Les banques britanniques face au resserrement de la contrainte
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Les banques britanniques face au resserrement de la contrainte
economic-research.bnpparibas.com Conjoncture Juin 2016 3 Les banques britanniques face au resserrement de la contrainte réglementaire* Laurent Nahmias La crise a appelé le déploiement de plans de soutien gouvernementaux aux banques britanniques pesant significativement sur les finances publiques. Le coût élevé de ces interventions a conduit le gouvernement à mener des réflexions sur la réglementation prudentielle qui s’accompagneront d’une redéfinition du modèle bancaire. Le ralentissement de la croissance mondiale, l’intensification de la concurrence sur le marché retail et la mise en conformité aux nouvelles exigences réglementaires nationales et internationales amènent les grands établissements à réorienter leur stratégie pour préserver in fine leur rentabilité. * Ce texte a été finalisé avant le résultat du référendum britannique. Alors qu’au début du nouveau millénaire, les banques britanniques affichaient une rentabilité parmi les plus élevées et encore supérieure à celle de leurs homologues outre-Atlantique, elles témoignent aujourd’hui d’une profitabilité bien plus modeste. La crise financière a fortement ébranlé les établissements britanniques et amené le gouvernement à déployer des mesures de soutien de grande ampleur – fort assouplissement de la politique monétaire, création d’une bad bank virtuelle et recapitalisations publiques massives – pour éviter l’effondrement d’une partie du système bancaire. Si les établissements d’outre-Manche ont renforcé leur solidité financière sur la période récente, ils restent sujets à de nouvelles menaces. En dépit de perspectives de croissance interne favorables, l’essoufflement de la croissance mondiale, l’environnement de taux bas, l’avènement de nouveaux acteurs sur le marché de la banque de détail et les durcissements réglementaires successifs affectent la capacité des grandes banques britanniques à dégager des marges confortables. Malgré le mouvement de désintermédiation qui bénéficie actuellement à la banque d’investissement en Europe, la rentabilité des grands établissements sur ce segment a également été mise à mal par les baisses du prix des matières premières et des cours boursiers en 2015. Enfin, la révolution digitale modifie profondément les liens des banques avec leurs clients, intensifiant encore un peu plus la concurrence sur le marché de la banque de détail. Confrontés à un nouveau paradigme économique et réglementaire, les principaux acteurs ont allégé leur bilan (deleveraging) et procédé à des repositionnements géographiques. Ce contexte moins favorable continuera probablement de peser sur la performance financière des grands groupes bancaires britanniques en réduisant leur capacité à générer des revenus récurrents. La nécessaire réorientation stratégique des groupes bancaires À l’issue de sa profonde recomposition, le paysage bancaire britannique demeure dominé par cinq grands établissements de crédit (les « big five ») : HSBC, Barclays, RBS, Lloyds et Standard Chartered. Pour réduire leurs charges opérationnelles et restaurer in fine leur rentabilité, ces groupes bancaires réorientent leur stratégie. Le nouveau paradigme économique et réglementaire Les grandes banques internationales (HSBC, Standard Chartered et Barclays) avaient mieux résisté à la crise que leurs homologues ancrées sur leur seul marché domestique (RBS et Lloyds). Bénéficiant désormais à un moindre degré de relais de croissance à l’étranger, elles doivent, à l’instar des autres établissements, se conformer aux nouvelles réglementations nationales (mise en œuvre d’ici 2019 des recommandations du rapport Vickers Independent Commission on Banking publié en septembre 2011 et exigences prudentielles de la Banque centrale) et internationales (Bâle 3, TLAC, MREL et Bail-In). Le coût induit sera important. economic-research.bnpparibas.com Conjoncture L’essoufflement de la croissance des pays émergents amène un repositionnement géographique Alors qu’il y a quelques années, la quasi-totalité des pays émergents affichaient une croissance extrêmement vigoureuse, certains sont désormais en récession (comme le Brésil et la Russie qui ont enregistré une contraction de leur PIB respectivement de -3,8% et -3,7% en 2015) et/ou subissent un ralentissement économique prononcé. Les projections de croissance ont été révisées plusieurs fois à la baisse. Elles ne laissent pas entrevoir d’embellie notable en 2016 au Brésil et augurent généralement d’une moindre progression du PIB à horizon de deux ans en Asie (à l’exception de l’Inde) (cf. graphique 1). Les grandes banques britanniques internationales, traditionnellement très implantées en Amérique latine et en Asie-Pacifique, ont été touchées de plein fouet par ce ralentissement. Elles ont ainsi enregistré une diminution de leurs revenus d’activité. Elles ont répondu à l’assombrissement des perspectives de croissance en Amérique latine en se désengageant progressivement de la zone, tout en procédant à des redéploiements géographiques au sein de la région AsiePacifique. Plus généralement, le contexte économique et réglementaire les a conduites également à réduire la voilure de leurs activités. Projections de croissance réelle du PIB par zone géographique 10 % 2013 2014 2015 2016p 2017p 8 6 4 2 0 -2 -4 -6 Graphique 1 UK Monde G7 Emergents Asie* LATAM Brésil Russie Inde Chine Afr. du Sud Source et prévisions à fin mai 2016 : BNP Paribas HSBC a ainsi annoncé en juin 2015 la cession de ses filiales au Brésil et en Turquie, opérant ainsi un recentrage de son activité sur l’Asie, plus particulièrement au Sud de la Chine (région de Canton et Shenzhen) et dans l’ASEAN (l’Indonésie, Singapour, Juin 2016 4 le Vietnam et les Philippines notamment). Seule une division sera maintenue au Brésil pour les clients professionnels les plus importants. HSBC espère réduire ses coûts opérationnels de 4,5 milliards de dollars par an à l’horizon 2017 (pour un total de 39,8 milliards de dollars en 2015) dans l’objectif de dépasser les 10% de retour sur investissement (RoE) d’ici 2017 et d’accroître parallèlement sa distribution de dividendes. Ce repositionnement géographique marque une inflexion de la stratégie d’internationalisation récente du groupe qui tendait depuis trente ans à privilégier l’Amérique latine1. Il amène le groupe à revenir vers ses marchés historiques puisque le continent asiatique représentera en 2017 plus de 40% de ses actifs bancaires, contre environ 33% fin 2015. En revanche, HSBC a annoncé en mai 2016 la fermeture de 24 de ses 50 agences en Inde qui totalisent moins de 10% de sa clientèle particulière, en tablant sur un élargissement de ses services de banque digitale dans ce pays. Présente surtout en Asie, au Moyen-Orient et en Afrique, Standard Chartered a été également fortement touchée par le ralentissement économique des pays émergents et la chute du cours des matières premières survenue l’an passé, marché sur lequel elle est extrêmement présente. En 2015, la banque a ainsi dû prendre des mesures drastiques pour renforcer ses fonds propres (augmentation de capital de 5,1 milliards de dollars en novembre 2015 et gel du versement des dividendes et bonus) et pour réduire ses charges opérationnelles (programme de réduction des coûts d’un milliard de dollar en 2015 porté à 2,9 milliards d’ici 2018). En outre, cent milliards d’actifs jugés trop risqués ou peu rentables (près du quart du bilan bancaire) feront l’objet d’une restructuration ou d’une cession. Cela concerne au premier chef les filiales coréennes ou indonésiennes. Selon Bloomberg, Standard Chartered chercherait ainsi à vendre, à mi-avril 2016, au moins 4,4 milliards de dollars d'actifs en Asie pour consolider son bilan. En particulier, elle souhaiterait se séparer d'un portefeuille de prêts en souffrance octroyés à des entreprises indiennes totalisant à son actif 1,4 milliard de dollars. Enfin, Barclays, moins internationalisée que les deux grandes banques précédemment citées, a fait part de son intention en avril 2016 de procéder à un recentrage de ses activités au Royaume-Uni et aux États-Unis. La economic-research.bnpparibas.com banque prévoyait ainsi déjà en mai 2014 de se délester de 115 milliards de livres d’actifs non stratégiques (près de 9% du bilan bancaire). L’objectif poursuivi diffère néanmoins sensiblement de celui d’HSBC puisqu’il s’agirait d’améliorer en premier lieu son ratio en fonds propres durs. La banque a ainsi annoncé la cession de ses activités de banque privée à Singapour et HongKong qui devrait se traduire par une réduction de 1,3 milliard de dollars de son encours d’actifs pondéré par le risque. Le groupe préparerait également un retrait de grande ampleur en Afrique : 10% de Barclays Africa serait ainsi revendu à plusieurs grands investisseurs. A terme, Barclays pourrait céder jusqu’à l’intégralité de sa participation de 62%. La forte rentabilité de cette filiale africaine se trouvant diluée dans les comptes consolidés du groupe, cette cession pourrait lui permettre d’économiser un point de ratio en fonds propres durs. Toutefois, le montant important de la capitalisation boursière de Barclays Africa (75,4 milliards de rands à fin 2015) et la conjoncture défavorable compliquent la quête d’un acquéreur capable de payer une telle somme et sans trop dégrader ses ratios réglementaires. Conjoncture Juin 2016 5 conformément aux recommandations du rapport Vickers, seront tenus de cloisonner leurs activités de banque de détail au Royaume-Uni (ring-fencing) en mettant en œuvre une gouvernance autonome, tant dans la gestion de leurs ratios prudentiels que dans leur management. La délimitation entre les activités logées au sein de la banque de détail cloisonnée et celles qui en seront