin d’enlever la primauté aux sociologues dans le domaine des réseaux
sociaux, il semble que le géographe peut apporter ses réflexions et enrichir le
concept, de façon théorique et méthodologique. Nous proposons d’éclaircir cette
affirmation et de l’illustrer par une étude de cas explicitant la pertinence d’une
étude des réseaux sociaux pour la géographie des conflits.
I. LES RÉSEAUX SOCIAUX :
UN DOMAINE DE RECHERCHE PEU EXPLORÉ EN GÉOGRAPHIE
La notion de « réseaux sociaux » naît chez les sociologues dès le début du
siècle. Selon G. Simmel (1908), les formes sociales émergent des interactions
entre les individus. Il introduit ainsi en sociologie la question des relations entretenues entre un individu (ou groupe) et autrui. Les réflexions sur les liens entre les
individus se manifestent également chez les psychologues et anthropologues tout
au long du XXe siècle. L’étude des réseaux sociaux apparaît plus récemment chez les
géographes tels que H. Bakis, J.-M. Offner et D. Pumain, C. Grasland et S. Larribe.
L’intérêt porté à cette notion dépend de l’objectif recherché et de l’approche
scientifique de l’objet social. Ainsi, on comprend aisément les raisons pour
lesquelles les sociologues figurent comme les pionniers concernant les recherches
sur les réseaux sociaux2. Les influences sociologiques étant notables, il nous
semble pertinent de faire le point sur leur approche.
XXe
Les réseaux sociaux chez les sociologues
L’étude des réseaux sociaux se manifeste plus particulièrement dans les
années 1970 et résulte de nombreux travaux sociologiques et psychosociologiques.
Plusieurs chercheurs permettent à la notion de se développer, comme J. Barnes et
2. La littérature est d’ailleurs abondante dans cette discipline. Plusieurs travaux de synthèse
apparaissent dans les années 1990, soulignant les nombreuses études sur le sujet (Scott, 1991 ; Wasserman et Faust, 1994 ; Degenne et Forsé, 1994).
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plus tard les chercheurs de l’école de Chicago. La création de la revue Social Network
et d’un bulletin Connections, produit par le Réseau international pour l’analyse des
réseaux sociaux (International Network for Social Network Analysis), institutionnalise ce paradigme. La grande majorité des travaux porte sur les relations entre les
individus, les réseaux personnels. Les études s’appliquent sur de nombreux terrains,
la diffusion de l’information, l’emploi (Granovetter, 1973), la vie inter-organisationnelle (Lazega, 1992), les associations (Ferrand, 1982; Flament, 1991).
Les premiers sociologues qui travaillent sur les réseaux sociaux s’opposent
quant à la manière de les analyser. Globalement, les uns considèrent l’analyse des
réseaux en fonction d’un déterminisme social, les autres prônent l’individualisme
méthodologique. Parmi ces derniers se distinguent deux paradigmes, une vision
atomistique s’inspirant de la pensée wébérienne et une vision interactionniste qui
considère que « les phénomènes ne résultent pas du déterminisme du milieu social
ou du système global (normes sociales, structures), mais des intentions stratégiques des acteurs » (A. Touraine, J.-G. March, etc.). L’opposition entre les visions
individualistes (l’acteur agit uniquement par intérêt) et holistes (pour laquelle le
réseau s’impose à l’acteur sous forme de contraintes ou de normes) est dépassée
par l’association de ces deux approches. Elle apparaît d’ailleurs par « l’analyse structurale » telle que A. Degenne et M. Forsé la définissent. Par « réseaux sociaux »,
M. Forsé désigne « l’ensemble des relations entre un ensemble d’acteurs, ces relations pouvant être de nature fort variées (pouvoir, échanges, amitié,etc.), l’ensemble en question pouvant lui-même être organisé (une entreprise) ou non (un
réseau d’amis) » (Forsé, Langlois, 1997, p. 29.).
L’analyse des réseaux permet de décrypter les relations entre les acteurs, de
comprendre la position des acteurs au sein du réseau et d’étudier la forme générale
de ce réseau. Il s’agit d’une analyse de la structure où l’acteur est étudié par les
liens qu’ils tissent avec d’autres. Autrement dit, l’analyse de réseau permet d’évaluer la structure d’un réseau et d’apporter des éléments explicatifs quant au
comportement de l’acteur. Les travaux de C. Mitchell (1969) rendent compte de la
position occupée par chacun des participants à un réseau. Il insiste sur le fait que
« les caractéristiques des interrelations, considérées comme une totalité, peuvent
être utilisées pour interpréter le comportement social des personnes impliquées »
(Mitchell, 1969, cité par Ferrand, 1997, p. 37).
Il convient cependant d’insister sur la différenciation entre analyse structurale et déterminisme sociologique émanant d’une vision holiste qui appuie l’idée
que la structure domine l’individu (Granovetter, 1985). A. Degenne et M. Forsé
insistent sur cet aspect en précisant que s’il existe une contrainte structurale, elle
n’est pas absolue (Degenne, Forsé, 1994, p. 11.).
L’analyse des réseaux met l’accent sur les relations et la forme du réseau.
Est-ce la cause du manque d’intérêt des géographes qui percevaient de manière
moindre le rapport avec l’espace ? Les régularités observées dans la structure des
réseaux est pourtant un élément explicatif des comportements des acteurs, qui
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sont alors clarifiés par l’analyse des réseaux sociaux. Ces thèmes suscitent l’intérêt
des géographes, qui préfèrent cependant utiliser l’expression « réseaux d’acteurs ».
Quelle différence y a-t-il entre les réseaux sociaux, les réseaux d’acteurs et les
réseaux d’acteurs sociaux ?
Réseaux sociaux, réseaux d’acteurs ou réseaux d’acteurs sociaux ?
Les réseaux sociaux évoquent les acteurs (individus, associations, entreprises, administrations, etc.) et les relations qu’ils entretiennent entre eux (relation
familiale, amicale, conflictuelle, commerciale, électorale, etc.). Ces rapports sont
volontaires ou non, ou bien sont éphémères ou durables. Quoi qu’il en soit, ces
liens sont d’ordre social dans le sens où l’action, ou le comportement, de l’un est
orienté par rapport à ceux de l’autre (Weber, Simmel). Si l’on accepte cette définition, toute relation au sein d’un réseau (non technique) est un lien social. L’ensemble des relations entretenues par un acteur constitue ainsi un réseau social. Les
réseaux d’acteurs sont donc des réseaux sociaux.
