L`inceste : d`un état des lieux à une pratique de la clinique

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L'inceste : d'un état des lieux à une pratique de la clinique
Extrait du Espace d'échanges du site IDRES sur la systémique
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L'inceste : d'un état des lieux à
une pratique de la clinique
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pour stimuler des échanges -
Date de mise en ligne : samedi 12 mars 2011
Description :
Résumé
Le phénomène de l'inceste recouvre de multiples facettes qui rendent complexes son approche, sa compréhension et son traitement. Un état des lieux actuel
montre à quel point, les études sur l'inceste balbutient encore, notamment dans des domaines aussi variés que l'analyse des données, les protocoles d'accueil de la
parole de l'enfant victime, l'institutionnalisation de la prise en charge, la psychothérapie de l'enfant incesté, l'appréhension des familles à transactions
incestueuses, etc. L'inceste coïncide avec une réalité sociétale manifeste. La portée épidémiologique de l'inceste est telle qu'il semble difficile d'en rapporter des
statistiques exactes, tout juste des chiffres glaner dans différents systèmes de recueil de données. Difficiles à nommer et à identifier, les affaires d'incestes sont
des histoires de sang-mêlé, c'est-à-dire des situations qui impliquent des processus psychopathologiques d'aliénation relationnelle, de traumatisation sexuelle et
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de victimisation, laissant sur le carreau d'innombrables victimes de tout âge et de toute condition sociale. Ces histoires d'inceste interpellent de plus en plus les
praticiens de la santé mentale. Les effets à moyen et long terme sont parfois dévastateurs. L'acte d'inceste relève d'une contamination psychique. Étant donné la
particularité de ces situations et l'extrême souffrance des victimes, certaines balises éthiques s'imposent à l'intervention thérapeutique et nous invitent à innover.
Dans le champ des thérapies, de nouveaux défis restent à relever. Il importe de sortir des sentiers battus. Les innovations thérapeutiques existent, comme l'art
thérapie, les thérapies psychocorporelles avec média, ... centrées d'avantage sur le vécu émotionnel des victimes, leur bien-être psychique, la réparation
symbolique et la libération du stress post traumatique. La prise en charge des situations d'inceste représente un travail particulièrement lourd, complexe,
envahissant et angoissant. Le traitement individuel de la victime ne peut faire l'économie d'une approche plus systémique de la famille. Depuis des années, les
systémiciens apportent de nouvelles réflexions et développent des stratégies répondant aux situations d'inceste. Ayant acquis de meilleures connaissances sur les
transactions incestueuses, ils proposent des thérapies familiales visant chaque protagoniste concerné par l'inceste. Ces thérapeutes s'intéressent tout
particulièrement aux thérapies contextuelles et attirent l'attention sur des questions concernant l'éthique et l'équité relationnelle, les loyautés, la confiance et le
processus de parentification.
Mots-clés : inceste, incidence, impact, traumatismes, souffrance psychique, thérapies, systémique, éthique relationnelle, loyauté, confiance, parentification.
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Sommaire
• L'inceste : d'un état des lieux à une pratique (...)
• L'inceste, une confusion de langue entre (...)
• L'origine sémantique et mythologique du mot (...)
• Par définition, l'inceste est un abus sexuel
• En guise de conclusion
• Sources bibliographiques
L'inceste : d'un état des lieux à une pratique de la
clinique
Yves-Hiram Haesevoets
« Autant le fantasme du désir incestueux pour le père est structurant pour la féminité de la fille, autant il est
ravageant pour sa libido s'il vient à se réaliser (avec le père ou le frère). C'est aux dépens de sa dynamique qu'elle
s'y soumet, coupable ou non, d'ailleurs avec le sentiment d'être une victime sacrificielle déshumanisée. Dès lors,
porter le nom de cet homme qui a voulu jouir d'elle, hors de la loi dont il était le représentant, c'est pour la fille un
déshonneur. (...) Accomplir le désir incestueux produirait une sorte d'autisme à deux, entre des êtres fusionnés. Car
il y a dédynamisation s'il y a possession génitale de celui qui a été le modèle pour grandir. »
Naître une victime, Françoise Dolto (1985 : 243)
L'inceste, une confusion de langue entre l'adulte et
l'enfant
La pratique clinique est de plus en plus interpellée par des histoires d'inceste. D'un point de vue humain, cette
problématique relève du non-sens existentiel. L'inceste essaye de détruire le temps psychique, en agressant l'ordre
symbolique des choses et la structure inconsciente du langage. En détruisant le désir de l'autre, l'inceste fige ou
bouleverse l'agencement des générations et engendre le trauma. La plupart des histoires d'inceste rapportées par
l'expérience clinique et le témoignage des victimes montrent que la prégnance de l'abus sexuel est telle que la
plupart des enfants sexuellement incestés sont aliénés à une vie quotidienne pauvre en sens.
L'enfant qui vit une situation incestueuse s'y laisse souvent prendre à partir d'une quête affective (le langage de la
tendresse) qui rencontre chez l'adulte un désir passionnel prohibé et non refoulé (le langage de la passion) [1] . La
réalisation de ce désir abolit la distance nécessaire à l'individuation de l'enfant et à son développement global. Au
risque d'éprouver une angoisse de morcellement ou d'anéantissement, l'enfant se défend en évitant de comprendre.
À cette fin, il élabore des mécanismes de survie qui maintiennent l'événement réel hors de portée du champ de la
mentalisation (scotomisation de la réalité, syndrome d'accommodation et clivage du moi). La clinique de l'inceste met
en évidence la confusion des rôles générationnels et sexuels au sein de la famille. La famille incestueuse se
caractérise par l'absence d'un triangle oedipien stable, par défaut d'un tiers ; un tiers, qui, subordonné au désir, rend
accessible la différenciation des sexes et des générations par l'interdit édicté par la Loi du père, celle qui signifie le
tabou de l'inceste. « La loi qui interdit (l'inceste) nous contraint à donner, l'inhibition nous invite au partage, l'angoisse
nous incite à la rencontre. » (Cyrulnik, 1993 : 195)
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L'inceste est un amour sans forme
L'inceste est un amour sans forme, sans distance. Alors que la distance est nécessaire pour mettre en place le rituel
qui aménage l'affectivité et transforme la violence en agressivité libératrice. Ceux qui vivent l'inceste n'éprouvent pas
le Sacré. Ainsi, il existe des lignées familiales où l'inceste se répète à travers les générations comme un jeu intime
qui n'aurait aucune raison d'être interdit ; la sexualité y jouerait le rôle de liant affectif. Par contre, ceux qui subissent
l'inceste éprouvent de l'horreur, parce qu'ils vivent dans la représentation du Sacré, lequel massacre une grande part
de leur vie psychique.
L'attachement empêche l'inceste, et à l'origine, la loi qui interdit l'inceste est vivante, émotive et naturelle. Ensuite,
elle est devenue religieuse, morale, culturelle et langagière. L'ensemble des codes qui gèrent l'attachement se
retrouve dans le monde animal libre. Ainsi, la plupart des primates non-humains développent naturellement des
conduites d'évitement de l'inceste. Dans toute société humaine, l'obligation d'être adulte, des êtres-adultes, repose
sur l'intégration des interdits en tant que structures et représentations surmoïques. Dès lors, même s'il est présent
émotivement, l'interdit de l'inceste doit s'énoncer.
L'inceste est une histoire de haine et de sang-mêlé
Une histoire d'inceste est souvent une histoire de haine et de sang-mêlé. Une haine qui agit en réponse à la pulsion
de mort. Comme l'écrit Bigras (1987 : 62-71), l'inceste,« c'est du bruit autour de la mort », c'est faire sécession au
langage. Il ajoute que l'inceste mis en actes,« c'est quand deux corps font du hors-parole et du bruit autour de la
mort ». L'inceste est une approximation sexuelle qui abolit le fantasme et ne permet pas une différenciation de la
relation. C'est alors que la rencontre de l'autre arrive traumatiquement par le biais de la sexualité.
Les liaisons incestueuses se nouent à partir d'une fusion de semblable à semblable et autour des « retrouvailles
nostalgiques avec le temps », c'est-à-dire avec l'Archaïque. Là où le temps s'arrête, l'espace de l'étreinte interdite est
clos, parce que celui qui inceste l'autre lui porte un même regard. Il reflète sur le corps de l'autre, pris comme miroir
de soi, sa propre image, attiré par le vide et l'absence de l'autre,« au risque d'entraîner l'arrêt du langage, le silence
et la mort » .« L'inceste dénoue les liens que le langage a tissé autour des choses. Il détruit les points d'ancrage qui
permettent de nommer et de séparer les objets ». (C. Alexandre-Garner, 1987:183 et 190)
L'inceste, c'est du non-sens à l'état pur
L'inceste appartient au registre du non-sens. Il empêche la circulation et l'échange de la parole,« en paralysant les
mots, il instaure le silence » (C. Alexandre-Garner, 1987:188). À l'intérieur de ce silence naît l'espace clos coupé du
monde extérieur dans lequel le couple incestueux, cette dyade primitive, attend la mort ou la renaissance. L'inceste
appartient également au registre du Sacré. Toutefois, si le sacré suscite autant la fascination que l'horreur, il n'est
pas appropriable.