exclues sera laissée, dans une certaine mesure, à la discrétion des établissements. Toutefois, l’entité autorisée à collecter des dépôts (y compris de grands corporate) et à fournir des services aux particuliers et aux entreprises de l’Espace économique européen (ring-fenced bank) ne pourra pas, en contrepartie, s’engager sur des activités de marché. A l’inverse, la banque d’investissement à l’extérieur du segment cloisonné ne pourra plus collecter de dépôts des particuliers d’un montant inférieur à 250 000 livres et ceux des PME. Mais a contrario, elle sera autorisée et sous certaines conditions, à recevoir les dépôts de grands corporate. Concomitance du net durcissement de la réglementation bancaire nationale et du cadre prudentiel international Ce nouveau paradigme réglementaire aura donc une forte incidence sur le business model des groupes bancaires britanniques et, plus encore, sur le financement des entreprises. Le plan de soutien aux banques britanniques (environ 75 milliards de livres) a fortement pesé sur les finances publiques. Ce coût a amené le gouvernement à remanier en profondeur tant l’organisation du contrôle bancaire que la réglementation prudentielle pour protéger, en dernier ressort, le contribuable. Le système de supervision tripartite 2 , tancé pour avoir failli à anticiper les déboires financiers de certains établissements (par exemple Northern Rock, RBS ou Lloyds), a laissé place en avril 2013 à i) une autorité de contrôle microprudentiel aux prérogatives renforcées et directement contrôlée par la Banque d’Angleterre (BoE), la Prudential Regulation Authority (PRA), ii) un organe chargé d’identifier les risques systémiques, le Financial Policy Committee (FPC) et iii) une autorité des marchés et de la protection des consommateurs, la Financial Conduct Authority (FCA). Post-crise, la réglementation bancaire a également été renforcée : outre la nécessaire mise en conformité avec les nouvelles exigences réglementaires européennes et/ou internationales, les établissements britanniques, Premièrement, le cloisonnement des activités de détail devrait s’accompagner d’une augmentation du coût des ressources financières pour la banque de financement probablement pénalisée par: i) la moindre mobilisation des dépôts de la clientèle selon la définition large ou étroite retenue pour le périmètre des activités de détail et d’investissement, ii) l’élargissement des primes de risque supportées par la banque, car elle ne bénéficiera plus du coût de funding du groupe. Deuxièmement, le renchérissement des financements wholesale pourrait conduire les banques à arbitrer en faveur d’un recentrage sur les réseaux au détriment de la banque d’investissement. Enfin, ce nouveau schéma devrait induire une moindre transformation des maturités pesant in fine sur la rentabilité des établissements et les volumes de financements à moyen et à long terme. Les moyennes ou grandes entreprises seraient encouragées à se tourner davantage vers les financements de marché tandis que les plus petites d’entre elles risqueraient, en revanche, de pâtir de cette contrainte qui s’exerce sur le crédit. La demande accrue de economic-research.bnpparibas.com financements de marché pourrait par ailleurs se heurter à celle des États, dont le besoin pour couvrir leur déficit budgétaire s’est creusé notamment depuis la crise. Plus généralement, le coût estimé de ces mesures a été chiffré, en 2013, pour l’industrie bancaire à, entre 3,5 et 8 milliards de livres. Fin 2015, les cinq principaux établissements avaient déjà esquissé un premier schéma de leur futur business model et, ainsi, délimité le périmètre des activités de la partie cloisonnée. Les établissements orientés sur le segment retail devraient soit placer la quasi-totalité de leurs activités sous l’égide de l’entité cloisonnée (RBS), soit ne pas constituer d’entité spécifique en considérant l’ensemble du groupe comme une banque de détail (Lloyds). Les autres grandes banques plus fortement diversifiées en termes d’activités (HSBC et Barclays) regrouperont au sein d’une structure spécifique des opérations bancaires retail comme pour les établissements précédents. Néanmoins, leur part en pourcentage du Produit Net Bancaire (PNB) total outre-Manche sera plus faible (en raison de leur plus forte implantation à l’étranger). Seule Standard Chartered ne devrait pas constituer de ring-fenced bank car la part de son segment retail au Royaume-Uni est très faible. Concernant la partie cloisonnée des établissements systémiques, le rapport Vickers préconise également un relèvement des exigences en fonds propres par rapport à celles de Bâle 3, avec un ratio de common equity rapporté aux engagements pondérés par les risques de 10% minimum (contre 7% hors surcouche pour les GSIFIs selon la CRD IV). En revanche, les activités de banque d’investissement non cloisonnées resteraient soumises aux seules normes internationales 3 . Fin décembre 2015, le FPC a émis de nouvelles recommandations en termes de fonds propres durs pour couvrir les pertes inattendues, qui vont au-delà de celles du rapport Vickers (et a fortiori celles de Bâle 3), avec i) un ratio de CET1 à 11,2% pour la partie cloisonnée et à 11,5% pour le groupe et ii) un ratio de levier supérieur au seuil minimum bâlois de 3% en période de croissance excessive du crédit et/ou pour les G-SIFIs4. L’examen des ratios réglementaires CET1 fully loaded laisse à penser que la situation des principales banques britanniques devrait être relativement favorable eu égard à ces Conjoncture 6 Juin 2016 nouvelles exigences en fonds propres. En effet, depuis le début de la crise, les banques ont été recapitalisées à hauteur de 151 milliards de livres (dont la moitié provenait de fonds publics), principalement par le biais d’émissions d’actions ordinaires éligibles au common equity au sens de Bâle 3. Depuis 2013, le ratio CET1 fully loaded des principales banques britanniques a continué de se redresser (cf. graphique 2) au gré principalement de cessions d’actifs et, dans une moindre mesure, de nouveaux renforcements en fonds propres durs. Pour se conformer aux nouvelles exigences réglementaires sur une période relativement courte, les grands établissements ont ainsi été contraints d’alléger leurs bilans (deleveraging) et de réduire leurs encours pondérés par les risques (derisking). Ratios réglementaires CET1 "Fully Loaded"/RWA des principales banques* (%) * Ratios calculés selon les définitions au terme de la pleine application du calendrier prévu par Bâle 3 2013 10,0 11,1 12,4 11,2 10,7 12,6 10,3 12,8 12,8 Total échantillon Standard Chartered Lloyds 8,6 RBS 9,3 Barclays HSBC 0 Graphique 2 2 4 6 8 10 11,2 2014 2015 15,5 10,3 11,4 10,9 11,1 11,9 12 14 16 18 Source : rapports financiers des établissements Pour évaluer la solidité du secteur bancaire britannique, la BoE a conduit des tests de résistance en 2015, pour la seconde année consécutive. Les derniers stress tests publiés en décembre 2015, à partir des bilans bancaires au 31 décembre 2014, visaient à appréhender les éventuels besoins en fonds propres des principales banques et sociétés de crédit immobilier (HSBC, RBS, Lloyds, Barclays, Standard Chartered, Nationwide et Santander UK) consécutivement à un choc externe majeur et à choc interne de moindre ampleur que celui retenu lors de l’exercice effectué un an auparavant. En appliquant les principales hypothèses du volet externe (une contraction de 2,1% du PIB de la zone euro et un très net ralentissement de la croissance chinoise à 1,7% economic-research.bnpparibas.com au T4 2015) et celles du volet interne (une hausse du chômage de 3,5 points et une baisse de 20% des prix de l’immobilier résidentiel), cinq des sept établissements soumis aux stress tests préserveraient des ratios CET1 et des leviers supérieurs ou égaux aux seuils minimaux requis (respectivement 4,5% et de 3%) par le régulateur à l’horizon de l’exercice de simulation. Si RBS et Standard Chartered ont échoué à ces tests de résistance, ces établissements ont toutefois déployé des mesures préventives pour consolider leur bilan dans les derniers mois précédents la finalisation des stress tests. Au regard du scénario adverse retenu, la BoE est parvenue à la conclusion que le secteur bancaire britannique serait suffisamment robuste pour faire face à la conjonction de chocs internes et externes de grande ampleur, sans levée de fonds propres additionnelle et, en cas de vents contraires, pour continuer à financer l’économie réelle. Vers une recomposition du paysage bancaire britannique La crise financière a contribué à redessiner les contours du paysage bancaire britannique en favorisant peu après sa survenance un mouvement de concentration. Désireux de dynamiser la concurrence et de préserver les intérêts des consommateurs, les pouvoirs publics ont favorisé l’émergence de nouveaux acteurs sur le marché de la banque de détail. Pour optimiser les produits de la vente des entités nationalisées durant la crise (et maximiser ainsi les gains pour le contribuable), l’État a différé la cession de ses participations publiques. Le mouvement de concentration post-crise s’infléchit depuis 2014 L’une des recommandations du rapport Vickers de l’Independent Commission on Banking (ICB) dévoilées le 12 septembre 2011 visait à introduire une plus forte concurrence au sein du secteur bancaire i) en donnant la possibilité aux clients de changer rapidement et à moindre coût de banque et ii) en allégeant les conditions d’entrée de nouveaux acteurs potentiels (i.e. formalités et dispositifs administratifs allégés, délais de traitements des dossiers et de délivrance des agréments, etc.). Poursuivant cet objectif 5 , l’autorité de la concurrence (Competition Market Authority ou CMA) a détaillé fin octobre 2015 un large éventail de mesures complémentaires (mise en place d’outils pour comparer la facturation et les