Guérir le corps et l`âme

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Guérir le corps et l`âme
TA B L E D E S M AT I È R E S
Préface. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
PARTIE I
DÉPLOIEMENT DES ORCHIDÉES DANS L’UNIVERS
Chapitre 1 : Ce qui est dessus est dessous . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
Chapitre 2 : Le maintien de l’harmonie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35
PARTIE II
EAU CÉLESTE
Chapitre 3 : Mon premier contact avec l’Eau céleste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55
Chapitre 4 : La régularisation de l’Eau céleste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
Chapitre 5 : La relation avec nous-mêmes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77
Chapitre 6 : Prendre soin de soi pendant les menstruations . . . . . . . . . . . . 81
PARTIE III
FLORAISON DU LOTUS
Chapitre 7 : Prendre soin de nos seins . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101
Chapitre 8 : La progression possible des maladies des seins . . . . . . . . . . . . . 109
PARTIE IV
NUAGES ET PLUIE
Chapitre 9 : Sexualité et bien-être . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 129
Chapitre 10 : Les expériences sexuelles des femmes. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133
PARTIE V
MÛRISSEMENT DU FRUIT
Chapitre 11 : Semer la graine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 149
Chapitre 12 : Le Mûrissement du fruit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 161
Chapitre 13 : Le lâcher-prise du travail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 179
PARTIE VI
MOIS D’OR
Chapitre 14 : Des traditions différentes. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 195
Chapitre 15 : L’ouverture du cœur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 209
PARTIE VII
SECOND PRINTEMPS
Chapitre 16 : L’acheminement vers la complétude . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 217
Chapitre 17 : Une transition naturelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 245
Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 271
Annexe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 275
Index . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 279
Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 289
Chapitre 1
C e qu i est dessus est dessous
Q
uand on demande à un médecin occidental de décrire le corps
humain, il en parlera probablement comme un organisme qui, à
l’instar d’une machine, peut se diviser en parties et dont les différents
organes et systèmes peuvent être isolés, examinés et compris. Quand on
pose la même question à un médecin spécialisé en MTC, à moi en l’occurrence, il répond : « C’est un tout, c’est une personne, corps y compris.
Tous les aspects d’une personne – physique, émotionnel, mental et
spirituel – sont interreliés et interdépendants. On ne peut comprendre
une quelconque partie de cette personne si on ne la considère pas dans
son rapport avec le tout. Chacun d’entre nous est un ensemble unifié et
organique : corps, mental, esprit. » Quand une femme entre dans mon
cabinet, j’observe son expression, la luminosité de ses yeux, son teint,
son comportement, la forme de son corps, sa posture et son odeur. Je
prends son pouls et examine sa langue. Je lui pose des questions pour
amorcer un dialogue et j’écoute attentivement ce qu’elle me dit. J’utilise tous mes sens pour détecter les signes et symptômes extérieurs qui
viennent refléter la dynamique interne de son corps. Cette méthode
est arrivée jusqu’à moi depuis les plus anciens praticiens chinois. Leur
façon de décrire et de comprendre le fonctionnement du corps humain
était basée sur leur analyse et déterminée par la philosophie taoïste,
selon laquelle les humains sont un aspect de la nature et que, ce faisant,
ils sont gouvernés par les mêmes lois que l’univers. Par conséquent,
en avaient-ils conclu, chaque personne est une version miniature de
l’univers, un microcosme doté d’aspects analogues à ceux du grand univers, le macrocosme. L’ancien traité médical chinois Huang Di Nei Jing
(«Classique interne de l’Empereur jaune ») dit ce qui suit : « Le ciel a
le soleil et la lune, les humains ont deux yeux… Le ciel a le tonnerre
et l’éclair, les humains ont le son et la parole… Le ciel a le vent et la
pluie, les humains ont la joie et la colère… Le ciel a l’hiver et l’été,
les humains ont le froid et le chaud… Le ciel a le matin et le soir, les
humains dorment et veillent. »
Les taoïstes ont toujours considéré l’univers comme un tout organisé
et harmonieux. Selon eux, si nous vivions en fonction des lois de l’univers,
nous serions harmonieux nous aussi. Pour y arriver, il faudrait vivre en
fonction des saisons, se coucher quand le soleil se couche, se réveiller
quand le soleil se lève, s’habiller en fonction du temps et manger des aliments de saison à l’endroit où nous vivons. Il faudrait que les changements de comportements reflètent les changements universels parce que
ce qui est bénéfique pour l’ensemble de la nature (macrocosme) l’est aussi
pour l’individu (microcosme), et vice versa.