Cependant, il existe une différence de sens selon l’angle d’analyse. Est-ce
pour insister sur le fait que l’acteur joue un rôle prépondérant dans les mutations
du réseau, bien plus que le rôle joué par les relations ? Ou bien est-ce pour ne pas
susciter de confusion entre les acteurs sociaux et les acteurs économiques par
exemple ? Si les réseaux d’acteurs sont des réseaux sociaux, les acteurs de ces
réseaux ne sont pas forcément des acteurs sociaux. Certains diront que les réseaux
d’entreprises font partie de la sphère économique, et non sociale, comme peuvent
l’être les réseaux amicaux ou familiaux. Les entreprises ont des liens de filiation,
des liens financiers, etc. Cependant, cette nuance est très fragile, car l’entreprise fait
partie de la sphère sociale à bien des égards3. De plus, selon la définition des
réseaux sociaux, les échanges monétaires entre les acteurs sont considérées
comme une relation qui mérite analyse.
En fait, certains distinguent les réseaux sociaux des réseaux de sociabilité
formelle. Codifiées, les relations formelles se développent au sein d’organisations
institutionnelles, par exemple. La simple connexion entre des acteurs n’est pas
suffisante pour qu’un réseau social apparaisse (Lemieux, 1999). L’étude des acteurs
et de leurs relations formelles et codifiées se distingue alors de celle des réseaux
sociaux (Bassand, Galland, 1993). Si l’on adopte ce point de vue, le terme de
« réseaux d’acteurs » serait plus approprié et éviterait la confusion. Les acteurs qui
font partie d’un réseau formel usent de leurs relations informelles pour déjouer les
règles établies par le « système d’acteurs » tel que le définit S. Larribe, c’est-à-dire
comme « un ensemble de règles implicites ou non qui organisent une activité (en y
impliquant de fait les acteurs) » (Larribe, 2003, p. 158). Ainsi, les acteurs, par leurs
jeux proposés, s’affranchissent partiellement des règles établies.
3. Se référer par exemple aux travaux de E. Lazega.
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De notre point de vue, nous entendons les réseaux sociaux dans un sens
large, en considérant les relations informelles et formelles entre les acteurs. Ainsi,
nous ne différencions pas les réseaux sociaux des réseaux d’acteurs.
L’appellation réseaux d’acteurs sociaux semble plaire à plusieurs auteurs.
L’accent est mis sur le caractère social d’une personne ou d’un groupe. Dans les
réseaux d’acteurs, il y a donc aussi les réseaux d’acteurs sociaux au sein desquels
les acteurs jouent un rôle majeur dans le domaine social. Dans ce sens, toutes les
catégories d’acteurs peuvent faire l’objet d’une analyse de réseaux d’acteurs
sociaux.
En géographie, outre l’attention portée à l’acteur lui-même, c’est la relation à
l’autre et le lien à l’espace qui suscitent l’intérêt. L’étude du rapport entre le social
et le spatial caractérise l’approche en géographie sociale au sein de laquelle s’effectue l’étude des réseaux d’acteurs socio-spatiaux. L’acteur établit une relation à
l’espace par l’utilisation qu’il en a, les stratégies mises en place pour l’organiser ou
encore les représentations qu’il en a (Brunet, 1992; Lussault, 2003). Le terme d’acteur possède donc une dimension spatiale en géographie. Serait-ce alors un pléonasme de parler de réseaux d’acteurs socio-spatiaux ? ou une volonté de précision
conceptuelle ?
Une chose est sûre, l’analyse des réseaux sociaux que nous nous proposons
de réaliser se place au cœur de la géographie sociale que quelques géographes ont
explorée.
Les réseaux sociaux chez les géographes
L’analyse des réseaux sociaux est récente en géographie. Cela justifie-t-il
l’absence de définition du réseau social dans les dictionnaires de géographie ?
L’intérêt des géographes pour les réseaux sociaux porte sur le rapport à l’espace, au territoire. Les interactions entre les acteurs s’étudient dans une perspective
spatiale car les chercheurs s’intéressent à la gestion des espaces, à l’aménagement
du territoire, à la compréhension des dynamiques socio-spatiales. Parmi les spécialistes de cette discipline, les géographes aménageurs, ceux de la santé ou les chercheurs en géographie humaine se distinguent par leur approche et l’utilisation des
réseaux sociaux dans leurs travaux.
L’analyse de ces réseaux constitue pour les chercheurs un outil efficace et
pertinent dans la représentation et la compréhension des dynamiques sociales
d’un espace. Ainsi elle prend toute son importance au travers d’objectifs divers :
l’aide à la décision, l’aménagement, l’appréhension de la diffusion épidémiologique, l’influence sur les réseaux techniques ou encore la compréhension des
rapports socio-spatiaux.
Les réseaux sociaux au cœur de la géographie sociale
L’analyse des groupes sociaux, de leurs usages et de leurs dynamiques s’intègre dans le champ de recherche en géographie sociale. Celle-ci fait partie de la
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géographie humaine, elle se différencie par son approche géographique des faits
sociaux et sa dimension sociologique des faits géographiques (Frémont, 1984)4.
Géographie et sociologie se complètent et représentent le binôme conceptuel social
et spatial (Claval, 1984, in Bailly, Beguin, 1996, p. 67-71). Selon P. Claval, deux
dimensions définissent la géographie sociale. La première explique et décrit les
aspects de la vie en société qui contribuent à la différenciation du monde, la seconde
repère les organisations et les institutions caractéristiques de chaque aire. Par organisation, l’auteur entend « groupement social » qui se propose des buts déterminés.
Le poids des faits sociaux dans l’évolution des rapports entre les sociétés et
l’espace implique une analyse sociale. En évolution permanente, les dynamiques
internes et externes des relations des acteurs sociaux évoluent au fil du temps et
contribuent à la structuration des territoires5. Indissociables dans une analyse
géographique, et plus généralement en sciences sociales, les trois dimensions
Espace-Société-Temps sont en interactions continuelles. Une approche spatiotemporelle est donc nécessaire dans une étude en géographie sociale « afin d’évaluer les dialectiques internalité-externalité, passé-présent, et les effets du croisement
de ces deux dialectiques » (Corlay, 1995, p. 263).
Le concept de réseaux sociaux témoigne de la dynamique sociale présente
sur un espace. Il « touche largement à l’organisation de nos sociétés et à leur
rapport à l’espace « (Bakis, Grasland, 1997).
