Les acteurs de la lutte contre le terrorisme et leurs

Transcription

Les acteurs de la lutte contre le terrorisme et leurs
1
SOMMAIRE
INTRODUCTION ……………………………………………....... 3
PREMIERE PARTIE : DE L’EFFICACITE DE LA
GUERRE ANTI-TERRORISTE …………………………........ 8
CHAPITRE 1 : Les acteurs de la guerre contre le terrorisme et leurs
missions …………………………………………………………….….. 9
CHAPITRE 2 : La guerre contre le terrorisme : une “politique”
anti-terroriste unilatéraliste bénéficiant d’un soutien
international mitigé …….……………………………………………... 34
CHAPITRE 3 : Des acquis et de l’efficacité de la guerre antiterroriste…………………………………………………………..…... 74
DEUXIEME PARTIE : DES IMPLICATIONS
DE LA GUERRE ANTI-TERRORISTE SUR
LES RELATIONS AMERICAINES …………………….…. 98
CHAPITRE 4 : Les réactions au 11 septembre, à la guerre contre le
terrorisme et leurs motivations …………………………………….… 99
CHAPITRE 5 : Les implications de la guerre anti-terroriste sur
les relations Etats-Unis/Europe et Etats-Unis/Russie .......................... 138
2
CHAPITRE 6 : Les implications de la guerre contre le
terrorisme sur l’opinion publique musulmane et sur les
relations Etats-Unis/Régimes proaméricains ………………..……… 159
CONCLUSION …………………………………………….…… 189
DOCUMENTS ANNEXES ……………………………...…… 194
BIBLIOGRAPHIE …………………………………………..… 247
3
INTRODUCTION
4
Le 11 septembre 2001, à l’heure où les New-yorkais, dans leur grande
majorité, se rendaient au travail, deux avions de lignes américaines
percutent les Tours jumelles du World Trade Center (le symbole de la
puissance économique américaine). En même temps on apprenait qu’un
autre avion avait percuté le Pentagone (les locaux du Département de la
Défense et symbole militaire des Etats-Unis). Un autre avion s’écrasera
le même jour en Pennsylvanie ; officiellement les passagers se sont
rebellés contre les pirates pour leur empêcher d’atteindre leur objectif qui
était le Capitole ou la Maison Blanche.
En tout, quatre avions de lignes ont été utilisés comme armes le 11
septembre pour frapper, les symboles de la puissance américaine. Plus de
3 000 personnes seront tuées dans ces attaques. L’Amérique furieuse et le
monde ahuri se demandent « qui a osé faire cela ? ». Quelques jours
après
cette
tragédie,
à
la
suite
d’une
gigantesque
opération
d’investigation, Ossama Ben Laden et son organisation Al Qaïda sont
désignés comme les responsables des attaques1. La « quatrième guerre
mondiale » est déclenchée. Une guerre contre le terrorisme international
qui mobilise l’Amérique entière et ses moyens (diplomatiques, militaires,
économiques, judiciaires, etc.).
Ce n'était pas la première fois qu’Ossama Ben Laden et son organisation
Al Qaïda s’en prenaient à la puissance américaine. Dans les années 90 au
cours de la guerre somalienne, Al Qaïda avait publié une fatwa
demandant l’attaque par les musulmans des forces américaines dans la
Corne de l’Afrique. Par la suite, après le massacre de soldats américains
dans l’opération ″Restore Hope″, le groupe islamiste était soupçonné d’y
être lié. En 1993, Al Qaïda est impliqué dans l’explosion d’une bombe au
World Trade Center. L’attentat avait fait six morts. En 1996, 19 soldats
américains sont tués dans un attentat vraisemblablement orchestré par Al
Qaïda à Dharan en Arabie Saoudite. En 1998, deux attentats contre les
1
Voir Annexe I pour plus d’informations sur Ossama Ben Laden et Al Qaïda.
5
ambassades américaines au Kenya et en Tanzanie avaient fait plus de 200
morts dont la plupart étaient des ressortissants kenyans et tanzaniens. En
2000, un destroyer américain, le USS Cole, est attaqué dans le port
d’Aden au Yémen, par des terroristes financés par Ossama Ben Laden :
bilan de l’opération 17 marins américains tués2.
Jusque là, les Etats-Unis n’avaient pas pris de sérieuses options pour
neutraliser Ben Laden et son organisation. La seule chose qu’ils ont fait,
pour répliquer à certaines des attaques, a été de bombarder, avec des
missiles Tomahawk, des infrastructures supposées appartenir à Al Qaïda
(au Soudan et en Afghanistan). Mais depuis le 11 septembre, le ton est
tout autre : l’Amérique est décidée à éradiquer le terrorisme international
et à mettre la main sur ses cerveaux.
Depuis les terribles événements du 11 septembre, le terrorisme
international est devenu la préoccupation majeure de tous les Etats et de
toutes les organisations internationales. Il a remplacé, pour les Occidents,
le nazisme, le fascisme et le communisme d’hier. C’est le nouvel ennemi
de l’Occident mais pas seulement. Les pays musulmans, également,
notamment l’Arabie Saoudite, le Pakistan et autres, y voient une menace
crédible à leur stabilité. Ces pays, qui hier, avec la complicité de
l’Amérique, avaient soutenu et attisé l’intégrisme islamiste contre
l’ennemi soviétique, le voient aujourd’hui se retourner contre eux et les
empêcher de dormir tranquillement. La guerre que l’Amérique mène aux
terroristes est au centre de l’actualité internationale et n’est pas sans
conséquences sur les Relations internationales. D’où notre intérêt
d’avoir entrepris un travail de recherche sur le sujet : notre objectif étant
de voir si cette guerre a produit les effets escomptés et si elle a des
implications notables sur les relations entre les Etats-Unis et le reste du
monde.
2
Une chronologie sur les attaques terroristes commises par Al Qaïda ou dans lesquelles
il est lié est disponible en Annexe II
6
Noter bien que notre travail ne consiste pas à traiter la lutte internationale
contre le terrorisme. Il consiste uniquement à traiter la question du côté
américain. Plus clairement cela veut dire que ne sera pris en compte que
ce qui rentre dans le cadre de la guerre américaine contre le terrorisme.
Toutefois, les actions internationales se rapportant ou en réaction à cette
guerre seront développées.
Quand on évoque la guerre anti-terroriste, il est intéressant, à notre avis,
de se poser ces questions : Comment est-elle organisée ? Quelles sont les
mesures prises ? Comment les acteurs de la scène internationale y
réagissent-ils et quelles sont leurs motivations ? Bénéficie t-elle d’un
soutien international ? Produit-elle les effets escomptés ? A-t-elle
bouleversé les relations entre les Etats-Unis et le reste du monde ?
Nous organiserons notre réflexion autour de deux principaux axes dans
les quels nous chercherons à répondre à deux questions principales
englobant l’ensemble des réponses ou tentatives de réponse aux questions
que nous venons de soulever :
¾ dans une première partie, notre démonstration consistera à voir
si vraiment cette guerre anti-terroriste produit des résultats
positifs ou si elle est contre productive (Chapitre 3). Mais avant
cela, nous allons identifier, dans un premier temps, les acteurs de
cette guerre et leurs missions (Chapitre 1) et ensuite, dans un
second temps, nous verrons les mesures anti-terroristes mises en
place par les Etats-Unis pour mener cette guerre, l’appui
international (notamment pour geler les avoirs des terroristes) et
la coopération militaire américaine avec certains pays (Chapitre
2).
¾ dans une seconde partie, notre objectif consistera à voir si la
guerre contre le terrorisme a eu des implications notables sur les
7
relations qu’entretiennent les Etats-Unis avec le reste du monde,
notamment leurs pays alliés et amis (en Europe et dans le monde
musulman) mais aussi avec leur adversaire d’hier la Russie
(Chapitres 5 et 6). Avant d’en arriver là, nous verrons d’abord
quelles ont été les réactions des acteurs de la scène internationale
(les Etats, les Organisations internationales et les Organisations
non gouvernementales) au 11 septembre et à la guerre antiterroriste (Chapitre 4). L’intérêt de ces réactions repose sur le
fait que, dans la plupart des cas, se sont elles qui ont canalisé les
relations des Etats-Unis avec les autres depuis le 11 septembre.
8
PREMIERE PARTIE : DE
L’EFFICACITE DE LA GUERRE
ANTI-TERRORISTE
9
Chapitre 1 : Les acteurs de la guerre
contre le terrorisme et leurs missions
La “guerre contre le terrorisme” aux yeux de Washington est une
véritable guerre. Ce n’est pas que des mots. A y voir de prés, on assiste à
un véritable effort de guerre aux Etats-Unis. Tout le monde est mis à
contribution. Cela va du président au simple citoyen. Des plus hautes
autorités au “bas peuple”. Chacun a un rôle bien défini à y jouer. Une
grande partie de ces rôles est définie dans le document “National
Strategy for Homeland Security” (NSHS). Avant donc d’identifier les
acteurs de cette guerre et de présenter leurs missions, il serait utile
d’avoir un aperçu de ce qu’est la NSHS ; qu’est ce qu’elle cherche à
réaliser ; et comment elle compte faire pour y arriver.
I.
Une brève présentation de la NSHS
La “National Strategy for Homeland Security” (Stratégie nationale pour
la sécurité de la Patrie) a été publiée en novembre 2002. Elle a été le
fruit d’une large consultation qui a duré huit mois3. Elle cherche a
répondre à « quatre questions fondamentales » que sont :
‰
Qu’est-ce-que c’est que la “Homeland Security”, et quelles
missions lui attribuer ?
‰
Que cherche t-on à accomplir à travers cette Stratégie
nationale de sécurité, et quels sont ses objectifs primordiaux ?
‰
Quel est le rôle de l’Exécutif américain dans la réalisation des
objectifs de cette Stratégie nationale de sécurité ?
3
Les concepteurs de la NSHS ont prie le soin de consulter, avant de l’élaborer : des
gouverneurs ; des maires ; des membres du Congrès ; des hommes d’affaires ; des
professeurs ; des soldats ; des pompiers ; des policiers ; des familles des victimes du 11
septembre 2001 ; des journalistes ; des scientifiques etc.
10
‰
Quels sont également les rôles des gouvernements non
fédéraux, du secteur privé, et des citoyens américains ?
La NSHS a pour objectifs4 : d’empêcher des attaques terroristes sur le sol
des Etats-Unis ; de réduire leur vulnérabilité aux actes terroristes et de
réduire également au maximum les dégâts que pourraient leur causer de
tels actes. Pour atteindre ses objectifs, elle a défini dix domaines sur
lesquelles elle va s’appuyer. Chaque domaine renferme des objectifs
précis à atteindre. Ces domaines sont : le Renseignement et l’alerte
(Intelligence and Warning) ; la Sécurisation de la frontière des Etats-unis
et du transport (Border and Transportation Security) ; le Contreterrorisme domestique5 (Domestic Counterterrorism) ; la Protection des
infrastructures
critiques
et
des
capitaux
(Protecting
Critical
Infrastructures and Key Assets) ; la Protection contre les menaces
catastrophiques (Defending against Catastrophic Threats) ; l’état de
préparation des secours et de la réaction [face aux attaques terroristes]
(Emergency Preparedness and Response) ; la Loi (Law) ; la Science et la
technologie (Science and Technology) ; le Partage de l’information
(Information sharing and Systems) [entre les acteurs de la guerre contre
le terrorisme à l’intérieur des Etats-Unis mais aussi entre les Etats-Unis et
leurs partenaires internationaux] ; enfin la Coopération internationale
(International Cooperation).
Pour éviter de rentrer dans des détails inutiles, il ne serait pas nécessaire
de développer les objectifs de chaque domaine. Toutefois, les objectifs de
trois domaines (la Sécurisation de la frontière et du transport ; le Contreterrorisme domestique ; la Protection contre les menaces catastrophiques
et l’état de préparation des secours et de la réaction) seront développés.
4
Voir la lettre de George W. Bush qui est au début du document de la NSHS.
Aux Etats-Unis, le mot « domestique » remplace celui de « intérieure » dans le
langage politique. Cela pour éviter que l’expression « intérieure » renvoie à la
Commission sur la « sécurité intérieure » créée pendant le maccarthysme pour réprimer
les comportements politiques anti-américains.
5
11
Cela pourra permettre aux lecteurs d’avoir une idée de ce qu’envisage les
Etats-Unis dans la “Homeland Security”.
La Sécurisation de la frontière et du transport6
Dans ce domaine, les Américains envisagent, avec l’aide de leurs voisins
(le Mexique et le Canada) mais certainement aussi avec la coopération
des autres pays, de mieux contrôler les flux de personnes, de
marchandises et de services vers leur pays. La Stratégie nationale de
sécurité a fixé six objectifs dans ce domaine parmi lesquelles :
‰
la création de « frontières futées » : c’est à dire des frontières
qui ne permettront pas aux personnes mal intentionnées de
rentrer aux Etats-Unis. A vrai dire cela signifie des contrôles
accrus et très stricts aux frontières ;
‰
la mise en application de l’"Aviation and Transportation
Security Act" ;
‰
la restructuration de la “US Coast Guard” (la Garde côtières
américaine);
‰
la réforme des services d’immigration ; etc.
Egalement, dans le cadre de la sécurisation de la frontière et du transport,
le Président Bush avait demandé au Congrès de permettre le transfert de
certaines agences nationales (s’occupant de la surveillance de la frontière
et du transport) au nouveau Département de la Homeland Security7. Les
agences en question étaient : le Service d’immigration et de
naturalisation (relevant du Département de la Justice) ; le Service des
douanes (relevant du Département du Trésor) ; l’“Animal and Plant
Health Inspection Service” (relevant du Département de l’Agriculture) ;
l’Agence pour la sécurité du transport (relevant du Département du
6
Pour plus de détails sur ce domaine voir p. 21 à 24 du document de la NSHS.
A l’époque où le président Bush faisait cette demande, le Département n’était pas
encore créé ; il était en projet.
7
12
Transport) et de la Garde côtière des Etats-unis. Aujourd’hui ces agences
dépendent du Département de la sécurité intérieure (DHS).
Le Contre-terrorisme domestique8 : la Stratégie nationale de sécurité
recommande dans ce domaine :
‰
de faciliter l’appréhension des terroristes potentiels : par le
vote de nouvelles lois qui le permettent par exemple ;
‰
d’achever la restructuration du FBI pour accentuer la
prévention des attaques terroristes ;
‰
de cibler et d’attaquer les finances des terroristes ;
‰
de traquer les terroristes étrangers et de les traduire en justice ;
etc.
La Protection contre les menaces catastrophiques9
Ces menaces sont liées à l’utilisation des armes biologiques, chimiques,
radiologiques ou nucléaires par des terroristes ou toute autre personne ou
groupe hostile. Parmi les initiatives majeures définies dans ce domaine
par la Stratégie nationale de sécurité, nous pouvons relever :
‰
la nécessité d’améliorer les techniques de décontamination et les
détecteurs chimiques ;
‰
la mise au point de vaccins et d’antidotes [contre les agents
biologiques pouvant servir comme arme de destruction massive
(ADM)] ;
‰
l’exploitation à fond de la connaissance et des outils scientifiques
pour contrer le terrorisme ; etc.
8
9
Pour plus de détails sur ce domaine voir p. 25 à 28 du document de la NSHS.
Pour plus de détails sur ce domaine voir p. 37 à 40 du document de la NSHS.
13
L’état de préparation des secours et de réaction10
Dans
ce
domaine
la
Stratégie
nationale
de
sécurité
prône :
l’augmentation des stocks de médicament et de vaccin ; la mise en place
de “Citizen Corps”11 (Corps de Citoyen) ; la préparation à la
décontamination chimique, biologique et nucléaire ; la mise en place de
formation [pour organiser les secours en cas d’attaques terroristes] et
d’un système d’alerte national [contre les attaques terroristes] ; etc.
Parallèlement à la Stratégie nationale de sécurité, qui est (comme la
“United State National Strategy” ou Stratégie nationale des Etats-Unis)
une stratégie globale, d’autres stratégies plus spécifiques ont été
confectionnées. Il s’agit de :
‰
la “National Strategy for Combatting Terrorism” : qui définie la
stratégie des Etats-Unis pour la guerre contre le terrorisme
international ;
‰
la “National Strategy to Combat Weapons of Mass Destruction” :
qui a pour objectif d’empêcher aux Etats non nucléaires et aux
terroristes d’accéder aux matériels, à la technologie et au savoir
nécessaire pour développer des ADM;
‰
la “National Strategy to Secure Cyberespaces” : qui vise à
protéger les systèmes informatiques des Etats-unis contre des
personnes ou groupes de personnes mal intentionnées comme les
Hackers, les Crackers ou encore les terroristes ;
‰
la “National Money Laundering Strategy” : elle a pour but
d’empêcher le blanchiment de l’argent qui, selon les autorités
américaines, servirait de financement aux terroristes ;
‰
10
la “National Defense Strategy” ; enfin
Pour plus de détails sur ce domaine voir p. 41 à 46 du document de la NSHS.
Voir la partie sur la mission des citoyens américains dans la guerre contre le
terrorisme dans ce chapitre.
11
14
‰
la “National Drug Control Strategy” : pour lutter contre le trafic
et la consommation de drogue.
II.
Le rôle des autorités fédérales américaines dans la guerre
contre le terrorisme
A la suite du 11 septembre, les autorités américaines ont mis en place un
bureau de rang ministériel pour coordonner les actions des acteurs de la
lutte contre le terrorisme. Ce bureau a servi de fondement au nouveau
ministère de la sécurité intérieure (DHS) qui aujourd’hui est censé
protéger les Etats-Unis contre des attaques terroristes dans le futur. Le
nouveau ministère, à l’instar des autres ministères, comme ceux du
Département de la défense, du Département d’Etat, du Département du
Trésor et autres, joue un rôle central dans la guerre contre le terrorisme.
Chaque ministère impliqué dans la guerre contre le terrorisme joue un
rôle spécifique et qui rentre dans ses compétences.
A. L’OHS : une agence de rang ministériel pour coordonner
la guerre contre les terroristes en attendant la création
d’un ministère de sécurité intérieure
Le “White House Office of Homeland Security” (Bureau de la Maison
Blanche pour la sécurité de la Patrie) est une agence de rang ministériel
créée le 20 septembre 2001. Il avait reçu pour mission de diriger la mise
en œuvre de la Stratégie nationale de sécurité du pays contre la menace
terroriste12. Le premier directeur de cette agence fut Tom Ridge actuel
Secrétaire du Département de la sécurité intérieure. M. Ridge avait pour
mission de coordonner l’ensemble des politiques de guerre contre le
terrorisme du gouvernement fédéral qui impliquait prés d’une
12
En novembre 2002 l’"Office de la Homeland Security" a publié le document de la
NSHS.
15
quarantaine d’agences, un certain nombre de ministères et le secteur
privé.
Après la création du nouveau Département de la sécurité intérieure,
l’OHS, qui lui a servi de fondement, a continué à fonctionner.
Actuellement, sa mission est, entre autre, de conseiller le Président des
Etats-Unis et, en collaboration avec l’“Office of Management and
Budget”, de développer et de défendre les propositions de budget du
Président Bush (c’est à dire le budget pour la défense de la Patrie). Il est
également chargé de certifier que le budget alloué aux ministères leur
permet d’assumer leurs responsabilités dans la guerre contre le
terrorisme.
B. La naissance du ministère de sécurité intérieure et sa
mission dans la guerre anti-terroriste
« L’idée de créer un “super ministère” de la sécurité intérieure n’a pas
germé dans les heures qui ont suivi la catastrophe du 11 septembre
2001 ; celle-ci a plutôt donné l’impulsion finale »13. Le président Bush
n’a fait que reprendre l’idée de son prédécesseur le président Clinton.
De 1993 à la fin des années 90, les Etats-Unis ont subi de nombreux
attentats terroristes très meurtriers (les attentats contre le Wold Trade
Center en 1993, les attentats contre un immeuble fédéral à Oklahoma
City en 1995, les attentats de Nairobi au Kenya et de Dar-es-salaam en
Tanzanie en 1998 etc.). A cela, s’était ajoutée « [une] multiplication des
attaques informatiques, contre les sites gouvernementaux ou les réseaux
civils »14.
13
Jean François RANCOURT et Stéphane ROUSSEL, « Le Département de la
Homeland Security (DHS) Tour de Babel Bureaucratique Américaine ? », Bulletin
d’information de l’institut LE MAINTIEN DE LA PAIX, n° 61, décembre 2002, p. 1
14
ibidem.
16
Tout cela a participé à ce qui poussera les autorités fédérales américaines
à réactualiser le concept de “lead agency” ou “agence directrice”
(apparu aux Etats-Unis dans les années 80) dont le rôle est conféré, par la
“Directive 39” du Président Clinton, au FBI. La “lead agency” a pour
mission de coordonner les efforts des différents organismes fédéraux
dont les activités touchent aux mesures anti-terroristes. Rôle qu’a joué
l’OHS juste après le 11 septembre et que joue actuellement le DHS.
En novembre 2002, la loi de la Homeland Security est adoptée par le
Congrès. C’est elle qui a permis la création du Département de la sécurité
intérieure dont le Secrétaire est Tom Ridge.
M. Ridge est né le 26 août 1945 (60 ans). Il a grandi dans une famille de
la classe ouvrière. Il a été enrôlé dans l’Armée américaine lors de la
Guerre du Vietnam comme sergent de personnel d’infanterie. En 1982, il
est élu au Congrès pour ainsi devenir l’un des premiers vétérans de la
Guerre du Vietnam à y siéger. Avant d’occuper le poste de Secrétaire du
DHS, il a été le Directeur de l’OHS et auparavant le gouverneur de la
Pennsylvanie. Sa mission consiste à développer et à coordonner la
stratégie nationale de guerre contre le terrorisme pour renforcer la
protection des Etats-Unis contre les menaces et les attaques terroristes.
1) Les missions du DHS
Le DHS est chargé de renforcer la coordination entre les acteurs de la
lutte anti-terroristes, de faciliter la circulation de l’information entre eux
et de réduire les chevauchements et l’étendue des “zones grises” entre les
différents services et agences gouvernementaux à caractère fédéral,
étatique ou municipal. Il contribue également à la “guerre contre la
drogue” (par l’élimination des liens unissant le trafic de drogue au
terrorisme et en participant à la lutte contre les trafiquants) ; il participe à
la formation des “Citizen Corps” par l’intermédiaire du “Community
17
Emergency Response Teams"15 ; enfin il gère le "Homeland Advisory
System"16
2)
La structure17 du DHS
Les hauts fonctionnaires du Département sont : le Secrétaire, l’Assistant
spécial au secrétaire et les Officiers.
Il compte cinq “Divisions” ou Directions générales que sont: la Direction
générale de l’analyse du renseignement et de la protection des
infrastructures critiques (Information Analysis and Infractructures
Protection ou DG de l’IAIP) ; la Direction générale de la Science et de la
Technologie (Science and Technology ou DG ST ) ; la Direction générale
de la sécurité frontalière et des transports (Border and Transportation
Security ou DG BTS) ; la Direction générale de la gestion des mesures
d'urgence (Emergency Preparedness and Response ou DG EPR) et la
Direction générale du “Management”. Chaque direction générale est
dirigée par un Sous-secrétaire.
a)
Les cinq directions générales du DHS et leurs
missions
La DG de l’IAIP
La DG de l’IAIP a pour mission de centraliser les données provenant des
services fédéraux, étatiques et locaux impliqués dans la guerre contre le
terrorisme. Ces informations permettent à la DG de l’IAIP d’identifier les
secteurs vulnérables du territoire, de détecter et d’évaluer les menaces
terroristes. Cette Division joue également un rôle de coordinateur entre
15
Voir la partie sur la mission des citoyens dans la guerre contre le terrorisme dans ce
chapitre.
16
Voir la DG de l’IAIP un peu plus loin dans cette partie du chapitre.
17
Jean François RANCOURT et Stéphane ROUSSEL, op. cit., p. 2 - 4
18
les différentes agences de renseignement mais aussi avec les acteurs
privés.
Le “Homeland Advisory System” est géré par la DG de l’IAIP. C’est un
système qui informe la population et les autorités sur le niveau de risque
d’attaque terroriste sur le territoire des Etats-Unis. Les niveaux d’alerte
sont au nombre de cinq et vont du “vert” au “rouge” en passant par le
“bleu”, le “jaune” et l’“orange”. « Le niveau vert signifie qu’il faut
évaluer les mesures d’urgence et maintenir les activités de formation,
tandis que le rouge indique aux autorités de se tenir prêtes à intervenir,
de fermer les édifices publics et de porter une attention particulière aux
transports. Entre ces deux extrêmes, les recommandations vont de la
réévaluation des mesures d’urgences (bleu), au renforcement de la
surveillance (jaune), jusqu’à l’annulation d’événements d’envergure
(orange). »18
La DG ST
La DG ST a pour mission de constituer suffisamment de stocks de
vaccin, d’antidote, de médicament et de matériel (des dispositifs de
détection par exemple) pour permettre aux Etats-Unis de faire face à
d’éventuelles attaques terroristes de type ADM ou de limiter leurs effets.
Elle travaille en étroite collaboration avec le secteur privé, les agences de
la Santé et de l’Energie (impliquées dans la lutte contre terrorisme) et les
institutions de recherche et d’enseignement.
La DG BTS
La DG BTS regroupe les “Douanes”, le Bureau de la Citoyenneté et de
l’Immigration, l’“Office for Domestic Preparedness” (Bureau pour l’état
de préparation domestique), le Bureau de la Sécurité des Frontières,
18
Jean François RANCOURT et Stéphane ROUSSEL, op. cit., p. 3
19
l’Administration de la Sécurité des Transports et la “Garde côtière”. Elle
a pour mission de « (…) renforcer la sécurité aux points d’entrée (postes
frontière, ports et aéroports) aux Etats-Unis par l’achat d’équipement et
par l’établissement de mécanismes de contrôle. »19 Et de « (…) veiller
aux fonctions d’émission de visas, de documents douaniers, et de
coordination entre les différentes agences. »20
La DG EPR
La DG EPR a pour mission de maintenir un certain “état de préparation”
pour permettre aux Etats-Unis de réagir efficacement à une attaque
terroriste ou à une catastrophe d’envergure. La “Federal Emergency
Management Agency” (FEMA) est la pièce maîtresse de cette Division.
Elle a pour mission de planifier et de coordonner les efforts visant à
atténuer l’impact d’une catastrophe21 sur les Etats-unis.
La DG Management : elle est chargée de tout ce qui est de la gestion
matérielle et financière du DHS.
b)
Les hauts fonctionnaires du DHS et leurs
missions
Le Secrétaire est nommé par le président des Etats-Unis, avec
l’assentiment du Sénat. Il attribue les tâches et définit les fonctions des
différentes unités administratives et des services qui font partie du
Département. Il peut octroyer des contrats ou conclure des ententes avec
d’autres agences. Le Secrétaire est également responsable de la
comptabilité des systèmes et des banques de données au sein du DHS.
19
ibidem.
Ibidem.
21
Tornades, feux de forêt, pluies diluviennes, tremblements de terre, attaques terroristes
et autres.
20
20
L’Assistant spécial au secrétaire a pour mission de faire le lien entre le
DHS et le secteur privé. Il doit informer le secrétaire des impacts des
nouvelles législations sur le secteur privé, promouvoir des partenariats
publics/privés et transmettre au Secrétaire les informations sur le
développement, par le secteur privé, de produits ou méthodes de travail
pouvant être utiles au Département.
Les Officiers sont : le Secrétaire adjoint, le Conseiller général et les
Sous-secrétaires. Ces personnes sont désignées par le Président des EtatsUnis, avec l’assentiment du Sénat. En plus de ces officiers, il s’y ajoute :
le Directeur des Services secrets, le Chef de la Direction des Finances, le
Chef de la Direction de l’Information, le Chef de la Direction des
Ressources humaines et un “Officiers” pour les droit et libertés. Ces
officiers sont nominés par le Président sans l’assentiment du Sénat.
C. Les rôles des autres ministères dans la guerre contre le
terrorisme
Les ministères les plus en vue dans la guerre contre le terrorisme, en
dehors du DHS, sont le Département de la Défense, le Département de la
Justice, le Département d’Etat, le Département de la santé et des services
humaines ; le Département du Trésor et le Département de l’Agriculture.
Avant de présenter le rôle de chacun de ces départements, il est utile de
préciser leurs rôles d’origine et de faire une présentation de ceux qui sont
à leurs têtes (les Secrétaires). La présentation de certains des secrétaires
de département qui suit peut sembler trop détaillée ou banale mais elle
aidera à comprendre ou à mieux interpréter leurs engagements dans cette
guerre contre le terrorisme.
21
Le Département de la Défense22 (DoD)
Le DoD, qui a remplacé le “National Military Establishment” qui
regroupait les anciens départements de la Guerre, de la Marine et de
l’Armée de l’air, a été créé en 1949. Son premier Secrétaire fut Lyndon
Johnson président des Etats-Unis de 1964-1968. Son Secrétaire actuel est
Donald Rumsfeld.
M. Rumsfeld, qui fait partie de ceux qu’on appelle les “Faucons”23 dans
l’administration Bush, a pris ses fonctions de 21e Secrétaire à la défense
le 20 janvier 2001. Il est né en 1932 (72 ans) dans l’Illinois. Il a servi
dans l’US Navy (ancien pilote de l’aviation naval) de 1954 à 1957. Il est
entré très tôt dans la politique. En 1962, à l’âge de 30 ans, il est élu à la
Chambre des Représentants. En 1975, sous la présidence de M. Nixon,
M. Rumsfeld est nommé Secrétaire à la défense et devient ainsi la plus
jeune personne à avoir occupé ce poste dans l’histoire des Etats-Unis.
Auparavant, de 1973 à 1974, il a été Ambassadeur des Etats-Unis auprès
de l’OTAN à Bruxelles (Belgique).
M. Rumsfeld a souvent servi dans le secteur privé. Avant de devenir
Secrétaire à la défense en janvier 2001, il était le Président de Gilead
Sciences Inc. Il a également occupé des postes de cadre supérieur dans
des entreprises de renom comme GD Seale and Co. (compagnie
pharmaceutique) et General Instrument Corporation (spécialisé dans la
technologie des télécommunications).
Son Département participe à la protection du territoire américain, dans le
cadre de la “Homeland Security”, en menant des opérations militaires à
l’extérieur (comme en Afghanistan en octobre 2001) et en venant en aide
22
La plupart des informations sur les ministères ont été extraites de l’ouvrage de JeanTacques LAVENUE, « Dictionnaire de la vie politique et du droit constitutionnel
américain ».
23
M. Rumsfeld, à l’instar de Condoleezza Rice et Dick Cheney, fait partie de la “ligne
dure” de l’administration américaine (c’est les “vas t’en guerre”)
22
aux autorités civiles dans certaines situations où elles sont débordées ou
incapables d’intervenir (par exemple : une attaque terroriste d’ampleur,
des feux de forêt, des inondations, des tornades etc.). Egalement, le
Département de la défense peut être appelé à appuyer les autorités civiles
dans des missions dites de “Portée limitée” comme les événements
spéciaux (Coupe du monde de football, Jeux Olympiques etc.).
Le Département de la justice (DoJ)
Il a été créé en 1870. Le “Federal Bureau of Investigation” (FBI), le
LEAA24, le Service d’immigration et de naturalisation et le Community
Relation25 dépendent de lui. Il contrôle également l’administration des
prisons ainsi que les “US district attorneys” et les “US marshall” sur tout
le territoire américain. Son Secrétaire est John Ashcroft (l’Attorney
General).
M. Ashcroft est né le 9 mai 1942 (62 ans) dans la même ville et le même
Etat que Donald Rumsfeld (à Chicago dans l’Etat de l’Illinois). Il a été
gouverneur de cet Etat de 1984 à 1993. En 1994, il est élu au Sénat où il
a été, entre autre, président de la Sous-commission de la Constitution et
membre de la Commission judiciaire. L’Attorney General est chargé de
veiller à l’application de la loi pour permettre d’enquêter, de prévenir et
d’empêcher les activités terroristes sur le sol américain.
Son Département, à l’instar d’autres départements, est également chargé
de l’entraînement des intervenants civils des plus grandes villes
américaines pour affermir la capacité d’intervention rapide dans des
environnements contaminés par des agents chimiques, biologiques ou
24
LEAA = Law Enforcement Assistance Agency (Agence d’assistance à la mise en
vigueur de la loi). Cette Agence a pour objectif d’aider les forces de police locale dans
l’accomplissement de leurs missions.
25
Le Community Relations Services ou Bureau intercommunautaire a été créé par le
Civil Rights Act de 1964 pour coordonner l’ensemble des activités du gouvernement
fédéral relatives aux droits civiques.
23
radiologiques. Il est responsable de la formation des VIPS26. Tout ce qui
concerne les arrestations, les autorisations de perquisition, la présentation
des terroristes devant la justice civile et autres relèvent de ses
compétences.
Le Département d’Etat (DoS)
Ce Département a été créé en 1789 et est chargé des relations extérieures
des Etats-Unis, de son personnel diplomatique et consulaire ainsi qu’une
bonne partie de son aide non militaire. L’aide est distribuée à travers des
agences comme l’AID27 et la “Peace Corps”28. Colin Powell y occupe
actuellement le poste de Secrétaire.
Monsieur Powell est né le 5 avril 1937 (67 ans) à New York. Issu d’une
famille d’origine jamaïcaine, il a grandi dans l’un des endroits les plus
“chaud” de New York (le Bronx). Il a été nommé Secrétaire d’Etat le 16
décembre 2000 et a pris ses fonctions le 20 janvier 2001. Avant
d’occuper cette fonction, M. Powell a été pendant 35 ans soldat
professionnel. Il a un rang de Général de quatre étoiles. De 1989 à 1993,
il fut le patron du Joint Chiefs of Staff, la position militaire la plus élevée
au Département de la défense. Pour terminer, en 1991 lors de la Guerre
du Golfe, il a été l’un des principaux acteurs militaires, avec le Général
Schwartzkopf, de l’“Opération Desert Storm” (Tempête du Désert).
Colin Powell, dont le Département joue un rôle déterminant dans la
guerre contre le terrorisme notamment au niveau de la coopération
internationale, est le détenteur de la “liste d’exclusion terroriste”. Sur
cette liste est inscrite toute organisation que Washington considère
26
Voir la partie sur la mission des citoyens américains dans la guerre contre le
terrorisme dans ce chapitre.
27
AID = Agency for International Developpement (Agence pour le développement
international) créée le 4 septembre 1961 pour la gestion des programmes d’aides et de
développement économiques et militaires.
28
Peace Corps (Corps de la paix) est un programme de recrutement de volontaire pour
servir dans les pays sous-développés. Il a été lancé par le président Kennedy.
24
comme terroriste. L’habilitation de désigner un groupe comme étant
terroriste est donnée au Secrétaire d’Etat par l’article 411 de l’“USA
PATRIOT ACT” de 2001. Cette désignation se fait après consultation de
l’Attorney General (par le Secrétaire d’Etat) ou sur la demande de ce
dernier. Le Département est chargé de rechercher la coopération des
autres pays à la guerre contre le terrorisme, d’informer et de protéger les
citoyens et les intérêts américains à l’étranger contre les menaces
terrorismes, etc.
Le “Programme d’aide anti-terroriste” (ATA) est géré par le
Département d’Etat ; plus précisément par le Bureau de la sécurité
diplomatique. L’ATA a été créé en 1983 sur autorisation du Congrès. Il a
pour mission de dispenser une formation aux forces de police et de
sécurité à l’étranger pour lutter, dissuader et élucider des crimes de
nature terroristes. A ce propos, si l’on en croit au Département d’Etat,
« depuis sa création, l’ATA a permis de former plus de 25 000 personnes
de 117 pays »29.
Le Département de la santé et des services humaines (DHHS)
Le Département a été créé en 1979. Il a en charge la santé et les services
sociaux, et contrôle la "Food and Drug Administration" (FDA). Son
Secrétaire est Tommy Thompson.
Monsieur Thompson, né le 19 novembre 1941 (62 ans) dans l’Etat du
Wisconsin, a prêté serment le 2 février 2001 pour ainsi devenir le 19e
ministre de la santé et des services humaines des Etats-Unis. Avant
d’occuper ce poste de ministre, M. Thompson a été pendant 14 ans
(quatre mandats consécutifs dont le dernier date de 1998) gouverneur du
29
Alan BIGLER, « Le Programme américain d’aide à la lutte contre le terrorisme »,
fiche d’information diffusé par le Bureau des programmes d’information internationale
du Département d’Etat, le 14 novembre 2001, p. 1
25
Wisconsin. Il a également été réserviste dans l’armée et a servi dans la
“Garde nationale du Wisconsin”.
Le DHHS est chargé de l’acquisition des stocks d’antidote et des
ressources médicales pour le traitement des victimes d’attaques d’armes
de destruction massive [au cas où il y’en aurait]. Les “Centers for
Disease Control and Prevention”, les “National Institutes of Health”, qui
relèvent de ce ministère, sont chargés, d’une part, de fournir des
informations et de faire des recherches approfondies sur les maladies
pouvant être causées par les armes biologiques, et d’autre part, de limiter
les effets de ces armes sur les victimes en cas d’attaque.
Le Département du Trésor (DoT)
Le DoT a été créé la même année que le Département d’Etat (en 1789). Il
perçoit les impôts, émet les bons du Trésor, rembourse les dettes de l’Etat
américain, supervise l’émission de la monnaie et réglemente les
transactions financières internationales. Il dirige le Service des douanes
et le “Service secret” chargé de la protection du Président des EtatsUnis, de son Vice-président et de leurs familles. Son Secrétaire actuel est
John W. Snow. M. Snow, né le 2 août 1939 dans l’Ohio (65 ans), a pris
ses fonctions en février 2003 en remplacement de Paul O’Neil.
Le DoT intervient dans la lutte contre les finances terroristes. Depuis les
attentats du 11 septembre 2001, il a monté un certain nombre
d’opérations visant à geler les avoirs des terroristes (l’“Opération Green
Quest” par exemple)30. Il est également très actif dans la lutte contre le
blanchiment de l’argent.
Le Département de l’agriculture (USDA)
30
Nous reviendrons sur ces opérations dans le deuxième chapitre.
26
Créé un siècle après le DoS et le DoT en (1889), l’USDA31 a pour
mission de favoriser le développement de l’agriculture et de superviser le
commerce des produits agricoles pour maintenir des prix raisonnables.
Ann M. Veneman en est l’actuelle Secrétaire. Mme Veneman a pris ses
fonctions en janvier 2001. Elle a eu à occuper le poste de Sous-secrétaire
de ce département de 1991 à 1993 sous la présidence de Bush (père).
L’USDA a pour mission, dans la guerre contre le terrorisme, d’empêcher
à ce que les produits agricoles et les infrastructures alimentaires (par
exemple les stocks alimentaires, les fermes agricoles, les industries
alimentaires etc.) des Etats-Unis soient menacés par les terroristes. En
quelques mots, sa mission consiste essentiellement à lutter contre
l’“agroterrorisme”.
En outre des départements et de leurs secrétaires, on retrouve des
personnes qui eux aussi jouent un rôle central dans la guerre contre le
terrorisme. Parmi elles, nous pouvons citer : Richard B. Cheney (Viceprésident des Etats-Unis) et Condoleezza Rice (“National Security
Advisor” ou Conseiller national à la sécurité).
M. Cheney est devenu vice-président des Etats-unis après l’élection de
George W. Bush à la présidence américaine. Il est né dans le Nebraska le
30 janvier 1941 (63 ans). De 1989 à 1993, sous l’administration de
George Bush (le père), M. Cheney a été Secrétaire à la défense et a joué
un rôle crucial dans les campagnes militaires “Just Cause” (en 1989 au
Panama) et “Desert Storm” (dans le Golfe persique en 1991).
Mme Rice, nommée Conseiller national à la sécurité le 22 janvier 2001,
est née le 14 novembre 1954 (49 ans) à Birmingham dans l’Etat de
l’Alabama. Elle est professeur de sciences politiques et a enseigné à
l’université de Stanford où elle a été un membre du “Center for
31
USDA = United State Departement of Agriculture.
27
international Securiry and Arms Control” (Centre pour la sécurité
internationale et la limitation des armements). Elle a eu à côtoyer, dans le
cadre de son service administratif, des entreprises et des fondations de
renom comme : Hewlett Packard, Carnegie Corporation, Carnagie
Endowment for International Peace, Rand Corporation, National
Council for Soviet and East European Studies, etc. Pour terminer, elle a
été l’une des plus proches collaboratrices de Georges Bush (le père)
lorsque celui-ci était président.
III.
Les autres acteurs de la guerre contre le terrorisme et leurs
missions
La guerre contre le terrorisme aux Etats-Unis est l’affaire de tout le
monde. En dehors des ministères, les services de renseignement,
notamment le FBI et la CIA, sont naturellement impliqués. Les citoyens
américains, le secteur privé, les autorités des Etats fédérés et locales ont
eux aussi chacun un rôle à jouer dans cette guerre dans la mesure de leurs
compétences. Les actions des uns complètent celles des autres et chacun
fait son travail pour que l’autre puisse faire le sien.
A. Les agences de renseignements et la guerre antiterroriste
Le FBI et la Central Intelligence Agency (CIA) ont subi de vives
critiques pour n’avoir pas été capables d’empêcher les attaques du 11
septembre. Par la suite, ils se sont fixés de nouveaux objectifs, se sont
dotés de meilleurs moyens pour atteindre ces objectifs et se sont
restructurés pour mieux affronter le terrorisme.
1)
Le FBI
28
Le FBI, police fédérale des Etats-unis, a vu le jour en 1924. Son premier
directeur fut John Edgar Hoover. M. Hoover occupera le poste de
directeur pendant 48 ans (1924-1972). Le Bureau relève du Département
de la Justice. Il a pour mission d’enquêter sur les délits fédéraux à
l’intérieur des Etats-Unis. Robert S. Mueller en est actuellement le
directeur.
M. Mueller a été nommé Directeur du FBI une semaine avant les
attentats du 11 septembre 2001 (le 4 septembre 2001). Originaire de New
York, et vétéran de la Guerre du Vietnam, il a surtout travailler dans le
domaine judiciaire. En 1982 à Boston, où il travaillait pour le compte du
Département de la justice, il a eu à traiter plusieurs cas de fraudes
financières, de terrorisme, de blanchiment d’argent et de corruption.
Avant d’occuper sa fonction, il a été procureur général à Francisco.
L’implication du FBI dans la guerre contre le terrorisme date du début
des années 80. Depuis la moitié des années 90, il s’occupe non seulement
de la menace terroriste sur le territoire américain mais aussi à l’étranger.
Il s’occupe aussi de la lutte contre les cyber-menaces.
Le FBI s’est fixé comme nouvelles priorités, pour lutter contre le
terrorisme mais aussi contre la criminalité, de « protéger les Etats-Unis
contre des attaques informatiques et contre la corruption dans la
fonction publique à tous les niveaux ; protéger les droits civiques ;
s’opposer aux entreprises et réseaux criminels tant transnationaux que
nationaux ; combattre la délinquance d’affaires ; réprimer la criminalité
violente ; appuyer les organismes de police fédéraux, locaux et
internationaux ; enfin, moderniser les moyens techniques qui assurent
l’exécution de toutes ces missions. »32
32
Wendy ROSS, « La réorganisation du FBI à la suite des attaques du 11 septembre »,
diffusé par le Bureau des programmes d’information internationale du Département
d’Etat, 30 mai 2002. Pour voir l’article vous pouvez consulter l’adresse suivante :
http://usinfo.state.gov/regional/af/security/french/f2053003.htm
29
Pour réaliser les objectifs qu’il s’est fixé dans le cadre de la guerre contre
le terrorisme, le FBI compte non seulement sur un partenariat renforcé
avec les autres acteurs mais aussi sur l’augmentation de ses capacités de
renseignement et d’analyse. Dans le cadre du partenariat, il « entend
améliorer ses échanges d’information avec l’Agence Centrale de
renseignement [CIA] »33. Il a mis en place ou intégré des groupes de
travail notamment les “Joint Terrorism Task Forces” (JTTFs), le
“National Joint Terrorism Task Force” (National JTTF), le “Foreign
Terrorist Tracking Task Force” (FTTTF) etc.
Les JTTFs, dont la première équipe a été créée en 1980, sont des équipes
au sein desquelles sont réunis des “officiers de la loi” des Etats et des
comtés ainsi que des agents du FBI et d’autres agents et personnels
fédéraux. Ces équipes ont pour mission de collecter du renseignement en
vue de prévenir des actes terroristes sur le sol américain.
Le National JTTF, qui a été créé par le FBI en 2002, est chargé de
collecter du renseignement et des informations sur le terrorisme (à
l’instar du JTTFs) pour ensuite en faire une redistribution aux JTTFs, aux
unités du FBI (impliquées dans la guerre contre le terrorisme) et aux
agences partenaires.
Le FTTTF a été créé en octobre 2001 par l’Attorney Général. Il se
compose des représentants du FBI, du Service d’immigration et de
naturalisation, du Service des douanes et d’autres agences fédérales. Les
membres du FTTTF ont pour mission d’empêcher des terroristes ou des
personnes suspectées comme telles d’entrer aux Etats-Unis. Si ces
personnes s’y sont déjà infiltrées, ils [les membres du FTTTF], doivent
les identifier et les localiser pour qu’elles puissent être arrêtées.
33
ibidem.
30
Comme nous l’avons déjà annoncé ci-haut, le FBI compte également
multiplier ses capacités de renseignement et d’analyse pour accomplir sa
mission dans la guerre contre le terrorisme. C’est ainsi qu’il a entrepris
un certain nombre d’initiatives parmi lesquelles : la mise en place de
l’“Office of Intelligence”, du “Counterterrorism Watch” (CT Watch), du
“College of Analytical Studies”, etc.
L’“Office of Intelligence” est chargé de créer des opportunités
professionnelles pour des analystes et d’assurer le partage des données
des analyses et du renseignement au sein et à l’extérieur du FBI.
Le “CT Watch”, qui fonctionne 24h/24, est chargé de la prévention des
opérations terroristes au niveau national mais aussi à l’étranger.
Le “College of Analytical Studies” a élu domicile à l’Académie du FBI à
Quantico dans l’Etat de la Virginie. Il a pour mission de permettre à des
analystes du FBI et à ceux de ses partenaires, pendant une période de six
semaines, de se perfectionner dans les méthodes d’analyse.
2)
La CIA
La CIA a été créée en 1947 par la “Loi sur la Sécurité Nationale”
(National Security Act.). Sa mission consiste à veiller sur la sécurité des
intérêts américains dans le monde. Elle a eu comme directeur Georges
Bush ancien président des Etats-Unis (1989-1993). Aujourd’hui, George
J. Tenet occupe le poste de directeur.
M. Tenet a pris ses fonctions de patron de l’“Intelligent Community” (qui
regroupe l’ensemble des agences de renseignement des Etats-Unis à
l’étranger et la CIA) le 11 juillet 1997 sous le second mandat du
Président Clinton. M. Tenet n’est pas un “bleu” à la Central Intelligence.
Il a été le Directeur adjoint de John Deutsch (Directeur du Central
31
Intelligence ou DCI jusqu’en 1996). Après le départ de ce dernier, M.
Tenet avait assuré la transition.
La CIA recueille et analyse toute les informations liées aux menaces
terroristes potentielles à l’étranger. Il a joué un rôle très important dans
les campagnes militaires américaines menées dans le cadre de la guerre
contre le terrorisme et notamment la campagne en Afghanistan en 2001.
B. Le rôle des citoyens américains
Le peuple américain participe à la Homeland Security essentiellement à
travers des “Citizen Corps” (Corps de citoyen) qui sont une initiative de
l’“USA Freedom Corps”. C’est un regroupement de citoyens américains
volontaires pour participer à la Homeland Security. Dans chaque Etat
américain il existe un "Conseil des Corps citoyens" (Citizen Corps
Council) et dans chaque comté un "Conseil local des Corps citoyens"
(Local Citizen Corps Council). Ces conseils sont chargés d’informer,
d’encourager et d’orienter les citoyens pour qu’ils puissent participer aux
“Citizen Corps”.
L’action des “Citizen Corps” est coordonnée par la FEMA en
collaboration avec le DHHS, le DoJ et d’autres agences fédérales. Les
volontaires sont appelés à participer dans une variété de programmes
dont la plupart sont gérés par des ministères (DoJ, DHS et DHHS). Parmi
ces programmes on trouve :
‰
le “Volunteers in Police Services (VIPS) Program” (Programme
des volontaires du service de la police), qui est sous l’aile du
Département de la Justice. Il forme des volontaires pour aider la
police dans l’exécution de fonctions non-assermentées. Ce qui
permet aux officiers de la police de pouvoir effectuer des
fonctions plus essentielles;
32
‰
Le “Medical Reserve Corps” (Corps médical de réserve) dépend
lui du DHHS. Il a pour objectif de constituer des réserves de
personnel médical pour aider les services locaux de santé à
répondre efficacement, à une urgence de type catastrophe
naturelle ou attaque terroriste en tant que premiers secours ;
‰
Les
“Community
Emergency
Response
Teams”
(CERT)
permettent aux citoyens américains de participer à la planification
et à la gestion des secours dans leurs localités ;
‰
Le “Terrorist Information and Prevention System” (TIPS)
encourage les citoyens américains à identifier et à dénoncer toute
activité ou toute personne qu’ils soupçonnent d’être liées aux
terrorisme ou au crime.
C.
Le rôle du secteur privé et des autorités
étatiques et locales
Le secteur privé, principal fournisseur des Etats-Unis en marchandises et
services, est propriétaire de 85% des infrastructures (économiques et
industrielles). En partenariat avec les autorités fédérales, il investit dans
la protection physique et informatique des infrastructures critiques. Il
peut être appelé par les autorités fédérales à fournir les ressources
nécessaires à la guerre contre le terrorisme.
Les compagnies pharmaceutiques doivent produire des vaccins contre les
maladies pouvant être causées par des armes biologiques susceptibles
d’être utilisées par les terroristes. Les industries de haute technologie sont
chargées de faciliter les contrôles aux frontières et la détection des ADM
par la mise au point de dispositifs de détection répondant à ces besoins.
33
Les Etats34 et les gouvernements locaux35 ("Local governement") ont la
responsabilité primaire de placer, de préparer et d’actionner les services
de secours adaptés en cas d’attaque terroriste. Les gouvernements des
Etats sont chargés, à l’instar du gouvernement fédéral, d’encourager leurs
communautés à participer aux "Citizen Corps".
Après avoir déterminé "qui est qui" et "qui fait quoi" dans cette guerre
américaine contre le terrorisme, voyons maintenant quels sont les
instruments mises en place pour éradiquer cette nouvelle menace.
34
Le State ou l’Etat désigne les 51 Etats fédérés des Etats-Unis ainsi que le District de
Columbia, Porto Rico, les Îles Vierges, les Samoa américaines, le Guam, la Zone du
canal etc. Chacun des Etats est régi par une constitution qui le dote d’un législatif
(Legislature) et d’un exécutif (Gouverneur et Lieutenant-gouverneur) et d’un système
judiciaire (Cour Suprême de l’Etat et juridictions).
35
Le Local governement désigne toute comté, ville, village, district etc.
34
Chapitre
2:
terrorisme :
La
une
guerre
contre
“politique”
le
anti-
terroriste unilatéraliste bénéficiant d’un
soutien international mitigé
A y voir de prés, la politique anti-terroriste américaine est beaucoup plus
unilatérale. Les Etats-Unis ont défini leur propre stratégie pour combattre
le terrorisme international dans un document intitulé "National Strategy
for Combatting Terrorism" publié au mois de février 2003.
Leur
unilatéralisme se manifeste beaucoup plus dans le domaine militaire et
sécuritaire : domaines dans lesquels ils décident de tout et dirigent tout
selon leur “bon vouloir”. Toutefois, au niveau de la lutte financière, sans
trop avoir le choix, ils composent plus ou moins bien avec les autres
Etats et Organisations internationales (OI).
I.
Présentation
de
la
"National
Strategy
for
Combatting
Terrorism"
Cette stratégie a pour objectif non seulement d’empêcher toute attaque
terroriste contre les Etats-Unis, leurs citoyens, leurs intérêts, leurs alliés
et amis mais également d’ôter toute liberté d’action et de mouvement aux
terroristes. Pour ce faire, les Américains comptent agir de quatre
manières :
‰
attaquer
les
sanctuaires
terroristes,
leurs
leaderships
et
commandements, perturber leurs communications et, enfin, leur
ôter tout soutien matériel et financier ;
‰
renforcer la coopération avec leurs partenaires régionaux pour
mieux isoler les terroristes ;
35
‰
aider les Etats faibles ("Weak States") à mettre en place des
institutions et à disposer des moyens nécessaires pour exercer leur
autorité sur l’étendue de leurs territoires et empêcher qu’ils
servent de refuges aux terroristes ; enfin
‰
forcer, s’il le faut par l’usage de la force militaire, les Etats
réticents à ne pas soutenir le terrorisme.
Les Etats-Unis se sont, également, fixés quatre objectifs majeurs, dans
cette guerre contre le terrorisme, qu’ils ont appelé les 4D (Defeat, Deny,
Diminish, Defend)36. Ces 4D consistent à :
‰
défaire les terroristes et leurs organisations ;
‰
leur priver de tout parrainage, de tout soutien et de tout
sanctuaire ;
‰
diminuer les conditions qu’ils cherchent à exploiter ; enfin
‰
défendre les intérêts et les citoyens américains sur leur
territoire et à l’étranger.
Dans chacun des éléments 4D est défini un certain nombre d’objectifs à
atteindre et les moyens adéquats pour y parvenir.
Défaire les terroristes et leurs organisations (1D)
Les objectifs ici consistent à identifier les terroristes ainsi que leurs
organisations et à les localiser. Pour ce faire, les Etats-Unis comptent
s’appuyer sur le renseignement technique (avec leurs moyens
technologiques et informatiques) mais aussi sur le renseignement
humain. La Communauté de l’intelligence et le FBI, entre autres, sont
chargés de collecter le renseignement, de le traiter et de le distribuer aux
acteurs de la lutte anti-terroriste. Il est possible également qu’il soit
36
Cf. "National Strategy for Combatting Terrorism"
36
distribué aux alliés des Américains si les autorités fédérales l’estiment
nécessaire.
Priver les terroristes de parrain, de soutien et de sanctuaires (2D). Cet
élément comporte comme objectifs :
‰
l’élimination du parrainage du terrorisme par les Etats : le
Département d’Etat est chargé de mettre en place une
politique visant à encourager ou à décourager les Etats
parrainant le terrorisme à cesser de le faire. Les Etats-Unis se
disent prêts à coopérer avec tous pays le désirant, et à aider les
pays faibles à faire face aux terroristes qui voudraient utiliser
leurs territoires comme sanctuaires ou refuges ;
‰
l’interdiction de tout soutien matériel et financier aux
terroristes ; enfin
‰
l’élimination de tous sanctuaires et refuges terroristes à
travers le monde : la Communauté de l’intelligence, en
collaboration avec d’autres ministères (DoD, DoS, etc.), est
chargée chaque année de faire le point sur les sanctuaires
terroristes dans le monde et de mettre en place des plans pour
les détruire.
Diminuer les conditions que les terroristes cherchent à exploiter (3D)
Pour ce faire, les Américains estiment qu’il est capitale de gagner la
« guerre des idées » ("The war of ideas")37 . Comment ?
‰
En montrant que les actes terroristes sont illégitimes et en
faisant de sorte que le terrorisme soit vu comme l’esclavage,
la piraterie ou le génocide. Bref ce qu’aucun gouvernement
responsable ne pourrait soutenir ou tolérer.
37
Cf. "National Security Strategy of the United States"
37
‰
En soutenant les gouvernements modernes et modérés, en
particulier ceux du monde musulman, pour que les terroristes
ne puissent trouver dans aucune nation les idéologies et les
conditions qui leur sont avantageuses.