caractéristiques des produits bancaires, Conjoncture 7 Juin 2016 déploiement d’alertes en cas de dépassement de découvert, etc.). Toutefois, la CMA a décidé de ne pas contraindre les banques à se scinder et a exclu de mettre fin à la gratuité des comptes6. Début décembre 2015, la FCA a publié son premier baromètre semestriel destiné à accroître la transparence sur le marché des comptes d’épargne (meilleure comparabilité des tarifications et des pratiques de marché, etc.). En outre, la FCA réfléchit à imposer un délai de transfert limité à sept jours ouvrables pour la plupart des comptes ISA 7 . Enfin, la FCA demandera aux institutions financières d’indiquer dans leurs points de vente les informations clefs de leurs différents produits d’épargne et de mentionner clairement tous les éléments relatifs à leur facturation. La décennie ayant précédé la crise s’est caractérisée par un accroissement substantiel de la concentration du marché bancaire (cf. graphique 3). Cette tendance s’est toutefois inversée en 2014, pour la première fois depuis 2008, et cette inflexion devrait se poursuivre dans les années à venir. Les turbulences financières avaient entraîné, tant parmi les groupes cotés qu’au sein des banques mutualistes, la disparition ou la perte d’indépendance de nombreux établissements (par rachats ou fusions), et une concentration au profit de petits groupes. Barclays a par exemple acquis pour 1,75 milliard de dollars (environ 879 millions de livres) une partie des activités de Lehman Brothers (actifs commerciaux) peu après sa faillite en septembre 2008. Lloyds avait en outre racheté, au second semestre 2008, pour 12,2 milliards de livres HBOS, fortement dépendante de la liquidité de marché et significativement exposée au marché immobilier. Part des cinq plus grands établissements de crédit dans l'UE En % du total des actifs bancaires nationaux 120 100 2000 2005 2010 2014 80 60 40 20 0 Graphique 3 Source : BCE - EU Banking structure economic-research.bnpparibas.com Conformément à ses engagements européens, le gouvernement britannique s’était engagé à réduire la taille des établissements nationalisés et/ou ayant bénéficié d’un important soutien public (RBS et Lloyds). En effet, les plans de recapitalisation des banques avaient été avalisés par la Commission européenne en contrepartie de cessions de filiales ou d’agences d’établissements bancaires secourus pour « contenir les distorsions de concurrence ». L’objectif clairement affiché par la Commission était de faciliter « l’arrivée sur le marché d'un nouveau concurrent ou le renforcement d'un concurrent existant de plus petite taille et, par conséquent, stimuler […] la concurrence »8. Lloyds Banking Group a ainsi dû se séparer de 632 agences (selon l’échéance fixée initialement au 30 novembre 2013 et reportée au 31 décembre 2015). Certaines agences des filiales de TSB en Angleterre, au Pays de Galles, en Ecosse, à Cheltenham et Gloucester ont ainsi été regroupées au sein d’une entité TSB9 en mars 2013. Cette nouvelle structure totalisait dès sa création 6% des comptes courants britanniques, soit le minimum recommandé par le rapport Vickers pour permettre à une nouvelle entité scindée d’un groupe existant de devenir un véritable concurrent sur le marché de la banque de détail domestique. La TSB a commencé à opérer sur le marché bancaire en tant qu’acteur distinct de Lloyds (tout en demeurant sous son contrôle à 100%) en septembre 2013. Après de multiples rebondissements 10 , Lloyds est finalement parvenue à céder TSB par le biais i) d’introductions en bourse en juin 2014 et en septembre 2014 (pour respectivement 11,5% et 38,5% du capital) et ii) de la vente du solde de ses parts (50% du capital) à la banque espagnole Sabadell en mars 2015. RBS est également tenue de réduire sa taille au plus tard d’ici à fin 2017. En septembre 2013, cette banque avait déjà cédé jusqu’à 49% du capital de sa filiale Williams & Glyn, opérant sur le segment du retail, à un consortium de private equity (Corsair Capital, Centerbridge Partners, RIT Partners et Church Commissioners for England). Midécembre 2015, RBS privilégiait de se délester de cette filiale comptant 314 agences (soit 5% du marché, deux millions de particuliers et 250 000 PME) en vendant sa part restante du capital à des investisseurs privés plutôt qu’en procédant, comme elle le prévoyait à l’origine, à une introduction en bourse en 2016. Conjoncture Juin 2016 8 Si le mouvement de concentration s’est intensifié après la crise, il a aussi suscité une vigilance accrue des pouvoirs publics qui ont encouragé l’implantation dans la banque de détail de nouveaux acteurs bancaires étrangers et non bancaires. De nouveaux acteurs, qui affichent pour les plus petits, une rentabilité nettement supérieure à celle des big five De nouveaux établissements (challenger banks) défient désormais les acteurs historiques principalement sur le marché de la banque de détail et, dans une moindre mesure, sur celui de la gestion de fortune. Ils se différencient des big five par des sources de revenus moins diversifiées. Début novembre 2015, la petite challenger bank, Métro bank, qui hésitait encore à ouvrir son capital via une introduction en bourse, a dû reporter à 2016 sa levée de fonds sur le marché en raison de pertes financières. Ces fragilités rendent les nouveaux acteurs plus vulnérables à une détérioration des conditions de marché (notamment un retournement conjoncturel ou une correction immobilière) et à une intensification de la pression concurrentielle sur les prix. Les plus petits d’entre eux affichent néanmoins une forte rentabilité financière (RoE de 18,2% en 2014) qui contraste nettement avec le taux de retour sur fonds propres des plus grandes challenger banks (RoE de 2,1%) ou celui des big five (RoE de 2,9%). En cause : des coûts fixes plus bas que ceux des établissements « traditionnels » (mutualisation du réseau dédié au commerce avec celui de distribution de produits financiers, banque en ligne, absence de réseau d’agences bancaires et frais généraux plus bas, etc.). En d’autres termes, leur avantage compétitif réside dans des coûts plus faibles liés à l’absence d’un réseau d’agences physiques et/ou leur capacité à offrir une palette élargie de services (ouverture en continu sept jours sur sept, proactivité des conseillers bancaires, tarifs avantageux, etc.). La présence grandissante de ces nouveaux acteurs sur le marché de la banque de détail ne devrait pas remettre en cause la prédominance des intervenants historiques : HSBC, Barclays, RBS et Lloyds collectent encore 77% des comptes courants personnels et 85% des comptes d’entreprises. Toutefois, elle pourrait peser sur la reconstitution de leurs marges d’intermédiation. economic-research.bnpparibas.com - Les grandes challenger banks Le mouvement de consolidation du secteur bancaire par des opérations de fusions/acquisitions a donné naissance à des acteurs domestiques de grande taille. Fruit de nombreuses fusions – la plus importante étant celle avec Anglia Building Society en 1987 et la Portman Building Society en 2007 – Nationwide Buiding Society s’est imposée comme un acteur mutualiste de premier plan, par le volume de ses prêts hypothécaires et son rôle de prestataire de services d'épargne. D’autres opérations de fusions/acquisitions ont eu lieu. Premièrement, le groupe Virgin a significativement développé ses activités de banque de détail via sa filiale Virgin Money, notamment grâce à l’acquisition de la banque régionale Church House en 2009. Ensuite, en novembre 2011 Virgin Group a racheté à l’État, pour environ un milliard de livres, les 75 agences de Northern Rock, banque emblématique de la crise du subprime nationalisée en février 2008. La holding financière britannique NBNK, cotée au London Stock Exchange, a également fait son apparition en 2010. Ce groupe financier a pour ambition de bâtir un vaste réseau principalement de banques de détail par croissance externe via des acquisitions d’actifs bancaires sur le marché retail britannique uniquement (et des rachats ponctuels d’activités en gestion de fortune). Enfin, les filiales de banques nationalisées (RBS et Lloyds) et revendues (ou sur le point de l’être) sont devenues des acteurs à part entière du marché bancaire. La banque TSB, ex-filiale de Lloyds, s’est retrouvée en concurrence en 2014 avec les big five. Il devrait en être de même de l’actuelle filiale Williams & Glyn de RBS. Des banques étrangères sont venues aussi concurrencer les big five britanniques. L’espagnole Santander a pu consolider sa position sur le marché bancaire outre-Manche par croissance externe (rachats d’Abbey en août 2004, d’Alliance et Leicester en août 2008, du réseau et de la branche « épargne » de Bradford & Bingley en septembre 2008, et acquisition de 318 succursales de RBS en août 2010). De même, la banque espagnole Sabadell a pu s’implanter au Royaume-Uni en devenant le Conjoncture Juin 2016 9 propriétaire exclusif de TSB, ex-filiale de Lloyds, en juillet 2015. S’inspirant de l’exemple de Santander, ses dirigeants se donnent actuellement comme priorité de transformer cette caisse d’épargne régionale en banque internationale intégrée – en s’appuyant sur ses atouts technologiques – pour diversifier in fine ses sources de revenus et accroître sa rentabilité. Enfin, la deuxième banque espagnole (en termes d’actifs ou de capitalisation), BBVA, a acquis 29,5% du capital de la banque en ligne Atom Bank en novembre 2015, mettant ainsi un pied au Royaume-Uni et se renforçant, par ailleurs, dans les activités centrées sur le numérique. - Les petites challenger banks Contrairement aux grandes, les petites challenger banks ne sont pas le fruit d’opérations de fusions/acquisitions, et en ce sens elles constituent de « véritables » nouveaux acteurs. La première stratégie consiste pour des entités non bancaires à élargir leur périmètre