N°Spécial Libération de Paris.qxp - Hôpitaux Universitaires La Pitié

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N°Spécial Libération de Paris.qxp - Hôpitaux Universitaires La Pitié
Hôpitaux Universitaires
La Pitié Salpêtrière - Charles Foix
C
F
X
INFOS
LA LETTRE DE L’HÔPITAL
LIBÉRATION
DE
PARIS :
N° 106 - août
2014
CHARLES FOIX POUR SES PROFESSIONNELS
NUMÉRO SPÉCIAL
"La mémoire doit encore trouver les mots
quand les voix se sont éteintes"
Francois Hollande, discours au mémorial de Caen en juin 2012
Il y a 70 ans que le peuple de Paris s'est soulevé pour sa
libération à l'appel lancé par le Colonel Rol-Tanguy, au nom
des organisations parisiennes de la Résistance qui depuis
plusieurs jours avaient initié les mouvements de grève,
préalable nécessaire de l'insurrection, notamment parmi les
personnels de la Préfecture et des Transports Urbains.
Nous entrons probablement dans la dernière décennie qui
connaîtra encore des témoins vivants de l'occupation nazie
et de ses actes de barbarie perpétrés dans toute l'Europe.
C'est donc l'exigence du devoir de mémoire qui nous réunit
aujourd'hui dans cet hôpital, et dans cette ville où l'engagement collectif dans la lutte contre l'occupant a été précurseur,
déterminé, et violemment réprimé par les arrestations,
l'emprisonnement, les tortures, la déportation, les exécutions.
Pendant ces années de plomb, les hôpitaux, fidèles à leur
tradition pluriséculaire, grâce à la mobilisation des personnels,
parfois au péril de leur vie, ont su rester des lieux
d'accueil et de solidarité, pour les personnes pourchassées
par l'occupant et les collaborateurs.
Tract gommé
"Vivre Libre ou mourir".
Coll. Musée de la
Résistance nationale
(Champigny-surMarne).
Ce tract parachuté en
France en mai et juin
1944 avait été conçu
et imprimé à Londres
par le Service de
diffusion clandestine
du commissariat
national à l'Intérieur.
18x24 cm
Parce que la guerre était mondiale, les luttes antifascistes
ont fédéré de manière indissociable les populations d'OutreMer et de l'Empire Colonial, des patriotes venus de toute
l'Europe se battre sur le sol de France contre la terreur nazie,
Coll. Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne).
Photo Presse Libération.
les forces françaises libres qui avaient refusé l'armistice de
1940, la résistance de l'intérieur, et les troupes alliées dont le
débarquement fut aussi un terrible sacrifice humain. Les
premiers chars français qui pénètrent dans Paris portent les
noms des villes espagnoles victimes dès 1936 de la terreur
fasciste parce qu’ils sont conduits par des républicains espagnols.
Attachons-nous donc à connaître cette histoire pour nous prémunir
collectivement contre les maux qui nous ravagent à nouveau
avec la peur de l'autre, et de la tentation de l'autarcie.
La reddition des troupes allemandes est signée à la gare
Montparnasse par le Général Von Choltitz, coupable de crimes
de guerre contre les populations civiles en Crimée, et d'une
répression sauvage contre les résistants parisiens exécutés
dans le bois de Boulogne et à Vincennes jusqu'à la dernière
minute des combats. Elle est recueillie pour la Résistance
par le Colonel Rol-Tanguy et Maurice Kriegel-Valrimont, et
Place de la Concorde, 26 août 1944. Coll. Musée de la
Résistance nationale. Photo Presse Libération. “Libération de
Paris : les parisiens se pressent pour acclamer leurs libérateurs.
fondait, entre autres, dans un pays économiquement
exsangue, les bases ambitieuses de notre système de
santé et de solidarité pour que ne revienne jamais
la tentation, pour les plus démunis, de succomber aux
ravages des idéologies anti-démocratiques.
C'était hier un événement immense pour tous les peuples
d'Europe opprimés que d'assister à la libération de la
capitale du pays des droits de l'homme.
Il est de notre responsabilité de transmettre aux générations
futures le souvenir et le sens de ces combats, qui,
jusqu'au dernier jour, firent de nombreux morts, pour en
faire une histoire susceptible de nous éclairer aujourd'hui
et demain.
Marianne Bensaid
Directrice
Barricades, quartier du Luxembourg. Coll. Musée de la Résistance
nationale. DR.
pour les forces françaises libres, par le Maréchal Leclerc
que, depuis 1943 et depuis Alger, de Gaulle avait symboliquement désigné comme gouverneur militaire de Paris
toujours occupé par les nazis.
Comme chaque année, l'hôpital donne à voir, en cet
anniversaire, des images de cette histoire, où se mélange la
liesse populaire avec la tristesse de ceux qui, rescapés ou
endeuillés, ont souffert de la barbarie nazie.