‰
En s’assurant que la communauté internationale focalise ses
efforts et ses ressources sur les zones à risque.
‰
En promouvant la liberté de penser, de s’exprimer librement,
de s’informer et en faisant naître l’espoir et les aspirations à la
liberté de ceux dont les sociétés sont sous la joug de tyrans et
de dictateurs doublés de terroristes ou qui les protégent.
‰
Enfin, en résolvant le conflit israélo-palestinien : les
Américains admettent que la résolution de se conflit est un
élément crucial pour gagner la « guerre des idées ».
Défendre les intérêts et les citoyens américains sur leur territoire et à
l’étranger (4D)
Ce dernier élément des 4D inclus la protection physique et informatique
des Etats-Unis et ses principes démocratiques. Il est fait appelle à tous les
autorités fédérales, les autorités étatiques, les gouvernements locaux, le
secteur privé et à tous les citoyens américains pour faire face au
terrorisme.
Il est à noter que la stratégie de guerre contre le terrorisme vise plus
particulièrement les organisations terroristes de portée mondiale comme
Al Qaïda et les Etats qui sponsorisent le terrorisme et qui ne ménagent
aucun effort pour se doter d’ADM. Les Etats-Unis envisagent, pour
mener à bien cette stratégie, d’user de tous les moyens en leur disposition
(économique, juridique, diplomatique et militaire).
38
II.
Les mesures américaines de lutte contre le terrorisme : des
mesures unilatéralistes
Ces mesures vont des mesures juridiques aux mesures financières en
passant par des mesures sécuritaires et militaires. C’est dans ces deux
dernières que l’unilatéralisme américain se manifeste le plus. La plupart
de ces mesures sont très contestées et contestables. Les détracteurs sont
en général les Etats et les associations de défense des droits de l’Homme
et des libertés publiques. Mais, envers et contre de tous, les autorités
américaines fond la sourde oreille.
A. Les mesures juridiques et sécuritaires
Suite aux attaques du 11 septembre, les Etats-Unis ont adopté un certains
nombre de mesures très contestées et contestables pour faire face au
terrorisme. Parmi ces mesures controversées on retrouve le plus souvent
le Patriot Act, les commissions militaire etc. Toutefois, il y a eu quelques
mesures, dans le cadre des mesures sécuritaires, qui ne sont pas aussi
mauvaises que cela puisqu’elles permettent aux Etats faibles de
bénéficier d’une assistance pour pouvoir faire face au terrorisme : c’est le
cas du Programme de l’ATA.
1) L’USA PATRIOT Act
Adoptée par le Congrès le 25 octobre 2001, l’USA PATRIOT Act est
signée le lendemain par le Président Bush. Elle renforce les pouvoirs des
« organes chargés de l’action pénale » en matière d’enquête et de
surveillance. Elle étend les perquisitions, les écoutes téléphoniques, ainsi
que la surveillance des communications électroniques. Enfin, elle facilite
la collecte et l’analyse des informations sur certaines personnes
suspectées d’être liées au terrorisme ou à la criminalité.
39
La loi a été très critiquée aux Etats-Unis mais également dans la plupart
des pays démocratiques. Les détracteurs les plus acharnés sont les
organisations de défense des droits de l’Homme et les organisations de
défense des libertés publiques38.
Elle définie le terrorisme. Elle considère comme étend un acte de
terrorisme tout acte qui est illégal en vertu du droit américain ou du droit
du lieu où il a été commis et qui prend les formes suivantes39 :
‰
détournement ou sabotage d’un aéronef, d’un navire, d’un
véhicule ou d’autres moyens de transport ;
‰
prise d’otages ;
‰
attaque violente contre une personne protéger par le droit
international ;
‰
assassinat ou emploi d’un agent biologique, d’un agent
chimique, d’une arme ou d’un dispositif nucléaire ou encore
d’un explosif, d’une arme à feu ou de toute autre arme ou
d’un dispositif dangereux (autrement qu’à des fins monétaires
d’ordre personnel) dans l’intention d’attenter directement ou
indirectement à la sécurité d’une ou de plusieurs personnes ou
de causer d’importants dommages à des biens.
Et considérait également comme acte de terrorisme, par la loi, « toute
menace, toute tentative ou association en vue d’exécuter l’un de ces
actes ».
La définition américaine du terrorisme, n’est pas partagée par la plupart
de leurs alliés et amis. Certains la trouvent très large et d’autres trouvent,
sans le dire officiellement, qu’elle va à l’encontre de leurs intérêts. Cette
38
Cf. au Chapitre IV
Cf. à « La Nouvelle Liste d’Exclusion Des Organisations Terroristes », Fiche
d’information diffusée par le Bureau des programmes d’information internationale du
Département d’Etat, le 21 novembre 2002, p. 1
39
40
absence de consensus autour de ce qu’est le terrorisme met à rude
épreuve la coopération internationale (en particulier la lutte financière40).
Pour terminer, il faut également noter qu’en vertu de la loi, le secrétaire
d’Etat est habilité à inscrire une organisation sur la "Liste d’Exclusion
des Organisations Terroristes" (TEL) si celle ci41 :
‰
commet ou incite à commettre des actes de terrorismes dans des
circonstances révélant son intention de causer la mort ou des
blessures ;
‰
prépare ou envisage un acte de terrorisme ;
‰
recueille des informations sur les éventuels objectifs d’un acte de
terrorisme ; enfin
‰
fournit un soutien matériel en vue de faciliter un acte de
terrorisme.
2)
Des
commissions
militaires
pour
juger
les
terroristes
Le 13 novembre 2001, le Président Bush a émis un décret autorisant la
mise en place de commissions militaires pour juger « des terroristes
internationaux ». Le décret ne s’applique qu’aux non citoyens
américains « qui [se sont] livré [s] à des actes de terrorisme international
ou à des actes préparatoires, s’en [sont] rendus complice [s] ou [ont]
comploté en vue de les commettre menés au détriment des Etats-Unis ou
qui [ont] sciemment abrité un ou plusieurs individus répondant aux
critères précités. »42
40
Cf. au Chapitre III du doc.
« La Nouvelle Liste d’Exclusion Des Organisations Terroristes », op. cit., p. 1
42
Paul HOFFMAN, « Libertés Publiques Aux Etats-Unis Après le 11 Septembre »,
Bureau du secrétariat de presse de la maison Blanche, 13 novembre 2001, p. 3
41
41
Le président des Etats-Unis est seul habilité à désigner les personnes
concernées par le décret. Les juges remplissent aussi le rôle des jurés. Il
est précisé qu’ « il n’y aurait aucune obligation d’apporter des éléments
probants au-delà du doute raisonnable, et ce ne serait pas à l’accusation
qu’incomberait la tâche de fournir des preuves. »43 Les sentences sont
rendues à la « majorité des deux tiers » des membres qui composent la
commission et ne sont susceptibles d’aucun recours ni devant une cour
internationale ni devant une cour américaine. Toutefois, le président des
Etats-Unis et le secrétaire à la Défense (sur autorisation du Président)
peuvent « demander une révision du jugement ».
Il est à noter que les jugements peuvent se tenir à huis clos pour éviter la
divulgation de renseignements classifiés ou susceptibles de l’être, pour
garantir la sécurité des membres du tribunal, des représentants du
ministère public et des témoins éventuels ou pour ne pas compromettre
les sources d’information, les méthodes ou les activités des services de
renseignement et d’action pénale, ou encore, toute autre question
touchant à la sécurité nationale.
L’instauration de ces commissions, à l’instar de l’USA PATRIOT Act, a
été objet à de très vives critiques à travers le monde. A la suite de ces
critiques, les autorités américaines avaient promis de revoir certaines des
dispositions les plus controversées du décret. Ainsi, le 21 mars 2002,
elles ont affirmé que lors des procès, la « présomption d’innocence » et la
« conviction au-delà du doute raisonnable » seront pris en compte et que
les inculpés pourront se faire assister de l’avocat de leur choix dans
certains cas. En outre, elles ont décidé que la condamnation à la peine de
mort se ferait à l’unanimité des membres de la commission.
Avec ce décret, les Etats-Unis adoptent ce q’ils ont toujours récusé des
autres pays : le recours aux tribunaux militaires, « au mépris des
43
Rapport Général de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, « La Lutte Contre le
Terrorisme Résultats et Questions », paragraphe 66.
42
garanties de procès juste et équitable ». En guise d’exemple, selon B.
Hoffman, les Etats-Unis ont émis des protestations à l’encontre de la
condamnation du citoyen américain Lori Berenson par un tribunal
militaire péruvien et a obtenu qu’il soit rejugé en appel par une cour
civile. Les Etats-Unis ont également émis des critiques similaires à
l’encontre du jugement de l’activiste nigérian Ken Sara Wiwa devant un
tribunal militaire et de son exécution.
3)
L’US-VISIT44 : un programme pour filtrer les
entrées aux Etats-Unis
L’US-VISIT a été voté par le Congrès américain juste après les attentats
du 11 septembre 2001. Il a été lancé le 5 janvier 2004. Cette nouvelle
procédure d’entrée sur le territoire américain a recours à la biométrie, en
particulier au balayage électronique des empreintes digitales, pour
confirmer l’identité du visiteur étranger et vérifier son statut au plan des
visas. Le programme se sert aussi des données obtenues par les consulats
des Etats-Unis à l’étranger pour vérifier l’identité des visiteurs. A la fin
de l’année 2004, la même procédure devra être suivi par les étrangers à
leur sortie du territoire des Etats-Unis. L’US-VISIT est présent dans les
115 aéroports et 14 [c’est 15] ports américains45 et va être étendu d’ici
peu à 50 postes aux frontières canadiennes et mexicaines.
Sur une année pleine, 24 millions de voyageurs munis de visas devront se
soumettre à ces contrôles46. Les autorités américaines affirment, pour
défendre le programme, qu’il dissuade les terroristes ou criminels fichés
de se rendre aux Etats-Unis, protége les visiteurs en empêchant
l’usurpation de leurs documents de voyage et enfin garantie l’intégrité du
44
Voir également Annexe III
Voir Annexe IV pour les aéroport et ports concernés
46
Pascal RICHE, « Aux frontières américaines : souriez vous êtes fichés », Libération,
6 janvier 2004, p. 9
45
43
système d’immigration américain en facilitant les voyages et en
respectant la vie des visiteurs.
Mais ce qui inquiète dans ce programme, notamment pour les
organisations de défense des doits de l’Homme et les organisations de
défense des droits civiques, « c’est la fiabilité des informations que
contient la base de données fédérale ». En plus, « des tas de gens y
figurent par erreur et, une fois qu’ils y sont, il est très difficile de les en
faire sortir »47. Ils affirment également craindre que le FBI s’en sert pour
y faire entrer qui bon lui semble. Pour réfuter l’argument selon lequel le
programme empêcherait aux terroristes d’entrer aux Etats-Unis, M. J.
Gohel (spécialiste de la Sécurité à l’Asia Pacific Foundation à Londres)
affirme que « les terroristes sont souvent des jeunes gens de bonne
famille, ayant fait des études et sans aucun casier judiciaire. »48
Toutefois, la plupart des ressortissants français, n’ayant pas besoin de
visa pour se rendre aux Etats-Unis, ne sont pas concernés par le
programme mais certaines catégories de voyageurs comme les étudiants,
les journalistes et autres, ayant besoin d’un visa américain, devront se
plier aux nouvelles règles. A l’instar des ressortissants français, les
ressortissants de 27 autres pays49 sont exemptés de l’US-VISIT (la durée
du séjour ne doit pas dépasser 90 jours). Cependant, au plus tard avant la
fin de l’année, ces 27 pays et la France, devront fournir à leurs
ressortissants des passeports avec une puce « contenant leur photo et des
informations biométriques : empreintes digitales scannées ou reproduction de l’iris »50
47
Crystal WILLIAMS (porte parole de l’American Immigration Lawyers Association)
cité par Pascal RICHE, op. cit., p. 9
48
Pascal Riché, op. cit., p. 9
49
Allemagne, Andorre, Australie, Autriche, Belgique, Brunei, Canada, Danemark,
Espagne, Finlande, Grande-Bretagne, Islande, Irlande, Italie, Japon, Liechtenstein,
Luxembourg, Monaco, Nouvelle-Zélande, Norvège, Pays-Bas, Portugal, Saint-Marin,
Slovénie, Suède, Suisse, Singapour.
50
Pascal RICHE, op. cit., p. 9
44
En dehors de l’US-VISIT, les autorités américaines envisagent de mettre
en place à partir de cette année : le CAPPS II. Il consiste en une
utilisation d’informations communément fournies par les passagers ainsi
que les banques de données commerciales et les banques de données sur
les criminels afin de repérer les passagers qui pourraient faire peser une
menace sur les autres.
Selon les autorités fédérales, le CAPPS II aidera à protéger la vie privée
des gens tout en protégeant les vies et n’aura pas accès aux informations
bancaires, aux informations médicales ou aux données relatives aux
transactions commerciales par carte de crédit. Enfin, les autorités
assurent qu’une bonne partie des données concernant les passagers sera
effacée immédiatement après le vol.
4)
Le programme d’aide anti-terroriste (ATA) : un
programme pour aider certains pays à former leurs
forces de sécurité
L’ATA, évoqué au premier chapitre, est l’un des programmes que les
Etats-Unis ont mis en place pour aider certains pays à lutter contre le
terrorisme.
Ce programme n’est ni une aide militaire ni une aide économique ; il se
rapproche beaucoup plus à une coopération policière. Pour rappel, l’ATA
forme les forces de police et de sécurité, de certains pays, à combattre, à
dissuader et à élucider les crimes de nature terroriste sur leurs territoires.
Après demande du pays intéressé, auprès des autorités diplomatiques
américaines sur son sol, de bénéficier du programme, une équipe
d’experts est envoyée sur place pour évaluer « les capacités de
dissuasion et de riposte du pays face aux terroristes » dans cinq
domaines :
45
‰
application des lois, maintien de l’ordre et protection des
personnes et des biens ;
‰
protection des détenteurs du pouvoir national, du siége et des
fonctions du gouvernement, et du corps diplomatique, y inclus
celui des Etats-Unis ;
‰
surveillance des frontières internationales ;
‰
protection des infrastructures essentielles ; et
‰
gestion des crises de portée nationale.
C’est à partir de là que les Etats-Unis vont déterminer de quel type de
formation le pays hôte nécessite et avec quel type d’équipement.
Toutefois, avant qu’un pays puisse participer au programme, les
Américains
s’assurent
d’abord
s’il
respect
les
droits
de
l’Homme (condition essentielle pour bénéficier du programme).
La formation dure de deux à cinq semaines et se focalise essentiellement
sur la prévention, la gestion et le règlement des crises et sur les
investigations.
L’ATA a le mérite, comme l’affirme les autorités fédérales, de fournir
« aux forces de police et de sécurité des pays un cadre d’officiers
spécialisés qui connaissent les valeurs et la façon de penser des EtatsUnis et sur lesquelles les officiers de sécurité régionaux et autres
responsables Américains peuvent compter en temps de crise. »51
B. Les mesures financières pour bloquer les avoirs des
terroristes
Les attentats du 11 septembre 2001 ont convaincu les Etats-Unis
combien il était important pour eux de lutter contre ce nouveau
51
Alan BIGLER , « Le Programme américain, d’aide à la lutte anti-terroriste », op.
cit., p. 4
46
phénomène qu’est le terrorisme et en particulier leurs finances sans
lesquelles ils ne pourraient pas fonctionner efficacement. Sans argent, les
auteurs des attentats du 11 septembre n’auraient, certainement, jamais
pus suivre des cours de pilotage, rester des mois sur le territoire
américain pour préparer minutieusement et sereinement leurs actes et
s’acheter des billets pour embarquer dans les avions qui leur ont servi
d’armes. Il semblerait que la préparation des attentats a coûté aux
terroristes environ 400 000$ US.
Pour lutter contre les finances du terrorisme, les Etats-Unis font appel à
deux types d’outils : le gèle des avoirs appartement à des terroristes à
titre individuel, à des groupes terroristes et aux Etats qui parrainent le
terrorisme ; le second outil est l’interdiction de tout soutien matériel aux
terroristes. Un certain nombre de mesures a été mis en place par les
autorités. Parmi les plus importantes nous pouvons noter : le décret
13224, l’"Opération Green Quest" et l’US PATRIOT Act.
Le décret 13224
Le décret 13224 a été signé par le président Bush le 23 septembre 2001.
Il habilite au Département du Trésor de bloquer les avoirs et transactions,
aux Etats-Unis, de personnes (donateurs, agents de transfert d’argent etc.)
ou institutions (banques, organisations charitables etc.) liées à des
terroristes ou à des organisations terroristes. Le DoT a également
l’autorisation de geler les avoirs des banques et institutions financières
étrangères sur le territoire américains, qui refuseraient de coopérer au
blocage des avoirs terroristes, ou de leur bloquer l’accès aux marchés et
capitaux Américains.
Ce décret n’est pas le premier du genre. Le président Clinton avait, sous
ses deux mandats, signé trois décrets similaires. Il s’agit des décrets
12947, 13099 et 13129.
47
Le décret 12947 a été signé en janvier 1995. Il devait permettre la saisie
des capitaux des personnes ou organisations considérées comme étant
nuisibles au processus de paix au Moyen-orient.
Le décret 13099, signé en août 1998, prohibait toute transaction effectuée
aux Etats-Unis avec un certain nombre de groupes terroristes inscrits sur
une liste tenue par le DoT.
Enfin, le décret 13129 a été signé en juillet 1999 en réponse aux attentats
contre les ambassades américaines au Kenya et en Tanzanie. Il interdisait
toute transaction financière avec les Taliban. Il avait permis le gèle de
prés de 300 millions de dollars US.
L’"Opération Green Quest"
Juste après les attentats du 11 septembre 2001, c’est à dire en octobre
2001, le gouvernement des Etats-Unis a mis en place : le "Foreign
Terrorist Asset Tracking Center" (FTAT), l’"Opération Green Quest" et
le "Terrorist Financing Task Force". En plus de traquer les avoirs des
terroristes, ces organismes avaient pour missions de faciliter le partage
des informations, dans le domaine financier, entre les agences de
renseignement et les agences chargées de veiller à l’application de la loi.
Ils étaient également chargés d’aider et d’encourager certains pays à
identifier, à perturber et à faire échec aux réseaux de financement du
terrorisme.
L’"Opération Green Quest" a été déclenchée le 25 octobre 2001 par le
DoT. Il a mobilisé : les douanes ("US Customs Service"), les agents des
impôts (IRS), le Secret Service, le Bureau de contrôle des avoirs
étrangères (OFAC), le Réseau de répression de la criminalité financière
48
(FinCen52), le Service d’inspection des postes et le Service naval
d’enquêtes criminelles. D’après Antoine Colonna53, l’Opération a permis,
entre octobre 2001 et février 2002, c’est à dire en l’espace de quatre
mois, le gèle de 14,6 millions de dollars US d’avoirs.
Le USA PATRIOT Act.
En matière de lutte contre le financement du terrorisme, la loi invite les
institutions financières privées à augmenter la transparence de leurs
transactions, de rechercher un système commun d’identification du client
et à trouver les moyens nécessaires pour empêcher leurs services
financiers d’être utilisés par des criminels ou des terroristes pour blanchir
de l’argent. En outre, elle encourage une coopération entre le
gouvernement et le secteur privé et facilite le partage de l’information
entre le gouvernement et les agences nationales.
C. Les mesures militaires
Les mesures militaires concernant la guerre contre le terrorisme,
notamment les opérations militaires, sont exclusivement unilatérales. Les
Etats-Unis ont agi en dehors des Nations Unies et n’ont pas beaucoup
sollicité l’aide internationale (pour ce qui est de la façon de mener les
opérations). Les opérations concernent essentiellement l’Afghanistan et
l’Irak. Même si elles se sont déroulées avec succès (techniquement), on
ne peut pas assurer qu’elles ont permis à avancer la guerre contre le
terrorisme.
Dans un souci de mieux mener leurs opérations militaires à l’extérieur
mais aussi pour protéger leur territoire, les Américains avaient opéré des
changements assez importants dans le domaine militaire.
52
Le FinCen est un groupe inter-agence créé récemment par le Trésor américain et le
Secret Service.
53
« Guerre secrète contre Al-Qaeda », dir. Eric DENECE, p. 52
49
1)
Des changements intervenus dans le domaine
militaire depuis le 11 septembre
Depuis le 11 septembre 2001, les Etats-Unis estimant qu’ils font face à
de nouvelles menaces et à de nouveaux ennemis, affirment que les
principales priorités pour leurs armées sont de défendre le territoire
national et de réaffirmer leur rôle dans le monde. Ils estiment également
que leurs institutions militaires doivent être transformées pour faire face
aux défis du 21e siècle. Pour cela l’armée doit assurer les alliés et les
amis des Etats-Unis ; dissuader toute future concurrence militaire et
toutes menaces contre les intérêts américains, de leurs alliés et amis ;
enfin défaire de manière décisive tout adversaire si la dissuasion ne
fonctionne pas. Pour parvenir à cela, les Etats-Unis ont défini leur
stratégie de défense (Quadrennial Defense Review) et mis en place un
nouveau commandement (Northern Command ou Northcom).
a)
La Quadrennial Defense Review (QDR)
La QDR est un document de référence relatif à la stratégie de défense des
Etats-Unis. Depuis 1993, la loi oblige chaque nouvelle administration
d’en établir un. L’administration Clinton en avait élaboré deux (en 1993
et en 1997). Celui de septembre 2001, le 3e du genre, a été élaboré par
l’administration Bush. La QDR a été présentée au Congrès le 30
septembre 2001. Le contenu de ce document a été très largement
influencé par les événements du 11 septembre 2001.
Face aux menaces terroristes, mais aussi face à la prolifération des
missiles balistiques et des CBRNE, le QDR a assigné quatre objectifs à
l’armée américaine54 :
54
Cf. Rapport d’information du Sénat français, n° 313, Session ordinaire de 2001-2002,
p. 31 - 32
50
‰
le premier est d’assurer la « défense du territoire des EtatsUnis », ce qui demande une implication beaucoup plus forte du
pentagone dans la « Homeland Defense » ;
‰
le deuxième objectif est de « dissuader les agressions » grâce à la
présence militaire extérieure et à la capacité de réaction,
notamment par le redéploiement des troupes ;
‰
le troisième objectif consiste, en cas de conflit, à « pouvoir
l’emporter simultanément sur deux théâtres majeurs », de
manière décisive sur l’un d’entre eux ;
‰
le quatrième et dernier objectif vise à pouvoir conduire un
nombre limité d’opérations dans des « crises de faible intensité ».
Pour donner à l’armée les moyens d’atteindre ces objectifs, la QDR
prône une hausse du budget de la défense et la « transformation » des
forces armées américaines. Cette transformation s’appuie sur quatre
piliers55 :
‰
le premier d’entre eux concerne le renforcement de la
coordination (« jointness ») à tous les niveaux : entre les armées,
notamment en matière de commandement et de contrôle, avec les
alliés et les pays partenaires dans le cadre de coalitions, entre le
Pentagone
et
les
différentes
pilier
repose
agences
gouvernementales
américaines ;
‰
le
deuxième
sur
un
développement
de
l’expérimentation et de l’évaluation de nouveaux concepts
opérationnels, matériels ou équipements, afin de disposer d’une
plus large variété d’options ;
‰
le troisième pilier consiste à exploiter l’avantage dont disposent
les Etats-Unis dans le domaine du renseignement, par le
renforcement du renseignement humain, par les développements
technologiques concernant les drones et les moyens aériens,
55
Cf. Rapport d’information du Sénat français, op. cit., p. 33 - 35
51
navals et spatiaux, dédiés au renseignement et surtout pour une
meilleure intégration des diverses sources de renseignement ;
enfin
‰
le quatrième pilier concerne les capacités des forces.
La « transformation » implique également de doter à l’armée la capacité
de pouvoir « déjouer les stratégies de déni d’accès » et d’ôter à l’ennemi
toute possibilité de bénéficier d’un « sanctuaire ».
b)
La création d’un nouveau commandement
pour protéger le territoire américain : le
Northcom
Jusqu’en 2002, les Etats-Unis comptaient huit commandements unifiés :
quatre à vocation géographiques et quatre autres à vocation
fonctionnelles. Les quatre commandements à vocation géographiques
sont : le Southern Command (Southcom), le Pacific Command (Pacom),
l’European Command (Eucom) et le Central Command (Centcom). Les
quatre commandements fonctionnelles sont : le Strategic Command, le
Transportation Command, le Special Operations Command et le Joint
forces Command.
Le Centcom joue un rôle très important dans la guerre contre le
terrorisme. Il a été créé en 1983 et son Quartier général se trouve à Mac
Dill (Floride). Il couvre une zone de responsabilité de 25 pays parmi
lesquels les pays du Proche-Orient et du Moyen-Orient et les pays de
l’Asie centrale.
Depuis le début de cette guerre, les opérations militaires anti-terroristes
menées l’ont été sous son commandement. C’est le cas des opérations en
Afghanistan (en 2001) et en Irak (en 2003).
52
Suite aux attentats du 11 septembre, les Etats-Unis ont mis en place un
neuvième commandements unifié : le Northcom qui est à vocation
géographique. Le Northcom est entré en fonction le 1e octobre 2002. Il
couvre les Etats-Unis, le Canada, le Mexique, une partie des Caraïbes et
les eaux environnant jusqu’à 500 miles (l’Océan Pacifique et l’Océan
Atlantique). Sa mission est de défendre le territoire américain (terre, mer
et air) et de coordonner l’assistance militaire fournie aux autorités civiles
nationales en cas d’attaques avec des ADM. Ce qui implique « des
actions militaires (protection des infrastructures critiques, de l’espace
aérien et des approches maritimes), tout autant que civilo-militaires
(participation aux plans d’évacuation et aux secours aux populations,
protection nucléaire, biologique, chimique et radiologique). »56
Désormais, le Commandant en chef du Northcom est aussi celui du
Norad. Le Norad est un organisme binational (Etats-Unis et Canada)
chargé de la surveillance aérospatiale et de l’espace aérien de l’Amérique
du nord.
Le Northcom emploie au moins 1000 personnes (militaires et civiles) et
possède un budget annuel qui tourne autour de 70 millions de dollar US.
2)
Les opérations militaires
L’Opération Enduring Freedom (OEF) en Afghanistan et l’Opération
Iraqi Freedom (OIF) en Irak sont les opérations militaires les plus
importantes que les Américains ont mené dans le cadre de la guerre
contre le terrorisme, depuis le 11 septembre. Ils n’ont pas mis beaucoup
de temps à défaire leurs adversaires lors de ces opérations. L’OEF qui est
intervenue en riposte aux attaques du 11 septembre a été plus ou moins
soutenue par les Etats et les Nations Unies (l’ONU avait dépêché une
force d’assistance dans le pays après la chute des Taliban). Par contre
56
Rapport d’information du Sénat français, op. cit., p. 48
53
avec l’OIF les Etats-Unis n’ont pas bénéficié dont soutien international à
quelques exceptions prés.
a)
OEF
En Afghanistan, les gens étaient brutalisés par le régime en place.
Beaucoup de personnes ont souffert de famine. Les femmes n’étaient
autorisées ni à aller au travail ni à aller à l’école. Un homme risquait la
prison si sa barbe n’atteignait pas une certaine longueur. On pouvait très
facilement être arrêté et mis en prison pour avoir regardé la télévision. En
résumé, sous le régime des Taliban, les Afghans vivaient en esclavage.
En dehors de cela, Ben Laden, le présumé responsable des attentats du
11 septembre 2001, vivait dans ce pays avec la bénédiction des Taliban.
S’appuyant sur l’idée qu’il fallait libérer l’Afghanistan de son régime
archaïque qui réduisait son peuple à l’esclavage et ; voulant riposter aux
attaques du 11 septembre et mettre la main sur Ben Laden et ses amis,
les Américains ont monté une opération militaire sous l’appellation de
Enduring Freedom ou Liberté Immuable. Elle a été lancée le 7 octobre
2001.
L’opération militaire américaine, Enduring Freedom, en Afghanistan
avait quatre objectifs selon le Center for Defense Information57 (CDI).
Ces objectifs étaient : ôter à Al Qaïda son refuge afghan ; arrêter
Oussama ben Laden et ses hommes pour les traduire en justice ; rendre
Al Qaïda incapable de poser des menaces aux intérêts américains ; enfin
stopper le parrainage du terrorisme islamiste par le régime des taliban en
le détruisant si nécessaire. En voulant détruire le régime des Taliban, il
était clair pour les Etats-Unis que cette guerre était une guerre totale.
57
Sofia ALDAPE, « The US Campaign In Afghanistan : The Year In Review », Center
for Denfense Information (CDI), 10 octobre 2002, p. 1 (Doc. Word)
54
Une fois sur le champ de batailles, l’objectif principal des militaires
américains était de « s’assurer la maîtrise du ciel ». Pour cela, il fallait
« détruire par des frappes aériennes de nuit et à haute altitude l’aviation
des Taliban, les installations aériennes au sol et leur défense
antiaérienne, mais aussi les centres de contrôle et de commandement et
les camps d’entraînement des terroristes »58.
L’atteinte de cet objectif devait permettre aux Américains d’éliminer les
risques auxquels leur aviation s’exposer : la Défense contre avion (DCA)
et l’aviation des taliban (presque inexistante). Elle permettait également
de briser la cohésion des forces taliban et des hommes d’Al Qaïda en leur
ôtant tous moyens de communication, de surveillance, de renseignement
et toute liberté de mouvement et ainsi faciliter une intervention terrestre.
Cette intervention va se dérouler en deux phases : une première phase
aérienne et une seconde terrestre.
La première phase a porté sur des frappes aériennes ciblées et des
bombardements. Elle devait permettre aux Américains d’avoir la
« maîtrise des airs ». Les premières frappes ont d’abord visé les défenses
aériennes, l’aviation, les centres de commandement et de contrôle des
taliban et les camps d’entraînements d’Al Qaïda. Après dix jours de
frappes aériennes, pour permettre aux Forces de l’Alliance du Nord
(FAN) de progresser vers Kaboul et le sud du pays, les bombardiers
américains commencèrent à s’attaquer aux lignes taliban. En guise
d’exemple, le 31 octobre, des bombardiers B-52 avaient sévèrement
pilonné les lignes des taliban situées au nord de Kaboul.
D’après Loup Francart, dans les premières heures qui ont suivi le début
de l’Opération, les Américains ont tiré 50 missiles Tomahawk qui ont
58
Loup FRANCART et Isabelle DUFOUR, « Stratégies et décisions : la crise du 11
septembre », p. 225.
55
tous atteint leurs cibles. Ces missiles ont été tirés à partir de trois
croiseurs et un destroyer positionnés en mer d’Arabie59.
Cette première phase a été accompagnée d’opérations de guerre
psychologiques qui consistaient à larguer des tracts à diffuser des
messages radios à la population afghane pour leur expliquer que leurs
actions [les Américains] visées uniquement les Taliban.
Après quatre semaines de bombardement, les défenses aériennes, les
installations militaires, les moyens de communication des taliban étaient
presque tous détruits et leurs lignes sérieusement atteintes. C’est à partir
de se moment que débute, véritablement, la seconde phase.
La seconde phase de l’Opération a porté sur une intervention des Forces
spéciales au sol. Cet intervention ne s’est pas faite par un envahissement
massif du territoire afghan par les troupes de la coalition. Elle s’est faite
plutôt au « coup par coup » et selon les besoins.
La principale mission des Forces spéciales était de traquer et d’arrêter les
terroristes et les Taliban. Sur le champ de bataille, elles étaient chargées
d’encadrer et de conseiller les FAN d’une part et de désigner les objectifs
au sol au profit des forces aériennes d’autre part. Dans certains cas, 20
minutes après avoir reçu les détails sur leurs cibles, l’aviation frappée.
Les frappes aériennes intensives et précises combinées avec une
intervention au sol des Forces spéciales agissant en concert avec les FAN
ont ôté aux taliban tout espoir et toute possibilité de transformer
l’Opération Enduring Freedom en une guerre d’usure. Moins d’un mois
après l’offensive terrestre, les taliban avaient perdu plus de 90% du
territoire qu’il contrôlait avant le début de l’Opération. Mazar-i-Sharif, la
première ville à être prise, est tombée le 9 novembre ; moins de deux
59
Loup FRANCART et Isabelle DUFOUR, op. cit., p. 206 .
56
semaines plus tard, Taloqan, Kaboul, Herat, Bamiyan tombaient ; le 25
novembre la ville de Kunduz tombe. Avant la Chute de la capitale
Kaboul le 13 novembre, les taliban s’étaient repliés dans leur fief
Kandahar. Cette ville tombera le 7 décembre. Le dernier refuge des
taliban et d’Al Qaïda, l’enclave de Tora Bora, tombera le 16 décembre.
A la fin de l’année 2001, l’Afghanistan était sous contrôle des FAN et de
la coalition américano-britannique. Les taliban et les membres d’Al
Qaïda qui ont eu la chance d’échapper à la mort ont eu le malheur d’être
prisonniers des Américains ou de vivre en cachette entre l’Afghanistan et
le Pakistan. Pour capturer ceux qui sont en fuite, les Américains ont
monté d’autres opérations. Parmi elles : l’Opération Harpoon et
l’Opération Anaconda respectivement en mars et en d’avril 2002, et
l’Opération Lions des Montagnes.
b)
OIF
A la suite des événements du 11 septembre 2001, les Américains
affirmaient que leur principal soucis était de voir des groupes terroristes
lancé des attaques à partir du territoire irakien ou que l’Irak utilise ces
groupes pour attaquer les pays occidentaux. Soupçonnant l’Irak de
détenir des ADM (Chimiques et biologiques), les Américains craignaient
que le régime de Saddam Hussein donne ses armes aux terroristes. Ils
affirmaient aussi que l’Irak avait probablement des liens avec Al Qaïda.
Se fondant sur tout cela, ils ont estimé, à tort ou à raison, qu’il était
urgent de mener une action militaire contre l’Irak.
Pour justifier leur intervention, les Américains ont essayé par tous les
moyens, sans trop convaincre, de prouver le lien entre l’Irak et le
terrorisme ainsi que la détention d’ADM. Le président Bush avait à de
nombreuse reprises déclaré que l’Irak représentait « une menace
imminente » et que son pays disposait d’élément tendant à prouver
57
l’existence de programmes interdites en Irak. Colin Powell s’était
présenté au Conseil de sécurité des NU, devant les médias du monde
entier, avec des photos prise par satellites (camions et sites), des
enregistrements téléphoniques (entre des personnes supposées appartenir
à l’armée irakienne et d’un groupe terroriste) et un flocon contenant de
l’Anthrax, pour convaincre les NU d’intervenir en Irak ou au moins de
cautionner leur intervention.
D’après certaines personnes, la volonté de l’administration Bush
d’intervenir en Irak date bien avant les attentats du 11 septembre. En
guise d’exemple, selon un rapport du sénat français, bien avant le 11
septembre, « l’élimination du régime de Saddam Hussein revêtait un
caractère prioritaire pour une large partie de l’administration. » En
outre, dans ses discours de politique étrangère, avant son élection,
George Bush ne cachait pas sa volonté d’en finir avec le régime de
Saddam Hussein.
Malgré l’opposition de la Communauté internationale, l’OIF débutera le
19 mars 2003 après plusieurs semaines de suspense. Cette guerre, comme
l’illustre les propos du président Bush, s’inscrit dans une logique de
guerre préemptive qui consisterait à s’attaquer au mal avant qu’il
n’émerge. En effet, le président Bush disait que l’intervention en Irak
consistait « de faire face à cette menace [irakienne] maintenant avec [l’]
armée de terre, [l’] armée de l’air, [la] marine, [la] garde côtière et [les]
Marines, pour ne pas avoir à y faire face plus tard avec des armées de
pompiers, de policiers et de médecins dans les rues de [leurs] villes. »60
Les objectifs, aussi bien politiques que militaires que les Américains
s’étaient fixés dans cette guerre, étaient les suivantes61 :
60
Cité par Bruno TERTRAIS, «Analyse et enseignements de la campagne Iraqi
Freedom», FRS (Fondation pour la Recherche Stratégique), 24 avril 2003, p. 2
(Document Word)
61
ibidem
58
‰
mettre fin au régime de Saddam Hussein ;
‰
identifier, isoler et éliminer les ADM ;
‰
rechercher, capturer et expulser les terroristes ;
‰
obtenir des renseignements sur les réseaux terroristes ;
‰
obtenir des renseignements sur le commerce illicite d’ADM ;
‰
d’apporter une aide humanitaire ;
‰
sécuriser les installations pétrolières ; enfin
‰
aider les Irakiens à créer un gouvernement représentatif.
Pour atteindre leurs objectifs, les militaires américains avaient planifié
ou envisagé un certain nombre d’options. Parmi elles : l’envahissement
de l’Irak par au moins deux fronts. Au nord à partir de la Turquie et au
sud à partir du Koweït. Une autre option était de procéder à des attaques
aériennes pour ensuite, soit en même tant que les frappes ou après, lancer
une offensive terrestre à partir du Koweït. Finalement, face au refus des
Turcs de l’utilisation de leur territoire, c’est la dernière option qui sera
adoptée.
Le 21 mars débute la campagne aérienne "Shock and Awe" (choc et
stupeur) assimilée par certaines personnes à une Blitzkrieg (guerre
éclair). Elle consistait à bombarder massivement la capitale irakienne
Bagdad dans le but de saper le moral de l’armée mais aussi de détruire le
système de commandement et de contrôle des forces irakiennes.
En même temps que se déroulait cette campagne aérienne, les
Américains et les Britanniques opéraient une offensive terrestre, à partir
de la frontière koweitienne, le long de l’Euphrate et du Tigre pour
remonter jusqu’à Bagdad.
Quelques jours après le début des combats la coalition américanobritannique avait réussi à mettre la main sur les villes du sud comme
Bassora et le port de la ville d’Oum Qasr (le seul débouché de l’Irak à la
59
mer). Les Britanniques devaient rester au sud pour sécuriser les villes
conquises. Quant aux Américains, ils devaient poursuivre leur avancée
vers Bagdad en tâchant d’éviter les villes qui ne revêtaient pas un intérêt
stratégique à leurs yeux.
Le 4 avril, soit prés de deux semaines après le début de l’opération, la 3e
Division d’infanterie américaine mettaient la main sur l’Aéroport
International à la périphérie de Bagdad après avoir défait la Division
irakienne Médina. A partir du 5 avril les troupes américaines
commençaient à investir la ville. Au 10 avril, Bagdad était entre les
mains des Américains. Saddam Hussein et compagnie s’étaient évanouis
dans la nature. A partir de cette date, en moins de trois jours, Kirkuk et
Mossoul (villes kurde se trouvant au nord de l’Irak) sont tombées sans
résistance entre les mains des Peshmergas. Tikrit, la ville natale de
Saddam Hussein où l’on croyait que le raïs s’était retiré avec sa Garde
républicaine et ses Feddayins, tombera sans grande difficulté le 14 avril.
En résumé, nous pouvons dire qu’à la mi-avril la guerre était gagnée par
la coalition américano britannique. A la déception de certaines personnes,
la « mère de toutes les batailles », qu’avait promise Saddam Hussein, n’a
pas eu lieu.
3)
Le
soutien
international
aux
campagnes
américaines
De source militaire américaine, « 15 des 18 Alliés américains membres
de l’OTAN » ont participé à la campagne militaire en Afghanistan et 11
pays de l’OTAN ont déployé des forces terrestres sur le théâtre des
opérations et aux alentours.
60
Selon un rapport présenté en novembre 2002 devant l’Assemblée
parlementaire de l’OTAN62, 23 pays ont mis des installations à la
disposition des Américains pour leurs opérations militaires en
Afghanistan ; 89 ont donné une autorisation de survol de leurs territoires
et 76 une autorisation d’atterrissage. Toujours selon le rapport, plus de
100 pays ont offert des forces militaires ; 27 pays partenaires de la
coalition ont fourni en matériels et en soldats : 104 avions, plus de 60
navires et 14 000 soldats (il faut noter que la plupart des soldats se
trouvaient à bord de navire opérant dans la région et non sur le terrain des
combats). Le Royaume-Uni, la France et l’Italie ont fourni des groupes
aéronavals.
Noter bien qu’une bonne partie des pays ayant participés, à la campagne
militaire en Afghanistan l’ont fait dans le cadre de la Force de sécurité et
d’assistance internationale (ISAF).
L’ISAF est une force de maintien de la paix envoyée en Afghanistan par
les Nations Unis63 vers la fin de l’année 2001. Elle se composait, en
2003, de 4000 à 6000 troupes de prés d’une vingtaine de pays64. Au mois
d’avril 2003, l’Allemagne avec prés de 2500 troupes était le pays qui
possédé le plus grand nombre de troupes dans l’ISAF. A la même date, la
France possédait prés de 550 troupes dans la force. La plupart des troupes
françaises étaient des troupes de déminage, de reconnaissance ou de
logistique.
La mission de l’ISAF est de sécuriser l’Afghanistan et en particulier la
capitale Kaboul; d’aider le gouvernement afghan à mettre en place ses
propres forces de sécurité et de défense et d’aider à la reconstruction du
pays.
62
Cf. Rapport Spécial de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, « La guerre contre le
terrorisme », paragraphe 30
63
Résolution 1386 du Conseil de sécurité des NU adoptée le 20 décembre 2001.
64 Albanie, Australie, Azerbaïdjan, Bulgarie, République Tchèque, Danemark, Finlande, France,
61
Il lui est reproché d’être présente uniquement dans les grandes villes du
pays comme Kaboul. Il est à noter que l’ISAF, comme les forces
américaines, les agents et fonctionnaires des OI et les autorités afghanes,
est la cible d’attaques terroristes, orchestrées vraisemblablement, par les
taliban déchus et les membres d’Al Qaïda.
En dehors de l’ISAF comme nous l’avons évoqué, des pays ont participé
à titre individuel à la campagne afghane. Le Royaume-Uni, lors de
l’Opération Enduring Freedom, a eu à effectuer de nombreuses missions
de reconnaissances aériennes. Ses forces navales ont mené des attaques
avec des missiles Tomahawk sur le territoire afghan (à bord de leurs
sous-marins HMS Superb, HMS Trafalgar et HMS Tiumph par exemple)
lors de la première phase de l’Opération. Leurs forces spéciales ont
participé à la seconde phase de l’Opération.
Le porte-avions français le Charles de Gaulles a été déployé de
décembre 2001 à juin 2002 sur le théâtre des opérations. Les forces
aériennes françaises ont eu à effectuer des missions de reconnaissance au
cours de l’OEF65. La France avait également déployé des appareils de
transport (C-160 Transall et C-130 Hercules) à Douchanbe au
Tadjikistan ; des avions ravitailleurs au Kirghizstan « à des fins d’aide
humanitaire, de transport d’appoint pour les troupes de la coalition et de
ravitaillement en vol ». Des Mirage 2000 basés à Manas, au Kirghizstan,
avaient été mis à la disposition de la coalition pour servir à des missions
de soutien aérien rapproché.
D’autre pays, comme l’Allemagne, le Canada, la Pologne, l’Ouzbékistan,
le Kirghizistan, le Tadjikistan et autres ont contribué diversement à la
réussite de la campagne militaire américaine en Afghanistan.
65
cf. Rapport Spécial de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, « La guerre contre le
terrorisme », paragraphe 37
62
Contrairement en Afghanistan, les Etats-Unis n’ont pas bénéficié d’un
très large soutien international dans la guerre en Irak. Avant le début de
l’OIF, les autorités américaines affirmaient que leur coalition comptait
prés de 50 pays « représentant au total plus d’un milliard d’êtres
humains. » parmi ces pays, selon Colin Powell le secrétaire d’Etat
américain, 15 n’ont pas souhaité que leurs noms soient divulgués. Donc
on se retrouvait avec une coalition de 50 pays dont les 35 étaient connus
et les 15 autres inconnus.
Toutefois, il faut retenir que ces pays, à l’exception du Royaume-Uni et
de l’Australie, n’ont pas participé militairement à la campagne ; ils n’ont
fait que déclarer leur soutien politique. En outre, une bonne partie de ces
50 pays n’avait aucun pouvoir de décision ou même de visibilité sur la
scène internationale. Tout ce qu’ils voulaient, c’étaient de gagner l’amitié
ou la confiance des Etats-Unis en perspective d’un éventuel soutien
économique ou financier.
III.
La coopération internationale à la guerre contre les terroristes
A la suite des attaques du 11 septembre, de nombreuses OI et institutions
financières, notamment l’ONU, l’Union européenne, le Front monétaire
international (FMI), la Banque mondiale et autres, ont mis en place des
mesures pour lutter contre les finances des terroristes. Sur le papier ces
mesures sont très intéressantes et laissent croire que la traque des avoirs
des terroristes va être féroce.
En dehors de l’appui international à cette traque, l’autre forme de
coopération entre les Etats-Unis et les autres pays de la planète s’est faite
bilatéralement. C’est ainsi que les Philippines, la Georgie et le Yémen,
entre autre, ont reçu une importante assistance militaire pour pouvoir
faire face aux terroristes sur leurs territoires.
63
A. L’appui internationale à la lutte contre les finances des
terroristes : l’un des rares domaines où l’étranger coopère
plus ou moins sérieusement
Après les attentats du 11 septembre 2001, prés de 197 pays et quelques
organisations intergouvernementales ont exprimé leur souhait d’aider les
Etats-Unis à bloquer les avoirs des terroristes. Certains de ces pays ont
aussitôt mis en place des mesures de gèle des avoirs terroristes et d’autres
ont sollicité l’aide des Américains pour y arriver. Ceux qui se sont le plus
illustrés dans cette lutte financière sont : les OI et les institutions
financières notamment les NU, l’Union européenne et un certain nombre
d’institutions et organisations régionales ou internationales.
1)
Les NU et la lutte contre le financement du
terrorisme
Bien avant que se produisent les attentats du 11 septembre les NU
avaient pris des mesures pour lutter contre le financement du terrorisme.
Le 9 décembre 1999, l’assemblée générale des NU avait adopté à
l’unanimité une convention sous l’appellation de « Convention
internationale pour la répression du financement du terrorisme. »
Cette convention mettait en garde les membres de l’organisation contre
tous soutien financier à des terroristes et tout financement d’opérations
terroristes. Au lendemain des attaques du 11 septembre, elle n’était
ratifiée que par quatre pays66. Les Etats-Unis eux même ne l’avait pas
ratifié ; ce qui n’est pas surprenant. Toutefois, ils ont promis, suite au 11
septembre, d’encourager tous les pays de ratifier, la convention ainsi que
les résolutions qui vont suivre et qui concernerait le terrorisme.
66
Le Royaume-Uni, le Botswana, le Sri Lanka et l’Ouzbékistan.
64
Après le 11 septembre, le Conseil de sécurité des NU dans sa résolution
7158, avait demandé les pays membres de geler les avoirs des
organisations terroristes et des personnes liées au terrorisme figurant sur
la liste du DoT. A la suite de cette résolution, le Conseil de sécurité
adoptera deux autres résolutions beaucoup plus contraignantes, sérieux et
célèbres (ou plus connues). Il s’agit des résolutions 1373 et 1390.
La résolution 1373 a été adoptée le 28 septembre 2001. Elle oblige les
Etats membres des NU à considérer comme délit l’usage ou la collecte de
fonds à des fins terroristes, geler les fonds de ceux qui sont impliqués
dans la planification d’attaques terroristes, coopérer aux enquêtes
internationales et refuser d’accueillir ceux qui exécutent, planifient ou
cautionnent des actes de terrorisme. Les Etats membres sont tenus de
faire part aux NU, par des rapports, de leurs efforts d’appliquer la
résolution.
La résolution 1390 a été adoptée le 16 janvier 2002. Elle oblige les
gouvernements des Etats membres à bloquer les avoirs des taliban (le
mollah Mohammad Omar et ses ministres) d’Oussama ben Laden, d’Al
Qaïda et de tous ceux qui y sont associés. Il est à noter que les noms, de
ceux dont les actifs sont bloqués, sont communiqués à la Commission
des sanctions des NU qui a 48 heures pour soulever d’éventuelles
objections. En l’absence d’objection, les noms concernés sont placés sur
la liste terroriste du Conseil de sécurité et tous les Etats sont tenus de
geler leurs actifs et d’empêcher qu’ils ne soient mis à disposition67.
2)
L’Union européenne (UE) et le gèle des avoirs
terroristes
67
Cf. au Rapport Général de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, « Les
Conséquences économiques du 11 septembre 2001 et la dimension économique de la
lutte contre le terrorisme », paragraphe 41
65
Prés des trois quarts des avoirs terroristes gelés, depuis le 11 septembre
2001, l’ont été au sein de l’UE et des Etats-Unis. L’Europe joue un rôle
très important dans la lutte contre le financement du terrorisme. Des
sommes considérables d’argent appartenant à des terroristes ont été
gelées par les Etats membres de l’Union. Le 8 novembre 2002, les
autorités britanniques annoncées avoir gelé, sur 38 comptes bancaires
appartenant à des individus suspectés d’être liés au terrorisme, prés de
103 millions de dollars américains. Le lendemain (9 novembre), le
ministre de l’économie de l’Italie déclarait que son pays avait, moins de
deux mois après les attentats du 11 septembre, gelé 20 comptes bancaires
et surveiller attentivement les mouvements d’argent sur prés de 100
autres comptes suspects. En Allemagne, 214 comptes bancaires
contenant prés de 4 millions de dollars US ont été gelés par les autorités,
dans les premiers mois qui ont suivi les attaques du 11 septembre.
L’UE, probablement piquée par l’émotion qu’avait suscitée les attentats,
avait activement et presque sans réserve participer à la vague de gèle des
avoirs terroriste. Cela a été également le cas de nombreux pays à travers
le monde. Au fur et à mesure que l’on s’éloignait de ces attentats, on
remarquait que la coopération avec les Etats-Unis, sans s’interrompre, se
compliquait. En guise d’exemple, quand les Etats-Unis ont demandé à
l’UE d’inscrire sur sa liste terroriste le Hamas palestinien pour geler ses
avoirs, l’UE n’avait pas accepté sur le coup ; il a fallu quelques semaines
de tractations pour voir le Hamas inscrit sur la liste.
3)
Le G7, le G20 et la lutte contre le financement du
terrorisme
Le G768 a été fondé en 1975 par les sept pays les plus industrialisés du
monde. On y a ajouté la Russie dans les années 90 d’où l’appellation
actuelle G8. Le groupe tient chaque année un sommet sur le territoire de
68
Le G7 ou Groupe des 7 se compose de l’Allemagne, du Canada, des Etats-Unis, de la
France, de l’Italie, du Japon et le Royaume-Uni.
66
l’un des Etats membres. Lors des sommets les Chef d’Etats et de
gouvernement discutent des problèmes de l’économie mondiale, de la
mondialisation, des crises internationales etc. Ils arrêtent ensuite des
mesures, non obligatoires, censées régler les « problèmes » de la planète.
Le 6 octobre 2001, au cours d’une réunion des ministres des finances du
groupe et des dirigeants des banques centrales, un plan d’action pour
combattre le financement du terrorisme a été établi. Le plan avait défini
comme
priorités :
l’« application
vigoureuse
des
sanctions
internationales, dont le gel des avoirs des terroristes, [le] développement
et [la] mise en œuvre rapide de normes internationales, [l’]
accroissement du partage des informations entre pays et [le]
renforcement des efforts des superviseurs financiers pour contrer
l’utilisation pernicieuse du secteur financier par les terroristes »69. Le
plan prévoyait aussi la création d’unités de renseignement financier pour
faciliter le partage des informations sur le blanchiment de l’argent et le
financement du terrorisme.
Le G2070 a pour rôle de favoriser le dialogue entre les pays industrialisés
et les pays en développement, particulièrement sur des sujets globaux
(comme la mondialisation ou la lutte contre le financement du
terrorisme), où la coopération internationale est un impératif.
Le groupe avait établi le 17 novembre 2001, un plan d’action similaire à
celui du G8. Le plan prévoyait de fournir une assistance technique aux
69
Rapport Général de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, « Les Conséquences
économiques du 11 septembre 2001 et la dimension économique de la lutte contre le
terrorisme », paragraphe 38
70
Le G20 a été créé en 1999 par le G7. Il réunit les pays membres du G8 (les EtatsUnis, le Japon, l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni, le Canada, l’Italie et la
Russie), un certain nombre de grands pays émergents ou intermédiaires (Indonésie,
Corée, Chine, Afrique du Sud, Brésil, Argentine, Mexique, Turquie, ainsi que l’Arabie
Saoudite et l’Australie), et plusieurs institutions financières internationales (FMI,
Banque mondiale, Comité du développement, Comité monétaire et financier
international). Outre les Etats membres, l’Europe est fortement représentée au sein du
G20 (Présidence de l’Union, Banque centrale). Les pays sont représentés par leurs
ministres des finances et leurs banquiers centraux.
67
pays nécessiteux pour qu’ils puissent lutter efficacement contre le
blanchiment de l’argent et le financement du terrorisme.
4)
Le GAFI et la lutte contre le financement du
terrorisme
Le GAFI est un organisme intergouvernemental créé à l’origine pour
lutter contre le blanchiment de capitaux. Il se compose actuellement de
33 membres71 : 31 pays et gouvernements et deux OI.
A la suite des attaques du 11 septembre 2001, lors d’une réunion
extraordinaire tenue à Washington DC en octobre 2001, le GAFI a décidé
d’élargir sa mission au financement du terrorisme. Il a ainsi adopté « Huit
Recommandations Spéciales » susceptibles d’empêcher aux terroristes et
à ceux qui les soutiennent d’accéder au Système financier international.
Ces « Huit Recommandations Spéciales » engagent les membres du
GAFI à72 :
‰
prendre des mesures immédiates pour ratifier et mettre en
œuvre les instruments appropriés des NU ;
‰
ériger en infraction pénale le délit de financement du
terrorisme, des actes terroristes et des organisations
terroristes ;
‰
geler et confisquer les avoirs des terroristes ;
‰
fournir la gamme la plus vaste possible d’assistance aux
autorités opérationnelles et de réglementation d’autres pays
dans les enquêtes sur le financement du terrorisme ;
71
Afrique du sud, Allemagne, Argentine, Australie, Autriche, Belgique, Brésil, Canada,
Commission européenne, Conseil de coopération du Golfe, Danemark, Espagne, EtatsUnis, Fédération de Russie, Finlande, France, Grèce, Hong Kong, Chine, Irlande,
Islande, Italie, japon, Luxembourg, Mexique, Norvège, Nouvelle-Zélande, Royaume
des Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni, Singapour, Suède, Suisse et Turquie.
72
Cf. Site du Gafi : www.fatf-gafi.org
68
‰
imposer des obligations de lutte contre le blanchiment de
capitaux aux systèmes alternatifs de paiement ;
‰
renforcer les mesures d’identification dans les transferts
électroniques de fonds internationaux et domestiques ;
‰
s’assurer que les personnes morales, notamment les
organisations caritatives, ne puissent pas faire l’objet d’abus
pour financer le terrorisme.
5)
Les institutions financières internationales et la lutte
contre le financement du terrorisme
Les institutions financières internationales en question sont le Fond
monétaire international (FMI) et la Banque mondiale. Ces institutions
fond parties du « Système des Nations Unies ».
Le FMI et la Banque mondiale ont été fondés suite à la conférence
internationale de Bretton Woods (d’où le nom d’institutions de Bretton
Woods) dans le New Hampshire aux Etats-Unis. Lapidairement, leur
mission consiste à rehausser le niveau de vie des pays membres. Plus
précisément, le FMI œuvre en faveur de la coopération monétaire
internationale et offre aux pays des conseils stratégiques et une assistance
technique pour les aider à bâtir et à maintenir des économies solides.
