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LA NOUVELLE LOI BANCAIRE : LA MAITRISE DES RISQUES ET LE RENFORCEMENT DES FONDS PROPRES Denis PHILIPPE Avocat aux barreaux de Bruxelles et Luxembourg Professeur extraordinaire à l’Université catholique de Louvain 1 CHAPITRE I – STRUCTURE NORMATIVE _________________________ 5 1. 2. 3. 4. BÂLE _______________________________________________________ 5 RÈGLEMENTS EUROPÉENS ________________________________________ 5 LOI BELGE ___________________________________________________ 5 LES AUTORITÉS PRUDENTIELLES ___________________________________ 6 a) Autorité bancaire européenne (ABE) _____________________________ 6 b) Banque Nationale de Belgique __________________________________ 6 5. CONSEIL DE RÉSOLUTION ________________________________________ 6 CHAPITRE II – MECANISME DE SURVEILLANCE (MSU) ET DE RESOLUTION UNIQUE (MRU) ____________________________________ 7 1. MÉCANISME DE SURVEILLANCE UNIQUE _____________________________ 7 2. MÉCANISME DE RÉSOLUTION UNIQUE ( MRU) ________________________ 8 CHAPITRE III – EXIGENCES NOUVELLES EN MATIERE DE FONDS _ 8 1. LE NUMÉRATEUR ______________________________________________ 9 a) Fonds propres_______________________________________________ 9 2. EXIGENCE GLOBALE DE FONDS PROPRES DE BASE DE CATÉGORIE 1 ________ 10 a) Les fonds propres de base purs (common equity tier one): ___________ 10 b) Fonds propres tier 1 de deuxième catégorie ( fonds propres complémentaires) ______________________________________________ 10 c) Tier 2 ____________________________________________________ 11 d) Evolution des exigences dans le temps ___________________________ 11 e) Observations générales ______________________________________ 12 3. COUSSINS ___________________________________________________ 13 a) Coussin de conservation des fonds propres _______________________ 13 b) Coussin contracyclique_______________________________________ 14 c) Coussin pour établissements de crédit d’importance systémique _______ 14 d) Le risque macroprudentiel ____________________________________ 16 e) Garde fous ________________________________________________ 16 4. AU DÉNOMINATEUR: ACTIFS PONDÉRÉS_____________________________ 17 CHAPITRE IV - POLITIQUES A SUIVRE EN MATIERE DE RISQUE __ 18 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. RISQUE DE CRÉDIT ET DE CONTREPARTIE____________________________ 18 LE RISQUE RÉSIDUEL ___________________________________________ 18 LE RISQUE DE CONCENTRATION __________________________________ 19 ACTIVITÉS DE NÉGOCIATION DES BANQUES(TRADING) _________________ 19 RISQUE OPÉRATIONNEL. ________________________________________ 19 RISQUE DE MARCHÉ ___________________________________________ 20 RISQUE D’INTÉRÊT ____________________________________________ 20 2 8. RISQUE DE LEVIER EXCESSIF _____________________________________ 20 9. TITRISATION _________________________________________________ 21 CHAPITRE V - LIQUIDITE _______________________________________ 22 1. LE LCR (LIQUIDITY COVERAGE RATIO) _____________________________ 22 2. LE NSFR (NET STABLE FUNDING RATIO) ____________________________ 23 CHAPITRE VI - RATIO DE LEVIER _______________________________ 24 CHAPITRE VII - GOUVERNANCE ________________________________ 24 CHAPITRE VIII - MESURES POUVANT ETRE PRISES PAR L’AUTORITE DE SUPERVISION__________________________________ 25 CHAPITRE IX - DISPOSITIONS TRANSITOIRES ___________________ 25 CHAPITRE X - SANCTIONS ______________________________________ 26 CHAPITRE XI - CONCLUSION ___________________________________ 26 3 La nouvelle loi bancaire du 25 avril 2014 et toutes les législations y afférentes renforcent le contrôle des banques. Notre exposé se développera comme suit : En première lieu, nous décrirons brièvement la structure normative. (Chapitre I). Nous étudierons ensuite le mécanisme de surveillance unique (Chapitre II). En troisième lieu, nous nous pencherons sur les nouvelles règles en matière de fonds propres (Chapitre III). Par après, nous nous attacherons aux nouvelles règles en matière de gestion de risques et de liquidité (Chapitre IV). Nous aborderons ensuite le ratio de liquidité (Chapitre V) ainsi qu’au ratio de levier. En troisième lieu, (Chapitre VI) Enfin, nous évoquerons les nouvelles règles en matière de gouvernance (Chapitre VII). Décrivons en quelques mots les principaux changements en la matière : a) la qualité des fonds propres a été améliorée ; b) des coussins de sécurité ont été introduits ; c) un ratio de levier à respecter a été prescrit ; Un mécanisme de surveillance européen a été mis en place. 4 CHAPITRE I – STRUCTURE NORMATIVE 1. Bâle Le Comité de Bâle a été créé en 1974 par les gouverneurs de banques centrales de pays essentiellement du G 20; il vise au renforcement de la sécurité et de la fiabilité du système financier. Le travail de ce comité a donné lieu à d’importants accords, Bâle I signé en 1988, Bâle II en 2004 dont l’idée de base est de permettre aux banques de calculer leur exigence de fonds propres réglementaires pour risques de crédit sur la base de leurs données de risque internes plutôt que par application d’un système forfaitaire. Bâle II.5, approuvé en juillet 2009, est venu améliorer le traitement du risque de position et les exigences qualitatives et quantitatives aux modèles internes. Bâle III, signé en 2010 tire les leçons de la crise financière de 2008. Bâle III fait l’objet d’une mise en œuvre progressive. Ces accords doivent ensuite être implémentés dans les normes européennes ou nationales. 2. Règlements européens La directive 2013/36/UE, complétée par son règlement d’exécution, le règlement 575/2013, constitue la refonte intégrale des directives 2006/48/CE et 2006/49/CE. Elle incorpore les règles prudentielles élaborées au niveau du Comité de Bâle (règles Bâle III). C’est essentiellement dans le règlement 575/2013 que sont insérées les normes posant les exigences en matière de fonds propres. Par ailleurs, la nouvelle architecture bancaire est aussi le résultat des travaux du groupe de haut niveau sur la surveillance financière, présidé par Jacques de LAROSIERE1. 3. Loi belge La directive a donc été transposée en droit belge, par la loi du 25 avril 2014 et dans ses annexes. La loi la transpose de manière stricte 2. La loi tient également compte des enseignements de la Banque Nationale.. S’agissant de la légistique, ce sera généralement dans les annexes que l’on trouvera les textes principaux concernant les ratios des banques 3 . Les renvois réciproques aux différents textes normatifs n’en facilitent pas la compréhension. 1 Règlement UE 575/2013 du 26 juin 2013, considérant n° 2. Exposé des motifs par le Ministre Koen GEENS, DOC 53 3406/005, p. 8. 3 Voy. sur l’avantage de la méthode, l’exposé des motifs, DOC. 53/3406/001, p. 16. 2 5 En outre, comme cela résulte du raisonnement ci-dessus, les recommandations du Comité de Bâle, qui ont reçu force juridique par la directive, sont donc incluses dans notre dispositif règlementaire. 