Vu sous un autre angle, ce concept avance que ce qui sustente l’environnement sustente également les organismes vivants. Par exemple, la
pluie sustente les arbres et les plantes, et remplit les lacs, les rivières et les
cours d’eau, qui nous fournissent l’eau potable. À l’échelle microcosmique,
chaque partie de notre corps a besoin d’eau. Par conséquent, il est impossible d’isoler une partie de notre corps ou un symptôme sans prendre le
reste de notre corps en considération. Les praticiens en MTC ne traitent
pas une maladie sans comprendre l’impact qu’elle a sur le reste du corps
ou sans comprendre ce qui a pu l’engendrer. Si une personne vient me
consulter pour une éruption et des démangeaisons cutanées rouges, je ne
me contente pas de regarder sa peau. Je lui pose également des questions
sur sa santé gastro-intestinale et sur sa respiration, puisque, en MTC, ces
trois éléments sont liés. Je lui demande également si elle vient de vivre
une perte significative récemment, vu que la tristesse est un facteur pour
les problèmes des Poumons, problèmes qui peuvent par la suite se manifester par une inflammation de la peau.
Tous les problèmes et les maladies résultent d’un déséquilibre dans le
corps. Les anciens Chinois percevaient tout dans l’univers, nous y compris,
comme un jeu entre deux forces contraires en constant changement : le
froid de l’hiver qui devient le chaud de l’été, l’obscurité de la nuit qui
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• Guérir le corps et l’âme Grâce à la médecine traditionnelle chinoise
devient la clarté du jour, le repos qui cède sa place à l’activité. Ces deux
forces opposées sont connues comme le Yin et le Yang.
Yin et YanG
Tout ce qui existe dans la nature, ainsi que toutes les activités, comporte
deux aspects opposés : un aspect Yin et un aspect Yang. Le terme Yin veut
dire « ubac » (versant de la montagne à l’ombre) et le terme Yang, « adret »
(versant de la montagne au soleil). Le Yin est associé à l’ombre, au froid,
à la contraction, à la lune, à l’eau, à l’inactivité, au principe féminin et à
la matière. Le Yang est associé à la clarté, à la chaleur, à l’expansion, au
soleil, au feu, à l’activité, au principe masculin et à l’énergie. Ces aspects
apparemment opposés sont en fait les deux côtés de la même médaille.
Le froid et le chaud sont les caractéristiques de la température. Le jour
et la nuit sont les caractéristiques du temps. Ces caractéristiques existent
uniquement parce qu’elles sont en relation l’une par rapport à l’autre : il
ne pourrait y avoir de nuit sans jour, d’arrière sans devant.
La tension dynamique et la transformation permanente entre le Yin et
le Yang sont ce qui crée l’énergie qui nourrit la nature et les humains. On
peut comparer le Yin et le Yang à l’attraction qui existe entre des forces
électriques de charges positives et négatives. Dans le truisme selon lequel
les contraires s’attirent, il est également question de Yin et de Yang. Le Yin
est féminin et le Yang, masculin. Et bien entendu, c’est l’union de ces deux
types d’énergie qui donne naissance à une nouvelle vie. Ce sont donc le
Yin et le Yang qui font tourner le monde.