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Les professionnels de santé tiennent une place importante
dans les combats, et donc sur ce patrimoine photographique.
Ils ont en effet préparé l'organisation des soins qui allaient
être nécessaires pendant l'insurrection, alors que
l'administration de l'Assistance Publique était engagée
dans une collaboration que notre institution a reconnue et
condamnée dans son travail de mémoire.
A lire, à voir
http://www.filmsdocumentaires.com/films/1143-vingt-ans-en-aout-1944
Vingt ans en août 1944 (80 mn)
Le parcours d'une femme résistante, Madeleine Riffaud,
alias "Rainer" sous l'occupation.
Soixante ans plus tard, cette femme d'exception, grand
reporter, écrivain et résistante, se souvient. Elle raconte
avec ferveur son combat contre l'occupant nazi, les
séances de torture (elle est emprisonnée à Fresnes pour
avoir tué un soldat allemand), les joies et les chagrins de
la libération de Paris. Un être rare et courageux qui
raconte sa lutte pour la libération.
Ce film est proposé sur le DVD avec La voix de Jean
Moulin et Les Témoins de la libération de Paris
http://www.aveyron.com/histoire/parislib5.html
Dossier : La Libération de Paris vue par deux
Aveyronnais. Le journal de Geneviève Lépine. Vendredi
25 août. Paris pavoise.
http://m.leparisien.fr/val-de-marne/un-film-sur-l-infirmiere-heroique-dela-liberation-17-06-2006-2007082179.php
Un film sur l'infirmière héroïque de la Libération. Pour en
savoir plus : www.heroine-lefilm.com
http://liberation-de-paris.gilles-primout.fr/le-bombardement-du-26-aout
1945, La Salpêtrière, une salle réservée aux déportés malades.
Archives AP-HP.
C'est donc aussi l'histoire de nos anciens que nous honorons
aujourd'hui. Quelques mois plus tard, les professionnels
de l'AP-HP seront aussi amenés à soigner les déportés à
leur retour, les camps de concentration n'ayant été libérés
que dans les premiers mois de 1945.
Célébrer la Libération, c'est aussi penser au message
d'espoir et d'égalité élaboré par le Conseil National de la
Résistance aux heures les plus noires de la répression
orchestrée par les nazis et leurs séides collaborateurs.
Le programme du CNR dont le rédacteur fut Pierre Villon,
LA LETTRE DE L’HÔPITAL
Le bombardement du 26 août : en cette fin d'après-midi
du 26 août 1944, j'avais demandé asile à mon oncle et à
ma tante, chez qui se trouvait déjà ma mère, au numéro
4 de la rue Mornay. Après le dîner nous avons prolongé
la soirée qui était chaude dans la salle à manger dont la
fenêtre donnait sur la rue de l'Arsenal, alors que les
ouvertures sur cour laissaient voir les murs et les toits du
Quartier de cavalerie de la Garde Républicaine dans la
caserne des Célestins. Un bruit confus montait jusqu'à
nous par la croisée largement ouverte, ce qui nous reposait des éclatements de grenade et du crépitement des
mitrailleuses des jours précédents. C'est alors que de
façon tout à fait imprévue le cri strident de la sirène
d'alerte retentit dans l'atmosphère ouatée de ce soir d'été ….
Témoignage de Robert Genty conservé par le Musée de
la Garde Républicaine.
CHARLES FOIX POUR LES PROFESSIONNELS DE SANTÉ
Discours du 70ème anniversaire
de la commémoration
de la Libération de Paris
Jacques POURRE
Secrétaire Général du Syndicat CGT
de l'hôpital Charles Foix
Hommage aux combattants martyrs du ghetto
de Varsovie - dessins de Maurice MENDJISKY
1940 due à l'incompétence des généraux et à la
pagaille orchestrée au sein de l'armée.
La France fut offerte par Pétain à Hitler qui assura la
mise à sac de notre industrie et le pillage de nos richesses
avec l'aide de collaborateurs français d'extrême droite.
Suivirent quatre années de souffrances physiques et
mentales, d'horreurs, de tortures pour ceux qui, avec
honneur et dignité, se battirent pour libérer notre pays
de l'oppression nazie.
N'oublions pas
ces démocrates antifascistes italiens, espagnols, allemands, juifs d'Europe de l'est qui, au côté des français,
se battirent pour des idéaux nés de la révolution française et de la république.
N'oublions pas
BIENVENUE A TOUS
La CGT remercie les personnalités présentes à cette
cérémonie commémorant la libération de Paris organisée
par le syndicat, et au travail de mémoire que nous
devons aux combattants de la liberté que furent les
résistants et à la population parisienne insurgée et
parmi eux, les hospitaliers qui participèrent au soulèvement de la capitale.
