Identification des talents et programmes de développement

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Identification des talents et programmes de développement
Talent Identification and Development Programmes in Sport Current Models and Future Directions
Roel Vaeyens,1 Matthieu Lenoir,1 A. Mark Williams2 and Renaat M. Philippaerts1
1 Department of Movement and Sports Sciences, Faculty of Medicine and Health Sciences,
Ghent University, Ghent, Belgium
2 Research Institute for Sport and Exercise Sciences, Liverpool John Moores University,
Liverpool, UK
Identification des talents et programmes de développement dans le sport
L'identification des talents (IdT), défini comme le
processus d'identification de sportifs ayant le potentiel d'exceller
dans une discipline, et le développement des talent (DdT), défini
comme la mise en place de l'environnement le plus approprié à
l'expression de ce potentiel, jouent tous deux un rôle essentiel
dans la recherche de l'excellence.
En plus de l'avantage compétitif d'un recrutement précoce,
les programmes d'IdT permettraient de garantir l'investissement en
le concentrant sur un nombre restreint d'athlètes.
Malheureusement les modèles d'IdT ont une valeur prédictive
relativement faible et leur validité et intérêt sont remis en
question. Bien que nombre de chercheurs suggèrent de redéployer
les moyens des projets IdT vers les projets DdT, un grand nombre
de fédérations et de clubs dans les sports professionnels
continuent d’investir considérablement sur le premier volet (IdT)
de ces programmes.
A travers une revue de la littérature récente non exhaustive, cet article (ndlr, paru en 2008) se penche sur les
connaissances concernant l'IdT et le DdT et discute des difficultés à les mettre en pratique dans le contexte sportif.
1. Problèmes des modèles actuels
Les modèles traditionnels d'IdT utilisant pour chaque catégorie d'âge des protocoles transversaux, et recoupant des
données physiologiques, physiques, anthropométriques, ou des variables techniques, pour prédire la réussite sportive à
l'âge adulte ont montré leur limite pour plusieurs raisons.
Premièrement, les recherches sur ce type de modèles ont basé leur travail sur l'hypothèse que les
caractéristiques du succès chez l'adulte peuvent être extrapolées pour identifier de jeunes talents. Cependant, les
adolescents présentant de telles caractéristiques ne les conservent pas nécessairement lors du processus de maturation.
Il est de plus évident que les caractéristiques préadolescentes n'évoluent pas automatiquement vers des performances
adultes exceptionnelles. Des paramètres comme la maturation et les effets de l'entraînement ont une influence sur ce
processus de développement (ndlr, cf. Modèle LTAD Long-Term Athlete Development, Lettre des Entraîneurs n°13).
Nombre des qualités caractérisant les performances athlétiques de haut niveau chez les adultes n'apparaissent que très
tardivement, mettant donc à mal la sélection précoce des talents.
Un autre problème qui se pose avec les approches transversales est que le niveau de maturation biologique
influence les caractéristiques des performances comme la puissance aérobie, la force musculaire, l'endurance
musculaire, les habiletés motrices et l'intelligence. Etant donné que l'âge chronologique et la maturité biologique
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évoluent rarement à la même vitesse, certains enfants peuvent être avantagés ou désavantagés lors des tests de
performance, particulièrement lorsque l'on compare leurs résultats à des statistiques liées à l'âge chronologique. En
plus de la variabilité de la forme physique liée à l'augmentation de la taille et du poids avant et pendant la puberté, la
maturité sexuelle a également une grande influence, particulièrement chez les garçons.
Les problèmes liés à la maturité sont également importants dans les programmes de DdT. Dans un souci
d'équité, les organismes sportifs soutiennent les jeunes sportifs en fonction de leur âge chronologique et sans tenir
compte de leur âge biologique. Cependant les différences de vitesse de maturation prouvent qu'il faut exclure l'âge
chronologique comme paramètre pertinent d'évaluation du potentiel physique et que la non-prise en compte de l'âge
biologique peut mener à une méprise lors de l'évaluation d'un enfant. Les conséquences pour le sport et l'IdT sont
immenses. Par exemple, la majorité des enfants à maturité précoce pratique un sport caractérisé par l'importance de la
taille, le poids, la force, ou la vitesse (basketball, hockey sur glace, aviron, natation) alors que les enfants à maturité
tardive pratiquent des disciplines pour lesquelles une maturation précoce est un inconvénient (gymnastique, danse).
