Travaux sans permis, ça peut faire mal... – Budget
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Travaux sans permis, ça peut faire mal... – Budget
22 Infr actio n s & U rb a n i s m e Travaux sans permis ennuis garantis ? Effectuer des travaux sans permis ou sans respecter le permis d’urbanisme pourrait avoir de lourdes conséquences, non seulement pour l’auteur des travaux, mais aussi pour les acheteurs du bien. O n ne construit pas ce que l’on veut, où l’on veut ni comme on le veut. Toute nouvelle construction et bon nombre d’aménagements doivent faire l’objet d’un permis d’urbanisme, qui remplace l’ancien permis de bâtir. Lorsque vous construisez ou faites réaliser des aménagements importants, il est obligatoire de faire appel à un architecte, qui se charge d’introduire la demande auprès des autorités et veille à ce que les travaux soient conformes aux prescriptions urbanistiques. Mais il existe aussi des aménagements que vous pouvez réaliser sans l’aide d’un architecte et qui nécessitent néanmoins l’octroi d’un permis. Pour ces travaux, c’est à vous d’effectuer la demande de permis auprès de la commune. Mais que se passe-t-il si vous décidez de passer outre cette procédure ? On parlera d’infraction d’urbanisme dans les trois cas suivants : – si vous effectuez des travaux sans permis ou qui ne respectent pas le permis octroyé; – si les travaux sont effectués après la date de validité du permis; – si les travaux ne respectent pas un plan de secteur (niveau régional) ou est en contradiction avec un plan particulier d’aménagement (PPA, niveau communal). Qui constate ? Plusieurs fonctionnaires sont habilités à repérer et constater les infractions afi n d’en dresser un procès-verbal : – les agents et officiers de la police locale et de la police fédérale ; – les agents de l’urbanisme. Ils ont accès au chantier ou au bâtiment incriminé mais ne peuvent tout de même pas se transformer en détectives privés. Par exemple, si la maison est déjà occupée, ils ne peuvent pas y entrer d’autorité. Dans ce dernier cas, pour effectuer un constat, ils devront disposer d’un mandat du juge, qui ne le délivrera que si les fonctionnaires peuvent faire état d’une suspicion sérieuse d’infraction. Bien entendu, un voisin qui s’estime lésé par vos projets peut vous intenter un procès, si le dommage que vous lui infl igez dépasse les troubles de voisinages acceptables. Dans ce cas un expert peut être désigné pour constater s’il y a eu infraction ou troubles de voisinage excessifs. Acheteur prudent Toute personne qui effectue, fait effectuer ou maintient en l’état des travaux illégaux est punissable. On ne parle donc pas ici du seul propriétaire de la maison, mais aussi de l’architecte ou de l’entrepreneur. En premier lieu, c’est celui qui a exécuté ou fait exécuter les travaux qui sera sanctionné. Par exemple, le propriétaire d’une maison qui demande à un entrepreneur de creuser une piscine alors qu’il n’en a pas l’autorisation. Mais, sauf en Flandre, on pourra aussi sanctionner le propriétaire qui maintient en l’état des travaux effectués sans permis même s’ils ont été effectués par d’autres et même s’il ignore cette illégalité En effet, à l’heure actuelle, les infractions au permis d’urbanisme sont prescrites au bout de 5 ans mais le maintien en l’état, lui, est une infraction imprescriptible, autrement dit qui ne se régularise pas avec le temps. Donc, si vous achetez une maison bâtie illégalement, au bout de cinq ans ceux qui l’ont construite ou fait construire ne sont plus punissables mais la construction reste illégale même plusieurs dizaines d’années après et son nouvel acquéreur devient à son tour punissa- Budget & Droits La saga du certificat d’urbanisme Jusqu’il y a peu, toute personne ayant demandé un permis d’urbanisme en Wallonie devait, une fois les travaux achevés, faire une déclaration de conformité à la commune, autrement dit certifier que les aménagements étaient bien conformes à ce que prévoyait le permis. L’idée a alors germé que, pour remplacer cette déclaration unilatérale non contrôlée, on ferait appel à des contrôleurs indépendants. Dont coût, quelque 250 €. La mesure se profilant sans doute comme trop peu populaire, les autorités parlent maintenant d’attribuer ce rôle aux communes elles-mêmes. Mais ce n’est encore qu’un projet. En attendant, on revient au système de la déclaration sur l’honneur. ble aux yeux de la loi car il maintient cette situation. En Flandre, toutefois, seul le fait de construire illégalement reste punissable dans un délai de 5 ans. Le nouvel acheteur, lui, n’est pas punissable sauf si les travaux sont effectués dans une zone sensible, par exemple un bois ou une réserve naturelle. Dans ce cas, l’infraction est imprescriptible et le propriétaire de la maison reste sanctionnable. Cela, c’est pour le côté pénal des choses. Toutefois, les autorités ou un voisin lésés gardent la possibilité d’intenter une action au civil . En effet, un voisin que la construction prive de lumière, par exemple, peut demander des mesures de réparation devant un tribunal civil dans un délai de 20 ans après la construction ou les travaux effectués. En tant qu’acheteur, mieux vaut dès lors s’informer que le bien convoité est libre