Nous apprécions l'aide précieuse apportée par Madame
Bensaid, directrice de l'établissement, à cet hommage.
L'actualité rend plus que nécessaire cet instant avec
la montée, dans notre pays, d'un parti politique dont
l'idéologie prend ses racines dans le racisme, la xénophobie, la haine de l'autre et la collaboration issue de la
deuxième guerre mondiale.
les communistes, gaullistes, socialistes, combattants issus
de mouvements catholiques et juifs qui donnèrent leurs
vies pour un monde meilleur. Malheureusement dans ce
combat, des mauvais coups furent portés à la résistance
par des français collaborateurs tels que les miliciens,
pétainistes, bandits à la solde d'une idéologie destructrice.
L'histoire doit reconnaître
le combat des personnels hospitaliers qui cachèrent de
nombreux combattants ainsi que des juifs à l'hospice
d'Ivry mais aussi des soldats russes dans le clocher de
l'église et des aviateurs alliés dans les caves de
l'établissement. Ivry, ville insoumise, eut plusieurs
réseaux de résistance au sein de l'établissement.
La crise économique de 1929 amena, en Allemagne, la
création d'un parti populiste, revanchard, raciste et
antijuif ayant à sa tête Hitler, soutenu financièrement
par le patronat et la grande bourgeoisie sur fond d'anticommunisme et d'antisémitisme et de soi-disant race
aryenne supérieure.
Son discours basé sur l'idée d'une grande Allemagne ne
pouvait que déboucher sur une guerre, son but étant
une redistribution des zones d'influences économiques
permettant l'essor de l'industrie allemande.
Le laisser faire des gouvernements occidentaux face à
la volonté d'expansion et à l'autoritarisme germanique
par réflexe de classe "plutôt Hitler que le Front
Populaire” permit à l'Allemagne d'envahir la
Tchécoslovaquie puis la Pologne. Ceci poussa la
France à entrer en guerre.et aboutit à la débâcle de juin
LA LETTRE DE L’HÔPITAL
25 août 1944
Bloc
opératoire à l’Hôtel Dieu
dans une cave
Etre ici aujourd'hui
c'est rendre hommage à nos collègues, ainsi qu'à ceux
qui, dans la nuit noire de l'occupation, ont écrit un
programme social à mettre en place à la libération de
CHARLES FOIX POUR LES PROFESSIONNELS DE SANTÉ
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notre pays, programme du Conseil National de la
Résistance appelé "LES JOURS HEUREUX "
CORENTIN CELTON
Préposé à l'Assistance Publique, secrétaire de la fédération
des services publics CGT, il fut fusillé au Mont Valérien.
Notre pays bien que ruiné et dévasté put mettre en
place ce programme novateur qui permit à la France de
se reconstruire avec des acquis sociaux importants.
Naissance de la sécurité sociale en particulier qui
débouchera sur la création d'un système de santé
égalitaire en termes d'accès aux soins et qui fit l'admiration
du monde entier.
Aujourd'hui ce système a été attaqué sur ses fondements et continue à subir les outrages des gouvernements successifs qui oublient que la sécurité sociale
c'est "soigner de la naissance à la mort et d'apporter à
chacun un même traitement que l'on soit riche ou
pauvre".
La loi HPST et la tarification à l'activité engendrent un
sous financement de nos hôpitaux et une baisse de
qualité du service rendu au patient.
"Nous devons prendre conscience que l'accès au
soin pour tous n'est plus garanti"
Ayons une pensée
ROBERT DEGERT
Il vécut à l'hospice,
engagé dans les FFI,
arrêté le 1er juillet
1944, il fut fusillé le 1er
aout 1944, les nazis
l'empalèrent sur une
grille pour l'exemple.
pour ce peuple de Paris qui se souleva et permit la
libération de la capitale sans trop de pertes humaines,
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à ces hospitaliers qui au cœur des combats soignèrent
ces combattants,
JEAN-CHARLES BLOCH
Chirurgien à l'hospice, il fut poussé au suicide parce
qu'il était juif.
à nos collègues de Charles
Foix ; je vous demanderai donc,
en leur honneur, d'observer
une minute de silence à la fin
de cette allocution.
MARIE JEZEQUEL
Aide soignante à l'hospice
d'Ivry début 1944, elle prend
la parole au réfectoire ;
dénoncée, elle partit pour le
camp de concentration de
Ravensbrück d'où elle ne
revint jamais.
LA LETTRE DE L’HÔPITAL
Puis nous irons dans l'hôpital fleurir les plaques commémoratives de ces collègues
CHARLES FOIX POUR LES PROFESSIONNELS DE SANTÉ
Hôpital Charles Foix - août 2014