L'inceste est un contre-pouvoir à l'envers et un contre-temps
L'inceste est une sorte de contre-pouvoir, une tentative de revenir à des étapes antérieures de l'évolution
psycho-sexuelle humaine qui interdisent la promotion des générations. L'inceste est comme une force guerrière, qui
permet l'accès à un pouvoir total, c'est-à-dire la conquête de l'immortalité et la jouissance extrême. L'inceste est un
moyen non chaste, impur, un sacrilège qui entretient l'utopie de l'éternité. L'inceste arrête le temps et signifie un
retour au même, une boucle sur sa propre origine, une renaissance par enfant interposé, un retour au cloaque
intra-utérin trop étroit et étouffant qui se contracte non pour donner la vie, mais plutôt la mort. L'inceste en tuant le
temps, nie l'espace, la distance, les séparations, ... et entretient la fusion, la collusion et le collage des semblables ;
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rejetant la coupure entre les mêmes, rendant impossible la castration symbolique, l'accès au symbolique, au langage
et aux fantasmes oedipiens. L'inceste ressemble également à une lame à double tranchant qui blesse l'objet
sacrificiel et qui se retourne contre l'abuseur-instigateur.
L'inceste est aussi un processus de victimisation
L'inceste coïncide aussi avec un lent processus de victimisation où victime et auteur jouent une partition tragique qui
sonne comme le trépas de la pulsion de vie. Le processus de victimisation sexuelle de l'enfant est une véritable
relation d'emprise, c'est-à-dire un processus d'aliénation mentale comparable aux manipulations psychiques
pratiquées dans les sectes ou d'usage courant chez les publicitaires qui ciblent des publics de plus en plus jeunes.
Tout y est faussé et prémédité, la passion télescope la raison, les sentiments des victimes sont bafoués et exploités,
le désir est émoussé de manière artificielle, les émotions authentiques sont inhibées, les émotions verrouillées et la
pensée individuelle est annihilée. De manière insidieuse, le fonctionnement affectif de l'agresseur conditionne la
victime à se soumettre à des transactions malsaines et/ou pathologiques. La vulnérabilité de l'enfant est ainsi
exploitée suivant des stratégies dont l'efficacité est redoutable. Les effets post-traumatiques du processus de
victimisation sexuelle fonctionnent ensuite comme une onde de choc symptomatique qui perturbe autant l'enfant que
son entourage.
L'origine sémantique et mythologique du mot inceste
Le mot inceste serait apparu dans les écrits religieux vers 1350. Ce terme vient du latin incestus, in-cestus,
non-chaste, impur, souillé ; son antonyme, castus, terme religieux qui possède une double origine, d'une part,
exempt de faute, d'impureté, de souillure et d'autre part, instruit, éduqué, bien dressé, conforme aux règles et aux
rites ; ses confluents étymologiques sont castrare, couper, émonder, châtrer, dont l'adjectif est castus, soumis à la
règle et au manque, et castigare, châtier, corriger, instruire ; castrare est issu de la même racine indo-européenne
kas, couper, retrancher que carere, ne pas avoir, être privé de ; le mot inceste est étymologiquement marqué des
signes coupure, castration, chasteté et éducation.
Un déplacement sémantique permet de trouver une parenté étymologique entre inceste et sexe : en effet, le mot
sexe vient du latin sexus, construit à partir du participe passé secatus, du verbe secare, couper, lui-même issu du
radical indo-européen sek, cousin étymologique de signum, signe ; secare, secatum désigne la marque faite par
coupure, par incision ; la coupure fonde le signe, le signe permet de reconnaître ; le marquage permet de signifier ;
couper et castrer n'en finissent pas de se rejoindre à l'intérieur du lexique humain. La fonction symbolique des mots
prend ici toute son importance.
Parallèlement aux glissements sémantiques, des translations des mythes vers les rites s'observent : entre autres
exemples, la coupure du pénis, la castration, son déplacement vers les rites de circoncision et la création du concept
d'angoisse de castration en psychanalyse, et la relation entre le mythe de l'égorgement d'Isaac et la circoncision, en
passant par le rite de saignement de l'animal sacrificiel,...
Dans le langage mythologique, posséder sexuellement, c'est connaître, c'est approcher du Sacré et c'est interdit. La
sexualité touche à la sacralité, en tant qu'instrument ou manifestation des puissances qui ont créé le monde dans sa
diversité et le préservent dans son être. Les hommes identifient leurs fantasmes à ceux que les Dieux mettent en
actes. Fascinés et dominés par les Dieux, auxquels ils s'identifient, les êtres humains sont avides de leur ressembler,
au péril de leur vie. Afin de survivre à cette dangereuse fascination, les hommes ont inventé des rites ; les désirs y
sont domptés et ritualisés. Le rite permet d'accéder à l'ordre symbolique et de sublimer le Sacré. Aux confins
extrêmes de l'accomplissement de l'inceste, on retrouve le thème de l'accouplement avec le Divin. Le thème
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mythique de l'inceste, avec ses variantes, ses mutations et ses vicissitudes, prend racine au coeur du mythe unique
de l'Origine, c'est-à-dire, le grand Tout où domine l'indifférenciation incestueuse.
Dans son article De l'Inceste dans la mythologie grecque, Rudhardt (1981 : 731) explique que« Les mythes relatifs
aux dieux s'ordonnent dans le système d'une cosmogonie conduisant de l'unité d'un premier être ou d'un premier
couple à la multiplicité des créatures qui constituent et peuplent aujourd'hui le monde. Ce développement est exposé
sous la forme d'une généalogie qui, de cet ancêtre unique ou de ce premier couple, fait naître des descendants plus
nombreux d'âge en âge. Puisque la génération est ainsi le mode ordinaire de l'action cosmogonique, l'union sexuelle
en est le principe. Si l'être originel est unique, il doit engendrer ou enfanter ses premiers descendants tout seul, sans
aucun partenaire... » .
Nommer l'innommable
Comme trace, le langage reste inscrit dans la chair de l'humanité et beaucoup d'auteurs n'hésitent pas à utiliser des
mots puissants ou très connotés pour nommer l'innommable : la conspiration du silence (Butler, 1979), un assassinat
psychique (Clarac et Bonnin, 1986), comme une bombe dans la vie (Bigras, 1987), le traumatisme du silence
(Hadjisky, 1986), un problème pédiatrique masqué (Kempe, 1978), une confusion de langue entre les adultes et
l'enfant (Ferenczi, 1933), un terrorisme familial (Miller A., 1986), un désir de meurtre (Van Gijseghem, 1985), quelque
chose de pourri au Royaume d'Oedipe (Nathan T., 1992), un secret de famille (Ausloos, 1979), une pathologie de
l'amour ou un amour pathologique (Meltzner, 1975), un péril en la demeure (Quiles, 1989), le sexe aveugle de
l'inceste (Cyssau C., 1983), une enfance trahie (Séguin, 1993), une tragédie à trois personnages (Barudy, 1991), le
viol du silence, le sang des mots (Thomas E., 1986 &1992), un cri à l'envers (Vannotti, 1992), la violence du
désespoir ou le contresens d'une pulsion de mort (Begoin J., 1987), un meurtre d'identité (Balier, 1994), le
traumatisme de l'inceste (Gabel M., 1995), le désamour, c'est le monde à l'envers (Lempert, 1994, 1995) etc.
Par définition, l'inceste est un abus sexuel
La définition de l'abus sexuel se décompose en neuf points principaux :
1.transgression de normes sociales et/ou de règles familiales ;
2.manifestation d'un abus de pouvoir ou de confiance ;
3.impliquant l'intimité et l'intégrité corporelle ;
4.concerne des actes sexuels imposés qui comprennent des formes verbales et non verbales ;
5.existence d'une activité sexuelle, planifiée ou non, ponctuelle ou répétée, entre un adulte ou un partenaire plus
âgé et un enfant (mineur d'âge) ;
6.existence habituelle d'une différence d'âge significative entre la victime et l'abuseur ;
7.l'enfant est exposé à une stimulation sexuelle inappropriée à son âge, à son niveau de développement
psycho-sexuel et à son rôle dans sa familleou dans son groupe social ;
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8.à l'intérieur du cercle domestique, dans la famille élargie ou dans l'entourage social ;
9.pouvant entraîner des dommages importants chez l'enfant et la perturbation de ses liens familiaux et sociaux.
L'inceste, comme un monde à part qu'il faut cerner
En fonction de leurs références théoriques et expertises cliniques, de nombreux auteurs proposent des définitions,
des plus générales aux plus spécifiques [2] .