Réseaux techniques et réseaux sociaux
Certains géographes s’attachent aux réseaux d’acteurs parce qu’en premier
lieu, ils se sont intéressés aux réseaux techniques qui structurent l’espace et organisent le territoire. Les travaux sur les réseaux sociaux en géographie se développent
ainsi en parallèle de ceux sur les réseaux techniques. En effet, ces derniers ne
peuvent s’étudier sans prendre en considération les acteurs pour lesquelles se
créent réseaux routiers, d’eau, de télécommunications, etc. « Les flux qui se développent dans l’espace dépendent de l’existence préalable de réseaux sociaux »6. Les
liens entre réseaux techniques et réseaux sociaux ainsi que la corrélation entre eux
et le territoire sont mis en lumière notamment par J.-M. Offner et D. Pumain. Les
réseaux techniques n’exercent pas seulement un rôle de maillage de l’espace, ils
créent également des regroupements et des solidarités entre les acteurs. « Au regard
de la flexibilité d’usage et de développement des systèmes techniques, ce sont les
4. « [La géographie sociale] vise à appréhender les interactions multiformes qui existent entre
rapports sociaux, en fixant comme postulat que les faits sociaux jouent un rôle essentiel dans la détermination des espaces géographiques » (Frémont et al., 1984).
5. La thèse en géographie sociale de R. Rochefort aborde dans les années 1960 la question de la
mafia italienne, réseau social particulièrement structuré qui participe fortement au fonctionnement de
certaines villes et à l’organisation des activités économiques.
6. CLAVAL P., 1990, « La mise en réseau des territoires », in BAKIS H., 1990, p. 41-45. L’auteur
souligne l’importance des réseaux sociaux pour le dynamisme des réseaux techniques.
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utilisateurs et les institutions qui donnent sens aux réseaux, par les stratégies et les
processus d’appropriation qu’ils mettent en œuvre » (Offner, 1998, p. 4.).
Dans le domaine des nouvelles technologies d’information et de communication, les recherches tendent surtout à comprendre et à mesurer l’influence des
technologies sur les réseaux sociaux et la vie communautaire7. H. Bakis développe
dans ses articles et ouvrages les relations entre réseaux de télécommunications et
réseaux sociaux. Selon lui, le milieu socio-économique préexistant influence nettement l’organisation d’un réseau de télécommunications et ne fait que traduire et
renforcer une organisation socio-spatiale déjà en place. Dans son ouvrage sur les
réseaux et leurs enjeux sociaux (Bakis, 1993, p. 94), il définit les réseaux sociaux
comme des « modèles de relations à l’intérieur du système social » et souligne l’intérêt d’une analyse géographique des réseaux qui met en évidence les relations entre
les acteurs. H. Bakis remarque aussi la complexité des réseaux sociaux du fait d’un
environnement social constitué de compétitions exacerbées, dans le cadre d’un
changement global de plus en plus complexe.
Dans de nombreuses recherches en géographie, les réseaux sociaux sont
considérés, au même titre que les réseaux techniques, comme un élément structurant l’organisation de la société et de l’espace. Les chercheurs insistent sur l’importance du concept. Cependant, peu d’entre eux consacrent véritablement des
travaux relatifs à l’analyse des réseaux sociaux. Le concept s’intègre dans le
discours ou est traité dans une partie spécifique. D’une manière générale, les
auteurs insistent plus sur l’aspect technique (qui correspond à leur domaine de
recherche) que sur l’aspect social. Les travaux plus « opérationnels », menés en
aménagement, en géographie de la santé ou en géographie urbaine semblent
prendre davantage en considération les réseaux sociaux.
Gestion des territoires et réseaux sociaux
Les « aménageurs », qui regroupent bien évidemment des chercheurs autres
que des géographes, se préoccupent des réseaux sociaux. La connaissance des
comportements et des jeux d’acteurs est un élément primordial de l’analyse des
choix décisionnels concernant l’application d’un projet d’aménagement (Larribe,
1999). C’est la raison pour laquelle une définition et des outils sont développés afin
d’élaborer des scénarios pour l’aide à la décision8.
En parallèle, les spécialistes des épidémies, dont certains géographes de la
santé, font de plus en plus usage de l’analyse des réseaux sociaux. Cela leur
permet une compréhension de la transmission des maladies et une représentation
7. Par exemple la création de groupes sociaux solidaires au travers d’Internet. Voir Véler B.,
2001.
8. Tout chercheur s’intéressant aux problématiques de gestion d’un espace s’attache aux
comportements des acteurs sociaux en matière de décision individuelle et collective. Ainsi on peut
constater que des chercheurs du CEMAGREF travaillant sur des problématiques d’aménagement font
appel à l’analyse des réseaux sociaux pour l’aide à la décision. Cf. Ferrand N., 1998.
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des diffusions spatiales. « Cette démarche favorise la prévention et le repérage d’individus ‘centraux’ dans le processus » (Saint-Charles, 2000, p. 3).
Les études en géographie sociale et urbaine sont les plus fructueuses concernant l’approche géographique des réseaux sociaux (Ley, 1983 ; Garat, 1994 ; François, Grasland, Le Goix, 1999). L’école de Chicago y a largement contribué. Dans le
cadre du programme de recherche ATIP-CNRS « Morphologie sociale et morphologie spatiale » (1999-2001), C. Grasland et son équipe de recherche confrontent les
réflexions sociologiques et géographiques et contribuent au développement d’une
nouvelle représentation de la distribution spatiale des formes sociales. Ils exposent
la nécessité d’un rapprochement pluridisciplinaire pour croiser les informations
relatives à la spatialité des réseaux sociaux et aux maillages de l’espace9.
I. Garat mène, quant à elle, une réflexion sur le rapport entre réseaux
sociaux et territorialité. Les recherches de l’auteure portent plus généralement sur
l’appropriation des lieux par ceux qui les pratiquent. Une étude menée à Bayonne
a permis de mettre en évidence le rôle des réseaux amicaux dans la gestion des
lieux de fêtes dans la ville. I. Garat met en évidence la « cimentation des réseaux
par le partage d’un espace commun ». Le thème des représentations en géographie
suscite l’étude des réseaux sociaux. Cependant, si plusieurs géographes y font référence, ils ne le mentionnent pas toujours de façon explicite.
Géographes implicites des réseaux sociaux
Les scientifiques qui œuvrent à l’identification des acteurs afin de
comprendre les dynamiques socio-spatiales ont une approche implicite des
réseaux d’acteurs sociaux. En effet, ils s’intéressent aux comportements des acteurs
et aux relations entre les hommes et leur espace. Par définition, leurs recherches
correspondent à l’étude des réseaux sociaux. Le caractère implicite des réseaux
sociaux dans certaines recherches suggère que les auteurs traitent des réseaux
sociaux depuis les premiers travaux de géographie sociale ! Cependant il convient
de noter que la désignation « réseaux sociaux », dans les travaux géographiques, ne
constitue pas un effet de mode mais un riche apport théorique. Les réseaux
sociaux n’offrent pas un cadre de recherche nouveau, mais une orientation de
recherche peu explorée en tant que telle dans cette discipline.
