«*Si sérieux s`abstenir*»

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«*Si sérieux s`abstenir*»
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AUTHOR "Jeroen Vandaele"
TITLE "«Si sérieux s’abstenir»"
SUBJECT "Target 13:1 (2001)"
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«Si sérieux s’abstenir»
Le discours sur l’humour traduit
Jeroen Vandaele
K.U. Leuven and VLEKHO-Brussels
Malgré le succès récent des Humour Studies et de la traductologie, la traduction de l’humour ne suscite pas souvent l’intérêt des chercheurs. La plupart
des contributions traitent de la soi-disante «(in)traduisibilité», qui se situerait aux niveaux «culturel» et «langagier». Bien qu’en général les pensées
soient empiriquement peu fondées et théoriquement déficientes, elles nous
procurent une image plus concrète de ces difficultés de traduction culturelles
et linguistiques. Pourtant, la «cartographie culturelle» a tout intérêt à prendre l’humour traduit encore plus au sérieux: son absence ou présence et ses
modalités se laissent lire comme des signes incontestables de frontières
communautaires. La bibliographie élargie qu’offre cet article pourrait servir
de point de départ d’une discussion plus articulée qui incorpore les résultats
récents aussi bien des Humour Studies que de la traductologie.
La traduction impossible?
Même le plus commun des mortels a ses idées reçues sur la traduction de
l’humour, de ce qui fait rire.1 Il affirmera sans doute que les problèmes de
traduction que pose le comique (pris comme synonyme, ici, de l’humour)
seront bien des fois insurmontables. Pourtant, l’homme de la rue n’est d’ordinaire pas le premier à questionner la possibilité/impossibilité de la traduction
(la soi-disant «(in)traduisibilité»). Bien plus souvent c’est du côté académique
(et philosophique) qu’il faut chercher les champions de l’intraduisibilité.
Suivant Wilhelm von Humboldt, nous comprenons et pensons le monde selon
les schémas préétablis et spécifiques de notre langue (la langue comme «lunettes conceptuelles»); on sait bien que pour Wittgenstein (II) chaque langue
constitue un «jeu» différent, une conception qui anéantit l’idée de «référence»
Target 13:1 (2001), 29–44. issn 0924–1884
© 2001 John Benjamins Publishing Company
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Jeroen Vandaele
et donc le tertium comparationis de deux langues; les leçons de traduction que
tira Quine d’un scepticisme linguistique extrême sont également connues: il est
impossible de vérifier jamais si original et «traduction» «signifient la même
chose» parce qu’il n’y a tout simplement pas de signification parfaitement
observable/contrôlable. Toute communication est toujours une traduction
invérifiable. Tout aussi académiquement formé, mais moins philosophique et
plus orienté vers la pratique, est le milieu des traducteurs et des traductologues.
Celui-ci prend en quelque sorte une troisième position dans le débat général,
bien résumée par Tricás Preckler:
Un texto nunca podrá ser totalmente intraducible … Aún así, es justo reconocer la existencia de ciertos problemas de intraducibilidad. Esta intraducibilidad
puede situarse a dos niveles:
intraducibilidad lingüística
intraducibilidad cultural (1995: 36)
Comme rien n’est vraiment «traduisible» dans les schémas drastiquement
sceptiques, l’humour ne le sera pas non plus; débat clos. D’autre part, le grand
public assume la traduction de l’humour comme un fait accompli. Qu’en est-il,
toutefois, du troisième groupe? Que pense «le discours traductologique», à
comprendre au sens large, de «textes plus ou moins explicites sur l’humour en
traduction et de la main de praticiens et théoriciens en la matière»?
Première constatation: en termes quantitatifs, il semble penser très peu.