Kempe et Kempe (1978 : 383) proposent la définition suivante :« Implication d'enfants et d'adolescents dépendants,
immatures dans leur développement, dans des activités sexuelles dont ils ne comprennent pas pleinement le sens,
ou pire, violant les tabous sociaux concernant les rôles familiaux ». S'ajoute la définition de Straus et Manciaux (1982
: 94) pour qui l'inceste est "la participation d'un enfant ou d'un adolescent mineur à des activités sexuelles qu'il n'est
pas en mesure de comprendre, qu'il subit sous la contrainte ou qui transgressent les tabous sociaux existants dans
presque toutes les civilisations« . Pour Furniss (1984 : 299), l'inceste correspond à » toute forme d'abus d'un enfant
par n'importe quel adulte ayant un rôle parental dans le contexte familial.". Wolters (1985 : 241) ramène la définition
de l'inceste à un ensemble « de rapports sexuels de diverses natures entre consanguins ». Selon Sabourin (1988 :
22), il s'agit d'« actes sexuels intra-familiaux ayant pour objet privilégié un enfant prépubère, puis les autres enfants
de la fratrie quand le premier aura atteint la puberté ». Suivant la définition élargie de Sgroi (1987 : 26), l'abus sexuel
intra-familal ou« l'exploitation sexuelle incestueuse d'un enfant » correspond à l'imposition de toute formes d'actes
sexuels à un enfant ou à un adolescent par un parent, un beau-parent, un membre du groupe familial élargi ou une
figure parentale de substitution ou exerçant un rôle éducateur. « L'autorité et le pouvoir permettent de contraindre
l'enfant à la soumission sexuelle. » Pour Barbaro (1988 : 4),« l'inceste indique toute activité entre une figure
parentale à l'initiative de l'adulte, avec l'intention de dominer sexuellement l'enfant ou d'exciter sexuellement l'adulte,
l'enfant ou tous les deux » .
Dans tous les cas de figure, l'inceste confronte l'enfant à une sexualité ambiguë, énigmatique et trouble qui le conduit
à grandir dans un monde à part. Pris dans ces transactions particulières et mortifères, l'enfant victime souffre de
manière équivoque, au risque de sa survie psychique.
Une réalité de moins en moins muselée : une vérité sociétale
De la sociologie à la psychologie clinique, en passant par l'anthropologie, la criminologie, la pénologie et les théories
systémiques,.... Le phénomène de l'inceste concerne toutes les sciences humaines.
Au service de ces disciplines variées, la recherche scientifique a permis de mettre en évidence une véritable «
clinique de l'inceste ». Ainsi, en matière de psychologie clinique, un grand nombre d'études ont été menées dans
différents domaines : la symptomatologie particulière de l'enfant victime d'abus sexuel, les caractéristiques
psychopathologiques des abuseurs d'enfants et des parents incestueux, la dynamique systémique des familles à
transactions incestueuses, la phénoménologie clinique de l'interaction abusive, le rôle de la mère dans la dynamique
incestueuse, le processus de victimisation, le syndrome d'accommodation, le stress post traumatique, la prise en
charge pluridisciplinaire des familles abusives, la psychothérapie de l'enfant abusé, la transmission
transgénérationnelle du traumatisme sexuel précoce,...
Aujourd'hui, la recherche sur les abus sexuels à l'égard des enfants atteint un niveau international. À partir de
résultats de plus en plus nuancés, un grand nombre d'études spécifiques permettent de mieux cerner cette
problématique et de comprendre l'impact de l'inceste sur l'enfant victime et sa famille.
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Les premiers travaux scientifiques importants sur le sujet proviennent du Continent nord-américain. Aux États-Unis, il
existe depuis 1973 une banque de données relatives aux mauvais traitements et négligences graves envers les
enfants signalés aux autorités administratives et judiciaires. L'ensemble de ces sévices à enfants sont recensés à
l'échelon national, état par état, au moyen de registres informatisés.
Ajoutons qu'à partir des années 70', les mouvements féministes et les associations en faveur du bien-être des
enfants, à travers leurs revendications, démontrent l'importance du phénomène des abus sexuels et dénoncent les
sévices sexuels subis par les filles et les femmes, en particulier les situations d'inceste père/fille. L'influence
internationale des mouvements féministes, à travers les médias (les revues féministes, la littérature, le cinéma, la
télévision,...), a provoqué une prise de conscience tant au niveau de l'opinion publique qu'auprès des milieux
scientifiques. De nombreux témoignages de femmes ayant vécu dans leur enfance des situations incestueuses ou
abusives ont favorisé cette ouverture. Cette vague anglo-saxonne va également déferler sur le vieux continent.
À côté d'une sensibilisation de plus en plus importante de l'opinion publique, de nombreuses recherches, surtout
épidémiologiques, sont effectuées. À l'origine, ces études d'incidence et de récurrence du phénomène des abus
sexuels à l'égard des enfants sont plutôt le fait de sociologues, de psychologues ou de travailleurs sociaux que de
médecins. Ces recherches essayent de démontrer que le phénomène de l'abus sexuel est d'une importance
croissante, qu'il est associé à l'isolation sociale et à l'autorité patriarcale traditionnelle, qu'il est très répandu et revêt
des dimensions internationales.
La thèse de Doctorat de Vincent DeFrancis (membre de l'American Humane Society) publiée en 1976, à propos des
crimes sexuels commis sur les enfants, est devenue un ouvrage de référence : à partir de l'étude sur un échantillon
de 250 cas, il conclut que les enfants victimes de violences sexuelles sont statistiquement plus nombreux que ceux
qui subissent des violences physiques, que « tous les indices inclinent fortement à penser que son incidence, à ce
niveau, est infiniment plus importante que ne pourrait le laisser supposer le nombre de cas rapportés ».
Un grand nombre de recherches vont être réalisées, parmi lesquelles [3] : Finkelhor (1979, 1982 et 1984), Russel
(1983), Kercher & Mcshane (1984), Siegel & al. (1987), Badgley & Ramsey (1986), Wyatt (1985 et 1986), Hall &
Flannery (1986), Baker & Duncan (1985), Wyatt & Peters (1986), etc.
David Finkelhor, sociologue américain et concepteur du programme de recherche sur la violence familiale, pense
que la « révolution sexuelle » et l'érosion des valeurs qui contrôlent le comportement sexuel ont probablement
aggravé la situation. Il considère les sévices sexuels comme un problème distinct des sévices physiques au sens
classique ; qu'il faut en rechercher les causes non pas dans la désagrégation des familles ou dans les insuffisances
éducatives des parents, mais plutôt dans la transformation du comportement sexuel de l'homme adulte ; en précisant
que la plupart des agresseurs sexuels sont de sexe mâle. Le soutien du gouvernement des États-Unis permet
d'organiser une enquête nationale américaine sur la fréquence (incidence et importance) de la maltraitance et
négligence à l'égard d'enfants, afin d'évaluer la prévalence des cas de maltraitance à l'égard d'enfants. Bien que
cette étude repose sur une définition précise de la maltraitance physique et sur une méthodologie rigoureuse à partir
d'un échantillon représentatif, plusieurs critiques lui sont adressées. En ce qui concerne la maltraitance sexuelle,
l'enquête n'admet que les cas où l'auteur des sévices est la personne en charge de l'enfant, et les données sur les
abus sexuels sont également biaisées par le manque de précision des définitions.
Les premières enquêtes sociologiques
Entre 1979 et 1989, Finkelhor D. conduit plusieurs enquêtes sociologiques rétrospectives auprès de populations
d'adultes. Dans l'ensemble même si elles sont critiquables sur le plan méthodologique, ces études épidémiologiques
sur les abus sexuels, élaborées à partir d'échantillons sélectifs, ont permis d'évaluer l'ampleur du phénomène et de
mieux comprendre certaines composantes socio-dynamiques. Au Canada, le rapport du Comité Badgley sur les
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agressions sexuelles, souvent cité pour ses qualités méthodologiques et la fiabilité de ses résultats, demandé par les
Ministères du Bien-être social et de la Justice, publie en 1984 des données significatives qui illustrent l'importance
épidémiologique du phénomène. Il s'agit d'un sondage national auprès d'un échantillon représentatif d'adultes. À un
moment donné de leur existence, une femme sur deux et un homme sur trois ont été victimes de plusieurs actes
sexuels non désirés :
•
4 sur 5 de ces actes ont été commis pendant l'enfance ou l'adolescence ;
•
4% des femmes ont été violées ; 2% des hommes ont fait l'objet de tentatives ou d'actes de pénétration ;
•
1 agresseur sur 4 est un membre de la famille ou une personne de confiance ; 1 agresseur sur 6 est un
étranger ;
•
les filles ne sont pas les seules à être abusées, mais elles sont d'avantage abusées à l'intérieur de la famille
que les garçons ;
•
si l'âge médian au moment de l'abus est de 8-10 ans, les abus commis sur des enfants beaucoup plus jeunes
ne sont pas exceptionnels ;
•
1% des agresseurs est de sexe féminin ;
•
moins de 28% des femmes et moins de 10% des hommes ayant vécu une offense sexuelle ont demandé de
l'aide.
A côté de ces nombreuses études épidémiologiques, un grand nombre de cliniciens se penchent sur la question des
conséquences psychopathologiques des abus sexuels, de l'inceste en particulier. À la fin des années 80', nous
assistons à une véritable flambée d'articles et d'ouvrages scientifiques.
