Présentation Aurore Lalucq

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Présentation Aurore Lalucq
Quand les banques fraudent
et déclenchent des crises…
Aurore Lalucq – Les conférences de l’Espace Dickens, Mars 2016.
Pourquoi revenir sur la crise des subprimes et son
début aux USA
- Le rôle des banques est de financer l’économie réelle
- on a vu avec la crise des subprime, qu’elles ne remplissaient pas toujours ce rôle
- Et auj elles ne le remplissent pas correctement: QE sans conséquences sur éco
réelle – comme si credit crunch
- Retour BAU pour les banques (aussi grosses, pratiques peu régulées, renouent
avec les profits)
- endettement des Etats pour socialiser les pertes de banques)
- Pourquoi sommes nous dans cette situation?
- rapport de force défavorable à la régulation
- les bons économistes pas écoutés - Retard sur la banque/finance - diagnostic
erroné/étouffé de la crise -> mauvais traitement
- Craintes retour crise
Quel est ce diagnostic erroné ?
• Inconscient collectif : part des USA - débute avec Lehman en 2008 – la plus grosse faillite
bancaire de tous les temps. La cause : les actifs toxiques et la titrisation.
• Crise non prévisible
• Dans les faits : part des USA mais les faillites bancaires débutent fin 2006 et continuent
en 2007 (Ownit Mortgage, Ameriquest, Indymac) 2ème plus grosse faillite bancaire
Washington Mutual (WaMu) et un rôle important de la fraude.
• Indymac + WaMu + New Century Financial Corporation = faillite de Lehman
• Tomson Nguyen et Henry Pontell :
« La crise financière de 2008 de la zone Atlantique Nord […] semble avoir été le théâtre
dans lequel l’appât du gain, la supercherie, une surveillance insuffisante et la cupidité de
nombreux initiés ont entraîné le développement d’une criminalité telle qu’elle déboucha
sur une véritable catastrophe »
• Si on ne s’intéresse pas à la fraude dans cette crise – on passe à côté de l’essentiel et
d’autres risques de se reproduire.
De la théorie…
La fraude et la fraude patronale
• Principe de la fraude/escroquerie : amener qqn à lui faire confiance dans le but
de le trahir et de le voler
• Fraude patronale : PDG utilise sa banque à la fois comme une arme d’extorsion et
un bouclier pour compliquer la détection de sa fraude (Wheeler et Rothman,
1982)
• le patron va être le mieux placer pour dévaliser sa banque (W. Black/ Jean de
Maillard/ Jean François Gayraud)
• Pourquoi les banques sont des institutions propices à la fraude (relation de
confiance et int. privés) – Hyman Minsky
• Csqs dramatiques (éco et social) surtout quand ces fraudes évoluent par vague ou
épidémie (pas sans victime – FBI) – super-prédateurs
• G. Akerlof : position de force des fraudeurs
• Rôle dans les bulles – ex : Enron/Worldcom – crise des Saving and loan etc.
Fraude patronale contre intuitive
• fraude comptable patronale de « pari gagné d’avance » (sure thing),–
“Looting: The Economic Underworld of Bankruptcy for Profit” [Pillage
: l’économie criminelle de la faillite à but lucratif].
• Il est certes contre-intuitif de penser qu’une faillite puisse faire gagner
de l’argent et pourtant c’est bien de cela qu’il s’agit ici.
• La fraude comptable maximise le revenu à court terme fictif de
l’entreprise. Elle permet ainsi au dirigeant de faire un profit (profit) en
maximisant sa rémunération(en « pillant » la banque/looting) et
provoque des pertes massives qui pousseront l’établissement de
crédit au dépôt de bilan (« faillite »/bankruptcy).
Faits stylisés
• Caractéristiques fraudeurs : culture d’entreprise bien spécifique (culte de
l’égo du patron, intimidation etc.), volonté neutraliser les contrôles
internes et externes (besoin de contrôle, W.Black), optimisation du
contexte réglementaire (soutenir les processus de déreglementation,
neutraliser les agents), pyramide de Ponzi.
