Incivilités au travail : pourquoi s`y intéresser

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Incivilités au travail : pourquoi s`y intéresser
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Incivilités au travail : pourquoi s’y intéresser ?
Les incivilités ne sont pas spectaculaires, mais du fait notamment de leur caractère répété, elles
constituent une pression insidieuse ; le mal-être qu’elles provoquent a un impact sur la santé des
personnes et sur leur implication (implication = motivation + engagement). Les différentes enquêtes
menées notamment en 2014 montrent qu’un nombre important de salariés se dit touché par les
incivilités quel que soit le secteur d’activité.
Quelques chiffres (Source : Agence ELEAS) :
-
42% des salariés se déclarent victimes d’incivilité au travail
-
33% se déclarent personnellement affectés par des incivilités et en souffre
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Le public extérieur (clients, visiteurs, …) apparaît comme le premier auteur d’incivilité (54%)
-
Mais 48% des salariés désignent également leurs collègues
-
Pour 46% des salariés, les incivilités dans le cadre du travail ont augmenté ces dernières années
Pour 66% des salariés, les incivilités relèvent du manque de respect des codes de politesse envers
autrui, des règles comportementales et de cordialité
-
21% des salariés mettent en avant la violence verbale et les comportements agressifs
75% des salariés français ont été confronté à des symptômes ayant une incidence sur leur
productivité au travail (démotivation, difficulté de concentration…) et 77% ont connu des répercussions
sur leur santé (stress, anxiété, troubles du sommeil …)
Ainsi toute entreprise doit peser ce risque en termes d’image, en termes juridiques et organisationnels
(productivité, qualité). Les incivilités deviennent un enjeu majeur de management. « Les
conséquences de l’incivilité au travail ont la perversité silencieuse de l’amiante. L’action est lente mais
régulière sur l’organisme aussi longtemps que l’exposition est maintenue. Avec le temps et selon les
individus, les défenses s’amenuisent et les symptômes physiques autant que psychiques peuvent
apparaître. Les fondamentaux identitaires de l’individu sont également attaqués à travers une estime
de soi et une confiance en soi en berne » Xavier Alas Luquetas Agence ELEAS.
Nadine FORZINETTI – JPC CONSULTANT décembre 2014
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Comment définir l’incivilité au travail ?
Il n’existe pas de définition légale de l’incivilité au travail.
On peut se rapprocher d’une définition donnée par le dictionnaire « manque de courtoisie, de politesse,
un acte ou un comportement qui manifeste l’ignorance ou le rejet des règles élémentaires de la vie
sociale ».
Un accord interprofessionnel du 26 mars 2010 vise les incivilités comme contribuant à la « dégradation
des conditions de travail (…) elles rendent difficile la vie en commun (…), les entreprises qui laissent
les incivilités s’installer favorisent l’émergence d’actes plus graves de violence et de harcèlement »
Chaque personne, chaque salarié a sa propre définition de l’incivilité ; on ne réagit pas tous de la même
façon aux incivilités et notre seuil de tolérance varie selon notre personnalité : il est parfois difficile de
s’accorder sur ce qui relève ou non de l’incivilité.
Les formes d’incivilités sont multiples :
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Absence de formules de politesse : bonjour, au revoir, merci, pardon…
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Des gestes : jeter un dossier sur un bureau au lieu de le poser …
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Des attitudes : commencer à parler à quelqu’un et continuer en lui tournant le dos ; avoir une
conversation bruyante dans les espaces communs…
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La voix, l’intonation, le ton qui peuvent être considérés comme un manque de respect ; les
brimades verbales (hurler après quelqu’un)
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Intrusion dans la vie privé (poser des questions indiscrètes, écouter les conversations
téléphoniques, lire les mails …) ; critiquer la vie privée des personnes
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Discréditer la personne en présence de tiers
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Proférer des propos touchant à la dignité des personnes (moqueries, humour déplacé,
surnom …)
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Petites vexations, mesquineries…
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Gestes offensants : tourner le dos, hausser les épaules, lever les yeux au ciel, soupirer
quand quelqu’un parle …
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Gestes agressifs : claquer la porte, taper du poing sur la table …
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Hygiène propreté : laisser les espaces communs sales et en désordre : 84% des salariés
jugent qu’il s’agit d’une incivilité et la moitié le vit chaque semaine
Nadine FORZINETTI – JPC CONSULTANT décembre 2014
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Conduite en réunion : ne pas éteindre son portable, consulter et répondre aux mails et SMS,
arriver en retard sans excuser, partir avant la fin de la réunion, couper la parole sans tenir
compte de la parole des autres ; régler ses comptes ; rabaisser un collaborateur en réunion…
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Non-respect du travail effectué (ex : celui des femmes de ménage) ou de certaines
catégories de salariés (ex : chargés d’accueil qui « reçoivent » la mauvaise humeur des
clients qui ne peuvent joindre le responsable du dossier)
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Sur le trajet du travail dans les transports : être dérangé par les conversations au téléphone
portable, être bousculé sans excuses, avoir du mal à monter ou descendre …