Des chiffres plus accessibles dans certains pays
La réalité du phénomène de l'inceste est difficilement chiffrable et certainement sous-estimée. Certains auteurs
évoquent l'existence d'un « chiffre noir », véritable inconnue qui fait encore débat de nos jours. D'une part, de
nombreuses victimes se taisent, renoncent à porter plainte, reviennent sur leur déposition ou s'expriment longtemps
après les faits. D'autre part, l'épidémiologie dans ce domaine balbutie au plan méthodologique. Les pistes de
recherches sont cependant prometteuses et quelques données sont disponibles dans différents Centres de
recherche interuniversitaires très sérieux comme le CRIPCAS (Centre de recherche interdisciplinaire sur les
problèmes conjugaux et les agressions sexuelles), au Québec, Canada.
Il existe également quelques « sondages d'opinion » dont la rigueur et la portée scientifique ne sont pas toujours très
appréciables, comme par exemple cette enquête de « victimation sur les abus sexuels » (2009), réalisée par Ipsos
auprès d'un échantillon national représentatif de 931 personnes (soit 0,0016 % de la population française) [4] . Cette
étude commandée par l'AIVI (Association internationale des victimes de l'inceste, http://aivi.org/) montre notamment
que 3 % des Français déclarent avoir été victimes d'inceste, que 26% des Français connaissent au moins une
personne(victime d'inceste dans leur entourage. Près de 2 millions de personnes sont donc concernées, selon ce
sondage.
Les statistiques concernant cette problématique sont plus accessibles aujourd'hui. Les méthodes de recueil de
donnée semblent plus fiables. Néanmoins, leur interprétation reste complexe et fastidieuse, d'autant plus qu'il existe
différentes sources d'information issues de plusieurs pays. Concernant le recueil de ces données, il n'existe aucune
étude comparée, ni aucun consensus international.
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L'inceste : d'un état des lieux à une pratique de la clinique
À travers la présentation chiffrée suivante, il s'agit bien de dresser un « profil général » qui correspondrait au plus
prêt à la réalité des pays européens ou occidentaux. Ces chiffres portent essentiellement sur l'incidence, les
victimes, les agresseurs, les conséquences de leurs actes sur les victimes et les circonstances.
L'incidence
•
80% des victimes d'infractions sexuelles sont de sexe féminin. http://www.agressionsexuelle.com/ Santé et
services sociaux du Québec, Canada, site Une agression sexuelle c'est quoi ?
•
20% des femmes et 7% des hommes subiront une agression sexuelle avant l'âge de 18 ans.
•
45% des violences sexuelles concernent des enfants de moins de 9 ans.
•
Le risque relatif d'infractions sexuelles chez les handicapés est multiplié par 3 par rapport à la population
générale.
•
50% des victimes d'inceste appartiendraient à des familles touchées par l'alcoolisme.
Les agresseurs
•
98% des agresseurs sexuels sont des hommes, âgés de moins de 18 ans pour 19% d'entre eux.
•
Dans 70 à 85% des cas, l'agresseur est connu de la victime.
•
72% des auteurs de violences sexuelles sur mineurs signalés sont des personnes de la famille , mais 74% des
personnes interrogées supposent que les violences sexuelles sont infligées aux enfants par des inconnus.
Troubles, séquelles et conséquences
•
Troubles multiples : une étude du Comité de protection de la jeunesse canadienne sur les cas de 85 filles ayant
subi l'inceste qui a été signalé, démontre que ces filles présentaient en moyenne huit sortes de problèmes, soit
d'ordre familiaux (86%), psychologiques (85%), de relations sociales (49%), scolaires (46%), de nature sexuelle
(34%), de délinquance (26%), de fugue (25%) et de santé (23%).
•
Troubles du sommeil :20 % à 30 % des enfants agressés sexuellement ont des problèmes reliés au sommeil.
•
Anorexie - boulimie : 5 % à 20 % des enfants victimes éprouvent des difficultés reliées aux comportements
alimentaires et à l'appétit. 50% des anorexiques et 75% des boulimiques interrogés font état d'agressions
sexuelles dont ils auraient été victimes dans leur enfance.
•
Fugues et délinquance : des études relatives aux jeunes fugueurs et aux délinquants rapportent qu'entre 30 %
et 55 % d'entre eux avaient été victimes d'agressions sexuelles. Les victimes d'inceste auraient tendance à
quitter précocement la maison, avant 18 ans.
•
Les séquelles : les perturbations psychologiques sont les séquelles les plus étudiées et qui ont probalement le
plus d'impact. Ces perturbations sont notamment décrites par Sgroi : la culpabilité, la peur, la dépression, la
perte d'estime de soi (60 et 87% des victimes d'inceste seraient modérément ou gravement affectées dans leur
estime d'elles-mêmes) et les problèmes de sociabilité, la colère et l'hostilité refoulées, la diminution de l'aptitude
à faire confiance à quelqu'un, la confusion des rôles, la pseudo-maturité, alliée à l'incapacité d'accomplir les
activités de développement ; des problèmes de maîtrise de soi et de contrôle.
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L'inceste : d'un état des lieux à une pratique de la clinique
•
Préjudice physique : le sondage national mené auprès des hôpitaux Canadiens par le Comité Badgley a permis
de recueillir que plus de sept filles sur dix (71,9%) et près d'un garçon sur deux (47,4%) victimes d'agressions
sexuelles avaient subi une pénétration ou une tentative de pénétration. D'après le résultat des examens
médicaux, environ un enfant sur quatre (23,1%) avait besoin de soins médicaux pour des préjudices physiques
ou des états pathologiques (qui n'étaient pas tous imputables à l'agression sexuelle).
•
Prostitution : entre 76 et 90% des femmes et des hommes prostitués ont des antécédents d'agressions
sexuelles pendant leur enfance, le plus souvent de nature incestueuse.
•
Toxicomanie : 35 % des femmes ayant vécu l'inceste auraient des problèmes de drogues et d'alcool,
comparativement à 5 % des femmes non agressées. Les femmes ayant été agressées sexuellement durant
l'enfance risquent deux fois plus que les autres de prendre des somnifères et trois fois plus de recourir à des
calmants.
•
Dépressions et suicides : les victimes d'infractions sexuelles sont 8 fois plus susceptibles que les « non-victimes
» de faire des tentatives de suicide et 5 fois plus susceptibles de faire une dépression nerveuse. Une étude
auprès des femmes hospitalisées dans les services psychiatriques des hôpitaux de Toronto révèle que 90%
d'entre elles ont vécu des agressions sexuelles ou physiques ou les deux durant leur enfance.
•
Maladies musculaires : 90% des femmes atteintes de fybromyalgie auraient subi des agressions sexuelles,
physiques ou psychologiques durant l'enfance, l'adolescence ou au début de l'age adulte.
•
Revictimisation : les femmes exploitées sexuellement pendant leur enfance se retrouvent souvent dans des
situations dangereuses ou dans des relations où elles sont exploitées. Il existe un lien étroit entre l'inceste et
l'expérience ultérieure d'agression sexuelle, de violence conjugale ou d'autres formes de violence sexuelle.
•
Problèmes affectifs : une forte majorité des victimes d'inceste vivent difficilement leurs rapports avec les
hommes, et environ 40% d'entre elles ne se sont jamais mariées.
Les circonstances
•
La torture morale jour après jour : 85% des cas d'inceste durent plusieurs années. Ils sont toujours
accompagnés de mauvais traitements psychologiques et souvent de violence physique.
•
Les appels au secours : 78 % des adolescents fugueurs déclarent des sévices de la part de leur parent dans
l'année qui précède la fugue.
•
La loi du silence : de 42,5% à 50% des personnes n'avaient jamais parlé des violences subies avant d'être
interrogées.
•
Le déni : jusqu'à 50% des victimes ne se souviennent pas avoir été exploitées qu'après plusieurs années. Ce
souvenir est généralement éveillé par un élément de la vie adulte.
•
Le rejet : il existe bien souvent une complicité familiale (tacite ou explicite), la mère hésitant à briser son
ménage, ou résistant difficilement à l'emprise de son mari. Dans ces « dictatures familiales », l'enfant est
souvent rejeté par la mère ou souffre de problèmes psychoaffectifs.
•
La révélation : 50% de ceux qui subissent ces violences en parlent à leurs amis ou à ceux qui prennent soin
d'eux (en général leur mère).
L'acte d'inceste, une contamination psychique
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L'inceste : d'un état des lieux à une pratique de la clinique
Le syndrome d'identification à l'agresseur et les effets du stress post-traumatique conditionnent l'enfant à des
comportements souvent inadéquats, voire symptomatiques. Intoxiqué par le discours idéologique de son agresseur,
l'enfant a besoin d'une sorte de décontamination psychologique progressive.