Quant à la Banque mondiale, elle favorise le développement économique
à long terme et la réduction de la pauvreté en offrant aux pays un appui
technique et financier pour les aider à conduire des réformes sectorielles
ou à réaliser des projets particuliers (constructions de routes, d’écoles, de
structures hospitalières etc.).
A la suite des attentats du 11 septembre 2001, les institutions de Bretton
Woods ont adopté des plans d’actions devant leur permettre de lutter
efficacement contre le blanchiment de capitaux et les finances du
terrorisme. Basiquement, les plans invitaient les deux institutions à
69
partager leurs stratégies de lutte contre le blanchiment d’argent pour
éviter que les terroristes se servent d’eux pour financer leurs opérations.
Les deux institutions avaient également promis d’étudier les systèmes de
transfère monétaires informels, comme le Hawala, pour empêcher que
les terroristes l’utilisent ; et de fournir une assistance technique aux Etats
nécessiteux pour qu’ils puissent combattre le blanchiment des capitaux et
le financement du terrorisme.
6)
Les autres soutiens à la lutte contre les finances des
terroristes
L’ASEAN a été créée en août 1967 par la déclaration de Bangkok. Elle a
pour mission de promouvoir le développement économique, social et
culturel des Etats membres, ainsi que la paix et la sécurité collective. Elle
se compose actuellement de 10 pays73. L’ASEAN et le Conseil de
coopération du Golfe avaient également pris un certain nombre de
mesures pour manifester leur bonne volonté de combattre les finances du
terrorisme.
En novembre 2001, lors du sommet de l’ASEAN à Brunei, les Etats
membres avaient signé une déclaration conjointe en vue de lutter contre
le terrorisme. Ils avaient promis de coopérer étroitement pour stopper les
flux monétaires des terroristes dans la sous région.
L’Arabie Saoudite, d’où est originaire la plupart des commanditaires des
attaques du 11 septembres, et ses partenaires du Conseil de coopération
du Golfe avaient promis aux Américains de geler les avoirs des
organisations terroristes mais malheureusement cela est resté à l’état de
vœux pieux.
73
Indonésie, Malaisie, Philippines, Singapour, Thaïlande, Brunei (1984), le Vietnam
(1995), la Birmanie, le Laos (1997) et le Cambodge (1999).
70
B. La coopération militaire bilatérale
Au niveau militaire, les Etats-Unis ont fourni une assistance à certains
pays dont les territoires sont considérés comme des sanctuaires pour
terroristes ou comme pouvant l’être du fait de l’incapacité de ces pays à
exercer leur autorité sur l’ensemble de leurs territoires. Cela a été le cas
des Philippines, de la Georgie et du Yémen.
1)
L’assistance militaire apportée aux Philippines
Les Philippines sont un archipel qui se trouve en Asie du Sud-Est. Il est
situé entre la mer des Philippines, le sud de la mer de Chine et l’Est du
Vietnam. Le pays a été cédé aux Etats-Unis par l’Espagne en 1898 suite à
la guerre hispano-américaine. En 1946, après la fin de la seconde guerre
mondiale qui a mis fin à l’occupation japonaise, les Etats-Unis accordent
aux Philippins leur indépendance tout en y maintenant des bases
militaires. La dernière de ces bases a été fermée en 1992.
Depuis quelques années, les autorités philippines font face à des
mouvements d’insurrections musulmans dont le plus connu et le Groupe
Abu Sayyaf. Ce groupe est spécialiste des prises d’otages (notamment
d’otages occidentaux). Les otages sont souvent échangés contre de
l’argent qui sert, avec les fonds fournis par certaines ONG et pays
musulmans, à financer la guérilla. D’après les Etats-Unis et les autorités
philippines, le Groupe Abu Sayyaf est étroitement lié à Al-Qaïda. C’est
ainsi, et dans le cadre de la lutte mondiale contre le terrorisme, que les
Américains (en accords avec les autorités philippines) ont décidé de
déployer des troupes sur l’archipel.
71
D’après un rapport de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN74, un
contingent américain de 660 hommes (dont 160 soldats des forces
spéciales) a été déployé sur l’archipel en février 2002 pour une période
de six mois. Ce contingent était chargé de former les forces philippines
aux opérations de contre guérilla. Les autorités américaines avaient
promis à leurs homologues philippins de leurs fournir des équipement
d’« une valeur d’environ 100 millions de dollars U. »75
Le partenariat entre les deux pays a pris fin officiellement en juillet 2002,
et « l’armée philippines a annoncé que le nombre de membres d’Abu
Sayyaf avait considérablement diminué, passant de 2000 environ à
200. »76 Pour relativiser ces propos, certains analystes « ont […] observé
que cette diminution s’expliquait d’avantage par le nombre de déserteurs
que de prisonniers. »77 Ces mêmes analystes laissent entendre qu’il n’est
pas exclu que le Groupe Abu Sayyaf se reconstitue à l’avenir.
2)
L’assistance militaire apportée à la Georgie
La Georgie est un pays de l’Asie du sud-ouest entouré au nord par la
Russie, au sud par la Turquie et l’Arménie, à l’ouest par la mer noire et à
l’est par l’Azerbaïdjan. Elle faisait partie de l’ex-URSS. Elle est devenue
indépendante après la dislocation de l’URSS en 1991. Le pays connaît
des troubles ethniquo-sécessionnistes (en Abkhazie, en Ossétie du sud et
en Adjarie), institutionnels et économiques très sérieux depuis son
accession à l’indépendance.
Les Gorges de Pankisi, près de la frontière troublée de la Tchétchénie,
sont suspectées d’abriter des combattants tchétchènes alliés supposés du
74
Rapport Spécial de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, « La guerre contre le
terrorisme », paragraphe 66
75
ibidem
76
Rapport Spécial de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, « La guerre contre le
terrorisme », paragraphe 67
77
ibidem
72
groupe Al Qaïda. En plus, suite à la chute des taliban en 2001 avec
l’OEF, les autorités géorgiennes ont affirmé que des taliban et des
membres d’Al Qaïda se cachaient dans ces gorges. Les Etats-Unis,
craignant que la Georgie (qui n’a pas les moyens de faire face à cette
menace) devienne un abri pour les terroristes, ont offert leur soutien pour
les chasser.
En mars 2002, avec l’accord de la Russie, les Etats-Unis ont déployé
dans le pays environs 200 soldats de leurs forces spéciales dans le cadre
d’un programme de formation. Le programme prévu pour un an, avait
pour objectif de former « quatre groupes géorgiens à déploiement rapide
aux opérations de la lutte anti-terroriste et anti-guérilla. »
3) L’assistance militaire apportée au Yémen
Le Yémen se trouve au Moyen-Orient. Il est situé au nord par l’Arabie
Saoudite, au sud par la Mer d’Arabie, à l’ouest par la Mer Rouge et à
l’est par l’Oman. Jusqu’en 1990, la République du Yémen était divisée
en deux : le Yémen du sud et le Yémen du nord. Après la réunification,
en 1994, un conflit sécessionniste va éclater mais sera très vite subjugué.
Le Yémen a eu un différent frontalier assez sérieux, avec son voisin
l’Arabie Saoudite. Ce différent a été réglé en 2000.
La même année (en 2000), un attentat terroriste contre l’USS Cole
(navire militaire), dans le golfe d’Aden, avait tué 17 marins américains.
En 2002 un pétrolier français, le Limburg subissait une attaque terroriste
à 5 kms des côtes du Yémen. Après les attentats du 11 septembre 2001,
plusieurs membres d’Al Qaïda arrêtés à travers le monde étaient
d’origine yéménite ce qui laisse à penser que le groupe avait une base
solide dans le pays. En outre, selon un rapport de l’Assemblée
parlementaire de l’Otan cité ci-dessus, les services américains de
renseignement avaient localisé, plusieurs campements, le long de la
73
frontière entre le Yémen et l’Arabie Saoudite, pouvant servir de refuges
aux combattants arabes fuyant l’Afghanistan.
En raison de tous cela, en mars 2002, suite certainement à des pressions
américaines sur les dirigeants yéménites, le Yémen a accepté de recevoir
sur son territoire des centaines de soldats américains dont la mission est
de former les troupes du pays à la lutte anti-terroriste. Les Etats-Unis
avait promis de former les gardes côtes yéménites et de leur « fournir 15
bateaux équipés de haute technologie pour effectuer des patrouilles dans
le golfe d’Agen. »78
En septembre 2002, pour avouer que la coopération avec le Yémen
n’avait pas fonctionné, le second de Donald Rumsfeld, Paul Wolfowitz,
avait reconnu que les Etats-Unis « n’avait pas réussi à atteindre au
Yémen le niveau de coopération ou de réussite atteint aux
Philippines. »79
78
Rapport Spécial de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, « La guerre contre le
terrorisme », paragraphe 70
79
Rapport Spécial de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, « La guerre contre le
terrorisme », paragraphe 71
74
Chapitre 3 : Des acquis et de l’efficacité
de la guerre anti-terroriste
Le bilan de la guerre contre le terrorisme n’est pas assez mauvais mais on
ne peut pas non plus dire qu’il est reluisant. Autant les opérations
militaires en Afghanistan et en Irak ont été des succès techniques autant
ces pays restent instables. Autant la lutte financière avait pris un élan
considérable dans les premiers mois qui ont suivi les attaques du 11
septembre, autant elle s’est essoufflée maintenant. Quant à la coopération
judiciaire, qui paraît être l’une des meilleures solutions pour lutter contre
le terrorisme, elle n’existe presque pas. Tout cela fait qu’aujourd’hui les
attentats sont de plus en plus nombreux et les gens se posent des
questions sur l’efficacité de cette guerre contre le terrorisme. Est-elle
vraiment efficace ou lui manque t’il quelque chose ?
I.
Le bilan des opérations militaires en Afghanistan et en Irak :
un bilan mitigé
Même si les opérations militaires en Afghanistan et en Iraq ont été de
véritables succès pour les Américains au niveau technique, elles sont
loin, pour le moment, d’avoir éradiqué le terrorisme international. Et il
reste beaucoup à faire dans la reconstruction et la stabilisation politique
des deux pays.
A.
Les acquis des opérations
Le bilan de l’opération "Enduring Freedom" en Afghanistan a été en
général positif pour les Etats-Unis. Ils ont réussi à chasser le régime des
taliban qu’ils présentaient comme étant un régime abominable et cruel.
Ils ont ôté à Al Qaïda leur principal refuge, détruit leurs camps
d’entraînement, tué certains de leurs dirigeants (par exemple : Ali
75
Mohamed adjoint de Ben Laden et responsable financier de
l’Organisation) et arrêté de nombreux membres du groupe. Ils ont installé
un gouvernement qui leur est favorable (H. Karzaï a la nationalité
américaine et y à vécu pendant longtemps). Enfin, la rapidité de
l’Opération et sa réussite ont permis aux Etats-Unis de faire taire les
critiques autour de la campagne.
Au niveau économique, si les Américains parviennent à stabiliser
totalement le pays, ils pourront réaliser leur projet de pipeline. Ce
pipeline permettra de faire passer le pétrole et le gaz de la mer
Caspienne, tant convoités par les Etats-Unis, de l’Afghanistan au
Pakistan pour ensuite être récupérés par des pétroliers et acheminés vers
les pays Occidentaux. Il [le pipeline] permettra également d’éviter le
passage par la Russie ou l’Iran.
Au niveau militaire, l’Opération a été un véritable succès. La presque
totalité des objectifs militaires ont été atteints. L’Opération s’est déroulée
très rapidement (moins de deux mois) avec un minimum de pertes
matérielles et humaines. Le bilan des pertes matérielles, à la fin de
l’Opération, s’élevait à moins d’une dizaine d’hélicoptères dont la
plupart ont été détruits par accident. En plus de ces hélicoptères, le 2
novembre 2001, les autorités militaires américains avaient déclaré avoir
perdu un drone qui s’était écrasé en raison du mauvais temps. Les pertes
humaines quant à elles tournées entre 10 et 20 hommes tués dont, là
aussi, la plupart ont été victimes d’accident ou de « tirs amis » (par
exemple : le 5 décembre 2001, trois soldats américains avaient trouvé la
mort à Kandahar à la suite d’une erreur de bombardement).
La campagne irakienne, à l’instar de celle de l’Afghanistan, a été un
véritable succès au point de vu militaire. Aucun des scénarios du pire ne
s’est réalisé, Donald Rumsfeld, qui avait prédit que la campagne durerait
« peut-être six jours, peut-être six semaines », avait gagné son pari
76
comme le souligne M. Tertrais. Selon lui80, engagée avec moitié moins
d’hommes qu’en 1991 (280 000 vs 600 000), la guerre de 2003 a été
remportée en moitié moins de temps (21 jours) et moitié moins de morts
dans la coalition (157 vs 358). Le total des victimes et le nombre de
morts par jour de combat étaient en fait proches de ceux du conflit des
Malouines (293, avec une moyenne de 7,5 morts/jour), et sans commune
mesure avec les conflits précédents. Toujours, selon M. Tertrais, de la
première guerre mondiale au Vietnam, le ratio entre pertes et forces
engagées s’établissait à environs 1/15, à comparer avec 1/480 pour
l’Opération en Iraq.
Selon les estimations, entre le 20 mars 2003 et le 19 mars 2004, c’est à
dire un ans après le début de l’Opération Iraqi Freedom, la guerre a fait
au moins 8500 victimes civiles, 13 500 militaires irakiens, 563
américains, 59 britanniques et 42 soldats d’origines diverses. De
nombreuses victimes de cette guerre ont péri dans des attentats. Parmi
eux, nous pouvons citer :
‰
L’attaque du 12 novembre 2003 prés du quartier général du
contingent italien à Nasiriya. Cet attentat à la bombe a fait au
moins 27 victimes dont 16 militaires italiens. D’après le journal
arabe Al-Majallah, Al Qaïda aurait revendiqué l’attentat.
‰
L’attaque du 19 août 2003 contre le siége de l’ONU à Bagdad.
Cet attentat au camion piégé a fait 22 morts dont l’envoyé spécial
des NU en Irak Sergio Vieira de Mello.
‰
L’attaque du 29 août 2003 à Nadjaf au sud de l’Irak. Cet attentat,
devant le mausolée d’Ali (le premier imam chiite et gendre du
prophète Mohamed PSL), a fait au moins 83 victimes. Al Qaïda
est soupçonné d’avoir orchestré l’attaque.
‰
L’attaque du 1e février 2004 contre les siéges des partis politiques
kurdes (UPK et UDK). Cet attentat a fait prés de 105 morts.
80
Bruno TERTRAIS, op. cit., p. 6
77
‰
L’attaque du 2 mars 2004 contre des mosquées à Kerbala et
Bagdad. L’attentat a fait 170 morts.
Ces attentats terroristes montrent nettement que le terrorisme est loin
d’être éradiqué en Irak. On peut même dire qu’il a fleuris, s’il existait
bien sûr.
B. Les opérations militaires n’ont pas éradiqué le
terrorisme en Afghanistan et en Irak ; et la paix est loin
d’être gagnée dans ces pays
La paix n’est pas encore totalement acquise en Afghanistan. Les taliban
essaient de se regrouper dans les zones où l’autorité du gouvernement
afghan est absente. Les règlements de compte entre pro et anti-taliban
n’ont toujours pas cessé. Les "Seigneurs de guerre" ne sont pas tout à fait
sous le contrôle de l’autorité politique et se livrent, sans cesse, à de petits
conflits d’influence très meurtriers parfois. A tout cela, s’ajoutent les
attaques terroristes, les assassinats et les tentatives d’assassinats sur les
autorités politiques (par exemple : la tentative d’assassinat sur Hamid
Karzaï en septembre 2002 et l’assassinat du vice-président afghans Abdul
Qadir).
Bref, en s’appuyant sur les FAN, sur un effort significatif en matière de
renseignement et à l’emploi massif de l’aviation et des forces spéciales,
en ayant atteint la plupart de leurs objectifs en peu de temps et subit très
peu de pertes, les Américains ont fait de "Enduring Freedom" un succès
militaire incontestable. Toutefois, l’Opération n’a pas éradiqué le
terrorisme islamiste, n’a pas permis de capturer le chef du groupe Al
Qaïda (Ben Laden) et son ex-protecteur le mollah Mohammad Omar. Et,
paradoxalement, elle a renforcé la raison d’être du terrorisme islamiste et
sa popularité dans les pays arabes.
78
En Irak, même si la guerre a été remportée très vite par la coalition
américano-britannique, les effets escomptés par Washington ne se sont
pas réalisés pour le moment. En effet, les Etats-Unis n’ont pas pu donner
aux Irakiens la responsabilité en ce qui concerne la sécurité et le
gouvernement de leur pays. Certes, il faut du temps pour cela mais la
situation de désordre et d’insécurité qui règne dans ce pays ne présage
pas un Irak stable et démocratique d’ici quelques bonnes années. Ajouté
à cela, l’Irak connaît aujourd’hui une rivalité ethnico-religieuse très
prononcée qui risque de déboucher, si jamais la coalition évacuée le pays,
dans une guerre civile.
La détention d’ADM par le régime de S. Hussein et ses liens avec Al
Qaïda, qui avaient justifié la guerre, ne sont toujours pas mis en évidence.
Aujourd’hui, des voix s’élèvent à Washington et à Londres pour
dénoncer la manipulation qu’il y a eu autour de cette affaire irakienne.
Aux Etats-Unis, Richard Clarke, un ancien responsable de la lutte antiterroriste au sein du « Conseil National de Sécurité », dans son livre
"Against All Ennemies", accuse le président Bush d'avoir négligé la
menace des activistes islamistes avant le 11 septembre 2001 et d'avoir
privilégié l'Irak comme « cible », au détriment d'Al Qaïda.
En dépit de la situation qui règne dans le pays de S. Hussein, les autorités
américaines insistent, persistent et signent qu’ils ont fait de considérables
progrès dans la reconstruction du pays. D. Rumsfeld affirmait, le 25
septembre 2003 dans un article qu’il a publié au Washington Post
qu’« en deux mois de temps, toutes les principales villes irakiennes et la
plupart des municipalités avaient des conseils municipaux – ce qui avait
pris huit mois après la guerre en Allemagne. Il a fallu quatre mois au
Conseil de gouvernement pour nommer un cabinet – ce qui avait
demandé quatorze en Allemagne. Une Banque centrale irakienne
indépendante a été établie et une nouvelle monnaie annoncée seulement
deux mois plus tard – il avait fallu trois ans à l’Allemagne pour ce faire
79
après la guerre. Au bout de deux mois, une nouvelle force de police
irakienne effectuait des patrouilles avec les forces de police irakiennes,
et à l’heure actuelle quelque 56 000 irakiens participent à la défense de
leur pays. A l’opposé, il a fallu 14 mois pour établir une force de police
en Allemagne et dix ans pour commencer à former une nouvelle armée
allemande ». Même si la reconstruction en Irak est allée beaucoup plus
vite qu’en Allemagne , comme le démontre M. Rumsfeld, nous sommes
convaincus que les résultats, pour le moment, sont très loin d’être les
mêmes. En outre, loin de briser le terrorisme en Irak, l’une des objectifs
majeurs de la campagne, les Etats-Unis ont transformé le pays en une
base du terrorisme internationale.
En conclusion, dans ces affaires de campagnes militaire, nous pensons
qu’il serait prématuré de dire que les Etats-Unis ont échoué en
Afghanistan et en Irak. Dans toute chose, il est plus facile de détruire que
de reconstruire. Cela vaut pour les Américains comme pour tout le
monde. Les Etats-Unis ont besoin de temps en Afghanistan et en Irak. Ce
n’est que dans le long terme que nous pourrons véritablement les juger.
Peut-être ils pourront réussir à faire dans ces deux pays ce qu’ils ont
réussi à faire en Europe et au Japon après la 2nd guerre mondiale même si
nous sommes conscients que les situations et les caractéristiques des pays
ne sont pas les mêmes. Toutefois, pour espérer que cela puisse se faire,
les Etats-Unis doivent d’abord juguler le terrorisme qu’ils ont contribué à
augmenter par leurs actions militaires dans ces pays.
II.
Les difficultés de la lutte internationale contre les finances des
terrorismes
Le fait de saisir les avoirs des terroristes n’a pas été chose facile. Comme
nous l’avons montré dans le chapitre précédent, durant les premiers mois
qui ont suivi les attentats du 11 septembre 2001, prés de 200 pays ont
participé ou manifesté leur désir de geler les avoirs des terroristes. C’est
80
ainsi que des dizaines de millions seront gelé. Cette réussite a été l’œuvre
non seulement des nouvelles mesures mises en place par les Etats-Unis,
les OI, les institutions financières internationales mais aussi par la bonne
volonté et la disponibilité des Etats à coopérer. Malheureusement, plus
nous nous éloignons du 11 septembre, plus la coopération internationale
s’estompe ; cela pour des raisons diverses.
A. Les difficultés liées à la détermination et à la traque des
avoirs des terroristes
Les principales difficultés liées à la détermination des avoirs des
terroristes résident dans l’origine de ces avoirs, dans les systèmes de
transfert alternatifs et dans l’existence des Paradis fiscaux.
1)
Les
sources
de
financement
des
terroristes
compliquent le gèle de leurs avoirs
La difficulté de déterminer les avoirs des terroristes est liée aux
provenances de ces avoirs. Voyons dans les lignes qui vont suivre
quelques sources de financement des terroristes et les difficultés que cela
pose pour geler leurs avoirs.
D’après certains, Ben Laden aurait hérité entre 250 et 300 millions de
dollar US de sa famille. Cet argent, il l’a investit dans des affaires
légitimes et illégitimes à travers le monde. Cet argent a
également
largement servis à financer Al Qaïda et ses filiales. Selon le FBI, Ben
Laden a mené des affaires tout a fait légitimes en Afrique du Nord, au
Moyen-Orient, en Europe et en Asie. Au Soudan, par exemple, entre
1991 et 1996, il a eu à investir dans l’agriculture, la construction, le
transport et dans des entreprises soudanaises. Selon le Département
d’Etat américain, Ben Laden a aidé le gouvernement soudanais à financer
des infrastructures civiles, des projets de développements et autres. Par
81
ailleurs, on le soupçonne d’avoir des investissements à l’île Maurice, à
Singapour, en Malaisie, aux Philippines et probablement à Panama. Il est
soupçonné également d’avoir des comptes bancaires à Hong Kong, en
Malaisie, à Vienne, à Dubaï et à Londres même. La plupart de ces pays,
craignant que le gèle des avoirs (qui mine de rien sont très importants) ait
des répercutions sur le bon fonctionnement de leurs économies, refusent
de jouer le jeu ou fond traîner les choses.
En dehors des fonds propre à Ben Laden, Al Qaïda bénéficie du soutien
de certains citoyens du Golfe très riches et influents dans leurs
monarchies. Ils est très difficile voir impossible de geler les avoirs de ces
personnes surtout si elles appartiennent aux familles royales.
Les Organisations non gouvernementales islamiques (ONGI) jouent eux
aussi un rôle très important dans le financement des activités terroristes.
Les Etats-Unis ont inscrit un grand nombre de ces ONGI dans la liste
d'exclusion des organisations terroristes (TEL) diffusée par le
Département d’Etat américains en novembre 2001 et en novembre 2002.
Pour vous donner une idée des activités humanitaires et des liens que ces
ONGI peuvent entretenir avec les groupes terroristes, nous vous citons
ces trois81 :
‰
La Holy Land Foundation. Initialement connue sous le nom de
Occupied Land Fund, la Holy Land Foundation a été établie en
Californie en 1989 en qualité d’organisation caritative non
imposable et non pas en tant que groupe religieux. En 1992, elle a
transféré son siége à Richardson (Texas). Elle a des bureaux en
Californie, dans le New Jersey et dans l’Illinois et des
représentants répartis à travers les Etats-Unis, en Cisjordanie et
dans la bande de Gaza. Moussa Mohamed Abou Marzouk, haut
responsable du Hamas, a fourni d’importantes sommes à la Holy
81
Les informations sur ces ONGI sont extraites du site du Département d’Etat
américain et de l’ouvrage d’Ali LAÏDI, « Le Jihad en Europe ».
82
Land Foundation dans les années 1990. En 1994, Marzouk (qui a
été désigné comme terroriste par le ministère américain des
finances en 1995) a choisi la Holy Land Foundation comme
principal responsable des collectes de fonds pour le Hamas aux
Etats-Unis. La Holy Land Foundation finance les écoles
administrées par le Hamas et qui servent les objectifs de cette
organisation en « encourageant les enfants à devenir de futurs
kamikazes ». Le Hamas des kamikazes en offrant de soutenir leurs
familles ; ce soutien est assuré en partie par les contributions de la
Holy Land Foundation.
‰
Beit Al Mal Holdings. Beit Al-Mal Holdings est une société
d’investissements publics qui a des bureaux à Jérusalem-Est, en
Cisjordanie et dans la Bande de Gaza. Bien qu’officiellement, ses
activités commerciales consistent en prêts d’investissements dans
les projets de développement économique et social, Beit al-Mal a
d’importants liens avec le Hamas. La plupart de ses fondateurs,
actionnaires et employés sont associés au Hamas. La majorité de
ses actions appartiennent à des personnes identifiées avec le
Hamas et Beit Al-Mal investit, à Gaza et en Cisjordanie, dans des
projets appartenant à des militants du Hamas ou gérés par ces
derniers.
‰
Al Haramein Islamic Foundation (AH) est basée à Djeddah et
est dirigée par un Saoudien: Akil Ben Abdel Aziz. Elle est bien
implantée en Albanie, Algérie, Autriche, Birmanie, Bosnie,
Cachemire, Grande-Bretagne, Kenya, Maroc, Russie et Tunisie.
L’AH est accréditée auprès du HCR et est financée par les riches
Saoudiens, ainsi que par le Saudi High Committee. Elle fournit de
l’aide aux réfugiés sous forme de logement, d’assistance
médicale, de nourriture et de vêtement.
Ces ONGI, bien qu’officiellement ayant pour activités de financer des
causes humanitaires, financent des terroristes. Le problème avec, ces
83
ONGI, est qu’elles sont extrêmement populaires dans le monde
musulman pour les actions de solidarité qu’elles conduisent. De ce fait,
geler leurs avoirs pour de nombreux Etats musulmans demeurent
difficiles. « En Extrême-orient, selon Antoine Colonna, nombre d’entre
elles ont joué un rôle important lors de la crise asiatique, contribuant,
notamment en Indonésie et en Malaisie, à la stabilité des Etats lors du
mécontentement des populations affamées. »82 Selon le même auteur, les
autorités américaines maintiendraient « une liste d’ONG suspectes, dont
la divulgation serait mal comprise par les opinions publiques de
nombreux pays. »83
En dehors des ONGI, certaines activités criminelles constituent
également une source de financement du terrorisme. Ces activités sont le
plus souvent le trafic de drogue, la contrefaçon, la contrebande etc. Les
terroristes ont également recours à l’extorsion de fonds pour financer
leurs causes.
2)
Hawala et Paradis fiscaux : un casse tête chinois
pour les traqueurs des avoirs terroristes
Il est très difficile de suivre la trace des fonds des terroristes à cause des
Hawala et des Paradis fiscaux.
Le Hawala est un moyen de transfert de fonds traditionnel reposant sur la
confiance. Ce système de transfert est souvent utilisé par les
ressortissants de l’Afrique, du Moyen-orient, de l’Asie centrale et du sudest. Il leur permet d’envoyer de l’argent à leurs familles, restées au pays,
sans avoir à payer des frais d’envoie très importants. Le système n’a rien
d’illégal mais il a été constaté que des organisations terroristes et des
organisations mafieuses s’en servent pour financer leurs opérations ou
pour blanchir de l’argent. Selon un rapport de l’Assemblée parlementaire
82
83
« Guerre secrète contre Al-Qaeda », dir. Eric DENECE, p. 72
ibidem
84
de l’OTAN, « Al Qa’ida avait auparavant utilisé […] des sociétés
locales de transfert hawala pour financer les attentats à la bombe contre
les ambassades américaines au Kenya et en Tanzanie. »84 Toujours,
selon le même rapport, « des organisations criminelles Russes impliquées
dans le trafic de drogue ont utilisé beaucoup de ces institutions pour
blanchir et transférer de l’argent. »85
L’avantage que constitue le Hawala, pour ce type d’organisation, est
qu’il ne laisse pas la moindre trace des opérations effectuées. Pour ceux
qui traquent les fonds des terroristes les Hawala constituent un véritable
problème. Se ne sont pas des structures financières qu’on peut localiser
comme une banque ou une agence de transfert d’argent du genre
WESTERN UNION. Souvent c’est de « petits propriétaires d’épicerie
utilisant
un
simple
téléphone
mobile
pour
procéder
à
leurs
transactions. » Et c’est surtout cela qui pose problème.
Malgré la difficulté de la tâche, depuis le 11 septembre, les Etats-Unis et
certaines institutions financières internationales ont décidé de réguler les
Hawala. C’est ainsi que la loi USA PATRIOT oblige aux Hawala se
trouvant sur le territoire américain de s’enregistrer comme des "Money
services businesses" (MSBs). Et à l’instar des MSBs, ils seront,
désormais, soumis aux règles concernant le blanchiment de l’argent et
doivent signaler aux autorités américaines les transactions suspectes ou
qui impliquent des sommes d’argents assez importantes. Le GAFI a
demandé à tous les pays d’exiger aux entreprises pratiquant des systèmes
alternatifs de transfert de fond, comme le Hawala, de respecter les
mesures d’anti-blanchiment d’argent mises en place. En dehors des
Hawala, les Paradis fiscaux constituent un véritable casse tête chinois
pour ceux qui traquent les avoirs des terroristes.
84
Rapport parlementaire de l’OTAN, « Les conséquences économiques du 11 septembre
2001 et la dimension économique de la lutte contre le terrorisme », paragraphe 31.
85
ibidem
85
Les Paradis fiscaux, dans la majorité des cas, sont de petites entités
géographiques de moins de 100 000 habitants. Ils n'ont pas d'ententes
fiscales avec les pays industrialisés. La confidentialité absolue y est
assurée et le secret bancaire intégral y est de rigueur. Toutes les grandes
banques occidentales y sont fortement représentées. Parmi les paradis
fiscaux, vous avez : les îles Caïmans, les Bermudes, les Bahamas, les îles
Turks et Caicos, l'île De Man, les Barbades, Luxembourg, Malte,
Monaco, Saint Marins, etc.
De tout temps, les gouvernements des pays européens (Grande-Bretagne,
Pays-Bas, Portugal, France, Espagne, etc.) ont laissé se développer ces
territoires qui, dans la plupart des cas, dépendent en fait plus ou moins
directement de leur juridiction. Les élus de ces pays ne veulent pas abolir
ces Paradis fiscaux, puisque, en dehors des terroristes et des mafias, ils
sont aussi utilisés par leurs riches concitoyens et entreprises desquels ils
sont largement tributaires.
Même les Etats-Unis se montrent réticent à lutter contre ces Paradis
fiscaux. Ils y a de cela quelques temps, les Etats-Unis ont décidé de ne
pas suivre une initiative de l'OCDE visant à obtenir un minimum de
coopération de 35 Paradis fiscaux : au nom du principe de la liberté du
commerce et des affaires, et aussi pour continuer d'aider nombre de
multinationales à échapper à la fiscalité de leur pays d'origine. Sans
intention de prendre partie, nous pouvons dire que les Etats-Unis, en
agissant ainsi, ont choisi de ne pas s'opposer à l'essentiel de la criminalité
financière.
Le succès de la guerre contre le terrorisme passe forcément par la
suppression ou au moins par le contrôle des Paradis fiscaux. Autrement
on peut toujours courir derrière les avoirs des terroristes sans succès total.
86
B.
Les autres facteurs de blocage de la lutte financière
contre les avoirs des terroristes
Parmi les autres facteurs de blocage de la lutte financière contre les
avoirs des terroristes, nous pouvons citer l’absence d’une définition
commune de ce qu’est le terrorisme ou de ce qu’il n’est pas et
l’« absence de volonté » des Etats à coopérer sérieusement.
1)
L’inexistence
d’une
définition
universelle
du
terrorisme
Le problème de la définition du terrorisme porte un coup sérieux au bon
déroulement de la guerre anti-terroriste, et en particulier à la coopération
internationale pour la lutte financière. Il faut savoir que jusqu’à présent,
et malgré la prolifération du terrorisme dans le monde, il n’existe aucune
définition universellement admise de ce phénomène. Chacun y va de son
bon vouloir et dans la mesure ou cela lui arrange. Parmi les définitions
que l’on fait du terrorisme, nous pouvons retenir celles-ci :
‰
« Le terrorisme […], s’il est d’abord action, […] dépassant
souvent le stade de l’initiative ponctuelle pour devenir une
véritable stratégie, […] postule l’emploi systématique de la
violence, pour impressionner soit des individus afin d’en tirer
profit, soit, plus généralement, des populations, soumises alors,
dans un but politique, à un climat d’insécurité ». [Encyclopedia
universalis]
‰
Le terrorisme est un « ensemble d'actes de violence (attentats,
prises d'otages, etc.) commis par une organisation pour créer un
climat
d'insécurité,
pour
exercer
un
chantage
sur
un
gouvernement, pour satisfaire une haine à l'égard d'une
communauté, d'un pays, d'un système. » [Le Petit Larousse
illustré 1999. © Larousse, 1998].
87
‰
Le Code Pénal français (art. 421-2), définie le terrorisme
comme « une entreprise individuelle ou collective ayant pour but
de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la
terreur. »
‰
Pour d’autres, tout recours à la violence pour imposer sa volonté
peut être assimilé au terrorisme. Il est également défini comme le
recours à la violence ou à la menace de la violence afin de semer
la panique dans la société, d'affaiblir ou de renverser les autorités
en place et de susciter des changements politiques.
Ces définitions ne sont certes pas contradictoires et nous pouvons même
dire, en relativisant, qu’elles sont les mêmes, mais là où réside le
problème c’est quand vient le moment de les appliquer. Certains vous
dirons, par exemple, que le Hamas palestinien est un groupe terroriste et
vous le prouverons, tandis que d’autres vous dirons le contraire et vous
convaincrons que c’est un mouvement de libération nationale.
La définition américaine du terrorisme dans l’USA PATRIOT Act86 par
exemple reste très controversée. Les européens estiment qu’elle est très
large et ne fait pas la distinction entre mouvements de libération
nationales et organisations terroristes. Si les Américains considèrent que
toute personne ou organisation finançant des groupes terroristes est
terroriste, donc (si jamais les pays du Golfe acceptent cet argument) cela
entraînerait l’implication de nombreux dignitaires respectueux des
monarchies du Golfe.
Des pays refusent de geler les avoirs de certains groupes, supposés être
terroristes par les Américains, pour la simple et bonne raison, qu’à leurs
yeux, ces groupes ne le sont pas. En guise d’exemple, la Syrie et le Liban
avaient refusé de geler les fonds du Hezbollah (Parti de Dieu) quand les
Etats-Unis le leur ont demandé.
86
Cf. au Chapitre II.
88
Au delà de la difficulté de trouver une définition universelle du
terrorisme, la nonchalance de certains Etats à coopérer a également
donné un véritable coup de frein à la lutte contre les finances des
terroristes.
2)
La « mauvaise volonté » des Etats à coopérer
entièrement pour bloquer les avoirs terroristes
Les Américains sont convaincus de la présence d’avoirs terroristes dans
certains pays sans que ces pays aient fait quoique ce soit pour les
bloquer. Cela est dû soit à une absence de volonté politique soit à un
manque de moyens efficaces.
Au Moyen-Orient, par exemple, des pays comme le Bahreïn, le Koweït,
l’Oman, le Qatar, l’Arabie Saoudite et les Emirats Arabes unis, ont
accepté les « Huit Recommandations » du GAFI concernant le
blanchiment de l’argent et le financement du terrorisme. Cependant, la
plupart
de
ces
pays
n’appliquent
pas
convenablement
ces
recommandations. Certains d’entre eux, comme l’Arabie Saoudite,
dépistent à peine les fonds des terroristes et refusent poliment de
travailler avec les Etats-Unis. En outre, l’Arabie Saoudite nie
catégoriquement l’implication de certaines de ses organisations de
charités islamiques dans le financement d’activités terroristes ; ce qui ne
facilite pas les choses.
En Afrique, en Asie centrale et dans le Caucase, le problème est
beaucoup plus dû à un manque de moyens pour dépister et bloquer les
avoirs des terroristes qu’à une absence de volonté politique. Les banques
dans ces régions ne sont pas bien équipées pour contrer efficacement le
blanchiment de l’argent. La faiblesse des institutions financières, en plus
d’attirer des fonds terroristes et mafieuses, favorise considérablement les
systèmes alternatifs de transfert de fonds comme le Hawala.
89
Par ailleurs, certains pays se confectionnent des listes de terroristes qui
sont tellement différentes qu’une personne peut être considérée comme
terroriste dans un pays A et comme un homme d’affaire ou un simple
commerçant dans le pays B voisin.
Pour clore ce sous-chapitre, il faut savoir que la lutte financière contre le
terrorisme, à l’instar de la campagne militaire en Afghanistan, a eu pour
effet de décentraliser Al Qaïda. Nous assistons aujourd’hui à une
multiplication sans précédent des cellules terroristes. Ces cellules
agissent actuellement en petits groupes autonomes. Elles ont pris la
charge de leurs propres opérations et de leurs emplois du temps. Les
fonds sont désormais trouvés sur place avec des activités légitimes
(comme le commerce), l’extorsion de fonds, la contrebande, le trafic de
drogue, etc. C’est ces groupes qui, aujourd’hui, ont frappé en Turquie, en
Arabie Saoudite, au Maroc ou encore en Espagne.
III.
L’absence d’une coopération judiciaire internationale affaiblie
la guerre anti-terroriste alors que la recrudescence des attaques
terroristes à travers le monde sème le doute quant à son
efficacité
La disproportion des efforts des Etats à lutter contre le terrorisme,
notamment l’absence d’une véritable coopération judiciaire, pourtant si
importante, explique en partie la recrudescence des actes terroristes dans
le monde. Aujourd’hui, aucun pays n’est à l’abri de tels actes. Même les
pays où sont originaires les terroristes sont sévèrement frappés. La
recrudescence des actes terroristes dans le monde depuis le début de la
guerre anti-terroriste sème incontestablement le doute quant à son
efficacité réelle.
90
A. La coopération judiciaire internationale : un élément
essentiel de la guerre contre le terrorisme mais inexistant
Le fait de recourir à la justice pénale peut efficacement freiner le
terrorisme de plusieurs façons. Un terroriste condamné à la prison à
perpétuité ou exécuter est une assurance qu’il ne commettra plus
d’attentats. Le risque de se faire arrêter et condamner peut avoir un effet
dissuasif sur les terroristes et limite leurs mouvements. En guise
d’illustration, à la question de savoir pourquoi ils n’ont pas commis
l’attentat aux Etats-Unis, en Australie, en France, en Allemagne, aux
Pays-Bas ou encore dans d’autres pays alliés de Washington, l’imam
Samudra (l’un des islamistes arrêtés et condamnés à mort à la suite de
l’attentat de Bali en octobre 2002), répondait : « Parce que j’étais
wanted. »87
La médiatisation des procés, aux accents dramatiques incontestables,
peut également contribuer à conforter l’attachement du public à la lutte
anti-terroriste, à démonter la volonté de pourchasser les terroristes et à
encourager d’autres à faire pareil.
Toutefois, il faut noter que l’effet dissuasif que nous venons d’évoquer
est à relativiser. C’est une considération manifestement sans intérêt pour
un terroriste qui est prêt à se faire sauter, et peut-être pour celui qui n’est
qu’un pion sur l’échiquier, mais qui se révèle tout aussi déterminé et
désespéré.
Il faut savoir que malgré son efficacité, l’instrument judiciaire n’est pas
si simple à manier. Intenter un procés à un terroriste, comme le constate
Paul Pillar88, présente une difficulté concrète qu’est de réunir
87
Source : COURRIER INTERNATIONAL n° 680 du 13 au 19 novembre 2003.
Paul PILLAR, « La lutte contre le terrorisme et ses instruments », diffusé par le
Bureau des programmes d’information internationale du Département d’Etat américain,
le 6 décembre 2001, p. 2
88
91
suffisamment de pièces à conviction qui soient juridiquement
admissibles. Aux Etats-Unis au moins, et contrairement à ce qu’on
observe dans les milieux du renseignement ou de la politique générale,
les tribunaux ne vont pas se contenter d’informations qui portent à croire
que telle personne ou telle autre est un terroriste. Il est particulièrement
difficile de produire des éléments matériels directs de nature à prouver
que telle décision ou tel ordre a été donné par des chefs de file du
terrorisme. Et M. Pillar de poursuivre, « la dispersion du processus de
planification et de prise de décision des groupes terroristes
internationaux fait qu’un grand nombre de démarches destinées à
aboutir à un attentat ont lieu à l’extérieur du pays visé, et donc en dehors
de la juridiction des principaux enquêteurs. »89 Donc, il est nécessaire
d’avoir une coopération sérieuse entre Etats pour pouvoir arrêter et
traduire les terroristes en justice. Mais l’implantation de cette coopération
est rendue difficile par la divergence de point de vue entre Etats et en
particulier entre les Etats-Unis et l’Europe.
D’après un rapport de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN90, les
ministres de la Justice de l’Union européenne avaient, lors d’un Conseil
JAI (Justice et Affaires Intérieures) à Luxembourg entre le 25 et 26 avril
2002, autorisé « l’ouverture de négociations autour d’un accord
d’extradition et de coopération judiciaire » avec les Etats-Unis. L’accord
devait normalement être conclu à la fin de l’année 2002 ou au début de
l’année 2003. Face à la réticence des Européens à la peine de mort dans
certains Etats américains et face à la différence de perception quant à
l’utilisation des « données personnelles » des personnes suspectées, il
était évident que l’aboutissement de l’initiative n’allait pas être simple.
Mais pour éviter tout blocage ou malentendus, le mandat excluait toute
aide judiciaire (communication de preuves) et toute extradition si
l’intéressé risquait une condamnation à la peine capitale. Il excluait
89
ibidem
Rapport de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, « La lutte contre le terrorisme :
résultats et questions », paragraphe 50.
90
92
également « toute assistance judiciaire si la personne poursuivie est
susceptible d’être traduite devant un tribunal spécial »91 (les
commissions militaires par exemple).
Beaucoup de personnes, liées à Al Qaïda92, ont été arrêtées en France, au
Pays-Bas, en Espagne, en Belgique, en Italie et en Grande-Bretagne sans
pour autant être extradées vers les Etats-Unis à cause des raisons déjà
évoquées. L’Allemagne, où Mohammed ATTA coordonnateur des
attaques du 11 septembre a résidé, a été l’un des premiers pays en Europe
à avoir jugé un terroriste impliqué dans les attaques. En effet, le 19
février 2003 le nommé Mounir Motassadek, un étudiant Marocain en
Allemagne, est condamné à 15 ans de prison ferme pour « complicité de
meurtres dans 3066 cas ». M. Motassadek, avait été arrêté le 28
novembre 2001 à Hambourg et faisait parti du groupe chargé du soutien
logistique de la « cellule de Hambourg. » Au début du mois d’avril 2004,
à la surprise générale, son jugement sera cassé. Actuellement il est en
liberté et attend d’être rejugé.
En dehors de l’Europe, d’autres personnes liées à Al Qaïda seront
arrêtées un peu partout. Les arrestations les plus importantes ont eu lieu
au Pakistan et ont concerné certains des membres les plus influents du
groupe terroriste de Ben Laden. Il s’agit de :
‰
Abou Zoubeida, un Palestinien de 32 ans né en Arabie Saoudite et
proche collaborateur d’Oussama Ben Laden, arrêté au Pakistan le
28 mars 2002. Il est considéré comme le responsable du
recrutement et des opérations du groupe Al Qaïda.
‰
Sheikh Ahmed Saleem, un Soudanais, arrêté le 12 juillet 2002. Il
est considéré comme étant l’un des conseillers financiers de Ben
Laden.
91
ibidem
Voir Annexe V pour les arrestations à travers le monde liées aux événements du 11
septembre.
92
93
‰
Ramzi ben Al-Shaiba, un Yéménite, arrêté le 11 septembre 2002.
Il faisait parti de la « cellule de Hambourg » et est présenté
comme l’un des coordinateurs présumés des attentats du 11
septembre 2001.
‰
Khaled Cheikh Mohammed, arrêté le 1e mars 2003. Il est
considéré comme le numéro trois du réseau, après Ben Laden et
le docteur Ayman Al-Zawahiri. Il figurait sur la liste du FBI des
22 suspects d’Al Qaïda les plus recherchés.
‰
Yassir al-Jazeeri, un Marocain, arrêté le 16 mars 2003. Il est
présenté comme le « responsable des affaires » d’Al Qaïda et fait
parti des « sept principaux » responsables du réseau terroriste.
Abou Zoubeida, Khaled Cheikh Mohamed et Ramzi ben Al-Shaiba
seront remis aux autorités américaines. Quant aux autres, nous ne savons
pas s’ils sont toujours au Pakistan, s’ils ont été extradés vers leurs pays
d’origines ou aux Etats-Unis. Mais il est très probable qu’ils soient entre
les mains des Américains.
Même si le Pakistan a accepté d’extrader ses prisonniers vers les EtatsUnis, il faut reconnaître, comme nous l’avons vu précédemment avec
l’Union européenne, que cela n’a pas été le cas avec la plupart des pays.
Enfin, pour en terminer avec les limites de l’instrument judiciaire et
parler de la recrudescence des attentats depuis le 11 septembre, il faut
noter que les Commissions militaires américaines n’ont, à ce jour, jugé
aucun terroriste. Zacarias Moussaoui, ressortissant français arrêté le 25
août 2001 et inculpé dans le cadre des attentats du 11 septembre 2001
pour « complot visant à commettre des actes internationaux de
terrorisme », remplit bien les conditions pour y être jugé. Finalement,
son procés se déroulera devant une juridiction civile. Est-ce que la France
y est pour quelque chose ? C’est probable.
94
Contrairement à Zacarias Moussaoui, les prisonniers de Guantanamo,
estimés à plus de 600, ont de réelles chances de passer devant ces
commissions militaires. Parmi eux, figurent des dizaines de ressortissants
occidentaux de la Grande-Bretagne, de la France, du Canada, etc. Delà,
nous pouvons nous demander si ces pays accepteront que leurs
ressortissants soient jugés devant ces commissions.
B. La recrudescence des attaques terroristes à travers le
monde laisse croire à une inefficacité de la guerre contre le
terrorisme
Depuis le 11 septembre, malgré les mesures mises en place pour contrer
le terrorisme, nous constatons une recrudescence sans précédent des actes
terroristes dans le monde. Parmi les plus importants, à l’exception de
ceux qui ont eu lieu en Iraq et que nous avons précédemment cité, nous
pouvons retenir :
‰
L’attentat-suicide contre la synagogue de la Ghriba en Tunisie le
11 avril 2002 qui a fait 21 victimes, dont 14 Allemands.
‰
L’attentat-suicide contre un hôtel à Mombasa, sur la côte du
Kenya le 28 novembre 2002 qui a fait 18 victimes. Dans le même
temps, un avion de la compagnie israélienne Arkia échappait au
tir de deux missiles lors de son décollage de Mombasa.
‰
L’attentat à la voiture piégée contre une discothèque sur l’île
indonésienne de Bali le 12 octobre 2002 qui a fait 202 morts et
300 blessés, en majorité des Australiens. Cet attentat a été attribué
à la Jamaah Islamiyah, un réseau terroriste lié à Al-Qaïda. Le 5
août 2003 un autre attentat-suicide au fourgon piégé contre l’hôtel
américain Marriott, en plein centre de Jakarta, fera 12 morts, et
quelque 150 blessés. Il est attribué lui aussi à la Jamaah
Islamiyah.
95
‰
Le double attentat à la voiture piégée contre deux synagogues à
Istanbul en Turquie, le 15 novembre 2003, qui a fait au moins 23
morts et plusieurs blessés. Al Qaïda a revendiqué la double
opération, selon le journal Al-Qods Al-Arabi. Le 20 du même
mois, un autre double attentat-suicide contre le consulat
britannique d'Istanbul et les bureaux de la banque HSBC fera au
moins 27 morts dont le consul général britannique, Roger Short,
et plus de 450 blessés. Les attaques ont été revendiquées au nom
d'Al-Qaïda et du groupe turc Front islamique des combattants du
Grand-Orient (IBDA-C).
‰
L’attentat-suicide de Casablanca au Maroc le 16 mai 2003 qui a
fait 45 morts, dont les 12 kamikazes. Il est attribué à Al Qaïda
aussi.
‰
Le triple attentat-suicide dans un complexe résidentiel à Riyad en
Arabie Saoudite le 12 mai 2003 qui a fait 35 morts et 194 blessés.
Selon Washington et Riyad, les attaques ont été perpétrées par 15
kamikazes liés au réseau Al-Qaïda. Le 8 novembre 2003, un
nouvel attentat-suicide à la voiture piégée frappe encore une
résidence de la banlieue Ouest de la capitale, Riyad, faisant au
moins 17 morts, dont cinq enfants, et 122 blessés. Cet attentat a
été également attribué à Al-Qaïda.
‰
Enfin, les attentats contre des trains de banlieue à Madrid en
Espagne le 11 mars 2004 qui ont fait prés de 200 morts et 1500
blessés. Ils ont été revendiqués par Al Qaïda. Des ressortissants
maghrébins ont été arrêtés dans le cadre de l’enquête.
Il faut à voir à l’esprit que, même si des attentats frappent le monde de
plus en plus, les forces de sécurités de la planète, notamment en Europe,
déjouent de plus en plus beaucoup d’autres. En guise d’exemple, le 30
mars 2004, au cours d'une grande opération anti-terroriste menée à
Londres et dans sa banlieue ouest, la police britannique a découvert 500
kilos de nitrate d'ammonium (un engrais chimique qui, mélangé à du
96
fioul, peut constituer un explosif redoutable) dont la quantité, selon les
experts, est cinq fois supérieure à ce qui avait été nécessaire à Bali. Du
nitrate d'ammonium avait aussi été utilisé dans les attentats de Riyad et
d'Istanbul. Huit personnes, d'origine pakistanaise pour la plupart, ont été
arrêtées. Elles sont toutes de nationalité britannique et vivaient dans des
quartiers résidentiels de la banlieue londonienne.
Les attentats et les tentatives d’attentats terroristes sont plus que jamais
fréquents depuis le 11 septembre comme on l’a constaté. A notre avis
cela veut dire deux choses. La première est que la guerre contre le
terrorisme, en particulier celle menée par les Etats-Unis, est incapable de
juguler le terrorisme international et pire elle l’aggrave. La deuxième est
qu’elle souffre d’handicap majeur qui l’empêche de tenir l’équilibre et
d’être efficace.
Toutefois, nous pensons que même si elle est encore loin d’être gagnée, il
serait injuste et malveillant d’affirmait qu’elle est improductive. Des
résultats notables ont été acquis. Des dizaines, voir même des centaines,
de millions d’avoirs terroristes ont été gelés ; des régimes corrompus et
autoritaires, qui parrainaient le terrorisme, ont été mis à terre ; et des
centaines de terroristes croupissent aujourd’hui dans les prisons. Même si
les groupes terroristes, notamment ceux liés à Al Qaïda, se sont
restructurés en s’autogérant maintenant, la guerre que le "monde" leur
mène les a sérieusement affaiblie et à long terme, il est probable qu’ils
n’arriveront plus à s’autogérer et seront totalement étouffés.
Ce qu’il faut pour rendre cette guerre beaucoup plus efficace, et en
particulier pour les Etats-Unis, c’est d’instaurer la confiance entre les
Etats en acceptant par exemple de partager leurs informations ; de
prendre en compte les sensibilités politiques, sociales et culturelles des
Etats ; et de ménager les intérêts de chacun. Cela est certes difficiles à
réaliser mais pas impossible. C’est ainsi seulement qu’on pourra
97
renforcer la coopération internationale pour lutter efficacement contre le
terrorisme. Car sans cette coopération, il est impossible, en particulier
pour les Etats-Unis, de vaincre cette nouvelle menace. Autrement, les
points de vue différeront toujours sur cette guerre et ses implications
risquent de mener le monde vers une catastrophe.
98
DEUXIEME PARTIE : DES
IMPLICATIONS DE LA
GUERRE ANTI-TERRORISTE
SUR LES RELATIONS
AMERICAINES
99
Chapitre
septembre,
4:
à
Les
la
réactions
guerre
au
11
contre
le
terrorisme et leurs motivations
Tous les Etats, à quelques exceptions prés, ont condamné les attaques du
11 septembre. Cependant, ils ont vivement réagi contre les opérations
militaires américaines en Afghanistan et en Irak qu’ils trouvent trop
unilatéralistes et imprudentes de la part de Washington. C’est la
campagne irakienne qui a le plus soulevé les critiques des Etats à l’égard
de la politique anti-terroriste de Washington.
Les OI et les associations de défense des droits ou des libertés ont elles
aussi, à l’instar des Etats, condamné les attaques du 11 septembre. Les OI
ont apporté un soutien plus ou moins important (direct ou indirect) aux
Etats-Unis dans leur guerre contre le terrorisme. Elles ont presque tous
adopté de nouvelles mesures ou ont révisé les anciennes pour faire face
au terrorisme. Toutefois, elles se sont abstenues de tout soutien aux
Américains dans leurs campagnes militaires et en particulier dans la
campagne irakienne. Quant aux associations de défense des droits et des
libertés, elles ont réagi par rapport aux mesures mises en place pour lutter
contre le terrorisme mais aussi par rapport à la manière dont les
journalistes ont été traités lors des campagnes militaires en Afghanistan
et en Irak. Elles s’inquiètent de la violation des droits de l’Homme, des
libertés publiques et de l’atteinte aux libertés de la presse constatées
depuis le début de la guerre contre le terrorisme.
I.
Les réactions des Etats : des réactions à motivations diverses
Dès l'annonce des attentats, les dirigeants de la planète (du continent
américain jusqu’en Asie en passant par l’Afrique, l’Europe et l’Australie)
100
ont exprimé émotion et solidarité à l’Amérique. Mais, dés l’instant où les
Etats-Unis ont décidé de mener des actions militaires en Irak, les
réactions ne se sont pas fait attendre. Les Etats se sont dans leurs grande
majorité opposés au projet. Chacun avait ses propres raisons. Ces raisons
étaient le plus souvent une volonté d’apaiser les esprits ou de composer
avec les terroristes, une défense d’intérêts particuliers, un rejet de
l’unilatéralisme américain etc.
A. Les réactions aux attaques du 11 septembre et à la
guerre anti-terroriste en Europe
En Europe, la France et l’Allemagne se sont vivement opposées à
l’intervention en Irak. La France fut d’ailleurs le plus farouche opposant
à la guerre en Irak. Elle a annihilé toute espoir américain au
cautionnement de la guerre par les Nations Unis. La France et
l’Allemagne se sont opposées à la guerre non seulement pour défendre
des intérêts économiques (France) et respecter des promesses électorales
(Allemagne) mais aussi pour faire de l’Europe un interlocuteur privilégié
des Américains sur la scène internationale. En quelques sortes, les deux
pays voulaient imposer la diplomatie européenne, presque inexistante,
sur la scène mondiale.
Toutefois, la position de la France et de l’Allemagne ne traduisait pas
systématiquement celle de l’UE. Il faut reconnaître que de nombreux
pays européens soutenaient les Américains notamment, la Grande
Bretagne, l’Espagne, l’Italie, le Danemark et un grand nombre des
nouveaux pays de l’Union.
1)
La réaction de la France
La population française, comme la plupart des populations des autres
pays, a été très choquée par les attentats du 11 septembre 2001. Elle a fait
101
preuve d’une très grande compassion à l’égard de l’Amérique meurtrie.
Les autorités françaises affirmeront apporter tout leur soutien et leur
détermination à aider les Etats-Unis à trouver et punir les auteurs des
actes. Le président français Jacques Chirac fut l’un des premiers chefd’Etats à se rendre sur le sol américain pour non seulement constater les
dégâts mais aussi pour discuter avec le président Bush de la manière dont
il envisageait de mener la riposte aux attentats.