4. Les autorités prudentielles a) Autorité bancaire européenne (ABE) Elle a pour objectif de sauvegarder la stabilité et l’efficacité du système bancaire et se focalise sur tout risque présenté par les banques dont la défaillance est susceptible de mettre à mal le fonctionnement du système financier dans son ensemble. L’ABE dispose de pouvoirs de normalisation, c’est-à-dire qu’elle peut adopter les normes techniques liées à la mise en œuvre de ces nouvelles règles ; ces normes sont contraignantes. Elle est également chargée d’émettre des recommandations. b) Banque Nationale de Belgique Celle-ci dispose de larges pouvoirs de réglementation et de contrôles 4 notamment sur la base de l'article 123 de la loi du 25 avril 2014 qui se base sur l’article 458 du Règlement 575/2013. La Banque est désormais formellement chargée de la détection et du suivi des risques systémiques et est dotée d’instruments pour prévenir ou atténuer ces risques afin de préserver et d'améliorer la résilience du système financier belge. Si des risques systémiques devaient se faire jour, la Banque a dorénavant à sa disposition un large éventail d’instruments et le pouvoir d'émettre des recommandations à l’intention des autorités susceptibles de contribuer à combattre les risques systémiques identifiés. La BCE a également été investie de pouvoirs de surveillance importants par le règlement MSU que nous étudierons ci-après. 5. Conseil de résolution L’accord européen prévoit la mise en place d’un conseil de résolution et d’un fonds de résolution, qui sera financé par des contributions bancaires et dont le montant s’élèvera à 1% des dépôts couverts dans les Etats participants. La loi belge prévoit que la Banque Nationale de Belgique peut imposer des règles plus strictes que la directive CRD IV5, soit à l’occasion d’une procédure d’évaluation prudentielle, soit en cas de non-respect des dispositions prudentielles de la loi bancaire6 ou au cas où la banque ne réussit pas à établir un bon plan de redressement7. 4 Voy. not. les articles 97 et 123 de la loi. Art. 149 à 151. 6 Art. 244, § 2. 7 Art. 116, § 2. 5 6 L’article 458 du règlement CRR autorise l’autorité de surveillance macroprudentielle à prendre des mesures spéciales si elle détecte un risque constituant une menace pour la stabilité du système financier. Ces mesures doivent être justifiées. L’article 97 de la loi belge désigne à cet effet la Banque nationale. Les règlements pris par la Banque requièrent approbation par arrêté royal délibéré en Conseil des Ministres. Précisons enfin que la réglementation belge comme européenne couvre les banques et entreprises d’investissement. CHAPITRE II – MECANISME DE SURVEILLANCE (MSU) ET DE RESOLUTION UNIQUE (MRU) 1. Mécanisme de surveillance unique C’est désormais la BCE qui exercera le contrôle des établissements de crédit « importants », les autorités nationales étant compétentes pour les établissements moins importants.8 Le Mécanisme de surveillance unique (MSU) doit garantir la cohérence et l’efficacité de la politique de l’Union en matière de surveillance prudentielle des établissements de crédit et l’application uniforme dans l’ensemble des pays. S’agissant d’un règlement, il ne doit pas faire l’objet d’une transposition.9 Ce mécanisme vise à pallier à la crise européenne de 2008 et il vise aussi à réduire la fragmentation du système bancaire qu’a entraînée la crise et marqué par des replis sur soi au niveau national. Le MSU s’applique à tous les Etats-membres de la zone Euro et non de l’Union et suppose une collaboration entre le MSU et les autorités nationales de surveillance. Le système est aussi ouvert aux Etats-membres de l’Union Européenne ne faisant pas partie de la zone Euro. Le critère d’importance est apprécié en fonction de la taille de l’établissement de crédit, son importance pour l’économie de l’Union et l’importance des activités transfrontalières de l’établissement. Le règlement prévoit que, sauf circonstances particulières, les établissements sont importants lorsque les conditions suivantes sont remplies : 1. la valeur totale de leurs actifs est supérieure à 30 milliards d'euros ; 2. le ratio entre leurs actifs totaux et le PIB de l’État membre d’établissement participant est supérieur à 20 %, à moins que la valeur totale de leurs actifs soit inférieure à 5 milliards d’euros ; 8 Règlement 1024/2013 du 15 octobre 2013. Le Conseil d’Etat avait demandé un tableau de concordance mais le législateur ne l’a pas estimé nécessaire puisque le Règlement est d’application directe ; voy. Trav. Préparatoires, p.10. 9 7 3. à la suite d’une notification de l’autorité nationale estimant que l’établissement présente un intérêt important pour l’économie nationale, la BCE arrête une décision qui confirme cette importance après avoir procédé à une évaluation.10 En tous les cas, la BCE exercera ce contrôle pour les trois établissements de crédit les plus importants dans chacun des Etats participants ainsi que pour les établissements qui ont bénéficié d’une aide financière publique européenne. C’est désormais la BCE qui est seule compétente pour agréer les établissements de crédit. Une coopération est cependant prévue par l’article 14 du règlement entre les autorités nationales et la BCE. Les banques plus petites seront contrôlées par les autorités nationales. Le Mécanisme de surveillance unique entrera en vigueur le 4 novembre 201411. La BCE est chargée de l’octroi et du retrait d’agrément et à l’appréciation d’acquisition et de cession de participation. 2. Mécanisme de résolution unique ( MRU) Le mécanisme de résolution unique sur lequel un accord politique est intervenu au niveau européen en mars 2014, vise à garantir la gestion efficace des défaillances bancaires. En cas d’effondrement d’une banque, c’est d’abord aux banques, à leurs actionnaires et créanciers à supporter les coûts et ce n’est qu’à titre ultime que les pouvoirs publics ou européens interviendront ; un Fonds de résolution unique a été mis en place à cet effet. CHAPITRE III – EXIGENCES NOUVELLES EN MATIERE DE FONDS Ces exigences visent à rendre les banques plus solides et rendre plus coûteuse la prise de risque.12 Un ratio dont on trouve au numérateur les fonds propres et au dénominateur les actifs pondérés en fonction du risque : FONDS PROPRES ACTIFS PONDERES EN FONCTION DU RISQUE 10 Article 6.4 du Règlement 1024/2013. Art. 33.2 du règlement 1024/2013 . 12 M. SEVE, La régulation financière face à la crise, Bruylant, 2013, p.401. 