L'acte abusif enfreint les limites intimes du corps. En effractant cette enveloppe du « moi-corps-peau », l'abuseur
s'accapare du « moi-désir-psychique » de l'enfant. L'enfant est dépossédé jusque dans sa chair de l'esprit qui le
tenait unitairement à son propre corps. Les ressources et les mystères de son corps sont alors rendues
inaccessibles par la pensée. C'est d'ailleurs souvent par corps interposé que le traumatisme vient faire irruption du
côté des symptômes d'allure psychosomatique : anorexie, boulimie, énurésie, encoprésie, insomnie, nausée,
céphalée, maux de ventre, maux de dos, allergie, ulcère, perte des cheveux, douleurs, etc. Les symptômes font du
bruit à la place des mots. Le corps fait silence à la place des symptômes. Les symptômes font corps avec la
souffrance. Le corps sexué n'est plus parlé. Les mots font silence avec le corps. L'enfant victime n'a plus accès au
désir de parler de ce corps investi sexuellement par un adulte. L'enfant abusé censure souvent les mots qui font
corps avec le sexuel. Parce qu'évoquer ce corps-là, c'est parler de trop, et parfois redire, c'est refaire. Qu'a-t-il fait à
mon corps ? est la question qui risque de faire symptôme à la place du sens. L'enfant cache la question pour oublier
ce corps sexuellement enfreint, et plus il comprime la question, plus elle refait surface, comme un sortilège, avec son
cortège de symptômes.
Mais la difficulté d'exprimer verbalement ce qu'il a vécu au lieu de son corps n'empêche pas l'enfant abusé de le
revivre symboliquement à travers des mises en scènes, au moyen des jeux de rôle avec des poupées, des
marionnettes ou des figurines, à l'aide de dessins, et à travers des jeux plus ou moins sexuels avec d'autres enfants
et/ou des animaux réels ou en peluche. Plus que par imitation, mais certainement par identification anxieuse à son
agresseur, l'enfant abusé reproduit des scènes à caractère sexuel, afin de mieux juguler l'angoisse qui l'envahit. À
l'occasion, l'enfant peut créer une sorte de conte métaphorique, en relatant une histoire d'abus sexuel qui serait
arrivé à un autre enfant. Cette stratégie narrative lui permet ainsi de prendre une certaine distance en relation avec
son propre vécu.
Selon son niveau de fantasmatisation, l'enfant peut remanier son vécu et « broder » un nouveau scénario pour lequel
il imagine une issue différente de son véritable vécu. Cette recomposition fantasmatique revêt des aménagements
de différente nature psychologique. Sur un versant hystérique, on retrouve une tendance à la théâtralisation, à
l'exagération, à l'indifférence, à la séduction ou à une certaine érotisation du contact et/ou de la gestuelle. D'un côté
plus obsessionnel, on observe des rituels névrotiques, des habitudes compulsives, des idées stéréotypées, un
conformisme exagéré et une rigidification de la pensée. Sur la tranche plus psychotique, on constate une certaine
tendance au délire, à la mystification, aux fantasmes de morcellement ou de destruction, à la pensée «
magicopsychédélique », aux idées paranormales, à l'exagération dans l'horreur, à la mythomanie, à la paranoïa. Du
bord plus psychopathe ou pervers, on le retrouve dans le monde du passage à l'acte à poser des gestes violents, à
commettre des transgressions inacceptables, à vouloir se détruire ou anéantir l'autre, etc.
Le stress émotionnel accumulé par l'enfant abusé réduit fortement l'accès à la réalité de l'abus par le biais d'une
pensée structurée et disponible. La pensée est alors inhibée, et les processus intellectuels, la cognition et le
raisonnement logique sont enrayés. La raison qui pousse à dire la vérité est comme bloquée notamment par le fait
même que le sujet enfant n'a plus accès à son propre désir.
Après les péripéties de la révélation, du dévoilement et de l'intervention, l'enfant devrait pouvoir « souffler ». En
grandissant, il va devoir pourtant vivre avec ces événements. Selon la gravité de la situation, il devra continuer à
survivre envers et contre tout. Les adultes de son entourage, ses parents en particulier, sont en droit de penser que
l'enfant-victime devrait bénéficier d'une thérapie afin de se dégager de la problématique abusive et de pouvoir vivre
le plus normalement possible.
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L'inceste : d'un état des lieux à une pratique de la clinique
Quelques orientations thérapeutiques pour les victimes
Bien que certains thérapeutes inventent des nouvelles techniques (groupe de parole pour enfants victimes, art
thérapie) ou des stratégies thérapeutiques (focus group, thérapies familiales systémiques) pour aider les enfants
victimes d'agressions sexuelles, il n'existe pas une forme de thérapie spécifique à tel ou tel type d'abus.
Indépendamment de la technique prônée, le traitement psychologique de l'inceste vise à « soigner » les blessures
psychiques de la victime et/ou à renforcer son Moi profond, afin notamment que son existence ne soit pas
compromise à terme.
Dès la première phase d'intervention, l'approche individuelle peut offrir à l'enfant un espace-temps nécessaire à la
réflexion et à la confidence. Il peut en toute confiance exprimer ses sentiments au sujet de l'abus sexuel, de son
abuseur, de sa famille et des événements qui se sont produits après la révélation des faits. À ce moment de
l'intervention, l'enfant peut ramasser les morceaux et commencer à reconstruire son image personnelle ou le puzzle
de son histoire. Ce lieu de parole et d'expression peut servir d'assises à une psychothérapie individuelle, brève ou
prolongée. Le temps consacré à la thérapie individuelle varie suivant chaque cas et tient compte de plusieurs
variables, telles que la sévérité de l'abus, l'intensité du traumatisme psychologique, l'emprise de l'abuseur ou de la
famille sur l'enfant, l'influence du milieu familial, le degré d'empathie des parents (du parent allié), l'âge et la maturité
de l'enfant, et surtout la demande de l'enfant, etc. Confidentiel et respectueux du désir de l'enfant, cet espace
thérapeutique lui permet de découvrir une issue la plus favorable possible à ses conflits intrapsychiques et à ses
troubles psychologiques. Ce type de thérapie peut préparer un enfant à renouer avec son entourage après une
éventuelle séparation (hospitalisation, placement), ou à s'engager dans une autre voie thérapeutique. Le travail
individuel peut éventuellement l'aider à s'impliquer dans une thérapie familiale ou un travail en groupe.
Les troubles présentés par l'enfant peuvent durer et perturber la construction de son identité, et c'est parfois dans le
long terme qu'il faut l'accompagner. C'est à partir de ses moyens de communication que le thérapeute peut l'aider à
se reconstruire psychiquement ; par le dessin, le jeu, la mise en scène d'un scénario qui peut exprimer ce que
l'enfant n'ose pas dire. Certains thérapeutes pensent que c'est par l'art que les enfants s'en sortent le mieux, et que
c'est valable aussi pour les adultes, anciennes victimes. Des enfants s'en sortent, et ils ont des conseils à nous
donner, parce qu'ils ont pu parler à quelqu'un et refaçonner leur affectivité. Sous l'effet d'un processus de résilience
(phénomène mieux reconnu aujourd'hui), une victime peut s'en sortir, tout en transformant sa souffrance en force
créatrice ou libératrice.
Des balises éthiques à l'intervention thérapeutique
L'intervention thérapeutique proprement dite devrait privilégier le soutien de l'enfant abusé. Cependant, le traitement
thérapeutique de l'enfant abusé soulève des questions éthiques qu'il faut appréhender selon le contexte et les
circonstances. La thérapie de l'enfant abusé n'est pas comme une drogue secrète que le thérapeute met dans sa
nourriture contre son gré, et qui par miracle s'en trouve guéri. La thérapie est avant tout un processus relationnel
entre un thérapeute-adulte et un patient-enfant.
Un enfant qui n'est pas très motivé, qui ne comprend pas la raison de la thérapie ou qui est constamment
indéterminé par rapport à son vécu, et qui ne parvient pas à exprimer une demande pour lui-même, peut se montrer
récalcitrant au processus thérapeutique, ou, au contraire, ultra-conformiste vis-à-vis de l'intervenant. L'acharnement
thérapeutique, qui semble plus répondre aux aspirations du thérapeute (qui cherche éventuellement à se donner
bonne conscience), peut s'avérer dangereux, voire abusif, et rigidifier les liens entre le thérapeute et l'enfant. À
travers le transfert qui s'opère entre thérapeute et patient, l'aliénation d'un enfant vulnérable au processus
thérapeutique risque d'engendrer une nouvelle forme de victimisation relative au « bon-savoir » du thérapeute.
Psychothérapie ou viol psychique ?, telle est la question que se posent Van Gijseghem & Gauthier (1992). Une
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L'inceste : d'un état des lieux à une pratique de la clinique
thérapie contraignante risque alors de reproduire le même type de transactions abusives auxquelles l'enfant était
obligé de se soumettre. Or, certains enfants ont été à ce point conditionnés par la dynamique abusive, qu'ils sont
incapables d'exprimer leurs véritables sentiments ou motivations. La reconnaissance du problème, la prise de
conscience de difficultés, l'expression des sentiments, la volonté de changer, le désir de mieux être ou la motivation
à mieux vivre sont inhérentes au processus thérapeutique. La thérapie devrait laisser l'enfant prendre son temps,
afin qu'il puisse élaborer et découvrir le désir de s'exprimer en tant que sujet de sa demande.