Le symbole du Yin et du Yang est un
cercle à moitié sombre (Yin) et à moitié clair
(Yang), qui est divisé par une ligne courbe
représentant les incessants mouvement et
dynamisme qui sous-tendent toute vie. Cette
ligne représente aussi l’équilibre harmonieux
qui existe entre les forces opposées (voir
figure 1). Dans la partie claire, il y a un point
noir et dans la partie noire, un point clair. Ce
détail vient illustrer le fait que tout phénomène n’est jamais exclusivement Yin ou
Figure 1 : Le Yin et le Yang
ce Qui est dessus est dessous
• 23
Yang. Par exemple, je suis petite si je me compare à une personne qui
mesure 1,80 m, mais je suis grande comparée à un enfant qui mesure
1,20 m. Ces points noirs et blancs montrent aussi que la source de l’état
opposé est inhérente à l’état actuel de tout phénomène. Par exemple, dès
que nous naissons, il est possible que nous mourrions. Ce concept de Yin
et de Yang reflète la vision orientale qui veut que les opposés n’ont pas
besoin de se battre, de se conquérir ou d’entrer en conflit, puisque chaque
aspect contient, complète et équilibre l’autre.
À l’instar de tout ce qui existe dans l’univers, nous sommes une combinaison de Yin et de Yang. Notre tête, puisqu’elle est en haut, est Yang.
Nos pieds, en bas, sont Yin. Notre dos est Yang et notre devant est Yin. La
MTC décrit chaque partie du corps, y compris nos organes et nos fluides,
comme Yin ou Yang et considère que la santé est la capacité à maintenir
en nous l’équilibre entre les deux, pour peu que nous vivions en harmonie avec les principes naturels de l’univers. Si le Yin ou le Yang est en
déséquilibre, il se peut que la maladie survienne. Si nous avons un excès
de Yin, nous avons une déficience de Yang. Cela se traduira entre autres
par les symptômes suivants : mains et pieds froids, pouls lent et fatigue.
Nous préférons le yoga à l’aérobie, nous prenons du temps à nous décider
et nous faisons preuve d’une grande écoute. Nous nous exprimons doucement ou calmement. Si nous avons un excès de Yang, nous avons une
déficience de Yin. Et cela se traduira entre autres par les symptômes suivants : constipation, lèvres sèches et forte transpiration. Nous avons facilement chaud, nous aimons rester actifs et nous déclenchons naturellement l’activité. Nous fonçons pour obtenir ce que nous voulons.
En Chine, la majorité de mes patients avaient une déficience de Yang,
alors qu’au Canada j’ai de nombreux patients avec une déficience de Yin.
Cet état de choses vient, selon moi, refléter la qualité Yang dominante de
la société canadienne et du monde occidental en général. L’activité, le
mouvement, la vitesse, la croissance, l’expansion, la jeunesse et le patriarcat sont les tenants et aboutissants de la culture occidentale. Bien entendu,
cette société n’est pas totalement Yang, mais son excès se révèle dans les
déséquilibres que je trouve chez mes patients canadiens. Afin d’équilibrer
l’aspect Yang de la culture occidentale, je préconise des activités Yin qui
font appel à l’intériorisation : se promener parmi les arbres, admirer un
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• Guérir le corps et l’âme Grâce à la médecine traditionnelle chinoise
coucher de soleil, rester assis sans bouger ou méditer sur un rocher. Ces
activités possèdent une qualité de quiétude, d’inactivité.
Vous vous demandez sûrement ce qui suscite ces excès ou ces déficiences. C’est le mouvement dynamique du Qi (prononcer « tchi »), un
concept fondamental en MTC.
comprendre ce Qu’est le Qi
En Occident, il n’existe pas de terme exact pouvant traduire le terme
chinois « Qi ». Même si on le désigne souvent par le terme « énergie
vitale », ce vocable ne rend cependant pas entièrement son sens. Le Qi est
l’énergie naturelle de vie qui engendre le changement et le mouvement.