d’activité en adossant une offre de services financiers à un réseau commercial existant pour offrir à leurs clients un spectre important de services financiers proches de ceux qu’offrent les banques de détail traditionnelles (gestion de comptes courants, crédits à la consommation, moyens de paiement, assurance, etc.). Plusieurs acteurs de la distribution – dont le cœur de métier initial n’était pas lié à une activité bancaire – se sont implantés sur le marché de la banque de détail britannique (Metro Bank fin juillet 201011, Tesco, leader de l’agroalimentaire, au travers de sa filiale Tesco Bank ou encore Mark & Spencer via M&S bank en 2012). La seconde stratégie réside dans l’obtention ou le rachat d’un agrément bancaire pour bâtir une banque de détail reposant sur un réseau d’agences resserré et/ou la mise à disposition de services financiers en ligne. De petites banques de détail ont ainsi été créées ex nihilo (Aldermore en 2009 adossée au fonds de private equity AnaCap Financial Partners LLP, Shawbrook en 2011 fondée suite au rachat de la licence bancaire de la Whiteaway Laidlaw bank par le fonds Pollen Street Capital de RBS Equity Finance, OneSavings Bank en 2011, ou Atom Bank en juin 2015, la première banque entièrement digitale au Royaume-Uni). economic-research.bnpparibas.com Les cessions de RBS et de Lloyds interviennent dans un contexte de fortes décotes boursières depuis la crise Les cours boursiers des banques britanniques ont certes sensiblement diminué en 2008 et début 2009 (cf. graphique 4) mais la baisse touchait en priorité, peu après la crise, RBS et Lloyds. Consécutivement à la nette amélioration de sa solvabilité, la valeur boursière de Lloyds a toutefois rebondi depuis 2012, contrairement à RBS toujours en proie aux doutes des investisseurs quant à sa profitabilité. La remontée du cours boursier de Lloyds devrait faciliter d’autant la poursuite du désengagement de l’État du capital de cette banque et la finalisation des cessions des participations publiques. Evolution des cours boursiers HSBC Standard Chartered Barclays Lloyds RBS FTSE FTSE - Valeurs bancaires Base 100 : 09/2008 280 240 200 160 120 80 40 0 05 06 07 Graphique 4 08 09 10 11 12 13 14 15 16 Source : Datastream Pour secourir le système bancaire britannique fortement ébranlé par la crise financière, le gouvernement avait procédé à des injections de fonds et des prises de participations dans les établissements les plus fragilisés (RBS, Lloyds et Northern Rock), à travers l’entité publique UKFI12, conduisant à une nationalisation et/ou un pourcentage de détention élevé du capital d’un grand nombre de banques. En 2009, l’Etat a ainsi porté sa participation au capital de RBS et de Lloyds à respectivement 84 % et 43%. Peu de temps après cette vague de nationalisations, le gouvernement s’était engagé à céder progressivement ses participations à des investisseurs institutionnels. Fin décembre 2015, la participation publique dans le capital de RBS était toujours de 73%. Pour Lloyds, elle a été ramenée à un peu moins de 10% au cours des deux dernières années. Conjoncture Juin 2016 10 En juin 2015, l’État a annoncé qu'il poursuivrait ce mouvement de désengagement du capital de Lloyds en associant, depuis octobre 2015, le grand public britannique à sa privatisation pour un montant minimum de deux milliards de livres. Les dirigeants de RBS avaient exprimé leur souhait d’amorcer, en concertation avec le gouvernement, un processus de privatisation dès 2011. Le gouvernement, qui se disait confiant en 2012 quant à l’éventuelle « reprivatisation » de RBS et de Lloyds, a été contraint de patienter, d’autant plus qu’il était attaché à créer, selon le porte-parole du Trésor, « de la valeur pour le contribuable ». Toutefois, le gouvernement a, semble-til, été contraint d’étaler ses cessions de participations de RBS car les valorisations boursières, de loin inférieures aux prix de souscription de 50 pences par action, auraient conduit l’État à enregistrer des pertes significatives en cas de cessions totales ou partielles. Le cours boursier actuel de RBS (environ 21 pences par action à mi-mai 2016) laisse toujours entrevoir une moins-value en cas de cession. Le Chancelier de l’Échiquier, George Osborne, a néanmoins annoncé la cession prochaine des titres de RBS. S’agissant de Lloyds, le gouvernement a dégagé un léger gain en revendant ses actions à 80 pences, au-dessus de son prix de souscription de 74 pences par action. Toutefois, la valorisation boursière actuelle (environ 67 pences par action à mi-mai 2016) rend encore difficile la concrétisation de plus-values pour les cessions à venir. Ce retour sur le marché contraste avec la cession à Virgin Bank des participations publiques dans Northern Rock en novembre 2012. Celle-ci s’était soldée par une moinsvalue pour l’État évaluée à entre 400 et 650 millions de livres. L’État, qui détenait encore en 2015, via le UK Asset Resolution, un montant important d’actifs toxiques issus du sauvetage de Northern Rock, a soldé en novembre dernier l’héritage de cette banque en difficulté. Il a ainsi cédé pour près de 13 milliards de livres de prêts immobiliers au fonds américain Cerberus et enregistré, par la même occasion, une légère plus-value de 280 millions de livres par rapport à la valeur comptable. Cet investisseur institutionnel a déjà revendu une partie de ce portefeuille immobilier nouvellement acquis à la banque TSB pour 3,3 milliards de livres (soit l’équivalent de 34 000 prêts hypothécaires). economic-research.bnpparibas.com Conjoncture 11 Juin 2016 Compte de résultat agrégé des cinq premiers établissements britanniques* Montant en milliards de livres et variations en % 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 Produit net bancaire 99,3 107,5 119,3 121,5 125,8 138,9 139,8 116,6 116,6 109,3 108,2 -1,0 dont produits nets d'intérêts 51,4 53,2 58,0 77,7 64,3 70,2 70,6 62,9 58,6 61,6 61,1 -0,8 dont commissions nettes 23,1 25,5 30,1 32,3 30,1 31,4 31,3 29,8 28,5 26,9 25,0 -7,0 dont autres produits nets d'exploitation 24,9 28,8 31,2 11,5 31,3 37,3 38,0 23,9 29,5 20,8 22,1 5,9 52,9 56,2 62,5 76,1 78,1 81,3 85,3 82,7 79,9 76,4 77,3 1,1 dont frais de personnel 28,2 31,2 34,4 39,5 41,1 43,4 43,9 40,9 40,8 38,9 38,6 -0,8 dont autres charges d'exploitation Frais généraux 2015/2014 24,6 25,0 28,1 36,5 37,0 37,9 41,4 41,8 39,1 37,5 38,7 3,2 Résultat brut d'exploitation 46,4 51,3 56,7 45,4 47,7 57,6 54,5 33,9 36,7 32,9 30,9 -6,1 Coût du risque 10,9 13,1 17,7 46,1 56,3 35,5 29,1 20,1 18,9 5,6 7,8 38,8 Résultat courant avant impôt 35,5 38,2 39,1 -0,7 -8,6 22,2 25,4 13,8 17,8 27,3 23,1 -15,3 Autres produits et résultats exceptionnels 0,1 1,0 1,5 -31,4 24,9 -0,5 -3,3 -1,9 -5,2 -9,4 -8,8 n.s. Impôt sur les bénéfices 10,0 10,7 8,5 -2,4 0,0 7,2 6,1 6,2 7,2 7,1 5,2 -27,4 Intérêts minoritaires 1,0 1,5 1,7 -9,2 2,0 1,1 1,8 1,9 1,9 1,6 2,2 37,6 Résultat net 24,6 27,0 30,4 -20,5 14,3 13,5 14,1 3,7 3,4 9,2 6,9 -25,1 (*) Notre échantillon comprend les cinq plus grands établissements de crédit en termes de capital tier one, soit: Barclays, HSBC, Lloyds, RBS et Standard Chartered. Cet échantillon couvrait à fin décembre 2015, 70% du total de bilan de l'ensemble des établissements de crédit britanniques. Des performances financières qui pâtissent du contexte économique et réglementaire Le contexte économique et réglementaire, conjugué à la montée en puissance de nouveaux acteurs bancaires et non bancaires, tend à mettre sous pression la solvabilité des grandes banques outre-Manche. Si à court et moyen terme, celles-ci pourraient pâtir d’un risque de crédit modéré du fait d’une conjoncture favorable à l’horizon de 2017, le risque de liquidité semble pour sa part désormais relativement circonscrit. La rentabilité peine à recouvrer ses niveaux d’avant crise La santé financière du secteur bancaire britannique s’est redressée : le bénéfice global de notre échantillon a été positif en 2015 (+6,9 milliards de livres) et, malgré son net recul sur un an (-25,1%), cette situation contraste avec les lourdes pertes affichées en 2008 (-20,5 milliards). Toutefois, la rentabilité des grandes banques qui était l’une des plus élevée des pays développés avant crise s’est fortement dégradée et peine à retrouver ses couleurs dès lors. Faible tassement du produit net bancaire sur un an La baisse du produit net bancaire (PNB) s’est poursuivie en 2015 (-1,0% entre 2014 et 2015) mais à un rythme bien plus modéré qu’en 2014 (-6,3% entre 2013 et 2014). La contraction annuelle du PNB à fin 2015, et malgré le rebond des autres revenus d’exploitation13, est imputable principalement à la diminution des commissions et, dans une moindre mesure, au tassement des revenus d’intérêts. Ce recul du PNB est à mettre en regard notamment du trou d’air économique de certains pays émergents (cf. supra). Il en a résulté un recentrage des banques sur des activités core de leur marché domestique et l’abandon d’opérations à l’étranger, certes plus rémunératrices mais également plus risquées. Dès 2009, après l’effondrement des autres revenus en 2008, les banques britanniques ont bénéficié d’une normalisation de leur structure de produit net bancaire (cf. graphique 5), constitué pour plus de la moitié des revenus nets d’intérêts en 2015. La déformation de la structure du PNB n’a été due qu’à une contraction des revenus liés aux activités d’assurance et de couverture plus fortement corrélés au marché domestique baissier. Les grands groupes bancaires outre-Manche avaient réussi, selon une enquête de l’Office of Fair Trading menée en 2012, à préserver leurs commissions en procédant à une hausse de leur tarification rendue possible par l’existence d’un marché oligopolistique. Toutefois, de nouveaux acteurs bancaires ou non bancaires investissent le marché de la banque de détail principalement depuis 2010, et viennent aujourd’hui défier à plus ou moins grande