Téléchargez l`analyse - Orchestre Philharmonique de Strasbourg
Transcription
Téléchargez l`analyse - Orchestre Philharmonique de Strasbourg
Jeudi 22 décembre 2016 – 20h Strasbourg, PMC Salle Érasme Silvia Casarin Rizzolo direction Maîtrise de l’Opéra national du Rhin, direction Luciano Bibiloni* John Williams (1932) Thème d’Hedwige (extrait de la BO Harry Potter) Traditionnel Carol of the Bells* Johann Georg Leopold Mozart (1719-1787) Musikalische Schlittenfahrt (Promenade musicale en traîneau) Traditionnel Jingle Bells* Traditionnel (arrangement Luciano Bibiloni) Noëls alsaciens* Leroy Anderson (1908-1975) Sleigh Ride Sergueï Prokofieff (1891-1953) Troïka (extrait de Lieutenant Kijé op.60) Traditionnel (arrangement Thierry Escaich) Entre le bœuf et l’âne gris* Piotr Ilitch Tchaïkovski (1840-1893) Casse-Noisette (Suite op.71a et Valse des flocons de neige)* Conrad Franz Xaver Gruber (1787 –1863) Stille Nacht* 5’ 2’ 3’ 3’ 4’ 5’ 3’ 4’ 25’ 5’ Un pays imaginaire, une terre enneigée, la pénombre où l’on distingue à peine des traîneaux. L’attente. Celle d’un miracle, peut-être. Bien des compositeurs ont su capter la magie de l’incertitude ou de la révélation, peuplant leurs notes d’images, de sensations étranges et si attirantes. Entrons dans leurs rêves sonores. John Williams Thème d’Hedwige, extrait de la bande originale du film Harry Potter Tout comme pour Ennio Morricone, on ne compte plus les musiques de films du compositeur, chef d’orchestre et pianiste américain. Parmi les plus célèbres, on citera les sagas de La Guerre des étoiles, mais aussi d’Indiana Jones, de Superman, d’Harry Potter sans oublier les succès planétaires que furent La Liste de Schindler, Il faut sauver le soldat Ryan, J.F.K… John Williams a recueilli une liste impressionnante de prix dont cinq Oscars, quatre Golden globes, etc. Le compositeur américain sait admirablement identifier les rythmes, mélodies et harmonies à des personnages, mais aussi à des sentiments et des situations. Le thème d’Edwige apparaît dans le premier volet de la série, Harry Potter, l’école des sorciers, film réalisé en 2001 par Chris Columbus. Son originalité vient du fait qu’il a été pensé pour un solo de célesta. Les couleurs mystérieuses de l’instrument conduisent l’auditeur dans l’univers des contes de l’enfance. Un univers « instable » comme le démontre l’écriture qui joue d’un décor brumeux jusque dans les glissandi des instruments à cordes. Chants traditionnels • Carol of the Bells • Jingle Bells • Noëls alsaciens • Entre le bœuf et l’âne gris Le petit choral de Noël Carol of the Bells (Sonnent les cloches) serait d’origine ukrainienne. L’importance des cloches d’églises est essentielle dans la culture slave. Ce sont elles qui rythment la vie des villages éloignés les uns des autres. Le chant composé sur la mélodie serait plus récent, datant de la première guerre mondiale. Certains ont émis l’hypothèse qu’il ne s’agirait pas d’un chant religieux, mais simplement folklorique. Il est composé sur la base d’un ostinato, c’est-à-dire que la même formule est répétée obstinément, accompagnant ainsi les éléments thématiques du morceau. Combien de films américains mettant en scène la Noël font-ils appel à Jingle Bells ? Tintez clochettes aurait été composé en 1857 par James Lord Pierpont (1822-1893). Compositeur de chansons, mais aussi organiste et arrangeur, il ne pouvait imaginer la renommée universelle que connaîtrait rapidement sa petite chanson, bientôt reprise dans toutes les langues. Son adaptation en français par Francis Blanche (Vive le vent) date de l’après-guerre. Luciano Bibiloni a arrangé plusieurs noëls alsaciens. Ce compositeur et chef d’orchestre né en Argentine a été formé dans son pays puis en France. Il dirige de nombreux chœurs tout en menant une carrière d’enseignant et de ténor professionnel. Depuis la saison 2013-2014, il assure la direction artistique de la Maîtrise de l’Opéra national du Rhin. Luciano Bibiloni et les chanteurs proposent un voyage dans le temps et à travers différents styles musicaux autour du thème des noëls alsaciens. Le chant de Noël Entre le bœuf et l’âne gris daterait du XVIe siècle. Un âne et un bœuf réchauffent Jésus qui vient de naître et que l’on a installé dans une crèche. En 2010, le compositeur Thierry Escaich en réalisa un arrangement pour chœur mixte