Un autre point concerne la comparaison des dates de naissance dans différentes disciplines. Elle révèle une
distribution non symétrique favorisant les individus nés en début d'année qui profitent de politiques de sélection et de
possibilités de progression plus importantes (ndlr, cf. Evangile selon Saint Matthieu ou le 41ème immortel, Lettre des
Entraîneurs n°7).
La troisième difficulté rencontrée dans l'approche croisant les données et les performances, et dans une
moindre mesure dans les études longitudinales, est liée à la nature dynamique du talent et de son développement. Cette
interaction dynamique est présente de 2 manières. Les différences interindividuelles de croissance, de développement
et d'entraînement impliquent une évolution non-linéaire des déterminants de la performance, rendant les prédictions
ponctuelles à long-terme peu fiables, particulièrement lorsqu'elles sont réalisées à un stade pré-pubère. Par ailleurs,
derrière les effets masquant des différences de niveaux de maturation, les différences de "background sportif" et de
résistance au stress face aux tests questionnent également sur la pertinence des critères de performance dans
l'identification des jeunes potentiels. Il existe des preuves empiriques dans des disciplines comme la gymnastique, le
hockey, le rugby ou le football, qui suggèrent que des indicateurs de performances différents pourraient caractériser le
succès à différents âges. Alors que les variables anthropométriques de la performance sont extrêmement
discriminantes autour de 10 ans, ces variables seront de moins en moins significatives au fur et à mesure que les sujets
à maturité tardive rattraperont leur retard à un stade plus tardif de l'adolescence. De plus, l'évolution des exigences de
tâches est prégnante dans les disciplines caractérisées par l'introduction fréquente de nouvelles tendances ou règles
comme dans les sports "jugés" (e.g. gymnastique, patinage artistique, judo) et les sports d'équipe (e.g. augmentation de
la vitesse de jeu en football).
Quatrièmement, bien que les capacités sportives résultent d'une multitude de paramètres, les procédés d'IdT se
sont majoritairement focalisés sur un nombre limité de variables. La plupart des chercheurs continuent d'adopter une
approche unidimensionnelle ou se concentrent sur le croisement de mesures anthropométriques, physiques et
physiologiques. Même si ces modèles montrent quelques réussites dans des disciplines pour lesquelles la majorité des
variables repose sur un nombre relativement faible de caractéristiques (e.g. bodybuilding, aviron), leurs prédictions
rencontrent davantage de problèmes dans la majorité des sports d'équipe et de ballon. L'excellence sportive ne peut
être réduite à un unique modèle de caractéristiques physiques et d'habilités maitrisées; elle peut être atteinte de
différentes façons, à travers différentes combinaisons d'habiletés, d'attributs, et de capacités. Une faiblesse dans un
secteur de la performance peut être compensée par un point fort dans un autre, c'est le "phénomène de compensation".
Aussi une confusion potentielle dans l'IdT peut venir de la non sélection d'un individu au sein du groupe de talents en
raison d'un faible score pour une unique variable ou inversement. Les exigences spécifiques liées à la position sur le
terrain impliquent également que les habiletés requises ne sont pas les mêmes selon le positionnement. Cependant, à
haut niveau, les athlètes doivent posséder un niveau de compétence minimal pour chaque composante de la
performance. En outre, un nombre croissant d'études suggère que des variables psychologiques potentiellement
cruciales sont souvent oubliées dans les modèles d'IdT. Cette observation est surprenante si l'on considère que: 1) avec
l'âge, la population d'athlètes réussissant devient plus homogène au regard des profils physiques et physiologiques; et
2) que les variables psychologiques ont été identifiées comme un (le seul?) prédicteur significatif de réussite parmi un
panel d'autres variables physiques et techniques.
En résumé, un certain nombre d'arguments suggère pourquoi les jeunes talents ne deviennent pas toujours des
sportifs adultes performants. Cette incertitude expliquerait l'absence relative d'études longitudinales dans ce domaine.