11 8 Dans Bale I, le ratio Cooke (du nom du président du comité) était de 8%. Dans Bale II, le ratio Cooke devient le ratio McDonough (nom du président de l’époque) (toujours 8%) mais la mesure des fonds propres est alors plus fine, notamment avec l’intégration du risque opérationnel et la notion de fonds propres. Depuis Bâle III, le ratio est toujours de 8% mais est assorti d’exigences complémentaires, objet de ce chapitre. Ce ratio est repris dans les réglementations européenne et belge.13 1. Le numérateur a) Fonds propres Rappelons que le règlement 575/2013 sera directement applicable afin d'éviter les divergences de mise en œuvre entre les États membres. En application de ce règlement, les banques et les entreprises d'investissement devront détenir des fonds propres de base de catégorie 1 correspondant à 4,5 % des actifs pondérés en fonction du risque (jusqu'en décembre 2014 entre 4 et 4,5 %), au lieu des 2 % applicables en vertu des règles actuelles. L'exigence totale de fonds propres, qui inclut les fonds propres de catégories 1 et 2, demeure inchangée, soit 8 % des actifs pondérés en fonction du risque. Le règlement définit les instruments de fonds propres de base de catégorie 1 à l'aide de quatorze critères, similaires à ceux qui figurent dans l'accord de Bâle III, et charge l'Autorité bancaire européenne (ABE) de contrôler la qualité des instruments émis par les établissements. Dans le Tier 2, on distingue les Upper Tier 2 et les Lower Tier 2. Dans le premier cas, il s’agit des titres subordonnés à durée indéterminée. Leur risque est plus limité car, même s’ils n’ont pas de date de maturité, la banque a une option de remboursement anticipé (call) à partir de 5 ans de vie et le coupon est cumulable en cas de non versement. Avec les Lower Tier 2, on sort de la catégorie des dettes à durée indéterminée (sans date d’échéance), mais on reste dans celle des titres subordonnés. Ils n’ont donc pas de priorité de remboursement en cas de faillite. Mais ils ont une date d’échéance (supérieure à 5 ans) et leur coupon est obligatoire (il peut toutefois être reporté en cas de difficulté de la banque Le capital Tier 3 a été abondonné par Bâle III. 13 Voy. Travaux préparatoires, p. 93, article 95. 9 2. Exigence globale de fonds propres de base de catégorie 1 a) Les fonds propres de base purs (common equity tier one): Ceux-ci ont été « durcis » dans Bâle III car auparavant, on y trouvait des instruments complexes qui ne permettaient plus d’évaluer correctement si la banque serait à même de rembourser ses crédits en cas d’imprévu. La qualité des fonds propres purs a donc été améliorée. Les fonds propres purs (core tier 1) consistent désormais dans Le capital (actions ordinaires) . Les réserves (autres que les réserves de réévaluation). Les primes d'émission ou de fusion. Le report à nouveau (s'il est débiteur) à savoir le résultat du dernier exercice clos, dans l'attente de son affectation, diminué de la distribution de dividende. 14 Les fonds propres purs (common equity) sensu stricto passent de 2 à 4,5%. b) Fonds propres tier 1 de deuxième catégorie ( fonds propres complémentaires) En effet, si on fait la dette d’une banque, les dettes subordonnées ne doivent être payées qu’après le remboursement des créanciers ordinaires et privilégies. Il faut également qu’il ait une absence d’obligation contractuelle de remboursement et d’obligation contractuelle de rémunération pour que ces instruments de dettes soient assimilés à du capital. Dans le Tier 1 complémentaire, on trouve des titres hybrides comme les titres super subordonnés et sont « perpétuelles » c’est-à-dire n’ont pas de date de remboursement.. Leurs spécificités: ils ne sont pas prioritaires en cas de liquidation, ils ne sont pas assortis de garantie, ils n’ont pas 14 M.SEVE, op.cit., p.405. L’auteur traite des intérêts minoritaires notamment qui peuvent être inclus dans certaines hypothèses dans le capital. Voy. aussi Basel Committee on Banking Supervision, Basel III : A global regulatory framework for more resilient banks and banking systems, June 2011. 10 d’échéance, leur coupon est facultatif et non cumulable. Ce sont les titres de dette les plus risqués et offrant pour cela, des rendements parmi les plus importants. Tous les instruments de capital innovants hybrides sont exclus des fonds propres de catégorie 1 alors qu’ils étaient limités auparavant à 15%. c) Tier 2 Le Tier 2 comprend, les titres subordonnés à durée indéterminée, d’une durée minimale de 5 ans. Leur risque est plus limité car, même s’ils n’ont pas de date de maturité, la banque a une option de remboursement anticipé (call) à partir de 5 ans de vie et le coupon est cumulable en cas de non versement. Le Tier 2 est destiné à absorber les pertes en cas de liquidation de l’établissement de crédit.15 Celui-ci doit d’abord utiliser les fonds propres réglementaires de base pour couvrir l’exigence de 8%. En l’absence de fonds propres additionnels de catégorie 1 ou de fonds de catégorie 2, les fonds propres réglementaires de base de catégorie 1 devront couvrir la totalité de l’exigence de 8%. d) Evolution des exigences dans le temps es contraintes se déclinent dans les années à venir, comme suit : 2013 : Fonds propres à 8% des engagements dont 4.5% de Tier One 2014 : Fonds propres à 8% des engagements dont 5.5% de Tier One 2015 : Fonds propres à 8% des engagements dont 6% de Tier One 2016 : Fonds propres à 8.625% des engagements dont 6% de Tier One 2017 : Fonds propres à 9.25% des engagements dont 6% de Tier One 2018 : Fonds propres à 9.875% des engagements dont 6% de Tier One 2019 : Fonds propres à 10.5% des engagements dont 6% de Tier One Intégration d’un matelas de sécurité (coussin de conservation) supplémentaire de 2,5 % à horizon 2019. Niveau des fonds propres durs porté à 7 % à horizon 2019. Mise en œuvre progressive entre 2013 et 2019. La part du « Common Equity Tier 1 » (ou plus communément « Core Tier 1 ») doit être majoritaire dans les fonds propres réglementaires. 15 Trav. prép., p. 93. 11 Conservation buffer (+ 250 pb en CET1) : mise en place progressive entre 2016 à 2019 Source : ACP e) Observations générales L’ABE doit tenir une liste actualisée de toutes les formes d’instruments de capital dans chaque Etat-membre, qui sont éligibles en tant qu’instruments de fonds propres de base de catégorie 1. La présente loi et le règlement européen respectent le principe de proportionnalité16. Aux termes de l’article 12.1 de la directive du 27 juin 2013, le capital initial d’une banque doit nécessairement être de 5 millions d’euros. 16 Voy. considérant n° 46 de la directive. 12 3. Coussins Désormais, pour un repos tranquille, une paillasse ne suffit plus ; il faut désormais un matelas épais et confortable ainsi que de moelleux coussins. Des exigences supplémentaires de fonds propres (common equity) sont ainsi imposées sous la forme de coussins. Ces coussins sont ainsi composés d’actions ordinaires et de profits mis en réserve. Ces coussins visent à préserver l’activité de la banque en cas de pertes inattendues ou de dégradation de la situation général. Les coussins (buffers) qui visent à compenser des risques sont intimement liés au dénominateur que nous allons aborder maintenant. a) Coussin de conservation des fonds propres Aux termes de l’article 1 de l’annexe IV de la loi belge intitulé « Coussin de conservation des fonds propres de base de catégorie 1 et instruments de politique macroprudentielle » , le coussin de conservation des fonds propres de base de catégorie 1 d’un établissement de crédit s’élève à 2,5% du montant total d’exposition au risque. Ce ratio est calculé conformément à l’article 92, § 3, du règlement 575/2013 . Il s’agit d’un coussin de sécurité complémentaire qui vise à s’assurer que les fonds propres permettront de subvenir aux pertes encourues. Ces fonds ne sont donc pas destinés à financer le développement de l’activité de la banque. 