Les travaux de G. Di Méo représentent un riche apport théorique par rapport à
la notion d’acteurs socio-spatiaux. Dans son ouvrage Géographie sociale et territoires,
il analyse les territoires propres aux agents sociaux. Il fusionne la dimension sociale
dans le concept de territoire et insiste sur les espaces vécus et l’identité territoriale. Il
étudie notamment des groupes d’acteurs socio-spatiaux ayant des représentations
identiques ou non sur un même espace. L’analyse de ces acteurs témoigne d’un travail
implicite sur les réseaux sociaux qui sont en interaction avec l’espace et créent une
identité territoriale spécifique. Certains auteurs mettent explicitement en évidence le
9. Leur terrain d’étude correspond aux quartiers urbains et aux régions transfrontalières.
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lien entre réseaux d’acteurs socio-spatiaux et organisation de l’espace, du territoire,
tandis que d’autres le suggèrent.
Notre intérêt porte sur le caractère social (organisation, structure, fonctionnement, comportements, etc.) et spatial (usages, occupation spatiale, rapport à
l’espace, etc.) de l’ensemble des acteurs. Ainsi, pouvons-nous nommer les protagonistes des conflits d’usage des « acteurs socio-spatiaux ». Trois dimensions apparaissent : l’action, la dimension sociale et la dimension spatiale. Elles impliquent une
approche systémique. Les interactions du social et du spatial ont des répercussions
sur l’action de l’acteur et ses stratégies. L’intervention sur le même espace ne s’effectue pas de la même façon, chaque acteur ayant sa stratégie d’occupation de l’espace, des conflits se déclenchent dès que les intérêts et les objectifs des différents
acteurs s’expriment et s’opposent.
Les réseaux sociaux représentent un outil de compréhension des processus
conflictuels. Leur analyse permet en effet de comprendre la structuration des territoires et les dynamiques locales et d’appréhender les représentations des acteurs.
L’étude des réseaux sociaux ouvre une porte sur les perceptions de l’espace, et les
relations entre les acteurs et cet environnement, permettant de décrypter les
conflits d’usage.
La modélisation des réseaux sociaux
L’étude des multiples acteurs sociaux présents sur un espace implique une
approche en termes de réseau afin de mieux comprendre les relations entre les
acteurs. Ces relations sont mises en évidence par l’analyse des réseaux. Pour ce
faire, il convient d’adopter une méthode pour les modéliser. Or, la multiplicité des
protagonistes et de leurs échanges sociaux complexifie cette modélisation.
La représentation des réseaux sociaux nécessite un regroupement d’informations sur les acteurs et sur leurs relations ainsi qu’un traitement des données. La
description et l’analyse des réseaux sociaux dépendent donc fortement des
méthodes et outils utilisés. qui permettent d’aborder la complexité des interactions
entre les acteurs. Les réseaux forment un système où les éléments (les acteurs) sont
en interactions. Ils correspondent donc à un sous-système du système social. La
démarche systémique constitue ainsi le cadre méthodologique général de l’analyse
des réseaux sociaux. Selon les objectifs de recherche, les outils d’analyse diffèrent.
Certains s’orientent vers la sociométrie10, d’autres évoquent l’analyse structurale
comme la « théorie des réseaux », quelques-uns font appel aux systèmes multiagents, etc. Qu’il soit technique ou social, un réseau peut toujours être vu comme
un graphe, et l’ensemble des disciplines étudiant les réseaux y font référence.
10. Le sociogramme est une représentation graphique des résultats du test sociométrique qui
permet d’avoir une image de la structure des relations. Moreno analyse les réseaux sociaux par les
« graphes sociométriques » dès 1930. La sociométrie est bien plus utilisée en sociologie qu’en géographie. Larribe, géographe, a cependant utilisé cette démarche pour analyser les comportements stratégiques des acteurs et leur rôle réel dans les prises de décision (Moreno, 1934 ; Larribe, 2003).
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La théorie des graphes
Les graphes sont des représentations de réseaux et correspondent à un
ensemble de points, nommés sommets, dont certains couples sont reliés par une
ligne, orientée ou non, appelé arc et exprimant un système de relations11 (Berge,
1985). La «théorie des graphes» correspond à un ensemble de techniques permettant
l’analyse synthétique des réseaux. En mathématique, elle «vise à la formalisation des
réseaux et la mesure de leurs propriétés» (Lévy, 2003). Un graphe à l’avantage de bien
résumer l’information et cela semble évident pour la notion de structure. «Les réseaux
correspondent à des modèles de relations à l’intérieur du système social, et leur étude
permet de dégager ‘des structures sociales’ sinon une ‘structure sociale’ abstraite »
(Bakis, 1993, p. 94). Les structures peuvent être représentées comme des réseaux,
avec des ensembles de «nœuds»12 (éléments du système social) et des ensembles de
lignes figurant l’interdépendance, l’interconnexion des éléments (Bakis, 1993).
Le langage des graphes constitue un langage commun à l’ensemble des
sciences sociales. Un vocabulaire spécifique permet d’appréhender cet outil privilégié pour décrire les aspects formels des réseaux (Degenne, Forsé, 1994). La
représentation par les graphes permet une visualisation des divers acteurs
(sommets) et des liens qui les relient (arcs). « [Ceux-ci] permettent de visualiser et
de formaliser des relations qualitatives qui jouent des rôles fondamentaux dans les
faits » (Grasland, 2001).
La théorie des graphes dispose d’un vocabulaire particulier pour décrire les
caractéristiques d’un réseau. L’analyse structurale se fonde notamment sur la
théorie des graphes pour expliciter la centralité, la cohésion, l’appartenance
multiple, etc.13. Les sociologues, notamment les quantitativistes, disposent d’une
certaine avance sur les géographes quant à la représentation de ces réseaux.
Représenter les réseaux sociaux
La représentation et l’analyse des réseaux sociaux par les graphes impliquent que soient fixés clairement les objectifs que les chercheurs souhaitent
atteindre. Ensuite, il est nécessaire de recueillir les données, au moyen d’enquêtes
ou d’entretiens, puis de traiter les données (création d’une matrice relationnelle par
exemple), pour représenter le graphe puis pouvoir l’analyser. La première étape
consiste à préciser les acteurs et les relations (Saint-Charles, 2001). Dans un second
temps, il s’agit de définir les variables relationnelles des acteurs (appartenance à
une association, une administration, etc.), et enfin de récolter des informations
comportementales permettant d’expliquer la position et le rôle d’un acteur au sein
d’un réseau (Larribe, 2003).
