aspirateur a 100 ans
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aspirateur a 100 ans
Cher aspirateur Il fête ses cent ans aujourd’hui ANNIVERSAIRE L’engin a été breveté le 30 août 1901. Eloge de son papa: Hubert Cecil Booth. 1 y a une question d’ordre domestique qui taraude les jeunes esprits contemporains Comment faisait-on pour se débarrasser de la poussière avant l’invention de l’aspirateur Et bien, on s’en débarrassait mal. Dans les maisons bourgeoises, les bonnes sortaient tentures, couvertures et tapis au grand air. Puis les battaient avec véhémence. Beaucoup d’effort, peu d’effet. Car la poussière, après avoir formé un méchant nuage et fait éternuer les travailleuses, revenait gentiment se loger dans le tissu. Sale époque. C’est pour cela que le Britannique et ingénieux Hubert Cecil Booth oeuvre incontestablement pour l’humanité le jour où il conçoit sa grosse pompe aspirante. On l’aura compris, l’engin est destiné à engloutir crasse et poussière. Le brevet du British Vacuum Cleaner est déposé le 30 mats 1901. Il y a cent ans pile. L’aspirateur fête donc son premier siècle aujourd’hui. Champagne! Boucan d’enfer Cela dit, le Füst dernier cri de ma concierge n’a pas grand rapport avec la machine de Booth. Celle-ci a la taille d’une locomotive. Tirée par un cheval, elle va de porte en porte, sans rentrer dans les maisons. II faut quatre bras au moins pour introduire de longs tuyaux dans les intérieurs à poutser. On déclenche alors une pompe à essence, dont l’infernal boucan tétanise les ménagères et affole les chevaux. II en faudra des années pour que ronronne l’aspirateur. Hubert Cecil Booth n’en est pas sa première réalisation d’envergure. Né en 1875, le jeune homme a étudié le génie civil et la mécanique. II a ensuite travaillé pour la marine de Sa Majesté et fabriqué des grandes roues de foire, dont la Ferris qui fait encore la joie des petits Viennois. Un beau jour de 1901, on présente à Londres une nouvelle machine américaine pour nettoyer les rails de voies ferrés. Elle se compose de gicleurs à haute pression, censés expulser la saleté de ses retranchements. L’engin marche mal, Mais Booth, qui assiste à la démonstration, a le flash décisif. Pourquoi souffler? Mieux vaut aspirer! II fait part de son idée à l’ingénieur américain, qui lui rit au nez. L’aspiration n’a, selon lui, aucun avenir... Mouchoir expérimental Quelques jours plus tard, l’obstiné Booth met en pratique son intuition. Dans un restaurant chic, il pose un mouchoir sur le rembourrage poussiéreux d’un siège. Puis aspire violemment. II manque de s’étouffer, bien sûr. Mais, retournant le mouchoir, il s’aperçoit avec jubilation qu’il a emprisonné toute la poussière de la chaise. Quelques mois après, il fait enregistrer son brevet, dont on vous passe, par charité chrétienne, les détails techniques. En cette aube du XXe siècle, l’aspirateur est une idée dans l’air. Des Géo Trouvetout planchent sur le même principe aux quatre coins du monde. D’ailleurs, Booth va fréquenter les tribunaux pendant des années, afin de défendre sa création. Les juges lui donnent d’ailleurs systématiquement raison. Son invention fonctionne. Ce qui n’est généralement pas le cas des engins concurrents. Aujourd’hui encore, le débat de paternité fait rage. II faut jeter un rail aux forums d’aspiratophiles sur le web. Edifiant, 11 semble toutefois qu’un certain Yves W. Gaffey ait créé dé, 1869 à Chicago un engin compact et performant. L’Histoire a pourtant tranché, en accordant à Booth le copyright et donc la gloire. Dès sa présentation, le Vacuum Cleaner met Londres en émoi. Les esprits modernes 1’adoptent. Mais une bonne partie de la population voit en ce monstre bruyant et crachotant la créature du diable. Quant aux employés de maison, ils craignent que la bête à tentacule ne leur souffle leur travail. Quoi qu’il en soit, Booth a l’insigne honneur de nettoyer les tapis de Westminster Abbey avant le couronnement de Edward VII. La famille royale est à ce point impressionnée par la machine qu’elle se l’offre pour dépoussiérer Buckingham Palace et Windsor Castle. En 1902, l’aspirateur gagne un moteur à vapeur, puis électrique l’année suivante. Pour qu’il devienne enfin maniable, il faudra attendre 1907 et l’invention de James Murray Splangler. A la fois homme de ménage et asthmatique, cet Américain s’est juré d’en finir avec la poussière. II bricole le premier aspirateur portatif avec un petit moteur électrique et une taie d’oreiller II vend sa trouvaille à la firme Hoover. Laquelle va régner pendant des décennies sur ce rayon de l’électroménager. La suite de l’histoire, vous n’avez qu’à la demander à votre grand-mère. L’aspirateur va pénétrer vite fait bien fait dans tous les foyers occidentaux bien avant la machine à laver ou le frigo. Dans les années 50, il va affiner sa dégaine, dans les années 70 gagner en puissance. Booth serait tout étonné s’il se baladait aujourd’hui dans un magasin d’électroménager. Que penserait-il di cyclone power de chez Electrolux au look inspiré de Stars Wars ? ou encore du silencieux Candy Hoover, sans sac mais avec télécommande ? On ne saura jamais. Car la mort a aspiré Hubet Cécil Booth en 1955. Qu’il dépoussière en paix ! Aspirer en musique Aujourd’hui bien moins bruyant qu’à ses débuts, l’aspirateur fait encore du potin. Un potin monocorde et submergeant, qui ne laisse guère la place à une autre source sonore. La plupart d’entre nous ont donc renoncé à écouter de la musique en aspirant. Pourtant le pianiste Glenn prétendait adorer jouer du Mozart sur fond d’aspirateur tonitruant. Pour lui, il s’agissait là même de l’unique manière d’apprécier le compositeur autrichien. Provocation sans doute. Quant à Manu et Fabiana, deux Genevoises à la quarantaine funky, elles avouent (sans se concerter) accompagner leur ménage d’un puissant boum boum. La première préfère la disco année 70, la seconde la techno transe. Est-ce la pulsation métronomique qui parvient à percer le ronflement électroménager? Peut-être bien», répond Manu. Il faut en tout cas une musique simple, stimulante et énergique pour donner du coeur à l’ouvrage. Mais comment couvrir le bruit du terrible engin? «En mettant la chaîne à fond, tout simplement». Article de Jérôme Estèbe - Tribune de Genève, 30 août 2001