13 Si les fonds inclus dans ce coussin devaient être utilisés, ils seraient réapprovisionnés notamment en y plaçant les profits au lieu de distribuer des dividendes. b) Coussin contracyclique Celui-ci est uniquement constitué en cas de croissance excessive des octrois de crédit ou de menace d’une belle croissance17; il sert précisément à freiner cette croissance et à pourvoir les banques d’une marge, pour qu’elles puissent continuer à garantir l’octroi de crédits pendant la période de pénurie de crédit, qui peut traditionnellement succéder à l’éclatement d’une bulle de crédit18. Ce coussin n’entraînera pas une pénurie du crédit, bien au contraire. Le coussin doit être égal à la moyenne pondérée des taux de coussins contracycliques s’appliquant dans les pays dans lesquels ces établissements ont des expositions de crédit19. Le taux du coussin doit tenir compte de la croissance du volume de crédit et de l’évolution du ratio des crédits par rapport au PIB de l’Etat, ainsi que toute autre variable influant sur le risque d’instabilité du système financier. Il ne portera que sur certaines catégories d’exposition au risque de crédit.20 La Banque Nationale fixe ce taux chaque trimestre sur base d’un ou plusieurs indicateurs de référence, traduisant le cycle de crédit et les risques liés à la croissance excessive du crédit en Belgique ; il est également tenu compte des spécificités de l’économie nationale, notamment la croissance des volumes de crédits octroyés sur le territoire belge, l’évolution de produits intérieurs bruts, les recommandations formulées par le CERF. Il est fixé dans une fourchette entre 0% et 2,5%. La Banque nationale peut, si elles l’estime nécessaire, exiger un taux supérieur à 2,5%. 21 Le taux est publié sur le site de la Banque nationale.22 L’on tient aussi compte de l’exposition géographique.23Le taux de coussin contracyclique pour les expositions dans un Etat membre tient compte du taux fixé dans cet Etat membre par l’autorité désignée. La Banque nationale peut ne pas reconnaître ce taux s’il est supérieur à 2.5% et le réduire à ce taux pour le calcul du coussin.24 Le Conseil d’Etat a souligné le caractère très complexe de ce texte législatif. c) Coussin pour établissements de crédit d’importance systémique Le risque systémique est celui qui correspond à la propagation des difficultés rencontrées par un agent ou un sous-groupe d’agents à tous les autres agents, c'est-à-dire au « système »25. Ce risque 17 Exposé des motifs précité, p. 38. Ibidem. 19 Voy. directive 2013, considérant n° 81. 20 J.COUPPEY SOUBEYRAN, Les réformes de la régulation bancaire, Idées économiques et sociales, 2013/4, p.26Travaux préparatoires, p. 261. 21 Article 5, §3. 22 Article 5, §6. 23 Article 4, annexe 4 24 Article 8, annexe 4. 25 M. SÈVE, « La régulation financière face à la crise », Larcier, 2013, p. 354, qui cite P. TRAINAR, « Assurance, stabilité financière et risque systémique », p. 29. 18 14 doit être, bien évidemment, pris en considération dans la régulation financière. Rien n’est plus interconnecté que les banques26. Les exigences pourront varier d’une banque à l’autre ; ainsi le coussin relatif aux risques systémiques sera plus élevé pour une institution d’importance systémique mondiale. La loi belge tient compte du profil systémique de l’établissement de crédit ou d’une catégorie d’établissement. Le risque se détermine de manière différente selon qu’il s’agit d’une banque de taille mondiale ou de taille locale. La classification des établissements est décidée par la Banque Nationale qui prend en compte les éléments suivants : La taille de l’établissement. La corrélation entre le système financier mondial et l’établissement de crédit. La faculté de substitution des services ou de l’infrastructure financière. La complexité de l’établissement de crédit. L’importance des activités transfrontalières.27 Chaque critère reçoit une pondération égale et est évalué sur base d'indicateurs quantifiables. La méthodologie utilisée permet de produire un score global pour chaque EIS m et, sur cette base, d'affecter chaque EISm dans une sous-catégorie. Les sous-catégories d'EISm et les seuils sont définis en respectant, outre la Directive 2013/36/UE, les normes techniques de l'ABE. Le montant du coussin de fonds propres de base de catégorie 1 pour EIS m dépend de la souscatégorie à laquelle l'EISm concerné appartient et se situe dans une fourchette allant de 1 % à 3,5 % du montant total d'exposition au risque de l'établissement concerné, calculé conformément à l'article 92, paragraphe 3, du Règlement n° 575/2013.28 29 Un dialogue étroit doit avoir lieu entre les autorités de contrôle et les établissements de crédit pour définir au mieux l’adéquation des capitaux aux risques et activités de cet établissement. Le 18 juillet 2014, l’autorité bancaire européenne a lancé une consultation sur le projet de recommandation relative aux critères permettant d’identifier les institutions qui sont importantes d’un point de vue systémique, que l’on appelle les autres institutions systémiquement importantes. Ces recommandations ont pour but de réaliser un degré approprié de convergence dans le processus d’identification et d’assurer une évaluation comparable, claire et transparente de ces institutions. La consultation commencera le 18 octobre 2014. En premier lieu, sur la base de critères quantitatifs obligatoires (liés à l’interconnexion, à la taille, à la pertinence pour l’économie et la complexité), un score indiquera l’importance systémique de chaque banque. Toute banque, atteignant ou dépassant le seuil supérieur, sera retenue. Toute banque qui se situe en dessous du seuil inférieur sera écartée. Les autorités pourront ensuite retenir toute institution comprise entre le seuil minimal et le seuil maximal sur base d’une liste définie d’indicateurs optionnels, mentionnés dans les recommandations. Les autorités seront, par souci de transparence, obligées de justifier leur décision. Ces recommandations ont été développées 26 M. SÈVE, p. 358. Article 14, annexe IV,§2. 28 Voy. l’article 13 annexe IV de la loi. 29 Article 13, annexe IV, §2. 