de toute infraction. Préalablement à l’achat, demandez au notaire si le bien n’a pas fait l’objet d’une citation ou d’un jugement pour infraction au permis d’urbanisme. L’information est transcrite au bureau des hypothèques et la responsabilité du notaire est engagée s’il ne la consulte pas. Pour lui laisser le temps de faire les recherches, ajoutez au compromis de vente la mention : " la vente n'aura lieu que si aucune infraction au permis d'urbanisme n'a été constatée avant la signature de l’acte de vente ". Vous pouvez également effectuer des recherches vous-même auprès de la commune. Celle-ci doit en effet vous fournir sur simple demande toute information sur la destination urbanistique, l’existence d’un permis, d’une cita tion ou d’une condamnation pour délit d’urbanisme. Permis ou pas ? Exemples fréquents Permis exigé dans les 3 Régions pour : – construction de maison, piscine, terrain de sport, mur de clôture en briques, cage grillagée, volière de plus de 10m², remise, garage ou abri voiture, serre ou véranda de plus de 10 m², terrasse couverte ; – agrandissement de la maison, modification du toit (forme ou type de couverture), ajout d’un balcon – modification de la façade par percement de porte/fenêtre ou placement d’une brique de parement ; – modification de la destination du bâtiment (habitation transformée en commerce) ou modification de la disposition du nombre de logements (par exemple installer un kot ou un studio) ; – installation d’une antenne parabolique, d’un réservoir de gaz en surface ; – aménagement d’une allée ou d’une place de parking ; – placement de clôtures en bois, en plaques de béton ou en blocs ; – modification du relief (créer une bute, creuser un étang de grand dimension) ; – abattage d’un arbre de grande taille et déboisement. Bruxelles et Wallonie uniquement : travaux souterrains (citernes) et placement de clôture en fil de fer. Pas de permis pour : – installations électriques, sanitaires, de chauffage, travaux d’isolation ou de ventilation ; – aménagements intérieurs sans modification de la destination ou du nombre de logements, etc. ; – travaux de conservation, y compris remplacement des tuiles et menuiseries extérieures ; – constructions d’une terrasse, d’allées à l’arrière , d’équipements de jardin (balançoires, barbecues). En Wallonie uniquement : poulailler, abri de jardin, serre (moyennant certains de conditions). En Flandre uniquement : clôture de fil de fer de 2 mètres max mai /juin 2005 - n° 180 Quelles conséquences ? Recours contre le vendeur Si vous avez malgré tout acheté un bâtiment frappé par une infraction au permis de bâtir/d’urbanisme, vous avez le droit de demander l’annulation de la vente et de vous retourner contre le vendeur si vous avez subi des dommages, frais ou amendes suite au constat tardif de cette infraction. Vis-à-vis des pouvoirs publics À l’exception de la procédure en justice, toutes les démarches nécessaires s’effectuent auprès du service urbanisme de votre commune. > Arrêt des travaux Dès qu’une infraction est constatée, les agents compétents peuvent intimer l’ordre (oral ou écrit) d’interrompre les travaux. Dès ce moment, tous nouveaux aménagements sont interdits, à l’exception des travaux justifiés par la sécurité (par exemple des travaux de stabilisation), que l’inspecteur peut autoriser. La notification écrite de l’arrêt des travaux est envoyée par recommandé dans les 5 jours (8 en Flandre) suivant la visite de l’inspecteur. Cela vous laisse le temps d’intenter une procédure en référé contre les autorités si vous estimez être dans votre droit. Mais si ce n’est pas le cas, vous n’avez aucune chance d’obtenir d’un juge qu’il autorise la poursuite de travaux illégaux. Quelles sanctions ? Les amendes dépendent de la gravité de l’infraction. Par exemple, changer la destination du bâtiment sera moins lourdement sanctionné qu’une démolition illégale. Voici quelques "fourchettes de prix ", selon les régions. Wallonie : 250 € en cas d’ infraction légère régularisée, 25 € par m³ bâti pour une construction illégale et 25 € par m², si c’est une démolition sans permis, avec un maximum de 25 000 € dans les deux cas. Flandre : 1 € par m³ illégalement construit et par m² illégalement démoli, avec dans les deux cas un minimum de 125 € et un maximum de 25 000 €. Bruxelles : 2 € par m³ de construction illégale et par m² de démolition, avec un minimum de 125 € et un maximum de 1250 €. 23 24 Infr actio n s & U rb a n i s m e Si vous outrepassez l’interdiction, vous risquez plusieurs milliers d’euros d’amende, la démolition des travaux postérieurs à l’interdiction et même (Wallonie et Bruxelles), une peine d’emprisonnement dans les cas les plus graves. > Régularisation Cette procédure est envisageable si vous avez effectué des travaux sans demander de permis mais que ceux-ci ne sont pas en infraction avec l’un ou l’autre règlement. Par exemple, vous avez percé une fenêtre supplémentaire dans la façade de votre habitation sans que cela soit interdit par un PPA. En Flandre, avant de pouvoir lancer une procédure de régularisation, il faut en plus apporter une preuve de transaction à l’amiable (voir plus loin). Sans paiement transactionnel, pas de régularisation. Mais une fois la