CA Rennes, 30 juin 2015, n°14/01014 - Osez vos droits

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CA Rennes, 30 juin 2015, n°14/01014 - Osez vos droits
Jurisprudence
Cour d'appel de Rennes
6ÈME CHAMBRE B
30 juin 2015
n° 14/01014
Sommaire :
Texte intégral :
Cour d'appel de Rennes 6ÈME CHAMBRE B 30 juin 2015 N° 14/01014
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
6ème Chambre B
ARRÊT No.
R. G : 14/ 01014
M. Etienne X...
C/
Mme Laëtitia Y...
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Copie exécutoire délivrée
le :
à:
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 30 JUIN 2015
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Jean-Luc BUCKEL, Président,
Monsieur Pierre FONTAINE, Conseiller,
Mme Françoise ROQUES, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Catherine DEAN, lors des débats, et Madame Huguette NEVEU, lors du prononcé,
DÉBATS :
En chambre du Conseil du 04 mai 2015
devant Monsieur Jean-Luc BUCKEL, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des
parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé hors la présence du public le 30 Juin 2015 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue
des débats.
****
APPELANT :
Monsieur Etienne X...
...
76310 SAINTE ADRESSE
Représenté par Me BOUROUILLOU substitugant Mr Christine JARNIGON-GRETEAU, avocat au barreau de RENNES
INTIMÉE :
Madame Laëtitia Y...
née le 30 Mars 1976 à DINAN (22)
...
22100 DINAN
Représentée par Me Aurélie GRENARD de la SCP LOZAC'MEUR/ GARNIER/ BOIS/ DOHOLLOU/ SOUET/ ARION/ ARDIS SON/
GRENARD, avocat au barreau de RENNES
Des relations entre Monsieur Etienne X... et Madame Laëtitia Y...est né Arthur le 2 août 2007, reconnu par ses père et mère.
Les parents se sont séparés une dizaine de jours après la naissance de l'enfant à la suite d'un épisode de violence de
Monsieur X... sur Madame Y...et pour lequel il a été condamné à une peine d'amende le 17 janvier 2008.
Par jugement du 12 juin 2008, le juge aux affaires familiales du Tribunal de grande instance de Dinan a fixé la résidence de
l'enfant chez la mère et attribué au père un droit de visite progressif et en premier lieu, dans un point de rencontre. Sur
l'appel de Monsieur X..., la cour, par arrêt du 23 juin 2009, a fixé à son profit un droit d'accueil, une fin de semaine sur deux
et la moitié des vacances scolaires.
Sur l'assignation délivrée par Madame Y...qui invoquait des violences du père sur l'enfant, le juge aux affaires familiales du
Tribunal de grande instance de Saint-Malo a, par jugement du 29 novembre 2012, ordonné une expertise psychiatrique et
fixé, dans l'attente du dépôt du rapport, le droit de visite du père deux fois par mois en lien neutre.
Le rapport d'expertise judiciaire a été déposé le 17 juin 2013.
Par jugement du 17 décembre 2013 le magistrat précité a :
- fixé la résidence habituelle de l'enfant au domicile de la mère,
- accordé au père un droit d'accueil progressif : pendant six mois et jusqu'au vacances d'été 2014, en lieu neutre une fois
par mois, puis la première fin de semaine de chaque mois le samedi et le dimanche de 10 heures à 18 heures, les trajets
étant à sa charge ; à partir de septembre 2014 : les fins de semaines paires de chaque mois du vendredi, sortie d'école, au
dimanche 19 heures, ainsi que durant la moitié des vacances scolaires, première moitié les années paires, seconde moitié
les années impaires, les vacances d'été étant fractionnées par quinzaines,
- maintenu à 300 ¿ par mois la contribution du père à l'entretien et l'éducation de l'enfant,
- laissé à chaque partie la charge de ses dépens.
Monsieur X... a interjeté appel de ce jugement selon déclaration reçue au greffe de la Cour le 10 février 2014.
Par ses dernières conclusions du 20 août 2014 il demande à la cour :
- de fixer la résidence d'Arthur à son domicile,
- d'accorder à la mère un droit de visite et d'hébergement les fins de semaines paires de chaque mois du vendredi 19 heures
au dimanche 19 heures et la moitié des vacances scolaires, première moitié les années paires, seconde moitié les années
impaires,
- de fixer à 550 ¿ par mois la contribution de la mère à l'entretien et l'éducation de l'enfant,
- d'ordonner le partage des trajets par moitié avec remise de l'enfant à Saint-Martin des Besaces, et ce, quelque soit le
titulaire du droit d'accueil,
- subsidiairement, de fixer la contribution du père à l'entretien et l'éducation de l'enfant à 180 ¿ par mois,
- de condamner Madame Y...à payer la somme de 1. 500 ¿ au titre des frais irrépétibles,
- de statuer sur les dépens.