27 15 conformément à l’article 131.3 de la directive CRD IV, qui mandate l’autorité de contrôle pour élaborer ces recommandations. Le coussin pour le risque systémique varie entre 1% et 3.5% de l’exposition. C’est sur la base consolidée que doit s’apprécier l’exigence de fonds propres. Si plusieurs critères doivent être respectés qui poursuivent des fonctions convergentes ( risque systémique et risque macroprudentiel), c’est l’exigence de coussin la plus élevée qui est retenue.30 Les recommandations du Comité européen de risques systémiques seront prises en considération. d) Le risque macroprudentiel Il s’agit ici d’appréhender les risques systémiques macroprudentiels structurels de perturbation du système financier susceptibles d’avoir de graves répercussions sur la stabilité du système financier et l’économie réelle en Belgique. Il peut s’agir de « modifications apportées à la législation ou aux normes comptables, de répercussions cycliques en provenance de l’économie réelle, du poids élevé du système financier par rapport au produit intérieur brut ou d’une innovation financière qui accroît la complexité du système financier ».31 La Banque nationale peut requérir la constitution d’un coussin de 1% ; un ou plusieurs établissements de crédit peut être visé. Le taux du coussin est revu tous les deux ans.32 L’exigence de fonds propres pourra aller jusqu’à 13%.33 e) Garde fous Au terme de l’article 99 de la loi, des dividendes ne peuvent être distribués s’il n’est pas satisfait aux exigences en matière de coussins de fonds propres de base de catégorie 1. Si l’établissement ne satisfait pas à l’exigence précitée, il en informe l’autorité de contrôle et lui soumet un plan de conservation des fonds propres.34 Soit celle-ci approuve le plan, soit elle fixe des exigences complémentaires consistant en une augmentation de fonds propres ou l’imposition de restrictions strictes en matière de distribution des dividendes. L’utilisation d’instruments de fonds propres additionnels de catégorie 1 pour combler les déficits ressortant du scénario de test de résistance est limitée afin de favoriser le recours à des éléments de capital de haute qualité et de favoriser l’utilisation d’instruments AT1 (fonds propres additionnels de catégorie 1) au seuil de déclenchement plus élevé. 30 Trav. Prép., p. 96. Trav. Prép., p. 273. 32 Voy. article 17, annexe 4. 33 Ibid., p. 26. 34 Article 104 de la loi. 31 16 Sur la base de l'article 123 de la loi du 25 avril 2014 relative au contrôle des établissements de crédit (ci-après loi bancaire), la Banque nationale de Belgique a décidé d'imposer une exigence complémentaire de fonds propres pour les activités de négociation dépassant les seuils fixés par l'article 12 du règlement de la BNB sur les activités de négociation des banques. 4. Au dénominateur: actifs pondérés Un actif plus risqué qu’un autre doit avoir une couverture de fonds propres plus importante. La pondération des actifs prend la forme suivante: Le RWA, c’est-à-dire Risk Weighted Assets, sera de 0% pour les actifs à risque de défaut quasi nul ; ainsi, aucun capital ne devra être constitué pour les fonds qui portent sur des obligations émises par les gouvernements centraux et banques centrales des pays membres de l’OCDE et 20% pour les actifs à risque de défaut modéré comme les dépôts et prêts effectués entre banques de pays membres de l’OCDE, 50% pour certains actifs présentant un risque moyen, comme les prêts hypothécaires, 100% pour les autres actifs comme les prêts aux entreprises ou aux particuliers qui exigent donc un capital de 8 euros pour 100 euros prêtés. Les engagements hors bilan se voient appliquer les mêmes pondérations que celles qui s’appliquent aux actifs mais après application d’un facteur de conversion qui les transforment préalablement en équivalent actif, facteur mesurant la probabilité que l’engagement se réalise, par exemple un facteur de conversion de 50% qui est appliqué à la partie non utilisée d’une ligne de crédit à long terme signifie qu’il y a 1 chance sur 2 pour que le montant disponible soit effectivement utilisé et se transforme en actif.35 Dans Bâle I, le critère de pondération unique était la nature des emprunteurs. Mais ces pondérations ont été affinées, selon les modèles internes des banques dans Bâle II et selon des critères plus généraux par la suite. Parmi les éléments, il convient de pondérer ceux-ci en fonction des incertitudes liées en premier lieu au remboursement du crédit. Le comité de Bâle II.5 propose une pondération plus importante des risques de marché et de titrisation. Les exigences de fonds propres ont donc été renforcées pour ces risques.36 La directive CRD III pondère de façon plus importante les opérations de retitrisation détenues dans le portefeuille bancaire. 35 A. Verboomen & L. De Bel : BALE II est le risque de crédit, les règles actuelles et leurs évolutions actuelles sur BALE III, Larcier 2011. 36 M. SEVE, op.cit., p.413. 17 Ainsi, est instituée une value at risk stressée qui permet de faire face aux variations exceptionnelles telles que connues lors de la crise financière. Les risques extrêmes doivent être modalisés pour tenir compte d’un défaut de l’émetteur ou de variation de la notion d’un instrument.37 CHAPITRE IV - POLITIQUES A SUIVRE EN MATIERE DE RISQUE 1. Risque de crédit et de contrepartie Ce risque devait être apprécié de manière plus sévère vu le nombre de défaillances.38 Les autorités doivent veiller à ce que le crédit soit alloué sur la base de critères sains et bien définis, tout comme doivent l’être également les processus d’approbation. Le risque de crédit doit être évalué selon des méthodes internes précises. Les systèmes de gestion de suivi des risques doivent être établis et le portefeuille doit être diversifié39. Les établissements bancaires recourent à différentes techniques pour atténuer le risque de crédit qu’ils encourent, par exemple en prenant des sûretés réelles sous forme de titres. L’utilisation de ces techniques peut accroître cependant d’autres risques, comme les risques juridiques ou opérationnels par exemple. Les mesures à prendre pour maîtriser ces risques sont énoncées dans l’annexe 1 de la loi qui transpose les articles 79 à 87 de la directive. Le dispositif de Bâle III comporte des éléments incitant davantage à renforcer la gestion des risques liés aux expositions de crédit de la contrepartie et à réviser le régime actuellement applicable au traitement des expositions. 40 Bâle III relève nettement les exigences de fonds propres liées aux opérations de financement des établissements portant sur des instruments dérivés de gré à gré et sur des titres, et incite fortement les établissements à recourir aux contreparties centrales. 2. Le risque résiduel L’article 80 de la même directive, incorporé dans l’article 2 de l’annexe I de la loi, stipule que le risque résiduel doit être contrôlé par des procédures et s’inscrire dans la politique générale de la banque en matière de risque. 37 Pour un calcul des pondérations, voy. A. Verboomen & L. De Bel, op.cit. Voir http://www.fgm.usj.edu.lb/files/a172011.pdf. 39 Art. 70 de la directive de 2013. 40 Voy. cons 82 règlement 575. 