régularisation obtenue, vous ne pouvez plus être poursuivi . Il en va autrement en Wallonie et à Bruxelles, ou la régularisation vous met en ordre d’un point de vue administratif mais ne vous exonère pas pour autant d’un règlement transactionnel. > Transaction C’est une proposition de paiement dont le montant dépend de barèmes préétablis pour l’infraction en question. Pour que l’arrangement à l’amiable soit possible, il faut que les travaux soient passibles d’un permis et qu’aucune action en justice n’ait été lancée,. En Flandre, il faut en outre qu’une procédure de régularisation ait été entamée. En Wallonie, en revanche, il faut au préalable l’accord du bourgmestre et de la Région. Demander un arrangement à l’amiable ne signifie pas que vous l’obtiendrez. Si l’inspecteur estime qu’une sanction se justifie, il peut vous poursuivre. Face à la justice C’est au fonctionnaire délégué représentant la Région ou au collège des bourgmestre et échevins qu’il appartient de déterminer devant quelle juridiction ils veulent vous poursuivre : un tribunal civil ou, plus fréquemment, un tribunal correctionnel. Devant le tribunal, c’est le fonctionnaire délégué qui détermine quel type de mesures de réparation il souhaite vous voir appliquer : – la démolition ou la remise dans l’état originel est la sanction la pluslourde. Ces travaux s’effectuent aux Infraction à quoi ? Plusieurs dispositions peuvent exister en matière de construction. Le plan de secteur : la Belgique est divisée en 48 régions, elles-mêmes subdivisées en zones (agricole, habitation, industrielle, naturelle). Pour chaque zone on a établi des règlements spécifiques. Les plans particuliers d’aménagement ou PPA couvrent des zones nettement plus petites (quelques rues). Outre la destination précise du terrain, ils contiennent des dispositions sur l’implantation, l’aspect extérieur, etc. Le lotissement est une zone parcellisée en accord avec les autorités. Le permis de lotir contient les dispositions valables pour les constructions dans ces parcelles. Les règlements de lotissement déterminent les obligations techniques et financières du responsable du lotissement. Ils établissent également la proportion de terrain affectée aux constructions, aux espaces verts, aux bâtiments techniques. Les règlements d’urbanisme sont surtout des mesures relatives aux constructions proprement dites et aux travaux assimilés : solidité, aspect extérieur, sécurité antiincendie, infrastructures routières, équipements techniques, etc. frais du contrevenant. Imaginez les frais que cela peut entraîner si, pour construire illégalement, vous avez préalablement et tout aussi illégalement démoli un bâtiment existant. Le juge peut prononcer la démolition du nouveau et la reconstruction de l’ancien ! Vous avez un an pour commencer à exécuter la sanction. Passé ce délai, le travail peut être effectué par la force publique, mais à vos frais. – Des travaux d’aménagement seront exigés s’ils permettent d’arriver à une solution permettant d’obtenir un permis d’urbanisme. Par exemple, vous avez fait construire un bâtiment à deux étages avec toit plat dans une zone où seules les maisons d’un étage avec toit à versants sont autorisées. Le juge peut exiger la démolition de l’étage excédentaire et l’adaptation du toit. – Une amende équivalente à la plusvalue que les travaux ont apportée au bien. C’est une mesure que l’on appliquera aux infractions de moindre importance. Si le propriétaire paie, la maison n’est pas libérée pour autant de l’infraction. Celle-ci perdure, même si non passible de poursuites, et doit être communiquée lors de chaque vente, ce qui représente tout de même une perte de valeur certaine. Exemple typique : creuser un étang sans permis. Le juge est tenu de suivre la voie exigée par l’autorité plaignante et ne peut se prononcer sur l’opportunité des mesures réclamées. Il ne peut s’y opposer que dans le cas où elles sont illégales. Toutefois le magistrat a la possibilité de refuser les mesures demandées si celles-ci sont manifestement exagérées par rapport à l’infraction commise. Par exemple, le fonctionnaire demande la démolition totale alors que de simples transformations suffi raient. > Sanctions pénales Outre les sanctions liées aux travaux, le juge peut également imposer une amende à l’encontre du contrevenant. Elle sera d’autant plus importante qu’il s’agit d’un professionnel de la construction. Cela va de quelques centaines d’euros à plusieurs millions, éventuellement assortis d’une peine d’emprisonnement de quelques jours/ mois. Le juge peut également confisquer les revenus liés à une construction illégale, par exemple les loyers. Dans le cas d’un particulier, toutefois, s’il s’agit d’une première fois, si l’ordre d’arrêt des travaux a été respecté et si l’intéressé a demandé une procédure de régularisation, le juge n’alourdira généralement pas la note avec une amende. À l’égard des tiers Toute personne lésée par le projet peut exiger un dédommagement ou des mesures de réparation, soit devant un tribunal civil soit devant un tribunal correctionnel. Celles qui auront éventuellement été réclamées par les autorités auront cependant priorité sur la demande de cette tierce personne. ▲ G. Coene et X. Debourse