11. Le graphe est orienté si les sommets sont ordonnés, non-orienté si l’origine et l’extrémité de
l’arc ne sont pas distinguées.
12. Les nœuds peuvent représenter des individus, des groupes, des collectivités, etc. ; les liens
étant des flux de toute nature, ils correspondent aux informations, ressources, relations, etc.
13. L’ouvrage de A. Degenne et M. Forsé (1994) consacre un chapitre entier aux aspects mathématiques de la théorie des graphes.
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Plusieurs difficultés apparaissent quant à la représentation de multiples
acteurs, pas toujours bien définis socialement et administrativement, et des
nombreuses relations existantes. La maîtrise des techniques informatiques permet
de résoudre certaines de ces difficultés. L’informatique a joué un rôle dans le développement de l’analyse des réseaux par les graphes, notamment parce qu’elle a
permis des analyses plus fines et rapides14.
La modélisation des systèmes sociaux fait appel à un éventail de méthodes
mathématiques, dont la théorie des graphes, mais aussi à des simulations numériques. En effet, les structures sociales ne sont pas figées, d’où la nécessité de
comprendre la sociologie des réseaux comme une « perspective dynamique »
(Bakis, 1993). L’intérêt d’une représentation dynamique des réseaux est par ailleurs
fondamental dans le cadre de leur analyse au cours des processus conflictuels. Les
caractéristiques sociales peuvent évoluer rapidement, ce qui pose le problème de
la péremption des données recueillies et de la pertinence de l’analyse du graphe.
Les auteurs reconnaissent cependant l’existence d’une constance dans les dynamiques socio-spatiales.
D’une manière générale, en étudiant les réseaux sociaux, les chercheurs
considèrent l’importance relative de l’analyse systémique et de l’apport de la
théorie des graphes, qui semble être le meilleur moyen d’appréhender et de représenter les réseaux sociaux.
Mis à part des sociologues et des économistes, rares sont les chercheurs qui
modélisent les réseaux sociaux qu’ils étudient. Parmi eux, les aménageurs qui
travaillent sur les SMA et les rares géographes utilisant le sociographe (Larribe,
1999). On peut citer aussi les travaux dirigés par C. Grasland sur les morphologies
socio-spatiales15. Les logiciels permettant la représentation des réseaux sont finalement plus adaptés aux besoins des sociologues qu’à ceux d’autres chercheurs.
Pourtant, les géographes peuvent apporter une contribution notable à la modélisation des réseaux sociaux. En effet, en couplant la dimension temporelle (analyse
dynamique) avec la dimension spatiale (analyse multiscalaire par exemple), ils
améliorent les représentations et participent au perfectionnement des outils de
visualisation des réseaux sociaux, l’intérêt étant de comprendre et de faire
comprendre la dynamique du système socio-spatial.
L’analyse des réseaux sociaux par la systémique et les graphes permet de
comprendre comment les rapports internes et externes des acteurs sociaux s’articulent et se modifient réciproquement. Nous proposons d’illustrer ces aspects théoriques et méthodologiques au regard d’une étude de cas en géographie des conflits.
14. Les logiciels Pajeck, Ucinet ou krackplot permettent notamment de représenter les réseaux
sociaux.
15. L’article de J.-C. François, C. Grasland, R. Le Goix (2002) explicite les travaux menés dans le
cadre d’un programme de recherche « Actions thématiques et incitatives sur programme » du CNRS
(ATIP-CNRS) intitulé « Morphologie sociale et morphologie spatiale » dirigé par C. Grasland (1999-2001).
148
NETCOM, vol. 20, n° 3-4, 2006
II. ÉTUDE DE CAS :
LES RÉSEAUX SOCIAUX DANS LES CONFLITS LIÉS À L’URBANISATION SAUVAGE
Présentation d’un conflit urbanistique et environnemental
Le littoral du Languedoc-Roussillon connaît une urbanisation diffuse sur des
espaces sensibles et, de ce fait, est un terrain d’étude approprié des conflits d’usage
liés à la cabanisation, un phénomène qui prend de plus en plus d’ampleur aujourd’hui en terme d’aménagement et de gestion des usages. La cabanisation est l’occupation illégale d’un espace par des personnes logeant dans des habitations
précaires ou tout-confort, non soumises aux règles d’urbanisme. En effet, l’augmentation de la population sur les espaces littoraux s’accompagne d’une croissance de l’urbanisation, mal maîtrisée et qui s’étend sur des espaces
non-constructibles. Ces espaces sont définis comme tels selon les critères juridicoadministratifs qui précisent le cadre réglementaire du littoral16.
Des abris anciennement destinés au matériel de pêche et de chasse sont
transformés en habitations précaires, occupées temporairement ou de façon
pérenne. Faisant partie du paysage et témoignant de la tradition locale, ce type de
pratique fut toléré tant qu’il restait modéré et ne constituait pas une menace forte
pour l’environnement littoral. Cependant, l’agrandissement des cabanons en de
véritables villas et l’apparition de nouvelles constructions illégales réveillent la
conscience juridique de représentants de l’État jusque-là conciliants et alarment des
citoyens attentifs à la fragilité du littoral. Les cabaniers sont devenus la cible d’un
État résolu à maîtriser le phénomène17 et à faire respecter la loi. Le conflit, latent
depuis des années, se manifeste, entraînant de nombreux acteurs dans un processus conflictuel complexe où les réseaux sociaux ont un rôle prépondérant.
La cabanisation est donc l’objet d’un conflit qui se manifeste de façon plus
ou moins virulente selon les espaces et le temps. Il oppose principalement deux
types d’acteurs : les cabaniers et les autorités publiques, mais en implique beaucoup d’autres. Les cabaniers sont accusés non seulement d’occuper illégalement
l’espace, mais aussi d’être source de nuisances environnementales (eaux usées
rejetées directement dans le milieu, etc.) et de susciter des problèmes de responsabilités des pouvoirs publics car les lieux occupés sont sensibles aux risques d’inondations et d’incendies18. En revanche, les cabaniers défendent un patrimoine
historique, un art de vie et une tradition et réfutent l’accusation de dégradation du
littoral,mettant l’accent sur l’entretien du milieu qu’ils assurent.
16. Les schémas d’aménagement (plan d’occupation des sols, plan local d’urbanisme, plan de
prévention des risques), les lois (Loi Littoral) et les réglementations spécifiques à la protection des
espaces naturels sensibles (réserves naturelles, arrêté de protection de biotope, etc.) précisent les zones
où les constructions sont limitées, soumises à autorisation pour une durée définie, ou interdites.