échelle les big five (cf. economic-research.bnpparibas.com Conjoncture Juin 2016 12 supra). Cette recomposition du paysage bancaire devrait s’accompagner d’une intensification de la concurrence et, dès lors, amener les grands réseaux historiques à baisser leurs prix pour préserver leurs parts de marché. inférieures à celles de leurs homologues européennes (cf. graphique 6)14. La faiblesse relative des marges est à mettre en regard, principalement, de l’environnement de taux et du maintien au plancher du taux de base à 0,5% depuis avril 2009 (cf. graphique 7). Structure du produit net bancaire des cinq premières banques britanniques Marges nettes d'intérêts à fin 2015 % 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 Autres produits nets d'exploitation Commissions nettes Produits nets d'intérêts 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 Graphique 5 Sources : Bankscope et communiqués financiers Produits nets d'intérêts rapportés aux acfifs productifs en % 3 2 1 0 GR ES US IE Graphique 6 IT ZE UE NL BE PT GB FR CH DE Sources : Bankscope et communiqués financiers Malgré leur légère progression en 2015, les marges devraient rester sous pression à moyen terme Taux d'intérêt par maturité Alors qu’au début des années 2000, les établissements de crédit outre-Manche affichaient des marges nettes (produits nets d’intérêt par rapport au total des actifs productifs) parmi les plus confortables, la période post-crise a porté un coup d’arrêt à leur capacité à dégager des revenus nets d’intérêts. Les marges nettes des banques britanniques ont légèrement progressé en 2015 sans totalement recouvrer leur niveau d’avant-crise (1,4% après 1,3% en 2014 contre 1,5% pré-crise). Cette légère amélioration a tenu tant à la progression des marges apparentes sur les emplois (2,1% en 2015 après 1,9% en 2014) qu’à la baisse des marges apparentes sur les ressources (0,6% en 2015 après 0,7% en 2014). Malgré le nouveau recul des intérêts reçus (-5,2%), la diminution significative des actifs productifs (-10,8%) a permis la consolidation des marges apparentes sur les emplois. La diminution des intérêts versés (-13,8%), plus rapide que celle des actifs productifs, s’est accompagnée quant à elle du tassement des marges apparentes sur les ressources. Comme cela a été souligné, les banques britanniques présentent désormais en moyenne des marges 10 8 % Taux de base LIBOR 3 mois Emprunt d'Etat à 10 ans 6 4 2 0 00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16 Graphique 7 Source : Datastream Dans la mesure où les prêts hypothécaires sont généralement à taux révisables outre-Manche, les diminutions de taux de marché (en liaison avec les baisses successives des taux directeurs) se sont traduites par une réduction plus rapide des taux débiteurs et des intérêts perçus par les banques britanniques que pour celles de pays où les taux fixes sont prédominants (France et Pays-Bas). En outre, les produits d’intérêts ont également pâti de la baisse des volumes dans le sillage du processus de economic-research.bnpparibas.com désendettement du secteur privé à l’œuvre. Au premier trimestre 2010, pour la première fois depuis le début de la décennie, le taux d’endettement des agents privés non financiers en pourcentage du PIB s’est replié pour atteindre au T4 2015 144,2% (dont 57,2% pour les sociétés non financières et 87% pour les ménages), contre 175,1% du PIB au point haut au T3 2009. En dépit de la prolongation du statu quo monétaire que nous anticipons, les marges nettes resteront probablement à nouveau sous pression à moyen terme du fait i) de la faiblesse persistante des taux longs, ii) d’un renchérissement des ressources financières découlant des nouvelles exigences réglementaires de Vickers en janvier 2019 et du nouveau cadre prudentiel lié à l’entrée en vigueur en janvier 2014 de la transcription en droit européen de Bâle 3 (CRDIV/CRR)15, et notamment la prise en compte d’une forte contrainte sur leurs marges de manœuvre quant à la transformation des maturités (financement des emplois longs par des ressources longues),iii) d’un moindre rendement moyen des actifs lorsque les efforts déployés par les grands établissements britanniques pour respecter, dès à présent, les exigences minimales en matière de ratio de liquidité à court terme LCR (cible de 100% au 1er janvier 2018) ont consisté en un gonflement des HQLA 16 , iv) de la poursuite de la concurrence sur les dépôts favorisée par de nouveaux entrants sur le marché de la banque de détail (cf. supra), v) d’un fort ralentissement de la demande de crédit depuis 2009 (cf. graphique 8) consécutivement au désendettement (deleveraging) du secteur privé non financier. Crédits bancaires aux agents privés non financiers résidents %, taux de croissance calculés selon la méthodologie des statistiques monétaires à partir d'encours et de flux de crédits corrigés des titrisations et autres ajustements (changements de périmètres, reclassements, etc.) Conjoncture Du fait principalement d’une hausse des frais généraux, le coefficient d’exploitation des établissements de notre échantillon a augmenté en 2008 et il est resté plus élevé par la suite. En 2012, il a progressé à nouveau fortement consécutivement au tassement du PNB, en s’établissant à un niveau bien supérieur à celui d’avant-crise (71,5% en 2015 contre 52,6% sur la période pré-crise). L’accroissement des charges post-crise est à mettre en perspective avec le mouvement de fusions et d’acquisitions bancaires survenu après la crise financière, les synergies n’étant toujours pas perceptible17. Les coefficients d’exploitation des cinq principaux établissements britanniques étaient à fin 2015 parmi les plus élevés (cf. graphique 9). Ils étaient proches des ratios constatés en Grèce (69%) et de celui de la moyenne de l’UE (67,6%); supérieurs à ceux des banques françaises (66,1%), italiennes (64,4%), américaines (64,1%) et surtout portugaises (60,6%), irlandaises (59,6%), néerlandaises (58,6%), belges (57,1%) ou espagnoles (54,7%), mais toutefois inférieurs aux coefficients des établissements allemands (87,6%) ou suisses (83,8%). Cette comparaison appelle néanmoins une certaine prudence quant à son interprétation car les coefficients d’exploitation sont en effet extrêmement dépendants de la structure des activités bancaires (soit de la ventilation entre le retail, la banque de financement et d’investissement, etc.). Coefficients d'exploitation à fin 2015 des cinq premières banques britanniques Frais généraux rapportés au PNB en % -10 00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16 Graphique 8 Source : BoE Graphique 9 SNF Ménages Secteur privé non financier 15 10 5 0 -5 13 Les conditions d’exploitation continuent de se détériorer légèrement en 2015 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 20 Juin 2016 DE CH GB GR UE FR ZE IT US PT IE NL BE ES Sources : Bankscope et communiqués financiers economic-research.bnpparibas.com Dans un contexte de légère progression des frais généraux (+1,1%), cette baisse ténue du produit net bancaire (-1,0%) s’est soldée en 2015 par un repli modéré du résultat brut d’exploitation (30,9 milliards de livres après 32,9 milliards en 2014, soit une diminution sur un an de -6,1%). En augmentation sensible sur un an (+38,8%), le coût du risque s’est toutefois établi, en proportion du produit net bancaire, en 2015, à un niveau bien inférieur (7,2% après 5,1% en 2014) à celui qui prévalait avant la crise (12,7%). S’agissant des perspectives futures, les banques pourraient pâtir d’un léger accroissement du coût du risque en 2016 et 2017, et d’une modération de la croissance (cf. graphique 10). Cette dégradation de la qualité des actifs pourrait être amplifiée par un éventuel ajustement plus ou moins accusé des prix immobiliers (cf. infra). Les portefeuilles de crédits des banques au secteur privé non financier sont en effet très largement constitués de prêts liés au segment de l’immobilier résidentiel ou commercial (cf. graphique 11). Fin décembre 2015, 88% des prêts aux ménages était concentré sur le segment de l’immobilier résidentiel – soit plus des deux tiers du portefeuille de crédits aux agents non financiers privés – alors que plus de la moitié des crédits aux entreprises correspondait à des prêts immobiliers commerciaux. Les provisions exceptionnelles pour litiges encore conséquentes (-8,8 milliards de livres) ont amplifié la baisse du résultat brut d’exploitation en 2015 et celle du résultat courant avant impôt (+23,1 milliards de livres après +27,3 milliards en 2014 soit une contraction de -15,3%). En particulier, ces provisions ont été enregistrées pour couvrir i) l’indemnisation de clients suite à des ventes d’assurances PPI (Payment Protection Insurances) et de produits financiers adossés à du subprime et/ou ii) les sanctions consécutives aux soupçons de fraude sur le LIBOR. Au final, le résultat net s’est également inscrit en fort repli en 2015 (+6,9 milliards de livres après +9,2 milliards en 2014). La rentabilité financière post-crise des banques de notre échantillon (cf. graphique 12) reste, en moyenne, bien en deçà de celle d’avant-crise (s’établissant respectivement, sur les périodes 1999-2007 et 2008-2015, à 16,8% et à 1,5%). La diminution de la rentabilité est également à rapprocher du renforcement significatif des fonds propres comptables (+41,5% entre 2008 et 2015 pour notre échantillon de banques) qui résulte de la mise en œuvre de Bâle 3 (cf. supra). Conjoncture 14 Juin 2016 Ratio du coût du risque et taux de croissance réelle du PIB % Coût du risque/PNB PIB volume, %, g.a. 50 Echelle 44,8 45 inversée 38,0 40 35 30 25,5 25 20,8 17,3 20 14,8 16,2 15 11,0 12,2 10,3 8,0 7,2 10 5,1 5 0 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16 p 17p -6 -4 -2 0 2 4 6 prévisions BNP Paribas Graphique 10 Sources : Bankscope, Datastream Ventilation du portefeuille de crédits des