C’est la force motrice et créatrice qui imprègne toute chose : les étoiles
qui scintillent, le ruisseau qui glougloute, l’organisme en décomposition.
Le pouvoir de cause à effet du Qi se trouve dans tout. Comme le vent,
le Qi est doté de la capacité à amorcer le changement et à engendrer
l’activité.
Le Qi est l’énergie qui crée la vie, notre
vitalité. Il est la force vitale qui anime notre
corps, notre esprit, notre cœur et notre âme.
Il est immatériel et invisible. Pourtant, il est
capable de générer de la matière et des effets
visibles, entre autres par la conception qui
permet à un bébé de se former. Le Qi possède une nature transformationnelle. Par
exemple, il permet à notre corps de se matérialiser et à l’eau de se changer en glace. Et
quand la glace fond, elle se transforme de
Figure 2 : Le qi
nouveau en eau. De façon similaire, quand
notre corps meurt, nous redevenons esprit. Les deux caractères chinois qui
composent l’idéogramme du Qi (voir figure 2) veulent dire « vapeur » et
« grain de riz non cuit ». La vapeur s’échappant du riz qui cuit représente
le Qi dans son état sans forme, alors que le riz symbolise l’aspect substantiel
et matériel de la matière. L’essence du Qi, cette force de transformation et
de changement du matériel à l’immatériel, et vice versa, est totalement
inhérente à ce concept.
ce Qui est dessus est dessous
• 25
Le mouvement du Qi dans notre corps touche toutes nos activités.
Quand j’étais enfant en Chine, on m’a appris que, lorsque le Qi se
condense, le corps physique se forme et que, lorsqu’il se disperse, le corps
physique meurt. Le Qi est ce qui engendre l’activité, entre autres notre
capacité à digérer les aliments, à bouger les jambes et à penser. Cette
énergie peut également se manifester sous forme de ressentiment ou de
boule dans la gorge, lorsque nous sommes tristes. Avec le concept du Qi,
les Occidentaux peuvent se voir d’une façon radicalement différente.
Mais il existe en Occident des expressions qui, comme « plein de vie »,
décrivent des personnes énergiques et dynamiques. À un niveau profond,
nous sentons qu’il existe un lien entre le mouvement de la force vitale et
la vie.
La science occidentale n’a pas encore prouvé l’existence du Qi, puisqu’on ne peut le voir sous le microscope, pas plus qu’on ne peut le disséquer ni le scanner. En revanche, cela ne veut pas dire qu’on ne peut pas
le sentir. Je vous propose un exercice tout simple. Amenez vos mains
devant votre ventre, paumes se faisant face. Rapprochez lentement vos
mains sans toutefois les laisser se toucher. Maintenant, écartez-les l’une
de l’autre. Répétez ce mouvement lentement (voir figure 3, à gauche).
Observez la légère tension, la chaleur, les picotements ou la pression entre
vos paumes. Il se peut que vous sentiez que l’air soit plus dense dans l’espace situé entre vos mains. C’est le Qi. N’essayez pas de comprendre le Qi
avec la raison. Essayez plutôt de le sentir.
Pendant que vous rapprochez vos mains, tendez légèrement les
doigts et les paumes (voir figure 3, à droite). Quand vous les éloignez
l’une de l’autre, laissez-les se détendre. Maintenant, déplacez lentement
les doigts de votre main droite au-dessus de votre paume gauche. Sans
toucher celle-ci, caressez la paume gauche du bout de vos doigts. Vous
sentirez peut-être une sensation de picotement. C’est le Qi qui sort de
vos doigts.