Nous estimons avoir recueilli dans le présent article une bonne partie de la
littérature sur l’humour traduit, bien que le lecteur ne trouve à la fin qu’une
bibliographie relativement restreinte.2 Observation encore plus frappante si l’on
sait que les Humour Studies (un quatrième groupe possiblement intéressé par
notre sujet) vivent depuis la fin des années ’80 un boom énorme. Y aurait-il très
peu à ajouter aux idées reçues («C’est difficile»)? La traduction de l’humour
serait-elle plutôt perçue comme relevant de l’artistique ou du pragmatique, et
non du scientifique? Plutôt de l’idiosyncratique que du systématique? Le silence
(partiel) est toujours difficile à interpréter. Limitons-nous donc aux écrits
rassemblés ci-dessous.
Rien d’étonnant à ce qu’en matière d’humour la question de la traduisibilité/intraduisibilité gagne en importance vis-à-vis de la position que lui avait
accordée Tricás Preckler dans le débat sur la traduction en général. L’humour,
tout comme la poésie, le calembour et la métaphore, est souvent mentionné
parmi les cas prototypiques de ce qui défie le traducteur. Pour ce qui concerne
les jeux de mots, Delabastita avait rattaché la centralité de la traduisibilité à la
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Le discours sur l’humour traduit
nature essentiellement prescriptive ou normative des approches: «[T]he
question whether or not translation is possible presupposes that one has in
mind a fairly clear idea of what a translation is supposed to be …» (1993: 172).
Le même auteur fait encore remarquer que ces cadres normatifs partent en règle
générale d’une perspective non textuelle dans laquelle le côté «autofonctionnel»
d’un jeu de mots (l’aspect humoristique d’un jeu de mots considéré en isolement) est moins pertinent que le côté «synfonctionnel» (le calembour comme
«textème» intégré dans un réseau de relations textuelles) lorsqu’on veut
déterminer si un jeu de mots peut ou ne peut pas se traduire (1993: 183–186).
Des présuppositions semblables sous-tendent souvent le discours sur
l’humour et sa traduction. Elles témoignent plus en particulier d’une même
vision «essentialiste» sur la traduction; un discours essentialiste dans le sens
qu’il postule une relation d’équivalence qui part de toutes les caractéristiques
possibles d’un élément humoristique en isolation (le lieu d’apparition d’une
unité humoristique dans un texte, la forme de l’unité, son contenu, sa spécificité culturelle «incomparable» etc.), et non de ses fonctions humoristiques et
autres dans l’ensemble du texte:
[Le traducteur] substitue «la langue des nôtres», à «la langue des autres»: au
cours de ce processus se perdent malheureusement les subtiles manipulations
ludiques de la langue des nôtres: accents, dialectes, … (Diot 1986: 266)
Le vocabulaire pittoresque reflétant la réalité russe de l’époque et pour lequel
il est difficile sinon impossible de trouver un équivalent français. C’est le cas
par exemple de la tournure de politesse exprimée par la 3ème personne du
pluriel, suivie de ‘-s’, qui caractérise le langage des domestiques. (Lazarus
1986: 182)
Bien que bornés au champ comique, on pourrait taxer ces commentaires de
culturellement solipsistes et sceptiques.
Logiquement, la réponse à la question de la traduisibilité sera le plus
souvent négative. Ainsi Van Crugten (1989), un traducteur professionnel
connu, qui est notamment traducteur attitré de Hugo Claus, commence son
article par une énumération de ses propres traductions moins réussies (1989:27).
Les citations suivantes laissent deviner le ton négativiste assez généralisé
d’autres essais:
«Sous quoi la sentinelle ne doit-elle pas déposer les armes? — La sentinelle ne
doit déposer les armes sous aucun prétexte.» Cela est proprement intraduisible
en quelque langue que ce soit. (Bertaux 1986: 28)
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[Le traducteur] se trouve devant un problème insoluble: en effet, outre
l’impossibilité de traduire les calembours, il lui est impossible de traduire
dynamiquement les isotopies, les disjoncteurs enclencheurs des séquences nées
de l’explosion du «signe». (Diot 1986: 264)
Diot est totalement défaitiste dans son autre article, intitulé «Humor for
Intellectuals: Can It Be Exported or Translated? The Case of Gary Rudeau’s In
Search of Reagan’s Brain»: «When it comes to translating humor, the operation
proves to be as desperate as that of translating poetry» (1989: 84). Les intellos
seraient-ils plus essentialistes que le grand public?