IFM aux ANF privés résidents Parts en proportion du total à fin décembre 2015 Consommation et autres objets (ménages) 9,4 Prêts autres objets (SNF) 9,9 Prêts à l'immobilier commercial (SNF), 11,5 secteur de la construction et des biens immobiliers Graphique 11 Prêts hypothécaires 69,2 (ménages) Sources : BoE et estimations BNP Paribas RoAE agrégé des cinq principaux établissements bancaires britanniques* 25 20 15 10 % * Barclays, HSBC, Lloyds, RBS et Standard Chartered 20,2 18,8 16,9 16,8 17,6 17,3 15,3 13,9 14,4 Moyenne 1999 - 2007 : 16,8 Moyenne 2008 - 2015 : 1,5 5,9 5 4,7 4,6 1,2 1,1 2,9 2,1 0 -5 -10 -10,1 -15 99 00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 Graphique 12 Sources : Bankscope, Bloomberg & communiqués financiers economic-research.bnpparibas.com Le secteur bancaire britannique se caractérisait traditionnellement par un important dualisme en matière de performances financières entre, d’une part, les établissements ancrés sur leur marché domestique et, d’autre part, ceux diversifiés géographiquement. A l’avenir, cette dichotomie devrait progressivement s’estomper du fait du recentrage des groupes bancaires internationaux sur leurs marchés domestiques (cf. supra). D’une part, les banques internationales seront nettement plus dépendantes des perspectives internes de croissance. D’autre part, elles pâtiront, à l’instar des autres établissements, de l’intensification de la concurrence sur le marché de la banque de détail britannique. Enfin, elles seront davantage pénalisées par la réglementation Vickers car, si les filiales situées hors de l’espace européen ne sont pas concernées par ces nouvelles dispositions, le repositionnement géographique conduit, de fait, au rétrécissement de l’éventail des activités bancaires échappant à ce dispositif d’ « exemption réglementaire ». Standard Chartered a affiché une perte en 2015 pour la première fois de son histoire (-1,5 milliard de livres) tandis que Barclays rapportait un résultat net tout juste à l’équilibre. Seule HSBC a su tirer son épingle du jeu en publiant un résultat net confortable en progression sur un an (+9,1 milliards de livres en 2015 après +8,8 milliards en 2014). Les autres grandes banques témoignent encore, quant à elles, d’importantes disparités : tandis que RBS a continué d’accuser un résultat négatif depuis la crise tout en réduisant ses pertes en 2015 (-1,6 milliard de livres après -2,8 milliards en 2014), Lloyds a réussi à dégager, pour la seconde année consécutive, un solde net courant positif (+0,9 milliard en 2015 après +1,4 milliard en 2014). Le risque de crédit subsiste mais le risque de liquidité tend à se dissiper L’examen des portefeuilles de prêts des établissements britanniques met en lumière la persistance, à court terme, d’un risque de crédit (concentration des prêts sur le segment hypothécaire, nouvelles baisses du marché de l’immobilier résidentiel et endettement encore élevé des ménages). En revanche, le risque de liquidité a sensiblement diminué depuis fin 2010 : le système bancaire britannique se distingue, en effet, par un ratio loans-to-deposits (LTD) désormais parmi les plus bas des pays de l’Union européenne. Conjoncture 15 Juin 2016 Une éventuelle correction immobilière pourrait affecter la qualité du crédit à moyen terme Dans le sillage de la crise financière, la détérioration soudaine de l’environnement macroéconomique et celle de la solvabilité des ménages avaient induit d’importantes corrections de l’immobilier résidentiel, segment sur lequel les banques britanniques sont très présentes (cf. supra). Il en avait résulté une très nette détérioration de la qualité des actifs bancaires, comme en témoigne l’augmentation substantielle de la part des créances douteuses dans le total des encours bruts de crédits. S’établissant pour le Royaume-Uni à moins de 0,9% du total des encours de prêts avant la crise financière, les créances douteuses s’étaient ainsi accrues en 2008 pour atteindre près de 4,0% du total à fin 2014. Depuis 2010, la part des créances douteuses dans le total des prêts des banques britanniques a sensiblement reflué (1,8% au T4 2014 selon les dernières données du FMI disponibles). Comparé à celui de leurs homologues européens et/ou américains, le poids des prêts non performants des établissements outre-Manche est désormais le plus faible des pays développés (cf. graphique 13). Taux de prêts non performants* en % du total des crédits 2008 32 28 24 20 16 12 2010 2012 2015 ou donnée disponible la plus récente * Dernière donnée disponible pour : - l'Espagne : T2 2015 - les Etats-Unis, la Grèce l'Irlande et le Portugal : T1 2015 - l'Allemagne, la France, l'Italie et le Royaume-Uni : T4 2014 8 4 0 GR IE Graphique 13 IT PT ES FR DE US GB Source : FMI - Financial Soundness Indicators Au Royaume-Uni, les prix réels des logements (i.e. prix nominaux corrigés de l’inflation) avaient presque triplé entre 1996 et 2007 (cf. graphique 14). Bien qu’ils aient accusé un ajustement peu après la crise, puis un dégonflement plus léger à partir du premier trimestre 2010 (soit -32% entre le T3 2007 et le T4 2012), la economic-research.bnpparibas.com dynamique des prix est à nouveau orientée à la hausse depuis début 2013. Selon les dernières données nationales disponibles, les prix se situaient fin décembre 2015 à environ 16% en deçà de leur précédent point haut (mais contre 36% en Irlande). La revalorisation récente de l’immobilier résidentiel reflète en partie la combinaison de : i) l’amélioration des conditions économiques et ii) la persistance d’un environnement de taux bas. Les ratios prix sur loyers (cf. graphique 15) ou prix sur revenus (cf. graphique 16), qui dans un contexte de taux exceptionnellement bas restent bien au-dessus de leur moyenne de long terme, suggèrent toujours une survalorisation de l’immobilier résidentiel – fruit d’excès passés en matière de distribution de prêts à l’habitat – et le risque de nouvelles corrections. De plus, le niveau encore élevé d’endettement des ménages outreManche, comparativement à leurs homologues européens (cf. graphique 17), pourrait rendre le service de la dette vulnérable à un choc sur les taux d’intérêt, l’emploi et la croissance. A terme, la poursuite de ce mouvement haussier accroîtrait la sensibilité des prix immobiliers à un retournement du cycle monétaire. Néanmoins, nos hypothèses macroéconomiques ne laissent pas entrevoir de détérioration des fondamentaux économiques à horizon de deux ans : selon notre scénario central, la croissance du PIB, bien que ralentissant légèrement en 2016 (à 1,7%), accélérerait à nouveau en 2017 (à +2,1%), tandis que le marché du travail continuerait de s’améliorer en 2016 et plus modérément en 2017 (avec un taux de chômage à respectivement 5,1% et 4,9% contre 5,4% en 2015). Le début de normalisation de la politique monétaire n’interviendrait pas avant 2017. En conséquence, les ajustements des prix immobiliers devraient rester graduels et modérés tandis que leur incidence sur la dégradation de la qualité du crédit serait relativement contenue à moyen terme. Au Royaume-Uni et contrairement à la France 18 , l’attribution des prêts à l’habitat dépend plus étroitement de la valeur sous-jacente du collatéral apporté en garantie du bien financé, alors que le cautionnement reste peu usité. Ainsi, en cas de correction immobilière, les banques pâtissent d’une dégradation de la qualité de leurs actifs bancaires à double titre, au travers : i) d’une hausse des taux de défaut (détérioration du contexte économique) et ii) d’une revente à perte des biens mis en garantie. En Conjoncture Juin 2016 16 effet, en revendant les biens immobiliers mis en garantie en cas de non remboursement de l’emprunteur, les banques exacerberaient, de fait, la pression à la baisse des prix de l’immobilier résidentiel, subissant en retour une nouvelle dégradation de la qualité de leurs créances. Enfin, la prééminence de taux variables renforce l’impact de variations sous-jacentes des taux sur la qualité des portefeuilles de prêts à l’habitat. Consciente des limites de l’instrument monétaire conventionnel pour lutter contre la formation de bulles immobilières et du risque qu’elles font peser sur la stabilité financière 19 , la BoE explore actuellement la possibilité d’adopter de nouvelles mesures macroprudentielles. Il s’agirait i) d’imposer aux établissements de crédit un relèvement de leurs exigences en capital et ii) de les inciter à déployer des pratiques prudentes d’octroi de crédit en réduisant la part du bien immobilier qu’ils financent et donc en abaissant in fine la loan-to-value (LTV), à l’instar du modèle canadien ou français. En avril 2015, le gouvernement britannique a conféré à la BoE, via le Financial Policy Committee (FPC), les pouvoirs d’imposer des plafonds d’endettement immobilier en lui permettant de fixer un ratio maximal de dette sur revenu (debt-to-income ou DTI) ou de prêt sur la valeur sous-jacente du bien (loan-to-value ou LTV). En juillet 2015, le FPC a avancé l’idée de déployer une politique macroprudentielle contra-cyclique qui consisterait à resserrer les seuils DTI et LTV (baisse de la limite d’endettement acceptable) en période de forte croissance du crédit immobilier mais à les assouplir (relèvement du seuil) lorsque la menace d’instabilité financière se dissipe. En mars 2016, le FPC a décidé d’imposer un coussin contra-cyclique, fixé à 0,5% des engagements pondérés par les risques et prenant effet en mars 2017. Celui-ci pourrait être relevé progressivement à moyen terme, à 1% des actifs pondérés. Pour justifier l’introduction de ce nouveau matelas réglementaire, le FPC a argué de ce que les évolutions du crédit domestique (notamment sur le segment mortgage) étaient de nature à faire peser un risque sur la stabilité financière et qu’il convenait, en conséquence, de modérer l’offre de crédit. En revanche la poursuite, par