Après que les Américains aient identifié les coupables des attentats, qui
étaient Ben Laden et Al Qaïda, et envisagé de frapper l’Afghanistan pour
débusquer les terroristes, Jacques Chirac affirmait : « La coopération
militaire naturellement peut se concevoir, mais dans la mesure où nous
nous serions préalablement concertés sur les objectifs et les modalités
d'une action ». Nous pouvons comprendre par là que, dés le départ, les
Français souhaitaient que la guerre contre le terrorisme se fasse dans le
cadre d’une coopération internationale. Ils souhaitaient aussi qu’elle se
fasse dans le cadre d’une coopération judiciaire et dans d’autres cadres
comme la lutte contre les finances des terroristes et l’échange de
renseignements. Et pas seulement par des actions militaires.
La France n’était pas catégoriquement contre des actions militaires pour
éradiquer cette menace qu’est le terrorisme. Elle a même fournie un
soutien assez notable aux forces américano-britanniques lors de la guerre
d’Afghanistan en octobre 2001. Elle a aussi activement participé à
l’ISAF93. Là où se sont corsées les choses c’est quand Washington a
ouvertement manifesté sa volonté de mener une action militaire en Irak
pour des raisons déjà évoquées94. La France a manifesté une opposition
radicale et n’a ménagé aucun effort pour empêcher une telle action.
93
94
Cf. au Chapitre II
ibidem
102
Selon Martin Laberge95, l’opposition de la France contre le projet
américain en Irak s’est déroulée en trois phases successives :
‰
Premièrement, à la fin de l’été 2002, face aux menaces d’une
intervention américaine en Irak, la France utilise la voie
diplomatique et l’opinion internationale pour exiger que le
règlement de la crise passe par les Nations Unies.
‰
Deuxièmement, à l’automne 2002, la France fait pression sur les
États-Unis, à l’aide de la résolution 1441, pour que le litige soit
encadré par l’ONU et que le Conseil de sécurité détermine le
casus belli justifiant une intervention militaire.
‰
Troisièmement, devant l’insistance américaine de régler la crise
par la force, Paris menace de bloquer le Conseil de sécurité en
utilisant son veto.
M. Chirac réaffirmera sa détermination de mettre le veto français, au
début du mois de mars 2003, pour s'opposer à un projet de résolution
déposé par les États-Unis, la Grande-Bretagne et l'Espagne donnant
jusqu'au 17 mars à Baghdad, pour se conformer pleinement à ses
obligations. Le président de la république française affirmait en ces
termes : « Quelles que soient les circonstances, la France votera non »96.
Pour éviter à avoir utilisé ce veto, ce qui aurait été très mal vu à
Washington, les autorités françaises avaient entamé une grande
manœuvre diplomatique au sein du Conseil de sécurité. Le ministre
français des Affaires étrangères, Dominique de Villepin, s'était rendu en
Angola en Guinée et au Cameroun, certains des membres du Conseil de
sécurité indécis à propos du projet de résolution américano-britannico95
Martin LABERGE, « La France et la politique américaine en Irak », POINTS DE
MIRE, Vol. 4 no 3, 27 février 2003, p. 1 (Doc. PDF). Disponible à l’adresse :
http://www.er.uqam.ca/nobel/cepes
96
Cité dans l’article « La France et la Russie opposeront leur droit de veto », Radio
Canada, 10 mars 2003. Vous pouvez voir l’article l’adresse : http://www.radiocanada.ca/url.asp?/nouvelles/special/nouvelles/irak/200303/10/005-ONU--chefsEtat.shtml
103
espagnole. Le basculement de ces trois pays dans le « camp de la paix »
ou leur abstention au vote de la résolution permettait à la France de ne
pas avoir à utiliser son veto. Les Etats-Unis et la Grande Bretagne
courtisaient eux aussi les trois pays africains. La secrétaire d'État
britannique pour l'Afrique, Valerie Amos, avait, comme M. de Villepin,
entamé une tournée dans les trois pays.
Le Cameroun avait de réelles chances de basculer dans le camp de la
France. Quant aux deux autres pays rien n’était sûr. La Guinée entretient
des relations étroites avec la France, son principal bâilleur de fonds. Mais
les États-Unis, qui finançaient à hauteur de 400 000 dollars l'acquisition
d'équipements de transmission, apparaissaient comme un allié de plus en
plus important pour Conakry97. En 2002, l'assistance américaine à
Luanda, essentiellement humanitaire, s'élevée à 128 millions de dollars98.
Par conséquent, il n’était pas évident que l’Angola aurait suivi la France
au détriment des Etats-Unis.
Pour beaucoup de personnes, en s’opposant si ardemment au projet
américain, la France entendait sauvegarder sa position privilégiée dans le
monde arabe et musulman qui lui assure une part substantielle de son
approvisionnement pétrolier mais aussi de ses ventes d’armements. Pour
les Français la survie du régime de Bagdad était nécessaire pour
préserver leurs intérêts dans ce pays. Alors que pour les Américains la
chute du dictateur irakien renfermait un grand intérêt pour leurs
approvisionnements en pétrole mais aussi pour leurs entreprises.
97
« Londres et Paris se disputent l'Afrique », Radio Canada, 10 mars 2003. Vous
pouvez visualiser l’article à l’adresse internet suivante : http://www.radiocanada.ca/url.asp?/nouvelles/special/nouvelles/irak/200303/10/001-villepinafrique.shtml
98
ibidem
104
Selon Thierry Gadault et Gilles Tanguy du magazine l’Expansion99,
depuis la mise en application du programme de l'ONU « Pétrole contre
nourriture », en 1996, la France est le premier fournisseur de l'Irak. En
2001, les entreprises françaises assuraient près de 14% de ses
importations, pour quelque 660 millions de dollars. En chiffre d’affaire,
la France doublait l'Australie, la Chine, l'Italie, le Vietnam et
l'Allemagne.
Selon les mêmes auteurs100, en décembre 2000, Peugeot avait signé un
contrat pour 1 000 modèles 406 et 5 000 modèles 306 avec l’Irak. En
outre, depuis 1997, chaque année le constructeur français lui vendait 200
ambulances (en partenariat avec la PME vendéenne Gifa, pour 8 à 10
millions de dollars par an). Renault, via sa filiale agricole, avait signé en
2001 un contrat portant sur 200 tracteurs avec l’Irak.
La BNP avait le privilège de gérer les fonds provenant du « Programme
pétrole contre nourriture » par lequel transitait, chaque trimestre, environ
un milliard de dollars. TotalFinaElf avait prospecté des sites pétroliers en
Irak et tenait à coeur à en profiter.
En plus des intérêts économiques, l’opinion publique française était
défavorable à une participation de leur pays à une intervention militaire
en Irak sans l’encadrement de l’ONU. Seuls 19% des Français étaient
favorables selon un sondage de l’IFOP publié dans le Journal du
dimanche le 12 janvier 2003.
On peut voir également à travers l’opposition française, une volonté
d’imposer l’Europe comme un interlocuteur privilégié des Américains
sur la scène international. En guise d’exemple, Jacques Chirac déclarait
99
Thierry GADAULT et Gilles TANGUY, « L'Irak, terre de contrats français »,
L’EXPANSION,
26
février
2003.
Retrouvez
l’article
à
l’adresse :
http://www.lexpansion.com/art/17.303.65831.0.html
100
ibidem
105
en janvier 2003, devant des députés français et allemands et en présence
de Gerhard Schröder : « Il est urgent que l'Europe s'impose comme un
acteur international. Elle est aujourd'hui un exemple pour tous ceux qui
refusent la fatalité de la guerre. Son rêve n'est pas une vaine gloire (...)
mais de mettre sa puissance au service de la paix ».
En Europe, à côté des pays « pacifistes » comme la France et
l’Allemagne, d’autres faisaient campagne sans relâche pour une guerre
en Irak.
2) Les réactions dans le reste de l’Europe
A l’instar de la France, la totalité des pays Européens ont été sidérés par
les attentats du 11 septembre 2001. Ils ont tous proposé leur soutien à
Washington pour trouver et punir les auteurs des attentats. Comme la
France également, la majeure partie de ces pays a participé à la lutte
financières contre les avoirs des terroristes et à la campagne militaire
américaine en Afghanistan. Ils ont également arrêté et jugé des centaines
de personnes liées directement ou indirectement aux attentats du 11
septembre. Mais quand les Etats-Unis ont décidé de s’en prendre à l’Irak
les Européens se sont scindés en deux blocs. D’un côté les pays qui sont
contre la guerre et de l’autre ceux qui sont avec Washington.
L’Allemagne, à l’instar de la France, était contre. Tandis que la GrandeBretagne, l’Italie, l’Espagne et les nouveaux pays entrant dans l’Union
Européenne étaient pour.
L’Allemagne et la France, souhaitaient que les inspections de l’ONU en
Irak soient prolongées jusqu’à ce qu’on découvre ou non les ADM. Ils
n’excluaient pas une action militaire mais si est seulement si l’Irak gênait
les inspections ou les refusait. Les deux pays ont mené une concertation
étroite et exemplaire pour donner toutes ses chances à la paix.
106
L’attitude de l’Allemagne était dictée par une promesse électorale du
SPD de Gerhard Schroeder aux dernières législatives. C’est une simple
position de principe. Il faut noter aussi que l’Allemagne, qui rencontrait
des difficultés économiques au moment des préparatifs de la campagne
en Irak, ne tenait pas à financer cette guerre comme elle l’avait fait lors
de la guerre du Golfe. En outre, elle possédait des intérêts en Irak même
s’ils n’étaient pas assez importants.
La Grande-Bretagne, comme de coutume, était totalement acquise à la
cause américaine. Le premier ministre britannique, Anthony Blair, a
octroyé au Président Bush un soutient sans faille. Il n’a reculé ni devant
la pression de son peuple qui était contre la guerre, ni devant certains
membres de son parti et des parlementaires britanniques, ni même devant
la démission de l’un de ses ministres de renom Robin Cook. M. Blair a
même fabriqué des preuves pour montrer la culpabilité du régime de
Baghdad. Il sera, à un moment de la crise qualifié de « Secrétaire
d’Etat » des Etats-Unis tellement il menait des actions diplomatiques
pour le compte des Etats-Unis dans le but de convaincre le monde de
chasser Saddam Hussein du pouvoir.
L’Italie et l’Espagne, face à la détermination de l’Allemagne et de la
France de se faire les portes paroles de l’Union européenne, avaient
décidé de se ranger du côté des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne pour
contrer leur influence. A l’Italie, l’Espagne et la Grande-Bretagne
s’étaient ajoutés le Portugal, le Danemark (également membres de
l’Union européenne). Mais de tous ces pays, exception faite à la GrandeBretagne, c’est l’Italie et l’Espagne qui iront le plus loin dans l’affaire
irakienne.
Vers la fin du mois de janvier 2003, des journaux européens publiaient
une lettre d'appui aux États-Unis signée par les dirigeants de huit pays
européens. Les cinq que nous venons de citer plus la Hongrie, la Pologne
107
et la République tchèque nouveaux membres de l’Union. Dans la lettre,
les huit pays avertissaient que la crédibilité des Nations Unies était en jeu
dans cette crise. « Notre force réside dans l'unité », indiquait elle. Elle
était vue comme une rebuffade à la France et à l'Allemagne, qui
plaidaient sans cesse pour une poursuite des inspections et des
discussions dans le cadre de l'ONU pour éviter la guerre. La Hongrie qui
avait signé le document, avait fait savoir que les premiers ministres des
gouvernements britannique et espagnol en étaient à l'origine.
Exaspéré par l’attitude des nouveaux membres, le Président Chirac
déclarait le 17 février, pour les remettre à l’ordre et leur signifier que
l’Allemagne et la France sont des poids lourds dans l’Union, « [c]es pays
ont été à la fois […], pas très bien élevés et un peu inconscients des
dangers que comportait un trop rapide alignement sur la position
américaine »101.
Le soutien des dirigeants de ces Etats au Etats-Unis ne traduisait
aucunement la volonté de leurs populations. Dans la presque totalité des
pays la majeur partie de la population était contre la guerre. Dans
certains, comme l’Espagne et l’Italie, les deux tiers de la population
étaient contre. Des manifestations ont eu lieu dans plusieurs villes de ces
Etats pour protester contre la perspective d'une guerre en Irak. Selon
Radio Canada102, moins d’une semaine avant le déclenchement de la
campagne en Irak, plus de 700 000 personnes, auraient manifesté à Milan
(Italie) pour protester contre l'adhésion de Berlusconi à la politique
guerrière des États-Unis. En Espagne, quelques 500 000 manifestants
sont descendus dans les rues de Madrid. En Grande Bretagne, Au
Portugal, au Danemark, en Pologne, en Hongrie pour ne citer qu’eux les
101
Cité par Martin LABERGE, op. cit. p. 2
« Les voix de la paix s'élèvent partout dans le monde », Radio Canada, 15 mars
2003. Vous pouvez visualiser l’article à l’adresse internet suivante : www.radiocanada.ca/url.asp?/nouvelles/special/nouvelles/irak/200303/14/008-manif-paixirak.shtml
102
108
populations ont vivement protesté contre le soutien de leurs pays à la
guerre.
La crise irakienne a une fois de plus démontré que la diplomatie
européenne n’existait pas et qu’elle aura beaucoup de mal avec certains
des nouveaux membres qui se sentent beaucoup plus proche des EtatsUnis que de l’Allemagne ou de la France.
Comme dans la plupart des pays européens, les pays arabes et
musulmans ont eux aussi vivement réagi à la guerre en Irak. Il y en a eu
qui ont également protesté contre la guerre en Afghanistan.
B. Les réactions des pays musulmans au 11 septembre et
aux opérations militaires américaines
Dans le monde arabe et musulman, la plupart des autorités politiques ont
condamné les attentats du 11 septembre. Toutefois, dans certains pays les
populations se sont réjouies de ces attentats. Elles l’ont fait non pas parce
que les 3 000 victimes n’avaient aucune valeur à leurs yeux mais parce
que pour elles l’Amérique venait de récolter ce qu’elle avait semé. Ces
populations ont fait de Ben Laden leur nouveau héros. Pour elles, le chef
d’Al Qaïda venait de faire ce que leurs dirigeants n’ont jamais osé faire :
c’est à dire défier l’Amérique et lui dire « nous en avons a assez ».
Comme beaucoup de pays européens, les pays arabes et musulmans ont
été contre certaines des opérations militaires américaines menées dans le
cadre de la guerre contre le terrorisme notamment la guerre en Irak.
Cependant, des pays comme le Pakistan, la Turquie, l’Egypte, la Jordanie
et autres, bien qu’officiellement n’étant pas pour les opérations, ont
manifesté leur soutien aux Américains. Cette attitude était surtout
motivée par les relations qu’ils entretiennent avec Washington et qu’ils
comptaient sauvegarder.
109
1)
La réaction du Pakistan à la riposte américaine
contre les Taliban
Le Pakistan, qui a mis au pouvoir les taliban et qui les avait formé dans
ses madrassas (écoles coraniques), a subi de très fortes pressions venant
des Etats-Unis pour coopérer dans la riposte contre l’Afghanistan. En
outre, les Etats-Unis avaient promis aux autorités d’Islamabad de sortir
leur économie de la situation où elle se trouvait. Le 22 septembre 2001,
les sanctions imposées au pays, suite aux essais nucléaires effectués en
1998, seront levées. Cette levée des sanctions fut un moyen pour les
Américains de s'assurer la coopération d’Islamabad. Le président
pakistanais qui était un peu réticent à une coopération de son pays au
début va finalement céder.
La coopération entre Washington et Islamabad concernait : le partage
d'informations, l'utilisation des couloirs aériens pakistanais et un support
logistique. Les autorités pakistanaises devaient également prendre des
mesures et mener des actions contre les intégristes soupçonnés d’être liés
à Al Qaïda et qui se trouvaient sur leur territoire.
L’une des premières mesures prises fut de mettre en place un fichier
informatique, créé en collaboration avec les Américains, pour surveiller
enseignants et élèves des madrassas. Le président pakistanais, le général
Musharraf, restreindra, début novembre 2001, l'usage des haut-parleurs
sur les mosquées ; seuls les appels à la prière étaient autorisés ; les
prêches et les discours politico-religieux étaient proscrits. Selon le
journal "Dawn", « le pouvoir voulait éviter que les mollahs se servent des
minarets pour critiquer son soutien aux Etats-Unis ». Autre revirement :
alors que le Pakistan était l’un des rares pays à avoir reconnu le
gouvernement des taliban et à lui offrir une représentation diplomatique
sur son sol, l’ambassadeur taleb sera renvoyé.
110
Le général Pervez Musharraf, pour éviter d’être évincé du pouvoir par
certains de ses proches collaborateurs qui n’appréciaient pas son soutien
aux Etats-Unis, procédera discrètement à des changements importants au
sein des forces armées du pays. C’est ainsi qu’il nommera le général
Mohammad Aziz Khan au poste de président du comité d'état-major des
forces armées (CJCSC) et le général Mohammad Yusuf au poste de chef
d'état-major adjoint. Ces généraux sont jugés beaucoup plus fidèles au
président Musharraf. Il ordonnera également, la mise en résidence
surveillée de Fazlur Rahman, le chef du parti Jamiat Ulema-e-Islam
(JUI), principal supporter pakistanais de Ben Laden et des Taliban.
La réaction au soutien des autorités pakistanaises aux Etats-Unis ne
s’était pas fait attendre. Les réactions les plus vives sont venues des partis
islamistes. Quand les Américains ont désigné Al Qaïda comme
responsable des attaques du 11 septembre, les représentants des partis
islamistes avaient fait part de leur opposition à la collaboration de leur
pays avec la coalition anti-terroriste et à l'intervention armée des forces
américaines et britanniques contre leur voisin afghan. Certains hauts
responsables de l’armée et des services secrets, sans trop faire de bruit,
n’appréciaient également pas ce soutien.
Quand les frappes ont débuté au mois d’octobre 2001, les mouvements
islamistes pakistanais, pro-taliban, les ont dénoncé et appelé au djihad.
Munawar Hassan, numéro deux du Jamiat, Jamaat-e-Islami, principal
parti religieux du pays, avait qualifié les frappes sur Kaboul d’« attaques
contre l'Islam » et prédit des conséquences graves pour le président
Pervez Musharraf. Ils avaient mobilisé la population qui avait vivement
protesté par des manifestations, à Lahore (est) et à Peshawar (ville
frontalière avec l'Afghanistan au nord-ouest du pays). Certaines de ces
manifestations ont été très violentes. Les villes Islamabad la capitale
administrative, Karachi la capitale économique et Quetta avaient elles
111
aussi été les théâtres d'opérations « coup de poing » menées par des
groupes de plusieurs centaines de manifestants.
2)
La réaction des pays arabes au 11 septembre
Comme nous l’avions déjà souligné, la majeure partie des autorités des
pays arabes a condamné les attentats du 11 septembre. Même la Libye
ennemi juré des Etats-Unis. Ce qui n’était pas le cas de Saddam Hussein.
Le raïs irakien s’était félicité des attaques : chose non surprenante quand
on connaît ses sentiments à l’égard de Washington. Dans les rues arabes,
comme en Palestine, les populations ont manifesté leur joie sans retenue.
Les autorités palestiniennes avaient réprimé ces manifestations et M.
Arafat, par un geste symbolique et pour exprimer à l’Amérique mais
aussi au monde son soutien et sa compassion ainsi que celle de son
peuple, fera un don de sang aux blessés des attaques devant des caméras.
L’Arabie Saoudite, premier pays exportateur de pétrole au monde et allié
des Etats-Unis depuis des décennies, a très vivement condamné les
attentats. Chose tout a fait normale si on se réfère aux relations des deux
pays mais aussi à l’implication de ressortissants saoudiens dans les
attentats que les autorités saoudiennes n’ont certainement jamais
souhaité. Cette implication de saoudiens a beaucoup gêné l’Arabie dans
la contestation des mesures anti-terroristes américaines qu’elle ne partage
pas du tout. Elle a mis un peu de temps avant de protester, mollement,
contre les attaques en Afghanistan. Les relations entre les deux amis sont
tendues103. Washington accuse Riyad de ne pas coopérer, notamment en
ce qui concerne le gèle des avoirs des terroristes et des personnes qui les
finances, et Riyad exige de Washington des preuves pour sévir contre les
groupes terroristes et les personnes soupçonnés de financer le terrorisme.
103
Cf. au Chapitre VI
112
Le leader libyen Mouammar Kadhafi avait qualifié de « terribles » les
attaques et avait, malgré les « différends politiques » qui opposaient son
pays aux Etats-Unis, proposé l'aide de Tripoli au peuple américain. A cet
égard, il avait déclaré : « Les différends politiques et les conflits avec
l'Amérique ne devraient pas constituer un obstacle psychologique à
l'envoi d'une aide humanitaire au peuple américain et toutes les
personnes en Amérique, qui ont été profondément touchés par ces
attaques terribles »104. Il avait ajouté : « Cette vague d'attentats
terrifiants ne peut qu'éveiller la conscience humaine et il est de notre
devoir humanitaire de nous tenir aux côtés du peuple américain malgré
le conflit politique. »105 Le 27 septembre 2001, la Fondation Kadhafi de
bienfaisance, présidée par Seif al-Islam, fils du colonel Kadhafi, avait fait
un don en espèces d'un montant non précisé aux familles des victimes des
attentats du 11 septembre.
Le Soudan que Washington qualifiait d’« Etats voyous », comme la
Libye, avait lui aussi dénoncé les attaques. Lors d’une visite en Arabie
Saoudite, quelques jours après les attentats, le ministre des Affaires
étrangères, Moustapha Osman Ismaïl, avait, dans un communiqué,
dénoncé les attaques, présenté ses condoléances au gouvernement et au
peuple américain et réaffirmé « la volonté du gouvernement soudanais de
coopérer
entièrement
avec
les
Etats-Unis
et
la
communauté
internationale pour combattre toutes les formes de terrorisme et de
traduire leurs auteurs devant la justice »106.
Le Soudan qui subissaient des sanctions économiques mis en place par
les Nations Unies mais aussi par les Etats-Unis, pour avoir soutenu le
terrorisme, voulait saisir l’occasion pour réchauffer ses relations avec
Washington et montrer à la Communauté internationale sa volonté de
104
Cité par Christophe CHAMPIN « Les Etats «voyous» solidaires de Washington »,
Radio France (RFI), 13 septembre 2001. Retrouvez l’article sur :
http://www.rfi.fr/Fichiers/evenements/10septembre/chronologie_annee.asp#1
105
ibidem
106
ibidem
113
combattre le terrorisme. Objectif atteint. Le 28 septembre 2001, le
Conseil de sécurité votait la levée des sanctions en vigueur contre le pays
pour sa coopération avec les Etats-Unis à la campagne anti-terroriste
internationale. Le 19 janvier 2002, suite à une promesse antérieure au 11
septembre d’aider le pays à trouver une solution à la guerre civile qui le
divise depuis des années, un accord de cessez-le-feu entre l'armée
soudanaise et la branche Nuba du SPLA est conclu sous l'égide des EtatsUnis.
En fait la coopération du Soudan à la guerre contre le terrorisme n’est pas
la seule explication du changement d’attitude de Washington à l’égard de
Khartoum. Les Etats-Unis lorgnent également sur les ressources
pétrolières du pays.
D’autres pays arabes amis ou partenaire de Washington (ou seulement
des pays opportunistes), ont apporté leurs soutiens au Président Bush.
Parmi eux l’Egypte, la Jordanie, le Maroc, l’Algérie etc. Toutefois, il faut
retenir que ce soutien des pays arabes et même des pays musulmans non
arabes, la plupart du temps, ne s’est pas traduit en actes. Les musulmans,
loin d’aider les Américains, ont vivement protesté contre la façon dont ils
mènent la guerre contre le terrorisme notamment les opérations
militaires.
3)
Les réactions de certains pays musulmans aux
opérations militaires
Beaucoup de dirigeants des pays musulmans ont dénoncé la campagne en
Afghanistan tout en comprenant la volonté des Américains de riposter
aux attaques du 11 septembre. Toutefois, les populations très remontées
contre les Américains et se sentant humiliées, avaient manifesté contre
les frappes. Pour ce qui est de la campagne irakienne, la presque totalité
114
des dirigeants des pays musulmans était contre. La population plus
encore.
a)
Iran : une réaction neutre
Dans l’affaire afghane, l’Iran, autre pays de l'« axe du mal » selon
George Bush, qualifiera les taliban de fanatiques religieux et les
Américains d’agresseur militaire hégémonistes. Elle n’excluait pas une
coopération avec les Etats-Unis mais à la seule condition que celle-ci soit
dans le cadre des Nations Unies. Selon le Financial Times l’attitude du
gouvernement iranien était avant tout pragmatique : Téhéran, comme
Washington, souhaitait le renversement du régime des taliban, contre
lequel il a failli entrer en guerre en 1998. En collaborant avec
Washington, l’Iran espérait en outre un allègement des sanctions
américaines à son encontre, notamment concernant l’exploitation des
ressources de la mer Caspienne.
Pour ce qui est de l’Irak, l’Iran avait condamné le déclenchement de la
guerre lancée par les Américains contre son voisin, la qualifiant
d'«injustifiable et illégitime». Malgré cette condamnation, l’Iran penchait
incontestablement pour la chute de Saddam Hussein pour un certains
nombre de raisons. D’abord parce que Saddam Hussein lui a mené une
très longue guerre au cours de laquelle elle a perdu beaucoup d’hommes
et beaucoup de temps : Saddam Hussein était un ennemi. Et ensuite parce
que le régime irakien réprimait les chiites (majoritaire en Irak), interdisait
leurs rites et en même temps leur ôtait toute liberté politique.
b)
Les autres réactions
Suite au déclenchement des opérations en Afghanistan, des milliers de
personnes avaient défilé dans les grandes villes en Indonésie (le plus
grand pays musulman par sa population) notamment dans la capitale
115
Jakarta. Ces manifestations se sont parfois accompagnées de violentes
affrontements entre forces de l'ordre et étudiants islamistes. Elles étaient
le plus souvent orchestrées par des groupes islamistes radicaux jugés
proches de Ben Laden et d’Al Qaïda. Quand la guerre contre l’Irak a
débutait, le gouvernement indonésien s’y était fermement opposé. La
population avait de nouveaux réagie par des manifestations en menaçant
l’Amérique et en appelant au Djihad (guerre sainte).
Les autorités turques ne se sont pas vigoureusement opposées aux
frappes contre l’Afghanistan. Là aussi c’est surtout la population qui
s’était distinguée en manifestant et en scandant des slogans hostiles aux
Etats-Unis. Elle fera la même chose lors de la crise irakienne. Quant aux
autorités turques, contrairement à la guerre en Afghanistan, elles
adopteront un autre ton. Ankara était contre une intervention
unilatéraliste américaine en Irak. Le président turc Ahmet Necdet Sezer
avait estimé que le processus de désarmement de l'Irak par les Nations
Unies devait se poursuivre. Les Tucs avaient refusé que leur territoire
serve à l’offensive terrestre contre leur voisin. Toutefois, le parlement
avait voté l'ouverture de l’espace aérien aux avions américains.
Ce qui inquiétait les Turcs dans l’affaire irakienne c’est surtout la
question kurde. En effet la Turquie, qui compte une importante
communauté kurde aspirant à l’indépendance, ne veut pas que les Kurdes
d’Irak, avec la chute de Saddam Hussein, s’affirment totalement et
donnent des idées ou du soutien aux siens.
Dans les pays musulmans de l’Afrique noire les populations ont dans
l’ensemble vivement protesté contre les opérations militaires des EtatsUnis. Leurs autorités quant à eux ont soutenu les Etats-Unis sans pour
autant approuver à cent pour cent leurs actions. Au Nigeria les
populations musulmanes s’en sont prises aux populations chrétiennes :
116
chose très fréquente dans ce pays. La plupart des pays africains ont
soutenu Washington pour s’attirer leurs bonnes grâces.
En dehors des pays que nous venons de citer d’autres pays comme le
Yémen, le Liban, la Syrie, le Bahreïn et autres ont condamné les attaques
américaines. Dans l’ensemble, les pays musulmans (arabes ou non
arabes) ont dénoncé les opérations en Afghanistan et en Irak.
C. Les réactions au 11 septembre et à la guerre antiterroriste dans le reste du monde
Nous allons voir la réaction de la Russie et leurs motivations ainsi que les
réactions de certains pays comme le Canada, l’Australie, la Chine ou
encore Cuba.
1)
La réaction de la Russie : « oui à la guerre contre le
terrorisme et non à la guerre contre le “partenaire”
irakien »
Les jours qui ont suivi les attaques du 11 septembre ont vu Washington et
Moscou, les deux anciens adversaires de la guerre froide, se retrouver
pour déclarer la guerre au terrorisme. Les Russes avaient fermement
condamné les attentats et avaient promis de coopérer avec Washington
pour éradiquer ce fléau qu’est le terrorisme qui selon eux les touche
également. C’était là pour Vladimir Poutine le président russe une
occasion de mater la résistance tchétchène qu’il ne considérait rien
d’autre qu’un terrorisme.
Quand les Américains ont décidé de s’en prendre à l’Afghanistan, les
Russes leur ont bien facilité la tâche. En effet la Russie avait permis aux
avions de la coalition d’utiliser les bases aériennes des pays d'Asie
centrale. L’espace aérien russe fut également ouvert aux vols transportant
117
de l'aide humanitaire, et la Russie s’était dite prête à prendre part, si
nécessaire, à des opérations de sauvetage et de recherches internationales.
Quand les taliban furent chassés du pouvoir, la Russie fut l’un des
premiers pays étrangers à entrer en Afghanistan pour officiellement
rapporter de l’aide à la population afghane. Mais on peut voir à travers
cette intrusion une volonté de Moscou d’être à nouveau présent en
Afghanistan.
En ce qui concerne la crise irakienne, le ton était tout autre. La Russie
était radicalement opposée à une intervention en Irak car elle avait des
intérêts non négligeables dans ce pays. Elle s’était rangée du côté du
« camp de la paix » avec la France et l’Allemagne, et avait menacé, à
l’instar de la France, d’opposer son veto à une résolution autorisant le
recours à la force contre le régime de Saddam Hussein. Quand la guerre
sera déclenchée, le président russe Vladimir Poutine avait demandé un
« arrêt rapide de l'opération militaire », et trouvé qu'elle était « une
grave erreur politique ». L’ancien président soviétique Mikhaïl
Gorbatchev ira dans le même sans que M. Poutine. Au cours du
Troisième Forum mondiale de l'eau qui se tenait au Japon, il avait
qualifié cette guerre de
« grosse erreur politique » et accusé
l'administration américaine de considérer le monde comme sa
«propriété». Il avait ajouté : « La guerre va miner la sécurité du monde
et discréditer le Conseil de sécurité ».
Pour ce qui est des intérêts russes en Irak, il faut savoir que des
entreprises russes avait conclu des marchés pétroliers avec le régime de
Saddam Hussein. LUKoil, l’une des plus grandes compagnies de pétrole
de la Russie, avait signé un contrat de production de pétrole de plusieurs
milliards de dollars avec le raïs irakien, lui octroyant un enjeu majeur au
Kourna Occidental, un gigantesque champ pétrolifère irakien qui recèle
plus de 11 milliards barils de pétrole. Les entreprises russes ne pouvaient
pas exploiter le pétrole de l’Irak en raison de l’embargo. Mais, une fois
118
l’embargo levé, elles avaient le droit de profiter des marchés qu’elles
avaient conclu.
Au delà des marchés pétroliers, que la Russie ne voulait pas perdre,
Moscou craignait également que la chute de Saddam Hussein entraîne
une hausse de la production du pétrole qui aurait pour conséquence de
faire baisser le prix du baril. Ce qui ne l’arrangeait pas du tout. En avril
2002, le Bureau d’Information Energétique du Departement de l’Energie
des Etats-Unis notait : « l’exportation de pétrole brut est une des sources
de revenus majeure pour la Russie, accordant au gouvernement 25% de
tous ses revenus. Une augmentation d’un dollar par baril du Blend Oural
apporterait presque 1 milliard de dollars de revenus supplémentaires à
la Russie. Inversement, une chute d’un dollar par baril est un sérieux
revers pour le budget russe ».
2)
Les réactions des autres pays beaucoup plus liées à
une volonté d’apaisement
Des pays comme le Canada, la Chine, l’Australie, le Japon et autres
avaient vivement condamné les attaques du 11 septembre et avaient
apporté leurs soutiens aux Etats-Unis. Même Cuba, « Etat voyous » selon
Washington, lui avait assuré sa solidarité. Le gouvernement de La
Havane avait ainsi fait part de sa « douleur et de sa tristesse » à son
adversaire de toujours, allant même jusqu'à proposer une aide « à
caractère humanitaire ». Mais là aussi comme partout ailleurs c’est la
guerre en Irak qui a posé problème.
La Chine n’avait pas fait beaucoup de bruit dans l’affaire irakienne mais
s’était dite favorable à un règlement pacifique de la crise et à un rôle plus
important des Nations Unies si une action militaire devait être
déclenchée. Toutefois, Pékin s'était rangé aux côtés de Paris, Moscou et
Berlin.
119
Le Canada, voisin des Etats-Unis, s’était dit contre toute action militaire
en Irak. Le ministre canadien de la Défense, M. John McCallum, avait
fait savoir qu’à moins de recevoir la preuve que Saddam Hussein
envisageait de s’en prendre au monde occidental son pays ne serait pas
favorable à une attaque contre l’Irak. Le 15 mars 2003, quelques jours
avant le début de l’intervention contre le régime de Saddam Hussein, des
centaines de milliers de personnes ont défilé dans les grandes villes du
pays. A Montréal, par exemple, plus de 250 000 personnes avaient défilé
ce jour là contre la guerre107.
L’Australie a soutenu les deux campagnes militaires en Afghanistan et en
Irak et le gouvernement s’est toujours inscrit sur la ligne de conduite des
Etats-Unis. La population australienne, contrairement au gouvernement,
était contre la guerre et des manifestations ont eu lieu dans les principales
villes du pays notamment à Sydney et Melbourne.
Selon des sondages, plus de 80% des Japonais étaient opposés à une
intervention contre l'Irak. Le gouvernement n'en a pas moins marqué sa
solidarité avec Washington.
En dehors des protestations qu’il y a eu autour des opérations militaires
américaines, certains Etats ont eu à protester contre les conditions de
détentions de leurs ressortissants sur le sol américain. Par exemple, en
janvier 2002, certains diplomates étrangers en poste aux Etats-Unis
avaient fustigé les autorités américaines qui ne respectaient pas, selon
eux, les droits fondamentaux de leurs ressortissants incarcérés depuis les
attentats du 11 septembre. A l'instar du Consul général du Pakistan à
New York, ils avaient rapporté que dans la plupart des cas, ils n’avaient
ni l'identité, ni le lieu de détention de leurs ressortissants. On affirmait
107
« Les voix de la paix s'élèvent partout dans le monde », Radio Canada, 15 mars
2003. Vous pouvez visualiser l’article à l’adresse internet suivante : http://www.radiocanada.ca/url.asp?/nouvelles/special/nouvelles/irak/200303/14/008-manif-paixirak.shtml
120
également que les autorités américaines faisaient pression sur les détenus
pour qu'ils n'accèdent pas à leurs droits à contacter leurs représentations
consulaires ou des avocats. Les associations de défense des droits ou des
libertés ont elles aussi dénoncé ces abus.
II.
L’inquiétude des associations de défense des droits et des
libertés face aux nouvelles normes anti-terroristes
Les associations comme Amnesty internationale et entre autres Reporters
sans frontières ont à plusieurs reprises affirmées avoir constaté des
violations des droits et des libertés des personnes depuis le 11 septembre
un peu partout dans le monde. Des lois préventives et restrictives ont vu
le jour. Les pouvoirs policiers ont été étendus, les arrestations
préventives se sont multipliées, des processus sécuritaires sont mis en
place. Une législation de guerre s’est développée. Les étrangers sont
suspectés de tous les maux et expulsé ou sous surveillance. Les libertés et
la vie privée (écoutes, surveillance) des citoyens sont menacées. L'Etat de
droit est méprisé. La conservation des secrets d'Etat est arbitrairement
étendue. Les libertés s’érodent. Les violations des règles de la défense et
de la présomption d'innocence sont violées. Des journalistes sont tués ou
enlevés. L’information censurés, etc.
A. Une inquiétude justifiée
Aux Etats-Unis, dans les premiers jours qui ont suivi les attaques, des
centaines de personnes ont été interpellées et détenues. La plupart sont
restées sans jugement pendant longtemps. Dans la majeure partie des cas,
les prévenus (essentiellement interpellés pour infractions à la législation
sur les visas) n’ont pas pu rencontrer un avocat ou contacter leurs
familles. La communauté arabe et musulmane était la principale visée.
Cette communauté, dans les premiers mois qui ont suivi le 11 septembre,
a vécu de durs moments. Ses ressortissants ont été victimes de meurtres,
121
d’agressions physiques, de pressions morales, de licenciements abusifs,
etc.
Le 13 novembre 2001, le ministère de la Justice avait demandé, aux
services de sécurité américaines d’interroger cinq mille personnes de
cette communauté, tous d’origine moyen-orientale, entrées régulièrement
aux Etats-Unis avec un visa de touriste. Le but de cette opération était
d’identifier d’éventuels complices des auteurs des attentats du 11
septembre ou des « agents dormants » du réseau Al-Qaïda d’Oussama
Ben Laden. Cet interrogatoire "géant" a contribué à mettre à l’index et à
marginaliser des étrangers moyen-orientaux, arabes ou musulmans et à
faire naître chez eux un sentiment de suspicion et d’injustice.
A cela, s’ajoutent ; le vote de la loi USA PATRIOT Act ; l’autorisation
de l'Attorney général, John Ashcroft, (le 31 2001) de mettre sur écoute
les conversations téléphoniques entre les suspects incarcérés dans le
cadre de l’enquête sur les attentats et leurs avocats ; la mise en place de
tribunaux militaires d’exception pour juger des terroristes présumés et
dans une moindre mesure la création du ministère de sécurité intérieure.
Les conditions de détention des 600 prisonniers suspects sur la base de
Guantanamo sont elles aussi décriées.
Pour ce qui est du DHS l’opposition n’était pas très grande car sa
création était motivée par la protection du territoire américain. Toutefois,
certaines associations de défenses des libertés publiques aux Etats-Unis
avaient manifesté leurs inquiétudes de voir ce ministre interférer dans la
vie privée des citoyens ou encore restreindre leurs libertés. L'American
Civil Liberties Union (ACLU) avait demandé aux législateurs d’exiger un
mécanisme de surveillance des activités du ministère. Laura Murphy,
directrice du bureau de Washington de l'ACLU, avait déclaré par voie de
communiqué : « Si ce nouveau ministère renforce les pouvoirs du
gouvernement, le Congrès doit également s'assurer qu'il existe des
122
mécanismes appropriés pour éviter les abus. De tels mécanismes, comme
la nomination d'un inspecteur général, sont cruciaux étant donnée
l'ampleur des pouvoirs accordés au nom de la sécurité intérieure, des
pouvoirs qui toucheront à tous les recoins de nos vies et libertés. »
En résumé, aux Etats-Unis, ce qui inquiète le plus les associations
militant pour la défense des droits de l’Homme et des libertés (comme
l’Union américaine des libertés civiques [ACLU], la Commission des
droits de l’homme des Etats-Unis, Human Rights Watch, le Centre pour
la démocratie et la technologie et l’Association nationale des Arabes
américains)108 c’est :
‰
la définition juridique du terrorisme, si vaste qu’elle pourrait
donner
lieu
à
des
mesures
répressives
arbitraires
et
discriminatoires ;
‰
le traitement réservé aux personnes incarcérées sur le territoire
américain à des fins d’enquête, et plus spécialement aux détenus
arabes et musulmans, qui sont soumis à des gardes à vue et à des
interrogatoires dont la durée a été dénoncée, sans parler de leurs
difficultés à s’entretenir avec un avocat ;
‰
la révision des procédures d’immigration et d’expulsion, qui
autorise la détention sans procès, pour une période indéterminée,
d’immigrés et autres ressortissants étrangers si le ministre de la
Justice " est raisonnablement fondé " à les soupçonner de mener
des activités terroristes ou d’aider à la commission d’actes de
terrorisme, suivant l’acception lato sensu du terme ;
‰
l’absence de lignes directrices quant à la durée autorisée de
conservation de données à caractère personnel et la possibilité
pour les autorités fédérales d’accéder à des renseignements
financiers d’ordre privé sans contrôle adéquat de l’usage qui en
108
Rapport parlementaire de l’OTAN, « La lutte contre le terrorisme : résultats et
questions », paragraphe 63.
123
est fait ni obligation d’informer les particuliers concernés de la
surveillance exercée sur leurs transactions ; enfin
‰
les limitations fixées aux procédures de révision judiciaire et de
supervision judiciaire.
En dehors des Etats-Unis, plusieurs pays à travers le monde ont adopté
des mesures très controversées dont certains ont servi à faire passer des
mesures impopulaires qui ne seraient jamais passées avant le 11
septembre et qui, dans la plupart des cas, n’ont rien à avoir avec la guerre
contre le terrorisme. En Europe, si nous reprenons Volker Kröning109, la
législation anti-terroriste française a prévu la possibilité d’incarcérer et
d’interroger pendant quatre jours, en l’absence de tout avocat, les
personnes soupçonnées d’aider des réseaux terroristes sur le territoire et à
l’étranger et, en cas d’inculpation, de les maintenir en détention
préventive pendant une période pouvant aller jusqu’à quatre ans. En
Italie, la période de détention préventive a été portée de 18 à 24 mois. Le
code pénal espagnol autorise désormais la détention d’auteurs présumés
d’actes terroristes pendant trois jours, délai susceptible d’être prolongé de
48 heures par ordonnance judiciaire. En plus, les forces de l’ordre ont
l’autorisation de leur bander les yeux, les coiffer d’une cagoule et les
garder au secret sans leur laisser le choix d’un avocat. Au Royaume-Uni,
la nouvelle loi sur le terrorisme (l’Anti-Terrorism Act 2001) permet
l’internement sans procès des personnes dont le ministre de l’Intérieur
juge qu’elles sont une menace pour la sécurité nationale.
D’autres pays, si l’on en croit à certaines ONG, ont profité de leur
soutien aux Etats-Unis pour détourner l’attention de la situation des
droits de l’homme chez eux et de la répression qu’ils exercent sur les
opposants politiques.
109
Rapport parlementaire de l’OTAN, « La lutte contre le terrorisme : résultats et
questions », paragraphe 28.
124
La liberté de la presse, elle aussi, n’a pas été ménagée par les mesures
anti-terroristes. Les associations militant pour la défense de la liberté de
la presse à l’instar de Reporters sans frontières et du collectif FEN110 ont
vivement protesté contre ces mesures et dénoncé les conditions dans
lesquelles les journalistes travaillent depuis le 11 septembre.
B. Une liberté de la presse mal éprouvée par la guerre antiterroriste
A la suite des attentats, les autorités américaines ont mis en place (ou ont
voulu le faire) un certains nombre de mesures pour contrôler l’accès de
l’information, relevant de la guerre contre le terrorisme, aux médias. Au
mois octobre 2001, le président des Etats-Unis avait interdit que des
documents confidentielles de la Maison Blanche soient transmis aux élus
du Congrès (ce qui est d’usage), par crainte de "fuites" dans la presse.
Cette décision était motivée par une fuite d’information venant de
parlementaires et publiée dans le Washington Post. Mais face à une vive
réaction des élus, la décision restera sans suite. Egalement, les autorités
américaines avaient demandé aux grands médias du pays de ne pas
diffuser les messages de Ben Laden au motif que ces messages pouvait
être des codes envoyés par le chef d’Al Qaïda à ces agents dormants sur
le sol américain. D’après certaines sources, le Pentagone avait mis en
place un bureau d’influence (Office de l'Information Stratégique) dont le
but était vraisemblablement de faire de la propagande et de désinformer
les médias étrangers. Mais face aux protestations, la Maison Blanche
affirmera que le Président Bush n’était pas mis au courant de l’existence
de ce bureau et demandera sa fermeture. Lors des campagnes militaires,
notamment en Irak, le Pentagone avait imposé des contrôles très stricts à
l’accès des images de guerre aux journalistes. Il avait même choisis ses
propres journalistes pour couvrir les opérations militaires.
110
Le Free Expresion Network est un collectif qui regroupe une douzaine
d'organisations non gouvernementales anglo-saxonnes dont les mandats concernent la
liberté d'expression, la cyberliberté et la liberté de la presse.
125
Selon un rapport du FEN, des journalistes ont été licenciés aux EtatsUnis pour avoir osé critiquer le président Bush ou la politique antiterroriste de son gouvernement. En guise d’exemple, le rapport cite, deux
journalistes, Tom Gutting (reporter au Texas City Sun) et Dan Guthrie
(éditorialiste au Grant's Pass Dial dans l’Oregon). Ces deux ont été
licenciés, quelques jours après les attaques du 11 septembre, par leurs
employeurs pour avoir, dans leurs articles, reproché à George W. Bush
d’être rentré à la Maison Blanche un peu tard après les attentats.
Le 3 mai 2002, à l’occasion de la 12e Journée internationale de la liberté
de la presse, Robert Ménard, secrétaire général de Reporters sans
frontières, affirmait que « depuis les attentats du 11 septembre. Au nom
de la lutte contre le terrorisme, de nombreux régimes s'en prennent, sans
aucune retenue, aux journalistes qui osent les contester en les accusant
de faire le jeu des poseurs de bombes. » L’UNESCO ira dans le même
sens que M. Ménard. Pour l'organisation onusienne la campagne antiterroriste a facilité la répression de la liberté de la presse et a permis à
certains dirigeants d’adopter des mesures restrictives contre la presse qui
étaient « depuis longtemps dans les cartons. »
Les associations de défense de la liberté de la presse ont dénoncé aussi
l’installation de logiciels d’espionnage chez des fournisseurs d’accès à
Internet (FAI). D’après Loïc Coriou et Régis Bourgeat111 quelques heures
après les attentats du 11 septembre des agents du FBI se sont présentés
dans les locaux des FAI comme AOL, Earthlink et Hotmail pour installer
sur leurs serveurs ce genre de logiciels. Le but était de trouver
d'éventuels indices laissés sur le réseau par les auteurs des attentats. Cette
pratique sera officialisée avec l’adoption de la loi USA PATRIOT Act
par la Chambre des représentants. Désormais, ces logiciels peuvent
légalement être branchés sur les réseaux des FAI. Selon les défenseurs de
111
Loïc CORIOU et Régis BOURGEAT, « La liberté de la presse à l'épreuve de la
politique anti-terroriste de l'administration Bush », 23 mai 2002. Retrouvez l’article
sur : http://www.enduring-freedoms.org/article.php3?id_article=314
126
la liberté de la presse, cela remet en cause la confidentialité de
l'information sur le Net. Ils craignent que les agents fédéraux abusent de
l’opportunité que leur offrent ces logiciels pour espionner qui bon leur
semble ou le faire sans mandat. Les logiciels que l’on évoque le plus
souvent sont : le logiciel "Lanterne magique" ("Magic Lantern") et le
logiciel Carnivore.
Le logiciel "Lanterne magique" appartient à la catégorie des
"keyloggers". Installé sur un micro-ordinateur, le keylogger surveille et
garde en mémoire les touches frappées au clavier par l'utilisateur.
Lorsque quelqu'un crypte ses communications avec un logiciel trop
difficile à casser, il est beaucoup plus simple de découvrir son mot de
passe ou bien le contenu de ses messages en récupérant les données du
keylogger. Quand on a évoqué l’existence de ce logiciel dans la presse, le
FBI avait nié le posséder tout en reconnaissant travailler sur sa
conception.
Carnivore est un logiciel d’espionnage installé sur une machine reliée
dans les locaux d'un FAI. Il est capable de filtrer les paquets de données
qui transitent entre l'utilisateur et le FAI et de reconstituer les messages
échangés : courriers électroniques mais aussi pages Web visitées, et
conversations en directes (chats). Avant lui il y a eu Etherpeek puis
Omnivore (1997) qui scannait 6 Go de données par heure. Carnivore
serait moins rapide (quelques millions d'e-mails par seconde quand
même !) mais est capable de reconstituer les pages Web et les cessions de
discussion en ligne (les chats). Son coût de développement est estimé à
6,8 millions de francs.
La façon dont les journalistes ont été traités et l’information censurée,
lors des campagnes militaires en Afghanistan et en Irak, a aussi été
dénoncée. D’après, Loïc Coriou et Régis Bourgeat, en Afghanistan, des
« journalistes et collaborateurs des médias ont été frappés ou menacés
127
d'exécution par des soldats américains ou leurs alliés afghans »112.
Toujours selon la même source, le 10 avril 2002, un traducteur et
assistant du quotidien américain Boston Globe a été violemment frappé,
en présence des forces spéciales américaines, par des combattants des
FAN.
La façon dont la chaîne de télévision Al-Jazira basée au Qatar a été
traitée par les Etats-Unis, en Afghanistan mais également en Irak, a elle
aussi été condamnée par les défenseurs de la liberté de la presse. Les
Etats-Unis accuse la chaîne de faire passer les messages de Ben Laden et
d’« encourager des sentiments anti-américains » au Moyen-Orient. Les
locaux de la chaîne ont été pilonnés à Kaboul par l’aviation américaine
lors de la guerre d’Afghanistan. Les Américains avaient affirmé qu’ils les
soupçonnaient d'abriter des éléments d'Al-Qaida, par conséquent ils
étaient une cible militaire. Un journaliste de la chaîne serait prisonnier à
la base de Guantanamo et un autre aurait été tué lors de la guerre en Irak
par l’armée américaine.
III.
Les réactions des OI aux attaques du 11 septembre et à la
guerre anti-terroriste
A la suite des attaques du 11 septembre, l’une des premières choses que
les OI (l’ONU et l’OTAN) ont fait, après avoir condamné les attaques, a
été d’adopter de nouvelles mesures anti-terroristes ou de réviser les
anciennes. Certains des membres de l’OTAN avaient souhaité une
transformation de l’organisation pour qu’elle puisse faire face aux
nouvelles menaces à l’instar du terrorisme. Comme nous l’avons déjà
indiqué, il est à retenir que, l’ONU et l’OTAN se sont gardées de fournir
tout soutien aux Etats-Unis dans la guerre en Irak. Cependant, elles leur
ont apporté un soutien assez important (non pas dans les opérations
militaire) lors de la campagne en Afghanistan.
112
ibidem
128
A. Les nouvelles mesures mises en place par l’ONU et ses
organismes et sa réaction à la crise irakienne
L’ONU avec douze conventions113 en vigueur sur le terrorisme
international, est la seule entité d’envergure mondiale à préconiser une
coopération à l’échelle planétaire dans la guerre contre le terrorisme.
Au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, le Conseil de sécurité
des Nations Unies a considéré d'emblée, dans ses Résolutions 1368 et
1373 adoptées les 12 et 28 septembre, les attentats comme une menace
contre la paix et la sécurité internationales et il a réaffirmé à cet égard le
droit
naturel
de
légitime
défense,
individuelle
ou
collective,
conformément à la Charte des Nations Unies avant même qu'il y ait des
preuves tangibles que ces actes émanaient de l'étranger. Il avait promis de
prendre toutes les mesures requises pour riposter à ces attaques.
Contrairement à ce que d’aucuns ont affirmé, selon Volker Kröning114,
les résolutions 1368 et 1373 n’ont pas autorisé les Etats-Unis à recourir à
la force armée de la même façon que la résolution 678 de 1990 l’avait
fait lors de la crise du Golfe. D’après lui, l’administration Bush s’est
appuyée sur le droit naturel de légitime défense inscrit à l’article 51 de la
Charte des Nations Unies qui n’est subordonné à aucune autorisation
préalable du Conseil de sécurité.
Après l’adoption de ces résolutions, le Conseil de sécurité va adopter
d’autres comme la résolution 1377 le 12 novembre 2001, la résolution
1390 le 16 janvier 2002115 etc. Outre le Conseil de Sécurité (CS), divers
organismes des Nations Unies ont réagi aux attaques en adoptant de
nouvelles mesures ou en émettant la volonté de le faire. On peut
113
Jusqu’en novembre 2002, seuls 24 Etats avaient ratifié les 12 conventions sur le
terrorisme. Ces Etats sont: Autriche, Bolivie, Botswana, Bulgarie, Canada, Chili, Cuba,
Danemark, Finlande, Grenade, Islande, Japon, Mali, Pays-Bas, Norvège, Panama,
Pérou, Slovaquie, Espagne, Suisse, Turquie, Royaume-Uni, Etats-Unis et Ouzbékistan.
114
Rapport parlementaire de l’OTAN, « La lutte contre le terrorisme : résultats et
questions », paragraphe 9
115
Cf. au Chapitre II
129
citer parmi eux : le Comité spécial créé par la résolution 51/210 de
l’Assemblée générale du 17 décembre 1996, l’Agence internationale de
l’énergie
atomique
(AIEA),
l’Organisation
de
l’aviation
civile
internationale (OACI), l’Organisation maritime internationale (OMI),
l’Union postale universelle (UPU), L’Organisation mondiale de la santé
(OMS), et le Conseil économique et social des Nations Unies.
1) Quelques mesures anti-terroristes adoptées par des
organismes de l’ONU en réaction au 11 septembre
Le Comité spécial créé par la résolution 51/210 de l’Assemblée
générale du 17 décembre 1996 a réagi aux événements du 11 septembre
dans les limites de son mandat d’harmonisation de la guerre contre le
terrorisme par des moyens juridiques. Il a adopté deux traités, l’un
portant sur les attentats terroristes à l’explosif et l’autre sur la répression
du financement du terrorisme.
L’AIEA a pris des mesures pour élargir son examen des installations
nucléaires dans les États membres, pour cerner les améliorations de la
sécurité nécessaires et pour organiser les contributions financières
permettant de mettre en oeuvre ces mesures. L’AIEA a proposé la
création d’un mécanisme international de réaction aux menaces
nucléaires venant d’acteurs non étatiques et aux attaques contre les
installations nucléaires.
L’OACI avait annoncé son intention d’intensifier la mise en oeuvre et
l’exécution des conventions relatives à la sécurité aérienne, de renforcer
les mesures visant à contrer les menaces à la sécurité dans des États
donnés et de mettre l’accent sur les besoins des pays en développement.
L’OMI a élaboré 12 propositions en vue d’améliorer la sécurité
maritime. Ces propositions visent l’identification automatique obligatoire
130
sur tous les navires de plus de 500 tonnes, des lignes directrices sur
l’évaluation de la vulnérabilité des ports, une pièce d’identité des gens de
mer dont le besoin est urgent, une nouvelle coopération douanière et de
nouvelles alarmes anti-terroristes à bord des navires.
L’UPU a offert des avis et une formation afin d’éliminer la transmission
de matières dangereuses par la poste. Elle a organisé de nombreux
séminaires comme celui sur le bioterrorisme organisé avec le Groupe
d’action pour la sécurité postale (GASP) en avril 2002. Ce séminaire
avait mis l’accent sur les événements bioterroristes survenus aux ÉtatsUnis en octobre 2001. Lors de ce séminaire, des conférenciers de l’US
Postal Service (USPS) avaient présenté un aperçu de l’usage du
bioterrorisme par l’intermédiaire des envois postaux. Ils avaient
également décrit la façon dont ils ont traité la crise, ce qu’ils avaient
appris des événements et ce qu’il fallait maintenant pour protéger leurs
clients, leurs employés et le public contre les risques chimiques et
biologiques.
L’OMS a dégagé, à l’intention des responsables de la santé publique,
trois enseignements de la crise de l’anthrax d’octobre 2001 : réaction
rapide du système de santé au soupçon d’infections délibérées, vigilance
de tous les instants et information de la population.