Erreur de jeunesse, sans doute, mais les études dites «descriptives» ont
peut-être trop longtemps voulu présenter l’opposition «descriptif-prescriptif»
comme plus absolue qu’elle ne l’est en réalité. Delabastita (1993: 183) et Toury
(1986: 217–222) semblent suggérer qu’à la logique d’exclusion que propage le
normatif s’associeraient quasi automatiquement une vision «autofonctionnelle» sur le jeu de mots, et donc un défaitisme regardant sa traduction. Ce n’est
pas le cas dans notre domaine de l’humour: bien des auteurs combinent
normativité avec traduisibilité affirmative. Il y a un type de normativité construit autour de l’idée d’«effet semblable», notion qui peut cacher pas mal de
visions différentes mais qui semble tout de même plus flexible que celle
d’«équivalence» stricte: «The main thing is … that the effect of the translation
is the same as the original one: comical writing remains comical writing!» (von
Stackelberg 1988: 11). Mais toute flexibilité a ses limites: «The question is,
however: should the translator be allowed to make us laugh at his own ideas
rather than at those of the author? We do not think so» (1988: 12).
Landheer (1989) semble le plus optimiste. Après avoir donné sa solution à
quelques problèmes soi-disant insolubles, il conclut son article, «un essai de
démystification du dogme a priori de l’intraduisibilité», en constatant que
«dans la grande majorité des cas, disons entre 80 et 90%, il est possible de
trouver une traduction entièrement satisfaisante» (1989: 41). Laroche (1989) va
encore un pas plus loin en disant que «tout peut se traduire» (1989: 15).
D’autres auteurs qui optent, de façon plus prudente, pour la traduisibilité sont
Laurian («l’humour est souvent considéré comme intraduisible, et pourtant on
le traduit»; 1989: 6) et Nilsen (1989), qui lutte contre le dogme en citant
Baldinger en tête de son article:
By all the accepted theories of linguistics, it should be impossible to translate
from one language to another. Fortunately the ordinary translator does not
know this, and he goes ahead and translates it anyhow. (1989: 112)
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Le discours sur l’humour traduit
Toujours est-il que la traduisibilité reste le thème central et que l’optimisme des
derniers ne cache pas ce que Tricás Preckler avait déjà affirmé à propos de la
traduction en général; qu’un texte «puede presentar serias dificultades de
traducción en algunos segmentos» qui peuvent se situer aux niveaux linguistique et culturel. Quant aux études sur la traduction de l’humour, il vaut tout de
même la peine de voir de plus près quelles perspectives et illustrations elles
apportent.
«Culture»
D’abord, en gagnant en spécificité, «le culturel» se défait de son image d’idéecliché plutôt vague et automatiquement acceptée («le culturel, c’est toujours
difficile à traduire»). Les attaches culturelles de l’humour sont analysées comme
liées au fait que le comique présuppose (peut-être plus que le discours sérieux)
des schémas cognitifs communs. Del Corral (1988) esquisse comment se
développent et fonctionnent cette dépendance culturelle et ce réservoir de
présuppositions.
Communication breaks down when the levels of prior knowledge held by the
speaker/writer and by the listener/reader are not similar. While this is true of
any communication, the breakdown is particularly obvious in the case of
translated humor, whose perception depends directly on the concurrence of
facts and impressions available to both speaker/writer and listener/reader …
Our sense of humor is not innate … By imitation, [a child] learns when it is
considered proper to laugh, and his laughter becomes the result of conditioning, an automatic response to stimuli accepted as humorous by his society.
(1988: 25)
Une éducation différente inculque des connaissances et des schèmes cognitifs
différents à chaque enfant, et c’est surtout entre des personnes qui ont plus ou
moins le «même» passé cognitif et les mêmes automatismes que l’humour aura
le plus de chances de se produire et de se développer.