• ENVIRONNEMENT du Marché hypothécaire américain : environnement
criminogène (passage des 3D aux 3dé) / gré à gré (actifs dont la valeur est
peu vérifiable) , tx croissance élevé, effets de leviers, rémunérations
excessives, bulle, absences de provisions sur pertes
• RECETTE : croissance / prêts médiocres / levier /provisions faibles
• Conséquence : faillite
… à la pratique
Le principe
• Dans un environnement déréglementé et donc criminogène, des
produits financiers falsifiés (des prêts menteurs) ont été vendus
massivement aux populations les plus fragiles (des personnes
illettrées, des personnes âgées, parfois malades, etc.).
• Ces prêts contrefaits – devenus la marque de fabrique de plusieurs
grandes entités bancaires telles que WaMu, IndyMac, Ameriquest,
Countrywide – étaient conçus pour faire défaut, conçus pour ne pas
être remboursés, en d’autres termes mais ils allaient faire la fortune
de leurs pdgs et courtiers.
Fonctionnement des prêts hypothécaires aux
Etats-Unis
• Relancer la croissance à tout prix
• Marché primaire et secondaire (MBS, CMBS etc.)
• Fannie Mae et Freddie Mac
• Les courtiers (licence / pas de formation)
• Prêts prime (full doc loans) et non prime (stated or no
documentation) + credit score
Ex : new century (vol prêts émis en milliards
de USD)
Produits frauduleux et rôle des incitations
• Rémunération des courtiers ( prêt élevé + taux d’int + solidité) : gonfle
revenue de l’emprunteur et la valeur de son actif + bonus si pas
remboursement anticipé + si pb historique
• Couvre 100% achat
• 2006 : 46 % des prêts émis sont sans doc ou à faible doc / en
Californie 60%
• Épidémie de fraude : croissance exceptionnelle + crédit de mauvaise
qualité / effet de levier / fonds
• Fraude systémique : FinCEN + Fitch + dynamique Gresham + Thomas
Miller attorney général de l Iowa (nivellement par le bas)
« Depuis quelques années, le marché des subprimes a provoqué une
sorte de nivellement par le bas : les acteurs malhonnêtes ont été
grassement rémunérés pour leurs méfaits tandis que les acteurs
honnêtes ont perdu des parts de marché. […]
Les incitations du marché ont récompensé responsables presque non
compétitifs. L’instauration de réglementations fortes permettra la mise
en place d’un terrain équitable où les acteurs éthiques feront preuve de
déontologie.
En dépit de l’identification des problèmes précis posés par les prêts de
l’année 2006, les « originateurs » ont continué à utiliser des produits
aux mêmes caractéristiques en 2007, »
« La banque, selon notre analyse, a suivi une stratégie d’expansion
agressive qui s’appuyait massivement sur des prêts initiés par les
courtiers et notamment sur des prêts peu documentés.
Cette stratégie lui a permis de croître à un taux annuel de plus de 50 %
de 2004 à 2006.
Ce business model est typique des grands acteurs qui on bénéficié
d’une croissance très rapide pendant le boom du marché de
l’immobilier résidentiel et ont subi les plus lourdes pertes lors de son
effondrement » (Jiang, Aiko et Vytlacil 2009, p. 9).