Le Conseil économique et social des Nations Unies a voté deux
résolutions qui mettent l’accent sur le terrorisme et les droits de la
personne. La première résolution, datant du 16 avril 2002, condamne les
actes terroristes « en tant qu’actes qui visent l’anéantissement des droits
de l’homme, des libertés fondamentales et de la démocratie » et appelle à
une action multilatérale vigoureuse « en conformité avec les obligations
internationales applicables, aux termes des instruments relatifs aux
droits de l’homme et du droit humanitaire international. »116 La
116
E/CN.4/2002/L.50/Rev. 1, le 16 avril 2002.
131
deuxième résolution, demande que le Haut Commissaire des Nations
Unies aux droits de l’homme fournisse des orientations sur la protection
des droits et des libertés dans le contexte de la guerre contre le terrorisme
en aidant et en conseillant les États et l’ONU, en soumettant des
recommandations à propos d’éléments précis du droit international
relativement à des mesures qui sont proposées, en analysant les
répercussions des mesures anti-terroristes et en puisant dans les
enseignements tirés des interventions, des recommandations et des
décisions antérieures, ainsi que de l’expérience.
Dans l’ensemble, les Nations Unies ont bien réagi aux attaques du 11
septembre. Elles ont adopté de nouvelles mesures et amélioré les
anciennes. Contrairement à avant, depuis le 11 septembres beaucoup de
pays adoptent ces mesures par crainte d’être taxés de mauvaise foi pour.
Toutefois, l’adoption de ces mesures par les Etats, ne signifie pas qu’elles
sont respectées comme il le faut.
2)
L’ONU et la crise irakienne
Pour ce qui est des campagnes militaires en Afghanistan et en Irak,
l’ONU a eu des réactions différentes. La campagne en Afghanistan, sans
vouloir dire qu’elle a été autorisée par l’ONU, était acceptée par
l’Organisation. Après la chute des Taliban, les Nations Unies ont envoyé
en Afghanistan l’ISAF117.
Pour ce qui est de l’Irak, les Nations Unies avaient refusé de cautionner
une intervention militaire comme les Etats-Unis le souhaitaient. Quand
les Américains ont estimé qu’il fallait attaquer l’Irak, les Nations Unies
avaient proposé d’envoyer des inspecteurs vérifier si elle possédait des
ADM avant toute action militaire. Le 08 novembre 2002 le Conseil de
sécurité adoptait la résolution 1441. Par cette résolution, il ordonnait à
117
Cf. au Chapitre II
132
Bagdad de se soumettre aux inspections et de détruire tous ses
programmes d’armes de destruction massive sous peine d’un recours à la
force. Cette résolution n’était pas ce que les Américains souhaitaient
mais ils s’en sont contentés le temps de se déployer dans le Golfe et de
trouver une faille pour attaquer l’Irak. Le suédois, Hans Blix, était le chef
des inspecteurs. L’AIEA était également présente avec son directeur
Mohamed El Baradei.
Après plus deux mois d’inspections, Hans Blix déclarait au siège des
Nations Unies « Si vous demandez s'ils coopèrent activement, je
répondrais non, ils ne sont pas encore arrivés à ce stade. Si nous avons
une coopération active, s'ils font véritablement un effort, nous ne
devrions pas avoir besoin de beaucoup de temps. Si nous n'avons pas ce
type de coopération, cela (le processus d'inspection) peut s'éterniser »118.
Toutefois, il avait précisé que « des progrès ont été faits (...) »119 et qu’il
leur fallait encore un peu de temps. Ce temps, les Américains ne le leur
laisseront pas. Au mois de mars (2003) les Etats-Unis agiront
unilatéralement pour désarmer l’Irak et couper ses liens avec le
terrorisme. Mais auparavant, ils avaient tout fait pour que l’ONU
cautionne l’intervention. Et sans l’opposition de la France, de la Russie et
de l’Allemagne, ils auraient certainement réussi.
B. La réaction de l’OTAN et sa transformation face aux
nouvelles menaces comme le terrorisme international
A la suite des attentats du 11 septembre 2001, l’OTAN a pris un certain
nombre de décisions pour soit soutenir ou soit exprimer sa solidarité avec
les Etats-Unis. C’est ainsi qu’elle avait activé l’article 5 du Traité.
Certains Etats-membres, notamment les Etats-Unis, avaient jugé
118
« Les positions semblent inconciliables », Radio Canada, 30 janvier 2003. Voir :
http://www.radio-canada.ca/url.asp?/nouvelles/Index/nouvelles/200301/22/006irak-mercredi.shtml
119
ibidem
133
nécessaire de transformer l’organisation pour lui permettre de faire face
au terrorisme mais également à la prolifération des ADM et autres. Cette
probabilité devait être discutée au sommet de l’OTAN à Prague.
1)
La réaction de l’OTAN aux attaques du 11
septembre
Le Conseil de l'Atlantique nord a commencé par adopter une position
assez prudente en convenant, le 12 septembre, que, s'il était prouvé que
les attaques du 11 septembre contre les Etats-Unis avaient été
commanditées de l'étranger, elles devaient être considérées comme
relevant de l'article 5 du Traité de Washington, qui stipule qu'une attaque
armée contre l'un ou plusieurs des alliés survenant en Europe ou en
Amérique du Nord sera considérée comme une attaque dirigée contre eux
tous. En octobre 2001, pour la première fois dans l'histoire, l’article 5 du
traité de Washington sera activé.
Dans le même mois d’octobre 2001, après que les Etats-Unis aient
demandé à leurs Alliés de l’OTAN de prendre des mesures spécifiques
pour appuyer leur campagne militaire en Afghanistan, les Alliés ont
décidé120 :
‰
d’intensifier leur coopération dans le domaine du renseignement
(collecte et partage) sur le plan bilatéral comme à l’intérieur de
l’Alliance ;
‰
d’accorder - en tenant dûment compte des dispositions requises
pour le trafic aérien et des procédures nationales - des
autorisations générales de survol pour les appareils des Etats-Unis
et de l’OTAN mis en œuvre dans des opérations anti-terroristes ;
120
Rapport parlementaire de l’OTAN, « La lutte contre le terrorisme : résultats et
questions », paragraphe 13
134
‰
d’aider les membres de l’Alliance (et des pays extérieurs) qui
risquaient d’être exposés à des menaces accrues en raison de leur
soutien à la campagne contre le terrorisme ;
‰
de prendre les mesures nécessaires pour renforcer la sécurité des
installations américaines en Europe ;
‰
de remplacer, dans la zone de l’OTAN, les moyens alliés
susceptibles d’être nécessaires ailleurs, toujours dans le contexte
de la campagne contre le terrorisme ; et
‰
de permettre aux Américains et aux autres Alliés engagés dans les
opérations anti-terroristes d’accéder aux ports et aéroports situés
sur leurs territoires respectifs, notamment à des fins de
ravitaillement en carburant, dans le respect des procédures
nationales en la matière.
L’OTAN en tant que telle n'a pas participé directement aux opérations
militaires contre le régime des Taliban. Toutefois, certains de ses
membres, à titre individuel, ont apporté un soutien non négligeable aux
Américains dans leurs opérations. Retenez que l’ISAF est sous
commandement de l’OTAN.
2)
La transformation de l’OTAN à la suite du 11
septembre
Depuis les attaques du 11 septembre, beaucoup de gens pensent que
l’OTAN doit transformer ses institutions et ses capacités pour faire face à
cette nouvelle menace qu’est le terrorisme. En septembre 2002 à
Varsovie, au cours d’une réunion des ministres de la défense de l’OTAN,
Donald Rumsfeld avait proposé la création d’une « force de riposte » au
sein de l’organisation. Le délai de déploiement de cette force devrait se
situer entre 5 et 30 jours. Elle devrait atteindre sa « capacité
opérationnelle initiale » au plus tard au mois octobre de cette année, et
devrait être opérationnelle à cent pour cent avant 2006. Selon un rapport
135
parlementaire de l’OTAN, la force de riposte proposée par le Secrétaire à
la Défense américain « interviendrait au titre de Groupe de forces
interarmées multinationales (GFIM) de l’OTAN, sous le commandement
du chef d’état-major des GFIM. Elle pourrait se composer d’un
maximum de 21 000 hommes, avec une force terrestre de la taille d’une
brigade, des moyens aériens capables d’effectuer jusqu’à 200 sorties de
combat par jour, et des forces navales dont la taille pourrait égaler celle
des forces navales permanentes de l’OTAN (qui peuvent comprendre de
8 à 15 frégates et destroyers). »121 Sa mission serait entre autres
d’« intervenir notamment dans des opérations de réponse aux crises (par
exemple, l’évacuation des civils), pour prévenir les agressions en jouant
le rôle d’un groupement de forces « proactif » appelé à accepter des
renforts, ou comme force d’entrée initiale dans le cadre d’opérations de
grande envergure comme celles de l’OTAN au Kosovo (elle assurerait
alors la sécurité des ports et des voies de communication, et préparerait
le théâtre des opérations). »122
La mise en place de cette force de riposte inquiétait certains membres de
l’OTAN pour deux raisons. La première est le risque de la voir
concurrencer la « Force de réaction rapide européenne ». La seconde est
la crainte de la voir « transformait l’Alliance en une organisation aux
responsabilités planétaires ». Les membres s’étaient donnés rendez vous
au Sommet de Prague pour examiner cette proposition du Secrétaire
d’Etat américain Donald Rumsfeld.
Lors de la réunion du Conseil de l'Atlantique Nord tenue à Prague le 21
novembre 2002, les chefs d'Etat et de gouvernement ont adopté un
ensemble de mesure pour permettre à l’OTAN de relever les défis pour la
121
122
Rapport parlementaire de l’OTAN, «La guerre contre le terrorisme», paragraphe 59.
ibidem
136
sécurité des forces, des populations et des territoires des pays membres.
Il a été décidé123 :
‰
de créer une force de réaction rapide de 20.000 hommes (utilisant
des technologies de pointe, facilement déployable, apte à soutenir
des opérations prolongées) comportant des éléments terrestres,
maritimes et aériens prêts à se transporter partout où il le faudra ;
‰
de rationaliser les arrangements de commandement militaire de
l'Alliance.
La
nouvelle
structure
consolidera
le
lien
transatlantique, entraînera une réduction sensible du nombre de
quartiers généraux et de centres d'opérations aériennes. Il y aura
deux
commandements
stratégiques.
Le
commandement
stratégique "opérations", basé en Belgique, appuyé par deux
commandements interarmées en mesure de constituer des groupes
de force interarmées multinationales (GFIM) terrestres et
maritimes. Le commandement stratégique "transformation" sera
basé aux Etats-Unis avec une antenne en Europe ;
‰
d’approuver l'Engagement Capacitaire de Prague (PCC) afin
d'améliorer les capacités existantes et en développer de nouvelles
pour une guerre moderne dans un environnement caractérisé par
un haut niveau de menace. Améliorer les capacités dans 8
domaines : défense contre les menaces chimique – biologique –
radiologique, surveillance terrestre aéroportée, renseignements,
communication protégée, munitions guidées, transport aérien et
maritime stratégique, ravitaillement en vol, défense antiaérienne
et brouillage électronique ;
‰
d’entériner le concept militaire agréé de défense contre le
terrorisme ;
123
Ces informations sont extraites à l’adresse : http://www.robertschuman.org/synth69.htm. Vous pouvez vous référer également à la Déclaration du
Sommet de l’OTAN à Prague. Retrouvez cette déclaration à l’adresse :
http://www.defense.gouv.fr/dga/fr/pdef/declaration_sommet_prague.pdf
137
‰
de souscrire à la mise en œuvre d'initiatives de défense contre les
armes nucléaires, biologiques et chimiques (NBC) ;
‰
de renforcer les capacités de défense contre les cyberattaques ; et
‰
d’engager une étude de faisabilité sur la défense antimissile de
l'OTAN.
Outre ces mesures, les chefs d'Etat et de gouvernement, dans la
Déclaration du sommet, s’étaient engagés à appuyer « pleinement la mise
en application » de la résolution 1441 du Conseil de sécurité des Nations
Unies et avaient appelé l'Irak à se conformer « intégralement et
immédiatement » à cette résolution. Ils avaient aussi promis de prendre
« des mesures efficaces pour aider et soutenir les Nations Unies dans
leurs efforts visant à faire en sorte que l'Irak respecte intégralement et
immédiatement, sans conditions ni restrictions, la résolution 1441 »124.
En dehors de l’ONU et de l’OTAN, d’autres OI ont réagi aux attaques du
11 septembre en adoptant un certains nombre de mesures pour protéger
les populations de leurs Etats membres ou pour soutenir la lutte antiterroriste américaine. C’est le cas de l’Union européenne, l’Organisation
pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), l’Organisation de la
Conférence islamique (OCI) etc.
Dans l’ensemble, les attaques du 11 septembre ont été condamnées par
tout les acteurs de la scène internationale. Cependant la manière dont les
Etats-Unis mènent la guerre contre le terrorisme n’est pas du goût de tout
le monde. Ceux qui ont accepté de les suivre comme ce qui ne
l’acceptent pas ont vu leurs relations avec Washington se transformaient
(positivement ou négativement) ou leurs différents éclater au grand jour.
124
Cf. à la Déclaration du sommet de l’OTAN à Prague du 21 novembre 2002.
138
Chapitre 5 : Les implications de la
guerre anti-terroriste sur les relations
Etats-Unis/Europe et Etats-Unis/Russie
La guerre contre le terrorisme a incontestablement eu un impact négatif
sur les relations transatlantiques. Européens et Américains voient de plus
en plus le fossé se creuser entre eux. Ils ont des points de vue très
opposés dans la façon de lutter contre le terrorisme. Les Américains
parlent de “guerre” et prônent l’usage de la force, à l’instar des autres
moyens, pour écraser le terrorisme international. Les Européens parlent
de “lutte” et n’intègrent l’usage de la force dans cette “lutte” qu’en
dernier recours. Mais de tout ceci, c’est l’affaire irakienne qui a mis la
poudre au feu sur les relations transatlantiques.
Contrairement aux relations transatlantiques, la guerre anti-terroriste a eu
des effets positifs sur les relations américano-russes ; même si la Russie
s’est vivement opposée à la guerre en Irak. Moscou compte, avec la
“bénédiction” de Washington, mater la rébellion tchétchène, nouer un
partenariat stratégique et trouver une solution au problème des gorges de
Pankisi en Georgie.
I.
Les implications de la guerre anti-terroriste sur les relations
transatlantiques
« Samuel Huntington avait raison de prophétiser un choc des
civilisations dans le courant du XXIe siècle. Il s’est juste trompé de
casting. Le choc, dont les prémices commencent à se faire jour, loin de
ressembler à un affrontement généralisé entre l’Orient et l’Occident, est
en réalité en train de prendre la forme d’un profond divorce au sein
même du bloc occidental. Un divorce entre l’Europe et les Etats-
139
Unis »125. Actuellement, les relations transatlantiques vacillent tellement
que l’on se demande si elles ne vont pas se « crasher ». Les disputent
entre l’Europe et les Etats-Unis ne datent pas d’aujourd’hui. Déjà à
l’époque de l’ennemi soviétique Européens et Américains ont eu des
pommes de discorde. A la suite de la chute de l’URSS, de la chute du
mur de Berlin et du renforcement de la Communauté européenne, les
Etats-Unis et l’Europe ont vu leurs intérêts et leur vision du monde
diverger peu à peu. Cette divergence vas éclater au grand jour à partir
des événements du le 11 septembre et notamment avec la crise irakienne.
Cette crise a mis à jour les différents qui existent depuis longtemps entre
l’Amérique et l’Europe. Pour Robert Kagan126, cette divergence est très
profonde et porte notamment « sur le rôle que doit jouer la puissance
militaire dans la politique internationale, et sur ce que devrait être
l’ordre mondial aujourd’hui »127. Malgré tout, Européens et Américains
conservent des valeurs communes et des intérêts convergents pour
dépasser leurs divergences et préserver leurs relations. Et ceci même si
avec certains pays, comme la France, les relations avec Washington sont
sérieusement entamées.
A. Les pommes de discorde entre le “Vieux” et le “Nouveau
continent”
Aujourd’hui ce qui oppose l’Europe et l’Amérique est assez notoire. Ces
entités s’opposent sur des contentieux commerciaux, politiques et même
stratégiques. Il n’y a pas longtemps, quand les Etats-Unis ont augmenté
les droits de douane sur les importations d’acier avec pour objectif de
protéger leur propre industrie sidérurgique qui ne se portaient pas bien,
125
Samy GHORBAL, « Europe/Etats-Unis : la fracture », JEUNE AFRIQUE
L’INTELLIGENT (JAI), n° 2235, du 9 au 15 novembre 2003, p. 27
126
Robert KAGAN est politologue et membre de la Fondation Carnegie pour la paix
internationale. Il fait parti des « faucons » de l’administration Bush qui sont considérés
comme des partisans de la stratégie musclée de Bush.
127
Cf. à l’interview de Dominique SIMONNET, « L’Amérique doit mener la politique
des forts », L’EXPRESS, 06 mars 2003. Retrouvez cet interview à l’adresse :
http://www.lexpress.fr/info/monde/dossier/bush/dossier.asp?ida=383143
140
l’Union européenne a porté plainte devant l’Organisation mondiale du
commerce et avait menacé de surtaxer certains produits américains. Cet
exemple n’est qu’un parmi les contentieux commerciaux qui oppose le
« Vieux continent » et l’Amérique.
Autre sujet de discorde, l’environnement, plus précisément le protocole
de Kyoto. Ce protocole est issu de la Convention-cadre des Nations
Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) adoptée à l'issue du
Sommet de la Terre, qui s'est tenu en juin 1992 à Rio de Janeiro, au
Brésil. Son but est de réduire les émissions de six gaz à effet de serre de
5,2 % entre 2008 et 2012, par rapport aux niveaux de 1990. Les EtatsUnis refusent de ratifier le protocole alors même qu’ils sont les plus gros
pollueurs de la planète. Washington craint que les mesures auxquelles
contraint le protocole ne nuisent son industrie. Cette attitude est jugée
égoïste par l’ensemble des pays européens qui se sont fermement
engagés pour la protection de l’environnement.
D’autres contentieux opposent le « Vieux continent » et le « Nouveau ».
Ces contentieux font croire plus que jamais que le fossé se creuse
considérablement entre les deux vieux amis de la Guerre froide. Selon S.
Ghorbal128 sur le plan intérieur : les Européens sont opposés à la peine de
mort et à la libre circulation des armes, alors que les Américains y sont
favorables ; ils sont généralement partisans de la protection sociale, alors
que les Américains y sont allergiques ; ils sont devenus areligieux, alors
que l’Amérique se verse dans la bigoterie et le manichéisme ;
ils
s’interdisent de mélanger politique et religion, chose que les Américains
font en permanence. Sur le plan extérieur, M. Ghorbal avance que les
sociétés du Vieux Continent sont multilatéralistes, favorables à l’ONU, et
n’envisageant le recours à la force qu’en dernière extrémité alors que les
Américains sont unilatéralistes, interventionnistes, partisans des guerres
préventives, et « cultivent un mépris sans limites pour les institutions
128
Samy GHORBAL, op. cit., p. 27
141
onusiennes » ;
enfin,
l’Amérique
est
contre
la
justice
pénale
internationale et l’interdiction des mines anti-personnel alors que
l’Europe et pour.
Comme nous l’avons déjà souligné, la crise irakienne a véritablement
révélé les divergences entre l’Europe et l’Amérique. En effet lors cette
crise, globalement, l’Union européenne était contre une intervention
contre Saddam Hussein sans l’aval des Nations Unies. Les pays de
l’Union qui se sont le plus illustrés dans cette opposition, comme nous
l’avons vu antérieurement, ont été la France et l’Allemagne que le
secrétaire d’Etat à la défense Donald Rumsfeld a qualifié de « vieille
Europe ». Contrairement à la France et à beaucoup d’autres pays de
l’Union, l’Allemagne avait fait comprendre qu’elle ne participerait pas à
une intervention militaire en Irak quand bien même celle-ci serait
approuvée par l’ONU.
Certains intellectuels, notamment américains, avaient interprété le refus
des Européens, pour des actions militaires, comme une faiblesse. Pour
eux, l’Europe étant faible militairement préfère faire appelle aux lois
internationales pour écarter les dangers qui menacent le monde ; et que
les Etats-Unis étant puissant préfèrent faire disparaître ces dangers par la
puissance de leur armée. Pour illustration, d’après R. Kagan « Quand les
Etats-Unis étaient faibles, ils pratiquaient les stratégies de la voie
détournée, les stratégies de la faiblesse. A présent qu’ils sont forts, ils
adoptent le comportement des nations fortes. Quand les grands pays
européens étaient puissants, ils croyaient au pouvoir et à la gloire
martiale. Mais aujourd’hui, ils voient le monde par les yeux des nations
faibles. Ces deux points de vue très différents ont naturellement donné à
des prises de positions stratégiques opposées, à des évaluations
contraires des menaces et des moyens appropriés pour y répondre, à des
calculs d’intérêt différents et à des points de vue différents sur la valeur
et
la
signification
du
droit
international
et
des
institutions
142
internationales. »129. Et Victor Davis Hanson130 d’ajoutait : « au lieu des
moyens d’envoyer des divisions aéroportées en Afghanistan, de
bombarder l’Irak avec leurs porte-avions ou de lancer des ultimatums à
des régimes rétifs comme le Pakistan, les Européens frustrés ont mis leur
foi, à tort ou à raison, dans des organismes internationaux tels que les
Nations Unies ou la Cour pénale internationale, tout en feignant de ne
pas remarquer que seule la puissance américaine leur a permis de rêver
qu’ils habitent un monde enchanté peuplé de gens raisonnables »131.
Nous précisons à M. Hanson que les Américains n’y sont pas parvenus
en solitaire. Ils avaient derrières les Européens et d’autres. Le « monde
enchanté » dont il parle est une entreprise collective.
D’autres affirment que cette opposition est due en partie à une différence
de perception de ce qui constitue un danger. Si l’Irak était une menace
pour l’Amérique est-ce qu’elle l’était forcément pour l’Europe dont
certains pays y avaient des intérêts économiques ? Et si l’Irak ne
constituait pas une menace aux yeux des Européens quel intérêt avaientils pour suivre les Américains dans leur politique ? Selon Steven Everts,
rapportait par M. Kagan132, aujourd’hui les menaces pour les
responsables américaines ne sont pas tout à fait les même que celles des
responsables européens comme c’était le cas durant la Guerre froide. M.
Everts avance que pour les Américains, les menaces sont la prolifération
d’armes de destruction massive, le terrorisme et les « Etats voyous » alors
que pour les Européens les menaces sont les conflits ethniques, les
migrations, le crime organisé, la pauvreté et la dégradation de
l’environnement.
129
Robert KAGAN, « La puissance et la faiblesse : les Etats-Unis et l’Europe dans le
nouvel ordre mondial », p. 20
130
C’est un historien militaire de réputation internationale.
131
Victor Davis HANSON, « Adieu à l’Europe », Le DEBAT, n° 123, janvier-février
2003, p. 20. (Le présent article a initialement paru dans la revue Commentary, octobre
2002. Il est traduit en français par Pierre Emmanuel Douzat).
132
Robert KAGAN, op. cit., p. 54
143
Pour appuyer cet argument, prenons par exemple le cas de la pauvreté. A
la suite des attaques du 11 septembre, les Européens, bien que n’étant pas
catégoriquement opposés à des actions militaires pour lutter contre le
terrorisme, avaient avancé l’idée selon laquelle une réduction de la
pauvreté serait l’un des meilleurs moyen de réduire ou de faire disparaître
le terrorisme. Plus précisément, pour les Européens la pauvreté est l’une
des causes majeures du terrorisme. Argument contestait par les
Américains. Pour eux la pauvreté ne transforme pas des personnes en des
terroristes et des meurtriers. Toutefois ils admettent qu’elle est une
condition que peuvent exploiter les terroristes pour avoir l’appui des
populations et qu’elle peut également rendre les Etats faibles vulnérables
aux réseaux terroristes et aux cartels de drogue. Si l’on s’y penche de
prés, on peut dire, sans intension d’affirmer que les Européens ont tord,
que les Américains ont certainement raison. Pourquoi ? Parce que la
plupart des kamikazes du 11 septembre sont issus de pays riches et en
outre Ben Laden qui est leur chef n’est pas quelqu’un qui a connu la
pauvreté. Sa fortune est estimée à des milliards de dollars.
Aujourd’hui, le « Vieux continent » et le « Nouveau continent » ont
certains de leurs intérêts qui sont divergents. Ils ont une vision du monde
et de la menace qui sont différentes. Ils ont une perception de mener la
guerre contre le terrorisme qui n’est pas tout à fait la même. Tout cela
complique les bonnes relations qu’ils entretiennent depuis des décennies.
Pour autant est-ce que cela peut entraîner une rupture complète des
relations transatlantiques ? Nous pensons que non. L’Europe et
l’Amérique sont liées par des valeurs communes et des intérêts
convergents notoires qui leur permettront de veiller à leurs bonnes
relations et dépasser leurs différents.
144
B. L’Europe et l’Amérique : des valeurs communes et des
intérêts convergents malgré les pommes de discorde
Comme le reconnaît R. Kagan, « il y a un Occident culturel, politique,
économique » malgré les divergences. L’Europe et les Etats-Unis ont des
valeurs, des cultures, des principes communs. Les deux rives de
l’Atlantique sont animées par la démocratie, le respect des libertés et du
droit. Elles sont les gardiennes du capitalisme et sont issues d’une même
origine
judéo-chrétienne.
En
outre
leurs
intérêts
économiques
convergent. L’Europe et l’Amérique ont pour objectifs, aujourd’hui
comme hier, de promouvoir l’économie de marché, la croissance des
échanges commerciaux, l’augmentation de la croissance économique
mondiale, etc.
En matière commerciale, les deux continents sont étroitement liés et
dépendent l’un de l’autre. L’un est le meilleur partenaire commercial de
l’autre et vis versa. En outre avec la mondialisation les liens financiers et
économiques des deux rives de l’Atlantique se sont densifiés.
Face au terrorisme qui sévit aujourd’hui dans le monde, face à la
prolifération nucléaire et balistique dans des pays n’ayant pas une culture
occidentale, face au mécontentement des populations du Sud qui
s’estiment exploitées par les Occidentaux, face à l’instabilité des foyers
d’approvisionnement en pétrole de l’Occident, nous pensons que
l’Amérique et l’Europe ont tout intérêt à coopération dans la lutte contre
ces fléaux.
En résumé, si nous reprenons Colomban Lebas133, Européens et
Américains ont intérêt à pérenniser les relations transatlantiques.
133
Colomban LEBAS, « Quel avenir pour la relation transatlantique », Etude menée
pour la fondation Robert Schuman, septembre 2002, p. 51 – 53
145
Pour l’Europe, les enjeux sont :
‰
de bénéficier des retombées de la prospérité américaine à travers
un commerce lucratif et stimulant ;
‰
de bénéficier de la protection américaine sans en supporter la
totalité des coûts ;
‰
de bénéficier d’un rôle dans le gouvernement multilatéral du
monde, conditionné par le bon fonctionnement des institutions
internationales (Conseil de Sécurité par exemple) lui-même
dépendant du bon état de la relation transatlantique ;
‰
d’être reconnu comme partenaire particulier par les Etats-Unis ce
qui permet à la fois de bénéficier d’un accès particulier à la
puissance
américaine
tout
en
gardant
une
position
de
commentateur légitime de l’évolution des affaires internationales
et de la gestion de celle-ci par les Etats-Unis (à défaut de
réellement maîtriser le calendrier et les thèmes du débat
international
comme
les
Etats-Unis),
sans
représailles
américaines, et tout en bénéficiant aux yeux du monde des gains
diplomatiques de cette posture critique et un brin moralisant ;
enfin
‰
pour les Européens de l’Est, la relation transatlantique est une
occasion formidable de bénéficier de la paix que procure le
parapluie américain. Elle est aussi la perspective de bénéficier à
l’avenir d’une relation commerciale nourrie, en particulier par le
truchement de l’intégration européenne.
Pour les Etats-Unis, les enjeux sont :
‰
de maintenir une présence en Europe suffisante pour éloigner la
tentation européenne de la puissance tout en les incitant à mieux
se prendre en charge militairement afin de libérer des ressources
pour augmenter la visibilité américaine dans les zones les plus
146
stratégiques de l’Asie centrale au sens large, du Proche-Orient, de
la Chine. Les associer – en contrôlant qu’ils ne développent pas
de monopoles dans les techniques militaires clef – au sein des
grands programmes militaires américaines (bouclier antimissile,
JSF) (meilleur contrôle, maintien de leur dépendance) ;
‰
de cultiver le partenariat économique stimulant et irréversible
avec une Europe dont les marchés sont relativement proches en
termes culturels et de pouvoir d’achat, tout en maintenant des
positions fermes de négociation autant que possible (acier) et en
défendant l’industrie américaine, et l’agriculture américaine ;
‰
de continuer les fructueuses exportations culturelles (en terme de
musique ou d’habillement, de comportement et de mode vie) qui
induisent des profits économiques directs et indirects, en jouant
sur la fascination qu’exerce le mode de vie américain ;
‰
l’aspect heurté des relations permet d’éviter un monolithisme trop
affirmé du bloc occidental qui donnerait une prise aisée à la
critique, tout en maintenant la certitude d’une solidarité sans faille
dans les moments historiques cruciaux ;
‰
de posséder des alliés inconditionnels en cas de crise ;
‰
de maintenir un lien avec d’autres pays culturellement et
idéologiquement proches ; enfin
‰
d’accroître son influence en Europe centrale et orientale,
idéalement de la Mer noire à la Baltique.
Mais pour que les relations transatlantiques puissent se pérenniser
facilement, il est nécessaire pour l’Europe de relever quelques défis pour
mettre en place une relation équilibrée et complémentaire avec les EtatsUnis. Pour cela, elle devra devenir une entité politique forte et se doter
d’une véritable politique étrangère.
Avant de clore cette partie sur les relations transatlantiques, nous allons
voir les implications de la guerre contre le terrorisme, notamment avec
147
l’opposition de la France à la guerre en Irak, sur les relations francoaméricaines. Pour précision, nous ne donnerons qu’une vue d’ensemble
de ces implications.
C. La relation franco-américaine et la crise irakienne
Depuis la fin de la 2nd Guerre mondiale, et peut être bien avant, les
relations franco-américaines ont connu des hauts et des bas. A chaque
fois que la France n’était pas d’accord avec les Etats-Unis, elle l’a fait
savoir. Et cela a toujours agacé les Américains qui y voient une volonté
de s’affranchir. Quelqu’est pues être les divergences entre les deux pays,
ils sont toujours parvenus à les résoudre ou au moins à les atténuer. « Nos
divergences sont parfois crispantes, acides, explique un diplomate. Mais
quand cela va trop mal, nous sommes toujours capables de nous prendre
la main et de nous dire : est-ce vraiment sérieux ? Et on trouve une
solution. »134 Depuis la crise irakienne, Américains et Français ont du
mal à surpasser complètement leurs différents.
Comme nous l’avons déjà vu dans le Chapitre IV, la France s’était
vivement opposée à une intervention américaine en Irak. Elle se fera le
porte drapeau du « camp de la paix » et empêchera en quelque sorte le
cautionnement de cette intervention par l’ONU. Ce qui n’a pas été du
goût des Américains. A partir de là débute une campagne de
diabolisation de la France en Amérique.
Les Américains avancent que si se n’étaient pas eux « aujourd’hui la
France parlerait l’allemand ». Ils prétextent que c’est leurs "boys" qui
ont libéré la France de l’occupation allemande et, par conséquent, elle
leur doit reconnaissance. Cela n’est pas complètement faux. Mais il faut
savoir que cette libération était aussi une victoire et une ″libération″ pour
134
Mireille DUTEIL, « Diplomatie : une amitié houleuse », LE POINT, N°1515, 28
septembre 2001, p. 74
148
l’Amérique, l’Europe et le monde entier. En outre, les Américains
n’étaient pas seuls dans cette affaire. La France et l’Amérique, en partie,
défendaient chacun ses intérêts en Irak. Et ces intérêts n’étaient pas les
mêmes. Delà, l’Amérique mécontente n’a ménagé aucun effort pour le
faire savoir à la France.
Au mois de mars 2003 la Chambre des représentants avait supprimé du
menu de ses cafétérias les ″French Fries″ pour les remplacer par des
"Freedom Fries" ("frites de la liberté"). Un représentant républicain du
Congrès,
Bob
Ney
(président
de
la
commission
chargée
de
l'administration de la Chambre des représentants), avait affirmé que la
mesure était « un effort petit mais symbolique pour exprimer le fort
mécontentement de nombreux membres du Congrès à propos des
décisions prises par [leur] soi-disant allié, la France»135.
Un boycott des produits français, par la population, a également été
constaté. Il affecter surtout les produits emblématiques de l'image de la
France, comme les vins et les fromages. Il faut reconnaître que si le
boycott était bien suivi, il aurait eu des répercutions assez considérables
sur les exportations françaises. Les Etats-Unis sont le 6ème client de la
France, avec plus de 26 milliards d'euros de biens et de services exportés
par an.
Les Américains n’avaient aucun intérêt à boycotter les produits français
car les entreprises françaises qui sont chez eux emploient des centaines
de milliers d’Américains et payent des sommes considérables d’impôts.
Si ces entreprises ne fonctionnent pas, c’est des emplois et des impôts de
moins. En outre, cela aurait pris assez de temps à la population
américaine pour trouver des produits de substitutions. Et rien ne dit qu’ils
allaient trouver mieux. En plus du boycott, certains américains, qui
135
« Pas de "French Fries" au Capitole! », RADIO CANADA, 11 mars 2003. Voir :
http://www.radio-canada.ca/nouvelles/special/nouvelles/irak/200303/11/005patriotisme-frites.shtml
149
avaient payé des billets d’avions pour se rendre en France, avaient annulé
leurs voyages en guise de protestation à la position française dans la
crise.
Tout ce que nous venons de citer n’est rien par rapport à ce que les
animateurs vedettes des talk-shows et certains journalistes américains
disaient sur la France. Leurs propos ne peuvent être qualifiés autrement
que d’offenses. David Letterman, dans l’une de ses émissions très suivie
aux États-Unis mais aussi dans certains pays européens, affirmait : « La
dernière fois que les Français ont demandé des preuves, elles sont
arrivées dans les rues de Paris avec un drapeau allemand »136. Le
célèbre humoriste Dennis Miller, en arguant donner des conseils à W.
Bush, disais : « Je dis qu'il faut envahir l'Irak, puis la France, et installer
un pipe-line sous la tour Eiffel. Comme ça on aura le plus grand derrick
de la planète ! »137
Malgré toutes ces tentatives de punir ou de diaboliser la France, selon
Ulysse Gosset, des millions de gens sur le territoire américain étaient
sensibles aux arguments « des chevaliers Chirac et Villepin ». Mary
Mac-Grory, une journaliste du Washington Post, avait écrit : « Il y a
beaucoup d'Américains qui se surprennent à crier « Vive la France ! » et
à murmurer la « Marseillaise », en se retournant tout de même pour
vérifier si le ministre de la Justice, l'Attorney général, le très croyant
John Ashcroft, ne les entend pas... »138
Avant la guerre en Irak, Dominique de Villepin avait averti les EtatsUnis en tenant ces propos : « L’option de la guerre peut apparaître a
priori la plus rapide. Mais n’oublions pas qu’après avoir gagné il faut
construire la paix. Et ne nous voilons pas la face : cela sera long et
136
Ulysse GOSSET, « Singes capitulards mangeurs de grenouilles », OUESTFRANCE, mai 2003. Vous pouvez visualiser l’article à l’adresse internet suivante :
http://dossiers.ouestfrance.fr/dossiers/irak_article.asp?iddoc=9216
137
ibidem
138
ibidem
150
difficile, car il faudra préserver l’unité de l’Irak, rétablir de manière
durable la stabilité dans le pays et une région durement affectés par
l’intrusion de la force »139. Actuellement si on voit ce qui se passe en
Irak, on peut affirmer que les Français n’avaient pas complètement tort
de s’opposer à une intervention militaire contre le régime de Saddam
Hussein ; et que s’ils l’ont fait c’étaient, peut être aussi, pour éviter aux
Américains les difficultés qu’ils rencontrent aujourd’hui. L’Amérique a
du mal en Irak et il est probable que la France, dont elle se moquait hier,
vienne à son secours. La Russie qui comme la France c’était opposée à
l’intervention en Irak n’a pas connu le même destin dans ces relations
avec les Etats-Unis.
II.
La guerre contre le terrorisme : une aubaine pour Moscou de
nouer un partenariat stratégique avec Washington, de mater la
rébellion tchétchène et d’apaiser les tensions au sujet des gorges
de Pankisi
Depuis le 11 septembre, la page de la Guerre froide semble
définitivement tournée, la Russie s’est vraiment rapprochée des EtatsUnis et les deux pays se sont engagés dans une coopération ayant pour
credo, la guerre contre le terrorisme. Ils se sont également engagés dans
un nouveau partenariat stratégique. Résultat de cette « entente », les
Américains ferment les yeux sur la Tchétchénie et les Russes tolèrent la
présence américaine dans « l’étranger proche » de Moscou. Malgré cette
« entente », Russes et Américains restent opposés sur certaines questions
internationales.
139
Extrait de l’intervention de Dominique DE VILLEPIN, ministre des Affaires
étrangères français, au Conseil de sécurité le 14 février 2003.
151
A. Le nouveau « partenariat stratégique » entre Moscou et
Washington
Les attaques terroristes du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis ont donné
une impulsion aux efforts pour l'établissement d'un partenariat
stratégique entre la Russie et les Etats-Unis. Les Russes ont accepté de
céder
face
à
certains
sujets
traditionnels
de
friction
comme
l’élargissement de l’Alliance atlantique ou la défense antimissile. En
contrepartie les Américains s’engagent à soutenir l’économie de la
Russie, à financer son désarmement etc.
Le 13 décembre 2001, les Etats-Unis annoncent leur retrait du traité
ABM (Antiballistic Missile Treaty), clef de voûte à la dissuasion
nucléaire depuis 1972. Ce traité, interdisant tout système de défense
antimissile balistique, est jugé obsolète par les Etats-Unis qui veulent
désormais déployer un bouclier antimissile sur leur sol, face à la menace
d'Etats "hors-la-loi" soupçonnés de détenir l'arme nucléaire. Le retrait
américain du traité n’a pas compromis les relations bilatérales entre les
deux pays.
Au mois de mai 2002, les Etats-Unis et la Russie signaient à Moscou un
accord portant sur une réduction des deux tiers en dix ans de leurs
arsenaux nucléaires stratégiques. Le texte prolonge les deux traités
START (1991, 1993). Par cet accord, les deux pays s’engagent à ne
disposer, d’ici 2012,
que de 2000 têtes nucléaires opérationnelles.
L’accord a été présenté comme le symbole d’une nouvelle relation
stratégique
et
d’un
partenariat
de
portée
historique,
liquidant
définitivement l’héritage de la guerre froide.
Le 28 mai 2002 à Rome, au sommet OTAN/RUSSIE réunissant les 19
pays membres de l'Otan et la Russie, est avalisé de manière officielle la
création du nouveau Conseil OTAN-Russie. Il doit permettre des prises
152
de décision communes en matière de guerre contre le terrorisme, de
gestion des crises, de défense, de non-prolifération des armes de
destruction massive et de contrôle des armements.
Au sommet du G8 à Kananaski les 26-27 juin 2002, Bush a annoncé un
budget de 20 milliards de dollars, pour le contrôle et le démantèlement
d’armes de destruction massive chimiques et nucléaires russes, y compris
les sous-marins nucléaires vétustes, et dans le cadre des accords russoaméricains de réduction en la matière.
Le 26 septembre 2002, par un accord de coopération gouvernementale
sur la lutte contre le trafic de drogue, le crime organisé et les réseaux de
blanchiment d’argent, les Etats-Unis ont prévu un versement de 1,9
millions de dollars à la Russie.
Au delà du partenariat stratégique, les Etats-Unis, au nom de la guerre
contre le terrorisme et par soucis de ménager la Russie, ont décidé de
fermer les yeux sur ce qui se passe en Tchétchénie. En échange, la
Russie accepte un « partenariat » pour régler des crises en Georgie, en
Azerbaïdjan et en Asie centrale. En d’autres termes, elle tolère les EtatsUnis dans son arrière-cour. Russes et Américains s’étaient également mis
d’accord de mener « des efforts pour développer les vastes ressources
énergétiques de la Russie et de la région de la Caspienne ».
B. La guerre contre le terrorisme : une occasion pour
Moscou de mater la rébellion tchétchène et de lui priver sa
zone de replie en Georgie (les gorges de Pankisi)
1)
La « benladénisation » du conflit tchétchène
La Tchétchénie, située dans le Nord-Caucase russe, le 1er novembre
1991 avait proclamé son indépendance. Le 11 décembre 1994 les troupes
153
russes interviennent dans la République tchétchène. Dés lors débute une
guerre
très
sanglante
(surtout
pour
les
Tchétchènes)
entre
indépendantistes tchétchènes et Russes. C’est la « première guerre de
Tchétchénie ». Elle s'est achevé en mai 1997 par un accord portant les
signatures du Président russe Boris Eltsine et du président tchétchène
Aslan Maskhadov. Le 27 janvier 1997, M. Maskhadov devient président
lors des premières élections libres, sous la surveillance d’observateurs de
l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). En
1999, à la suite d'attentats meurtriers qui ont endeuillé plusieurs villes de
la Russie, et qui ont été attribués aux indépendantistes tchétchènes,
l'armée russe intervient une fois de plus dans la république séparatistes.
Ce fut le début de la « seconde guerre de Tchétchénie » qui continue
jusqu’à présent. Cette guerre a été dénoncée par de nombreux pays,
notamment les Etats-Unis et les pays de l’Union européenne. Ces pays
accusent la Russie de ne pas respecter les droits de l’Homme en
Tchétchénie.
A la suite du 11 septembre, comme l’affirme Hélène Carrére
d’Encausse : « L’adhésion de Poutine à la lutte anti-terroriste des EtatsUnis lui a permis d’inscrire la résistance tchétchène dans la catégorie
des mouvement terroristes, donc lui a laissé toute latitude pour la
briser»140. Moscou a réussi à faire passer les indépendantistes
tchétchènes pour des terroristes aux yeux de l’Occident. Maintenant, M.
Poutine a les mains libre en Tchétchénie grâce au soutien des
occidentaux et notamment celui des Etats-Unis. La prise d’otages à
Moscou, le 23 octobre 2002, va accentuer ce soutien.
Le président Poutine « répète à l’envi que le combat des indépendantistes
tchétchènes correspond à celui des islamistes d’Al Qaïda »141. Les
autorités russes ont toujours soupçonné Al Qaïda de soutenir les
140
Cité par Frédéric ENCEL et Olivier GUEZ, « La grande Alliance, de la Tchétchénie
à l’Irak : un nouvel ordre mondial », p. 111 – 112.
141
Cité par Frédéric ENCEL et Olivier GUEZ, op. cit., p. 112.
154
tchétchènes. Elles affirment, depuis des années, que le réseau terrorisme
fournissait aux islamistes tchétchènes des explosifs, des armes
automatiques et même des moyens informatiques. Le réseau de Ben
Laden, d’après Moscou, a acheminé en Tchétchénie plus de 10 millions
de dollar. La Russie et les Etats-Unis ont maintenant un même ennemi.
En septembre 2002, à la suite de la campagne afghane, Russes et
américains ont participé à des opérations armées communes et
conjointes, pour soutenir des troupes géorgiennes engagées dans les
gorges de Pankisi à neutraliser des éléments d’Al-Qaïda.
2)
La Russie tolère la présence américaine en Georgie
dans l’espoir de priver les rebelles tchétchènes de
leur refuge des gorges de Pankisi
Trois acteurs géopolitiques se partagent le pays : le pouvoir géorgien
évidemment, croulant sous les difficultés économiques et politiques ; la
Russie, ancienne puissance tutélaire qui cherche à garder son influence ;
les Etats-Unis qui s’intéressent à la Transcaucasie comme acteur
privilégié dans les échanges pétroliers, mais également comme fenêtre
sur l’Iran et l’Irak.
Après leur indépendance, pour échapper à une influence de la Russie sur
leur Etat, les Georgiens se sont rapprochés de l’Occident : entrée au
Conseil de l’Europe, demande d’assistance à l’Union européenne, appel à
une intervention économique américaine dans les domaines culturel,
économique, militaire et politique, etc. Les Russes n’ont pas apprécié
cette attitude. Ils « se représentent les Georgiens comme un peuple bien
ingrat, lui qui bénéficia durant les dernières décennies soviétiques d’une
sorte de statut privilégié sinon en droit, du moins en fait : la République
autonome était alors la vitrine de l’URSS avec son niveau de vie plus
155
élevé que la moyenne au sein de l’Empire, ses productions d’agrumes,
son secteur touristique balnéaire »142.
Dés le lendemain du 11 septembre, la Georgie offrait aux Etats-Unis son
espace aérien. Les Georgiens pensent que la Russie veut leur empêcher
de se constituer en Etat-nation viable. Ainsi lorsque Tbilissi a voulu sortir
de la Communauté des Etats indépendants (CEI), a accepté le tracé
américain du pipeline Bakou-Tbilissi-Ceyhan, a appelé les Américains à
l’aider à former une armée contre le terrorisme dans les gorges de
Pankisi, Moscou leur a mis la pression.
Les Russes affirmes que les gorges de Pankisi abritent des rebelles
tchétchènes. Ils ont maintes fois demandé aux autorités de Tbilissi de
leur permettre de passer par leur territoire pour prendre les séparatistes
tchétchènes à revers. Chose que la Georgie a toujours refusé. En début
2002, face à un nouveau refus de Tbilissi, M. Poutine ordonne une
intervention unilatérale qui sera empêchée grâce aux Américains. En
septembre de la même année, dans une lettre adressée au Secrétaire
général et au Conseil de sécurité des Nations unies, le président Poutine
accusait la Georgie de soutenir les rebelles tchétchènes. Il affirmait : « Le
succès de notre opération anti-terroristes en Tchétchénie a contraint les
terroristes survivants à se réfugier en Georgie où, grâce à la
complaisance des autorités, ils se sentent à l’aise et continuent à recevoir
des aides militaires et financières. Personne ne peut nier que ceux qui
sont impliqués dans les actes de terrorisme aux Etats-Unis et les
explosions d’immeubles en Russie se soient retranchés sur le territoire
géorgien »143. Il menaçait également de mener une intervention militaire
en Georgie « en conformité avec le droit international et la résolution
1368 du Conseil de sécurité de l’ONU adoptée en réponse aux actions
142
Frédéric ENCEL et Olivier GUEZ, op. cit., p. 224
Laurent NICOLET, « Vladimir Poutine menace de suivre en Georgie l’exemple
américain », LE TEMPS (Genève), 18 septembre 2002, p. 8
143
156
terroristes barbares commises le 11 septembre aux Etats-Unis »144. En
dehors de ces accusations et de ces menaces, les avions russes violaient,
de temps en temps, l’espace aérien de la Georgie à la recherche de
combattants tchétchènes.
Même avec les événements du 11 septembre et la présence de rebelles
tchétchènes liés à Al Qaïda sur le territoire géorgiens, les Etats-Unis se
sont toujours montrés hostiles à une intervention militaire de Moscou en
Georgie. Ils ont même envoyé des instructeurs militaires dans le pays
pour aider les autorités à lutter contre le terrorisme145. Moscou, en accord
avec Washington, a toléré le déploiement de ces soldats américains sur
son arrière-cour.
Selon Frédéric Encel, en dehors de la guerre contre le terrorisme, la
présence des Etats-Unis en Georgie est motivée par trois raisons :
défendre le Bakou-Tbilissi-Ceyhan (BTC), compléter l’encerclement
« amical » de la Russie et avoir une vue imprenable sur l’Iran et l’Irak.
Quoiqu’il en soit, il est incontestable que les Etats-Unis ont réussi une
percée assez importante en ″Asie russe″.
Si dans l’ensemble la Russie a bien coopéré avec les Etats-Unis sur
certains dossiers. Il en a été tout autre en ce qui concerne l’Irak et, à un
moindre degré, l’Iran.
C. La coopération dans la guerre contre le terrorisme n’a
pas fait disparaître les divergences russo-américaines
Comme nous l’avons souligné dans le Chapitre IV la Russie avait des
intérêts géopolitique et économique en Irak sous Saddam Hussein. Elle a
insisté sur une solution pacifique de la crise dans le cadre de l'ONU, et
144
145
Ibidem.
Cf. au Chapitre II
157
s'est opposé fermement à la guerre. Le président Poutine avait condamné
avec des termes forts l'action militaire contre l'Irak et avait accusé les
Etats-Unis d’avoir violer le droit international ainsi que la Charte des
Nations Unies.
« Tous les pays souverains ont perdu le sens de
sécurité », avait noté le président russe. Les Américains, de leur côté
avaient reproché à la Russie d'avoir vendu des armes à l'Irak. Ils avaient
envoyé des avions de reconnaissance près de l'espace aérien de la Russie
et bombardé un quartier qui se trouve près de l'ambassade russe à
Bagdad. Un acte que les Russes n’avaient pas du tout apprécié.
Les relations entre Moscou et Washington ont été très tendues lors de la
crise irakienne. Le président russe ira même jusqu’à dire que les relations
entre les deux pays ont rencontré la plus grave crise depuis la fin de la
guerre froide. Toutefois, la Russie étant consciente qu’elle a besoin des
Etats-Unis plus que ces derniers ont besoin d’elle, a tempéré ses ardeurs.
M. Poutine avait adouci ses critiques contre la guerre et avait même
affirmé qu'un échec des Etats-Unis n'était pas dans l'intérêt de la Russie.
L’Iran est considérée comme un « pays voyous » par les Etats-Unis. Le
président Bush, après le 11 septembre, l’a classé dans « l’Axe du mal » en
compagnie de la Corée du Nord et de l’Irak (sous Saddam Hussein). La
Russie est un allié traditionnel de l’Iran et personne n’ignore qu’elle vend
des armes à Téhéran. Les Etats-Unis reprochent à Moscou le transfert par
la Russie de technologies sensibles vers ce pays dans les domaines
nucléaire et balistique. Depuis le 11 septembre, Washington a accentué la
pression sur Moscou notamment en ce qui concerne l’aide fournie à
Téhéran pour la construction dans le sud du pays de la centrale nucléaire
de Boucher. En réponse aux Etats-Unis, tout en rejetant les soupçons, M.
Poutine a proposé de placer la centrale, qui devait être mise en route en
septembre 2003, sous un régime d’inspection internationale.
158
En guise de conclusion, nous pensons, comme l’on déclarait si souvent
les deux pays, que Washington et Moscou doivent coopérer dans les
domaines tels que le maintien de la stabilité stratégique dans le monde, le
désarmement nucléaire, la prévention de la prolifération des armes de
destruction massive et la guerre contre le terrorisme. Les Russes et les
Américains ont beaucoup à gagner dans cette coopération. Les Russes
peut être beaucoup plus que les Américains.
Si cette coopération parvient à bien se mettre en place et perdure,
l’Amérique pourra ranger aux oubliettes les différents qui l’ont opposé à
l’ex-URSS puis à la Russie depuis la 2nd Guerre mondiale. Elle pourra
également se trouver un autre adversaire idéologique pour mettre en
exergue sa puissance. Cette adversaire pourrait être le monde musulman.
Tout porte à y croire depuis le 11 septembre.
159
Chapitre 6 : Les implications de la
guerre
anti-terroriste
sur
l’opinion
publique musulmane et sur les relations
Etats-Unis/Régimes proaméricains
Le monde musulman se sent visé à travers la guerre anti-terroriste. Aux
Etats-Unis, dans les mois qui ont suivi les attaques du 11 septembre, des
musulmans ont été massacrés, torturés et injustement arrêtés. Jusque là
les opérations militaire américaines menées dans le cadre de la guerre
contre le terrorisme n’ont visé que des pays musulmans (ce qui est tout à
fait logique car, étant donné que les Américains font la guerre au
terroristes islamistes ce n’est pas en Corée du nord qu’ils vont aller les
chercher). Il s’y ajoute que M. Sharon réprime l’Intifada palestinien sans
retenue (avec la bénédiction américaine selon les musulmans). Tout cela
fait qu’aujourd’hui l’opinion publique musulmane et très remontée contre
le "Grand Satan". Et ceci n’est pas sans conséquences sur les relations
entre les Etats-Unis et leurs pays alliés et amis du monde musulman.
I.
Les implications de la guerre contre le terrorisme sur l’opinion
publique musulmane
La guerre contre le terrorisme a attisé l’anti-américanisme et un
sentiment d’injustice de plus en plus grandissant dans le monde
musulman. Ce sentiment d’injustice est aggravé par des sujets à
frustration datant bien avant le 11 septembre et pour lesquels les
musulmans estiment que l’Occident, et en particulier les Etats-Unis, est
directement ou indirectement impliqué.
160
A. La guerre anti-terroriste attise l’anti-américanisme et
exaspère le sentiment d’injustice des musulmans
Les réactions des opinions arabes et musulmanes aux attentats du 11
septembre ont été mitigées et ambiguës. D’un côté, les musulmans ont
condamné l’acte du fait des milliers d’innocent qui y ont péri; de l’autre,
il y a eu une certaine fierté que des musulmans aient eu le courage de
s’attaquer aux puissants américains et de défendre leurs frères opprimés.
Selon Lahouari Addi, Ben Laden est présenté comme un « défenseur de
l’islam bafoué » dans le monde musulman et dans le monde arabe en
particulier. « Il y apparaît comme le justicier et le rebelle capable
d’organiser des opérations de représailles avec une précision militaire.
Il rappelle le héros musulman portant des coups mortels à l’adversaire,
en l’occurrence les USA, obligés à l’avenir de tenir compte des réactions
des musulmans dans le Proche-Orient. Certains n’hésitent pas à
revendiquer ses actions avec fierté, à exhiber son portrait et à écrire son
nom sur les murs, nom qui revêt à lui seul une signification
antiaméricaine tranchée »146. A cette élévation de Ben Laden à l’ordre de
« grand défenseur » du monde musulman contre l’oppresseur américain,
certaines personnes rajoutent que les attaques du 11 septembre ne sont
rien d’autre qu’une punition divine du fait du mal que cause les
Américains dans le monde par leur politique extérieure. Delà, vous
imaginez
certainement
la
réaction
américaine
connaissant
leur
attachement à la religion.
Depuis le 11 septembre, les musulmans ont le sentiment d´être
injustement catalogués comme des terroristes à cause d´une minorité
d´extrémistes. Dans les pays arabes, plus particulièrement, un sentiment
d'incompréhension, d'injustice et de colère vis-à-vis de l'Occident et en
146
Lahouari ADDI, « La perception des attentats du 11 septembre dans le monde arabe
et musulman », CONFLUENCES MEDITERRANEE, N°40, Hiver 2001-2002. Voir à
l’adresse : http://www.ifrance.com/Confluences/textes/40addi.htm
161
particulier des Etats-Unis a grandi. Les populations accusent les EtatsUnis, sous des prétextes sécuritaires et politiques, de dénigrer l'Islam.
Aux Etats-Unis, dans les premiers jours qui ont suivi le 11 septembre des
musulmans ont été persécutés non seulement par la population
américaine mais aussi par les autorités. Des mesures très controversées
ont été mises en place. Des milieux hostiles à l’islam en ont profité pour
faire l’amalgame entre islam et terrorisme comme le constate Abdel
Majid Al-Khoie, un dignitaire chiite irakien. Il affirme : « Les
événements du 11 septembre ont été utilisés par des milieux hostiles à
l´islam, bien connus en Occident, qui ont intérêt pour des raisons
politiques à faire des amalgames sur le plan des valeurs, des idées et de
la religion afin d´en tirer prétexte pour attaquer l´Islam et les pays
arabo-musulmans »147. Dans ce contexte du 11 septembre, des
restrictions dans la délivrance de visas pour se rendre aux Etats-Unis ont
été à maintes reprises constatées dans certains pays arabes et musulmans.