Ce qui explique également une seconde idée apportée par Del Corral, à
savoir que l’humour (car l’éducation) peut varier de groupe en groupe. Dans une
telle perspective, la «culture» ne constitue pas plus qu’un groupe — ou faudrait-il dire «terme»? — englobant parmi d’autres groupements possibles:
As a child grows, his comic vocabulary expands, and he discovers that, in
addition to the more or less ‘universal’ comedy of his earliest years, different
groups of people develop their own inside jokes. (1988: 25)
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Laurian élargit le facteur de l’éducation à celui du vécu en général lorsqu’elle
propose un classement non-exhaustif mais ample des «types de connaissances
communes au locuteur et à l’auditeur nécessaires pour la compréhension des
blagues, plaisanteries, histoires drôles racontées» (1989: 13). Diot (1986)
constate le même phénomène: dans l’exemple qu’elle fournit, les clichés locaux
(intéressants pour des caricatures, entre autres) sont humoristiques à l’intérieur
d’une seule culture:
… Groucho est l’Américain, jusque dans son parler, l’«Amurken», comme
disait Mencken; les accents, les codes de comportement, tous les personnages,
types, stéréotypes ou caricatures, sont américains … ne peuvent fonctionner
que dans le cas où le locuteur et le récepteur appartiennent au même système
culturel, et partagent les mêmes codes. (1986: 267)
Elle liste des formes d’humour culturellement spécifiques: «Yankee humor»,
«South West humor», «nonsense britannique», «humour juif», «la tradition
américaine des vaudevilles», etc. sans toutefois en établir les caractéristiques.
En même temps, un second apport relié au niveau culturel se profile: les
présuppositions, tellement cruciales, sont articulables et fonctionnent au moins
de deux manières différentes. Le réservoir culturel prend une forme «interneimplicite» et un aspect «externe-explicite»: d’une part les membres d’une
culture ou d’un groupe ont des connaissances communes qui sont à la base de
formes d’humour spécifiques; d’autre part ils partagent des préjugés (humoristiques) sur d’autres cultures ou d’autres groupes. Raphaelson-West appelle la
forme explicite «ethnic joke» (1989: 130) et l’interne «cultural joke», dont font
par exemple partie la parodie et la satire (1989: 133–134). Ainsi, selon Draitser
(1989), les Polonais forment le sujet de «blagues ethniques» aux Etats-Unis,
alors qu’ils sont fort estimés en Russie; ce qui entraîne peut-être des difficultés
de traduction.
Interne ou externe, selon Maria Tymoczko la «réalité culturelle inconnue
du lecteur de la traduction» (1987: 30) entrerait toujours dans un «paradigme
comique» particulier, notion qu’elle propose à l’instar de Thomas Kuhn et qui
se définit comme une vision, spécifique et intériorisée de ce qui est à considérer
comme humoristique (1987: 87–88). Tout comme les travaux résultant d’un
autre paradigme scientifique, les blagues conçues dans un autre paradigme
comique deviennent incompréhensibles «de l’extérieur», voire impossibles à
détecter. Une opinion extrême et à peine entendue en relation avec le texte non
comique, à moins qu’on ne s’appelle Quine.
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Le discours sur l’humour traduit
«Langue»
L’autre grand obstacle de tout traducteur d’humour relèverait, nous l’avons déjà
dit, du linguistique proprement dit — un principe qui s’avère également
articulable. Les trois problématiques degagées sont (1) l’interaction langueculture (2) les attaches généralement sociolinguistiques et (3) le côté quasi
inévitablement métalinguistique d’un texte comique plus large.
En effet, certains auteurs discernent tout d’abord un problème qui tient à
l’interaction entre la langue et la culture dans laquelle fonctionne la langue en
question. De Bruyn (1989) formule l’idée sous-jacente selon laquelle une langue
est le reflet de son environnement: «… language is a symbolic representation of
culture …» (1989: 79). Laurian (1989) signale que ce mécanisme d’adaptation
et d’appropriation linguistiques se produit tant en sémantique dénotative
(référentielle) qu’en sémantique connotative (émotionnelle):
1.Références précises des mots (et en particulier pour les langues où les
références extralinguistiques de l’une sont inexistantes pour l’autre).