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2. Vers un cadre théorique clair et consensuel
Le Talent est un concept extrêmement complexe difficile à définir et pour cela un cadre théorique manque. Un
paramètre important dans ce manque de consensus est le débat perpétuel concernant la contribution relative de l’inné
et de l'acquis dans le développement du talent. Il y a des preuves soulignant l'importance à la fois de l'inné et des
caractéristiques environnementales, suggérant qu'aucun des deux ne peut à lui seul expliquer le talent. Cette
sempiternelle discussion ainsi que l'utilisation abusive du mot "Talent" ont freiné le développement des connaissances.
En réponse à l'ambiguïté du terme "Talent", Gagné et al. (1) ont proposé une distinction nette entre les éléments
constitutifs (le don) et le produit fini du développement (le talent) à travers le Modèle Différencié du Don et du Talent
(MDDT). "Le Don" désigne la possession et l'utilisation de hauts niveaux d'habiletés naturelles (aptitudes) dans au
moins un des quatre domaines (figure 2 : intellectuel, créatif, social, perceptuel), situant la personne parmi les
meilleurs 10% des personnes du même âge. "Le Talent" est la maitrise supérieure d'habiletés développées
(compétences) dans tous les champs de l'activité humaine jusqu'à un niveau situant l'individu parmi les meilleurs 10%
dans un domaine précis. Malgré son développement dans le domaine de l'éducation, le MDDT présente un cadre
conceptuel clairement défini qui a récemment été approuvé par les sciences du sport grâce notamment aux deux
domaines physiques mis en avant dans les dons naturels (musculaire, contrôle moteur). Les 6 composants du MDDT
représentent ensemble, de façon dynamique, les déterminants reconnus du talent. Ils permettent également de décrire
comment le talent peut émerger à partir de dons naturels via une chorégraphie complexe entre différentes influences
causales (figure 2).
Alors que les aptitudes clés en sport sont vues comme principalement physiques, la nature
multidimensionnelle du talent sportif suggère qu'un individu puisse posséder des éléments constitutifs de son talent
autres que des habiletés sensori-motrices (e.g. leadership). Ces aptitudes, partiellement génétiques, peuvent être plus
facilement observées chez les jeunes enfants moins influencés par les contributions environnementales et les
apprentissages systématiques. Cependant, ces dons continuent de se manifester à des âges plus avancés et doivent être
mesurés au rythme auquel les individus acquièrent leurs nouvelles habiletés. Van Rossum et Gagné (2) suggèrent que
le don peut être identifié par la capacité d'apprentissage plutôt que par le niveau d'habileté. Le processus de
développement est décrit comme la transformation du don en talent (i.e. les habiletés développées dans un sport
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donné, à travers un processus de maturation, d'apprentissage, d'entraînement et de pratique). Dans la littérature sur
l'apprentissage moteur, la pratique est uniformément vue comme la variable ayant l'influence la plus importante sur
l'acquisition des habiletés. Ericsson et coll. (3) ont conclu que le niveau atteint dans n'importe quel domaine est
uniquement lié à l'accumulation de pratique. Un minimum de 10 années (10 000 heures) de pratique intensive serait
nécessaire pour acquérir les habiletés et l'expérience d'un expert. Cependant, il reste beaucoup de questions concernant
d’une part l'environnement idéal pour le développement du talent et d’autre part la nature, le type et la fréquence de
pratique d'une activité pour atteindre l'expertise.
Un trio de catalyseurs (facteurs intra-personnels, environnementaux, et "chance") pourrait aider ou gêner le
processus de développement. Les catalyseurs intra-personnels sont presque infinis et incluent les traits de personnalité
(caractéristiques physiques et mentales) et les procédés d'autogestion (volonté et personnalité). Les catalyseurs
environnementaux prennent différentes formes incluant la localisation géographique, les personnes, les apports et les
évènements. A l'opposé de nombreuses autres théories, le MDDT reconnait que la chance peut jouer un rôle important
dans le développement du talent. Des événements incontrôlables (e.g. blessures, revenu familial, qualité de
l'éducation, lieu et date de naissance) interviennent de manière non probabiliste dans le développement du talent.