38 18 3. Le risque de concentration Celui-ci est à l’origine de nombreux problèmes en matière bancaire et découle d’une exposition trop importante de nature à engendrer des pertes suffisamment importantes. En cas de grands risques concernant un risque de concentration à signature unique, le risque de crédit n'est pas bien diversifié. Par conséquent, la prise en compte des effets de ces techniques devrait être assortie de garanties prudentielles. S’agissant de l’article 65/1, Madame ALMACI et Monsieur GILKINET proposent, dans un amendement n° 8 (DOC 53 3406/004), d’introduire une nouvelle division, consacrée à l’exposition aux risques des établissements bancaires, qui vise à limiter à 25% des fonds propres, l’exposition au risque d’une même contrepartie. Cet amendement n’a pas trouvé grâce auprès du Ministre des finances, qui a considéré qu’il ne voyait pas comment la loi belge pourrait aller plus loin que l’article 116, § 6, du règlement 575/2013. Cette disposition fixe la limite normale d’exposition à 25%. Avec l’autorisation de la Banque Nationale, il est possible de déroger à cette limite en permettant de prêter jusqu’à 100% dans les relations entre filiales et mères. 4. Activités de négociation des banques(trading) C’est le risque auquel sont exposées les banques qui exercent des activités de trading ( négociation). Ce risque a été perçu en 1996 par le Comité de Bâle comme le second type de risque à traiter 41 après le risque de crédit. Ce risque était couvert par la directive européenne du 15 mars 1993. En effet, Un amendement est introduit pour couvrir ce risque dès 1997. Ce risque porte sur : le risque de taux d’intérêt ; le risque sur actions ; le risque de change ; le risque sur produits de base (commodities). 5. Risque opérationnel. Celui-ci représente le risque de pertes résultant de carences ou défauts attribuables à des procédures, aux personnels et aux systèmes internes ou à des événements externes. Il représente un risque important pour les établissements et exige une couverture par des fonds propres. Il est essentiel de tenir compte de la diversité des établissements de l'Union en prévoyant plusieurs méthodes de calcul des exigences de fonds propres pour risque opérationnel, correspondant à différents niveaux de sensibilité au risque et exigeant une sophistication plus ou moins poussée. Les établissements devraient être encouragés à adopter des approches plus sensibles au risque 41 Verboonen, p. 18 ; voy. Amendement de l’accord sur les fonds propres pour son extension aux risques de marché, Comité de Bâle sur le contrôle bancaire, janvier 1996. 19 L’article 7 de l’annexe I de la loi reprend l’article 84 de la directive en prévoyant les méthodes à observer dans la maîtrise de ce risque. La loi prévoit qu’il convient de prendre en compte les événements exceptionnels générateurs de pertes potentiellement élevées.42 6. Risque de marché Le risque de marché est le risque de perte qui peut résulter des fluctuations des prix des instruments financiers qui composent le portefeuille. Ce risque peut porter sur le coût des titres, les taux d’intérêts, le taux de change, le coût des matières premières. En outre, l’article 5 de l’annexe I transpose l’article 83 de la directive. Il aborde le risque de liquidités qui se présente lorsqu’un établissement ne peut pas facilement compenser ou éliminer une position au prix du marché, en raison des perturbations affectant celui-ci43. Les institutions bancaires doivent développer des modèles internes pour le calcul de l’exigence de fonds propres pour le risque de marché qui est liée au titre de créance du portefeuille de négociation et pour les exigences de fonds propres liées au risque de défaut et au risque de migration des notations44. La Banque Nationale sera appelée à préciser ces éléments. Un risque spécifique, le risque qui est lié à la variation du prix de l’instrument en fonction de facteurs liés à son émetteur. Le risque de migration des notations représente quant à lui le risque de perte potentielle lié à la dégradation de la qualité de crédit d’une contrepartie45. L’autorité bancaire européenne sera appelée à, elle aussi, introduire des normes techniques sur ces points. 7. Risque d’intérêt Là aussi, les établissements de crédit doivent disposer de systèmes d’évaluation qui permettent de mesurer les conséquences d’un choc du taux d’intérêt pouvant affecter leurs revenus. 8. Risque de levier excessif Les établissements de crédit doivent prendre les mesures pour maîtriser l’effet de levier. Ces mesures sont basées sur le résultat des scénarios de crise. Les indicateurs d’un risque de levier excessif sont notamment le ratio de levier, dont question cidessus et les asymétries d’échéance entre les actifs et les obligations de l’’établissement bancaire. 42 Travaux préparatoires, p.244. Travaux préparatoires, p. 242. 44 Travaux préparatoires, p. 243. 45 Ibidem. 43 20 Les caractéristiques fondamentales des actifs liquides sont : le risque faible ; la liquidité ; la certitude de l’évaluation ; le peu de corrélation avec les actifs à risque ; pouvoir faire l’objet d’un marché fiable. S’agissant des caractéristiques de marché, il faut un marché actif et mesurable, une volatilité faible et une haute qualité. S’agissant des conditions opérationnelles, les actifs ne doivent pas être grevés. Les actifs doivent également être diversifiés.46 S’agissant des sorties, celles-ci se composent notamment des dépôts ; une différence étant faite entre les dépôts stables et les dépôts moins stables qui ont donc un run off rate de 10 % ou supérieur à 10 %. Des outils de surveillance sont également mis au point. Des paramètres fournissent les informations clés qui permettent aux autorités de surveillance de déterminer le risque de liquidité. Ainsi un tableau reprenant les entrées et sorties de liquidité pour tous les actifs, bilans et hors bilans, est établi. Les actifs disponibles et non grevés sont également définis. Parmi ceuxci, des actifs qui peuvent servir de collatéral sur le marché secondaire, ainsi que les actifs non grevés qui permettent d’avoir accès aux facilités de paiement des banques centrales. Le risque est aussi défini en fonction de la monnaie47. Les contreparties à fort effet de levier doivent faire l’objet d’une attention particulière dans l’évaluation. Le considérant 84 du règlement insiste aussi sur le fait que les expositions dans les contreparties centrales ne sont pas nécessairement sans risque. 9. Titrisation Les exigences en matière de titrisation sont prévues dans le règlement délégué 625/2014 de la Commission du 13 mars 201448. L’article 82 de la directive vise à la maîtrise des risques générés par les opérations de titrisation, où l’établissement de crédit intervient en qualité d’investisseur, d’initiateur ou de sponsor. L’article 4 de l’annexe 1 de la loi précise que le traitement d’une position de titrisation doit être appréciée en fonction de sa nature économique plutôt que sa forme juridique. Si l’investisseur peut dénoncer les expositions avant le remboursement intégral des opérations de crédit, l’institution bancaire doit pouvoir disposer des liquidités nécessaires pour rembourser les investisseurs. 