2.Connotations précises des mots (et en particulier pour les cas où les
connotations liées à une référence pour une langue n’ont rien de commun avec
celles liées à la référence correspondante de l’autre langue). (1989: 13)
A en croire Diot (1989), ces deux volets ne se prêtent pas de façon égale à la
traduction: «While denotations can roughly be translated into a different
language, the connotations cannot» (1989: 84). Le traducteur sera donc confronté à un problème de signification bi-directionnel: d’un côté, certains
«réalèmes» locaux «obligent» une culture à fabriquer des termes spécifiques; de
l’autre, la culture se permet de charger certains termes ou expressions de
connotations spécifiques. Et ne peut-on pas penser que l’humour, en tant que
phénomène éminemment social (Attardo 1994; Vandaele 1999), fait fréquemment usage de connotations émotionnelles et de réalèmes particuliers?
Deuxièmement, toujours au niveau du linguistique, et également à propos
de l’ancrage des langues dans le monde, un nombre d’articles s’attarde sur les
registres, dialectes, sociolectes, idiolectes, etc. Ces attaches d’ordre social, qui se
manifestent à travers des variantes articulées par différentes couches sociales,
semblent jouer un rôle central dans bon nombre de textes humoristiques. Del
Corral (1988) fait observer à ce propos que la difficulté consiste en ce que
[t]he last thing we learn in a new language is the exact value of its words. Is a
word commonplace or is it elevated? Is it merely strong or insulting? … This
kind of shortcoming is particularly disastrous in humorous texts, in which plot
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and characterization are frequently subordinated to effects created through
carefully crafted language. (1988: 26–27)
Si le commentaire de Del Corral se limite à la détection, Sopeña-Balordi (1986)
semble inclure la recodification adéquate lorsqu’elle s’inquiète de «la difficulté
de traduire des textes très marqués dans la gradation des niveaux de langue et
des registres de discours» (1986: 239). Ce qu’Alam (1989) comprend par
«collocational problems» (72) inclut entre autres le problème des niveaux de
langue: selon lui, il faut toujours d’abord identifier le registre du texte-source.
Et rappelons les mots de Diot (1986): «la langue des nôtres», «la langue des
autres», «les subtiles manipulations ludiques de la langue des nôtres: accents,
dialectes» (1986: 266).
Un troisième élement langagier auquel plusieurs études accordent un rôleclef dans l’éventuelle intraduisibilité de l’humour est l’aspect dit «métalinguistique» d’une unité humoristique. Un signe ou une combinaison de signes peut
se dire «métalinguistique» s’il n’est pas énoncé exclusivement pour son signifié
mais en même temps pour sa forme (le signifiant). Parfois, comme dans les jeux
de mots, c’est justement une forme particulière qui permette d’énoncer une
signification totale, de créer tel ou tel effet cognitif sur le récepteur de l’énoncé.
Etant donné que la «distribution formelle» des signifiés est différente en chaque
langue (un mot en langue x n’est presque jamais la «traduction en tout contexte» d’un autre mot en langue y), un message qui met en relief (meta) sa
propre forme (linguistique) peut placer le traducteur devant des choix: forme ou
fond? Toutefois, le calembour n’est pas la seule incarnation; Van Crugten
(1989) renvoie à la formule rimée et «le rythme et l’assonance» comme problème de traduction métalinguistique (1989: 30).