Ceux qui parvenaient à avoir ces visas, une fois arrivé à destination
étaient sujets à des fouilles exagérées, des délits de faciès, des insultes,
des regards soupçonneux au contrôle des passeports et autres.
Au sein de la communauté musulmane, aux États-Unis, un malaise s'est
installé du fait du lien établi entre les pirates de l'air, le Moyen-Orient, les
Arabes et l'islam. La communauté arabo-américaine et musulmanoaméricaine s'est sentie visée et s'est subitement trouvée dans une position
très inconfortable.
En effet, cette communauté, dans les jours qui ont suivi les attaques, a été
contraintes de s’excuser pour des actes qu’elle n’avait pas commis et de
« jurer ouvertement fidélité et dévouement » à l’Amérique. Des lieux de
culte musulmans ont été attaqués, des ressortissants musulmans injuriés,
147
Christian CHESNOT, « Le monde arabo-musulman refuse les amalgames », RADIO
FRANCE INTERNATIONALE (RFI), le 5 septembre 2002. Retrouvez l’article sur :
http://www.rfi.fr/Fichiers/evenements/10septembre/islam.asp
162
licenciés et dés fois même massacrés par la population. Pourtant, parmi
ces gens maltraités figuraient des Américains, originaires du Moyenorient, qui n’ont jamais mis les pieds dans cette partie du monde et ne
savent même pas parler l’arabe. Bref des gens qui sont nées et grandis
aux Etats-Unis et qui ne connaissent que les Etats-Unis.
« Le passage de l’US Patriot Act et les décisions politiques prises par le
ministère de la justice, le service d’immigration et de naturalisation et le
ministère des Finances ont créé un climat qui laisse croire que les gens
venus du Moyen-orient et de l’Asie du Sud sont des populations
particulières ne pouvant bénéficier des droits civiques garantis par la
Constitution. Cette politique a conduit [des centaines de] personnes en
détention, sans que leur nom ni les accusations retenus contre elles
n’aient été révélés. Plus de la moitié de ces détenus ont été déportés, des
milliers de résidents étrangers venus de pays arabes ont été interrogés
alors qu’une déclaration arbitraire (car fondée sur des preuves
confidentielles) affirmaient que certaines organisations religieuses ou
politiques soutenaient activement le terrorisme, en particulier celles
accusées d’avoir des liens avec les opposants à l’occupation par Israël
de la bande ouest de Gaza, ce qui légitime le blocage de leurs biens
financiers et la criminalisation de leurs membres.
Le Patriot Act II […] étend le pouvoir du gouvernement à retirer la
citoyenneté américaine, là encore sur une preuve qui reste confidentielle.
Ainsi, une personne mise en accusation peut se trouver privée de l’accès
aux cours de droit civil et aux protections légales déportée ou détenue
indéfiniment, jugée par un tribunal militaire et même exécutée »148.
Face à cette situation des musulmans en Amérique, des pays du MoyenOrient et des ONG de défenses des droits et des libertés ont émis de vives
148
Andrew SHRYOCK, « Les Arabes de Detroit et la "guerre contre le terrorisme" de
l’Amérique : la remise en question de leur citoyenneté américain », HERODOTE, n°
109, 2e Trimestre 2003, p. 120.
163
protestations. Les autorités américaines, craignant que la situation
déborde et en voulant ménager les pays musulmans amis qui étaient sous
pression de leurs populations, prirent un certain nombre de mesures pour
non seulement stopper la persécution des musulmans mais également
pour faire savoir au peuple américain, une fois de plus, qu’islam
n’équivaut pas à terrorisme.
Dans les jours qui ont suivi les attaques terroristes, le gouvernement avait
pris des mesures pour protéger les populations musulmanes sur le
territoire américain. Ainsi, dans un mémorandum paru deux jour après la
catastrophe, le bureau de l’Attorney général John Ashcroft prévenait que
« toutes menaces de violence ou de discrimination envers les AraboAméricains ou les Américains musulmans ou les Américains d’origine
sud-asiatique ne sont pas seulement immorales et antiaméricaines, mais
elles sont aussi illégales et seront traitées comme telles »149.
Le président Bush avait entrepris un certain nombre d’actions pour
rassurer le monde musulman, mais aussi ses alliés occidentaux, que la
guerre qu’il mène contre le terrorisme n’est pas une guerre contre l’islam.
Peu après les attaques terroristes, il a visité le Centre islamique de
Washington pour rencontrer les chefs musulmans américains et leur
fournir un message de tolérance et de solidarité. Il avait lancé le
“Friendship Through Education”, encourageant des enfants en Amérique
et des enfants dans des nations musulmanes à se relier par email.
L’objectif étant de leur permettre de mieux se connaître et de se
comprendre. Le 19 novembre [2001], au cours du mois de Ramadan, M.
Bush avait invité, des dirigeants politiques musulmans et des
ambassadeurs des nations musulmanes sur le sol américain à une rupture
du jeûne à la Maison Blanche. Le 17 décembre [2001], le Président avait
accueilli des enfants musulmans à la Maison Blanche en l'honneur de
l’Aïd el Fitr (fête de la fin du Ramadan). Il leur avait lu des histoires et
149
Mémorandum 01 408 du département de la Justice américain, 13 septembre 2001.
164
leur avait fait des cadeaux pour la fête. Tout cela avait été une très belle
opération de charme en apparence. Mais pour autant le monde musulman
ne s’était pas rassuré, sa frustration avait augmenté et l’antiaméricanisme
de plus en plus important.
Cet anti-américanisme ne date pas d’aujourd’hui. Jusqu’aux terribles
événements du 11 septembre, il
s’était fait moins apparent et les
dirigeants des pays musulmans ont pu le contenir sans une très grande
difficulté dans leurs Etats. Mais depuis le 11 septembre, les choses ont
bien changé. L’homme de la rue ne décolère pas contre la guerre au
terrorisme déclarée par Washington et dont il considère que l'islam est la
véritable cible. Les gouvernements du Moyen-Orient sont sur la
défensive et tentent de modérer leurs opinions publiques tout en
préservant une alliance stratégique souvent cruciale avec la première
puissance mondiale.
Les musulmans, la plupart d’entre eux et notamment ceux dans les pays
arabes, gardent une grande haine pour les Occidentaux et en particulier
pour les Américains pour des raisons bien antérieures au 11 septembre
comme nous l’avons souligné. Cela est dû en grande partie à un certain
nombre de questions pour lesquelles les musulmans se sentent humiliés
et injustement traités.
B. Les sujets à frustration
Parmi les questions qui révoltent le monde musulman et surtout arabe, il
y a : le conflit israélo-palestinien, l’Irak et la Tchétchénie (qui ne
concerne
pas
directement
les
Occidentaux).
Pour
beaucoup
d’observateurs, une réussite de la guerre contre le terrorisme passe
nécessairement par le règlement de ces problèmes notamment le conflit
israélo-palestinien.
165
1)
Le conflit israélo-palestinien
En 1948, l’Etat d’Israël a été créé par un plan des Nations Unies dans la
colonie de la Palestine qui se trouvait sous mandat britannique. Le plan
prévoyait également la création d’un Etat arabe à côté de l’Etat d’Israël.
L’idée était de permettre aux juifs, qui avaient été persécutés par le
régime nazi d’Hitler, d’avoir un territoire où ils pouvaient vivre et se
constituer en Etat-nation. Vu la façon dont le peuple juif avait souffert
lors de la 2nd guerre mondiale, l’idée était louable et toute personne
ayant du cœur était sensée l’accepter. Les Etats arabes de la région
n’étaient pas de cet avis. Au lendemain de la déclaration d'indépendance
de l'État juif, le 14 mai 1948 les armées de Transjordanie, d'Égypte et de
Syrie, aidées de contingents libanais et irakiens, entrent en Palestine : ce
fut le premier conflit israélo-arabe. L’Etat juif remportera le conflit.
« Mais tous les Etats arabes ont refusé de reconnaître l’existence
d’Israël et ont tenté de l’étrangler en décrétant un boycott économique et
en lançant des opérations sporadique de guérilla »150. La guerre de 1948
sera suivie de deux autres en 1967 et en 1973. Mais auparavant Israéliens
et Egyptiens s’étaient affrontés lors de la crise de Suez en octobre 1956.
La guerre de 1967 dite des "Six Jours", en raison de la durée des
opérations militaires proprement dites, c'est également soldée par une
écrasante victoire de l'armée israélienne. Israël avait quadruplé la
superficie de son territoire avec l'occupation de Jérusalem-Est, de la
Cisjordanie, de Gaza, du Golan et du Sinaï.
La guerre de 1973 ou guerre du Kippour est le dernier affrontement
militaire entre Israël et ses voisins arabes. Menée par surprise par les
arabes, la spécificité de l’opération a tenu à la percée, temporaire, que les
troupes égyptiennes et syriennes parvinrent à réaliser dans les lignes
israéliennes. Bien que suivie d'un succès militaire d’Israël, cette
150
Henry KISSINGER, « La nouvelle puissance américaine », p. 185
166
provisoire "victoire" fut vécue, du côté arabe, comme la revanche des
humiliations subies en 1948 et 1967. Le président Egyptien Anouar elSadate va user du prestige que lui a valu la guerre du Kippour pour
négocier la paix et récupérer ses territoires que l’Etat hébreu avait
conquis lors des conflits précédents. Mais la normalisation des relations
avec Israël fut très mal perçu par les islamistes et les pays arabes, qui
voyaient en Sadate un traître. Le 6 octobre 1981, tandis qu'il assistait à un
défilé militaire à l'occasion de la fête nationale, Sadate fut assassiné par
des soldats islamistes.
Les arabes n’ayant pas pu libérer la Palestine par des guerres
conventionnelles recourent maintenant au terrorisme. Depuis les années
60-70, la république d’Israël est soumise à des attaques terroristes
orchestrées par des mouvements radicaux palestiniens dont la plupart
sont financés par des Etats arabes ou musulmans. Aujourd’hui, le conflit
israélo palestinien et le point central de la frustration du monde
musulman et en particulier du monde arabo-musulman. Les arabes
affirment que la souffrance que l’Etat d’Israël fait subir au peuple
palestinien est cautionnée par les Etats-Unis. Ils se sentent humiliés par la
situation en Palestine. Ce qu’ils souhaitent maintenant, dans leur grande
majorité, c’est de voir la création d’un Etat palestinien, alors qu’hier ils
voulaient la disparition de l’Etat d’Israël. Chose impossible aujourd’hui
car Israël est devenue un grand Etat militaire avec à sa possession l’arme
atomique qui le protége de toute tentative d’anéantissement.
Les attentats du 11 septembre ont eu des conséquences négatives pour le
peuple palestinien.
A la suite de ces attaques, les attentats des
mouvements palestiniens comme le Hamas, la Brigade des Martyrs d'Al
Aqsa et autres, ayant pour objectif la libération du territoire palestinien,
ont été tout de suite présentés par Ariel Sharon, le premier ministre
israélien, comme des actions terroristes. Il estime que sa lutte est la
même que celle des Américains. Ce qui lui a valu sans mal le soutien
167
inconditionnel de Washington. Aujourd’hui, Israël s'est placée à l'avantgarde du front anti-terroriste mondial. La lutte du peuple palestinien est
en mauvaise posture, surtout au sein de l'opinion publique américaine.
Avec les événements du 11 septembre, M. Sharon a les mains libres dans
le conflit qui l’oppose aux palestiniens et il ne se prive pas de l’occasion
pour mater la résistance. Face à cette situation, aujourd’hui plus qu’hier,
les musulmans ressentent un sentiment d’injustice et sont révoltés par le
soutien inconditionnel des Etats-Unis à Israël qui opprime les
Palestiniens selon eux. L’opinion publique musulmane jusque là craintive
de la répression des pouvoirs politiques commence à élever la voix contre
le terrorisme d’« Etat d’Israël » mais aussi contre la guerre et
l’occupation de l’Irak par les troupes américano-britanniques. Les EtatsUnis concentrent aujourd'hui leurs efforts sur le règlement de la situation
au Proche-Orient. Mais leurs récentes tentatives ne suffisent visiblement
pas à enrayer l'engrenage terroriste.
2)
L’affaire irakienne
Pour ce qui est de l’Irak la frustration du monde musulman date de la
première Guerre du Golfe. Ensuite, à la fin de la guerre, se seront les
sanctions économiques imposées au pays et qui ont durement éprouvées
la population. Enfin, c’est la dernière guerre et l’occupation américanobritannique.
a)
La Guerre du Golfe
Avec le conflit israélo-palestinien, c’est la question irakienne qui
cristallise et exacerbe toutes les frustrations du monde arabo-musulman.
Le problème de l’Irak ne date pas de la récente crise. Elle remonte de la
première guerre du Golfe au début des années 90. Ce conflit à servi de
marketing à Al Qaïda.
168
Le 2 août 1990, l’Irak de Saddam Hussein envahissait le Koweït. L'émir
al-Sabbah et son fils gagnent l'Arabie Saoudite. Le royaume des Saoud
n’était pas à l’abri d’une invasion des forces irakiennes. C’est pour cette
raison que les autorités ont demandé la protection des Etats-Unis. Les
Américains conscients du danger que représentait la mainmise de l’Irak
sur prés de 50% des réserves de pétrole mondiale (l'Arabie Saoudite
possède à elle seule plus de 25 % des réserves mondiales de pétrole,
l'Iraq et le Koweït réunis pourraient disposer de près de 20 % de ces
mêmes réserves) acceptent et décident de déloger Saddam Hussein de
l’émirat du Koweït. Pour cela, une coalition internationale d’une grande
variété de race, de religion, de culture et d’idéologie politique s’est
formée autour des États-Unis. Le 17 janvier 1991, après l’expiration de
l’ultimatum fixé par les Nations Unies à l’Irak pour se retirer du Koweït,
l’opération « Tempête du désert » débute. En un peu plus d’un mois,
après le début de l’opération, l’Irak succombe. Bilan : 200 morts du côté
de la coalition; 100 000 soldats irakiens périssent, 300 000 sont blessés et
des dizaines de milliers de civils meurent.
Lors de la crise, remarquant que la rue arabe et musulmane était
largement contre la guerre (contrairement à leurs dirigeants), le président
irakien avait tenté de gagner leur soutien. Bagdad affirmait mener une
guerre des pauvres contre les riches, thème qui touche particulièrement
les masses arabes défavorisées. Le raïs irakien avait également appelé
tous les Arabes à la "guerre sainte" (le djihad) pour libérer La Mecque
lieux saints de l'islam à proximité de laquelle étaient présentes des forces
américaines (des non-musulmans). Cette présence américaine, en partie,
a favorisé la création d’Al Qaïda par Oussama Ben Laden.
b)
Les sanctions économiques imposées à l’Irak
par la communauté internationale après la
guerre du Golfe
169
Juste après l’invasion du Koweït par l’Irak, les Nations Unies avaient
décidé de mettre en place des sanctions économiques contre le pays.
L’objectif était non seulement d’obliger à S. Hussein de se retirer du
Koweït mais aussi de l’affaiblir économiquement et financièrement avant
une opération militaire ou avant qu’il n’utilise ses biens pour s’acheter
des armes. Cet acte des Nations Unies rentrait dans le cadre de la logique
de sa Charte qui recommande de mener des actions non militaires, avant
toute action militaire, contre tout pays ayant menacé la paix et la stabilité
du monde. L’ONU adoptera la résolution 661.
Cette résolution obligeait à tous les Etats d’interrompre leurs relations
commerciales avec l’Irak et leur ordonnait de bloquer les avoirs irakiens
et koweitiens à l’étranger. Elle avait été votée à l’unanimité par les
membres du Conseil à l’exception de Cuba et du Yémen qui s’étaient
abstenus. Prés de trois semaines après l’adoption de cette résolution, plus
précisément le 25 août 1990, pour faire respecter l’embargo et le boycott,
le Conseil adopte une autre résolution (Résolution 665) autorisant la mise
en place d’un blocus, c’est à dire l’usage de la force contre toute
personne ou Etat qui violerait les sanctions.
L’embargo et le boycott, qui frappait l’Irak, étaient totaux et portaient sur
les domaines suivants :
‰
le domaine financier : avait pour but non seulement de bloquer les
avoirs de l’Irak pour l’affaiblir financièrement mais aussi
d’empêcher à Saddam Hussein de mettre la main sur les avoirs
koweitiens ;
‰
le domaine pétrolier : les exportations irakiennes dépendaient à
plus de 90% du pétrole. Donc on a cru que si on leur privait de
ces exportations, cela les obligerait à se plier à la volonté de la
Communauté internationale ;
170
‰
le domaine alimentaire : on interdisait de livrer à l’Irak des
céréales, fruits, légumes, viandes etc. L’objectif était d’affamer la
population pour qu’elle se soulève contre le régime ;
‰
le domaine industriel : suspension des livraisons de pièces
détachées nécessaires à la maintenance des usines irakiennes et
des unités d’extractions de pétrole ;
‰
le domaine militaire : interdiction de livrer des équipements
militaires à l’Irak.
Selon M. H. Labbé, vers la fin de l’année 1990 début 1991, « les
sanctions avaient interrompu plus de 90% des importations et plus de
97% des exportations [et] […] privaient Saddam Hussein de 1,5 milliard
de dollars par mois »151. Malgré tout, à l’exception de la libération des
otages occidentaux, les Nations Unies n’ont pas atteint leurs objectifs, à
savoir : le retrait de l’Irak du Koweït et la restauration du gouvernement
koweitien. Finalement, il a fallu l’intervention militaire du 17 janvier
1991 pour voir la réalisation de ces objectifs.
A la fin de l’intervention militaire, la résolution 687 avait reconduit les
sanctions contre l’Irak pour l’obliger à se désarmer et à stopper son
programme nucléaire. Cette résolution était moins sévère que la
précédente car elle « prévoyait un système complexe mais souple, pour la
levée des sanctions. »
Face aux images chocs de la situation alimentaire et sanitaire de la
population irakienne, dans une tentative d’assouplir les sanctions, le
Conseil de sécurité adopte la résolution 986 du 14 avril 1995 qui en
principe permettait à l’Irak d’échanger du pétrole contre de la nourriture
d’où l’appellation « Programme pétrole contre nourriture. »
151
87
Marie-Hélène LABBE, « L’arme économique sur les relations internationales », p.
171
Les sanctions économiques contre l’Irak, ont certes permis d’asphyxier
son économie et d’affaiblir son armée, mais elles n’ont pas pu obliger
Saddam Hussein de quitter le Koweït, provoquer un soulèvement
populaire contre son régime ni même changer le comportement du raïs.
Par contre, elles ont réussi à exacerber un sentiment d'injustice chez les
musulmans et chez les arabes en particulier du fait de leurs effets sur la
population irakienne qui a été très éprouvée.
Aujourd’hui malgré la levée des sanctions économiques, l’opinion du
monde musulman se sent plus que jamais humilié du fait de
l’intervention américano- britannique en Irak en mars 2003, mais aussi de
l’occupation qui n’est rien d’autre aux yeux des musulmans qu’un néocolonialisme. L’Irak est devenue aujourd’hui le principal front des
islamistes radicaux. Et il est à craindre qu’elle devienne pour les EtatsUnis l’Afghanistan de l’URSS.
Pour clore cette sous partie sur les implication de la guerre contre le
terrorisme sur l’opinion musulmane, il faut noter que la situation en
Tchétchénie a également fait naître chez bon nombre de musulmans un
sentiment de mécontentement à l’égard de l’Occident bien que celui ci ne
soit directement lié à cette affaire. Avant le 11 septembre, les musulmans
reprochaient aux occidentaux de ne pas faire assez de précision sur la
Russie pour mettre fin aux exactions de l’armée russe en Tchétchénie.
Après le 11 septembre, ils leur reprochent (notamment aux Américains)
d’avaliser la « brutalité » de Moscou à l’encontre des musulmans de la
Tchétchénie au nom de la guerre contre le terrorisme.
Depuis les événements du 11 septembre, revendication assumée
publiquement ou non et rumeur indiquent l’état d’esprit de la rue arabe et
musulmane où l’antiaméricanisme des masses met en difficulté les
positions modérées des dirigeants, dont le seul souci est de durer avec
172
l’appui encombrant mais néanmoins indispensable des pays occidentaux
et en particulier des Etats-Unis.
II.
Les implications de la guerre contre le terrorisme sur les
relations Etats-Unis/Régimes proaméricains
Nous n’irons pas jusqu’à dire que le 11 septembre a totalement
bouleversé les relations entre les Etats-Unis et ses amis du monde
musulman, mais il est sûr qu’il les a remis en cause. Avec l’Arabie
Saoudite, elles sont très tendues. L’Egypte conteste de plus en plus les
décisions américaines : concernant l’Irak, le conflit israélo palestinien ou
encore les projets américains au Moyen-Orient. Toutefois, certains pays,
comme la Jordanie et le Pakistan, ont saisi l’occasion que leur offrait le
11 septembre pour renforcer ou pour améliorer leurs relations avec
Washington.
A. Les implications de la guerre contre le terrorisme sur les
relations Etats-Unis/Arabie Saoudite
L’Arabie Saoudite entretient de bonnes relations avec les Américains et
cela date de l’époque du président Franklin D. Roosevelt. Ces relations se
sont renforcées avec la Guerre du Golfe dans les années 90. Mais depuis
le 11 septembre 2001, elles sont très tendues.
1)
L’historique
des
relations
Etats-Unis/Arabie
Saoudite
L’Arabie Saoudite, dirigée par la famille Saoud, est une monarchie
absolue dont les fondements reposent sur le Wahhabisme. Le
Wahhabisme est une doctrine fondée par Abdul Wahhab (1720-1792),
qui épousa une des filles de Mohamed ibn Saoud. Cette doctrine est
censée être celle des "salafi" (successeurs de Mahomet), les plus
173
fantastiques conquérants de toute l'histoire humaine. La plupart des
mouvements terroristes islamistes se réclament d’elle.
Elle interdit la mixité, le cinéma, la musique et le tabac. Elle impose le
port de la barbe aux hommes et celui du "djelbab" (voile recouvrant le
corps et le visage), ou au moins de "l'abaya" (vêtement ample cachant les
formes du corps), aux femmes. Tout ce qui s'oppose à cet islam,
sévèrement codifié à partir d'une lecture littérale des textes coraniques,
est considéré comme "bidâa" (invention humaine), et donc contraire à la
charia (loi divine). Pour cette idéologie qui fonde aujourd'hui l'islam
politique, la souveraineté populaire ne peut s'opposer à celle de Dieu,
telle que définie par le Coran et la Sunna (ensemble de textes juridicoreligieux basés sur les actes et les paroles du Prophète). Au nom de cette
conception de la société, la démocratie est "kofr" (péché) et les libertés
illicites. La société doit être dirigée par un "majliss echoura" (conseil
consultatif) composé d'oulémas (docteurs de la foi). L'islamisme ignore
l'Etat-nation qu'il considère comme une hérésie et défend l’Oumma
(communauté des croyants) telle qu'elle existait au temps du Prophète
(PSL). Les Wahhabites prônent le "tahrib" (contrainte) pour imposer
l’islam, tandis que les musulmans modérés sont pour l’"etabligh"
(persuasion).
En 1744, Mohamed Ibn Saoud et Mohamed Ibn Abdul Wahhab avaient
signé un pacte. « Cet accord instituait une alliance entre les religieux et
le pouvoir politique, mais établissait une séparation entre les affaires de
l’Etat, dont la famille Saoud avait la charge, et la religion, laissée aux
mains de l’establishment religieux »152. Ceci explique l’importance et
l’influence du Wahhabisme dans le royaume.
En dehors du Wahhabisme, l’Arabie Saoudite est réputée pour son « or
noir ». En effet, le royaume est le premier exportateur mondial, et le
152
Cité par Alain GRESH, « Lendemain de "Victoire" : les grands écarts de l’Arabie
Saoudite », MONDE DIPLOMATIQUE, juillet 2003, p. 16 et 17.
174
deuxième producteur de pétrole, après la Russie et devant les États-Unis.
Il possède 25% des réserves mondiales de pétrole prouvé. C’est surtout
grâce à ce pétrole qu’il a pu nouer des liens avec les Etats-Unis grand
consommateur de la matière.
Les bases de la relation Etats-Unis/Arabie Saoudite ont été jetées dans les
années 40 entre le roi Ibn Saoud, fondateur du royaume dans les années
30 et le président américain, Franklin D. Roosevelt. A partir de là, se
dessine une alliance à long terme, fondée sur de solides intérêts
communs. Ibn Saoud compte sur les Etats-Unis pour protéger l’intégrité
du royaume et, en contrepartie, les Etats-Unis pouvaient profiter de
l’immensité
des
réserves
saoudiennes
pour
assurer
leurs
approvisionnements. Toutefois, il serait malveillant de limiter l’alliance
américano-saoudienne à un échange "sécurité contre pétrole". L’Arabie a
occupé, durant toute la guerre froide, une place particulière dans le
dispositif antisoviétique, finançant des mouvements aussi peu musulmans
que l’UNITA en Angola ou la Contra au Nicaragua. Elle jouera un rôle
pivot dans l’aide aux moudjahiddins afghans et contribuera grandement à
la défaite de Moscou dans les années 1980. Mais l’effondrement de
l’URSS a fait perdre à l’Arabie une partie de son rôle. Elle a également
joué un grand rôle dans la tentative des occidentaux d’isoler le raïs
égyptien Nasser dans les années 50 - 60, et dans celle des Américains
d’isoler le régime islamiste iranien de Khomeiny.
A l’époque du communisme, l’argent saoudien a servi à lutter, au sein
des sociétés arabo-musulmanes, contre la montée en puissance des partis
marxisants et autres mouvances nationalistes laïques tout au long des
années 1950-1970153. En 1979, avec l’arrivée du régime islamiste de
Khomeiny au pouvoir et l’invasion de l’Afghanistan par l’armée
soviétique, américains et saoudiens ont estimé qu’ils était plus que jamais
nécessaire de renforcer leur partenariat pour faire face à ces périls.
153
Cf. à l’ouvrage de Frédéric ENCEL et Olivier GUEZ, « La Grande Alliance de la
Tchétchénie à l’Irak : un nouvel ordre mondial », p. 58
175
Selon Ali Laïdi, la politique étrangère des Etats-Unis dans le Golfe
reposait sur ce qu’on a appelé la « Théorie des piliers »154. Le pilier
politique en Iran et le pilier financier en Arabie Saoudite. Avec la chute
du Shah d’Iran, le premier pilier avait cédé et en plus le nouveau régime
était très hostile aux Américains. Washington se devait de revoir sa
politique dans la région.
L’arrivée de Khomeiny représentait également un danger pour le régime
des Saoud. Khomeiny avait manifesté sa volonté d’exporter sa révolution
islamique chiite155. Or autour des frontières de l’Arabie Saoudite sunnite,
de fortes minorités chiites pouvaient se laisser gagner à la tutelle du
grand frère persan, du Sud irakien à la pétromonarchie de Bahreïn en
passant par les Zaïdites du Yémen156.
Face à cette situation, l’Arabie Saoudite demande une meilleure
protection des Etats-Unis. « Cette assistance est formalisée dans le cadre
de l’US Central Command qui fait de la région une zone hautement
stratégique pour les Etats-Unis. Dorénavant, le contrat entre Saoudiens
et Américains est clair : les premiers se chargent de la sécurité militaire
du royaume, tandis que les seconds doivent renforcer leur influence dans
le monde arabo-musulman. Washington donne ainsi son aval à
l’expansion du Wahhabisme. Objectif : contrer la concurrence religieuse
des nouveaux maîtres de Téhéran grisés par le succès de leur révolution.
Il est vrai que l’Iran est un challenger de taille. Le pays possède, lui
aussi, une manne pétrolière qu’il peut mettre au service de son
154
Ali LAÏDI, « Le Jihad en Europe : les filières du terrorisme islamiste », p. 64
Le Chiisme est une branche minoritaire de l'Islam qui regroupe environ 10% des
musulmans de par le monde. Les chiites sont issus d'une division survenue au VIIème
siècle entre partisans d'Ali, cousin et gendre du Prophète, et partisans du Calife
Mouawiya, le fondateur de la dynastie Omeyyade, qui n'avait aucun lien de parenté avec
Mohammed. Les chiites estiment que la succession du Prophète doit légitimement être
attribuée à un descendant de la lignée de Ali. Cinq pays arabes ont une partie importante
de leur population qui se rattache à l'une ou l'autre des branches du Chiisme: l'Irak (+ 50
%, Duodécimains), Bahreïn (+ 50 %, Duodécimains), le Liban (25% environ,
Duodécimains), Oman (60%, Kharijites) et le Yémen (55 % environ, Zaydites). Le
chiisme est hérétique aux yeux des sunnites.
156
Cf. à l’ouvrage de Frédéric ENCEL et Olivier GUEZ, op. cit., p. 59
155
176
rayonnement extérieur »157. Pour contrer la concurrence de Téhéran,
Riyad va investir, à travers le monde musulman, des milliards de dollars
dans les mosquées, les organisations humanitaires islamiques, les
mouvements politiques (islamistes) et autres. Les Saoudiens ont pratiqué
« la politique du chéquier ; une politique à courte vue qui sèmera les
graines de l’islamisme radical »158.
En décembre 1979, l’URSS intervient en Afghanistan pour aider le
régime communiste afghan à se maintenir au pouvoir. Chose qui n’a pas
plu aux Etats-Unis. En guise de protestation, comme l’URSS importait
une grande partie de son blé des Etats-Unis, les Américains décrètent un
embargo contre elle. Malheureusement, cet embargo n’a pas réussi et
s’est même répercutée sur les Etats-Unis. Ne pouvant pas intervenir
directement dans l’affaire, les autorités américaines décident de se servir
de l’Arabie Saoudite, mais aussi du Pakistan, pour monter et financer une
rébellion contre les soviétiques. Le royaume wahhabite investira des
millions de dollars dans le « djihad » qui a opposé les moudjahiddines
afghans et les soviétiques. De nombreux ressortissants saoudiens
participeront au conflit. Et c’est de là qu’est née Ben Laden qui, à la suite
du retrait soviétique de l’Afghanistan, a jugé nécessaire avec ses
compagnons de continuer le djihad qu’ils avaient commencé avec l’aide
des Etats-Unis. Maintenant l’ennemi c’est l’Amérique qui s’est installé
sur les « Lieux saints » de l’Islam, et le régime des Saoud qui a permis
cette installation.
Le déploiement en Arabie Saoudite d’environ 4 500 soldats américains
après la guerre du Golfe de 1990-1991 a été très contesté par une partie
de la population saoudienne et surtout par les islamistes radicaux. C’est
cette présence militaire d’« infidèles sur les Lieux saints de l’Islam » qui
a le plus poussé Ben Laden à mettre en place Al Qaïda. L’une des
objectifs majeurs de l’organisation est de bouter les militaires américains
157
158
Ali LAÏDI, op. cit., p. 64
Ali LAÏDI, op. cit., p. 65
177
hors de l’Arabie Saoudite. C’est également cette présence militaire qui a
coupé les liens entre Ben Laden et la famille royale et lui a valu la
destitution de sa nationalité saoudienne.
Critiquée verbalement au début, la présence américaine va être
combattue violemment par les islamistes. Le 13 novembre 1995, un
attentat est perpétré contre un immeuble de la Garde nationale
saoudienne, abritant des conseillers militaires américains, à Riyad. Bilan
de l’attaque 7 morts. L’année suivante, plus précisément le 27 juin 1996,
un attentat à la voiture piégée frappe la base américaine d’El Khobar,
prés de Dahran. Bilan environ 19 morts et plus de 500 blessés. Ce type
d’action contre les Américains se poursuivra en Arabie Saoudite mais
aussi dans certains pays arabes comme le Yémen et le Soudan.
Comme vous l’avez constatez, l’Arabie Saoudite et les Etats-Unis, dans
leurs relations de complicité, ont largement contribué au lancement et à
l’éclosion
des
mouvements
islamistes.
Ces
mouvements
qu’ils
manipulaient hier pour arriver à leur fin se sont aujourd’hui retournées
contre eux et ont jeté le trouble dans leurs bonnes relations d’antan.
2)
Les relations américano-saoudiennes depuis le 11
septembre : des relations houleuses
Après les attentats du 11 septembre, le FBI a découvert que 15 des 19
pirates de l'air directement impliqués étaient d'origine saoudienne. Il a été
découvert que l’argent qui servait à financer Al Qaïda provenait en
grande partie du Royaume Wahhabite. Les services de renseignement
américains ont découvert que de grandes personnalités du royaume
(banquiers, hommes d’affaires etc.) finançaient le réseau de Ben Laden à
travers des ONGI caritatives. Il semblerait également que des membres
de la famille royale sont impliqués dans le financement d’Al Qaïda.
178
Depuis le 11 septembre et la découverte des liens entre Al Qaïda et
l’Arabie, les Etats-Unis font une forte pression sur les Saoudiens pour
qu’ils coopèrent dans la guerre contre le terrorisme, notamment dans la
lutte financière. Ils leur demandent également de prendre des mesures
vigoureuses contre les islamistes radicaux et ceux qui les soutiennent sur
leur territoire [le territoire saoudien]. Il faut le reconnaître, cela n’est pas
une simple affaire pour les Saoudiens car ils se trouvent devant un
dilemme. Ils ont le choix entre soutenir pleinement les Etats-Unis dans
leur lutte et s’aliéner leur opinion publique ; ou ne pas le faire et s’attirer
la colère américaine. Pour le moment, les Etats-Unis estiment que
l’Arabie ne coopère pas assez.
Au mois de septembre 2001, l'Arabie a rejeté une demande des EtatsUnis d’utiliser leurs bases aériennes sur le sol saoudien pour mener des
frappes contre les taliban et le réseau d’Oussama Ben Laden Al Qaïda.
La coopération du régime des Saoud aux enquêtes sur les réseaux
finançant Al Qaïda et à leur démantèlement a été jugée timide et
manquant de conviction par Washington. Toutefois, selon Alain Gresh,
les Saoudiens ont coopéré avec les Etats-Unis sur Al-Qaïda et,
notamment, sur son financement, en conformité avec les différentes
décisions de l’ONU. La preuve en est qu’un décret gouvernemental
oblige désormais toutes les organisations caritatives saoudiennes à
transmettre au ministère des affaires étrangères le détail de chaque
intervention à l’étranger avant de l’entreprendre159.
Comme dans l’affaire afghane, Riyad avait refusé que les bases
américaines sur son territoire servent de rampe de lancement aux
opérations en Irak. Mais d’après certaines personnes, les Saoudiens ont
secrètement coopéré avec les Américains pour chasser Saddam Hussein
du pouvoir. La base Prince Sultan a servi de centre de commandement de
toutes les opérations aériennes et que parallèlement, des troupes d’élite se
159
Alain GRESH, « ARABIE SAOUDITE : Coup de froid sur les relations avec
Washington », LE MONDE DIPLOMATIQUE, juin 2002, p. 14
179
sont installées sur les bases d’Arar et de Tabouk, dans le nord-ouest du
pays, d’où elles ont accompli des missions à l’intérieur de l’Irak160.
« Jamais nous n’aurions pu mener la guerre contre l’Irak comme nous
l’avons fait sans l’aide de l’Arabie »161, commente un diplomate
américain.
Les attentats du 11 septembre ont beaucoup contribué à ternir l’image de
l’Arabie Saoudite aux yeux de l’opinion publique américaine.
Aujourd’hui certaines grandes personnalités de l’administration Bush
estiment que l’Allié saoudien n’est plus digne de confiance et qu’on doit
l’obliger, bon gré mal gré, à coopérer entièrement. Ayant vite compris
que les attaques avaient terni ou allaient ternir son image, les autorités du
royaume entreprirent des « opérations de charme ».
Le prince Al-Walid Ben Talal, neveu du roi Fahd, avait proposé d’offrir
10 millions de dollars à la ville de New York, et plus précisément aux
familles des secouristes emportés par l’écroulement des « Tours
jumelles ». Le maire de New York, Rudolph Giuliani, avait refusé l’offre.
Par la suite la famille royale avait entrepris d’acheter, par dizaines, des
pleines pages dans les grands quotidiens américains (notamment Newyorkais) pour y rappeler la qualité de l’ancienneté des relations
chaleureuses entre les sociétés saoudienne et américaine, et condamner
encore les attentats162.
Toujours dans l’optique de redorer son blason, l’Arabie Saoudite par
l’intermédiaire de son prince héritier Abdallah avait proposé, en février
2002 lors d’un entretien accordé à une télévision américaine, un plan de
paix israélo-palestinien. La proposition s'articulait autour d'une
"normalisation complète" des relations entre Israël et les pays arabes, en
échange d'un retrait des troupes israéliennes de tous les territoires
160
ibidem
ibidem
162
Frédéric ENCEL et Olivier GUEZ, op. cit., p.74
161
180
palestiniens qu'elles occupent depuis 1967. Certains ont vu dans ce plan
un moyen d’apaiser les esprits critiques américains de l'Arabie Saoudite
et pour les empêcher de s'attaquer aux tensions intérieures du royaume.
Pour être effective, l'initiative devait être avalisée par les membres de la
Ligue arabe au Sommet de Beyrouth, les 27 et 28 mars 2002. Finalement,
elle restera sans suite. Et c’était prévisible au vu de la réaction de certains
pays arabes à l’annonce du plan. Les autorités égyptiennes considéraient
l’initiative comme une simple conversation. La Libye avait elle offert sa
propre proposition, censée être plus "globale et complète". Le Hezbollah
par l’entremise de son leader, Mohammed Fadlallah, l’avait définit
comme la soumission des Arabes. Enfin, la Syrie exigeait, pour
l’accepter, la garantie que ses intérêts au Golan seraient protégés.
Cette « offensive de charme » saoudienne avait atténué les critiques
américaines mais n’avait pas fait disparaître les soupçons et la méfiance à
l’égard du royaume. Certaines personnes à Washington affirmaient haut
et fort que l’Arabie Saoudite ferait mieux de mener des réformes internes
et de s’ouvrir à la démocratie pour une meilleure poursuite de ses
relations avec le monde occidental en général. Une frange de la
population saoudienne, notamment des opposants à la famille royale et
certaines minorités du royaume, étaient favorables à l’idée.
Les Etats-Unis ont également mis la pression sur certains de leurs alliés
musulmans, comme l’Egypte, le Pakistan, la Jordanie etc., pour qu’ils
coopèrent dans la guerre contre le terrorisme. En plus, comme avec
l’Arabie Saoudite, Washington avait estimé qu’il était temps pour ces
pays de s’ouvrir à la démocratie (même si on connaît le danger que cela
représente pour eux dans certains pays comme le Pakistan par exemple).
181
B. Les implications de la guerre contre le terrorisme sur les
relations Etats-Unis/Autres régimes proaméricains et les
desseins américains au Moyen-Orient depuis le 11
septembre
Outre l’Arabie Saoudite, les relations des Etats-Unis avec certains de
leurs alliés musulmans ont été bien affectées par les événements du 11
septembre : c’est le cas de l’Egypte par exemple. Toutefois certains pays
ont su, par opportunisme ou par contrainte, profiter de l’occasion pour
améliorer ou pour renforcer leurs relations avec Washington à leurs
risques et périls : c’est le cas de la Jordanie et du Pakistan. Mais la
Jordanie depuis quelques temps commence à élever la voix pour
contester le projet américain de Grands Moyen-Orient (GMO). Projet
faisant partie des desseins américains dans cette région pour s’attaquer
aux conditions qui favorisent le terrorisme.
1)
Les relations américaines avec les autres régimes
proaméricains
du
monde
musulman :
Egypte,
Jordanie et Pakistan
a)
Egypte/Etats-Unis : des relations éprouvées
par la guerre anti-terroriste
L’Egypte
est
l’un
des
Etats
arabes
les
plus
important,
démographiquement parlant. C’est également l’un des Etats au MoyenOrient qui entretient le plus de bon rapport avec Washington mais aussi
avec l’Etat hébreu. Il se présente comme un Etat musulman modéré et se
targue d'être à l'avant-garde de la lutte contre l'islamisme extrémiste. En
dehors d’Israël, le régime du président Moubarak est celui qui reçoit la
plus forte aide financière américaine au monde. Il reçoit 2 milliards de
dollars par an. Cette aide contribue énormément à la survie du régime.
182
Depuis le 11 septembre 2001, les relations entre les deux amis se
trouvent éclipsées. Cela est plus dû à la divergence de point de vu sur
certains grands dossiers proche-orientaux. Parmi eux : la question
palestinienne, l’Irak et le projet du « Great Middle East » (Grand MoyenOrient ou GMO).
Dans le dossier palestinien, l’Egypte est plus que concernée, non
seulement par solidarité avec les Palestiniens, mais aussi pour des raisons
de sécurité. Gaza se trouve à ses frontières et il faudra du doigté pour
éviter des troubles potentiels. Pour ce qui est de l’Irak, l’Egypte s’était
opposée à une action militaire contre le régime de Bagdad. Ce refus
pouvait se comprendre pour quelques raisons : d’abord du fait que la
presque totalité des pays musulmans était contre la guerre, ensuite parce
que M. Moubarak ne voulait pas s’attirer la foudre de l’opinion publique
égyptienne, et enfin parce que des ressortissants égyptiens travaillaient en
Irak (même avec l’embargo) et constituaient un soutien financier non
négligeable pour leurs familles en Egypte.
N’ayant rien pu faire pour éviter la guerre, l'Egypte avait proposé le
remplacement progressif des forces américaines en Iraq par d'autres
arabes, africaines et asiatiques, comme forces de maintien de la paix sous
la surveillance des Nations Unies et de la Ligue arabe. Cette proposition
n’avait aucune chance d’aboutir. L’important pour M. Moubarak c’était
de faire croire à son opinion publique mais aussi à celui du monde arabomusulman qu’il faisait tout son possible pour empêcher une occupation
durable de l’Irak par les forces de la coalition américano-britannique.
Les relations entre l’Egypte et les Etats-Unis, certes loin de ressembler à
celles entre Américains et Saoudiens, ont été très éprouvées par les
événements du 11 septembre. Actuellement, le président Moubarak
revient peu à peu vers les Etats-Unis pour éviter toute friction mais aussi
pour continuer à profiter des bonnes grâces de Washington à l’instar du
183
Pakistan et de la Jordanie qui ont magistralement su profiter de la guerre
contre le terrorisme en se ranger derrière l’Amérique.
b)
La Jordanie et le Pakistan : deux pays qui ont
su tirer profit de la guerre anti-terroriste
1.
La Jordanie
Répondant au nom officiel de Royaume hachémite de Jordanie, la
Jordanie fut l'un des très rare États arabes, avec l'Egypte, à avoir conclu
une paix avec l'Etat hébreu. Elle entretient de bonnes relations avec les
Etats-Unis qui lui assure une importante part de son aide économique à
l’instar de l’Egypte.
Au début des années 90, lors de la Guerre du Golfe, le roi Hussein avait
choisi de rester à l'écart de la coalition internationale. Il entendait ainsi
prévenir une insurrection des Palestiniens de Jordanie (majoritaires dans
le pays), favorables à Saddam Hussein. Par mesure de rétorsion,
Washington avait supprimé l'essentiel des subsides versés au royaume,
qui s'était enfoncé dans une crise économique sans précédent.
A la suite des attaques du 11 septembre, le roi Abdallah II, né en 1962 et
qui a succédé à son père le roi Hussein (mort en 1999), fut l’un des
premiers dirigeants arabes à se rendre aux Etats-Unis pour présenter aux
président Bush les condoléances du peuple jordanien et pour lui apporter
son soutien dans la guerre contre le terrorisme qui se préparait. Le roi
avait pris un certains nombre de mesures dans son royaume pour lutter
contre les terroristes. Ces mesures furent très décriées par les ONG de
défense des droits de l’Homme qui accusaient les autorités de vouloir
asphyxier l’opposition politique et la ″presse libre″.
184
Au moment de la crise récente de l’Irak, le roi se trouvait dans une
position très délicate. Sa population, majoritairement palestinienne,
soutenait Bagdad. Economiquement, la Jordanie, dépendait à la fois des
États-Unis mais aussi de l'Irak, son premier partenaire commercial.
Finalement, la Jordanie s'est officiellement opposée à une attaque contre
l'Irak, tout en accordant, selon certains observateurs, un appui discret aux
Américains à l’instar des Saoudiens. Contrairement à son père (lors de la
Guerre du Golfe) le roi Abdallah II s'est montré, cette fois, plus
compréhensif envers les Américains. En échange de cette bonne volonté
à hauts risques, les Etats-Unis avaient promis de débloquer une aide de 1
milliard de dollars163.
2. Le Pakistan
Le fait que la plupart des réseaux terroristes ultra-violents se situent, ou
se situaient, en Afghanistan et au Pakistan, est largement dû à un
décalage historique de la guerre froide, à partir de l’instant où ces
territoires ont été utilisés pour la lutte de Mohamed (PSL) contre Marx,
c’est-à-dire les soutiens occidentaux à tous ces pays dans le but d’évacuer
les troupes soviétiques de l’Afghanistan dans les années 80. Pour rappel,
les Américains, à la suite de l’invasion soviétique de l’Afghanistan en
1979 s’étaient servis du Pakistan pour former les moudjahiddines afghans
à combattre l’URSS. Washington comptait non seulement contrer le
communisme mais aussi faire vivre à Moscou ce que qu’elle avait vécu
au Vietnam. A l’époque, le Pakistan entretenait de très bonnes relations
avec Washington.
Après le retrait soviétique de l’Afghanistan en 1989, les relations
américano-pakistanaises connurent un coup de froid à cause du nucléaire
militaire pakistanais. Vers le milieu des années 90, grâce aux pétrodollars
163
Dominique LAGARDE et Tangi SALÜN, «Guerre d'Irak : le grand écart des
régimes arabes», L'EXPRESS, le 3 avril 2003. Retrouvez l’article sur :
http://www.lexpress.fr/info/monde/dossier/mondearabe/dossier.asp?ida=387693
185
saoudiens et sous l’oeil attentif des Américains, les services de
renseignements pakistanais (ISI) formèrent et portèrent au pouvoir les
Taliban.
A la suite des attentats du 11 septembre, le Pakistan dont les relations
n’étaient pas au beau fixe avec les États-Unis, en a largement profité pour
s’attirer ses bonnes grâces. Le président Musharraf a accepté de coopérer
dans la guerre contre le terrorisme au péril de son pouvoir. Il a pris un
certain nombre de mesures très contestées par sa population largement
anti-américaine164. Cette population, notamment les islamistes radicaux,
considèrent aujourd’hui M. Musharraf comme un traître qui mérite d’être
abattu. Pas moins de deux tentatives d’assassinats sur sa personne ont été
tentées cette année et l’année dernière.
En s'alliant avec les États-Unis, Islamabad a obtenu la levée de toutes les
sanctions américaines, un effacement important de sa dette, la réduction
des tarifs et des aides etc. Il n'empêche que peu d'investissements
étrangers franchissent les frontières pakistanaises. Les Etats-Unis fond
tout pour réchauffer les relations entre le Pakistan et l’Inde et ainsi éviter
à Musharraf d’avoir à surveiller deux fronts : les islamistes radicaux dans
son pays et l’Inde. En outre, la constitution pakistanaise (très contestée et
contestable), adoptée récemment et qui a permis au général Musharraf
d’être réélu, a été dénoncée du bout des lèvres par les Etats-Unis
champion de la démocratie.
Aujourd’hui, les Etats-Unis entretiennent de bonnes relations avec le
général Musharraf. Et ils y ont tout intérêt car son éviction du pouvoir ou
une défaite à une élection présidentielle pourrait profiter aux islamistes
radicaux. Etant donné que le Pakistan est un Etat nucléaire, la prise du
pouvoir par des islamistes représente un grand danger pour l’Occident et
en particulier pour les Etats-Unis. Comme vous le savez, ces islamistes
164
Cf. Chapitre IV
186
ne portent pas dans leurs cœurs l’Amérique qu’ils accusent, à tort ou à
raison, de combattre l’Islam.
2)
Les desseins américains au Moyen-orient depuis le
11 septembre
Depuis le 11 septembre, et même bien avant, les Etats-Unis ont pour
objectifs au Moyen-Orient :
‰
d’instaurer la paix entre les pays arabes et Israël (en réglant le
conflit israélo-palestinien),
‰
de préserver la sécurité et le bien-être d'Israël,
‰
d’assurer la libre circulation du pétrole du Golfe,
‰
d’endiguer les menaces que font peser l'Iran, l'Irak et la Libye,
‰
de lutter contre le terrorisme,
‰
d’enrayer la prolifération des armes de destruction massive,
‰
d’assurer l'accès des entreprises américaines à la région, enfin
‰
de promouvoir des régimes politiques et économiques plus
ouverts ainsi que le respect des droits de l'homme.
Pour ce qui est du règlement de la crise israélo-palestinienne, les EtatsUnis ont publié, en 2003, un document intitulé la "feuille de route". Ce
document prévoit les mesures que les Israéliens et les Palestiniens
doivent prendre pour parvenir à un règlement du conflit dans des délais
impartis, sous les auspices du Quatuor, qui se compose, en outre des
États-Unis, de l'Union européenne, de l'Organisation des Nations Unies
et de la Fédération de Russie.
Le règlement de ce conflit constitue un point central pour les Etats-Unis
dans leur guerre contre le terrorisme. S’ils veulent convaincre le monde
musulman (que ce n’est pas l’islam qui est visée à travers cette lutte mais
le terrorisme) et avoir leur soutien, ils doivent résoudre le problème
187
israélo-palestinien. Pourtant depuis des décennies, les Etats-Unis
essayent tant bien que mal de le régler (Oslo, camp David etc.). Il est
utile de savoir, même s’ils ont une grande influence sur l’Etat hébreu, ils
ne peuvent pas leur obliger à faire une chose que ce dernier considère
comme allant de sa survie. Ils peuvent faire pression sur l’Etat hébreu
mais pas leur forcer la main.
En dehors de la résolution du conflit israélo-palestinienne, les Etats-Unis
estiment qu’il est nécessaire pour eux de s'attaquer aux racines
économiques, sociales et politiques du terrorisme au Moyen-orient. A
cette égard, Mme Rice déclarait : « Nous avons trop longtemps toléré
l'oppression au nom de la stabilité. Trop de liens nous ont conduit à
fermer les yeux sur les responsabilités des dirigeants. Soixante ans de
soutien inconditionnel de la part des États-Unis ont nourri trop de
frustrations, de sentiments refoulés, d'idéologies de la haine »165. Le 20
janvier 2004, dans son discours sur l'état de l'Union, George W. Bush
synthétise : « Tant que le Proche-Orient demeurera la proie de la
tyrannie, du désespoir et de la colère, il produira des hommes et des
mouvements qui menaceront la sécurité de l'Amérique »166.
C’est dans ce cadre que l’initiative GMO a été lancée. Lapidairement, le
projet a pour objectif de pousser les pays moyen-orientaux à entamer des
réformes, à adopter la bonne gouvernance et à s’ouvrir à la démocratie. Il
a été très critiqué par les pays concernés qui y voient une pure ingérence
de la part de Washington. Ces pays pensent que si des réformes doivent
intervenir au Moyen-Orient c’est à eux d’en décider et non un intervenant
extérieur. Le président Moubarak a pris la tête de la fronde anti-GMO et
a enrôlé à ses côtés le roi Abdallah II de la Jordanie et le prince héritier
d'Arabie Saoudite, Abdallah. Il s’est rendu dans les principales villes
165
Cité par François SOUDAN, « Rêve ou cauchemar ? », JAI, 14 mars 2004. Vous
pouvez consulter l’article à l’adresse internet suivante :
http://www.jeuneafrique.com/gabarits/articleJAI_online.asp?art_cle=LIN14034rve
ouramehc0#
166
ibidem
188
européennes (Rome, Paris et Londres) pour dénoncer le projet. Il faut le
dire, de nombreux pays Européens ne sont pas d’accord avec le projet.
189
CONCLUSION
190
Au début de notre travail, nous nous sommes posés deux questions à
savoir si la guerre anti-terroriste produit les effets escomptés et si elle a
eu des implications notables sur les relations Etats-Unis/Reste du monde,
notamment avec les pays alliés et amis européens et du monde musulman
ainsi qu’avec l’ancien adversaire la Russie.
La guerre contre le terrorisme, à son lancement, avait pour objectifs
d’empêcher toute attaque contre les Etats-Unis, leurs citoyens, leurs
intérêts, leurs alliés et amis et d’ôter toute liberté d’action et de
mouvement aux terroristes. Trois ans après son déclenchement, il est
impossible d’affirmer que ces objectifs ont été atteints. Même si le
territoire américain n’a plus été frappé depuis le 11 septembre, il en est
tout autre pour leurs citoyens et leurs intérêts à l’extérieur. Leurs pays
alliés et amis connaissent une recrudescence sans précédent d’actes
terroristes. Ils sont en permanence en alerte et ceux qui ne sont pas
encore frappés par les terroristes sont conscients que tôt ou tard ils
devront y faire face. Ce n’est qu’une question de temps.
Certes les Etats-Unis ont asséné un sérieux coup à Al Qaïda mais ce coup
ressemble beaucoup plus à un coup sur une niche d’abeille ou sur une
fourmilière qu’à un coup portant atteinte à la survie du terrorisme. En
effet, on remarque qu’aujourd’hui, les organisations terroristes sont plus
que jamais nombreuses et sont présentes un peu partout dans le monde.
Elles s’autogérent et décident de leurs propres emplois du temps. Elles
n’ont plus de base centrale, plus de connexion entre eux, et ont des
structures très réduites et impossibles à cerner. Elles sont devenues de
véritables électrons libres. Et cela rend impossible leur appréhension et
met la planète entière en danger du fait que chaque groupe aura
désormais ses propres objectifs qui dans certains cas risquent de côtoyer
le ridicule.
191
La guerre anti-terroriste, au lieu de neutraliser le terrorisme ou au moins
de l’atténuer, a largement contribué à son éclosion. Ce dernier affiche
aujourd'hui une capacité de nuisance de plus en plus importante. Cela est
en partie lié à l'intervention américaine en Irak. Ce pays est devenu le
front des terroristes islamistes et son occupation par les forces
américaines est devenue l’un de leurs tremplins favoris pour justifier leur
barbarie à travers le monde (comme en Espagne).
En bref, les Etats-Unis se voient aujourd’hui engagés dans une véritable
escalade de violence dans laquelle ils ont entraîné des pays qui ne l’ont
certainement pas voulu.
En réponse à notre deuxième question, à savoir si la guerre anti-terroriste
a eu des implications notables sur les relations entre les Etats-Unis et le
reste du monde, nous répondrons par l’affirmative. En effet, cette guerre
a mis au grand jour les divergences entre Américains et Européens mais
aussi entre Européens. Elle a fait de la Russie un partenaire et un
interlocuteur privilégié des Etats-Unis notamment en ce qui concerne les
questions de sécurité internationale. Enfin, dans le monde musulman, les
populations sont plus que jamais anti-occidentales ; l’Arabie Saoudite
s’éloigne de plus en plus de l’Amérique et connaît une insécurité notable
tandis que le Pakistan renoue avec elle en risquant sa stabilité. L’Egypte,
le principal allié américain du monde musulman, conteste de plus en plus
les décisions de Washington.