Dans ses dernières écritures du 31 mars 2015 Mme Y...demande à la cour :
- de confirmer le jugement du chef de la résidence de l'enfant et de l'octroi d'un droit de visite progressif au père,
- de dire que Monsieur X... bénéficiera d'un droit de visite s'exerçant pendant une période de 6 mois en lieu neutre une fois
tous les 15 jours,
- de dire qu'à condition qu'il ait exercé ce droit de visite en lieu neutre et à l'expiration de ce délai de 6 mois, il pourra
bénéficier d'un droit de visite s'exerçant à la journée le dimanche les 1er, 3ème et 5ème dimanche du mois de 10 heures à
18 heures à charge pour lui d'effectuer les trajets pendant une période de 6 mois,
- de dire qu'à l'expiration de ce délai de 6 mois et à condition que Monsieur X... ait respecté cette progressivité, il pourra
bénéficier d'un droit de visite et d'hébergement une fin de semaine sur deux et la moitié des vacances scolaires, celles d'été
étant fractionnées par quinzaine, les trajets étant à la charge du père,
- de dire qu'à défaut d'avoir exercé ses droits à l'issue de la première heure pour les fins de semaines et à l'issue de la
première journée pour les vacances, le titulaire sera présumé y avoir renoncé pour toute la période concernée,
- de maintenir la contribution due par Monsieur X... à l'entretien et l'éducation d'Arthur à la somme de 300 ¿ par mois,
- de condamner Monsieur X... aux entiers dépens et au paiement de 1. 500 ¿ en application des dispositions de l'article 700
du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des faits de la cause, moyens et prétentions des parties, il est référé aux dernières écritures de
celles-ci.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 28 avril 2015.
Les éléments du dossier d'assistance éducative ont été transmis à la cour par le juge des enfants de Saint-Malo durant le
cours du délibéré et les parties y ayant été autorisées, Monsieur X... a déposé une note le 13 juin 2015.
SUR CE,
- Sur la résidence de l'enfant :
Aux termes des dispositions de l'article 373-2-6 du code civil, le juge doit régler les questions relatives à l'autorité parentale
qui lui sont soumises en veillant spécialement à la sauvegarde de l'intérêt de l'enfant.
Monsieur X... revendique la fixation à son domicile de la résidence d'Arthur, Madame Y...s'y opposant fermement.
Les parents entretiennent, autour de leur fils, un conflit particulièrement aigu depuis leur séparation quelques jours après la
naissance d'Arthur.
Madame Y...demeure focalisée sur des violences exercées, selon elle, au mois de septembre 2012 par le père sur l'enfant.
Bien que la plainte déposée par elle-même pour cette allégation de violences ait été classée sans suite, Arthur n'a pas revu
son père depuis cette date.
Dans le cadre de l'enquête pénale ouverte à l'occasion de cette plainte, une expertise psychologique a été ordonnée et le
rapport déposé en octobre 2012 mentionne la souffrance d'Arthur et un rejet de son père apparaissant préoccupant pour sa
construction psychique. L'expert remarque chez le jeune garçon des symptômes habituellement caractéristiques d'un
syndrome d'aliénation parentale.
Dans le rapport d'expertise judiciaire du 17 juin 2013, l'expert note qu'Arthur est perturbé et déstabilisé et ne peut investir
son père, que Madame Y..., décrite comme une mère omnipotente, exprime une volonté d'écarter le père de l'enfant et que
Monsieur X... parait capable de tenir compte de la place de la mère.
Madame Y..., qui n'entend pas se remettre en cause, critique ces expertises et a produit devant le premier juge un fort long
témoignage rédigé par un ami psychiatre n'ayant jamais rencontré Monsieur X...mais qui néanmoins le décrit comme étant
particulièrement nocif pour son fils.
A la suite de la plainte formulée par Monsieur X... auprès du conseil de l'ordre des médecins, ce psychiatre a indiqué dans un
courrier du 30 septembre 2014 avoir fait l'objet d'une manipulation de Madame Y....
L'appelant n'a cependant pas exercé le droit de visite, attribué par le premier juge en lieu neutre compte tenu de la longue
absence de relations entre le père et le fils. Monsieur X... refuse, en effet, de rencontrer à nouveau son fils dans ces
conditions ainsi qu'il l'a lui-même expliqué dans un courrier du 8 mars 2012 adressé au responsable du point de rencontre.
Au regard de la situation alarmante du jeune garçon, le premier juge a transmis sa décision et le rapport d'expertise
judiciaire au procureur de la République à la suite de quoi le juge des enfants du Tribunal de grand instance de Saint-Malo a
ordonné une investigation éducative le 17 juillet 2014.
Le rapport d'investigation déposé au tribunal le 18 mars 2015 ne permet de constater aucune amélioration de la situation
d'Arthur. Il est noté que l'enfant est pris dans le désir de sa mère, ne se permet pas de questionnement au sujet de
l'absence de son père, la souffrance de son manque est aussi grande que camouflée car Arthur ne se sent autorisé à la
nommer. Le développement psychoaffectif de l'enfant est impacté. Il a intégré la notion de dangerosité de son père, le
clivage est ancré et affecte l'enfant. Arthur est suivi par un pédo-psychiatre depuis le mois de juin 2011.