a cappella. Il a été créé le 16 décembre de la même année par l’ensemble Arsys Bourgogne et l’Ensemble vocal de Joigny. Johann Georg Leopold Mozart Musikalische Schlittenfahrt (Promenade musicale en traîneau) Voilà une partition qu’on n’attendait peut-être pas sous la plume du père de Mozart, lui qu’on nous a dépeint à satiété sous les traits d’un chef de famille acariâtre, colérique, jaloux de ses prérogatives de père, mais aussi dénué de toute forme d'humour. Devant l’Histoire, Leopold reste “l’éducateur” d’un des génies de la musique, très tôt conscient des dons exceptionnels de son fils. Mais on oublie un peu trop qu’il est l’auteur d’un traité de violon (Versuch einer gründlichen Violinschule), qui fut très fameux en son temps, mais aussi de nombreux oratorios, concertos, pièces de musique de chambre et de près d’une soixantaine de symphonies. Les musicologues s’accordent pourtant à considérer sa musique avec plus que de la bienveillance. Mais l’ombre prodigieuse du fils a occulté le talent du père. Cette Promenade musicale en traîneau n'incite guère à la tristesse ! Elle fait partie d’un Divertimento composé en décembre 1755 et qui comporte pas moins de dixneuf pièces. Il s’agit d’une œuvre d’envergure, s’inscrivant dans une tradition de promenades exotiques et amusantes. Quelques coups de fouets, le tintement de grelots et la balade peut débuter au trot (allegretto). Elle revient à trois reprises dans le Divertimento et, à chaque reprise, de manière plus développée. Leroy Anderson Sleigh Ride Né à Cambridge (Massachusetts), Anderson étudie à Harvard auprès de Georges Enesco et Walter Piston. Hélas, faute de moyens financiers, le jeune Anderson abandonne rapidement le rêve d’une carrière de compositeur “classique”. Il se passionne pour les langues et il apprend couramment l’allemand, le français, l’islandais, l’italien, le norvégien, le danois, le portugais et le suédois… Ce “passetemps” qui révèle des dons hors du commun en fait une recrue particulièrement précieuse pour les services de renseignements lorsque les États-Unis entrent en guerre. C’est au cours du conflit qu’Anderson rencontre Arthur Fiedler (1894-1979), le génial directeur des Boston Pops, qui le sollicite pour plusieurs arrangements destinés à sa formation. Ce qui fait le charme de la musique d’Anderson, c’est son mélange inouï de culot et de professionnalisme. Ses harmonies font parfois songer à Rachmaninov par leur lyrisme généreux teinté de sonorités inattendues, des rythmes hilarants, dignes des comédies de Sir Arthur Sullivan. L’effet humoristique est enveloppé dans une sorte de “papier de soie” : un air bien conçu devait alors tenir sur une face de 78 tours et être sifflé par l’homme de la rue. C’est bien évidemment le cas de Sleigh Ride (Promenade en traîneau), pièce truculente dans laquelle le compositeur nous convie à une promenade au trot. Une promenade avec ses airs de fanfares, ses sonneries éclatantes et son inévitable et conclusif… hennissement ! Serge Prokofieff Troïka, extrait de Lieutenant Kijé op.60 À l’origine, le Lieutenant Kije est un film. Il s’inspire d’une nouvelle de l’écrivain Yuri Tynianov. Le film muet doit voir le jour en 1928. Prokofiev accepte la proposition – c’est une première pour lui – de composer sur des images. Il est ravi de collaborer à ce projet d’une œuvre soviétique. Il est vrai que le sujet si caustique ne peut qu’attirer un musicien qui manie avec maestria l’art de la provocation. Sous le règne du tsar Paul Ier, un bureaucrate commet l’erreur d’attribuer une existence à un officier imaginaire. Il ne peut revenir en arrière et va créer, de toute pièce, la vie d’un soldat. Il sera bien utile pour endosser toutes les fautes de la cour du tsar. La Naissance, Romance, Le Mariage, Troïka, et L’Enterrement de Kijé composent les cinq épisodes dont Prokofiev se servira pour réaliser sa célèbre suite de concert. L’emphase décalée de ces pages qui raillent l’art militaire, mais plus encore la tendresse, l’émotion et la délicatesse de la partition mettent en valeur la virtuosité des solistes de l’orchestre. Le petit mouvement Troïka débute de manière dissonante et grandiloquente. Puis, c’est une course effrénée en traîneau, ornementée de grelots. Dans la version avec chant, Prokofiev utilise une chanson de hussard qui se moque de l’inconstance