L'enfant victime d'agression sexuelle risque aussi d'être « revictimisé » par la parole. Parler n'est pas toujours
éliminer le symptôme, et c'est parfois revivre sur un mode traumatique un événement douloureux. La survie
psychique de l'enfant est parfois en danger lorsqu'on réitère systématiquement des propos en relation avec l'abus
sexuel. L'enfant, face à l'abus sexuel a développé des stratégies de survie et des symptômes, qu'il reprend parfois à
son compte pendant la thérapie. Faut-il aborder le symptôme pour le symptôme ? Un thérapeute qui identifie un
problème d'abus sexuel chez un enfant qui porte tel ou tel symptôme, risque de le stigmatiser de manière indélébile,
en tant que victime-symptôme qui a vécu une expérience catastrophique. L'enfant porte (inconsciemment) la marque
d'un trauma sexuel qui est masqué par des symptômes, lesquels sont souvent nécessaires à sa survie psychique.
Aborder de front ces symptômes, risque d'activer le trauma, lequel peut devenir l'objet « fétiche » à la fois de la
victime et du thérapeute.
Il est toutefois légitime de la part d'un thérapeute de vouloir proposer un soutien à un enfant qui décompense sur le
plan psychologique. Ainsi, une thérapie brève, à travers des rencontres ponctuelles et bienveillantes, peut aider
l'enfant abusé à métaboliser certains aspects de son expérience abusive et à refouler ce qui a été transgressé.
L'incitation à la parole peut aider un enfant à mentaliser son vécu et à diluer les effets de l'emprise abusive, dont le
secret a été le moteur. Cependant, il paraît essentiel de jauger le niveau d'intervention et de mesurer les risques
psychiques pour l'enfant. L'indication d'un traitement devrait donc tenir compte du risque de victimisation secondaire.
En relation avec la gravité des faits et de leur impact, la maturité psychoaffective de l'enfant, ses potentialités
réparatrices, ses ressources personnelles, et les capacités de soutien de son entourage immédiat, le traitement doit
trouver en l'enfant un demandeur et non un preneur.
Dans ses principes fondamentaux, la thérapie de l'enfant abusé devrait remettre l'enfant dans un processus de
culpabilité névrotique normale (refoulement des désirs incestueux du sujet en rapport à sa constellation oedipienne,
distance transgénérationnelle) et de re-narcissisation (respect de son corps, restauration de l'identité sexuelle et de
l'image de soi, estime de soi, ... ). Le processus thérapeutique signifie également la rencontre d'un enfant et d'un
adulte. Ce dernier incarne l'Autre protecteur qui peut énoncer la Loi, celle qui signifie l'interdit de l'inceste, la
différence des générations et des sexes, le droit à la protection, au respect et à l'autonomie,... Cette approche
individuelle de l'enfant abusé essaye de reconduire l'enfant à sa place d'enfant et de reconstruire les repères, rendus
confus par la rencontre précoce avec la sexualité adulte.
À plus long terme, ce n'est pas le traumatisme sexuel qui détermine l'intervention thérapeutique, mais bien la prise
de conscience du sujet lui-même et sa décision personnelle de demander une aide ou une écoute particulière.
Le travail thérapeutique avec de l'enfant victime doit donc tenir compte de ses éprouvés, de ses blocages, des
sentiments qu'il ressent à l'égard de son agresseur, de ses ressources personnelles, de ses capacités résilientes,
etc. L'enfant peut prendre conscience du décalage qui s'est creusé entre lui et ses parents et percevoir l'agression
sexuelle sous un autre angle. Cet événement devra faire l'objet d'une métabolisation psychique qui permettra à
l'enfant de mieux l'incorporer à son histoire personnelle et d'avoir le dessus sur les aspects les plus traumatiques de
cette expérience. En l'aidant à sortir du cercle vicieux de l'identification à l'agresseur, des processus de
traumatisation sexuelle et d'accommodation, l'enfant peut s'accorder une prise de distance salutaire et reprendre le
cours de sa vie quotidienne. Il ne sera plus totalement comme les autres mais il pourra envisager l'existence avec
moins d'appréhension.L'aider à métaboliser l'agression sexuelle, c'est aussi lui apprendre à se fixer de nouveaux
objectifs et à adopter d'autres attitudes, afin de lui éviter notamment le risque d'être « revictimiser » ou d'entrer dans
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L'inceste : d'un état des lieux à une pratique de la clinique
une logique fataliste de reproduction transgénérationnelle.
Le thérapeute et la famille incestueuse
La prise en charge des situations d'inceste représente un travail particulièrement lourd, complexe, envahissant et
angoissant. Une situation d'inceste s'apparente en bien des points à une « équation complexe à plusieurs inconnues
» qu'il n'est pas toujours aisé de résoudre. Le thérapeute doit absolument comprendre que l'inceste est une sorte
d'impasse entre les générations, impliquant un blocage particulier de la communication, un verrouillage des émotions
qui ne circulent plus librement, une désaffectisation du lien d'attachement et un trouble sévère de la parentalité,...
c'est-à-dire des composantes analogues aux transactions spécifiques que l'on retourve dans certaines familles
psychotiques. En étroite collaboration avec la famille, le thérapeute doit donc tenter d'élaborer des objectifs
thérapeutiques fiables, afin notamment d'apporter à la victime de l'inceste (bien souvent le patient désigné du
système), le soutien nécessaire et d'y inclure les éléments déterminants suivants [5] :
•
La parenté entre la victime et l'agresseur,
•
L'intensité et la qualité des liens de loyauté,
•
La détermination des montages relationnels, comme les coalitions malsaines, voire psychopathologiques,
•
La distribution des rôles de chacun, versus le scénario incestueux,
•
L'enfant incesté peut devenir le parent de son (ses) parents(s),
•
La question du soutien des deux parents,
•
La problématique de la confiance dans les rapports parent-enfant,
•
L'impact des traumatismes sur l'économie psychique de la victime et les dégâts collatéraux vis-à-vis des autres
membres de la famille,
•
La personnalité particulière du père (ou de l'auteur) et son influence sur la victime,
•
La maintenance des secrets, des non-dits, des silences,... leur signification,
•
Si la confiance a été trahie, la victime peut éprouver le besoin et le désir de maintenir des liens avec sa famille,
voire avec son père (ou l'auteur des faits), etc.
Cette objectivisation élémentaire souligne l'importance des transactions familiales entre la victime et le responsable
de l'inceste. D'un point de vue de l'éthique relationnelle, des liens existentiels profonds se sont noués entre la victime
et son abuseur, en relation avec une certaine réciprocité-complicité dans le maintien du secret, des transactions
violentes, le stress émotionnel engendré par la situation, les échanges de nature affective, le partage d'une sexualité
interdite et la place des non-dits qui l'entourent, etc. Aucune rupture ni éloignement n'auront raison de cette « liaison
si particulière » et de cette dynamique antérieure à la révélation de l'inceste. L'inceste reste une affaire de famille
pouvant impliquer plusieurs générations à venir, mener les protagonistes vers une impasse et venir grever les
transactions familiales à jamais. Dans un esprit réparateur et d'humanisation, l'intervention thérapeutique doit donc
tenter un travail de restauration de la confiance, qui implique la sécurisation affective de la victime, l'explicitation des
faits, l'accès à la vérité de l'inceste, la reconnaissance des responsabilités, la prévention de toute risque de récidive,
la recherche d'interprétations plausibles et le rétablissement de l'ordonnance transgénérationnelle.
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L'inceste : d'un état des lieux à une pratique de la clinique
La thérapie systémique confrontée aux situations d'inceste
L'utilisation des thérapies systémiques dans les cas d'inceste connaît quelques limites. Les stratégies thérapeutiques
habituelles, comme la prescription de symptômes, sont souvent éthiquement incompatibles avec les spécificités
même des transactions incestueuses. Ces transactions particulières s'articulent à des phénomènes comme l'abus de
pouvoir, l'abus de confiance, la manipulation mentale, l'aliénation relationnelle, la séduction traumatique, l'inversion
générationnelle, la parentification de l'enfant, les conflits de loyauté internes, ... et d'autres enjeux encore plus
complexes à comprendre et/ou à résoudre.
Entre la volonté de dialogue, d'empathie et d'ouverture intimement associée à tout travail d'élaboration
thérapeutique, les troubles de la communication vécus à l'intérieur de la famille et l'impasse entre les générations,
l'inceste confronte le thérapeute à divers problèmes d'éthique relationnelle.
Les bases d'une thérapie systémique reposent sur l'analyse rigoureuse des transactions familiales reliées aux quatre
dimensions de la réalité relationnelle : les faits, le psychisme, les transactions et l'éthique relationnelle. Cette
approche préliminaire permet de progresser dans la compréhension des situations d'inceste.
Le thérapeute doit prendre en considération la personnalité de chacun des protagonistes concernés par la situation
d'inceste, au moins les trois acteurs principaux de cette tragédie : le père (ou l'auteur des faits), la mère et la victime
(la fille ou le fils). Le thérapeute peut ensuite reconstituer l'histoire familiale et s'intéresser non seulement aux
générations antérieures, mais également à celles qui sont à venir, c'est-à-dire celles qui seront aussi impliquées
(notamment les répercussions de l'inceste sur la vie sexuelle et familiale future de la victime).