la BoE, du déploiement de la politique d’assouplissement quantitatif (cf. supra) permettra aux sociétés non financières de continuer à se financer à taux bas sur les marchés. economic-research.bnpparibas.com Conjoncture 17 Juin 2016 Evolution des prix réels de l'immobilier résidentiel Immobilier résidentiel : prix rapportés aux revenus Base 100 : T1 1996 France Etats-Unis Moyenne à long terme : 100 France Etats-Unis 360 Royaume-Uni Espagne Irlande 320 280 240 200 160 120 80 96 98 00 Graphique 14 02 04 06 08 10 12 14 16 Source : Datastream 180 160 140 120 100 80 60 40 20 0 95 97 99 Graphique 16 01 Royaume-Uni Espagne 03 05 07 09 11 13 15 Source : OCDE - House prices database Immobilier résidentiel : prix rapportés aux loyers Taux d'endettement des ménages dans l'UE Moyenne à long terme : 100 France Etats-Unis 140 220 200 180 160 140 120 100 80 60 40 20 0 95 97 Graphique 15 Royaume-Uni Espagne Irlande Irlande En % du PIB 120 T4 2009 T3 2015 100 80 60 40 20 0 99 01 03 05 07 09 11 13 15 Source : OCDE - House prices database En mars 2016, le PRA a également conclu sur la nécessité de renforcer le contrôle microprudentiel, dans le même objectif de réduire les crédits non performants. L’autorité de tutelle bancaire souhaiterait ainsi encadrer plus fortement les critères d’attribution des prêts à l’investissement locatif (buy-to-let business) : les banques20 seraient tenues i) de satisfaire à des critères dits « minimaux » plus rigoureux (minimum standards) et ii) de déployer de nouveaux procédés opérationnels (comme la conduite de tests sur la soutenabilité du paiement des intérêts). Cette mesure microprudentielle viendrait en complément du nouveau dispositif macroprudentiel en passant au crible les politiques d’octroi de prêts de chacun des établissements de crédit et en supervisant les banques individuellement et plus étroitement. Graphique 17 Source : Eurostat Une perception de marché qui se dégrade à nouveau mais un net recul du risque de transformation Peu après la crise, la plupart des plans de soutien gouvernementaux ont suffi pour endiguer la crise de confiance des investisseurs à l’égard du système bancaire britannique. A ce titre, les primes sur Credit Default Swap (CDS) ont reculé depuis début 2012 sans avoir recouvré leur niveau d’avant-crise. Depuis début 2015, les spreads sur CDS se sont à nouveau élargis traduisant les doutes persistants quant à la solvabilité future du secteur bancaire et à l’érosion des bénéfices consécutive aux importantes pertes exceptionnelles de la plupart des banques (cf. supra). Cet élargissement des spreads a également reflété une vague de défiance à l’égard du secteur bancaire. Celle-ci n’a pas touché les seules banques britanniques economic-research.bnpparibas.com mais a affecté la plupart des établissements européens, en pénalisant les valeurs bancaires notamment début 2016. Au final, les principales banques britanniques affichent toujours des spreads sur CDS légèrement inférieurs, en moyenne, à ceux de leurs homologues européens (cf. graphique 18). Credit Default Swaps des principales banques britanniques Spread en points de base HSBC Barclays Lloyds 500 600 Standard Chartered RBS Banques de l'UE 400 300 200 Conjoncture Juin 2016 18 points entre le point bas de mars 2007 et mars 2016), alors qu’a contrario elles ont réduit leur financements wholesale (-3 points entre le point haut de septembre 2009 et mars 2016). En outre, leur dépendance aux refinancements de la BoE (opérations d’open-market à court terme et de reverse-repo à long terme), qui s’était fortement accrue peu après l’éclatement de la crise, a sensiblement diminué dès 2009, s’établissant à fin mars 2016, en proportion du total des actifs, à un niveau quasi proche de zéro (contre 1,7% en zone euro et 0,9% en Irlande). Pour assouplir les conditions financières post-crise puis maintenir l’accès au secteur privé non financier à des taux de financement très favorables, la BoE table depuis mars 2009 sur une intervention directe sur les marchés (cf. graphique 19), principalement via son programme d’achats d’actifs publics (Asset Purchase Facility)21. 100 0 08 09 Graphique 18 10 11 12 13 14 15 16 Sources : Credit Market Analysis, Datastream Si les banques britanniques, à l’instar des établissements irlandais, restent confrontées à un risque de crédit domestique, elles sont en revanche moins exposées au risque de liquidité. Contrairement à leurs consœurs irlandaises, les banques britanniques recourent peu au marché interbancaire. A cet égard, les dépôts interbancaires (au passif des établissements de crédit) restaient très modérés en totalisant, à fin mars 2016, à peine 19% du total des dépôts (contre 31% dans la zone euro et 37% en Irlande), et 8% du total du passif (contre 17% dans la zone euro et 11% en Irlande). A l’inverse, la base des dépôts de la clientèle résidente excluant le segment interbancaire – ressource réputée stable – était bien plus large pour les établissements britanniques (34% du total de bilan contre 38% dans la zone euro et à peine 20% en Irlande) leur permettant l’accès à des ressources pérennes et peu coûteuses. Comme le notait la BoE dans son dernier rapport de stabilité financière publié en décembre 2015, les banques britanniques ont bénéficié, en pourcentage du total des bilans, d’un net élargissement de leurs dépôts de la clientèle résidente hors refinancements interbancaires depuis la crise (+10 Actif consolidé de la Banque d'Angleterre, en milliards de livres 450 400 350 300 250 200 150 100 50 0 Autres actifs (principalement réserves en devises étrangères) Achats de titres publics, APF (Asset Purchase Facility) Obligations et autres titres acquis sur les marchés hors APF Avances au Trésor Opérations de reverse-repo à LT Opérations d'open-market à CT 07 08 Graphique 19 09 10 11 12 13 14 15 16 Sources : BoE et estimations BNP Paribas Le risque de transformation – illustré par le ratio crédits sur dépôts – est désormais relativement modéré. En effet, à la faveur de cessions d’actifs bancaires à l’étranger (deleveraging, cf. supra) et d’une modération des prêts, le ratio loans-to-deposits des banques britanniques (cf. graphique 20) s’est sensiblement réduit (102,7% à fin mars 2016 contre 139,8% à son point haut). Il s’établit désormais à un niveau inférieur à celui des établissements de la zone euro (110,3%), quasi équivalent à celui des consœurs irlandaises (102,6%). La nouvelle réglementation bâloise en matière de liquidité (i.e. economic-research.bnpparibas.com Conjoncture LCR et NSFR) pourrait avoir une incidence particulière pour les banques qui, sur le segment retail, affichent des ratios prêts sur dépôts encore élevés (principalement Lloyds) car elles seront contraintes de rééquilibrer leur gestion actifs/passifs et/ou d’accroître la base de leurs dépôts. Ratio Loans-To-Deposits dans l'Union Européenne* * Calculé sur le périmètre de la clientèle non financière privée (ménages et SNF) 320 Septembre 2008 Mars 2016 280 240 200 160 120 80 40 0 ** ratio ajusté des reclassifications Graphique 20 Source : BCE Juin 2016 19 Dans l’immédiat, les performances financières des grandes banques britanniques continuent de pâtir de l’environnement économique et de la nouvelle donne réglementaire. Le renforcement de la concurrence, lié à l’émergence de nouveaux acteurs bancaires et non bancaires, pourrait conduire ainsi à l’érosion des marges d’intérêts des big five. Toutefois, il ne faudrait pas en conclure trop hâtivement la fin de la prédominance des acteurs historiques au profit des nouveaux entrants. Ceux-ci bénéficient certes d’un avantage comparatif en termes de coût et d’une plus grande mutualisation de leurs frais fixes, mais ils ne disposent pas de l’assise financière des big five et d’une relation de confiance avec la clientèle aussi forte. Du point de vue du risque, leur ancrage sur leur marché domestique les expose davantage au cycle conjoncturel interne et/ou à une éventuelle correction du marché de l’immobilier résidentiel. [email protected] Achevé de rédiger le 2 juin 2016 economic-research.bnpparibas.com Conjoncture Juin 2016 20 Références Bank of England [2015], CRD IV: Liquidity, Policy Statement PS11/15, Juin Bank of England [2015], Financial Stability Report, Décembre Bank of England [2015], Implementing a UK leverage ratio framework, Policy Statement PS27/15, Décembre Bank of England [2015], Measuring the macroeconomic and benefits of higher UK bank capital requirements, Financial Stability Paper n°35, Décembre Bank of England [2015], Stress testing the UK banking system: 2015 results, Décembre Bank of England [2016], The Financial Policy Committee’s framework for the systemic risk buffer, Janvier Bank of England [2015], The Financial Policy Committee’s power over housing tools, Juillet BNP Paribas [2016], Eco Emerging, Avril BNP Paribas [2016], Eco Perspectives, Avril Carney M. [2016], Letter from Mark Carney, Governor, Bank of England, to Rt Hon Andrew Tyrie MP, Mars Commission européenne [2009], communiqué de presse (IP/09/1915), Décembre Dorbec A. [2016], Matières premières : combien de temps durera le blues ?, BNP Paribas, Conjoncture, Janvier Independent Commission on Banking [2011], Final Report Recommendations, Septembre Financial Conduct Authority [2015], Ring-fencing: Disclosures to consumers by non-ring fenced bodies, Consultation Paper CP15/23, Juillet Nahmias L. [2012], Big-bang réglementaire pour les banques britanniques, BNP Paribas, Conjoncture, Juin Nahmias L. [2011], Les banques britanniques trois ans après la crise financière, BNP Paribas, Conjoncture, Février Quignon L. [2000], Les banques britanniques trop rentables ?, BNP Paribas, Conjoncture, Juillet – Août Quignon L. [2005], Les banques britanniques au zénith de la rentabilité, BNP Paribas, Conjoncture, Mars Sabuco P. [2008], Les banques britanniques face à la crise du subprime, BNP Paribas, Conjoncture, Juillet economic-research.bnpparibas.com Conjoncture Juin 2016 21 Notes 1 L’implantation d’HSBC en Amérique Latine (Argentine, Brésil et Mexique) avait fait suite aux accords conclus en 1985 sur la rétrocession de Hong-Kong par le Royaume-Uni à la Chine (effective en 1997). En effet, les dirigeants d’HSBC craignaient que la fin de la détention britannique d’Hong-Kong fragilise le groupe, voyant ainsi les marchés d’Amérique Latine comme un levier pour consolider sa santé financière. 