L'entretien de la psychologue avec Madme Y...permet de constater que cette dernière n'entend pas se remettre en cause ni
accorder davantage de crédit à Monsieur X....
Le rapport d'expertise judiciaire de juin 2013 insistait sur l'importance pour Arthur de rencontrer son père en lieu neutre
dans un premier temps, puisqu'il n'a grandi qu'avec sa mère qui a toujours tenu Monsieur X... à distance.
Il ressort toutefois du rapport d'investigation que la position de Monsieur X... n'a pas évolué et qu'il ne prend donc pas en
considération l'intérêt de son fils puisqu'il refuse toujours de le rencontrer en lieu neutre et envisage même de se retirer de
la vie d'Arthur si la résidence de l'enfant n'est pas fixée à son domicile.
Il est patent que les parents sont malheureusement incapables de se remettre en question dans l'intérêt d'Arthur.
Dans ces conditions, et à défaut pour le père d'avoir accepté de renouer des liens avec son fils dans un lieu neutre
permettant à Arthur, qui ne l'a pas vu depuis bientôt trois ans, d'être rassuré, il ne peut qu'être débouté de sa demande de
transfert de résidence, malgré les capacités éducatives dont plusieurs témoins attestent.
Sous réserves de toutes décisions prises ou à prendre par le juge des enfants, le jugement, sera, dès lors, confirmé et le
droit de visite paternel en lieu neutre sera maintenu, pour le cas où Monsieur X... prendrait enfin conscience que l'intérêt de
l'enfant rend nécessaire une reprise des relations père-fils dans un point de rencontre.
- sur la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant :
La contribution à l'entretien et l'éducation des enfants est, selon l'article 371-2 du code civil, fixée à proportion des
ressources de l'un et de l'autre des parents et des besoins de l'enfant. Cette obligation ne cesse pas de plein droit lorsque
l'enfant est majeur.
Monsieur X... conclut à la diminution de la pension alimentaire à la somme mensuelle de 180 ¿, ce à quoi s'oppose Madme
Y...qui en demande le maintien à la somme de 300 ¿.
Pour fixer la pension à ce montant, la cour dans son arrêt du 23 juin 2009 a retenu pour la mère un revenu de 2. 893 ¿ et
des prestations familiales de 177 ¿ et des charges de 1. 502 ¿ et pour le père un revenu de 3. 811 ¿ par mois et des charges
de 1. 918 ¿.
La situation des parties telle qu'elle résulte des pièces produites aux débats est la suivante :
Monsieur X..., gérant d'une SARL, a déclaré un salaire mensuel de 2. 662 ¿ en 2013 outre des revenus de capitaux mobiliers
de 1. 087 ¿, soit un total mensuel de 3. 749 ¿ et un salaire de 2. 750 ¿ en 2014, le montant des revenus de capitaux
mobiliers n'étant pas connu pour cette période.
Il supporte mensuellement les charges courantes habituelles dont une somme de 500 ¿ versée à l'administration fiscale pour
le remboursement d'un montant de 70. 114 ¿ avec intérêts, 93 ¿ pour l'impôt sur le revenu versé en 2014, les assurances et
la mutuelle santé pour 246 ¿ et des échéances de deux prêts personnels pour un total de 1. 397 ¿.
Il ressort de ses bulletins de salaires que Madme Y..., déléguée médicale dont le revenu est composé d'un fixe et d'une part
variable, a perçu un total mensuel imposable de 3. 869 ¿ en 2013 (cumul novembre) et de 4. 341 ¿ en 2014 (2 bulletins de
salaire de décembre).
Elle s'acquitte des dépenses de la vie quotidienne dont des mensualités d'un prêt immobilier à hauteur de 909 ¿, les impôts
et taxes pour 793 ¿ par mois, les assurances et les frais scolaires et extra-scolaires de l'enfant.
Arthur, bientôt âgé de 8 ans, a les besoins d'un enfant de son âge.
Au regard de ces éléments d'appréciation et du caractère prioritaire de l'obligation alimentaire, il convient de ramener à 200
¿ par mois la contribution paternelle à l'entretien et l'éducation de l'enfant.
- Sur les frais et dépens :
La nature familiale du litige conduit à dire que chaque partie conservera la charge de ses entiers dépens, sans qu'il y ait lieu
à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant après rapport à l'audience,
Confirme le jugement entrepris, sauf en ses dispositions relatives à la contribution à l'entretien et à l'éducation d'Arthur ;
Fixe la contribution de Monsieur X... à l'entretien et à l'éducation de l'enfant à la somme de 200 ¿ par mois ;
Rejette toute autre demande ;
Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Décision attaquée : RENNES (Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée)
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