Nous pensons qu'il y a plusieurs leçons à tirer de cette guerre antiterroriste, et la principale en est la suivante : tant qu'il y a des problèmes
urgents assez graves dont souffre une grande partie de l'humanité, qui ne
sont pas résolus ou bien ne sont pas discutés, débattus et collectivement
réglés, il est certain que nous allons voir arriver dans l'avenir des
expressions violentes comme celles du 11 septembre. Il y a dans le
monde actuel trop de problèmes, extrêmement complexes et urgents qui
192
n'arrivent pas à attirer l'attention des autorités publiques nationales et
internationales et qui risquent d'être pris en charge par des organisations
à travers des actes de violence, lesquels constitueront un facteur
aggravant qui pourrait mettre en péril la paix et la stabilité dans le
monde. Ces problèmes sont : la pauvreté et l’absence de démocratie dans
de nombreux pays. C’est aussi, comme l’a si bien constaté Ibn Warraq,
« les déséquilibres profonds provoqués par le libéralisme sauvage dans
ce monde globalisé qui multiplie les exclusions, aggrave les injustices et
cautionne l’absolutisme. Ce sont également les politiques agressives et
les humiliations répétées ciblant le monde musulman, justifiées et mises
en avant par les néo-conservateurs de la Maison Blanche »167.
La pauvreté ne saurait certes pas justifier le terrorisme mais les terroristes
peuvent l’exploiter pour gagner le soutien des populations. C’est un
terrain fertile pour leurs idéologies. En Algérie par exemple, les
islamistes du FIS ont exploité la misère de la population et l’absence de
l’Etat pour gagner la ferveur des jeunes chômeurs algériens et des chefs
de familles désespérés. Au Pakistan, les familles pauvres, qui n’ont pas
les moyens de nourrir, de vêtir leurs enfants et de leur assurer une
éducation minimale, les envoient étudier dans des madrassas où on leur
offre le gîte et le couvert, ainsi qu’un endoctrinement religieux ; ce qui
explique en grande partie le développement de ces madrassas et leur
mainmise sur la jeunesse168.
A l’heure actuelle, il serait une erreur de croire que la guerre contre le
terrorisme est une affaire exclusivement américaine. Aucun pays n’est à
l’abri des attaques terroristes. Même si l’Amérique a agis de manière
unilatérale, à notre avis, il serait dangereux pour le monde entier de ne
pas réagir. Nous devons marcher avec les Américains et non derrière eux.
167
Ibn WARRAQ, « Contre l’islamisme militant », POLITIQUE INTERNATIONALE,
n° 95 - printemps 2002. Vous pouvez voir cette article à l’adresse Internet suivante :
http://www.politiqueinternationale.com/PI_PSO/fram_revpde_re_0795.htm
168
ibidem
193
Et l’Amérique de son côté doit comprendre qu’elle ne peut pas à elle
seule venir à bout du terrorisme international et que son unilatéralisme ne
contribuera qu’à creuser le fossé avec ses alliés et amis. Elle doit aussi
comprendre que c’est pas elle en tant que telle qui est rejetée et
condamnée par le monde musulman mais sa politique extérieure.
Maintenant qu’elle est dans l’impasse en Irak, peut être elle repensera à
sa stratégie de lutte anti-terroriste et y intégrera les pays avec lesquels
elle partage le même combat.
194
DOCUMENTS ANNEXES
195
ANNEXE I
Un homme et un réseau terroriste mondial
(Article du New York Times du 14 janvier 2001 de Stephen Engelberg)
L'article ci-après est le premier d'une série d'articles intitulée « Guerriers
du djihad » publiée par le New York Times les 14, 15 et 16 janvier 2001.
Cet article-ci se fonde sur une enquête menée par Craig Pyes, Judith
Miller et Stephen Engelberg, et a été rédigé par M. Engelberg.
Guerriers du djihad
Premier d'une série de trois articles :
Un réseau terroriste
L'article qui suit est basé sur un reportage de Craig Pyes, de Judith Miller
et de Stephen Engelberg, et a été rédigé par M. Engelberg.
« Le temps est venu de lancer un djihad mondial ! » déclare Oussama
Ben Laden, en 1987, à ses amis. Après avoir passé plusieurs années à
entraîner des volontaires arabes à guerroyer contre l'armée soviétique
pour la chasser d'Afghanistan, il a, dès cette année-là, le projet de mener
une guerre sainte islamique contre les gouvernements laïcs corrompus du
Moyen-Orient musulman et contre les puissances occidentales qui les
soutiennent. Ce milliardaire saoudien va alors commencer à accueillir et
former, dans ses camps d'entraînement afghans, des militants islamistes
du monde entier - jusque-là préoccupés seulement d'objectifs locaux dans le but d'en faire un réseau mondial chargé de replacer tous les
musulmans sous le règne d'une version militante de la loi islamique.
196
Certains de ses compagnons d'armes sont sceptiques et lui disent que son
but est hors d'atteinte. « J'ai discuté un jour avec Oussama et je lui ai
demandé ce qu'il voulait faire », se souvient Abdoullah Anas, un
Algérien qui a combattu en Afghanistan à l'époque et a donné une des
rares descriptions personnelles que l'on ait de la formation donnée par
l'organisation de M. Ben Laden. « Je lui ai dit : 'Imaginez un Malais qui
rentre dans son pays au bout de cinq ans. Comment pourra-t-il ne pas
oublier que vous êtes son chef ? Il se mariera, aura des enfants et
travaillera dans son pays. Comment pouvez-vous créer un camp pour un
djihad mondial ? ».
Mais, comme d'autres incrédules, il a été le témoin de la façon dont M.
Ben Laden - aujourd'hui le suspect de terrorisme le plus recherché par
l'Amérique - a engagé la réalisation de son projet. Son récit, corroboré
par d'autres témoignages et par les renseignements recueillis par les
polices et services secrets des États-Unis et de pays du Moyen-Orient et
d'Europe, nous donne une idée très concrète de la naissance d'un
mouvement moderne de guerre sainte, avec nombre de détails inédits. Ce
qui a commencé comme une guerre sainte contre l'Union soviétique a
pris, selon M. Anas, une nouvelle dimension lorsque M. Ben Laden s'est
émancipé et a créé un nouveau mouvement islamiste dont les ambitions
allaient bien au-delà de l'Afghanistan.
À partir de ses camps afghans, M. Ben Laden a créé et continue de
développer un réseau terroriste islamiste qui, selon les responsables
américains, non seulement conduit ses propres opérations mais encore
forme et soutient les militants de divers pays, reliant les opérations
locales pour en faire une croisade mondiale.
L'un de ses nombreux noms de code, l'Entrepreneur, évoque bien sa
stratégie. Le groupe qu'il a fondé il y a 13 ans, Al-Qaïda, nom arabe
signifiant « La Base », est dirigé par des tacticiens hors pair qui adaptent
197
leur action aux conditions du moment, tantôt enseignant la technique des
explosifs, tantôt envoyant leurs propres agents, tantôt suivant simplement
leur inspiration.
Ce groupe est devenu la référence pour ses islamistes malais, algériens,
philippins, palestiniens, égyptiens et même américains qui voient les
États-Unis, puissance impériale soutenant Ce des gouvernements athées
et corrompus, comme leur principal ennemi. M. Ben Laden a multiplié
les efforts pour fédérer en un seul mouvement des groupes qu'ont
longtemps opposés divergences doctrinales et diversité ethnique et
géographique. « Leurs actions sont commandées par des objectifs
politiques locaux, mais sous-tendues par une vision commune, explique
Robert Blitzer, ancien responsable de l'antiterrorisme au FBI. C'est une
affaire mondiale. C'est : 'Nous voulons être là et compter dans une
centaine d'années. »
Selon les recherches récentes de la CIA, le mouvement Al-Qaïda dirige
une douzaine de camps d'entraînement en Afghanistan, qui ont déjà
permis la formation de quelque 5.000 militants, aujourd'hui installés dans
une cinquantaine de pays où ils ont créé chacun leur cellule. Selon des
responsables de services secrets le groupe expérimente des armes
chimiques, notamment des gaz neurotoxiques, dans l'un de ces camps.
M. Ben Laden et ses partisans s'appuient sur des interprétations
séculaires du Coran pour justifier la violence au nom de Dieu, même
contre des coreligionnaires et des passants - vision extrémiste de l'une
des religions les plus répandues dans le monde. Mais les moyens qu'ils
utilisent sont, eux, tout à fait modernes : courrier électronique crypté,
CD-ROM où sont exposées des méthodes de fabrication de bombes,
liaisons satellitaires entre téléphones portables.
198
Selon des enquêteurs de la police judiciaire américaine, le groupe planifie
ses attentats des mois voire des années à l'avance. Un ancien sergent de
l'armée américaine, Ali A. Mohamed - qui a travaillé pour M. Ben Laden
et est aujourd'hui un témoin à charge - a expliqué au procureur qui
l'interrogeait comment Al-Qaïda apprend à ses agents « planqués », ou
« sous-marins », à vivre au sein de la population sans se faire remarquer.
M. Ben Laden est loin d'avoir atteint ses buts ultimes : il n'a pas
augmenté le nombre des musulmans respectant la loi islamique, il n'a
renversé aucun des gouvernements arabes qu'il vise et n'a pas chassé les
États-Unis du Moyen-Orient. En outre, sa violence, qui rebute de
nombreux croyants, a provoqué de sévères répressions dans les États
arabes où les libertés politiques étaient déjà restreintes.
Mais, avec le noyau de son organisation, il constitue une grave
préoccupation pour les autorités américaines, car il est capable de
paralyser des ambassades, de contrecarrer des projets d'exercices
militaires et d'inquiéter les Américains se trouvant à l'étranger et de
mettre en danger leur sécurité. Au début de janvier 2001, les États-Unis
ont dû fermer pendant près de deux jours leur ambassade à Rome, en
raison d'un risque d'attentat découvert par les services secrets.
Les autorités américaines accusent M. Ben Laden d'avoir commandité les
attentats de 1998 contre deux de leurs ambassades en Afrique - qui ont
fait plus de 200 morts - et le suspectent d'être impliqué dans l'attentat
d'octobre dernier contre le destroyer « U.S.S. Cole » au Yémen, qui a tué
17 marins. Quatre hommes ont comparu à partir de janvier 2001 pour les
attentats en Afrique devant un tribunal de New York.
Les autorités américaines examinent par ailleurs le rôle d'Al-Qaïda dans
trois projets d'attentats prévus pour les fêtes du millénaire en 1999 :
199
contre un autre navire de la flotte américaine - une première dans
l'histoire récente - et contre des sites touristiques et un hôtel en Jordanie.
Plus récemment, le groupe de M. Ben Laden a tenté des opérations contre
Israël, un tournant dans sa stratégie, selon des responsables américains et
moyen-orientaux. Ceux-ci notent qu'il a assuré la survie de son
organisation, au cas où il serait arrêté ou bien qu'il mourrait, en désignant
comme successeur son collaborateur de longue date, Abdoul-Aziz Abou
Sitta, un Egyptien connu sous le nom de Mouhammad Atef ou Abou
Hoffs Al-Masri, dont la fille a, selon Al Djazira, chaîne de télévision
arabe diffusée par satellite, épousé son fils au début de janvier 2001, à
Kandahar, en Afghanistan.
« Nous espérons vivement réussir à l'arrêter, mais ce ne sera qu'une
étape. Il nous restera beaucoup à faire pour éradiquer le réseau de ses
organisations », a déclaré Richard Clarke, responsable de la lutte antiterroriste à la Maison-Blanche.
La cause de la guerre afghane attire de jeunes combattants arabes
Al-Qaïda a pour origine le djihad prêché par des intellectuels musulmans
contre l'armée soviétique qui avait envahi l'Afghanistan en 1979. Ces
hommes ont publié des ordonnances religieuses (des « fatwas »)
exhortant les musulmans, où qu'ils soient, à défendre contre les infidèles
la terre musulmane de ce pays. Dans les années qui ont suivi, plusieurs
milliers de jeunes arabes ont rejoint les rangs de la résistance afghane.
L'un des premiers à avoir répondu à cet appel à la guerre sainte a été un
jeune Algérien, du nom de Boujema Bounouar, qui devait prendre pour
nom de guerre Abdoullah Anas. Dans de récentes interviews accordées à
Londres, où il habite aujourd'hui, celui-ci a raconté comment M. Ben
200
Laden est allé en Afghanistan pour combattre les Soviétiques et a été
attiré vers un groupe d'Egyptiens qui voulaient lancer un djihad mondial.
M. Anas, qui est aujourd'hui chef d'un parti politique islamiste algérien,
n'est pas un observateur impartial. Il affirme s'être opposé à M. Ben
Laden, dont le programme terroriste a, selon lui, terni la réputation de
milliers d'Arabes qui se sont battus honorablement pour la cause afghane.
Mais son récit de témoin direct, corroboré par les renseignements obtenus
par les services secrets occidentaux, est l'un des rares à décrire comment
M. Ben Laden est devenu responsable d'un mouvement islamiste.
De nombreux éléments rapprochaient ces deux hommes. M. Anas a
raconté son itinéraire d'enseignant du Coran devenu militant du djihad en
1984, alors qu'il avait 25 ans et qu'il vivait avec sa famille dans l'ouest de
l'Algérie. À la bibliothèque locale, il lut, dans un hebdomadaire, un
article commentant une fatwa selon laquelle faire la guerre aux
Soviétiques était le devoir de tout musulman.
« Au bout de quelques jours, se souvient-il, tout le monde avait entendu
parler de cette fatwa et commençait à se poser des questions : 'Où donc
est l'Afghanistan ? Quel est ce peuple ? Comment pouvons-nous aller làbas ? Combien coûte le billet ? ».
Cette année-là, il se retrouve dans la foule des musulmans qui participent
au Hadj, le pèlerinage annuel à la Mecque, en Arabie Saoudite. « Vous
vous sentez sanctifié, explique- t-il. Vous êtes entouré de musulmans du
monde entier, du Zimbabwe à New Delhi. Chacun porte deux simples
vêtements de coton blanc. Tout le monde est ainsi vêtu. Vous ne pouvez
pas savoir qui est ministre, qui est président. Pas de bijoux, pas de beaux
costumes. » A la Mecque, les chefs de prière parlent avec émotion du
djihad en Afghanistan.
201
Il se trouve, raconte-t-il, sur l'esplanade de marbre de la Grande Mosquée
au milieu de 50.000 autres pèlerins lorsqu'un ami lui désigne un
intellectuel palestinien radical, du nom de Abdoullah Azzam, qui est en
train d'organiser le soutien arabe aux Afghans et dont les écrits, qui vont
susciter le renouveau du djihad au XXe siècle, commencent à faire parler
d'eux.
M. Anas se présente à lui et lui demande si l'article du magazine qu'il lu à
la bibliothèque est exact :
« - Les chefs religieux sont-ils tous d'accord pour dire que combattre en
Afghanistan est un devoir pour tous les musulmans ?
« - Oui, répond l'autre, c'est vrai !
« - Bon, d'accord, dis-je. Et si je veux partir en Afghanistan, qu'est-ce que
je dois faire maintenant ? »
M. Azzam lui donne sa carte de visite. Il y figure un numéro de téléphone
à Islamabad, au Pakistan, où il est professeur d'université. Une semaine
plus tard, M. Anas est à bord d'un avion l'emmenant d'Arabie Saoudite au
Pakistan. Il n'a aucune idée de l'endroit où il va, ni de ce qu'il va y faire.
En arrivant, il compose le seul numéro de téléphone qu'il connaisse au
Pakistan et parle avec M. Azzam, qui lui offre de l'héberger à son
domicile, un lieu de rendez-vous animé, fréquenté par des étudiants et
des intellectuels. C'est là qu'il aperçoit pour la première fois la plus jeune
des filles de M. Azzam, qu'il épousera cinq ans plus tard. M. Azzam lui
présente un visiteur saoudien qui s'identifie à la façon arabe
traditionnelle, comme Abou Abdoullah, c'est-à-dire le père d'Abdoullah,
son fils aîné. C'était Oussama Ben Laden.
Les deux hommes échangent quelques banalités. Le nom de M. Ben
Laden est bien connu. Il est présenté comme le plus jeune de 24 frères
d'une famille qui dirige l'une des plus importantes entreprises de travaux
202
publics du monde arabe. M. Ben Laden n'apparaît pas différent des autres
volontaires arabes qui commencent à arriver au Pakistan, se souvient M.
Anas. La conversation porte sur la façon dont les volontaires peuvent
aider les Afghans à gagner leur djihad et la façon dont ils peuvent leur en
apprendre davantage sur l'Islam.
Dans le conflit afghan, les forces soviétiques disposent à ce moment-là
d'un atout décisif : la puissance de feu de leurs hélicoptères qui leur
donne la maîtrise de l'espace aérien tandis que leurs troupes au sol
tiennent les grands axes routiers. Mais les rebelles ont de puissants amis.
Les États-Unis et l'Arabie Saoudite dépensent des millions pour fournir
des armes aux Afghans par le canal des services secrets pakistanais.
M. Anas commence par enseigner le Coran aux rebelles afghans, qui ne
comprennent pas l'arabe et apprennent les versets par cœur, sans les
comprendre. Il dirige par ailleurs les prières dans une « maison des
hôtes » créée par des volontaires arabes. À l'époque, il n'y a, selon lui,
dans le pays, guère plus de quelques dizaines d'Arabes épaulant les
rebelles. Pas un ne connaît la moindre des langues parlées en
Afghanistan.
Au bout de quelques mois, M. Anas part à pied pour l'Afghanistan afin
de rejoindre une unité combattante. Il l'est l'un des trois Arabes qui se
déplacent au sein d'une colonne de 600 soldats afghans. Il apprend le
farsi et adopte un rôle de médiateur, se déplaçant d'un camp de
combattants rebelles à l'autre. Il passe l'essentiel de son temps, chaque
année, en Afghanistan.
Il devient un proche collaborateur du Commandant Ahmed Shah
Massoud - dont les troupes contrôlent à l'époque le nord de l'Afghanistan
et disputent aujourd'hui le pouvoir aux taliban - qui soutiennent M. Ben
Laden.
203
Comme beaucoup de musulmans qui ont rejoint les rebelles, M. Anas
s'attend à mourir dans le djihad afghan et à mériter le sort réservé, selon
le Coran, aux martyrs, dont les péchés sont pardonnés et qui vont au
Paradis où ils jouissent de la présence de belles jeunes femmes.
« Devenir un sahid ou un martyr n'était ma préoccupation principale
mais, reconnaît-il, cela faisait partie de mon projet. »
Selon les services secrets américains et moyen-orientaux, c'est vers le
milieu des années 80 que M. Ben Laden s'installe à Peshawar, ville du
Pakistan proche de la frontière afghane, qui sert à l'époque de base arrière
pour la lutte contre les soviétiques et où les officiers de renseignement
américains, français et pakistanais intriguent et se concurrencent,
cherchant à manipuler la cause afghane chacun à l'avantage de son pays.
Dans ce milieu, la fortune de M. Ben Laden, plusieurs centaines de
millions de dollars, lui assure un succès immédiat. « Il n'était que l'un de
ceux venus faire le djihad en Afghanistan, poursuit M. Anas, mais,
contrairement aux autres, il avait beaucoup d'argent. Ce n'est pas un
spécialiste de la politique ni de l'organisation, mais c'est un activiste à
l'imagination féconde. Il mange et dort très peu. Il est très généreux :
pour un peu, il vous donnerait ses vêtements, son argent. »
Toujours selon M. Anas, qui revient tous les ans des champs de bataille
afghans pour rendre visite à M. Azzam au Pakistan, M. Ben Laden a
d'abord dormi dans la maison des hôtes de ce dernier, à Peshawar, sur un
coussin posé à même le plancher et, rapporte M. Anas, M. Azzam aimait
dire : « Vous voyez cet homme ? Il a tout ce qu'il lui faut dans son pays,
mais ici, il vit dans cette pièce au milieu des pauvres ! »
C'est en 1984 que M. Azzam créé l'organisation qui va jouer un rôle
décisif dans le déclenchement du djihad mondial au cours de la décennie
suivante. Il l'appelle le Makhtab al Khadimat, en français « le Bureau des
204
Services ». Son but est de recruter et entraîner des volontaires musulmans
pour le front afghan. Il récolte des fonds pour son organisation dans des
pays étrangers, jusqu'aux États-Unis, et fait des discours enflammés pour
défendre la cause afghane. M. Ben Laden adhère à l'idée dès le début et
devient l'un de ses collaborateurs, lui apportant son soutien financier et
s'occupant des affaires militaires.
M. Ben Laden travaille avec des petits groupes, poursuit M. Anas.
« Lorsque vous êtes assis auprès d'Oussama, vous n'avez pas envie de
quitter la réunion. Vous voulez poursuivre la discussion avec lui, car il
est très calme et très éloquent. »
L'un des grands objectifs du Bureau des Services est alors, toujours selon
M. Anas, d'empêcher les volontaires, qui arrivent d'ailleurs en nombre
croissant, de prendre parti dans les luttes entre factions rebelles. « Nous
sommes en Afghanistan pour aider le djihad et l'ensemble du peuple
afghan », répète alors M. Azzam.
Mais de nombreux jeunes musulmans, préoccupés du sort de leur propre
pays, sont de plus en plus insatisfaits de réserver l'action du Bureau des
Services à la cause afghane. Certains contactent M. Ben Laden et,
rapporte M. Anas, lui suggèrent de « ne pas rester avec Abdoullah
Azzam qui ne parle que de l'Afghanistan et ne veut rien faire contre les
régimes au pouvoir en Arabie Saoudite, en Égypte ou en Algérie. Ces
gens, poursuit M. Anas, répétaient à Oussama : 'Vous devriez créer
quelque chose, proposer une orientation claire à tous ces gens-là pour
d'autres guerres après celle de l'Afghanistan. ».
Parmi les plus assidus auprès de M. Ben Laden, se trouve un groupe
d'Egyptiens radicaux, portant le nom de Djihad islamique égyptien, qui a
participé à l'assassinat du président Anouar el-Sadate en 1981 et dont le
programme est le renversement des gouvernements par le terrorisme et la
205
violence. L'une des figures de proue de ce groupe, le Docteur Ayman alZawahiri, qui s'est réfugié en Afghanistan va, d'après M. Anas et les
services secrets occidentaux, avoir une influence décisive sur l'évolution
de M. Ben Laden. Il ferait aujourd'hui, selon certains services secrets,
partie de la direction d'Al-Qaïda.
M. Azzam, lui, a d'âpres disputes avec ces Egyptiens. M. Anas raconte
qu'il a, un jour, été témoin d'une vive querelle entre M. Azzam et le
Cheikh Omar Abdel Rahman, un intellectuel religieux radical, qui
défendait l'idée que le mépris de la loi islamique manifesté par des gens
comme le président pakistanais Mohammed Zia ul-Haq et le président
égyptien Hosni Moubarak faisait d'eux des infidèles que l'on était en droit
d'assassiner. Ce Cheikh s'est ultérieurement installé à Brooklyn, où il
s'est associé à une antenne du Bureau des Services. En 1995 il a été
condamné pour participation à des tentatives d'attentats visant à détruire
des immeubles de New York.
C'est en 1986, selon M. Anas, que M. Ben Laden a commencé à suivre sa
propre route, information que confirment des responsables de services
secrets moyen-orientaux. Il créé son propre camp d'entraînement - qu'il
appelle Al Masadah, l'Antre du lion - pour un groupe d'une cinquantaine
d'Arabes du golfe Persique qui vivent dans des tentes dressées à l'écart de
celles des autres combattants afghans.
En à peine plus d'un an, la scission du mouvement est consommée : M.
Ben Laden et les Egyptiens ont fondé Al-Qaïda, en français la Base, pour
ce qu'ils espèrent être une croisade mondiale.
M. Azzam confie alors à M. Anas, toujours selon ce dernier, que les
idéologues égyptiens ont courtisé M. Ben Laden pour avoir accès à ses
moyens financiers. « Un jour, il m'a confié : 'Je suis très contrarié au sujet
d'Oussama. Cet homme est un ange envoyé par le ciel, mais je suis
206
inquiet pour son avenir s'il reste avec ces gens-là. » Mais les différends
entre ces deux hommes étaient essentiellement tactiques, indique M.
Anas qui note que les deux hommes restaient amis. Ennemi juré d'Israël,
M. Azzam pensait que les combattants arabes devaient centrer leur action
sur la création d'un État islamique en Afghanistan, ce qui pouvait
demander des dizaines d'années. M. Ben Laden, lui, s'était, selon M.
Anas, laissé convaincre que la guerre pouvait être menée dans plusieurs
pays en même temps.
« Ce débat était très secret, poursuit M Anas. À l'époque, trois ou quatre
personnes seulement étaient au courant. » M. Azzam voyait peu de
différence entre les États-Unis et l'Union soviétique et affirmait dans ses
articles et ses discours que tous deux étaient des ennemis de l'Islam,
mais, selon M. Anas, il était opposé à l'utilisation du terrorisme contre
l'Occident.
À la fin des années 80, Peshawar est devenu un centre d'attraction pour
les jeunes musulmans mécontents qui partagent les vues de M. Ben
Laden. À ce moment-là, se souvient M. Anas, « dix personnes ouvraient
une maison d'accueil et commençaient à prononcer des fatwas,
proclamaient :'Nous allons faire la révolution en Jordanie, en Égypte, en
Syrie !', mais n'avaient aucun contact avec le vrai djihad qui se déroulait
en Afghanistan. »
Pendant ce temps, le rapport des forces se renversait en Afghanistan, les
missiles Stinger, fournis dans le cadre d'un programme secret américain,
obligeant l'aviation soviétique à ne survoler les champs de bataille que de
très haut. C'était devenu une sorte de Viêt-Nam pour Moscou. En février
1989, les Soviétiques s'étaient retirés.
Selon un responsable de la CIA, celle-ci avait conscience du changement
de nature du djihad et pris des mesures pour contrer cette menace,
207
mesures que toutefois ce responsable n'a pas voulu préciser. Mais cette
affirmation est contredite par Milt Bearden, qui était à l'époque
responsable du bureau d'Islamabad de la CIA et, à ce titre, coordonnateur
des efforts antisoviétiques de l'Agence en Afghanistan. Selon lui,
« l'Union soviétique, armée jusqu'aux dents, s'écroulait et une guerre se
déclenchait dans le golfe Persique. Bref, l'Afghanistan n'était plus une
priorité. » La guerre s'est terminée « et nous avons décampé ».
La lutte des rebelles afghans ne s'arrête pas pour autant. Ils s'en prennent
d'abord au gouvernement prosoviétique resté en place, puis se déchirent
entre eux. Le 24 novembre 1989, M. Azzam et deux de ses fils sont tués
à Peshawar par l'explosion d'une voiture piégée, alors qu'ils se rendaient
à la prière du vendredi, un attentat qui n'a pas été élucidé.
M. Anas affirme qu'il a alors tenté de prendre la direction du Bureau des
Services. Selon la CIA, le groupe s'est scindé ; la faction extrémiste l'a
emporté et s'est rangée aux côtés de M. Ben Laden. « Ils aimaient les
idées d'Oussama et la personne d'Abdoullah Azzam, mais, raconte M.
Anas avec nostalgie, ils ne m'aimaient pas. »
La Base : de nombreux pays réunis sous une même bannière
Enflammés par leur victoire sur les Soviétiques, les Arabes qui avaient
combattu en Afghanistan rentraient chez eux, animés du désir d'appliquer
chacun les principes du djihad à son pays.
Le Coran fixe des règles strictes sur le moment et la façon d'engager une
guerre sainte. Mais, selon Gilles Kepel, grand spécialiste français de
l'Islam contemporain, les anciens combattants de l'Afghanistan se
fondaient sur une interprétation radicale des textes sacrés de l'islam.
« Intoxiqués par la victoire musulmane en Afghanistan, écrit-il, ils ont
208
cru qu'ils pouvaient la reproduire partout ailleurs et que le monde entier
était mûr pour le djihad, ce qui est contraire à la tradition islamique. »
Ils se sont appelés les Afghans arabes. En Jordanie, ils ont fondé un
groupe, Djaich Mouhammad, dont le but, selon ses responsables, était
d'abattre le roi Hussein, dont la famille s'honore de descendre du
Prophète Mahomet. En Algérie, ils ont participé à la création du Groupe
islamique armé (le GIA), le plus radical des groupes islamistes qui sont
apparus après l'annulation des élections, en 1991, par le pouvoir militaire.
Le GIA a commencé par des attentats contre des cibles militaires, puis
s'est lancé dans des tueries de civils algériens n'adhérant pas au djihad.
Selon M. Anas, un Algérien qui avait combattu avec lui en Afghanistan
et avait rejoint Al-Qaïda à la fin des années 80 faisait partie des
fondateurs du GIA. M. Anas a affirmé avoir été informé que M. Ben
Laden avait fourni une partie de l'argent ayant financé le GIA à ses
débuts.
Le début des années 90 est une période difficile pour M. Ben Laden. Il
est furieux que le roi Fahd ait laissé des troupes américaines mener la
guerre du Golfe à partir d'une base installée en Arabie Saoudite, terre de
deux lieux saints, les plus sacrés de l'islam. Sa colère est dirigée contre
les États-Unis et le pouvoir saoudien et, avant la fin du conflit, il s'est
réinstallé en Afghanistan.
Ce nouveau séjour va être bref. Quelques mois plus tard il quitte le pays,
disant à ses associés que l'Arabie Saoudite a ordonné aux services secrets
pakistanais de le supprimer. On ne possède aucune confirmation de
l'existence d'un tel projet. Toujours est-il qu'en 1991 il s'installe au
Soudan, où un gouvernement islamiste a pris le pouvoir.
Au cours des cinq années suivantes, il s'emploie à développer un réseau,
en combinant affaires commerciales officielles et soutien à la guerre
209
sainte. Il s'engage dans l'accomplissement de son but suprême qui est de
rassembler les principaux groupes islamistes extrémistes sous une seule
bannière. Selon des autorités moyen-orientales, lui ou ses émissaires ont
alors rencontré des groupes radicaux du Pakistan et d'Égypte et leur ont
proposé la création d'un front islamiste international, devant être dirigé
par des anciens combattants d'Afghanistan et lutter contre les Américains
et les Juifs.
Al-Qaïda va alors commencer à former ses propres agents. Ali
Mohamed, témoin à charge qui a reconnu avoir organisé le déplacement
de M. Ben Laden au Soudan, a avoué à la police judiciaire américaine
avoir formé des membres du groupe à la manipulation des armes et des
explosifs, aux enlèvements, à la guérilla urbaine, au contre-espionnage et
à d'autres disciplines, dans des camps en Afghanistan et au Soudan. Il a
également reconnu avoir montré à certains stagiaires comment créer des
cellules « pouvant être utilisées dans des opérations ».
L'envoi de troupes américaines en Somalie, fin 92 début 93, dans le cadre
d'une mission des Nations unies, que l'Administration Bush a présentée
comme une opération humanitaire, constitue pour M. Ben Laden un
nouvel affront. Selon des responsables américains, un transfuge d'AlQaïda a déclaré que ce groupe avait vu ce déploiement militaire comme
une dangereuse extension de l'influence américaine dans la région et une
étape vers la déstabilisation du gouvernement islamique du Soudan. Des
fatwas, indiquent des procureurs fédéraux Américains, ont été prises en
privé par Al-Qaïda enjoignant à ses membres d'attaquer les soldats
américains en Arabie Saoudite, au Yémen et dans la Corne de l'Afrique.
Selon cette source, M. Ben Laden a envoyé son responsable militaire, un
Egyptien qui est à ses côtés depuis la création d'Al-Qaïda, étudier les
faiblesses des forces des Nations Unies en Afrique. Toujours selon cette
source, Al-Qaïda créé une cellule au Kenya destinée à constituer un point
d'appui pour des opérations en Somalie. Les membres de cette cellule
210
s'intègrent dans la société kenyane, ouvrent officiellement des
commerces de vente de poisson et de négoce de diamants et créent une
organisation charitable islamique.
Toujours selon ces procureurs américains, au moins cinq membres du
groupe sont ensuite passés en Somalie, où ils ont entraîné certains des
éléments qui ont participé à l'embuscade du 3 octobre 1993 contre les
forces spéciales des États-Unis qui a fait 18 morts parmi les américains et
plusieurs centaines parmi les Somaliens. Le souvenir de ce revers des
forces américaines, le plus notable dans l'histoire récente, va jouer un
rôle important dans les débats ultérieurs du gouvernement Clinton
concernant l'hypothèse d'une utilisation de troupes au sol. Ce n'est que
plusieurs années plus tard que les services secrets américains
découvriront le rôle d'Al-Qaïda dans cet accrochage.
Toujours selon cette source judiciaire, le groupe a envisagé d'attaquer les
Américains au Kenya en représailles de la mission en Somalie. Dans sa
déposition, M. Mohamed a affirmé que M. Ben Laden l'avait envoyé à
Nairobi, fin 1993, pour y repérer des cibles américaines, françaises,
britanniques et israéliennes pour d'éventuels attentats, en accordant un
intérêt particulier à l'ambassade des États-Unis. Il a également déclaré
avoir pris des photos, dessiné des schémas et rédigé un rapport, tous
éléments qu'il a fait parvenir à son chef à Khartoum. « Ben Laden a
regardé la photo de l'ambassade des États-Unis, a-t-il déclaré, et désigné
l'endroit où devrait se diriger le camion chargé d'une attaque suicide. »
Selon les procureurs américains, les plans d'Al-Qaïda étaient encore plus
ambitieux : un de ses membres dirigeants, un Irakien, Mahdouh
Mahmoud Salim - dont M. Anas a dit qu'il gravitait déjà autour de M.
Ben Laden en Afghanistan - a tenté d'acheter de l'uranium enrichi en
Europe.
211
Cet Irakien a facilité l'établissement de liens entre le groupe de M. Ben
Laden et d'autres soutenus par l'Iran. Il a rencontré un responsable
religieux iranien à Khartoum et, peu après, toujours selon les procureurs,
des membres d'Al-Qaïda ont reçu une formation du Hezbollah, groupe
chiite libanais soutenu par l'Iran et passé maître dans l'organisation
d'attentats à la voiture piégée. Selon certains responsables américains,
cette alliance avait ceci de notable que c'était la première collaboration
entre des radicaux de la branche chiite minoritaire de l'Islam et des
extrémistes de la branche sunnite majoritaire.
Au Soudan, les entreprises commerciales de M. Ben Laden - une
tannerie, une société de transport et une entreprise de bâtiment - lui
permettaient d'obtenir de l'argent et, selon des responsables américains,
servaient de couverture pour les déplacements de M. Salim et d'autres
agents. Selon cette source, ces sociétés ont accaparé le marché des
exportations soudanaises de gomme, de tournesol et de sésame et M. Ben
Laden a investi 300 millions de francs d'argent de sa famille dans une
nouvelle banque islamique à Khartoum.
Un réseau comme celui de l'Afghanistan, mais à l'échelle mondiale
Le nouveau djihad s'est nourri de la guerre civile qui a ravagé
l'Afghanistan au début des années 90. Les camps d'entraînement qui
avaient servi à former des moudjahidin contre l'ennemi soviétique
accueillaient désormais des islamistes plus intéressés à fomenter la guerre
sainte une fois rentrés chez eux - en Amérique, en Europe ou au MoyenOrient - qu'à la lutte pour le pouvoir en Afghanistan.
Selon des autorités européennes et américaines, le Bureau des Services,
le groupe basé au Pakistan que M. Azzam avait fondé dans les années 80
pour recruter les moudjahidines de la cause antisoviétique, organisait les
déplacements de certains de ces nouveaux combattants du djihad.
212
Beaucoup de ceux qui étaient liés à ce bureau partageaient, selon M.
Anas, l'optique de M. Ben Laden sur la nécessité d'une stratégie
mondiale. Certains responsables américains pensent qu'ils s'étaient mis
sous ses ordres, mais les experts du renseignement ne sont pas tous
d'accord sur ce point. Quoi qu'il en soit, c'est seulement en 1993 que la
police judiciaire américaine est tombée sur les premiers indices du
nouveau djihad mondial, au cours de son enquête sur l'attentat du World
Trade Center qui avait fait six morts et plus de mille blessés.
Cette enquête a en effet révélé que les quatre auteurs de cet attentat
avaient des liens avec le Cheikh Omar Abdel Rahman, qui a été accusé
de diriger une « organisation djihad » mondiale ayant commencé dès
1989 à projeter la mort d'Américains. Ce Cheikh a été ultérieurement
condamné pour tentative d'attentats contre des sites sensibles de New
York, notamment contre l'immeuble des Nations unies. Mais ce n'est que
quelques années plus tard que les services secrets américains
découvriront que cet individu et les auteurs de l'attentat du World Trade
Center avaient des liens avec Al-Qaïda.
Les éléments de preuve réunis sont concordants, mais pas totalement
concluants. Plusieurs de ceux qui ont été condamnés dans l'affaire du
World Trade Center étaient liés au centre de réfugiés de Brooklyn qui
constituait une antenne du Bureau des Services, l'organisation basée au
Pakistan que M. Ben Laden a contribué à financer et à diriger. Ce centre
de Brooklyn était, à un moment, dirigé par Mustafa Shalabi, Egyptien
assassiné en 1991, dont le meurtre n'est toujours pas élucidé. Or, selon
des révélations récentes de la police judiciaire, M. Mohamed, le témoin à
charge fédéral, a déclaré que M. Ben Laden avait eu recours à ce M.
Shalabi en 1991 lorsqu'il avait voulu s'installer au Soudan.
L'un des condamnés pour l'attentat du World Trade Center, Ahmed M.
Ajaj, après avoir passé quatre mois au Pakistan en 1992, est revenu aux
213
États-Unis en possession d'un manuel expliquant comment fabriquer des
bombes, manuel que les autorités américaines ont saisi plus tard. Selon la
traduction en anglais de ce document qui a été présentée à titre de preuve
au procès du World Trade Center, ce manuel aurait été daté de 1982, été
publié à Amman, en Jordanie, et portait pour titre, sur la première page et
sur les suivantes : « La règle de base ».
Malheureusement, ces indications étaient erronées. Deux autres
traductions distinctes du document, dont une effectuée à la demande du
New York Times, montrent que le titre est en fait Al-Qaïda, le nom du
groupe de M. Ben Laden, que l'on doit traduire par La Base. En outre, le
pays et la date de publication indiqués dans le document sont, non pas
Jordanie, 1982, mais Afghanistan, 1989, c'est-à-dire un an après la
fondation par M. Ben Laden de son organisation. Ces erreurs, dit Steven
Emerson, l'expert du terrorisme qui, le premier, les a signalées, ont privé
les enquêteurs d'un indice ténu mais précoce de l'existence de
l'organisation de M. Ben Laden.
Le procès du World Trade Center s'est achevé en 1994 et ce n'est qu'en
1996 que la justice fédérale a ouvert une enquête criminelle sur les
activités de M. Ben Laden et du groupe Al-Qaïda. « Si les autorités
judiciaires avaient disposé d'une traduction correcte de ce document, a dit
M. Emerson, elles auraient pu comprendre que les auteurs de l'attentat du
World Trade Center et le groupe de M. Ben Laden étaient liés. »
Interrogé sur ces erreurs de traduction, un porte-parole du bureau du
procureur fédéral, qui n'a pas voulu que l'on cite son nom, a simplement
déclaré que M. Ajaj transportait « un important volume de documents
imprimés de diverses organisations. », ajoutant que leurs titres parlaient
de conspiration internationale, d'opérations de commando et de
fabrication d'engins explosifs.
214
Le mouvement du djihad s'est également développé en Europe. En août
1994, trois jeunes musulmans français d'origine nord-africaine, portant
des cagoules et armés de mitraillettes, ont ouvert le feu sur des touristes
dans le hall d'un hôtel de Marrakech, au Maroc, tuant deux Espagnols et
en blessant un troisième. Enquêtant sur cet attentat, la police française a
découvert qu'il avait été préparé par deux Marocains anciens combattants
d'Afghanistan qui avaient recruté à Paris et Orléans des commandos pour
cette attaque et avaient envoyé plus d'une douzaine de leurs membres
s'entraîner en Afghanistan.
L'endoctrinement des jeunes recrues commençait par la religion, selon
des pièces à conviction et des dépositions d'un tribunal français.
Mohamed Zinedine, professeur de mathématiques et interprète du Coran
qui demeurait à Orléans, avait réuni autour de lui un groupe d'hommes
des banlieues de cette ville qui souhaitaient apprendre à prier. Selon la
même source, il leur a ensuite enseigné l'idée d'un djihad à mener contre
les gouvernements corrompus, disant que c'était un stade avancé de
l'observance de la loi islamique.
Un jeune Marocain a déposé que ce M. Zinedine, actuellement en fuite,
lui a présenté une bande vidéo montrant « des musulmans torturés en
Bosnie, des bébés ayant eu la gorge tranchée, des femmes enceintes
éventrées, les ongles arrachés. Il m'a dit, a-t-il poursuivi, qu'il y avait une
façon de les aider et que je devais m'y engager. » Les prières pour des
gens comme les musulmans de Bosnie étaient insuffisantes, selon
l'instructeur, et, selon les mots de celui-ci, il devait devenir un
« humanitaire armé ».
Les polices européennes enquêtant sur le réseau afghan en France, en
Belgique et en Allemagne ont trouvé trace d'appels téléphoniques entre
les islamistes établis en Europe et le Bureau des Services au Pakistan. En
mars 1995, les enquêteurs belges ont découvert une autre pièce à
215
conviction : un CD-ROM trouvé dans la voiture d'un autre Algérien, qui
avait été entraîné en Afghanistan en 1992 et était membre d'une cellule
du GIA à Bruxelles. Les autorités belges ont reconnu avoir ignoré ce CD
au début de l'enquête.
Elles n'ont fait traduire son contenu que quelques mois plus tard et
découvert qu'il contenait plusieurs versions d'un manuel de terrorisme qui
circulait au sein des groupes islamistes depuis le début des années 90. Ce
volumineux manuel couvre divers sujets, allant de la « guerre
psychologique dans l'Islam » à « l'organisation des services secrets
israéliens » en passant par le « recrutement selon la méthode
américaine ».
Ce manuel contient également des méthodes détaillées de fabrication de
bombes, indiquant par exemple le moment adéquat pour mélanger les
produits chimiques, la façon d'utiliser une montre comme détonateur et
de tuer des gens au moyen de toxines, de gaz et de drogues. La préface
comporte une dédicace au nouveau héros de la guerre sainte : Oussama
Ben Laden. Ce manuel a été largement diffusé sous diverses versions et
des exemplaires ont été saisis par les polices de différents pays
européens.
La CIA, selon Reuel Gerecht, un de ses anciens hauts responsables,
n'aurait, d'après ce qu'on lui a dit, pu disposer d'un exemplaire de ce
manuel que vers la fin de 1999. « Ce guide terroriste, le plus important
jamais écrit, nous faisait défaut, dit-il, depuis des années. » Cette
transmission tardive aurait, selon lui, été la conséquence de la réticence
de l'Agence à examiner les conséquences de son soutien au djihad
antisoviétique. Mais, selon un responsable actuel de celle-ci, elle avait,
dès la fin des années 80, « accès à des versions » de ce manuel. « Ce n'est
pas le Saint-Graal que Gerecht prétend », a-t-il déclaré, ajoutant que les
parties portant sur le terrorisme étaient des ajouts assez récents.
216
C'est vers le milieu des années 90 que les autorités américaines ont
commencé à prêter attention à M. Ben Laden et à son entourage au
Soudan. Il était, pour elles, la personnalisation d'une dangereuse
évolution récente, un promoteur apatride du terrorisme utilisant sa
fortune personnelle - qu'un responsable du Moyen-Orient a estimée à
près de deux milliards de francs - pour financer les causes extrémistes.
Les autorités américaines ont alors demandé au Soudan d'expulser M.
Ben Laden et, en 1996, obtenu satisfaction, succès diplomatique qu'elles
devaient plus tard regretter amèrement. M. Ben Laden revint alors en
Afghanistan, où un nouveau groupe de jeunes militants islamistes, les
Taliban, prenait le pouvoir. Selon des responsables américains et moyenorientaux, une partie de l'argent utilisé par les taliban pour se rallier les
chefs de guerre locaux leur a été fournie par M. Ben Laden. Sans tarder,
ces nouveaux dirigeants intégristes de l'Afghanistan lui ont permis
d'utiliser leur pays pour y poursuivre son objectif de créer « un camp
pour un djihad mondial », selon les mots de M. Anas.
L'édit faisant un devoir sacré pour les musulmans de tuer tous leurs
ennemis
En février 1998, deux ans après son retour en Afghanistan, M. Ben Laden
annonçait publiquement ses intentions. Dans un camp situé à Khost, dans
l'est de l'Afghanistan, entouré de dirigeants d'autres groupes islamistes, il
annonçait qu'ils avaient fondé le Front islamique international pour le
djihad contre les Juifs et les Croisés, regroupant Al-Qaïda et des groupes
notamment égyptien, pakistanais et bangladais, et que ce Front prenait la
fatwa suivante : « Tuer les Américains et leurs alliés, tant civils que
militaires, est un devoir personnel pour tout musulman qui en est capable,
dans tout pays où c'est possible. »
Le 7 août 1998, huit ans après le débarquement de troupes américaines en
Arabie Saoudite, M. Ben Laden mettait, selon le parquet américain, ses
217
menaces à exécution : des bombes explosaient à quelques heures
d'intervalle dans les ambassades des États-Unis au Kenya et en Tanzanie.
Il s'est agi d'une opération de dimension véritablement internationale,
selon les procureurs fédéraux, qui affirment que ces attentats ont été
perpétrés par des musulmans de Tanzanie, d'Arabie Saoudite et de
Jordanie, qui, pour la plupart, ont été entraînés en Afghanistan. Selon la
même source, les terroristes kényans qui ont participé à l'opération se
sont entretenus directement avec M. Ben Laden par liaison téléphonique
satellitaire pour préparer leur action.
Ces attentats allaient coûter cher à Al-Qaïda. Moins de deux semaines
après, les États-Unis bombardaient des camps de M. Ben Laden en
Afghanistan. Au cours des deux années qui ont suivi, la police et les
services de renseignement du monde entier, souvent à l'instigation des
États-Unis, ont arrêté plus d'une centaine de ses militants dans une
vingtaine de pays.
Il ne se passe guère de mois sans que des autorités n'arrêtent et
n'interrogent des personnes ayant des liens avec Al-Qaïda. À la fin de l'an
dernier, dans le cadre d'une affaire que des responsables américains ont
qualifié de particulièrement alarmante, la police du Koweït a arrêté un
citoyen de ce pays, ancien combattant d'Afghanistan, qui a avoué être lié
au groupe de M. Ben Laden et préparer des attentats contre des cibles
américaines et koweïtiennes. Selon les autorités américaines, il a
finalement conduit la police à une cache d'armes où elle a découvert près
de 150 kilos d'explosifs et plus de 1.400 détonateurs.
On a évoqué plus haut la fermeture pendant deux jours de l'ambassade
des États-Unis à Rome, il faut y ajouter une alerte plus récente provoquée
par la possibilité d'un attentat d'Al-Qaïda qui, selon les autorités
américaines, a conduit les États-Unis à détourner un de leurs navires de
transport de troupes qui devait accoster à Naples.
218
Les autorités américaines reconnaissent que M. Ben Laden, avec son
organisation, s'est révélé un adversaire ingénieux et coriace. Aujourd'hui,
une partie importante de sa fortune personnelle a été dépensée ou se
trouve sur des comptes bancaires qui ont été bloqués. Mais, indiquent ces
autorités, il reçoit de l'argent d'un réseau d'organismes charitables et
d'entreprises. Dans de nombreux pays, il reconstitue ses réseaux aussi
rapidement qu'ils sont démantelés.
Et l'échec conduit parfois à la réussite. Selon des responsables
américains, une tentative d'attentat organisée fin 1999 par un groupe de
Yéménites contre un navire américain, The Sullivans, alors qu'il transitait
par le Yémen, a échoué : le bateau des terroristes, bourré d'explosifs, a
coulé à quelques mètres du rivage. Mais, selon la même source, c'est un
agent saoudien du groupe de M. Ben Laden qui avait participé à cette
tentative d'attentat qui a organisé, avec certains des Yéménites impliqués,
l'attentat contre l'U.S.S. Cole au Yémen.
Les répressions nationales contre les militants islamistes, tels les efforts
largement couronnés de succès du pouvoir algérien pour juguler le GIA
au milieu des années 90, ont, dans plusieurs cas, renforcé le djihad
international. Selon les autorités américaines, les islamistes algériens les
plus radicaux collaborent aujourd'hui avec M. Ben Laden. En 1999, elles
ont arrêté Ahmed Ressam au moment où, venant du Canada, il tentait de
franchir la frontière avec un chargement d'explosifs. C'était la première
fois que des Algériens se trouvaient impliqués dans des opérations
terroristes sur le sol américain. Le procès de M. Ressam doit avoir lieu
cette année à Los Angeles.
Selon des responsables américains et moyen-orientaux, Israël qui, jusque
récemment,
considérait
M.
Ben
Laden
comme
un
problème
« américain », fait maintenant partie des cibles d'Al-Qaïda. Selon ces
sources, cette organisation a financé et entraîné un groupe anti-israélien,
219
Asbat al Ansar, qui opère à partir d'un camp de réfugiés palestiniens situé
au Liban.
Selon une inculpation confidentielle israélienne de juin dernier, un
membre du Hamas qui préparait des attentats visant des cibles situées en
Israël, notamment des colons et des militaires, avait été entraîné dans un
camp afghan de M. Ben Laden. « Al-Qaïda veut participer à la nouvelle
intifada contre Israël », a déclaré un responsable américain.
Selon Olivier Roy, spécialiste français des activités des groupes
islamistes, le grand atout d'Al-Qaïda est de disposer de milliers de
partisans du djihad, situés dans le monde entier, qui ne voient plus leur
combat en termes strictement locaux ni même nationaux, ce qui les rend
insensibles aux pressions politiques ou miliaires ordinaires. « Les actions
de M. Ben Laden, dit-il, ne sont pas la continuation de la politique par
d'autres moyens. Oussama Ben Laden ne veut pas négocier. »
1979 : Invasion de l'Afghanistan par des troupes soviétiques. Déclaration
par les musulmans de ce pays d'un « djihad » contre les envahisseurs, que
les États-Unis et l'Arabie Saoudite vont soutenir.
1981 : Assassinat du président égyptien Anouar el-Sadate imputé à des
islamistes.
1984 : Création du Bureau des Services par Abdoullah Azzam, islamiste
jordanien, dans le but de recruter et soutenir des partisans du djihad.
1984 : Départ d'Oussama Ben Laden de l'Arabie Saoudite pour le
Pakistan dans le but d'aider Azzam à créer les camps d'entraînement en
Afghanistan.
220
1986 : Création par Ben Laden d'Al Masadah, camp d'entraînement pour
les Arabes des États du Golfe.
1988 : Création par Ben Laden d'Al-Qaïda, groupe chargé de mener un
djihad mondial.
1989 : Retrait des troupes soviétiques d'Afghanistan. Fermeture par les
États-Unis de leur ambassade dans ce pays. Formation d'un
gouvernement provisoire afghan. Retour de Ben Laden en Arabie
Saoudite pour travailler dans la société de travaux publics familiale.
Mort d'Azzam dans un attentat à la voiture piégée ; scission du Bureau
des Services dont la faction extrémiste rejoint Al-Qaïda.
1990-1991 : Envoi de forces américaines et alliées en Arabie Saoudite
pour chasser l'Iraq du Koweït. Guerre du Golfe.
Installation au Soudan de Ben Laden, furieux de la présence américaine
près des lieux saints de l'islam, ainsi que du siège d'Al-Qaïda.
1992 : Annulation par l'armée algérienne des élections législatives en
cours. Tentative de renversement du gouvernement par des groupes
islamiques armés et début de la guerre civile.
Envoi de troupes américaines en Somalie pour une mission humanitaire
de l'ONU. Publication par Al-Qaïda d'une fatwa demandant l'attaque par
les musulmans des forces américaines en Arabie Saoudite, au Yémen et
dans la Corne de l'Afrique, notamment en Somalie.
1993 : Explosion au World Trade Center de New York faisant six morts.
Découverte de liens entre le Bureau des Services et Al-Qaïda, sans que
cela puisse conduire à une inculpation de Ben Laden.
221
1993 : Attaque d'une opération humanitaire de l'ONU par des tribus
somaliennes, qui selon un parquet américain ont été entraînées par AlQaïda. Dix-huit morts américains.
1994 : Montée des taliban comme force décisive dans la guerre civile
d'Afghanistan.
Retrait par l'Arabie Saoudite de la citoyenneté de Ben Laden qui est
désavoué par sa famille.
Explosions dans le métro de Paris, imputées à des militants algériens
entraînés en Afghanistan, faisant huit morts.
1995 : Explosion à Riyad d'une voiture piégée qui tue cinq Américains et
deux Indiens. Exécution par décapitation de quatre Saoudiens qui ont
avoué avoir été influencés par Ben Laden.
1996 : Sous l'influence des États-Unis, expulsion du Soudan de Ben
Laden, qui se réinstalle en Afghanistan.
1996 : Explosion près des Tours Khobar à Dhahran, en Arabie Saoudite,
d'un camion bourré d'explosifs, qui tue 19 soldats américains.
1998 : Publication par le Front islamique international pour le djihad
contre
les
Juifs
et
les
Croisés
-
regroupement
international
d'organisations islamistes sous la houlette de Ben Laden - de sa première
fatwa : Il est du devoir personnel des musulmans de tuer des Américains,
civils comme militaires, partout où c'est possible.
Attentats contre les ambassades des États-Unis au Kenya et en Tanzanie
faisant plus de 200 morts. En représailles, bombardement par l'aviation
des États-Unis de sites au Soudan et en Afghanistan.
222
Inculpation, pour complicité d'attentats, de Ben Laden, aux États-Unis,
qui offrent cinq millions de dollars pour sa capture.
1999 : Annonce par la Jordanie de la découverte du projet, imputé à AlQaïda, d'une série d'attentats contre des sites touristiques à Amman qui
devaient avoir lieu pendant les fêtes du millénaire.
Arrestation aux États-Unis, à un poste de douane de Port Angeles, État de
Washington, d'Ahmed Ressam qui conduisait une voiture de location
contenant des explosifs dissimulés.
2000 : Dans le port d'Aden, au Yémen, attentat contre le destroyer U.S.S.
Cole, qui fait 17 morts parmi l'équipage, opération qui, selon les
enquêteurs, a été montée par Ben Laden.
Reconnaissance par Ali Mohammed, ancien sergent de l'armée
américaine, de sa participation à la conspiration tramée par Ben Laden
dans l'affaire des attentats contre les ambassades des États-Unis en
Afrique orientale.
2001 : Début de la sélection du jury pour le procès de quatre personnes
accusées dans l'affaire des attentats contre les ambassades des États-Unis,
devant le Tribunal fédéral de District de Manhattan.
Reconnaissance par un ancien sergent de l'armée américaine de sa
participation à une conspiration fomentée par Ben Laden et destinée à
réaliser les attentats contre les ambassades des États-Unis en Afrique
orientale.
(Source : Département d’Etat américain)
223
ANNEXE II
Chronologie
3, 4, 5 février 1986, 17, 20 mars 1986, 8, 12, 14, 15 et 17 septembre
1986. Attentats en France attribués au CSPPA (Comité de solidarité aux
prisonniers politiques arabes) allié des FARL (Fraction armée
révolutionnaire libanaise). Bilan : une quinzaine de morts et plus de 200
blessés. Fouad Ali Salel, le responsable de cette vague d'attentats, est
arrêté en avril 1987.
26 février 1993. Attentat contre l'une des tours du World Trade Center. 6
morts.
9 novembre 1993. Première rafle dans les milieux islamistes en France :
opération « Chrysanthème ». Principaux visés : les cadres de la FAF
(Fraternité algérienne en France), affiliée au FIS algérien.
8 novembre 1994. Arrestation des membres du réseau Chalabi, base
arrière de soutien logistique aux combattants de l'Armée islamique du
salut (FIS) et des GIA.
24 décembre 1994. Détournement par quatre hommes des GIA du vol
d'Air France Alger-Paris. L'affaire se clôt par l'intervention du GIGN à
l'aéroport de Marignane (Marseille).