46 Les actifs de niveau 1, on l’a vu, sont les billets de banque, ses réserves auprès de la banque centrale. Voy. pour plus informations, Basel Committee on Banking Supervision. Basel III: The Liquidity. Coverage Ratio and liquidity risk monitoring tools, January 2013, Bank for International Settlements. 48 L174/16. 47 21 Cette exigence doit avoir lieu de manière consolidée. Un établissement de crédit faîtier, qui est soumis aux exigences de coussin en fonds propres de base et en fonds propres pour établissement de crédit d’un processus systémique mondial, est tenu de satisfaire uniquement l’exigence la plus élevée. CHAPITRE V - LIQUIDITE La première fonction de la banque est de transformer des dépôts à court terme en emprunts productifs à long terme pour nourrir l’économie. Si les banques ont besoin de liquidités en période de crise, elles ne seront alors pas à mêmes de lever les fonds et leurs emprunts à long terme ne pourront pas être utilisés pour assurer la liquidité. Un retrait massif de dépôts, comme on l’a connu pendant la crise, peut provoquer alors l’effondrement du système bancaire. Deux nouveaux ratios de liquidité sont introduits. 1. Le LCR (Liquidity Coverage Ratio) Ce ratio se fixe comme suit : Ce ratio vise à permettre que les banques soient en mesure de puiser dans des actifs liquides de haute qualité pour résister pendant 30 jours à une crise de liquidité sévère. Les établissements seront tenus de détenir des actifs liquides, dont la valeur totale couvrirait les sorties nettes de liquidités auxquelles ils pourraient devoir faire face en situation de crise grave sur une période de trente jours. En période de crise, les établissements seraient autorisés à utiliser leurs actifs liquides pour couvrir leurs sorties nettes de liquidités. En Europe, le ratio de couverture de liquidité sera introduit progressivement, en commençant à 60 % en 2015 pour atteindre 100 % en 2018. Un examen aura lieu en 2016: il permettra à la Commission de retarder l'introduction du ratio de 100 % si l'évolution de la situation internationale le justifie. Jusqu'à l'introduction complète du ratio de couverture de liquidité, les États membres peuvent maintenir ou introduire des exigences de liquidité au niveau national. En Belgique, la BNB prévoit son introduction dès le 1 janvier 2015 sur la base de la position sociale et consolidée pour les établissements de crédit de droit belge ; pour les filiales belges d’un établissement belge, le LCR serait également imposé sur une base consolidée. Le ratio tient compte des pondérations suivantes pour les prêts et dépôts ;selon le texte de Bâle du 16 décembre 2010, ses principaux paramètres sont les suivants : le cash et les titres d'État sont pondérés à 100 % ; 22 un certain nombre d'autres titres sont pondérés à 85 % (15 % de décote sur leur valeur de marché) ; les prêts aux clients sont supposés renouvelés à 50 %, les prêts interbancaires ne sont pas renouvelés ; les dépôts retail subissent des taux de fuite entre 5 % et 10 % selon la stabilité estimée du dépôt en question ; les dépôts des grandes entreprises subissent un taux de fuite entre 25 % et 75 % selon la stabilité estimée du dépôt en question (critères assez restrictifs) ; Le traitement des flux intragroupes est également envisagé. Sorties Le règlement limite aussi les entrées de liquidités à 75 % des sorties de liquidités afin que les banques ne comptent pas uniquement sur des entrées attendues de liquidités pour faire face à leurs sorties de liquidités mais détiennent plutôt un montant minimal d'actifs liquides égal à 25 % des sorties. Une période d’observation est prévue pour identifier les conséquences imprévues et y remédier et ensuite deux coussins de liquidité sont prévus, un ratio de liquidité à court terme visant à renforcer le profil de liquidité à court terme des établissements financiers et un ratio de financement stable net visant à garantir un financement stable pour maintenir les actifs et les activités à moyen terme. 2. Le NSFR (Net Stable Funding Ratio) Ce ratio vise à permettre aux banques de résister un an à une situation de crise spécifique à l'établissement. Son principe est le suivant : le montant des besoins en ressources stables (required stable funding) doit être inférieur au montant des ressources disponibles (available stable funding).49 Le ratio s’établit comme suit : Les dettes à long terme sont plus stables que celles à court terme. Les dépôts des clients à court terme et des PME sont plus stables que les dépôts de gros. Si un actif est assorti d’une option pouvant être exercée à des moments espacés dans le temps, c’est le moment le plus proche qui est retenu. 49 Voy. Basel Committee on Banking Supervision, Consultative Document, Basel III : The Net Stable Funding Ration, January 2014. 23 CHAPITRE VI - RATIO DE LEVIER Le ratio de levier est une mesure indépendante des risques et correspond aux fonds propres de catégorie 1 de l'établissement divisés par son actif total consolidé moyen. Avec : FP: Capitaux propres de l'entreprise (Fonds propres dits Tier core one, ou de catégorie 1). TA : Total des actifs50. Ce chiffre est équivalent à un rapport maximal de 33:1 d'actifs sur capitaux propres. Un impact particulier doit être donné aux prêts hypothécaires et aux financements destinés aux autorités régionales ou locales. L’ABE doit établir une classification des modèles d’entreprise et des risques. Les exigences de fonds propres sont fondées sur des actifs pondérés en fonction des risques. Ce ratio de levier est de 3% selon Bâle III. Les fonds propres ne peuvent donc être inférieurs à 3% du total du bilan. Le ratio de levier ne sera instauré qu’en 2018, moyennant une proposition de la Commission de 2016. En attendant l’entrée en vigueur de l’effet de levier au niveau européen, la Banque Nationale de Belgique a décidé de maintenir le coefficient de solvabilité obligatoire. Un reporting spécifique est établi afin de vérifier les obligations prévues par cet article51. CHAPITRE VII - GOUVERNANCE La directive introduit de nouvelles règles visant à accroître l’efficacité et la maîtrise des risques par le conseil d’administration. Des nouvelles règles portent sur la nécessaire divulgation de la gestion des risques et des pratiques de gouvernance interne. L’article 94 de la loi transposant la directive oblige les établissements de crédit à se pourvoir d’une gestion prospective des besoins en fonds propres et en liquidité. La loi prescrit à l’organe d’administration de s’impliquer directement dans cette gestion. Les banques doivent disposer de stratégies et procédures visant au maintien des fonds propres (Internal capital adequacy process ou ICAAP). Un programme de financement des liquidités doit également être établi par la banque. Ces programmes doivent faire l’objet d’une évaluation par l’autorité de contrôle. 50 Des corrections seront apportées sur les dérivés, et l’on réintégrera dans le bilan les engagements actuellement traités de façon différente par les États-Unis et l'Europe8. 