2 Au Royaume-Uni, un système tripartite, chargé de la supervision bancaire, avait été mis en place en 1997 par Gordon Brown: i) le contrôle microprudentiel incombait à la Financial Service Authority ; ii) la stabilité financière était du ressort de la BoE et iii) le cadre législatif était défini par le Trésor. 3 Les établissements qualifiés de « systémiques » pourraient toutefois se voir imposer de détenir un coussin supplémentaire jusqu’à 3,5% des actifs pondérés. De même, une forte croissance du crédit pourrait induire un surcroît en capital jusqu’à 2,5% des actifs pondérés. 4 Le PRA précise qu’il conviendrait de prendre en compte les exigences prudentielles au titre du coussin contra-cyclique (CCB) pour déterminer le minimum requis du ratio de levier. Pour les établissements systémiques, le PRA suggère également d’accroître le seuil minimal du ratio de levier afin de couvrir les besoins au titre du matelas G-SIBs (Additional Leverage Ratio Buffer ou ALRB). En retenant l’hypothèse du PRA selon laquelle les coussins additionnels au titre du CCB et du G-SIBs totalisent 35% des exigences en capital, et en supposant que les matelas CCB et G-SIBs sont respectivement de 1% et 2,5%, le plancher du ratio de levier d’un établissement systémique s’établit donc à : 3%+35%x(1%+2,5%) soit 4,2% et celui d’une banque non systémique à : 3%+35%x1% soit 3,4%. En théorie, le ratio de levier serait ainsi compris entre 3% et 5,1%. 5 Selon le rapport de la CMA, le consommateur reste encore très réticent à changer de banque : seuls 3% des clients individuels et 4% des PME avaient effectué un changement de comptes en 2014. Néanmoins, le changement de banque pourrait conduire à une économie chiffrée entre 75 et 80 livres par an pour les clients créditeurs et 260 livres par an pour ceux affichant un découvert. 6 Selon la CMA, la gratuité des comptes ne conduirait ni à des distorsions de concurrence ni à des pratiques litigieuses. 7 Introduits le 6 avril 1999 et faisant suite aux Personal Equity Plans (i.e. plan ouvrant le droit à un régime fiscal avantageux pour la détention d’actions), les comptes ISA correspondent à une enveloppe fiscale : ils conduisent à l’exonération d’impôts sur les revenus qu’ils génèrent et sont plus généralement exempts de tous types de frais. Les fonds déposés sur un compte ISA peuvent être investis sous forme soit d’un livret d’épargne rémunéré à taux fixe (Cash ISA) soit d’actions en direct ou de parts de fonds d’investissement (Stock and Shares ISA). Depuis le 6 avril 2015, le plafond d’un compte ISA a été fixé réglementairement à GBP 15 240. 8 Citation extraite du communiqué de presse de la Commission Européenne (IP/09/1915) : http://europa.eu/rapid/press-release_IP-091915_fr.htm?locale=FR 9 La partie restante des agences logées dans l’ex-filiale TSB mais non transférées vers la nouvelle structure a été regroupée au sein de la Lloyds Bank. 10 Après le refus en décembre 2011 d’une première offre formulée par la holding financière NBNK, Lloyds avait décidé d’entamer des discussions exclusives avec le groupe mutualiste britannique Co-op Bank qui comprend, outre des activités de la banque de détail, des activités non financières (réseau d’épiceries et d’entreprises funéraires). Ces deux institutions financières étaient parvenues à un accord qui aurait dû aboutir au rachat de la TSB par la Co-Op bank. Parallèlement, des pourparlers entre la Lloyds et la holding financière britannique NBNK reprirent dès avril 2012 ; comme l’offre financière finale de NBNK de juin 2012 apparut décevante, Lloyds manifesta à nouveau sa préférence pour Co-Op bank. Du fait de difficultés financières et du tarissement de ses liquidités, la Co-Op bank a annoncé en avril 2013 qu’elle renonçait à conclure le deal avec Lloyds. La banque mutualiste avait également craint peu après l’ouverture des négociations en printemps 2012 que les exigences en capital du régulateur plus contraignantes ne s’appliquent à l’ensemble du groupe en cas de rachat de TSB. Faute d’acquéreur, Lloyds a finalement fait appel au marché boursier pour réduire sa voilure et se délester de la moitié du capital de TSB. 11 Metro Bank a annoncé en décembre 2015 son intention d’effectuer une levée de fonds pour 400 millions d’euros via un placement privé d’actions avant une introduction en bourse sur le London Stock Exchange l’an prochain. Même si Metro Bank n’a pas encore affiché le moindre bénéfice depuis sa création, cet établissement avait déjà réussi à obtenir des financements via un placement privé d’actions pour 387,5 millions d’euros en janvier 2014. 12 UKFI est l’acronyme de UK Financial Investment Ltd., entité publique destinée à gérer les prises de participations bancaires par le gouvernement britannique. 13 Les autres produits d’exploitation comprennent ceux liés aux activités d’assurance, aux produits d’arbitrage 14 et de couverture. Les banques européennes affichant les marges les plus élevées, telles que les banques espagnoles ou italiennes, bénéficient généralement d’une base de dépôts de la clientèle résidente, hors banques, relativement large (respectivement 53% et 43% à fin mars 2016). Néanmoins, la faiblesse relative des marges britanniques semble liée dans une bien moindre mesure à la structure bilancielle : la part des dépôts de la clientèle résidente excluant le segment interbancaire dans le total du bilan bancaire, qui totalise plus du tiers au Royaume-Uni, est comparable à celle en zone euro (38%). economic-research.bnpparibas.com Conjoncture Juin 2016 22 15 L’entrée en application du Liquidity Coverage Ratio et du Net Stable Funding Ratio a été fixée par le superviseur, respectivement, au 1er janvier 2015 et 2018. 16 A fin 2015, les principales banques affichaient un LCR supérieur au plancher réglementaire transitoire (cible nationale proposée par le PRA de 80% depuis le 1er octobre 2015 et au-dessus de l’exigence bâloise transitoire de 60% et 70% respectivement, au 1er janvier 2015 et 2016) : il s’établissait à 107% pour HSBC, 133% pour Barclays et 136% pour RBS, et excédait 100% pour Standard Chartered et Lloyds. 17 Parmi les principales opérations, on rappellera les rachats par RBS d’une partie des activités d’ABN-AMRO en 2007, par Barclays d’une partie des actifs de Lehman Brothers en 2008 et l’acquisition par Lloyds d’HBOS initiée en 2008 et finalisée en 2009. 18A cet égard, le marché français des prêts à l’habitat se distingue singulièrement de celui de ses pairs européens du fait de sa solidité. Trois éléments conduisent à amortir en France significativement l’incidence d’une correction immobilière sur la probabilité de défaut et/ou le taux de perte en cas de défaut et, d’en limiter les conséquences sur la solvabilité bancaire: i) le cautionnement des prêts via principalement le Crédit Logement (environ 60% des prêts résidentiels français en 2014) qui constitue un filet de sécurité pour les établissements de crédit en atténuant l’incidence potentielle des défauts au travers d’une mutualisation du risque de crédit ; ii) le déploiement de politiques prudentes de distribution de crédit en liant la capacité d’emprunt aux revenus des ménages (mensualités et autres charges inférieures ou égales à 33% des revenus mensuels) et en conditionnant l’octroi d’un crédit immobilier à un apport personnel, sauf pour une clientèle capable de mobiliser une épargne financière suffisante pour absorber, si besoin, tout ou partie de ses dettes (montant du prêt inférieur ou égal à cinq fois celui des fonds propres apportés par le ménage) ; iii) la prépondérance de taux fixes (plus de 90% des prêts) qui limitent la sensibilité de la qualité des portefeuilles de prêts aux mouvements de taux d’intérêt. 19 Le gouverneur de BoE avait ainsi rappelé lors d’une interview télévisée à la chaine Sky News le 18 mai 2014 que «[…] la plus grande menace pour la stabilité financière, et donc pour la durée de la reprise économique, se trouve dans le marché immobilier». 20 Plus précisément, il s’agit de l’ensemble des institutions bancaires qui sont sous le contrôle du PRA (PRA-regulated firms) soit les banques et les building societies (sociétés de crédit foncier). 21 Au plus fort de la crise, les autorités monétaires s’étaient substituées, dans une large mesure, aux ressources interbancaires qui s’étaient soudainement taries, en jouant un rôle de prêteur en dernier ressort (Lender at last resort). Elles avaient ainsi augmenté la base de refinancement en allongeant les maturités de refinancement, en élargissant l’étendue des contreparties éligibles et en mettant en place en mars 2009 l’Asset Purchase Facility. RECHERCHE ECONOMIQUE GROUPE ECONOMIES AVANCEES ET STATISTIQUES ECONOMIE BANCAIRE ECONOMIES EMERGENTES ET RISQUE PAYS PUBLICATIONS DES ETUDES ECONOMIQUES CONJONCTURE EMERGING PERSPECTIVES ECOFLASH ECOWEEK ECOTV ECOTV WEEK Pour recevoir directement nos publications, vous pouvez vous abonner sur notre site ou télécharger notre application pour tablettes iPad et Androïd Eco News © BNP Paribas (2015). Tous droits réservés. Bulletin édité par les Etudes Economiques – BNP PARIBAS Siège social : 16 boulevard des Italiens – 75009 PARIS Tél : +33 (0) 1.42.98.12.34 Internet : www.bnpparibas.com - www.economic-research.bnpparibas.com http://economic-research.bnpparibas.com Directeur de la publication : Jean Lemierre Rédacteur en chef William De Vijlder Achevé de rédiger : Juin 2016