Landheer, de son côté, mentionne le degré de liberté dans l’ordre des mots, les
possibilités de dérivation et de composition, de polysémie et d’homonymie, etc., et
conclut qu’il est impossible d’établir des taux de traduisibilité généraux pour des
jeux de mots et qu’il faudra se limiter à considérer des couples de langues
(1989: 39). Alam (1989) fait l’exercice en affirmant qu’une traduction de
l’anglais en japonais d’une communication à valeur métalinguistique pourrait
se révéler pénible étant donné que les mots anglais sont souvent polysémiques,
alors que le vocabulaire japonais aurait surtout une structure monosémique
(1989: 73). Et ajoutons à la liste Lazarus (1986), qui traite de la syntaxe de la
langue russe: «Certaines difficultés sont inhérentes à la langue russe elle-même,
dont la structure syntaxique est totalement différente de celle du français»
(1986: 182). Toury résume toutes ces positions quand il conclut, à propos des
jeux de mots en traduction (spoonerisms-contrepèteries dans son étude), que:
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Le discours sur l’humour traduit
The most prominent among [the factors which may reduce translatability]
seem[s] to be (1) the extent to which traits of the output and/or input utterances in the source language (SL) are language-specific … . (1986: 217)
Des typologies de jeux de mots sont ensuite proposées. Dans la plupart des cas,
il s’agit de théorisations très limitées ou même mal définies. Laurian (1989)
établit une distinction entre le jeu de mots syntaxique et le jeu de mots sémantique. «– What is grey, has four legs, a trunk and flies? – A dead elephant» est un
exemple syntaxique, tandis qu’elle illustre le jeu sémantique par «– How would
you get rid of a white elephant? – Give it to a jumbo sale» (1989: 7). Le raisonnement de Leclercq (1989) paraît simplement contradictoire. Il distingue
d’abord entre jeux de sons (ou formels) d’une part et jeux de sens ou de mots
d’autre part, mais semble ranger ensuite les «figures de style» comme la «reprise» (une répétition anaphorique et formelle d’un groupe de mots) sous la
catégorie des jeux de mots (1989: 48). Grosso modo les typologies «déductives»
sont les plus confuses et partielles. Une présentation déductive est en fait une
théorie ex nihilo qui demande au lecteur d’accepter l’honnêteté et la rigueur de
l’auteur dans la phase inductive préalable, et omise. Ici, elle paraît plutôt un
mauvais essai de camouflage de réflections inachevées. Diot (1986), par
exemple, propose une subdivision en «déréalisation du contenu», «déréalisation des codes linguistiques», «[deréalisation des] codes rhétoriques», etc.
(1986: 262), sans donner trop de précisions.
D’autres auteurs procèdent de façon inductive et formulent une typologie
à partir d’un corpus spécifique. Si leurs distinctions sont empiriquement
fondées, elles n’en deviennent pas moins impressionnistes. En effet, ces typologies souffrent d’un manque de critères bien explicités et homogènes. TavernierCourbin (1986) a découvert quatre types de jeux de mots chez Hemingway:
(1) Play on words whose effect is incongruous, and on the multiple meanings
inherent in words; (2) Statements which are literally true in more ways than
the intended one; (3) The joke that results from someone’s understanding of
a word in a different sense than might reasonably be expected; and (4) Jokes
which are like syllogisms, with the middle term unstated and which the reader
must use his ingenuity to supply. (1986: 224)
Leibold (1989) improvise une typologie d’après sa traduction de l’écrivain
français populaire San Antonio. L’expérience lui a montré que les calembours
se grefferaient principalement sur les noms propres, le «double-shift effect» (où
un sens litteral peut être opposé à un sens figé), l’allusion, les stéréotypes et les
néologismes. La typologie de Ballard (1989) a des intentions surtout pédagogi-
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ques et est basée sur les fautes les plus fréquentes des étudiants-traducteurs
(1989: 21). En ce sens, elle ne traite pas vraiment d’une intraduisibilité absolue.
Les seules études qui combinent une analyse empirique et une typologie
systématique des calembours sont celles de Grassegger (1985) et de Delabastita
(1993: 55–151). Delabastita est aussi le seul à élaborer un schéma proprement
traductologique pour les jeux de mots (1993:171–227). Il s’agit d’un modèle qui
tente de réunir, à partir de textes Shakespeariens en traduction, les relations
d’équivalence possibles où interviennent un ou plusieurs jeux de mots. Non
seulement ce modèle s’avère intéressant pour son apport théorique, il fournit
également un exemple concret qui montre comment l’on peut en effet rendre
de façon structurée des relations traductionnelles possibles. Ce livre est sans nul
doute la référence centrale en matière de jeux de mots (traduits), bien qu’il se
garde de toucher à la relation (non élucidée) entre calembour et humour (tout
jeu de mots n’est pas comique). La relation est néanmoins pertinente si l’on
accepte qu’il y a un lien très fort entre intraduisibilité métalinguistique et
humour. Indiquons brièvement quelques pistes à partir de Vandaele (1999): le
jeu de mots est une incongruité linguistique et pragmatique qui peut mettre en
marche plusieurs processus sociaux de supériorité. Incongruité (non application des schémas cognitifs normaux) et supériorité sont des concepts-clés dans
l’analyse de l’humour.