17. Selon l’étude commandée par la Mission Littoral en Languedoc-Roussillon, plus de
5 000 cabanes ont été dénombrées sur 80 % des communes littorales de la région. « Près de 30 % sont
utilisés à des fins de résidence principale, 2 % connaissent une pratique traditionnelle, les deux tiers
sont utilisées comme résidence secondaire ». BRL, 2004, p. 3.
18. 65 % des cabanons sont soumis à des risques d’inondations en Languedoc-Roussillon.
DE LA LÉGITIMITÉ D’UNE GÉOGRAPHIE DES RÉSEAUX SOCIAUX :
149
Nous nous proposons de clarifier de manière qualitative le rôle des réseaux
sociaux dans les processus conflictuels.
Création d’une dynamique de réseaux
Le retour à l’état initial n’étant plus possible, l’État prend des mesures pour
empêcher les nouvelles constructions et surveiller l’extension des cabanes existantes.
Afin de répondre à un phénomène global (l’urbanisation diffuse du littoral), il met en
place des réseaux d’acteurs capables de répondre à des situations locales complexes
et d’améliorer les relations entre les services publics et les élus locaux, ce qui faciliterait la gestion de ce phénomène et des espaces littoraux. Le manque d’articulation
entre les acteurs publics incite en effet l’État à créer une structure chargée de coordonner les actions des services publics et des collectivités locales.
Les réseaux de lutte contre les cabanes
Créée en 2001, la Mission Littoral en Languedoc-Roussillon19 a pour objectif
de mettre en œuvre des actions cohérentes pour la protection et la valorisation du
littoral. Une de ses missions concerne la gestion de la cabanisation. Un noyau
central hiérarchisé coordonne les acteurs-partenaires qui participent à la gestion de
la cabanisation. Des liens de coopération relient les sous-ensembles de ce réseau.
La dynamique de réseau a pour objectif la réalisation d’outils et la mise en place
d’actions pour lutter contre la cabanisation.
La structure du réseau dessine
Préfet
une étoile, dont le centre est la
Mission Littoral autour de laquelle
Administration
déconcentrées
gravitent des acteurs, indirectement
liés dans la lutte contre l’urbanisation
Conseil régional
et Conseil général
sauvage. L’extension de la cabanisaParquet
tion dans les zones rurales implique
Mission
Littoral
CAUE**
des acteurs liés au foncier agricole
Communes
comme la Société d’aménagement
SAFER*
20
foncier et d’établissement rural .
Conservatoire
Agence de l'Eau
Dans les espaces soumis à la régledu Littoral
mentation du code de l’environnePartenariat contre la cabanisation
ment, ce sont la Direction régionale
*Société d’aménagement foncier et d’établissement rural
**Conseils d’architecture, d'urbanisme et d'environnement
de l’environnement (DIREN) et les
Conseils d’architecture, d’urbanisme Figure 1. Réseau de partenariat contre la cabanisation
19. La Mission Littoral est créée par décision du Comité interministériel d’aménagement et de
développement du territoire du 9 juillet 2001 et mise en place le 1er octobre 2001.
20. La SAFER a pour mission d’améliorer les structures foncières par l’installation ou le maintien
d’exploitants agricoles ou forestiers par l’accroissement de la superficie de certaines exploitations agricoles et forestières, par la mise en valeur des sols.
150
NETCOM, vol. 20, n° 3-4, 2006
et d’environnement21 (CAUE) qui sont appelés à émettre des propositions. L’absence d’assainissement caractérisant de nombreux sites de cabanons suscite l’intervention des Directions départementales des affaires sanitaires et sociales (DDASS).
Les aspects liés aux équipements et à l’urbanisme suscitent l’implication des Directions départementales de l’équipement (DDE). L’Agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse est un partenaire également essentiel puisqu’il s’agit d’un établissement
public de l’État qui a pour mission de rationaliser, à l’échelle des bassins-versants,
l’utilisation des ressources en eau et de lutter contre la pollution des eaux, ainsi
que d’assurer la protection des milieux aquatiques. Une forte implication des
communes dans la gestion du phénomène est sollicitée par la Mission Littoral.
Cependant, elles ne s’investissent pas toutes de la même manière. Certaines ont été
présenté des projets pilotes, d’autres ont préféré refuser.
Les communes ont toujours été concernées par ce conflit, sans toujours l’affronter. La pression de l’État pour la mise en place des plans d’urbanisme ou leur
refonte, l’application des principes des schémas d’aménagement et de gestion des
eaux et la médiatisation du phénomène stimulent l’intervention des élus locaux
dans la gestion de la cabanisation. Les collectivités locales sont donc plus que
jamais impliquées dans ce type de conflit d’usage.
Les réseaux de lutte pour la défense des cabanes
Le conflit d’usage relatif à la cabanisation met en présence des acteurs désireux des traditionnelles vacances au bord des étangs littoraux ou soucieux de la
perte d’un patrimoine et d’un territoire. Divers acteurs se mobilisent autour des
habitants des constructions illégales pour former un réseau de soutien (population
locale, associations, journalistes, etc.).
Les « personnalités engagées » regroupent des personnes connues dans leur
milieu professionnel (écrivains, chercheurs, etc.), qui, à titre privé, sont sensibilisées au devenir de certains cabanons et se mobilisent en soutenant les cabaniers.
Les associations forment un sous-ensemble structuré dans le réseau de soutien à
l’intérieur duquel agissent des individus qui ont le même objectif : la défense des
cabanons. Si certaines de ces associations préexistent au conflit, leur cohésion s’est
renforcée au cours des oppositions. Deux tiers des propriétaires de cabanon sont
regroupés en association de défense ; cependant, ces associations ne sont pas
toutes liées22.
21. Le CAUE est un organisme départemental d’information assumant des missions de service
public dans un cadre associatif. Issus de la loi sur l’architecture du 3 janvier 1977, les CAUE ont été mis
en place dans 88 départements à l’initiative des Conseils Généraux.
22. Par contre, de par le lien que ces associations ont avec les autorités publiques, elles sont
équivalentes. Cette notion d’équivalence est « une façon de distinguer des sous-ensembles dans un
réseau et consiste à confondre des individus ou des positions sociales sur la base des relations qu’ils
entretiennent avec les autres » (Degenne, Forsé, 1994, p. 102).