Cependant, il est possible de minimiser l'impact potentiellement négatif du facteur "chance" sur l'IdT. Par exemple,
l'entraînement préventif et la connaissance des facteurs de risque peuvent permettre de réduire les épisodes de
blessures.
Le MDDT mérite des investigations supplémentaires. Il reconnait les influences potentielles respectives de
l'inné et de l'acquis et prend en compte les caractéristiques dynamiques et multidimensionnelles du talent sportif. En
proposant une distinction claire entre potentiel et réalisation, le MDDT constate que la maturité physique et
l'expérience peuvent influencer la performance, et il encourage les scientifiques et pratiquants à se concentrer
davantage sur la capacité individuelle à apprendre. La complexité du nombre d'interactions entre les différents
composants est évidente parce que ces interactions sont différentes d'un athlète à un autre, à chaque moment de la
carrière. La question du paramètre le plus important pour atteindre le plus haut niveau de réussite en sport reste à ce
jour irrésolue.
3. Recherches ultérieures : quelques recommandations
3.1.
Développement à long terme plutôt que sélection précoce
En réponse aux critiques grandissantes des modèles traditionnels d'IdT, un certain nombre de chercheurs se
sont éloignés des systèmes de détection précoces basés sur les tests de performance pour chercher à offrir des
possibilités de développement mieux adaptées à un plus grand nombre de jeunes sportifs. Il est admis que les
individus doués ne réaliseront leur plein potentiel que si les conditions de développement et de stimulation leur sont
accessibles. Aussi, une approche individualisée est souhaitable. C'est pourquoi nous recommandons un modèle de
développement tenant compte des besoins variés des jeunes sportifs, permettant une progressivité en fonction des
différentes étapes de développement, notamment au sein du programme d'entraînement. Ce modèle de développement
revu suggère différentes trajectoires de participation selon le type de discipline. Le modèle LTAD est un exemple
illustrant comment la pratique et le jeu peuvent être organisés différemment en fonction des étapes du développement
de l'athlète. Alors qu'une variété de paramètres comme la souplesse, la force, l'endurance et d’autres facteurs mentaux,
physiques, techniques, décisionnels nécessitent d’être considérés, les programmes de DdT doivent également avoir des
objectifs à long terme et des méthodes prenant en compte ces habiletés qui : 1) sont importantes dans les catégories
adultes; 2) permettent un apprentissage, un développement et une progression plus importants dans le futur. A
l'inverse, si les programmes donnent du poids aux performances immédiates plutôt qu'à l'apprentissage, les sujets
pourraient manquer des expériences fondamentales pour leur développement. Avec comme conséquence que les
champions précoces hypothéqueraient leurs succès dans la catégorie sénior. Or, les jeunes talents rencontrent de fait
déjà des difficultés lors du passage chez les séniors. Paradoxalement, il faut néanmoins garder à l'esprit que se
focaliser sur un axe "développement" inhibe probablement les performances à court terme et nuit par ce fait à l'IdT.
En résumé, la nature dynamique du talent nécessite que l'IdT et le DdT soient reliés. Nous ne recommandons
pas la pratique traditionnelle consistant à sélectionner les jeunes potentiels uniquement sur la base de tests de
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performance. Idéalement, il faut minimiser l'identification et la sélection précoce mais plutôt offrir les conditions d'un
entraînement permettant d'optimiser les potentiels. Malheureusement, dans la réalité, le manque de moyens oblige
souvent à se concentrer sur un nombre restreint d'athlètes. Quelques recommandations peuvent être faites afin d'aider
les chercheurs et les techniciens à concevoir et développer des modèles efficaces d'IdT.
3.2.
Evaluation de la progression plutôt que de la performance : approche longitudinale
Puisque la priorité pour les fédérations et les clubs est de garantir que les athlètes performeront à haut niveau
dans les compétitions Elite, il est primordial pour les modèles d'IdT de pouvoir différencier les performances d'un
adolescent de son potentiel de progression. Toutefois, cette distinction est rarement faite et les talents sont souvent
identifiés par leurs performances. Plusieurs chercheurs ont avancé que seule l'exposition à un environnement
spécifique d'entraînement et de pratique permet de déterminer si un jeune possède les atouts pour exceller. Il est donc
nécessaire d'identifier quelles sont les caractéristiques révélant qu'un individu a le potentiel pour progresser et devenir
un senior performant. Pour cela une approche longitudinale est nécessaire, mais la majorité des recherches ont utilisé
des études transversales. Une exception intéressante, UK sport a récemment mis en place un processus de
"confirmation des talents" : un programme de 3 à 6 mois pendant lesquels les talents identifiés sont confrontés aux
exigences du sport de compétition élite. Ce programme est censé confirmer et valider la sélection initiale.