Crise évitable
• Phil Angelides et la commission d’enquête « En dépit des points de
vue exprimés par de nombreuses personnes à Wall Street et à
Washington selon lesquels cette crise n’aurait pu être prévue, ni
évitée, il y avait bien des signes d’alerte. Le drame, c’est qu’ils ont été
ignorés ou disqualifiés »
• Savings and loan (expérience, travaux…)
• Identification des prêts menteurs
• FBI
Mais blocages politiques et idéologiques
• Ameriquest
• Science éco qui n’enseigne pas la fraude (et parfois la glorifie ->
Mankiw/Greenspan) – effets criminogènes de l’économétrie
• Des régulateurs anti-régulation et des conflits d ’intérêt
• Geithner : Efforts de Sheila Blair et Neil Barofsky vains
• Peu de plaintes – peu d’enquêtes – des recours aux arrangements
financiers
• En 2013, Eric Holder, alors procureur général des États-Unis (ministre de la
justice) a été entendu par le comité judiciaire du Sénat américain :« Si nous
poursuivons en justice ces banques, cela aura un impact négatif sur
l’économie nationale, peut-être même sur l’économie mondiale. Je crois
que cela est attribuable au fait que ces banques sont devenues trop
grandes. »
• Ce que dit Eric Holder, c’est qu’une fois une certaine taille atteinte, vous
êtes effectivement au-dessus des lois. À chaque fois, le procureur a
d’ailleurs préféré l’accord financier à l’amiable plutôt que le procès.
• Comme le souligne Matt Taibbi du magazine Rolling Stone, un journaliste
qui couvre depuis des années la crise financière et son aspect frauduleux, «
dans les années qui suivirent le 11 septembre 2001, respirer le même air
qu’une personne suspectée de terrorisme pouvait vous conduire en
détention “extra légale” à vie. En revanche aujourd’hui, si vous êtes too big
to jail, vous pouvez blanchir l’argent du terrorisme, violer l’Enemy Act et
non seulement vous ne serezp as inquiétés par la justice mais en plus, le
gouvernement fera tout ce qui est en son pouvoir pour faire en sorte que
vous ne perdiez pas votre licence ».
• La situation est la même de l’autre côté de la Manche : « Nous avons vu
beaucoup de choses durant cette crise, sauf des inculpations », résume le
journaliste Joel Benjamin. Un tacle direct à l’encontre de Mark Carney,
gouverneur de la Banque d’Angleterre (et ancien de Goldman Sachs), qui
avait un jour déclaré : « Personne n’est au-dessus des lois. » « Nombre de
PDG de banque derrière les barreaux depuis 2008 ? Zéro ! », ironise le
journaliste.
• Même le blogueur du journal conservateur The Telegraph s’étonne qu’«
aucun banquier [n’ait été] emprisonné aprèsla crise. Et [qu’]aucun des
chefs de la banque de semble faire preuve d’humilité ».
• tendance à l’individualisation des fraudes pour cacher leur ampleur
systémique. Bernard Madoff a reçu bien plus d’attention que Countrywide,
Washington Mutual, AIG, ou Bear Stearns.
Too big to fail – Too Big to jail – Too Powerful
to jail
• Finalement, le problème n’est pas tant le “too big to jail”, que le “too
powerful to jail”, comme le soulignent les criminologues et
économistes Henry Pontell, William Black et Gilbert Geis. La
criminalité en col blanc est une criminalité de puissants.
• Pb de vision de la criminalité
• Pierre Lascoumes et Carla Nagels
Edwin Sutherland
• Edwin Sutherland la complaisance vis-à-vis de la criminalité en col
blanc s’expliquait par la proximité sociale entre les gouvernants et les
criminels en col blanc (proximité culturelle, liens personnels – passage
des gouvernants par ces mêmes entreprises avant leur arrivée au
pouvoir –, politiques du gouvernement influencées par les
contributions du big business, etc.).
• « L’homogénéité culturelle, la proximité des relations personnelles et
les relations de pouvoir protègent les hommes d’affaires », écrivait-il.
• L’absence de poursuite judiciaire lors de la Grande crise valide les
écrits de Sutherland.
Comment redonner aux banques leurs rôles
• Enseignement (fraude, Minsky)
• Moyens aux régulateurs
• Changer le personnel
• Procès – sortir de la culture des arrangements financiers/amendes
• Structures de rémunérations
• Réduire la taille des banques
• Agence d’autorisation de mise sur le marché des produits financiers

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