Suivant cette orientation thérapeutique, les situations d'inceste démontrent à quel point toute action d'une personne
envers une autre est suivie de multiples conséquences relationnelles touchant l'ensemble des personnes associées
au problème. Même après la période de dévoilement, le système entier vacille encore autour de la question de
l'inceste. Les relations intrafamiliales restent très perturbées et fragiles.
L'éthique et l'équité relationnelles entre le parent et la victime (enfant) permettent d'appréhender certains enjeux
dans l'inceste :
•
La parentification extrême de l'enfant, pris comme partenaire sexuel dans une triangulation systémique
particulière ;
•
•
L'abandon de l'adulte de sa responsabilité à l'égard de l'enfant (victime) ;
L'injustice et l'inégalité relationnelle ;
•
La loyauté absolue de l'enfant confrontée à la déloyauté (la trahison, loyauté clivée) du parent incestueux à son
égard ;
•
Les stratégies adoptées par l'auteur des faits qui se traduisent par des mouvements de violence, d'abus de
pouvoir et de confiance, de manipulation mentale,... de la séduction, au déni, en passant par l'exploitation de
cette loyauté inconditionnelle de l'enfant ;
•
Les jeux de coalition malsains ;
•
La légitimité destructrice du père qui abuse de son autorité parentale au détriment de la fonction paternelle
protectrice et bienveillante ;
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L'inceste : d'un état des lieux à une pratique de la clinique
•
L'abus d'autorité et l'absence de culpabilité consolident la légitimité destructrice du père (ou de l'auteur
d'inceste) et l'emprise relationnelle sur sa victime ;
•
Le sacrifice de l'enfant suivant le principe de plaisir imposé par l'abuseur, lui-même soumis à la loi de son
propre désir narcissique dominé par des pulsions irrépressibles ;
•
L'asymétrie de pouvoir entre l'abuseur et sa victime, entre l'homme et la femme (entre le père et la mère), les
jeux de coalition et le rôle intrinsèque de la mère accentuent la parentification [6] de l'enfant (victime), etc.
Les loyautés, la confiance, l'éthique relationnelle et le processus de parentification
Lorsqu'un travail thérapeutique est initié avec la famille, les concepts de loyauté, de confiance et de parentification
sont des indicateurs intéressants permettant de mieux comprendre ce qui se trame dans ces transactions
incestueuses.
Lorsque l'inceste n'est envisagé que sous l'angle d'un abus de pouvoir, ne relevant que d'une sexualité déviante ou
d'une conduite perverse, ces idées recouvrent une telle connotation péjorative qu'elles pourraient enrayer le
processus de recouvrement de la confiance mutuelle entre les protagonistes. Selon Boszormenyi-Nagy (1991), « la
construction de la confiance est la tâche thérapeutique principale dans les situations d'inceste parent-enfant. » Pour
Boszormenyi-Nagy, lorsque l'enfant est réduit à devenir l'objet de satisfaction sexuelle de l'adulte, s'opère une
fragmentation des possibilités de dialogue puisque l'enfant est amené à se taire et, pour ne pas trahir l'adulte, à faire
comme s'il oubliait. Il s'agit d'une exploitation extrême de sa loyauté. La question des loyautés divisées surprend
souvent les intervenants qui observent cette loyauté de la victime à son agresseur, confrontée à la déloyauté
(loyauté clivée) de ce dernier. La loyauté inconditionnelle de la victime envers son père est souvent invoquée pour
expliciter des attitudes qui apparaissent contraires à son intérêt : hésitation à dénoncer les faits, complicités tacites,
rétraction des aveux, voire « acceptation » de nouvelles approches incestueuses, etc. La révélation de l'inceste
réactive les conflits et les clivages de loyauté au sein de la famille et entre les générations. « La loyauté est une force
régulatrice des systèmes. Pour Boszormenyi-Nagy, l'enfant, par la filiation éprouve d'emblée un devoir éthique de
loyauté envers ses propres parents dont il veut s'acquitter. C'est une loyauté existentielle. Elle implique au moins
trois protagonistes : celui qui doit faire un choix, celui qui est préféré, et celui qui ne l'est pas. »
« Chaque individu reçoit un héritage avant même sa naissance, une tâche, un mandat, une attente... Ce legs va lui
permettre de constituer un patrimoine pour créer quelque chose de nouveau à partir du passé. Ce qui est reçu
devient alors un devoir éthique de le restituer. »
« La confiance nécessite un dialogue où les échanges « de donner et de recevoir » sont présents et renforcent cette
même confiance. Elle s'inscrit dans une dimension de réalités relationnelles. »
Selon Boszormenyi-Nagy (1991), il existe quatre dimensions de réalités relationnelles :
•
La dimension factuelle, qui renvoie à des éléments du Destin (identités ethniques, déterminants biologiques
etc.)
•
La dimension de la psychologie individuelle, elle englobe les besoins élémentaires de reconnaissance, de
pouvoir, d'amour, de défenses, de transfert...
•
La dimension de communication interpersonnelle sujette aux théories systémiques.
•
La dimension de l'éthique relationnelle, définie par Nagy comme une justice des relations, une balance des
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L'inceste : d'un état des lieux à une pratique de la clinique
mérites acquis et des redevances, présentes dans les systèmes de loyautés.
Pour Boszormenyi-Nagy, la justice devient une notion existentielle, mais aussi condition sine qua non de la liberté.
C'est en prenant conscience de manière responsable de la conséquence de ses actes qu'une personne peut
envisager d'autres options. C'est ainsi qu'elle accède à la dimension éthique.
Dès lors que la dimension éthique de la relation parent-enfant devient essentielle au travail thérapeutique, il importe
de prendre en considération certaines modalités dont les principes s'articulent autour des éléments suivants :
•
Toute relation (agression ou attouchements) sexuelle entre adulte et enfant, relève de la responsabilité de
l'adulte.
•
Les enfants se montent très loyaux envers leurs parents. Cette loyauté doit rester explicite dans le travail
thérapeutique.
•
L'adulte (ou l'auteur des faits) est responsable de la mise en acte de l'inceste, des transactions périphériques et
de leurs conséquences, ... N'empêche que dans un esprit d'éthique relationnelle, il ne doit pas être pris comme
bouc émissaire du système familial et/ou thérapeutique.
Principes de base d'une approche contextuelle de l'inceste
Judith Grunebaum (1987) a systématisé les principes de base d'une approche contextuelle de l'inceste en la
distinguant d'un point de vue systémique des thérapies familiales classiques :
1.
1.Une attention multilatérale vis-à-vis de chaque membre de la famille est plus importante que le fait de
rencontrer tous les membres de la famille ensemble. Cette attention équitable pour tous permet à chacun de
gagner la sécurité et la liberté pour parler des faits.
1.
2.Tout contact sexuel entre un adulte et un enfant relève toujours de la responsabilité d'un adulte. Un enfant
abusé ne devrait pratiquement jamais être retiré de chez lui car cela aggrave son isolement et son risque d'être
désigné comme un bouc émissaire. L'éloignement de l'adulte responsable est plus équitable.
1.
3.Si le coupable doit être tenu pour responsable (au plan pénal), sa condamnation définitive et sa
transformation en bouc émissaire sont à proscrire. Il doit être aidé à regagner la confiance et l'estime des siens.
1.
4.Le thérapeute doit explorer toutes les composantes de pouvoirs et de loyautés dans la famille et aborder le
problème en encourageant explicitement les actes réparateurs. Le concept de légitimité destructrice est fort utile
pour comprendre comment certains parents sont inaptes à sentir les droits et les besoins des autres et abusent
de leur pouvoir avec si peu de remords.
1.
5.La parentification des femmes, autant des filles que de la mère lorsqu'elle était enfant, joue un rôle de
premier plan dans la réalisation de l'inceste.
Au plan de l'éthique relationnelle, la parentification n'est pas qu'un problème de frontière entre les générations. La
parentification dans les cas d'inceste correspond à l'exploitation de l'enfant qui se retrouve dans l'obligation de
donner sans recevoir. Ainsi parentifié, l'enfant reste soumis à la reconnaissance de ses parents, à leurs idéaux
narcissiques et à leurs moindres désirs. Il finit par se retrouver dans une position d'adulte par rapport à leurs
demandes régressives et répétées.
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L'inceste : d'un état des lieux à une pratique de la clinique
Dans les familles où l'inceste est mis en scène, la mère a souvent été elle-même une fille parentifiée. Sa
parentification précoce a entraîné un épuisement relationnel de son affectivité et le verrouillage de ses émotions.
Confrontée aux demandes multiples, la mère délègue alors à ses enfants de nombreuses tâches de la vie
quotidienne, en particulier celle de s'occuper affectivement du père.
En perspectives, il faut bien parler d'inceste
Depuis la répression sexuelle du XIX ème siècle jusqu'aux groupes de libération sexuelle des années 1960-1970, le
caractère tabou de la sexualité dans notre Société contemporaine nous amène à penser autrement la question de
l'abus sexuel à l'égard des enfants et de l'inceste en particulier. Ce phénomène interpelle l'individu au plus profond
de son intimité et atteint l'enfant qui demeure en lui. Ces ressentiments sont d'autant plus marqués qu'ils concernent
des personnes de manières directes, les victimes d'inceste en particulier, ou plus indirectes, les individus confrontés
au problème de manière professionnelle. L'inceste, bien que manifeste dans les actes et les émotions, appartient
encore au registre de l'énigmatique et de l'innommable. Phénomène ancestral et complexe, équivoque et
traumatique, l'inceste interroge en profondeur la pratique clinique actuelle et interpelle la communauté humaine tout
entière.
