Danielle Jacqui poussée vers l`exil artistique

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Danielle Jacqui poussée vers l`exil artistique
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jeudi 3 mars 2016 La Marseillaise
Bouches-du-Rhône
Aubagne. La peintre et sculptrice a passé 8 ans en résidence dans la ville provençale pour ériger un colossal
d’art brut. En stand-by depuis 2 ans, le projet sera finalement exposé dans la ville suisse de Renens.
Danielle Jacqui poussée
vers l’exil artistique
n
« Ici, résidence d’artiste Colossal d’art brut / Organugamme,
Danielle Jacqui ». Le large panneau,
installé sur l’ancien marché de gros
d’Aubagne à l’occasion de l’année
culturelle MP 2013, va pouvoir être
enlevé. Figure de proue de l’art singulier, Danielle Jacqui en avait fait son
repaire artistique depuis 2007 afin
de réaliser une œuvre monumentale
sur commande de la communauté
d’agglomération du Pays d’Aubagne
et de l’Étoile.
Sauf qu’à mesure que la peintre
avançait son travail, aucun lieu
pour l’exposer dans Aubagne ne
se dégageait. Initialement prévu
pour orner la gare d’Aubagne -refus des Bâtiments de France- puis
pour figurer en entrée de ville, un
échantillon témoin du colossal a
finalement été posé au-dessus d’un
rond-point attenant au parc de la
colline aux oiseaux.
« C’est le lot d’une
aventure artistique »
Aujourd’hui, c’est tout ce qu’il va
rester sur place de ces huit années
de labeur. Car depuis la fin de sa
convention avec l’Agglo d’Aubagne
fin 2014, Danielle Jacqui était dans
l’expectative la plus totale, victime
aussi collatérale du changement
de majorité politique de mars 2014.
Après deux ans de stand-by, une issue vient d’être trouvée : la majorité
de son colossal a pris le chemin de
la Suisse. Ce lundi, 5 conteneurs de
12m de long chacun ont été chargés
depuis le marché de gros. 35 tonnes
au total arrivées avant-hier à Renens, commune non loin de Lausanne. L’œuvre prendra place dans
un lieu en cours de création dédié à
tous les arts (lire ci-dessous).
« Une autre partie, un totem, ira
en collection au musée d’art brut
de Lausanne », relate Danielle Jacqui. D’autres pièces seront exposées
au musée des arts naïfs de Nice, à
Draguignan, à Montpellier et Sète.
Si elle regrette le « manque de communication locale » sur son projet,
« celle qui peint » trouve qu’il serait
« dommage qu’Aubagne ne fasse pas
partie de ce périple artistique ». « Danielle Jacqui, une artiste connue et
reconnue, a déjà une belle représentation ici avec la porte du Millénaire
et la colline aux oiseaux », tente de
désamorcer Philippe Amy, adjoint
au maire en charge de la culture.
L’élu assure que l’œuvre sera mieux
mise en valeur : « Avec notre projet
de restructuration du cœur de ville,
la céramique sera un marqueur fort,
différents sites seront identifiés pour
un parcours urbain. »
Quant au légitime sentiment de
gâchis de voir une œuvre locale
s’exiler en Suisse, Philippe Amy
y voit plutôt un moyen de « faire
rayonner le savoir-faire de notre
territoire ». Un sentiment partagé
par Danielle Jacqui, qui ne ressent ni amertume ni tristesse :
« Mon œuvre sera appréciée autrement, c’est le lot d’une aventure artistique, confie la Roquevairoise.
Je m’en tire bien, être fêtée comme
ça à l’extérieur, c’est agréable. »
« Une nouvelle vie commence pour
cette œuvre d’art si singulière »,
souligne Sylvia Barthélémy. La
présidente de l’ex-Agglo a donné
son accord pour que Danielle Jacqui fasse don de son œuvre à Renens, renonçant ainsi à ses droits.
florent de corbier
Un colossal aux accents helvètes
n Jointe avant-hier en fin d’après-
midi, la maire de Renens était tout
juste de retour à son bureau après
avoir assisté à l’arrivée des cinq
conteneurs partis tôt le matin d’Aubagne. Le colossal d’art brut sera
bientôt visible dans cette ancienne
cité ouvrière de 20 000 habitants
en pleine mutation, au cœur d’un
projet « La ferme des tilleuls ». Le
bâtiment sera « un lieu culturel
que l’on veut interdisciplinaire »,
indique Marianne Huguenin, la syndique, nom donné aux maires-.
Mais comment Renens a eu vent
du travail en jachère de Danielle
Jacqui ? « Un des acteurs du projet de «La ferme des tilleuls », Mario Del Curto photographe est en
contact avec de nombreux artistes
d’arts singuliers dont Danielle Jacqui, qu’il connaît depuis 15-20 ans.
Il a suivi les diverses péripéties de
sa résidence d’artiste », fait valoir
l’élue helvète. Danielle Jacqui s’est
rendue à Renens et a été séduite
par le projet. « Cela fait en gros
un an que nous travaillons à l’idée
de récupérer l’œuvre », poursuit
Marianne Huguenin.
La maire s’est rendue deux fois
à Aubagne, au marché de gros
bien sûr, mais aussi dans la fameuse maison de l’artiste à Pontde-l’Étoile. « Impressionnée par
l’ampleur de son travail », la maire
voit pour Renens « une opportunité
magnifique ». Le colossal devrait
recouvrir un petit bâtiment non
loin de la ferme en elle-même. Clin
d’œil de l’histoire, « elle jouxte la
voie de chemin de fer, cela fait
écho au projet initial de la gare
d’Aubagne », conclut malicieusement Marianne Huguenin.
f.c.
Partie mardi en Suisse via 5 conteneurs marins, l’œuvre de Danielle Jacqui ne laissera qu’un souvenir
minimaliste à Aubagne, dans un giratoire. photos Alban kakulya, archives f.c. et dr

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