L’incivilité peut être attachée à certains « usages » ou contextes professionnels qui tolèrent certains
écarts en particulier de langage ou de comportement : selon que le salarié travaille sur un chantier, un
bureau, dans une école en relation avec le public, dans un magasin … les tolérances seront diverses.
Ces comportements répétés contribuent à créer un climat de travail dégradé.
Quelles sont les causes de la montée des incivilités ?
Pour 71% des salariés interrogés la montée des incivilités serait due à l’évolution de la société
(éducation) et des mentalités. Pour 62% elle serait due aux nouvelles technologies et pour 29% au
cadre professionnel.
On pourrait également citer, un environnement économique plus difficile, des choix stratégiques qui se
durcissent engendrant un sentiment de pression accrue et un management plus difficile auquel certains
répondent par l’incivilité voire la violence !
Comme les manifestations des incivilités sont multiples, les causes sont également multifactorielles :
causes sociétales, causes organisationnelles ou en lien avec les modes de communication.
Si le problème se pose dans notre entreprise il conviendra d’en analyser parfaitement des causes pour
adapter le plan d’action. (Voir ci-dessous)
Nadine FORZINETTI – JPC CONSULTANT décembre 2014
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Quels sont les risques de ne pas traiter le problème des
incivilités ?
C’est prendre le risque juridique d’être poursuivi pour harcèlement ou pour ne pas avoir fourni un
environnement de travail sain (articles L1152-1 et L1154-4 CT)
C’est également prendre le risque de faire face aux critiques des salariés et d’être tenu pour responsable
de la dégradation des relations dans l’entreprise. En effet, 35% des salariés estiment que leur employeur
est conscient du problème mais n’engage pas de mesure pour lutter contre les incivilités.
Que proposent les salariés ? 44% des salariés souhaiteraient qu’une mesure d’enquête destinée à
connaître l’opinion des salariés sur l’ambiance et les relations de travail soit mise en œuvre. 40% des
salariés souhaiteraient la mise en place de formations sur les comportements et les relations entre
collègues.
Qu’est ce qui se pratique déjà aujourd’hui ?
On peut citer un certain nombre de mesures :
-
Mesures organisationnelles ou de management : mises en place de consignes relatives à la
politesse, au respect, réunions d’information, régulation de la charge de travail …
Rédaction d’une charte de bonne conduite
Création d’un groupe de travail entre collègues pour réduire les tensions
Organisation de formations (gestion du stress, gestion de l’agressivité des clients difficiles …)
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Diagnostic
Explication
Sensibilisation
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Action
Régulation
Un plan d’action complet.
Les mesures qui sont déjà prises sont intéressantes mais elles doivent être complétées et surtout
organisées pour prendre en compte les multiples causes et formes d’incivilités afin de réaliser un plan
d’action efficace.
1. Permettre le RECUEIL, le SIGNALEMENT des incivilités, pour en comprendre les causes, les
circonstances et les manifestations ; ce qui permet également de donner la parole aux
collaborateurs.
Faire une démarche de DIAGNOSTIC.
2. EXPLIQUER les incivilités rencontrées dans l’entreprise et mises au jour dans le travail de
signalement : affichage, communication interne, groupes d’échange…
3. Eviter tout sentiment d’ABANDON de la hiérarchie qui pourrait être ressenti par les
collaborateurs : SENSIBILISER, FORMER les managers à la mise en place de mesures de
PREVENTION afin de leur apprendre les bonnes attitudes pour soutenir les collaborateurs en
difficulté, à savoir gérer les incidents vis-à-vis des personnes concernées mais aussi de
l’équipe.
Les salariés victimes d’incivilité ont besoin de soutien : près de ¾ des salariés ont parlé du
problème à un tiers, à leur famille à leurs proches, mais 28% des salariés n’en parlent pas. Pour
se protéger ils développent des « stratégies individuelles » : prise de recul, humour, ironie, repli
sur soi ; voir même ils reproduisent le même comportement que le « fauteur » d’incivilité ! Ceci
ne peut que conduire à une amplification du phénomène, une altération des règles. Il ne faut
donc pas laisser le collaborateur seul face au problème mais apporter des réponses
organisationnelles.
4. AGIR sur l’organisation du travail (sur les procédures ou processus de travail, sur la clarification
des missions, …) ou l’environnement de travail (construction d’usages ou de modes de vie en
collectivité …) s’ils sont en cause, à l’origine des tensions.
5. REGULER les situations lorsqu’elles deviennent intolérables : soutien aux victimes, prise de
sanctions avant que les incivilités ne deviennent trop graves.
Nadine FORZINETTI – JPC CONSULTANT décembre 2014
Responsabilité de
l’organisation
Responsabilité des
managers
Responsabilité
de tous les salariés

Obligation de moyen

Appliquer les
politiques définies par
l’organisation

Avoir un regard critique
sur ses propres
comportements et leur
impact sur les autres

Approches :
Prévention
Soutien
Intervention rapide
Gestion des conflits
Moyens/outils :
Code ou chartes de
civilité
Politique de civilité
Mise en application
concrète des règles
Plan de
communication
Formation des
managers

Gérer les
comportements

Se reconnaître comme
le premier niveau
d’intervention dans nos
inconforts et

Agir sur le climat sur
l’inconfort, voir
l’insécurité

Aller chercher du
soutien si besoin
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
Un enjeu !
Le domaine des incivilités est encore à explorer : n’hésitez pas à décrire, identifier, expliquer, dialoguer
et à insuffler un état d’esprit indispensable à la vie en collectivité dans entreprise.
Nadine FORZINETTI
Nadine FORZINETTI – JPC CONSULTANT décembre 2014