3.3.
Maturation biologique et ses impacts
Le problème de l'utilisation de paramètres immatures évoluant de manière non-linéaire pendant la croissance
pour identifier les futurs talents a été soulevé. Il s'agit là d'une source d'erreurs importante qui s'illustre à travers la
distribution des dates de naissances au sein de chaque catégorie d'âge en faveur des athlètes nés en début d'année. Bien
que les dernières études montrent que les joueurs nés en fin d'année soient moins nombreux au sein de la population
Elite, leurs chances d'être recrutés ou de jouer sont identiques à celles des joueurs nés en début d'année. Comme de
nombreux paramètres physiologiques et physiques utilisés pour évaluer les performances en sport évoluent avec la
croissance, il est évident que la maturité biologique devrait être prise en compte dans l'évaluation de la capacité à
performer plutôt que l'âge chronologique. Malheureusement, en raison de la difficulté à recueillir ce type de données,
les modèles d'IdT ont rarement intégré ce paramètre.
3.4.
Utilisation de tâches représentatives dans un concept multidimensionnel
L'identification précise des caractéristiques de l'expertise propre à chaque discipline doit être utilisée pour
concevoir des tâches représentatives permettant d'identifier la haute performance. Dans certains sports (eg. natation et
course à pied), ces critères de performance peuvent être évidents et facilement déterminés via de simple tests.
Cependant, dans la majorité des disciplines, l'expertise est le produit de différentes habiletés et composantes. Dans des
études récentes, utilisant une approche multidimensionnelle, l'analyse des performances pour différentes composantes
importantes de la discipline est utilisée pour identifier les variables qui différencient les meilleurs athlètes des novices.
Avec cette approche, il apparait que lorsqu'on les compare aux profils anthropométriques et physiologiques, les
habiletés techniques, cognitives et perceptives sont plus à même de permettre d'identifier les joueurs exceptionnels
dans les sports d'équipe et de balle comme le football et le hockey sur gazon à mesure que leurs performances
s'élèvent. La performance technique supérieure d'un athlète s'appuierait sur un certain nombre d'habiletés perceptuelles
et cognitives intégrées et méticuleusement mises en œuvre dans l’exercice de la tâche. Des études récentes chez les
jeunes footballeurs montrent que ces mesures peuvent effectivement discriminer les différents niveaux d'habiletés.
Cependant, l'examen de la littérature révèle que les prédicteurs psychologiques (personnalité et habiletés perceptuelles
et cognitives) sont fréquemment oubliés dans les programmes d'IdT, qui, s'ils veulent gagner en fiabilité, devraient
intégrer ces habiletés.
Il est également recommandé aux chercheurs de développer des outils qui simulent de manière plus fiable les
conditions de compétition. Cette orientation vers des protocoles tests plus réalistes doit améliorer les prédictions.
Cependant, à cause du nombre infini de cas, les modèles d'IdT qui tentent de corréler le succès avec les scores
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individuels peuvent échouer. Le défi est de créer un dispositif qui puisse évaluer objectivement la performance
"absolue" lors d'une compétition.
3.5.
Utilités et contraintes de l'identification des Talents
L'objectif premier (principal) de l'IdT est de reconnaître les sportifs ayant le meilleur potentiel pour exceller
dans une discipline. La pression financière et compétitive croissante incite les équipes et les organisations à tenter
d'identifier les futures stars de plus en plus précocement. Cependant, la précision des modèles prédictifs apparait
comme inversement reliée à cette anticipation. Plus la détection est précoce, moins elle est fiable. La question est alors
: "quel est l'âge idéal pour l'IdT?". Il serait irréaliste de proposer un cadre commun pour toutes les disciplines car les
pics de performances et les étapes de développement apparaissent à différents âges. Les sports à spécialisation (e.g.