DE LA LÉGITIMITÉ D’UNE GÉOGRAPHIE DES RÉSEAUX SOCIAUX :
151
Le réseau du conflit
La création de réseaux d’acteurs faci«Personnalités
Inspecteurs des
lite les échanges d’informations et participe à
engagées»
monuments historiques
la mise en place d’actions cohérentes de part
Populations
Cabaniers
et d’autre. La situation conflictuelle évolue
locales
considérablement en quelques années grâce
Associations
de cabaniers
à la dynamique des réseaux sociaux. De
nouveaux acteurs s’insèrent dans le procesLien de solidarité
sus conflictuel global, entrent dans les
Figure 2. Réseau de soutien aux
réseaux préexistants et élargissent le réseau.
cabaniers
L’articulation entre les acteurs aux niveaux
de compétences variés offre en effet des moyens de gestion plus adaptés aux situations locales. Des méthodes de gestion sont pensées collectivement pour assurer une
régulation sereine du conflit. La gestion du conflit est donc multiscalaire.
Le graphe représentant le réseau du conflit est d’autant plus complexe qu’il
s’étend sur plusieurs échelles géographiques et que les enjeux liés à sa régulation sont
majeurs et alimentent l’actualité. La structure complexe du réseau se traduit par des
liens entre les acteurs parfois doubles et parfois à sens unique. Les liens de partenariat,
de soutien et les liens conflictuels créent des réseaux dans le réseau. On remarque par
ailleurs la position spécifique d’acteurs situés entre les réseaux de partenariat et les
réseaux de soutien. Leur position de relais mérite une attention particulière.
La position spécifique des intermédiaires
Le rôle passerelle des gestionnaires de terrain et des responsables associatifs
Les gestionnaires de terrain ont un rôle d’intermédiaire entre les élus, les
administrations, donc avec la Mission Littoral, et par son intermédiaire, avec l’État.
Ils ont par exemple en charge d’établir et de suivre un plan de gestion spécifique à
leur espace de compétence et sont de fait en contact constant avec les acteurs
locaux et les partenaires techniques des administrations. Ce sous-ensemble
regroupe des personnes travaillant au sein d’un syndicat mixte par exemple, ou au
sein d’une commission locale de l’eau, ou encore dans un parc ou une réserve
naturelle. Ils ont une bonne connaissance du terrain et des enjeux locaux et sont
en contact permanent avec la population.
Les contacts entre les acteurs locaux facilitent les discussions qui permettent
de surmonter certaines tensions. Les cabaniers sont en effet inquiets et se persuadent
que la seule volonté de l’État est de détruire les cabanons. Or, l’État et les collectivités
locales n’ont que trois ans pour constater et verbaliser une infraction liée à la cabanisation (hormis sur le domaine public maritime). Après ce délai, aucune destruction
n’est possible. Les réseaux d’acteurs de proximité ont pour mission de gérer l’extension de la cabanisation, donc d’informer les cabaniers sur le statut du terrain qu’ils
occupent, sur les représailles éventuelles s’il y a agrandissement du cabanon ainsi
que sur les dangers qu’ils encourent par rapport aux risques d’incendie et d’inonda-
152
NETCOM, vol. 20, n° 3-4, 2006
État
Échelle nationale
Types de liens:
Conflit
Agence de l'eau
Conservatoire
du Littoral
Partenariat
Soutien
Hiérarchie
Informations
Administrations
déconcentrées
Échelle régionale
Mission Littoral
SAFER*
Parquet
Préfets
CAUE**
Échelle départementale
Préfet de
Région
Administrations
déconcentrées
Conseil régional et
Conseil général
gestionnaires
de terrain
Échelle communale
Inspecteurs des
monuments historiques
"Personnalités
engagées"
Associations de
cabaniers
Populations
Communes
Cabaniers
*Société d'Aménagement Foncier et d’Établissement Rural
**Conseils d’Architecture, d'Urbanisme et de l'Environnement
A. Cadoret, UMR ESPACE, 2006
Figure 3. Graphe des réseaux sociaux du conflit lié à la cabanisation
tion. Les agents de terrain étant plus nombreux à l’heure actuelle et la problématique
de cabanisation étant intégrée dans les documents de gestion des espaces, l’information parvient davantage aux cabaniers.
Au regard de ces contacts réguliers avec les cabaniers, un climat plus serein
semble s’installer entre les autorités publiques et les propriétaires de cabanons.
Mieux informés, ces derniers consolident par ailleurs leurs réseaux de soutien. Au
sein des réseaux de cabaniers, des personnes influentes participent à la mutation
des relations conflictuelles en relations de coopération afin de parvenir à un climat
de « négociations » avec les gestionnaires, et par leur intermédiaire, avec l’État. Le
terme de négociation demande à être éclairci. En effet, la situation dans laquelle se
trouve le cabanier n’est pas vraiment négociable. Ce qui l’est, c’est le temps que le
cabanier va mettre pour régulariser sa situation, ou — plus généralement — pour
remettre en l’état le site afin d’éviter un procès-verbal et des sanctions par le tribunal
compétent. Les responsables d’associations vont donc établir une passerelle entre
les cabaniers et les gestionnaires.
Cette position d’intermédiaire ne signifie pas pour autant une place
influente ou un pouvoir spécifique. En effet, les gestionnaires sont tributaires des
décisions prises par leurs supérieurs qui, eux-mêmes, sont en position d’intermédiaire et subissent diverses pressions.
DE LA LÉGITIMITÉ D’UNE GÉOGRAPHIE DES RÉSEAUX SOCIAUX :
Si la capacité à travailler en
réseau semble être la clé d’une gestion
efficace, les limites ne tardent pas à
apparaître. Le comportement de certains
acteurs court-circuite parfois les efforts
entrepris. En refusant la communication,
certaines associations bloquent tout
dialogue. En demeurant dans l’inertie,
certains élus locaux freinent également
le processus de régulation.
La position des communes
153
Réseau associatif
Absence de structure
en réseau
Cabanier
Gestionnaire de terrain
Lien de solidarité, soutien
Lien informationnel...
évoluant en lien de négociation
Figure 4. Le rôle « passerelle » du
responsable associatif de défense des cabanes
Les maires ont parfois des réticences à prendre part au conflit lié à la cabanisation, alors qu’ils sont de fait au
cœur du conflit. Le lien reliant les élus locaux et les réseaux des résidants de cabanons est cependant ambigu. Cette ambiguïté a des conséquences sur les processus
de régulation du conflit.