Comme le démontrent les chiffres, le phénomène de l'inceste est présent dans la plupart des sociétés et concerne
un nombre important de protagonistes, victimes, auteurs et témoins à la fois. En termes de santé mentale, de
conséquences envers les victimes et d'impact pour la soiété, la fréquence et l'incidence de l'inceste correspondent à
un phénomène considérable. Sur fond de climat sécuritaire et répressif actuel, la portée médiatique et la prolifération
d'Associations de défense des victimes sont tout aussi significatives d'une réaction de masse qui réclame plus de
moyens, plus de sanction, plus de détection, plus de réparation et surtout plus de prévention auprès des enfants.
Si la gestion des plaintes (dévoilement et signalement) semble mieux organisée dans certains pays occidentaux, la
prise en charge plus thérapeutique des victimes reste encore à développer. Les idées ne manquent pas. Les
thérapeutes systémiques élaborent de nombreuses stratégies thérapeutiques, notamment dans le champ de
l'éthique relationnelle et des thérapies contextuelles. La formation de thérapeutes spécialisés dans ce domaine
particulier de la psychopathologie infanto-juvénile devrait comprendre une meilleure connaissance du vécu des
victimes d'inceste et des processus sous-jacents à la construction de leur personnalité.
Selon des processus plus ou moins inconscients, l'accommodation, l'assimilation, l'introjection et l'identification
anxieuse, la victime prend sur elle la culpabilité même de l'abuseur. L'enfant victime est ainsi marqué par la
personnalité de son abuseur au détriment de la sienne propre. Comme par un effet de miroir, l'enfant perd l'image de
soi, en captant celle de son abuseur. Cette image est notamment caractérisée par l'impossibilité d'avoir des relations
égalitaires avec les autres. L'enfant se voit comme un objet usé ou un tas de chair avariée. Cette dévalorisation
conduit à une dépersonnalisation et à une cassure identitaire. La faible estime de soi, le manque de confiance, la
blessure narcissique profonde empêchent l'enfant de se forger une personnalité singulière et de se réaliser dans un
être bien structuré. La honte d'avoir eu des rapports sexuels avec un adulte, surtout s'il s'agit d'un proche, peut
engendrer le dégoût de soi-même et d'énormes difficultés à assumer la vie de relation.
Selon Van Gijseghem et Gauthier (1992), il existe un lien entre la puissance du secret, qui allie l'enfant et son
abuseur, et la pulsion de mort. Le fait de garder un secret constitue une protection contre la menace fantasmatique
de destruction ou de morcellement. L'angoisse de mort est d'autant plus active si l'enfant a subi des menaces
concrètes et du forçage physique ou sexuel. Confier un secret, dans le premier temps de la révélation, c'est mettre
en mots quelque chose d'innommable ou d'incrédible, mais c'est également prendre un risque. Une fois le secret
révélé à une personne qui va le partager avec une autre, il ne remplit plus sa fonction contractuelle et protectrice.
L'enfant dépossédé de son secret est rendu vulnérable, d'autant qu'il va devoir le répéter à plusieurs intervenants
(qui peuvent appartenir à différents systèmes d'intervention). Répéter l'aveu à différents intervenants revient à
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L'inceste : d'un état des lieux à une pratique de la clinique
réactualiser des angoisses de mort, lesquelles représentent pour l'enfant un risque psychique important. Au fur et à
mesure des interventions, l'enfant développe une compulsion à parler qui l'oblige à dire « je suis l'enfant victime ».
Des premiers entretiens avec l'enfant, à une prise en charge plus thérapeutique, la dictature de l'aveu qui bouscule
une existence ne devrait pas soumettre les capacités désirantes et créatrices de l'enfant, en tant que sujet.
Indépendamment des activités sexuelles qu'il subit, l'enfant noue des liens de nature affective avec son abuseur ;
bien souvent pour atténuer des mouvements agressifs de sa part ou pour se donner une marge de sécurité. L'enfant
perçoit son abuseur comme un personnage incontournable qu'il faut bien supporter. Il essaye donc d'aménager des
espaces de sécurité affective autour de lui. Bien après l'arrêt des activités sexuelles, l'emprise de l'abuseur sur sa
victime continue à avoir des effets perfides sur l'existence de la personne abusée. Cette dernière une fois adulte et
trop embarrassée par son histoire d'abus, n'aura pas eu la possibilité de se structurer et de métaboliser ses
expériences. Elle devra compter sur le temps, sur ses ressources personnelles ou sur un éventuel soutien
psychologique, pour devenir capable d'affronter les vicissitudes de la vie.
Toujours susceptible d'être victimisée ou exploitée, une femme adulte qui a vécu un abus sexuel dans l'enfance peut
ainsi laisser se reproduire la même situation à l'égard de ses enfants actuels. Néanmoins, certaines personnes
abusées parviennent à prendre leur vie en main et à mener une existence quasi normale. Quant à l'homme adulte
qui a connu le même genre d'abus dans son enfance, il peut devenir à son tour abuseur d'enfants ou parent
incestueux à l'égard de ses propres enfants. Mais tous les abuseurs ne sont pas d'anciens enfants abusés ou
maltraités. A contrario, tous les enfants abusés ne sont pas destinés à devenir de futurs agresseurs sexuels. C'est
souvent parce qu'il est capable de démonter le scénario qui l'a amené à devenir le partenaire sexuel d'un adulte, que
l'enfant-victime parvient à se dégager progressivement de son emprise psychologique. Aussi pénible peut être une
expérience de ce type, aussi important est de lui donner du sens. Préventivement, il est donc capital d'aider l'enfant
abusé à ne devenir ni une victime désignée, ni un abuseur potentiel.
La prise de conscience de la problématique des abus sexuels, l'inceste en particulier et les techniques de
remédiation ouvrent progressivement la voie à une psychiatrie sociale à visage humain, plus particulièrement centrée
sur le devenir de l'enfant sexuellement abusé.
En guise de conclusion
Depuis Ferenczi (1932), nous savons que les passions des adultes et leur influence sur le développement du
caractère et de la sexualité de l'enfant ont souvent des conséquences désastreuses pour son devenir et son
bien-être. De son for intérieur, l'enfant « incestué », héritier d'une généalogie traumatique et figure mythique d'un
ordre inversé, regarde avec angoisse ceux des adultes qui ont confondu le langage de la tendresse avec celui de la
passion. Nous venons de quitter le siècle qui a vu naître entr'autres horreurs les camps de la mort. Parmi ces
horreurs, nous savons qu'aujourd'hui encore, la violence sexuelle peut être utilisée comme une véritable arme de
guerre et comme instrument de pouvoir dans certains systèmes totalitaires familiaux ou politiques. Si l'abus sexuel à
l'égard des enfants est un crime du quotidien, dans l'absolu, il représente également un crime dans l'humanité.
Ajoutons, en guise de conclusion, que le phénomène de l'inceste et son impact sur notre communauté humaine
donnent à méditer sur les postulats suivants : ne faudrait-il pas apprendre aux individus qui composent une famille
que l'interdit de l'inceste est une des règles qui fondent la communauté à laquelle ils participent ? Cette énonciation
devrait inclure une éducation sexuelle et affective de bonne qualité qui comprendrait l'enseignement d'une éthique
relationnelle et sexuelle. Cette éducation philosophique et morale devrait professer l'esprit critique, la prise de
conscience, le respect de soi et des autres, la notion d'intégrité corporelle, l'éthique relationnelle, l'équité, la
confiance, la tolérance, la loyauté, la reconnaissance, le droit, la légitimité et la justice. La plupart de ces concepts
sont fondamentaux à l'épanouissement d'une existence personnelle (l'individu), familiale (le système) et sociale (le
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L'inceste : d'un état des lieux à une pratique de la clinique
lien entre l'individu et le système socio-familial).
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CRIPCAS Centre de recherche interdisciplinaire sur les problèmes conjugaux et les agressions sexuelles,
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[1] FERENCZI S. La confusion de langues entre les Adultes et l'Enfant, le langage de la tendresse et de la passion. Analyses d'enfants avec des
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[2] Voir à ce propos Y.H. Haesevoets, L'enfant victime d'inceste, 1997, De Boeck Université, Paris-Bruxelles.
[3] 0 Citées par Marcela Montes De Oca dans une revue critique de différents travaux épidémiologiques anglo-saxons récents sur l'abus sexuel à
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[4] http://www.ipsos.fr/ipsos-public-af...'inceste
[5] voir : LE GOFF J-F. L'enfant, parent de ses parents. Parentification et thérapie familiale, Collection Les théarpeis familiales aujourd'hui,
L'Harmattan, 2000.
[6] voir : LE GOFF J-F. L'enfant, parent de ses parents. Parentification et thérapie familiale, Collection Les théarpeis familiales aujourd'hui,
L'Harmattan, 2000.
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