La science occidentale ne reconnaît pas l’existence du Qi. Pourtant, les
praticiens chinois travaillent à en harmoniser la circulation chez les gens
depuis plus de 3000 ans. Dans le corps, le Qi se déplace le long d’un réseau
de canaux, appelés « méridiens ». Une des choses les plus difficiles à saisir
pour les Occidentaux est le concept des méridiens. Pourquoi ? Parce qu’ils
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• Guérir le corps et l’âme Grâce à la médecine traditionnelle chinoise
Figure 3 : un exercice pour sentir le qi
sont invisibles. Ces méridiens courent le long du corps et relient les organes
vitaux à d’autres parties du corps. Ils n’existent pas dans l’anatomie occidentale. Avec l’acupuncture cependant, ce sont sur ces canaux, qui
s’ouvrent vers la surface de la peau en des points précis, que l’on plante de
minuscules aiguilles dont la fonction est de stimuler la circulation du Qi
dans le corps. Quand le Qi circule harmonieusement, nous sommes en
santé. Quand le Qi ne circule pas bien, la maladie survient. Les aiguilles
ont deux fonctions : soit elles intensifient la circulation du Qi dans certains
méridiens (tonification), soit elles la diminuent (dispersion). C’est ce qui
permet à l’énergie de s’équilibrer dans le corps et à ce dernier de retrouver
la santé. C’est ainsi que la MTC explique la façon dont l’acupuncture fonctionne. Ayant pu constater que l’acupuncture peut servir d’anesthésiant,
les médecins occidentaux en ont conclu que l’effet anesthésiant provient
peut-être du fait que les aiguilles stimulent les nerfs qui diffusent des
analgésiques naturels. Même si nous ne pouvons donner d’explication
rationnelle à l’acupuncture, son efficacité est absolument indéniable.
ce Qui est dessus est dessous
• 27
Le Qi est essentiel à notre corps pour que ce dernier puisse fabriquer
du Sang. Le Qi fait également circuler le Sang dans les vaisseaux sanguins
et les méridiens. Il existe donc un rapport d’interdépendance entre le Sang
et le Qi. Autant le Qi est nécessaire pour la fabrication et la circulation du
Sang, autant le Sang est nécessaire pour nourrir les organes qui génèrent
et soutiennent le Qi. Le Qi et le Sang sont donc indissociables. Sans le
mouvement du Sang, il n’y aurait aucun véhicule pour transporter l’énergie sans forme, le Qi. Inversement, le Qi fournit la force motrice qui anime
le Sang. De toute évidence, le concept du Sang en MTC diffère de celui de
l’Occident. En MTC, le concept du Sang renvoie non seulement au fluide
qui coule dans nos veines, mais aussi à la qualité énergétique qui amène
le Sang à circuler dans le corps et à le nourrir2. Étant donné que le Sang
est Yin et que l’énergie est Yang, l’harmonie entre les deux symbolise un
tout qui se manifeste par la santé.
Le Sang est emmagasiné dans le Foie et le Qi, dans les Reins. Je dis
souvent à mes patients que les praticiens chinois connaissent bien les principaux organes propres à l’anatomie de la médecine occidentale, mais que,
malgré le fait que ces organes portent le même nom, ils sont très différents.
La médecine chinoise considère ces organes comme des structures physicoanatomiques dont les fonctions sont similaires à celles de la médecine occidentale. Par contre, elle les situe dans un cadre énergétique plus vaste de
fonctionnement et de rapport qui comprend les méridiens reliant les
organes à d’autres parties du corps. Ce réseau d’appariement d’organes, ou
complexes d’organes, porte aussi le nom d’organes Zang-Fu, en MTC.
les orGanes ZanG-Fu
Le terme Zang-Fu lui-même sert à désigner le principe du Yin et du Yang
tel qu’on l’applique aux organes. Les organes Yin sont appelés Zang et
les organes Yang, Fu. Chacun des cinq organes Zang – Foie, Cœur, Rate,
Poumons et Reins – a des organes Fu correspondants – respectivement
Vésicule biliaire, Intestin grêle, Estomac, Gros Intestin et Vessie. Chaque
paire d’organes est associée à un organe sensoriel, par exemple les yeux
2. N.D.T. : C’est la raison pour laquelle l’auteur met un S majuscule au terme « sang »
chaque fois qu’il renvoie à ce concept. Sinon, il est écrit avec un s minuscule.