des femmes. Piotr Ilitch Tchaïkovski Casse-Noisette (Suite op.71a et Valse des flocons de neige) Au XIXe siècle, le ballet était considéré comme un divertissement, proposé entre deux pièces d’une musique de scène, entre les deux actes d’un opéra. L’idée de génie de Marius Petipa secondé par Tchaïkovski est d’avoir imaginé un spectacle à part entière. Grâce à trois ballets, Le Lac des cygnes (1876), La Belle au boisdormant (1889) et Casse-Noisette (1892), le compositeur et le chorégraphe donnèrent ses lettres de noblesse à un genre qui ne connaissait alors que les modèles surannés allemands et italiens. Casse-Noisette s'adresse autant à l'enfance qu'au monde des adultes. En effet, le livret s’inspire de l’Histoire du casse-noisette (1845) d’Alexandre Dumas et du Casse-Noisette et le roi des souris, l’une des Fantaisies à la manière de Callot d’E.T.A. Hoffmann. Au début du XIXe siècle, en Allemagne, un soir de Noël, Clara et Fritz, les enfants du riche bourgeois Silberhaus, contemplent leurs cadeaux. Le parrain de Clara, Drosselmeyer, apporte un casse-noisette en forme de petit soldat. Fritz le brise. Sa sœur le pose dans un lit de poupée. Après le départ des invités, Clara reste éveillée. Minuit sonne. C’est à ce moment qu’une armée de souris avec un roi à sa tête attaque l’arbre de Noël. Les jouets le défendent et ils résistent vaillamment à l’invasion des souris. Casse-Noisette prend part à la bataille et il se transforme bientôt en un beau jeune homme. Une forêt en hiver, recouverte de neige, a remplacé le décor chaleureux de la maison. Sous le clair de lune, on discerne une promenade en traîneau. Chez la fée Dragée et le prince Orgeat, à Confiturembourg, tout n’est que confiserie. Casse-Noisette et Clara, les deux héros de la soirée, sont accueillis avec bienveillance. Danses et divertissements s’enchaînent jusqu’à l’apothéose finale. La soif d’exotisme irrigue de nombreuses danses du ballet. Le musicien puise son inspiration dans les danses les plus prisées à la fin du XIXe siècle : danses arabe (le café), espagnole (le chocolat), chinoise (le thé), russe (Trepak). Les danses débutent dans une atmosphère enjouée, après une ouverture miniature, une véritable symphonie de jouets. Elles sont choisies pour leur allure pittoresque et leur humour à peine déguisé. Leurs rythmes et couleurs sont stylisés et n'ont guère de rapport avec leur pseudo-origine, qu’elle soit arabe ou asiatique. L’orchestration souvent complexe du ballet est condensée dans la Suite pour orchestre, régulièrement programmée en concert. La première de la Suite eut lieu à Saint-Pétersbourg, le 7 mars 1892 sous la direction du compositeur. Elle comprend huit numéros extraits des différents actes : Ouverture miniature, La Marche, puis la Danse de la fée Dragée, Trépak, la Danse arabe, la Danse chinoise, la Danse des mirlitons et, enfin, la célébrissime Valse des fleurs. Franz Xaver Gruber Stille Nacht Qui connaît les auteurs de l’une des plus célèbres chansons de Noël « Stille Nacht, Heilige Nacht » (Douce nuit, sainte nuit) ? Le musicien, tout d’abord. Né en HauteAutriche, Franz Xaver Gruber mène une carrière d’organiste et d’instituteur. Il rencontre le prêtre Joseph Mohr (1792-1848). Grâce à leur collaboration naît, en 1818, la célèbre mélodie dont la création a lieu le 24 décembre de la même année, à l’église Saint-Nicolas d’Oberndorf bei Salzbourg. Elle fut d’abord chantée accompagnée d’une guitare, puis connut d’autres versions, pour orgue et, enfin, avec orchestre. Orientations discographiques Leopold Mozart Musikalische Schlittenfahrt • Orchestre de chambre de Munich, direction Hans Stadlmair (Tudor) Leroy Anderson Sleigh Ride • Eastmann Rochester Pops Orchestra, direction Frederick Fennell (Mercury) Prokofieff Lieutenant Kije • Orchestre philharmonique de Berlin, direction Seiji Ozawa (Deutsche Grammophon) • Orchestre symphonique de Chicago, direction Fritz Reiner (RCA) • Orchestre philharmonique de St Pétersbourg, direction Yuri Temirkanov (RCA) Tchaïkovski Suite de Casse-Noisette • Orchestre symphonique de Chicago, direction Claudio Abbado (Sony) • Orchestre philharmonique de Munich, direction Sergiu Celibidache (Emi Classics) • Orchestre philharmonique de Vienne, direction Herbert von Karajan (Decca) • Orchestre symphonique d’URSS, direction Evgeni Svetlanov (Melodiya)