1er mars 1995. Neutralisation du réseau islamiste belge dirigé par Ahmed
Zaoui, considéré par la police comme l'homme fort des GIA en Belgique.
224
20 juin 1995. Démantèlement du réseau Salim. 131 personnes interpellées dans le cadre d'un réseau de soutien aux GIA dirigé par Mohammed
Kerrouche.
11 juillet 1995. Assassinat à Paris du cheikh Abdelkader Sahraoui, l'un
des fondateurs du FIS.
25 juillet 1995. Attentat dans une rame du RER B à la station SaintMichel. 8 morts.
17 août 1995. Une bombe placée dans une poubelle au 44 avenue de
Friedland fait 17 blessés.
26 août 1995. La bombe placée sur la voie du TGV Paris-Lyon n'explose
pas.
3 septembre 1995. Le système de mise à feu d'un engin explosif placé
sur le marché Richard-Lenoir à Paris ne fonctionne pas.
4 septembre 1995. Une bombe est découverte dans une Sanisette place
Charles-Vallin à Paris.
7 septembre 1995. Un véhicule piégé explose à proximité d'une école
juive de Villeurbanne (Rhône). Un blessé grave.
29 septembre 1995. Khaled Kelkal, principal suspect dans la vague
d'attentats de 1995, est abattu à Vaugneray, dans la région lyonnaise.
6 octobre 1995. Un attentat avenue d'Italie à Paris fait 16 blessés légers.
17 octobre 1995. Attentat dans le RER C. 30 blessés.
225
1er novembre 1995. Arrestation de Boualem Bensaid, l'un des chefs du
réseau responsable de la vague d'attentats de 1995.
4 novembre 1995. Rachid Ramda, considéré comme le financier du
groupe, est arrêté à Londres.
13 novembre 1995. Une bombe tue 7 personnes dans un bâtiment
abritant des militaires américains à Riyad (Arabie Saoudite).
29 mars 1996. Neutralisation du réseau Al Qaïda à Roubaix.
3 décembre 1996. Attentat dans le RER B à la station Port-Royal. 4
morts.
27 juin 1996. Une bombe explose dans le camp américain d’Al Khobar
(Arabie Saoudite) faisant 19 morts.
17 novembre 1997. 68 touristes sont massacrés à Louxor (Egypte).
Attentat attribué à la Jama'a Islamiya égyptienne.
7 août 1998. Attentats contre les ambassades américaines de Nairobi
(Kenya) et Dar es-Salaam (Tanzanie) attribués à Al Qaïda. Plus de 200
morts.
12 octobre 2000. Attaque suicide contre le destroyer américain USS
Cole dans le port d'Aden (Yémen). Attentat attribué à AL Qaïda. 17
morts.
9 septembre 2001. Assassinat du commandant Massoud, héros de la
résistance afghane, par deux Tunisiens appartenant à AL Qaïda.
226
11 septembre 2001. Quatre avions de ligne détournés par des terroristes
s'écrasent sur les tours du World Trade Center, sur le Pentagone et dans
un champ en Pennsylvanie. Bilan : près de 3 000 morts.
19 septembre 2001. Opération « Justice sans limites », rebaptisée plus
tard « Liberté immuable ». Déploiement des forces américaines dans le
golfe Persique.
5 octobre 2001. L'État de la Floride annonce le décès d'une personne dû
à la maladie du charbon (anthrax). La crainte d'une attaque biologique
gagne l'ensemble du pays.
7 octobre 2001. Début des bombardements américains en Afghanistan
13 novembre 2001. Chute du régime taliban. Les troupes de l'Alliance
du Nord entrent à Kaboul. Début de la traque de Ben Laden et de ses
hommes dans les montagnes de Tora Bora à la frontière afghanopakistanaise.
6 décembre 2001. Reddition des taliban à Kandahar, fief du mollah
Omar.
13 décembre 2001. Un attentat suicide contre le Parlement fédéral de
New Delhi fait une quinzaine de morts. Cette action meurtrière est
attribuée aux extrémistes musulmans du Cachemire.
22 décembre 2001. Richard Reid, sujet britannique, tente de faire
exploser une bombe cachée dans ses chaussures lors du vol Paris-Miami.
23 janvier 2002. Un journaliste du Wall Street Journal, Daniel Pear1, est
enlevé à Karachi (Pakistan). Il est assassiné le 21 février par ses
ravisseurs.
227
17 mars 2002. Un attentat à la grenade fait 5 morts dans un temple
protestant fréquenté par des diplomates à Islamabad (Pakistan). Action
attribuée à des terroristes islamistes.
11 avril 2002. Un camion-citerne explose tout près de la synagogue d'El
Ghriba sur l'île tunisienne de Djerba. Une vingtaine de morts, dont 14
touristes allemands. Auteur présumé de l'attentat : Nizar Ben Mohammed
Nasr Nawar, un Tunisien.
8 mai 2002. Un véhicule bourré d'explosifs percute le bus des ingénieurs
français de la Direction des constructions navales (DCN) à Karachi. 14
morts, dont 11 Français. Al Qaïda est fortement soupçonnée.
19 mars 2003. Début de la guerre en Irak*.
Avril 2003. chute du régime de Saddam Hussein*.
1 mai 2003. Le président Bush déclare la fin de la guerre en Irak*.
11 mars 2004. Attentats en Espagne. Bilan : 197 morts. Al Qaïda en est
le responsable*.
(Source : Ali Laïdi, « Le Jihad en Europe », pages 283-286)
*Moi même
228
ANNEXE III
HOMELAND SECURITY
US-VISIT is a U.S. Department of Homeland Security program
that enhances our country's entry and exit system. It enables the United
States to effectively verify the identity of incoming visitors and confirm
compliance with visa and immigration policies.
The goals of US-VISIT are to :
9 Enhance the security of our citizens and visitors
9 Expedite legitimate travel and trade
9 Ensure the integrity of the immigration system
9 Safeguard the persona] privacy of our visitors
The initiative will involve collecting travel information and "biometric
identifiers" (such as fingerprints, using a simple, inkless device) from
visitors to assist the border officer in making admissibility decisions.
The identity of visitors who need a visa to travel to the U.S. will be
verified upon their arrival and departure. These entry and exit procedures
address our critical need for tighter security and our ongoing
commitment to expedite travel for the millions of legitimate visitors we
welcome each year to conduct business, learn, see family, or tour the
country.
229
The verification process strengthens security by more accurately
verifying the identity of visitors who legitimately travel into the United
States. By capturing "biometrics" through the use of simple fingerprint
scanners, we will be able to conduct this verification process more
quickly and with more certainty than by searching databases by name
alone.
Upon Arrival
Many of the arrival processes will remain unchanged and will be familiar
to international visitors. At an airport or seaport, travel documents such
as a passport and a visa will be reviewed and a U.S. Customs and Border
Protection Officer will ask specific questions regarding the visitor's stay
in the U.S.
As part of the enhanced procedures, most visitors traveling on visas will
have two fingerprints scanned by an inkless device and a digital
photograph taken. All of the data and information is then used to assist
the border inspector in determining whether or not to admit the traveler.
These enhanced procedures will add only seconds to the visitor's overall
processing time.
All data obtained from the visitor is securely stored as part of the visitor's
travel record. This information is made available only to authorized
officials and selected law enforcement agencies on a need-to-know basis
in their efforts to help protect the nation against those who intend to harm
American citizens or visitors to our country.
230
US-VISIT Arrival Process for Visitors Traveling with a Visa
231
Upon Departure
The most notable change for international visitors will be new exit
procedures.
As part of US-VISIT, most visitors who require a visa will eventually
need to verify their departure. The US-VISIT system is being designed to
make this check out process easy by planning the placement of
automated self-service workstations in the international departure areas
of airports and seaports. By scanning travel documents and capturing
fingerprints on the same inkless device, the system is intended to validate
the visitor's identity, verify their departure, and confirm their compliance
with U.S. immigration policy.
Compliance with these new security procedures is critical because the
exit information will also be added to the individual's travel record to
protect their status for future visits to the United States.
232
Upon completion of testing and evaluation, the law requires that USVISIT capability be implemented at airports and seaports by December
31, 2003.
US-VISIT will enhance the security of the United States while expediting
legitimate travel and trade. While this has required some changes in our
entry and exit procedures, many things have not changed. The United
States of America is still a nation where diversity is celebrated and
people from all over the world are welcome. Today we - like most other
countries - are working to keep our borders secure while we maintain the
freedom to exchange ideas, keep businesses thriving, and enrich lives all
over the world.
US-VISIT helps to secure our borders, expedite the entry/exit process
and enhance the integrity of our immigration system while respecting the
environment and the privacy of our visitors.
(Source: www.dhs.gov/US-VISIT)
233
ANNEXE IV
AIR PORTS OF ENTRY DESIGNATED FOR US-VISIT
JANUARY 5, 2004
RANK ENTRY AIRPORT
RANK ENTRY AIRPORT
1 MIAMI IAP, FL
33 SAN ANTONIO,TX
2 TORONTO, CANADA
34 FREEPORT, BAHAMAS
3 JFK IAP, NY
35 HAMILTON, Bermuda
4 LOS ANGELES IAP, CA
36 SHANNON, Ireland PFI
5 VANCOUVER, CANADA
37 CINCINNATI, OH
6 MONTREAL, CANADA
38 BALTIMORE, MD
7 SAN FRANCISCO, CA
39 DENVER, CO
8 HOUSTON Intercontinental ,TX
40 TAMPA , FL
9 CHICAGO OHARE, IL
41 SAN DIEGO, CA
10 CHICAGO MIDWAY, IL
42 DUBLIN, IRELAND PFI
11 CALGARY, CAN PFI
43 MEMPHIS, TN
12 NEWARK, NJ IAP
44 Charlotte-Douglas, NC
13 ATLANTA, GA
45 PITTSBURGH, PA
14 DALLAS FT. WORTH, TX
46 TUCSON , AZ
15 DULLES, VA IAP
47 ARUBA
16 HONOLULU IAP, HI
48 ST. THOMAS, VI
17 DETROIT IAP, MI
49 West Palm Beach, FL
18 NASSAU, BAHAMAS
50 SANFORD, FL
19 OTTAWA, CANADA
51 NEW ORLEANS, LA
20 BOSTON LOGAN, MA
52 LAREDO, TX
21 SEATAC IAP, WA
53 Raleigh-Durham, NC
22 SAN JUAN, PR
54 BANGOR, ME
23 EDMONTON, CANADA
55 SALT LAKE CITY, UT
234
24 ANCHORAGE IAP, AK
56 ST. CROIX, VI
25 LAS VEGAS, NV
57 ST. LOUIS, MO
26 MINNEAPOLIS ST. PAUL, MA
58 FORT MYERS, FL
27 WINNIPEG, CANADA
59 BELLINGHAM, WA
28 AGANA, GUAM
60 CLEVELAND, OH
29 ORLANDO, FL
61 SPOKANE, WA
30 FORT LAUDERDALE, FL
62 KONA, HI
31 PHILADELPHIA, PA
63 PROVIDENCE, RI
32 PHOENIX , AZ
64 BRADLEY
RANK ENTRY AIRPORT
RANK ENTRY AIRPORT
65 PORTLAND, OR
99 KENMORE, WA
66 NORFOLK, VA
100 KING COUNTY, WA
67 ERIE, PA
101 KODIAK, AK
68 Brownsville-South Padre, TX
102 MANCHESTER, NH
69 KEY WEST, FL
103 MCALLEN, TX
70 MILWAUKEE, WI
104 OAKLAND, CA
71 FAIRBANK, AK
105 ONTARIO, CA
72 INDIANAPOLIS, IN
106 OPA-LOCKA
73 WILMINGTON, NC
107 Pease Tradeport, NH
74 PORTLAND, ME
108 RICHMOND, VA
75 MAYAGUEZ, PR
109 SACRAMENTO, CA
78 DOVER, DE
110 SAN JOSE, CA
79 PONCE, PR
111 SARASOTA, FL
80 AUSTIN BERSTROM, TX
112 ST. LUCIE, FL
81 DEL RIO, TX
113 ST. PETERSBURG, FL
82 SANDUSKY GRIFFIN, OH
114 Tamiami Executive, FL
83 NASHVILLE, TN
115 TETERBORO, NJ
84 JUNEAU, AK
85 JACKSONVILLE, FL
86 INTERNATIONAL FALLS, MN
235
87 RENO, AZ
88 CHARLESTON, SC
89 COLUMBUS, OH
90 KANSAS CITY, KS
91 ALBUQUERQUE, NM
92 VICTORIA - SYDNEY, CANADA
93 AGUADILLA, PR
94 BUFFALO, NY
95 EL PASO, TX
96 FAJARDO, PR
97 GREENVILLE, SC
98 ISLA GRANDE, PR
SEA PORTS OF ENTRY
GALVESTON RCI, TX
LONG BEACH CARNIVAL CRUISE, CA
MIAMI - RCI, FL
PORT CANAVERAL, FL
PORT CANAVERAL, TERMINAL 10 FL
SAN JUAN PAN-AMERICAN, PR
SAN PEDRO WORLD CRUISE CENTER, CA
SEATTLE SEAPORT, WA
SEATTLE, WA BIRTH 30, CRUISE TERMINAL
TAMPA, FL TERMINAL 3
TAMPA, FL TERMINAL 7
VANCOUVER, BALLANTYNE PIER, CAN
VANCOUVER, CANADA PLACE, CAN
VICTORIA, PRE INSPECTION, CAN
WEST PALM SEAPORT, FL
(Source : www.dhs.gov/US-VISIT)
236
ANNEXE V
1. Organisations
et
individus
accusés
d'activités
terroristes par les États-Unis après les attaques du 11
septembre 2001
Les organisations
Al Qaïda ; le réseau Abou Sayyaf, essentiellement implanté aux
Philippines; les Groupes islamiques armés (GIA algériens) ; le Groupe
salafiste pour la prédication et le combat (GSPC algérien) ; Harakat al
Moujahidine (Cachemire) ; le Mouvement islamique d'Ouzbékistan ;
Jihad islamique (Égypte) ; Jama'a Islamya (Égypte) ; Asbat al Ansar
(Liban) ; le Groupe de combat islamique libyen; Al Itihad al Islamiya
(Somalie) ; Armée islamique d'Aden (Yémen) ; Jaish-e-Mohamed
(Armée de Mahomet) implantée au Pakistan.
Les Hommes
Oussama Ben Laden ; Mohammed Atef (mort en novembre 2001 en
Afghanistan) ; Sayf al Adl ; Cheikh Saïd ; Abou Hafs ; Ibn al Cheikh al
Libi ; Abou Zoubeida (arrêté le 3 avril au Pakistan) ; Abdel Hadi al Iraqi;
Ayman al Zawahiri ; Tharwat Salah Chihata ; Tarek Anouar al Sayyed
Ahmad ; Mohamed Salah ; Mamoun Darkanzali ; Bilal Ben Marouan ;
Saad al Sharif ; docteur Amin al Haq ; Hadji Abdul Manan Agha;
Mohamed al Hamati ; Sakar al Djadaoui ; Ahmed Saïd al Kader; Yassine
al Kadi ; Ayadi Chafik Ben Mohammed ; Raed Hijazi ; Rachid Ahmed
Ladehyanov ; Omar Mahmoud Ousman ; Tohir Iouldachev ; Mohamed
Zia ; Abdel Rahmane Yassine ; Khaled Cheikh Mohamed ; Ahmed
Ibrahim al Moughassil ; Ali Saïd Ben Ali el Houri; Ibrahim Salih
237
Mohamed al Yacoub ; Abdelkarim Hussein Mohamed al Nasser ; Fazul
Abdallah Mohamed ; Mustapha Mohamed Fadhil ; Fahid Mohamed Ally
Msalam ; Cheikh Ahmed Salim Souedan ; Ahmed Khalfan Ghaïlani ;
Abdallah Ahmed Abdallah ; Ahmed Mohamed Hamed Ali ; Mouchine
Moussa Matwalli Atwah ; Imad Moughniyeh ; Ali Atwa ; Hassan Izz al
Din.
Organisations non gouvernementales islamiques (ONGI)
Makhtab Al Khidamat ; AL Kifah ; Wafa ; AL Rashid Trust; Al
Haramein.
Sociétés
Al Hamati Sweets Bakeries ; Al Shifa Honey Press for Industry and
Commerce; Jamia Ta'awoun Al Islamia; Fonds Rabita.
2. Principales arrestations dans les milieux islamistes
liées aux événements du 11 septembre 2001
Nous avons choisi de présenter les principales arrestations dans les
milieux islamistes liées aux attentats contre les États-Unis afin de
montrer l'ampleur du phénomène dans le monde. Précisons que toutes les
personnes citées bénéficient de la présomption d'innocence tant qu'elles
ne sont pas jugées.
Afghanistan
¾ John Walker Lindh (21 ans). taliban américain, appréhendé le 1er
décembre 2001 au fort de Qala-e-Jhangi, près de Mazar-e-Charif.
238
Allemagne
¾ Mounir al Motassadek (27 ans). Marocain, arrêté fin novembre
2001. II aurait été en contact avec les trois kamikazes de
Hambourg (Atta, Al Shehhi et Jarrah).
¾ Mandat d'arrêt contre le Marocain Zakariyah Essaabar (24 ans) et
le Yéménite Ramzi Bin al Shibh (29 ans), colocataires d'Atta. Bin
al Shibh avait tenté d'obtenir en août 2001 un visa pour les ÉtatsUnis. Il a fui le 5 septembre 2001. Autre mandat d'arrêt contre
Saïd Bahaji (26 ans) qui aurait vécu dans le même appartement
qu'Atta à Hambourg. Il a quitté le pays le 3 septembre 2001 pour
le Pakistan.
Arabie Saoudite
¾ Le 18 juin 2002, les autorités saoudiennes ont officiellement
annoncé l'arrestation de sept hommes présumés appartenir au
réseau AL Qaïda. C'est la première fois que Riyad reconnaît
l'existence de réseaux à l'intérieur de ses frontières. Parmi ces
hommes figure un Soudanais arrêté à Khartoum et expulsé vers
l'Arabie Saoudite. Cet homme est accusé d'avoir préparé des
attentats au lance-missiles contre la base militaire du PrinceSultan à Kharj.
Belgique
¾ Tarek Maaroufi. Belge d'origine tunisienne, arrêté le 18 décembre
2001 et soupçonné d'avoir recruté des activistes pour le compte
d'Al Qaïda.
239
¾ Nizar Trabelsi. Ancien footballeur professionnel tunisien, arrêté
le 13 septembre 2001. Il aurait préparé un attentat contre
l'ambassade américaine à Paris en relation avec le réseau de
Djamel Beghal.
¾ Mohammed Sliti. Arrêté en février 2002 en Iran et extradé en
Belgique en raison de sa nationalité belge. A séjourné avec sa
famille plusieurs années en Afghanistan. Il se serait occupé du
recrutement et de l'entraînement des jeunes recrues.
Espagne
¾ Imad Eddin Barakat Yarbas, alias Abou Dahdah. Espagnol
d'origine syrienne, chef présumé d'une cellule démantelée à la mi
novembre 2001. Serait un proche de l'Algérien Mohammed
Bensakhria, détenu en France et soupçonné d'être le relais Al
Qaïda (arrêté à Madrid le 22 juin 2001). Abou Dahdah est
soupçonné par le juge Garzon d'avoir directement participé à la
préparation des attentats du 11 septembre. Il aurait été souvent
aperçu à Londres en compagnie d'Abou Qutada, considéré par les
policiers comme le guide spirituel d'Al Qaïda en GrandeBretagne.
¾ Najib Chahib Mohammed. Marocain, appréhendé en janvier
2002. Il serait l'auteur d'un manuel de fabrication d'explosifs.
¾ Ahmed Brahim. Algérien, placé en détention le 17 avril 2002. Il
est soupçonné d'avoir participé au financement des attentats
contre les ambassades américaines du Kenya et de Tanzanie en
1998.
240
¾ Mohamed Galeb Kaladje Zouaïd. Arrêté le 23 avril 2002, il est
accusé par la police de financer le réseau Al Qaïda en Europe.
¾ Le 16 juillet 2002, la police espagnole a interpellé trois hommes
soupçonnés d'appartenir à Al Qaïda : Adbelrahman Alarnaat,
Mohammed Khan, considéré comme un financier d'AL Qaïda, et
Ghasoub al Abrash, dit Abu Mousab.
Etats-Unis
¾ Zacarias Moussaoui (33 ans). Franco-Marocain, arrêté le 16 août
2001 par la police de Saint Paul (Minnesota) pour sa conduite
étrange dans une école de pilotage.
¾ Mohammed Jawid Azmath (-47 ans) et Ayoub Ali Khan (51 ans).
Arrêtés le 12 septembre en possession d'une grosse somme
d'argent et de cutters dans un train au Texas. Ils sont aussi pilotes
débutants.
¾ Nabil Marabh (34 ans) et Walid Batouni. Appréhendés par le FBI
le 20 septembre à Chicago. Le FBI soupçonne Marahb d'avoir
joué un rôle d'intermédiaire entre Ben Laden et les dix-neuf
kamikazes.
¾ Bassam Kanj. Chauffeur de taxi arrêté à Boston. Il est soupçonné
d'avoir été en relation avec les terroristes du 11 septembre. Il
serait lié à Raed Hijazi, Jordanien détenu à Amman (il aurait
préparé des attentats), considéré comme un proche de Ben Laden.
¾ Moataz al Hallak. Imam résident à Laurel (Maryland). Il est
soupçonné par le FBI d'avoir été en relation avec Ben Laden en
241
1999 dans le cadre d'une collecte de fonds pour une association
musulmane.
¾ Omar Bakarbasha (26 ans). Arrêté par le FBI entre les 19 et 21
septembre à San Diego (Californie). L'homme aurait remis de
l'argent aux kamikazes et les aurait initiés au Web.
¾ Al Badr Mohammed al Hazmi (31 ans). Saoudien, arrêté à San
Diego pour ses éventuels liens avec les pirates de l'air.
¾ Richard Reid. Britannique. Arrêté le 22 décembre 2001 alors qu'il
tentait de faire exploser le vol Paris-Miami. Il est accusé d'avoir
été entraîné dans les camps d'Al Qaïda.
¾ José Padilla, alias Abdoullah al Moudjahir. Citoyen américain
arrêté le 8 mai 2002 à Chicago. I1 aurait été chargé par Al Qaïda
d'organiser un attentat à la « bombe sale » : une charge explosive
classique entourée d'éléments radioactifs.
France
¾ Jérôme Courtallier. Arrêté aux Pays-Bas le 18 septembre 2001 en
compagnie de deux autres personnes pour « faux en écriture et
fabrication de faux documents en vue de préparer un attentat ».
Son frère, David Courtallier, a été arrêté début 1999 à Caen
(Calvados), mis en examen pour « association de malfaiteurs en
relation avec une entreprise terroriste ». Converti à l'islam à
Londres, il aurait suivi un stage militaire en Afghanistan en 19971998.
¾ Djamel Beghal. Ce Français est considéré comme une pièce
maîtresse en France du réseau Al Qaïda. Il aurait recruté le Belge
242
Trabelsi et Kamel Daoudi. Il a été arrêté le 28 juillet 2001 à
Dubaï en provenance du Pakistan et extradé en France le 30
septembre 2001.
¾ Yacine Akhnouche. Arrêté plusieurs fois avant le 11 septembre
pour avoir passé trois ans en Afghanistan. Il aurait raconté aux
policiers sa rencontre avec Zacarias Moussaoui dans les camps
d'Al Qaïda.
¾ Youssef el Aouni (28 ans). Français d'origine marocaine, écroué
le 30 novembre 2001 pour «falsification de documents
administratifs et association de malfaiteurs dans un but
terroriste» ; Adel Tebourski (38 ans), Français d'origine
tunisienne, arrêté dans une ferme du Nord, a été mis en examen le
3 décembre 2001 pour « association de malfaiteurs dans un but
terroriste ». Tous les deux appartiendraient au réseau qui a livré
les faux papiers ayant servi aux meurtriers de Massoud. Deux
complices ont été arrêtés le 18 janvier 2002 : l'Algérien
Abderahmane Ameroud (24 ans) et le Français d'origine
algérienne Mehrez Azouz (34 ans).
¾ Ghulam Mustafa Rama. Pakistanais. Il a été arrêté le 12 juin 2002
avec deux autres hommes. La justice française le soupçonne
d'avoir apporté son soutien à Richard Reid, l'auteur de la tentative
d'attentat sur le vol Paris-Miami, le 22 décembre 2001.
Grande-Bretagne
¾ Lofti Raissi (27 ans). Pilote algérien arrêté le 21 septembre, puis
libéré sous caution. Suspecté d'avoir instruit certains kamikazes.
243
¾ Bagdad Meziane (36 ans) et Brahim Benmerzouga (30 ans).
Algériens poursuivis pour leurs liens éventuels avec Al Qaïda,
appréhendés en septembre 2001 à Leicester en même temps que
Kamel Daoudi, expulsé vers la France.
¾ Amar Makhnulif, dit Abou Doha. Arrêté avant le 11 septembre
dans le cadre d'une affaire de réseau italien. Cet Algérien est
suspecté d'avoir préparé un attentat contre l'aéroport de Los
Angeles. Les Américains ont demandé son extradition.
¾ Seifallah Ben Hassine: Tunisien basé à Londres et recherché par
les policiers dans le cadre d'une affaire italienne.
¾ Yasser al Siri (38 ans). Égyptien, arrêté le 23 octobre 2001 et
inculpé de complicité dans le meurtre du commandant Massoud.
Il aurait fourni la lettre de recommandation.
¾ Abou Qutada (41 ans). Palestinien, réfugié politique. II a disparu
après l'adoption d'une loi sur l'élargissement de la détention voté
après le 11 septembre. Considéré comme le guide spirituel d'Al
Qaïda en Europe.
¾ Khalid al Fawwaz (37 ans). Égyptien. Incarcéré depuis 1998. Les
Américains souhaitent son extradition; ils le soupçonnent d'avoir
été le chef d'Al Qaïda en Grande-Bretagne et d'être impliqué dans
les attentats contre les ambassades américaines au Kenya et en
Tanzanie, en 1998 (224 morts).
Inde
¾ Mohamed Afroz Abdul Razzak. Libéré le 9 avril 2002 après
quatre mois de détention. L'homme a versé une caution de 2 000
dollars environ.
244
Italie
¾ Avril 2001, le réseau des Tunisiens de Milan tombe. Fin février,
les membres sont condamnés à des peines allant jusqu'à 5 ans de
prison (Ben Khemais ; Mohammed Aouadi Ben Belgacem;
¾ Mokhtar Bouchocha et Tark Charaabi : tous tunisiens). Chef de
cette cellule, Essid Sami Ben Khemais, alias « Saber », considéré
comme le chef du recrutement d'Al Qaïda en Italie, est soupçonné
d'avoir été en relation avec Omar Chaabani, alias Abou Jaffar,
l'un des lieutenants de Ben Laden.
¾ Depuis le 11 septembre, la police italienne a opéré 73
arrestations. Trois autres Tunisiens soupçonnés d'appartenir à Al
Qaïda comparaissent le 18 février devant le tribunal de Milan :
Madhi Kammoun, Abdel Ben Soltane et Jelassi Riadh.
¾ Mi-septembre 2001, le réseau napolitain de Takfir Wal Hijra (16
arrestations) est démantelé.
¾ Entre les 14 et 29 novembre 2001. arrestations d'Abdel Halim
Hafed Remadna (Algérien), Yassine Chekkouri (Marocain),
Nabel Bennatia (Tunisien). Ils fréquentaient le Centre d'études
islamiques de Milan.
¾ Sami Kishk, alias Hammada. Égyptien basé à Paris, arrêté à
l'aéroport de Rome, le 20 novembre 2001. Sous le coup d'un
mandat d'arrêt italien depuis le 5 octobre, il serait, selon la police,
le faussaire d'une cellule du GSPC (Groupe salafiste pour la
prédication et le combat) installée à Milan.
245
¾ Huit Marocains sont arrêtés fin février 2002. Ils sont soupçonnés
d'avoir préparé un attentat contre l'ambassade des États-Unis à
Rome.
Maroc
¾ Abou Zoubair el Haili. Saoudien, surnommé « l'ours ». Il a été
interpellé au Maroc à la mi-juin 2002. Il est considéré par les
services américains comme un cadre important d'Al Qaïda,
proche de Ben Laden.
¾ Début juin 2002, les services de sécurité marocains ont neutralisé
un groupe de Saoudiens appartenant à Al Qaïda. Les trois
hommes - Hilal Djaber Aouad al Assiri, Zouhair Hilal Mohamed
al Tbaïti et Abdullah M'Sfer Ali al Ghamdi - sont suspectés
d'avoir préparé des attentats suicides contre des navires de guerre
américains et britanniques stationnés dans les ports marocains.
Pakistan
¾ Cheikh Omar. Soupçonné d'être le commanditaire du rapt et de
l'assassinat de Daniel Pearl (journaliste au Wall Street Journal), il
est arrêté le 12 février 2002. Les Etats-Unis ont demandé son
extradition.
¾ Abou Zoubeida. Responsable du recrutement d'Al Qaïda. Il est
arrêté le 3 avril 2002 à Faisalabad et remis aux Américains.
Singapour
¾ Début janvier 2002, arrestation de treize suspects liés à Al Qaïda.
246
¾ Mi-février, arrestation de treize suspects accusés de préparer des
attentats à l'explosif (21 tonnes de nitrate d'ammonium).
Turquie
¾ Ahmed Mahmud, Mustapha Hassan et Firas Suleiman, qui se sont
présentés respectivement comme jordanien, palestinien et irakien
à la police turque, ont été arrêtés le 15 février 2002 en Turquie
orientale. Soupçonnés de préparer des attentats en Israël, ils
provenaient d'Afghanistan via l'Iran.
(Source : Ali Laïdi, « Le Jihad en Europe », pages 275-281)
247
BIBLIOGRAPHIE
248
Ouvrages
1)
ACHCAR Gilbert, « Le Choc des Barbaries », Paris, Complexe,
2002.
2)
BODY-GENDROT Sophie, « La société américaine après le 11
septembre », Paris, Presses de Sciences Po., 2002.
3)
BONANATE Luigi, « Le terrorisme international », Rome
(Italie), Casterman, 1994.
4)
BRISARD Jean-Charles et DASQUIE Guillaume, « Ben Laden
la vérité interdite », Paris, éd. Denoël, 2002.
5)
CHALIAND Gérard, « L’Arme du Terrorisme », Paris, Louis
Audibert, 2002.
6)
CHOMSKY Noam, « De la guerre comme politique étrangère
des Etats-Unis », éd. Agone, 2001.
7)
CHOMSKY Noam, « Pouvoirs et Terreur », Paris, Le Serpent à
Plumes, 2003.
8)
COOLEY John K., « CIA et Jihad 1950-2001 (Contre l’URSS,
une désastreuse alliance) », Paris, Autrement, 2002.
9)
DELAPORTE Murielle, « La politique étrangère américaine
depuis 1945 », Paris, Complexe, 1996.
10)
ENCEL Frédéric et GUEZ Olivier, « La Grande alliance de la
Tchétchénie à l’Irak : un nouvel ordre mondial », Paris, Flammarion,
2003.
249
11)
FRANCART Loup et DUFOUR Isabellle, « Stratégies et
décisions : "la crise du 11 septembre" », Paris, Economica, 2002.
12)
FREYMOND Jacques, « La Paix Dangereuse », Neuchâtel
(Suisse), éd. La Baconniére, 1986.
13)
GERE François, « Demain la guerre : une visite guidée », Paris,
Calmann-Lévy, 1997.
14)
« Guerre secrète contre Al-Qaïda », dir. par DENECE Eric,
Paris, Ellipses éd. Marketing S.A, 2002.
15)
GUNARATMA Rohan, « Al Qaïda: Au cœur du premier réseau
terroriste mondial », Paris, Autrement, 2002.
16)
HASSNER Pierre et VAÏSSE Justin, « Washington et le
Monde », Paris, Autrement, 2003.
17)
HEISBOURG
François,
« Hyperterrorisme :
la
nouvelle
guerre », Paris, Galilée, 2002.
18)
HOFFMAN
Bruce,
« La
mécanique
terroriste »,
Paris,
Calmann-Lévy, 1999.
19)
KAGAN Robert, « La puissance et la faiblesse: les Etats-unis et
l’Europe dans le nouvel ordre mondial », Paris, Plon, 2003.
20)
KISSINGER Henry, « La nouvelle puissance américaine »,
Paris, Fayard, 2003.
21)
LABBE Marie-Hélène, « L’arme économique dans les relations
internationales », Paris, PUF, 1994.
250
22)
LABEVIERE Richard, « Les dollars de la terreur », Paris,
Grasset et Fasquellle, 1999.
23)
LAÏDI Ali, « Le Jihad en Europe : les filières du terrorisme
islamiste », Paris, Seuil, 2002.
24)
« La première guerre du XXIe siècle », dir. par JEAMBAR
Denis, Paris, L’Express, 2001.
25)
LAURENT Eric, « La guerre des Bush », Paris, Plon, 2003.
26)
LAVENUE Jean-Jacques, « Dictionnaire de la politique et du
droit constitutionnel américain », Paris, L’Harmattan, 1995.
27)
« Les stratégies du terrorisme », dir. par CHALIAND Gérard,
Paris, Desclée de Brouwer, 1999.
28)
« Lutte contre le terrorisme et droits fondamentaux », dir. par
BRIBOSIA Emmanuelle et WEYEMBERGH Anne, Bruxelles
(Belgique), Bruylant, 2002.
29)
RAMONET Ignacio, « Guerres du XXIe siècle », Paris, Galilée,
2002.
30)
RETIVEAU Michel, « La convention de terreur : terreur légale
et terrorisme dans les sociétés démocratiques », Paris, L’Harmattan,
1994.
31)
ROY Olivier, « Les illusions du 11 septembre : le débat
stratégique face au terrorisme », Paris, Seuil et La République des
Idées, 2002.
251
32)
VAREILLES
Thierry,
« Encyclopédie
du
terrorisme
International », Paris, L’harmattan, 2001.
Documents officiels
1)
Mémorandum 01 408 du département de la Justice américain, 13
septembre 2001.
2)
"National Strategy For Homeland Security", par l’Office of
Homeland Security (OHS), juillet 2002.
3)
"The National Security Strategy of the United States", septembre
2002.
4)
"National Strategy for Combatting Terrorism", février 2003.
5)
Rapport de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN (AV 187/EC
(02) 7), « Les conséquences économiques du 11 septembre 2001 et la
dimension économique de la lutte contre le terrorisme », par Paul
HELMINGER, 23 septembre 2002.
6)
Rapport de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN (AV 172/CC
(02) 9 rév. 1), « La lutte contre le terrorisme : résultats et
questions », par KRÖNING Volker, novembre 2002.
7)
Rapport de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN (AV 181/DSC
(02) 15 rev. 1), « La guerre contre le terrorisme », par SHIMKUS
John, novembre 2002.
252
8)
Rapport de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN (54 DSC 03
E), « Progress in the war against terrorism », SHIMKUS John et
MUÑOZ-ALONSO Alejandro, 28 avril 2003.
9)
Déclaration du sommet de l’OTAN à Prague le 21 novembre
2002 (OTAN).
10)
Résolution 1373 du Conseil de sécurité adoptée le 28 septembre
2001 (S/res/1373).
11)
Résolution 1386 du Conseil de sécurité des NU adoptée le 20
décembre 2001.
12)
E/CN.4/2002/L.50/Rev. 1, le 16 avril 2002 (Nations Unies).
13)
A/57/273 – S/2002/875, 6 août 2002 (Nations Unies).
14)
Rapport d’Information du Sénat français, n° 313, Session
ordinaire de 2001-2002.
Articles de presses
1)
ADDI Lahouari, « La perception des attentats du 11 septembre
dans
le
monde
arabe
et
musulman »,
CONFLUENCES
MEDITERRANEE, N° 40, Hiver 2001-2002.
2)
CHAMPIN Christophe, « Les Etats "voyous" solidaires de
Washington », RFI (Radio France Internationale), 13 septembre 2001.
3)
CHESNOT Christian, « Le monde arabo-musulman refuse les
amalgames », RFI (Radio France Internationale), 5 septembre 2002.
253
4)
CORIOU Loïc et BOURGEAT Régis, « La liberté de la presse
à l'épreuve de la politique anti-terroriste de l'administration Bush »,
REPORTERS SANS FRONTIERES, 23 mai 2002.
5)
COURRIER INTERNATIONAL N° 680 du 13 au 19 novembre
2003.
6)
De La GORCE Paul-Marie, « Aux sources de la dispute francoaméricaine », LE MONDE DIPLOMATIQUE, mars 2003.
7)
DUTEIL Mireille, « Diplomatie : une amitié houleuse », LE
POINT, N° 1515, 28 septembre 2001.
8)
GADAULT Thierry et TANGUY Gilles, « L'Irak, terre de
contrats français », L’EXPANSION, 26 février 2003.
9)
GHORBAL Samy, « Europe/Etats-Unis : la fracture », JEUNE
AFRIQUE L’INTELLIGENT (JAI), n° 2235, du 9 au 15 novembre
2003.
10)
GOSSET
Ulysse,
« Singes
capitulards
mangeurs
de
grenouilles», OUEST-FRANCE, mai 2003.
11)
GRESH Alain, « Arabie Saoudite : Coup de froid sur les
relations avec Washington », LE MONDE DIPLOMATIQUE, juin
2002.
12)
GRESH Alain, « Lendemain de "Victoire" : les grands écarts de
l’Arabie Saoudite », LE MONDE DIPLOMATIQUE, juillet 2003.
13)
HANSON Victor Davis, « Adieu à l’Europe », LE DEBAT, N°
123, janvier-février 2003.
254
14)
LABERGE Martin, « La France et la politique américaine en
Irak », POINTS DE MIRE, Vol. 4 N° 3, 27 février 2003 (CEPES ou
Centre d’Etudes des Politiques Etrangéres et de Sécurité se trouvant
au Canada).
15)
« La France et la Russie opposeront leur droit de veto », RADIOCANADA, 10 mars 2003.
16)
LAGARDE Dominique et SALÜN Tangi, « Guerre d'Irak : le
grand écart des régimes arabes », L'EXPRESS, 3 avril 2003.
17)
« Les positions semblent inconciliables », RADIO-CANADA, 30
janvier 2003.
18)
« Les voix de la paix s'élèvent partout dans le monde », RADIOCANADA, 15 mars 2003.
19)
« Londres et Paris se disputent l'Afrique », RADIO-CANADA,
10 mars 2003.
20)
NICOLET Laurent, « Vladimir Poutine menace de suivre en
Georgie l’exemple américain », LE TEMPS (Genève), 18 septembre
2002.
21)
« Pas de "French Fries" au Capitole! », RADIO-CANADA, 11
mars 2003.
22)
RICHE Pascal, « Aux frontières américaines : souriez vous êtes
fichés », LIBERATION, 6 janvier 2004.
255
23)
SHRYOCK Andrew, « Les Arabes de Detroit et la "guerre
contre le terrorisme" de l’Amérique : la remise en question de leur
citoyenneté américaine », HERODOTE, n° 109, 2e trimestre 2003.
24)
SIMONNET Dominique, « L’Amérique doit mener la politique
des forts », L’EXPRESS, 6 mars 2003.
25)
SOUDAN François, « Rêve ou cauchemar ? », JAI, 14 mars
2004 (Article extrait du site internet de l’hebdomadaire).
26)
WARRAQ Ibn, « Contre l’islamisme militant », POLITIQUE
INTERNATIONALE, n° 95 - Printemps 2002
Divers
1)
ALDAPE Sofia, « The Us Campaign In Afghanistan : The Year
In Review », Center for Denfense Information (CDI), 10 octobre
2002.
2)
BIGLER Alan, « Le Programme américain d’aide à la lutte
antiterrorisme », diffusé par le Bureau des programmes
d’information internationale du Département d’Etat, 7 décembre
2001.
3)
HOFFMAN Paul, « Libertés Publiques Aux Etats-Unis Après le
11 Septembre », diffusé par le Bureau du secrétariat de presse de la
Maison Blanche, 13 novembre 2001.
4)
Intervention de Dominique de VILLEPIN, ministre des Affaires
étrangères français, au Conseil de sécurité le 14 février 2003.
256
5)
« La Nouvelle liste d’exclusion des Organisations Terroristes »,
Fiche d’information diffusé par le Bureau des programmes
d’information internationale du Département d’Etat, 21 novembre
2002.
6)
LEBAS Colomban, « Quel avenir pour la relation
transatlantique », septembre 2002 (Etude menée pour la fondation
Robert Schuman).
7)
PILLAR Paul, « La lutte contre le terrorisme et ses
instruments », diffusé par le Bureau des programmes d’information
internationale du Département d’Etat, le 6 décembre 2001.
8)
RANCOURT Jean François et ROUSSEL Stéphane, « Le
Département de la Homeland Security (DHS) : Tour de Babel
Bureaucratique Américaine ? », Bulletin d’information "Le Maintien
de la paix", n° 61, décembre 2002 (Canada).
9)
ROSS Wendy, « La réorganisation du FBI à la suite des
attaques du 11 septembre », diffusé par le Bureau des programmes
d’information internationale du Département d’Etat, 30 mai 2002.
10)
TERTRAIS Bruno, « Analyse et enseignements de la campagne
Iraqi Freedom », FRS (Fondation pour la Recherche Stratégique), 24
avril 2003.
Sites interne t
1)
http://news.bbc.co.uk/
257
2)
http://usinfo.state.gov/ (Site officiel du Département d’Etat des
Etats-Unis).
3)
www.army.mil (Site de l’armée américaine).
4)
www.cairotimes.com/ (Site de l’hebdomadaire égyptien Cairo
Times).
5)
www.cdi.org: (Center for Defense Information (CDI). Site
d’information sur la défense américaine. Vous pouvez y retrouver des
informations sur la campagne irakienne, sur la campagne afghane, sur
le partenariat stratégique Etats-unis/Russie etc.)
6)
www.centcom.mil (Site du commandement militaire américain
Centcom responsable des opérations en Afghanistan)
7)
www.defense.gouv.fr/dga/fr/pdef/declaration_sommet_prague
.pdf (Site du ministère de la défense française. Vous retrouverez à
cette adresse la Déclaration du sommet de l’OTAN à Prague le 21
novembre 2002).
8)
www.defenselink.mil (Site du Département de la défense des
Etats-Unis).
9)
www.enduring-freedoms.org (Site créé par Reporters sans
frontières pour dénoncer les atteintes aux libertés collectives et
individuelles engendrées par la guerre contre le terrorisme).
10)
www.er.uqam.ca/nobel/cepes (Site du Centre d’Études des
Politiques Etrangéres et de Sécurité ou CEPES).
11)
www.fatf-gafi.org (Site du GAFI).
258
12)
www.frstrategie.org/ (Site de la Fondation pour la recherche
stratégique).
13)
www.globalsecurity.org
14)
www.gulfnews.com/ (Site du quotidien Gulf News au Emirats
Arabes Unis).
15)
www.ifrance.com
16)
www.jeuneafrique.com (Site de l’hebdomadaire africain Jeune
Afrique l’Intelligent).
17)
www.kuwaittimes.net/today/index.php (Site du quotidien
koweitien Kuwait Times).
18)
www.lefigaro.fr
19)
www.lemonde.fr
20)
www.lexpansion.com (Site du Magazine l’Expansion).
21)
www.liberation.fr
22)
www.radio-canada.ca (Site de Radio Canada).
23)
www.rfi.fr (Site de Radio France Internationale).
259
TABLE DES MATIERES
260
SOMMAIRE …………………………..…………...…………..…… 1
INTRODUCTION ……………………………..…………….......... 3
PREMIERE PARTIE : DE L’EFFICACITE DE LA
GUERRE ANTI-TERRORISTE …………..…………..…........ 8
CHAPITRE 1 : Les acteurs de la guerre contre le terrorisme
et leurs missions ……………..……………………………….……….... 9
I. Une brève présentation de la NSHS ……………..……….... 9
II. Le rôle des autorités fédérales américaines dans la guerre
contre le terrorisme …………..…………………..……...... 14
A. L’OHS : une agence de rang ministériel pour
coordonner la guerre contre les terroristes en attendant
la création d’un ministère de sécurité intérieure ………..... 14
B. La naissance du ministère de sécurité intérieure et sa
mission dans la guerre anti-terroriste ……...……............... 15
1) Les missions du DHS ………………………...…. 16
2) La structure du DHS ……………..…………...…. 17
a) Les cinq directions générales du DHS et
leurs missions ……...………...………...…….. 17
b) Les hauts fonctionnaires du DHS et leurs
missions …………………...………...……….. 19
261
C. Les rôles des autres ministères dans la guerre contre le
terrorisme ………………………...…………………...….. 20
-
Le Département de la Défense (DoD) ……...…...... 21
-
Le Département de la justice (DoJ) ……...….......... 22
-
Le Département d’Etat (DoS) …...……………….. 23
-
Le Département de la santé et des services
humaines (DHHS) ……...……………….................. 24
-
Le Département du Trésor (DoT) ……………...… 25
-
Le Département de l’agriculture (USDA) …......…. 25
III. Les autres acteurs de la guerre contre le terrorisme et leurs
missions …………………………………………………...……. 27
A. Les agences de renseignements et la guerre antiterroriste……...……………………………………...…..... 27
1) Le FBI ………………………………...……….... 27
2) La CIA ………………………………………….. 30
B. Le rôle des citoyens américains ……….…………….... 31
C. Le rôle du secteur privé et des autorités étatiques et
locales…………...……………………………….…...…… 32
CHAPITRE 2 : La guerre contre le terrorisme : une “politique”
anti-terroriste unilatéraliste bénéficiant d’un soutien international
mitigé ………………….…………………………………….........…... 34
I. Présentation de la "National Strategy for Combatting
Terrorism"……………………………………………………….. 34
II. Les mesures américaines de lutte contre le terrorisme : des
mesures unilatéralistes ……………………...…………….…..… 38
262
A. Les mesures juridiques et sécuritaires …………...……. 38
1) L’USA PATRIOT Act …………….....…………... 38
2) Des commissions militaires pour juger les
terroristes…………………………...…...………….. 40
3) L’US-VISIT : un programme pour filtrer les
entrées aux Etats-Unis ………………………...…… 42
4) Le programme d’aide anti-terroriste (ATA) : un
programme pour aider certains pays à former leurs
forces de sécurité ……………...………………...…. 44
B. Les mesures financières pour bloquer les avoirs des
terroristes ……..…………………………...……………... 45
C. Les mesures militaires ……………………………....… 48
1) Des changements intervenus dans le domaine
militaire depuis le 11 septembre ………………........ 49
a) La Quadrennial Defense Review
(QDR)………..……………………………..... 49
b) La création d’un nouveau commandement
pour protéger le territoire américain : le
Northcom…...………………………………... 51
2) Les opérations militaires ……….……...………... 52
a) OEF …………………….……………......... 53
b) OIF ………………………….……….......... 56
3) Le soutien international aux campagnes
américaines……………………………...……...…... 59
III. La coopération internationale à la guerre contre les
terroristes………………………….………………………….…. 62
263
A. L’appui internationale à la lutte contre les finances des
terroristes : l’un des rares domaines où l’étranger coopère
plus ou moins sérieusement …………..…………...….….. 63
1) Les NU et la lutte contre le financement du
terrorisme……………...……………...…………...... 63
2) L’Union européenne (UE) et le gèle des avoirs
terroristes ………………………………...……….... 64
3) Le G7, le G20 et la lutte contre le financement du
terrorisme ………………………...……………….... 65
4) Le GAFI et la lutte contre le financement du
terrorisme ………………………...…………...…..... 66
5) Les institutions financières internationales et la
lutte contre le financement du terrorisme …........….. 68
6) Les autres soutiens à la lutte contre les finances
des terroristes ………………………………...…...... 69
B. La coopération militaire bilatérale ……...…………….. 70
1) L’assistance militaire apportée aux
Philippines…............................................................. 70
2) L’assistance militaire apportée à la
Georgie…………....................................................... 71
3) L’assistance militaire apportée au Yémen ...……. 72
CHAPITRE 3 : Des acquis et de l’efficacité de la guerre antiterroriste………..…………………..……………...…………………... 74
I. Le bilan des opérations militaires en Afghanistan et en Irak :
un bilan mitigé ……...………………………...………...…......... 74
A. Les acquis des opérations …….…………………...…... 74
264
B. Les opérations militaires n’ont pas éradiqué le
terrorisme en Afghanistan et en Irak ; et la paix est
loin d’être gagnée dans ces pays ….………………...….… 77
II. Les difficultés de la lutte internationale contre les finances
des terrorismes …………………...……………………..…...….. 79
A. Les difficultés liées à la détermination et à la traque
des avoirs des terroristes ……………………………...….. 80
1) Les sources de financement des terroristes
compliquent le gèle de leurs avoirs …….…...……... 80
2) Hawala et Paradis fiscaux : un casse tête chinois
pour les traqueurs des avoirs terroristes …….……... 83
B. Les autres facteurs de blocage de la lutte financière
contre les avoirs des terroristes ………...……...……......... 86
1) L’inexistence d’une définition universelle du
terrorisme ………………………...……………........ 86
2) La « mauvaise volonté » des Etats à coopérer
entièrement pour bloquer les avoirs
terroristes…………………………...………...…….. 88
III. L’absence d’une coopération judiciaire internationale
affaiblie la guerre anti-terroriste alors que la recrudescence
des attaques terroristes à travers le monde sème le doute
quant à son efficacité ………………..…………………...…….. 89
A. La coopération judiciaire internationale :
un élément essentiel de la guerre contre le
terrorisme mais inexistant ………………...…………….... 90
265
B. La recrudescence des attaques terroristes à travers le
monde laisse croire à une inefficacité de la guerre contre
le terrorisme………………………………………......…... 94
DEUXIEME PARTIE : DES IMPLICATIONS DE
LA GUERRE ANTI-TERRORISTE DANS LES
RELATIONS AMERICAINES ……………………….…….... 98
CHAPITRE 4 : Les réactions au 11 septembre, à la guerre contre
le terrorisme et leurs motivations …………………….………..……… 99
I. Les réactions des Etats : des réactions à motivations diverses . 99
A. Les réactions aux attaques du 11 septembre et à la
guerre anti-terroriste en Europe ………..…………..…… 100
1) La réaction de la France ……………….….…… 100
2) Les réactions dans le reste de l’Europe …......…. 105
B. Les réactions des pays musulmans au 11 septembre et
aux opérations militaires américaines ……………........... 108
1) La réaction du Pakistan à la riposte américaine
contre les taliban …….............................................. 109
2) La réaction des pays arabes au 11 septembre ..… 111
3) Les réactions de certains pays musulmans aux
opérations militaires …………...…………………. 113
a) Iran : une réaction neutre ……….....….…. 114
b) Les autres réactions ……………...…....... 114
C. Les réactions au 11 septembre et à la guerre
anti-terroriste dans le reste du monde ……………........... 116
266
1) La réaction de la Russie : « oui à la guerre contre
le terrorisme et non à la guerre contre le
“partenaire” irakien » ……………...………….…... 116
2) Les réactions des autres pays beaucoup plus
liées à une volonté d’apaisement ……...……...…... 118
II. L’inquiétude des associations de défense des droits et des
libertés face aux nouvelles normes anti-terroriste ….…...….…. 120
A. Une inquiétude justifiée ……………………………... 120
B. Une liberté de la presse mal éprouvée par la guerre
anti-terroriste ………………………………….…....….... 124
III. Les réactions des OI aux attaques du 11 septembre et à la
guerre anti-terroriste …………………………………………... 127
A. Les nouvelles mesures mises en place par l’ONU
et ses organismes et sa réaction à la crise irakienne …..... 128
1) Quelques mesures anti-terroristes adoptées par
des organismes de l’ONU en réaction au 11
septembre………...……………………………….. 129
2) L’ONU et la crise irakienne …….…….……….. 131
B. La réaction de l’OTAN et sa transformation face aux
nouvelles menaces comme le terrorisme
international……………………..………….…………… 132
1) La réaction de l’OTAN aux attaques du 11
septembre …………………………………………. 133
2) La transformation de l’OTAN à la suite du 11
septembre …………………………...………….…. 134
267
CHAPITRE 5 : Les implications de la guerre anti-terroriste
dans les relations Etats-Unis/Europe et Etats-Unis/Russie .................. 138
I. Les implications de la guerre anti-terroriste sur les relations
transatlantiques ……………...………………………….……... 138
A. Les pommes de discorde entre le “Vieux” et le
“Nouveau continent” …..…………………….………….. 139
B. L’Europe et l’Amérique : des valeurs communes et des
intérêts convergents malgré les pommes de
discorde……………………………………....………….. 143
C. La relation franco-américaine et la crise
irakienne………………………………………...…….…. 147
II. La guerre contre le terrorisme : une aubaine pour Moscou de
nouer un partenariat stratégique avec Washington, de
mater la rébellion tchétchène et d’apaiser les tensions au
sujet des gorges de Pankisi ……...……………………...…....... 150
A. Le nouveau « partenariat stratégique » entre Moscou
et Washington ……………………….………………..… 150
B. La guerre contre le terrorisme : une occasion pour
Moscou de mater la rébellion tchétchène et de lui
priver sa zone de replie en Georgie (les gorges
de Pankisi) …..……………...………………………...…. 152
1) La « benladénisation » du conflit tchétchène ..… 152
2) La Russie tolère la présence américaine en
Georgie dans l’espoir de priver les rebelles
268
tchétchènes de leur refuge des gorges de
Pankisi …………..……………………………...… 154
C. La coopération dans la guerre contre le
terrorisme n’a pas fait disparaître les divergences russoaméricaines ………...…………………………………..... 156
CHAPITRE 6 : Les implications de la guerre contre le terrorisme
sur l’opinion publique musulmane et sur les relations
Etats-Unis/Régimes proaméricains ………………………....……….. 159
I. Les implications de la guerre contre le terrorisme sur
l’opinion publique musulmane …………………………....…... 159
A. La guerre anti-terroriste attise l’anti-américanisme et
exaspère le sentiment d’injustice des musulmans ………. 160
B. Les sujets à frustration …………………….………… 164
1) Le conflit israélo-palestinien ………….……….. 165
2) L’affaire irakienne …………….…….…………. 167
a) La Guerre du Golfe…………….…….…... 167
b) Les sanctions économiques imposées à
l’Irak par la communauté internationale
après la guerre du Golfe ……………...…...... 168
II. Les implications de la guerre contre le terrorisme sur les
relations Etats-Unis/Régimes proaméricains ………..……….... 172
A. Les implications de la guerre contre le terrorisme sur
les relations Etats-Unis/Arabie Saoudite ……..…….…… 172
1) L’historique des relations Etats-Unis/Arabie
Saoudite………………………...…………….…… 172
269
2) Les relations américano-saoudiennes depuis le
11 septembre : des relations houleuses …….……... 177
B. Les implications de la guerre contre le terrorisme sur
les relations Etats-Unis/Autres régimes proaméricains et
les desseins américains au Moyen-Orient depuis le 11
septembre……………………………………...……….... 181
1) Les relations américaines avec les autres
régimes proaméricains du monde musulman :
Egypte, Jordanie et Pakistan ……………..…..…… 181
a) Egypte/Etats-Unis : des relations éprouvées
par la guerre anti-terroriste ……………......... 181
b) La Jordanie et le Pakistan : deux pays qui
ont su tirer profit de la guerre anti-terroriste .. 183
1. La Jordanie ………………………...…...... 183
2. Le Pakistan …………………….……..….. 184
2) Les desseins américains au Moyen-orient depuis
le 11 septembre ...……………………………......... 186
CONCLUSION ……………………………………………..…… 189
DOCUMENTS ANNEXES …………………………….……... 194
BIBLIOGRAPHIE ……………………………………….…….. 247

Documents pareils