51 Circulaire du 6 mai 2014. 24 Ces programmes doivent être mis à jour en fonction de l’évolution des marchés l’environnement économique. et de Un comité de risques distinct du conseil, formé de membres n’exerçant pas de fonction dans la direction ainsi qu’une filière risques seront introduites dans chaque établissement. La loi institue (art. 110) l’asset encumbrance ratio, qui vise un monitoring permanent de la structure bilantaire 52 . Ce ratio est établi dans une fourchette prévue par un règlement de la Banque Nationale de Belgique. Il vise à prévoir une assiette suffisante pour l’exercice du privilège des déposants d’une part et garantir à la banque l’accès au financement externe d’autre part. Ce ratio tient compte du niveau des dépôts, de la nature des activités de l’institution et de la structure de son bilan53. CHAPITRE VIII - MESURES POUVANT ETRE PRISES PAR L’AUTORITE DE SUPERVISION Epinglons les nouvelles mesures qui peuvent être prises par les autorités de supervision. Les nouvelles mesures prévoient aussi des garanties supplémentaires. Aux termes des mesures dites du deuxième pilier, les superviseurs peuvent imposer des mesures particulières à une banque individuelle ou à un groupe de banques vu leur situation spécifique. Parmi ces mesures se trouvent bien évidemment les fonds propres complémentaires. A côté des mesures ciblées, s’adjoignent les mesures temporaires, des mesures d’un an. Il s’agit donc de suivre l’évolution des risques affectant tous les Etats-membres durant cette période limitée. Si ces exigences ne sont pas remplies, l’on compte parmi les sanctions, la restriction de la distribution des dividendes et des rémunérations variables. CHAPITRE IX - DISPOSITIONS TRANSITOIRES Outre les dispositions transitoires mentionnées plus haut, soulignons que le taux de coussin de conservation des fonds propres de la catégorie 1, exprime un pourcentage du montant total de l’exposition aux risques de l’établissement de crédit, est fixé à : • 0% pour la période allant de la date d’entrée en vigueur de la loi jusqu’au 31 décembre 2015 ; • 0,625% pour la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2016 ; • 1,25% pour la période du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2017 ; • 1,875% pour la période du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2018. 52 53 Travaux préparatoires, p. 44. Ibidem. 25 S’agissant aux articles 13 et 14 de l’annexe 4, l’exigence fixée à l’article 13, § 2, de l’annexe 4 est de 25% au 1er janvier 2016, de 50% au 1er janvier 2017, de 75% au 1er janvier 2018 et de 100% au 1er janvier 2019. Les articles 18 à 20 de l’annexe 4 entrent en vigueur le 1 er janvier 2015. Dans son avis, le Conseil d’Etat relève la difficulté de vérifier la transposition de la directive 2013/36/EU puisque le projet reprend des dispositions de la loi du 22 mars 1993, en abroge d’autres et tantôt met en œuvre des textes qui ne sont pas encore en vigueur54. CHAPITRE X - SANCTIONS L’article 116, § 2, stipule que l’autorité de contrôle peut enjoindre l’établissement de crédit de : • réduire son profil de risque, en ce compris le risque de liquidité ; • permettre des mesures de recapitalisation rapide ; • soit revoir sa stratégie et sa structure, s’agissant du plan de redressement. CHAPITRE XI - CONCLUSION En premier lieu, les normes étudiées épousent de manière constante les fluctuations du marché : elles surfent sur la vague du marché. Ceci qui rend l’assimilation de la norme par ses destinataires plus difficile. En outre, les principes et règles de base sont eux aussi en gestation continue. Que ce soit au comité de Bâle, à l’Union européenne ou en Belgique, l’on continue à plancher sur une meilleure supervision ; ceci débouchera à n’en douter sur de nouvelles normes dans les prochaines années. Ainsi, les travaux de comité de Bâle continuent et portent sur : - Une revue du portefeuille de négociations - De la titrisation et du rôle des notations externes - Une revue du traitement des grands risques - Une identification et un traitement approprié des établissements systémiques En deuxième lieu,, on peut se demander avec Philippe-Emmanuel PARTSCH si en fondant les pouvoirs de la BCE sur l’article 127, paragraphe 6 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, le législateur européen n’a pas excédé ses pouvoirs. En effet, la mission « dépasse la simple conception et s’étend à l’exercice effectif d’au moins une partie de la surveillance prudentielle des établissements de crédit. En conséquence, cela peut être une source de fragilisation pour l’existence du règlement »55. 54 55 Avis du Conseil d’Etat, n° 54/982/2 du 27 janvier 2014, DOC 53/3406/001. Droit bancaire et financier européen, 2014, Journal du droit européen 31. 26 En troisième lieu, certaines institutions (par exemple optima)56 ont abandonné le statut de banque vu les exigences lourdes qui sont instaurées. On parle également de shadowbanking ; en effet, le renforcement de la législation bancaire risque d’inciter certaines institutions à effectuer des opérations de nature bancaire sans adopter le statut d’établissements bancaires.57 56 “Optima verandert geweer van schouder. De Tijd schrijft vandaag dat Optima stopt als bank en verder wil met het statuut van beursvennootschap. Het diende daarvoor bij de Nationale Bank een aanvraag in. Om de beleggingsportefeuilles van klanten te beheren zal Optima gaan samenwerken met KBC Securities.Daarmee maakt het Gentse bedrijf een bocht van 180 graden. In 2011 nam Optima de Ethias Bank over met de bedoeling bankdiensten aan te bieden. In een persbericht zegt Optima dat het zich genoodzaakt ziet om tot een “strategische herpositionering” over te gaan nu de lage rente, de bankenheffing en de verhoogde kapitaaleisen de klassieke bankactiviteiten “beduidend minder aantrekkelijk” maken. Begin dit jaar waren er al berichten dat Optima niet meer zou willen inzetten op haar bank en op zoek zou zijn naar een partner. Eind juni verschenen in de pers ook artikels die op moeilijkheden bij de Optima Bank wezen. De Tijd ( 3 september 2014)schreef toen dat Optima Bank volgens de Nationale Bank ondergekapitaliseerd was. Jeroen Piqueur, de Gentse topman van de Optima Group, zou volgens de beurskrant 4,4 miljoen euro ingebracht hebben. In mei stapte bestuursvoorzitter Herman Verwilst op bij de Optima Bank. Verwilst heeft een fel besmeurd Fortisverleden en stond mee aan de basis van de desastreuze privatisering van de ASLK. Ook KBC Securities komt niet altijd op positieve manier in het nieuws. In De Tijd van 7 februari 2009 vertelde Luc Van Hecke, de hoofdeconoom van KBC Securities, dit: “Een oplossing voor de crisis? Men zou de overtollige Amerikaanse woningen kunnen opkopen en desnoods vernietigen zoals men ook bij tomaten de overschotten vernietigt.” (voy. Site www.openbareban.be/artchives/30019,capture du 24 septembre 2014) 57 Voyez sur le système bancaire parallèle, la communication de la Commission au Conseil, au Parlement Européen COM/2013/0604 final. 27