football) ou à pic de performances (e.g. gymnastique) précoces nécessitent une approche différente comparée aux
disciplines à spécialisation (e.g. aviron) ou pic de performances (e.g. triathlon) tardifs. De la même façon, le taux de
succès de l'IdT dépend de la discipline pour 2 raisons. Les sports pour lesquels 1 ou 2 variables ont une haute valeur
prédictive seront plus appropriés pour l'IdT par rapport aux sports à habiletés multiples. De plus, la prédiction de la
réussite sera plus facile pour les sports à habiletés fermées que pour les sports à habiletés ouvertes parce que l'impact
de l'environnement sur la performance sera moins important. C'est pourquoi les fédérations nationales investissent
plus dans l'IdT pour les sports à habiletés fermées (e.g. aviron, cyclisme, athlétisme, canoë, haltérophilie), mais
recrutent aussi désormais des potentiels de médaille à des stades plus tardifs (e.g. transfert de talent).
La figure 3 illustre comment ces 3 paramètres (temps, nombre de
paramètres essentiels, sports à habiletés ouvertes ou fermés) et leurs
interactions affectent la valeur prédictive des modèles d'IdT. Les couleurs
claires symbolisent les prédictions peu fiables. Par exemple, la fiabilité
d'IdT en aviron (sports à habiletés fermées et à faible nombre de
composantes de performance essentielles) sera meilleure qu'en hockey sur
gazon (sports à habiletés ouvertes et nombreuses composantes de
performance essentielles). De plus, la pertinence de la prédiction sera bien
plus faible à 15 ans de distance qu'à quelques mois ou années. Ce modèle
pourrait être validé par des contributions d'études longitudinales et
multidisciplinaires. Ainsi la valeur prédictive du modèle actuel d'IdT
pourrait être rétrospectivement étudiée.
L'inefficacité des modèles d'IdT actuels suggère que les observations scientifiques doivent encore être
accompagnées du regard intuitif de l'entraîneur. L’objectivité du programme d'IdT et la subjectivité du point de vue de
l’entraîneur doivent se renforcer mutuellement. Il est crucial d'éduquer les pratiquants pour qu'ils soient conscients des
nombreux processus qui influencent et interagissent lors de l'adolescence et le DdT. Les tests demeurent intéressants
pour identifier les faiblesses et permettre la mise en place de programmes d'entraînement individualisés.
4. Conclusions
La littérature montre qu'en raison de la dynamique et de la nature multidimensionnelle du sport, les modèles
d'IdT et de DdT traditionnels sont propres à exclure des programmes d'aide un grand nombre de jeunes doués et
talentueux, notamment dans les disciplines à maturité tardive. Aussi les ressources sont fréquemment investies de
manière inappropriée. Ces méthodes d'IdT se concentrent sur un nombre limité de paramètres et ne prennent pas en
compte l'influence de la maturité physique et de l'expérience sur la performance. Les processus d'IdT et de DdT
devraient œuvrer conjointement. Un modèle théorique (MDDT) pouvant servir de cadre de travail a été présenté.
L'avantage du MDDT est son approche dynamique et multidimensionnelle, aidant à identifier la capacité individuelle
à apprendre plutôt que ce qui a déjà été appris. A l'avenir, les études utilisant les modèles d'IdT devront mieux prendre
en compte, la croissance, la maturité, le potentiel de développement, tandis que la nécessité de disposer d’outils pour
mesurer la performance de manière fiable et précise restera primordiale.
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5. Bibliographie
1. Gagné F. Constructs and models pertaining to exceptional human abilities. In: Heller KA, Mönks FJ, Passow AH,
editors. International handbook of research and development of gifted- ness and talent. Oxford: Pergamon Press,
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2. van Rossum JHA, Gagné F. Talent Development in sports. In: J Hum Dixon FA, Moon SM, editors. The
handbook of secondary Mov Stud 2001; 40 (2): 115-28 gifted education. Waco: Prufrock Press, 2005: 281-316
3. Ericsson KA, Krampe RT, Tesch-Römer C. The role of deliberate practice in the acquisition of expert
performance. Psychol Rev 1993; 100 (3): 363-406
Modèle de Gagné – version 2008 en français
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