Paradigmes
Si en règle générale les auteurs paraissent s’entendre sur les causes des difficultés
de la traduction du comique, pourquoi les uns sont-ils sceptiques face à
l’entreprise alors que les autres se félicitent des solutions trouvées? La réponse
est bien facile et nous remet dans la logique des paradigmes. Elle dépend
entièrement de la conception que chaque chercheur a de la traduction, de
l’original et de la tâche du chercheur.
A l’intérieur des Translation Studies, une certaine branche essentialiste et
normative pourra concevoir le texte original à un certain point comme un fait
sémantiquement non imité (et, pourquoi pas, inimitable, c’est-à-dire non
susceptible d’être imité), malgré les traductions réellement existantes auxquelles elle n’accordera logiquement pas ce statut. Une telle attitude attribuera au
chercheur le rôle de critique ou encore de consommateur «illuminé» qui devra
instruire les traducteurs pour le futur («Comment faire?»). Il serait injuste de
ne pas reconnaître, dans ce groupe «normativiste», la différence entre celui qui
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Le discours sur l’humour traduit
constitue la norme en vérité incontestable (les grands normatifs comme von
Stackelberg) et ceux qui fondent leur conseils aux traducteurs sur des analyses
scrupuleuses de la situation communicative (le Skopos, par exemple). Le
fonctionnalisme du Skopos ne s’éloigne en fait pas trop de celui des Descriptive
Translation Studies. Ce n’est qu’à la fin que doivent se séparer leurs chemins,
lorsque les uns tirent les conclusions pratiques («Comment faire fonctionner?») alors que les autres tentent de se limiter à la constatation («Comment
fonctionne-t-il?»). Les articles rassemblés en l’occurence sont tous un peu plus
ou un peu moins normatifs, fonctionnalistes et pratiques, mais un jugement de
leur qualité ne pourra pas en dépendre. Il semble que chaque perspective ait
ses avantages.
Ce qui compte bien plus dans l’évaluation d’un écrit quelconque est
l’absence ou la présence de critères «scientifiques» plus ou moins couramment
acceptés. Et là, il faut le dire, nous avons dû noter un manque d’empirisme et
une terminologie souvent impressionniste, surtout du côté des «normativistes».
Pour ce qui concerne le manque d’empirisme il suffira de renvoyer à l’exemple
des typologies pseudo-déductives des jeux de mots; mais arrêtons-nous un
instant à la nomenclature. La notion récurrente d’«effet comique» mériterait
par exemple d’être explicitée, tout comme celle d’«intention». Qu’est-ce, au
juste, que
… a new utterance which successfully recaptures the intention of the original
humorous message and evokes in the target audience an equivalent pleasurable
and playful response[?] (Leibold 1989: 111)
Même l’article de Wetzel-Sahm, si exemplairement historicisant et inductif, se
laisse séduire par une tendance que nous pourrions appeler ici «de la critique
littéraire». Voici la conclusion au bout de l’analyse de quatre traductions de
Journalism in Tennessee de Mark Twain:
Während die Erstübersetzung von Moritz Busch (1877) als ausgangstextorientiert charakterisiert werden kann und Twains Erzählweise zu erhalten sucht,
übersetzt Günther Birkenfield (1933) eher mit Blick auf das Zielpublikum,
wobei er sein Augenmerk vor allem auf den Erzählgegenstand richtet. Der
Schweizer E. Spiegel (1945) schliesslich bemüht sich einerseits darum, Elemente des Twainschen Humors zu erhalten, anderseits eliminiert auch er —
ähnlich wie Birkenfeld — typische amerikanische Humormerkmale. (1989:1157)
Propos nuancés, bien illustrés, certes, mais des mots tels que «typische amerikanische Humormerkmale» nous laissent songeurs, même s’ils ont été définis
comme «trockenen Humor» (1989: 152, 154) et opposés au comique allemand,
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qui serait lardé de «weiche Sentimentalität» (1989: 153). Peut-être les Translation Studies devraient-elles considérer les mérites conceptuels des Humour
Studies avant d’entamer l’étude d’un phénomène aussi complexe que la
traduction de l’humour.