Les élus locaux ont administrativement autorité sur les cabaniers. Ils sont en
effet compétents pour verbaliser ceux qui agrandissent leurs habitations par
exemple. Or, il existe un rapport délicat avec les contrevenants. Le rapport de force
s’inverse parfois, bouleversant les stratégies établies par les services de l’État et
complexifiant la tâche des gestionnaires de terrain. La position des élus locaux est
en effet difficile car ils doivent faire respecter la loi tout en gérant les requêtes de
leurs concitoyens, et il se trouve que, dans certaines communes, les propriétaires
de cabanons sont des amis, ou ont un poids électoral important. On comprend dès
lors les difficultés d’une action litigieuse à l’encontre des populations de la
commune. De plus, les propriétaires des cabanes sont parfois conseillers municipaux. Il est alors préférable de faire endosser à l’État le litige. Inévitablement, les
réseaux sociaux ont un rôle majeur dans l’évolution de la situation. On comprend
l’inertie de certaines communes face à la cabanisation, ou le choix d’une issue plus
« douce » (tolérance, régularisation). C’est une politique qui freine considérablement
le processus de régulation du conflit, mais qui permet également d’atténuer les
tensions locales. Cette attitude s’explique aussi par le fait que « les modifications
sont trop peu brutales pour être prises en compte au regard des changements très
visibles occasionnés par la construction d’une zone pavillionnaire ou artisanale par
exemple » (Poulain, 2002, p. 4). En outre, si les maires ont conscience du phénomène, ils sont parfois impuissants pour en gérer la croissance. La nécessité de
moyens techniques, financiers et humains, pour recenser les cabanes, surveiller
l’extension des constructions, informer les cabaniers, éventuellement les poursuivre juridiquement, etc., demande un investissement majeur de la part des
communes pour lesquelles d’autres problèmes sont davantage prioritaires.
154
NETCOM, vol. 20, n° 3-4, 2006
La nature du lien entre élus et cabaniers fluctue en fonction des pressions
locales. Ces fluctuations affectent largement le système social local car elles induisent des changements de comportements des acteurs et, par voie de conséquence,
une redéfinition des alliances. Le système social est largement affecté, et les
processus conflictuels également.
En fonction du contexte local, des stratégies adoptées par les acteurs, de
l’influence de certaines personnes, l’issue du conflit va prendre des orientations
différentes. C’est pourquoi on observe des disparités spatiales concernant les
processus de régulation du conflit à l’échelon communal.
Les rapports de force sont totalement déséquilibrés, car l’avantage est au
réseau étatique. Les dynamiques locales jouent cependant un rôle majeur puisque
les acteurs locaux peuvent renforcer un travail en réseau qui émerge depuis la
mise en place des structures locales et de la Mission Littoral, mais certains ont aussi
le pouvoir de court-circuiter ce travail en réseau. Qu’il s’agisse des préfets, des
administrations ou des élus locaux, les acteurs ont des directives ou subissent des
pressions qui modifient la structure du réseau global et se répercutent sur l’évolution des processus conflictuels. Un acteur influent ayant un pouvoir particulier
(politique, financier, électoral, persuasif, etc.) peut dynamiser les réseaux sociaux
et participer à l’évolution des processus d’antagonisme.
L’analyse des réseaux sociaux : instrument d’analyse des processus conflictuels
La cabanisation n’est pas un phénomène nouveau. D’anciens réseaux d’acteurs se transforment du fait d’une implication forte de l’État et de nouveaux
réseaux apparaissent. Il convient alors de préciser que la structure des réseaux
sociaux évolue au cours du conflit en fonction des facteurs endogènes (comportement de certains acteurs au sein d’un réseau) et en fonction de facteurs exogènes
(changement du contexte politique par exemple). Un élément hors du système
conflictuel peut ainsi réalimenter le conflit et modifier la nature des liens entre les
acteurs ou leur position. Le rôle des réseaux sociaux est majeur dans l’évolution
d’un conflit. La modification de la structure du réseau se répercute sur la dynamique des processus conflictuels. Les dynamiques induites par les acteurs et leurs
relations au sein des réseaux sociaux ont des répercussions sur l’issue des situations antagonistes et à terme sur l’organisation de l’espace.
La gestion du conflit est pensée à plusieurs niveaux. Les actions sont
menées conjointement par des acteurs aux compétences institutionnelles et
géographiques distinctes. On assiste à un changement d’échelle permanent quant à
la gestion du phénomène. La régulation locale du conflit est ainsi dépendante à la
fois du travail en réseau à l’échelle régionale, donc des liens unissant les acteurs,
mais également du comportement de certains acteurs.
La création d’un réseau formel favorise le lien entre des acteurs pour lutter
contre la cabanisation. Le renforcement des réseaux de cabaniers leur permet de se
faire entendre. Les revendications sont transmises notamment par les intermédiaires
DE LA LÉGITIMITÉ D’UNE GÉOGRAPHIE DES RÉSEAUX SOCIAUX :
155
2
1
Marsillargues
2
Mauguio
1
Villeneuve-lèsMaguelonne
Le Graudu-Roi
Gruissan
Poussan
Sigean
Sig
Mèze
Frontignan
Lapalme
Marseillan
Mer Méditerranée
Leucate
Portiragnes
Vias
Agde
Salses-leChâteau
10 km
Le Bacarès
Torreilles
Nombre estimé de cabanes
Sainte-Marie
2094
Saint-Nazaire
Volonté de régulation par les élus
Tolérance passive
Volonté de légaliser
700
Argelès-sur-Mer
365
Volonté d’éradiquer
Port-Vendres
1
Réalisation: A. Cadoret, UMR ESPACE, 2006
Source: Mission Littoral LR
Absence de données
Pas de cabanes
Figure 5. Régulation du conflit envisagée par les élus locaux
locaux, c’est-à-dire les gestionnaires de terrain. Les réseaux au sein des sousensembles sociaux facilitent la mise en réseau d’acteurs qui participent à la dynamique des processus conflictuels et aux mutations des territoires. Si le réseau reste
déséquilibré, de multiples liens se sont créés entre les acteurs. Le conflit est créateur de lien social et donne vie ou recrée des territoires. Une relation conflictuelle
est à l’origine de la création de réseaux sociaux, de conflit, de soutien, de partenariat. La relation litigieuse de départ a rendu visibles des réseaux d’entraide et de
coopération.
Cette simple exploration qualitative des réseaux sociaux permet d’éclaircir
certaines problématiques géographiques liées à la mutation des espaces. L’analyse
quantitative permettra d’approfondir les interactions entre les opposants (calcul de
la centralité, de la densité des relations, etc.). L exemple présenté ici illustre la pertinence d’une géographie des réseaux sociaux en géographie des conflits. L’absence
de visibilité spatiale des réseaux sociaux est un défi vers lequel nous orientons nos
recherches actuelles.
156
NETCOM, vol. 20, n° 3-4, 2006
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