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• Guérir le corps et l’âme Grâce à la médecine traditionnelle chinoise
et les oreilles, ainsi qu’à des tissus (voir tableau 1). Le Foie est chargé de
la bonne circulation du Qi et du Sang, il entrepose le Sang, contrôle les
tendons et nourrit les yeux. Cela vous paraîtra étrange aussi longtemps
que vous ne savez pas que les maladies du Foie, entre autres l’hépatite,
font jaunir le blanc des yeux.
La théorie des organes Zang-Fu considère notre corps et les fonctions
de ses organes sous l’angle de l’interdépendance avec tous les autres complexes d’organes. La Rate transforme les aliments en Qi alimentaire, dont
le Cœur a besoin pour fabriquer le Sang. Les Reins fournissent du Qi au
Cœur pour fabriquer le Sang. Les Poumons aident à transporter le Qi des
aliments au Cœur pour faciliter la production de Sang. Le Sang circule dans
nos vaisseaux sanguins en raison du Qi présent dans le Cœur. Le bon fonctionnement de la Rate s’assure que le Sang soit contenu entre les parois
des vaisseaux sanguins. Le Foie gouverne aussi bien la régularisation de la
circulation du Qi que l’entreposage du Sang et le contrôle de son volume.
Chacun des complexes d’organes entretient donc un rapport très étroit
avec les autres, ce qui fait que notre santé dépend de l’harmonie de leur
fonctionnement. Et ce fonctionnement est totalement tributaire de la régularité de la circulation du Qi et du Sang dans ces complexes d’organes. S’il
y a blocage dans un quelconque organe, il y a aussi « Stagnation » dans cet
organe. S’il y a manque de Qi, il y a « Déficience ». S’il y a trop de Qi, il y
a « Excès » dans cet organe. Et vu que chacun des complexes d’organes
entretient un rapport étroit avec les autres, ces déséquilibres ont de grandes
répercussions sur tous les autres organes et peuvent se traduire par la
maladie.
Des milliers d’années d’observation et de pratique ont permis à la MTC
de trouver les symptômes des profonds déséquilibres des organes ou des
méridiens. Par exemple, la stagnation du Qi dans le Foie s’exprime par des
migraines et des menstruations irrégulières. Ensemble, ces symptômes
constituent un schème qui souligne le déséquilibre sous-jacent à l’origine
des problèmes. Les rapports entre les complexes d’organes peuvent s’expliquer par les classifications et les lois du mouvement telles qu’elles sont
mises de l’avant par la théorie des Cinq Phases (ou Éléments). Celle-ci
décrit la façon dont le Qi interagit et ce qui est nécessaire pour le ramener
à l’harmonie.