En effet, s’il faut parler ici de distinctions académiques institutionnelles,
celle entre les Humour Studies et les Translation Studies sera de loin la plus
intéressante, car sans doute très féconde. Les auteurs commentés sont souvent
ou bien spécialistes en humour (Nilsen, Laurian) ou bien en traduction (Toury,
Landheer); peu de contributions semblent combiner les progrès des deux
disciplines. Pourtant, les chercheurs des Humour Studies, eux aussi, devraient
comprendre que la traduction mérite toute leur attention. Elle se présente
clairement comme un test culturel et linguistique ultime des «frontières
communautaires» dans les présuppositions qu’exploite l’humour. L’auteur des
lignes qui précèdent serait heureux si elles donnaient lieu à de nouvelles
explorations et à un meilleur profil des différentes approches. D’où la fonction
d’une bibliographie quelque peu élargie.
Notes
1. Pour une définition plus nuancée de la notion d’humour, voir Vandaele 1999.
2. A part le livre de Dirk Delabastita (1993) sur les jeux de mots chez Shakespeare, et le livre
de Grassegger (1985) sur les traductions d’Astérix, nous n’avons pu repérer aucun livre sur
la traduction de l’humour. Articles compris, nous avons rassemblé une trentaine de travaux.
La majeure partie se trouve dans deux numéros spéciaux de revues: Laurian (éd.) 1986 et
Laurian et Nilsen (éds.) 1989. L’ensemble comprend des études: (1) sur l’humour en
traduction, à tendance (pseudo-)philosophique ou couvrant plusieurs aspects du phénomène: Bertaux 1986, Laurian 1989, Nilsen 1989, Raphaelson-West 1989, Van Crugten 1989,
von Stackelberg 1988; (2) sur des types spécifiques d’humour, tels que le jeu de mots
(Delabastita 1990, Delabastita 1987 et Toury 1986), l’ambiguïté (Ballard 1989 et Landheer
1989), la poésie ludique (Knight 1989 et Leclerq 1989); (3) sur des auteurs spécifiques:
Shakespeare (Delabastita 1990), Hemingway (Tavernier-Courbin 1986), Sinclair Lewis
(Laroche 1989), Twain (Wetzel-Sahm 1989), London (Tavernier-Courbin 1989), San
Antonio (Leibold 1989); (4) sur la traduction de bandes dessinées: Diot 1989, Grassegger
1985, Sopeña-Balordi 1986; (5) sur la traduction de films: Diot 1986; (6) sur des aspects
culturels: Alam 1989, de Bruyn 1989, Draitser 1989, Laurian 1989. Pour les références
complètes nous renvoyons à la bibliographie.
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Le discours sur l’humour traduit
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Jeroen Vandaele
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Summary
Despite the breakthrough of Humour Studies and Translation Studies, the translation of
humour is not often on the agenda. Most essays focus on the issue of “(un)translatability”.
The untranslatability of humour is found on two levels: “culture” and “language”. Although
most reflections are empirically and/or theoretically deficient, they do show to some extent
how these two abstract notions may be realized. However, if one is interested in “cultural
mapping”, translated humour deserves more high-standard research: the presence, absence
or modalities of humour translation are undeniable signs of community borders. This
article provides an enlarged bibliography as a possible starting point for a more programmatic discussion that would integrate recent developments in Humour Studies and in
Translation Studies.
Adresse de l’auteur
Jeroen Vandaele
Onderstraat 21 D
GENT 9000, Belgium
e-mail: [email protected]

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