ce Qui est dessus est dessous
• 29
tABLeAu 1 : Les oRGANes ZANG-Fu
oRGANes
ZANG
Foie
Cœur
Rate
Poumons
Reins
FoNCtioN
PReMiÈRe
entrepose
le sang,
assure la libre
circulation
du Qi
régit la
transformation du Qi
des aliments
en sang,
gouverne la
pensée, la
conscience
et l’esprit
(shen)
régit la
transformation des
aliments en
Qi ainsi que
le transport
du Qi et
maintient le
sang dans
les vaisseaux
sanguins
régit la
respiration et
la transformation du Qi
de l’air,
achemine le
Qi transformé
des aliments
vers le cœur
entrepose
le Qi, régit la
reproduction,
le développement et la
croissance
Intestin
grêle
Estomac
Gros
Intestin
Vessie
régit
l’entreposage
et la sécrétion
de la bile
reçoit les
aliments
digérés et
« sépare
le pur de
l’impur »
transforme
les aliments
solides et les
liquides
responsable
de l’élimination des
matières
fécales
responsable
de l’entreposage et de
l’élimination
de l’urine
oRGANes
seNsoRieLs
Yeux
langue
Bouche
nez
oreilles
tissus
tendons,
ligaments,
ongles
Vaisseaux
sanguins
muscles,
graisse
peau,
cheveux
os, moelle,
cerveau
oRGANes Fu Vésicule
biliaire
la théorie des cinQ phases (ou éléments)
Le mouvement harmonieux du Qi dans le monde vient refléter
l’équilibre entre les cinq éléments, ou phases, de fond : Bois, Feu,
Terre, Métal et Eau. Le Bois engendre le Feu. Le Feu brûle le Bois, ce
qui enrichit la Terre. Dans la Terre, il y a le Métal. Le Métal, fondu par
le Feu, donne l’eau (voir figure 4). Tous les phénomènes du monde
naturel correspondent à l’une des Cinq Phases, qui sont en constants
mouvement et changement. Par exemple, le printemps correspond au
30
• Guérir le corps et l’âme Grâce à la médecine traditionnelle chinoise
Bois, l’été au Feu, la fin de l’été à la Terre, l’automne au Métal et l’hiver
à l’Eau. Ces phases n’ont pas été attribuées de façon arbitraire par les
anciens. Au contraire, les qualités de chaque phase correspondent aux
caractéristiques, formes et fonctions du phénomène auquel celle-ci est
attribuée. Par exemple, le Bois représente la phase active de croissance,
raison pour laquelle on l’a associé au printemps. Les saisons changent
identiquement à la façon dont les phases changent. Le printemps amène
l’été, qui amène la fin de l’été, qui amène l’automne, qui amène l’hiver.
En plus d’être associées aux saisons, ces Cinq Phases sont aussi associées
à des climats, à des couleurs, à des saveurs… en fait à tout ce qui existe dans
l’univers. Et puisque chacun d’entre nous est un microcosme, chacun possède en soi une combinaison unique des influences de ces Cinq Phases.
Chacun des cinq complexes d’organes correspond à une des phases. Le
tableau 2 illustre la façon dont le corps humain est relié aux Cinq Phases,
cinq cycles de vie, cinq émotions, cinq sens, cinq saveurs, cinq tendances,
cinq vertus, cinq saisons, cinq climats, cinq directions et cinq couleurs.
cycle d’engendrement
cycle de contrôle
Feu
Bois
teRRe
eAu
MÉtAL
Figure 4 : Les rapports entre les Cinq Phases
ce Qui est dessus est dessous
• 31
La médecine traditionnelle chinoise, pratiquée depuis des millénaires,
s’attache davantage à prévenir la maladie qu’à la traiter. Son approche
holistique visant à harmoniser les aspects physique, émotionnel, mental
et spirituel de l’être nous amène à nous percevoir comme un tout. Ce livre
exceptionnel, empreint de sensibilité et de bon sens, invite les femmes à
renouer avec leur force de guérison à chaque étape de leur vie. Il propose
entre autres des exercices de Qi Gong, des massages de points d’acupression, des recettes et des techniques de méditation qui stimulent la
vitalité et permettent de rester en bonne santé. Les femmes apprendront
à développer de l’amour et du respect pour leur corps et à mener une vie
plus équilibrée et plus consciente.
Ce livre a été publié précédemment sous le titre
Reflets de la lune sur l’eau
Xiaolan Zhao a d’abord travaillé en Chine comme
de s’intéresser à la médecine traditionnelle chinoise
(MTC). Elle pratique aujourd’hui la MTC dans son cabinet de Toronto, qui compte plus de 12 000 patients.
du même auteur
ISBN 978-2-7619-3361-2
Design graphique: Nancy Desrosiers | Photo : © Tetra Images/Corbis | Photo de l’auteur : © Anka Czudec
chirurgienne formée à la méthode occidentale avant

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